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lundi, 21 juillet 2014

A la recherche de Vivian Maier

   Par le plus grand des hasards, un jeune Américain, John Maloof, met la main sur un paquet de négatifs puis de pellicules non développées. Il se rend rapidement compte que les photographies sont de grande qualité, très originales... mais que leur auteure est totalement inconnue. Ce documentaire est le récit de sa découverte, des recherches entreprises pour reconstituer la vie de Vivian Maier (1926 - 2009) puis de sa reconnaissance posthume.

   On sait à quoi elle ressemble parce que, parmi les milliers de photographies qu'elle a prises, se trouvent des dizaines d'autoportraits, presque jamais classiques. Elle joue toujours sur les reflets ou les ombres :

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   Dans le lot, on trouve aussi beaucoup de vues d'enfants, noirs comme blancs, riches comme pauvres. Peut-être est-ce par déformation : Vivian Maier a vécu comme domestique, notamment "nounou". Les auteurs du film ont retrouvé certains des enfants qu'elle a gardés. Les témoignages sont très variés, pas toujours à l'avantage de la dame, qui a semble-t-il souvent changé d'employeur, soit qu'elle ait eu envie d'autre chose, soit qu'elle ait été renvoyée.

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   Elle a arpenté les rues des différents quartiers de New York et de Chicago, dont elle laisse un témoignage foisonnant. Elle était visiblement attirée par les "gueules", les physiques qui sortaient de l'ordinaire :

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   Elle a eu l'art de saisir l'essence des travaux et des jours de ce petit peuple de New York ou de Chicago, mais aussi des paillettes dont la ville se parait, à certaines occasions. Excellente cadreuse, elle savait montrer les inégalités d'un coup d'oeil :

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   A force de pratiquer, cette autodidacte de l'objectif a acquis un grand savoir-faire technique, apprivoisant la lumière et sachant capter les mouvements de la vie :

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   La très grande majorité de son oeuvre est constituée de clichés en noir et blanc, mais il en existe aussi en couleurs, ainsi que quelques films... et même des enregistrements audio. Vivian Maier garde toutefois une part de mystère.

   Physiquement, c'était une femme impressionnante. Assez grande, elle était de surcroît dotée d'un gros caractère, tout en passant pour quelqu'un de farfelu. Il faut imaginer un équivalent féminin du M. Hulot de Jacques Tati, avec une pincée de Charles de Gaulle. Ces références à la France ne sont pas innocentes, puisque sa mère était française et qu'elle-même passa la majeure partie de son enfance dans notre pays, dans un coin perdu des Alpes où John Maloof finit par débarquer... et même par organiser une exposition !

   Elle n'a jamais été mariée, ne semble pas avoir eu d'enfant. Elle rejetait les hommes à tel point que, lorsque l'un d'entre eux, croyant bien faire, voulu l'aider à se stabiliser sur une plate-forme où elle était montée pour pouvoir prendre des photos, elle le repoussa violemment. On pense qu'elle a dû connaître un traumatisme grave. S'est greffé là-dessus un tempérament solitaire et une activité (la photographie) qui l'a coupée du monde. Elle semble avoir voulu mettre un écran entre elle et la vraie vie, se contentant de la suivre en spectatrice.

   Au cours de son enquête, John Maloof découvre qu'elle fut aussi une collectionneuse compulsive d'articles de journaux (entre autres), allant jusqu'à piquer une crise devant ses employeurs après qu'ils eurent donné une pile de vieux papiers à leur voisin. Il semble que, sur le tard, ses traits caractériels se soient accentués, au point qu'elle a dû arrêter de travailler. Elle a été temporairement sauvée de la misère par d'anciens enfants qu'elle avait gardés. Ils ont même loué un garde-meuble pour y stocker ses affaires. Elle est finalement morte pauvre, seule et oubliée.

   Un autre mystère demeure : aurait-elle voulu être reconnue pour son oeuvre ? Il semble qu'au début, oui. Maloof a retrouvé une correspondance avec la France, dans laquelle il est question de l'édition de cartes postales à partir de certains de ses clichés. Puis, plus rien. L'événement traumatique est-il survenu à cette époque, après son retour à New York ? On ne le sait pas.

   Il reste une oeuvre magnifique, tant sur la forme que sur le fond, preuve qu'une grande artiste peut venir d'un milieu modeste et mourir inconnue, à l'inverse de tant de pédants médiatiques sans talent.

   P.S.

   Toutes les illustrations de ce billet sont issues du site créé par John Maloof, qui est une véritable mine.

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