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jeudi, 26 juin 2025

Amélie et la métaphysique des tubes

   Ce film d'animation adapte la fiction autobiographique d'Amélie Nothomb (qui vient d'être rééditée en livre de poche). Jadis, l'auteure d'Hygiène de l'assassin avait imaginé raconter sa vie de 0 à 3 ans. Ce présupposé a été conservé dans l'adaptation, où quelques modifications de détail ont été opérées (notamment dans la chronologie des événements). L'essentiel a été préservé et les auteurs ont tenté de donner une existence visuelle aux doux délires de l'écrivaine.

   A celles et ceux qui ne connaîtraient pas le roman d'origine, il convient d'abord d'expliquer ce que sont ces tubes : une incarnation de Dieu, pour lequel se prend, dans un premier temps, le bébé. Des liens sont établis avec d'autres tubes remarquables, comme le biberon (uniquement dans le roman), le corps d'un aspirateur, des (emblèmes de) carpes...

   Notons que l’œuvre prend parfois une tournure féministe, puisque, dans le Japon du début des années 1970 (où se sont installés les parents d'Amélie), les garçons sont clairement privilégiés par rapport aux filles, comme le prouve la fameuse journée des carpes... mais la (très) petite Amélie ne va pas se laisser faire... surtout pas par son frère aîné, qui n'arrête pas de l'embêter.

   Les personnages masculins (principalement ceux du père et du grand frère) sont toutefois au second plan. L'intrigue insiste sur la relation quasi fusionnelle qui naît entre Amélie et la domestique japonaise de ses parents, qui devient une sorte de mère de substitution. Leurs relations sont l'occasion pour la gamine (et les spectateurs) de découvrir certains pans de la culture japonaise. Cela nous vaut notamment une très belle séquence autour des livres.

   Le roman comme le film ne masquent pas ce qu'ont subi les civils japonais à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à travers le passé de la domestique et celui de celle qui, dans le film, est la propriétaire désargentée de la maison où résident les parents d'Amélie. On a un peu atténué le côté agressif de celle-ci et l'on a évité de représenter les scènes les plus horribles, qui sont pourtant détaillées dans le roman. On a donc voulu faire une œuvre visible par les petits comme les grands.

   L'animation rend hommage aux classiques japonais. Les enfants ont de grosses têtes et de grands yeux. Un soin particulier a été apporté à la représentation de l'univers culinaire et à tout ce qui touche à la nature (animaux comme végétaux). La petite Amélie se découvre un lien particulier avec l'eau et c'est mis en scène avec inventivité.

   Cela ne dure qu'1h20 et je me suis régalé... tout seul dans la salle !

   P.S.

   Voici la couverture de la nouvelle édition de poche du roman :

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   Il est plus noir que le film d'animation, notamment parce qu'il évoque davantage les pulsions suicidaires de l'héroïne.

mardi, 24 juin 2025

Le Répondeur

   Cette comédie sociétale fonctionne sur des bases semblables à d'autres, comme Le Jouet : un homme devient (volontairement) l'instrument d'un autre, le premier étant issu d'un milieu beaucoup plus modeste que le second.

   Les deux premières scènes nous mettent dans le bain, avec Baptiste travaillant comme téléopérateur, puis tentant de percer, dans un "seul en scène". Dans les deux cas, le personnage fait montre de ses qualités d'imitateur. Attention toutefois : le comédien Salif Cissé ne réalise pas les imitations, qui sont dues à d'autres personnes. Un (habile) montage numérique fait croire à la supercherie (notamment quand Baptiste se met à répondre au téléphone à la place de l'écrivain Pierre Chozène). Le talent du comédien est d'avoir assimilé les mimiques et les postures des personnes dont il est censé reproduire la voix. Il est parfaitement crédible en imitateur.

   Cela aurait pu donner naissance à quantité de situations cocasses, mais la réalisatrice Fabienne Godet a décidé d'orienter son film du côté du conte moral. Elle veut traiter d'abord des relations familiales, d'amour et d'amitié. Son intrigue est fondée sur le mensonge : l'écrivain fait croire à ses proches qu'il leur répond au téléphone et son employé très spécial se garde de révéler à sa fille quel rôle il joue pour son père. 

   Baptiste ne se contente pas de suivre les instructions qui lui sont données. Il prend quelques initiatives. L'histoire semble d'abord nous dire que d'un (petit) mal peut surgir un (grand) bien... mais la vérité finit par rattraper tous les personnages.

   C'est agréable à suivre, parfois drôle, notamment dans la peinture du monde culturel germanopratin parisien (écrivains, éditeurs, journalistes, peintres, galeristes...). Toutefois, à partir du moment où Baptiste, engagé par Pierre, commence à officier, c'est très prévisible. J'ai aussi noté une grosse invraisemblance : quand Baptiste commence à (longuement) poser pour Elsa, il a le portable du père avec lui, auquel il est censé répondre, en imitant sa voix. Or, comme par miracle, jamais celui-ci ne sonne pendant ces séances de pose.

   C'est une comédie "sympatoche", pas vulgaire, dans l'air du temps.

16:47 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 21 juin 2025

Les Mots qu'elles eurent un jour

   ... mais qui ont été perdus. C'est ainsi qu'on pourrait compléter le titre de ce documentaire consacré à une vingtaine de "moudjahidate", des indépendantistes algériennes qui avaient été emprisonnées, durant la Guerre d'Algérie (1954-1962) .

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   Elles avaient été filmées en 1962, à leur sortie de prison, mais les bobines avaient disparu. Certaines ont été retrouvées par hasard, formant un corpus d'environ 40 minutes, mais sans le son (enregistré à part, à l'époque). Depuis une douzaine d'années, le documentariste Raphaël Pillosio mène l'enquête, dont le déroulement et les résultats sont présentés dans ce film.

   Les extraits du matériau de 1962 alternent avec d'autres images d'archives (notamment d'actualités anciennes) et des entretiens réalisés au XXIe siècle.

   Ces femmes (en 1962) sont jeunes, toutes vêtues "à l'occidentale", mais d'origines et de cultures différentes : arabes, berbères, pieds-noirs, musulmanes, chrétiennes, juives, athées. Celles qui ont été retrouvées, des années après, et qui ont accepté de témoigner, disent avoir voulu "faire la révolution" ou tout simplement se battre contre la domination française. Certaines d'entre elles évoquent l'aspect féministe de leur engagement, le point sur lequel "l'Algérie nouvelle" (indépendante) les a sans doute le plus déçues, puisque les mecs qui sont arrivés au pouvoir ont vu d'un mauvais œil l'activisme de celles qui étaient pour eux d'abord des compagnes et des (futures) femmes au foyer.

   Vous aurez d'ailleurs peut-être remarqué, sur la photographie qui illustre ce billet, la présence de deux hommes (le troisième étant sans doute un technicien), qui ne s'expriment jamais, mais semblent surveiller ce qu'il se passe pendant ce tournage militant. (On finit par apprendre que toute l'équipe est constituée de sympathisants de la cause algérienne, sans doute marxistes.) Ils avaient été envoyés par le nouveau pouvoir algérien, pour rapatrier au plus vite les prisonnières de métropole. Le réalisateur raconte comment il a tenté de retrouver l'un des deux hommes.

   N'étant pas parvenu à mettre la main sur la bande son, il a pensé pouvoir compter sur les souvenirs des participantes. Mais, 50 à 60 ans plus tard, ils se sont le plus souvent effilochés. Du coup, il a eu recours à des spécialistes de lecture labiale, avec des résultats mitigés. (En tout cas, les échanges filmés se sont tenus en français.)

   Certains moments sont poignants, comme l'évocation qu'une séance de torture (par des militaires français). On regrette d'autant plus que ces femmes n'aient pas été davantage interrogées sur les conséquences de leurs actes. Je crois qu'environ la moitié de celles qui s'expriment ont, à un moment ou à un autre, été des porteuses/poseuses de bombes. C'est la principale limite de ce documentaire au demeurant fort intéressant.

   Peut-être qu'un jour, le recours à une intelligence artificielle permettra de décrypter intégralement les conversations de 1962, ces bobines constituant une matière brute de grand intérêt.

mardi, 17 juin 2025

The Beekeeper

   Ce film d'action a été tourné pour une plateforme. Il y a été mis en ligne l'an dernier, mais je ne l'ai vu qu'après sa récente diffusion sur TF1, en replay. Son titre, que l'on peut traduire par "L'Apiculteur", est à double sens. Au sens premier, il désigne un éleveur d'abeilles, comme l'énigmatique Adam Clay, qu'incarne un Jason Statham barbu, au début de l'histoire.

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   Il vit à l'écart du monde, entretenant juste quelques contacts avec la propriétaire des locaux qu'il occupe, une enseignante à la retraite incarnée par Phylicia Rashad, qui fut jadis la délicieuse Clair Huxtable, dans le Cosby Show.

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      Pas de bol pour Adam : le soir où sa proprio l'invite à dîner, il la retrouve morte. Elle n'a pas supporté de se faire dépouiller (elle et l'association caritative dont elle s'occupe) par d'arrogants et habiles escrocs en ligne. Adam décide de la venger.

   Pas de bol pour les escrocs : Adam est un (ancien) Beekeeper, un impitoyable tueur employé naguère par les services secrets états-uniens pour "faire le sale boulot", en toute discrétion.

   A partir de là, David Ayer (réalisateur, entre autres, du premier Suicide Squad et de Fury) nous emporte dans une farandole de violence vengeresse. La première séquence ultra-vitaminée nous conduit dans l'immeuble qui héberge le groupe d'escrocs numériques... qui ne sont que les petites mains d'une entreprise de plus grande envergure, à laquelle Adam décide de s'attaquer aussi. Cela nous vaut d'autres moments d'adrénaline, au QG de la boîte d'escrocs, mais aussi à la campagne, dans une grange, transformée en zone de combat/torture/meurtre (et plus si affinités).

   Dans le même temps, le héros est pourchassé par le FBI, pour lequel travaille... la fille de l'enseignante décédée. Cruel dilemme pour elle (et son partenaire) : elle finit par trouver sa croisade justifiée, mais elle n'en approuve pas les méthodes. Cette policière est incarnée par Emmy Raver-Lampman, qu'on a pu voir dans Blacklight, aux côtés de Liam Neeson. Contrairement à ce dernier, Statham pète la forme et, en un peu plus d'1h30, il va corriger aussi bien des agents de sécurité, des militaires, des commandos du FBI qu'une bande de mercenaires déjantés... sans oublier le plus dingo de ses adversaires, que Clay, officiellement retraité de la CIA, affronte dans une station service : son successeur.

   L'histoire se conclut au cours d'un anniversaire de prestige. Statham croise sur sa route Jeremy Irons et Jemma Redgrave. Tout ce petit monde surjoue un peu mais, franchement, les scènes d'action sont de très bon niveau.

21:58 Publié dans Cinéma, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

lundi, 16 juin 2025

Life of Chuck

   Cet étrange biopic (construit antéchronologiquement) est consacré à un illustre inconnu, Charles Chuck Krantz, dont les photographies illustrent quantité de publicités dans les médias états-uniens (notamment au Nevada) de plus en plus présentes à mesure que le monde s'effondre. Toutes ces publicités le remercient pour "ces 39 années". On pense à un départ à la retraite, celui de  ce comptable qui semble sorti tout droit d'un film des frères Coen. Mais il paraît bien jeune pour un futur retraité...

   En attendant d'éclaircir ce mystère, on est plongé dans un monde apocalyptique, où toutes les catastrophes possibles surviennent dans un court laps de temps. C'est évidemment peu vraisemblable, tout comme l'incroyable concentration de connerie humaine chez les parents d'élèves que rencontre un professeur des écoles dévoué (Chiwetel Ejiofor, sans doute tellement emballé par son rôle que, dans la foulée, il a signé pour le dernier Bridget Jones). C'est aussi cocasse, quand l'un des parents révèle ce qui lui manque le plus depuis la coupure d'internet...

   Comme il s'agit de l'adaptation d'une nouvelle de Stephen King (déjà à l'honneur cette année avec The Monkey), on se dit qu'il y a anguille sous roche, le fantastique étant peut-être à l’œuvre... A la fin de cet acte III (proposé donc en premier), les spectateurs les plus vigilants auront compris à quoi correspond ce qu'on vient de nous montrer à l'écran. Allez, comme je suis d'humeur généreuse...

 

 

UN INDICE

 

 

 

CHEZ VOUS

 

 

 

 

AU BAS DE VOTRE ÉCRAN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mulholland Drive

 

   Durant l'acte II, on découvre Chuck à l'âge adulte, en déplacement professionnel. De manière totalement inattendue, le film prend l'aspect d'une comédie musicale... faussement improvisée. (Je ne suis pas un gros fan de La La Land...) La séquence dégage tout de même une belle énergie... et, surtout, quand on sait de quoi il retourne, au fond, elle est poignante. Dans le rôle titre, Tom Hiddleston réussit à faire oublier qu'il a interprété Loki (et je trouve qu'on lui a fait une tête un peu à la Matthew McConaughey).

   L'acte I remonte à l'enfance et à l'adolescence de Chuck, en compagnie de ses grands-parents. J'ai beaucoup aimé cette partie-là, où j'ai trouvé tous les comédiens impeccables, des plus âgés (Mark Hamill et Mia Sara) aux plus jeunes (notamment Benjamin Pajak). Le mystère semble dans un premier temps s'épaissir, d'autant que d'étranges liens avec l'acte III nous sont proposés. La voix-off contribue à éclaircir définitivement les choses pour les plus lents des esprits.

   Au final, la construction inversée se justifie par la volonté de ne pas terminer l'histoire par sa partie la plus sombre. Cela nuit un peu au suspens, mais les éléments disséminés ici et là pour dérouter les spectateurs entretiennent l'intérêt. Cela donne un beau film dans tous les sens du terme : plaisant à voir au plan visuel et baignant dans une belle humanité, avec des valeurs simples, en dépit de la complexité du monde. C'est quasiment une œuvre philosophique.

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samedi, 14 juin 2025

Vacances forcées

   Cette comédie française "familiale" commence par des images d'archives, notamment celles des premiers congés payés, à l'époque du Front populaire (le vrai, pas ses pâles copies). C'est d'ailleurs sous ce gouvernement de gauche que fut créée la SNCF, où travaille (de nos jours) le héros de l'histoire, Cyril (Clovis Cornillac), le roi de l'apéro et de la glande, qui est encore en arrêt maladie... juste avant de partir en congés ! (Mais, méfions-nous, les apparences sont parfois trompeuses...)

   Au début, j'étais inquiet. Les scénaristes nous ont bricolé trois groupes de personnages assez antipathiques (surtout dans la première partie). Cyril a trois enfants, l'aîné (qui ressemble à Adam Driver jeune) commençant à déraper. Heureusement qu'il y a son épouse, incarnée par Aure Atika (scandaleusement bien gaulée), qui gère, comme on dit.

   C'est aussi le cas de Daphné, l'épouse angoissée d'Eric le dentiste des stars, qui, lui, pense essentiellement à son boulot. Elle fait tenir leur couple, gardant un lien privilégié avec son fils diagnostiqué HPI (une véritable tête à claques ambulante). Notons que les parents sont interprétés par deux très bons acteurs : Pauline Clément (qui a des airs de Frédérique Bel) et Bertrand Usclat (qu'on pourrait presque prendre pour Benjamin Lavernhe).

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   Ces deux familles vont se retrouver, le temps des vacances, dans la même (superbe) villa... où les rejoint un étrange duo, composé d'un éditeur pédant (Laurent Stocker, excellent comme d'hab') et d'une influenceuse apprentie-écrivaine (Claïna Clavaron, une révélation).

   Chacun de ces groupes pensait se retrouver seul dans la villa. Dans des circonstances que je me garderai de dévoiler, tout ce beau monde est amené à cohabiter. Les tensions intrafamiliales ressortent, auxquelles s'ajoutent les querelles entre groupes, à fort soubassement social : la villa fait se côtoyer des personnes qui, aujourd'hui, en France, ne se croisent plus, ne se parlent (quasiment) plus : petite bourgeoisie de banlieue, grands bourgeois de Neuilly, intello germanopratin et vedette des réseaux "issue de la diversité", comme on dit.

   Je dois reconnaître que, même si la plupart des personnages m'ont souvent agacé, leurs interactions m'ont beaucoup amusé. C'est vraiment bien joué, avec de bons dialogues, des situations cocasses. Au fur et à mesure se produit ce qu'on pressent depuis le début : le rapprochement entre ceux qui, de prime abord, ne s'appréciaient pas. Pour cela, il faut attendre que les faiblesses de chacun(e) soient dévoilées.

   Le scénario est donc cousu de fil blanc... jusqu'au dernier quart d'heure. Une  péripétie inattendue se produit, qui donne plus de profondeur à l'intrigue.

   Je suis sorti de là de très bonne humeur.

21:36 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 10 juin 2025

Mission : Impossible - The Final Reckoning

   Il a fallu attendre presque deux ans pour que la suite de Dead Reckoning sorte sur nos écrans. Le film commence là où se terminait l'autre, tout en rappelant les éléments clés de l'intrigue, histoire de rassurer celles et ceux parmi les spectateurs qui auraient raté/oublié la première partie. (Elle vient d'être diffusée sur M6.)

   Comme ce n'est pas mon cas (et que je venais de revoir la partie 1), j'ai trouvé le premier quart d'heure un peu redondant, tout comme les explications ajoutées plus loin, en divers endroits, et qui rappellent tel ou tel aspect du précédent volet. Globalement, les 30-45 premières minutes me sont apparues trop verbeuses... et puis il n'y a plus Ilsa Faust (Rebecca Ferguson)...

   Pour moi, le film décolle vraiment à partir du moment où il est question du sous-marin échoué. Toute la séquence aquatique est virtuose (à voir sur très grand écran, de préférence). Même si les effets spéciaux sont (abondamment) mis à contribution, là, McQuarrie nous rappelle qu'il sait mettre en scène, tandis que Tom Cruise repousse ses limites d'acteur, une fois de plus.

   L'autre grand moment est la poursuite en avion. Cette fois-ci, les cascades sont faites à l'ancienne et, à plusieurs reprises, il semble que Cruise se mette presque autant en danger que son personnage. J'ai aussi adoré cette séquence parce qu'elle est le théâtre de la mort d'un type infect, qui ne décède pas de manière shakespearienne, mais pitoyablement. Je trouve que c'est très bien vu.

   C'est donc un film spectaculaire, qui use et abuse du juste-à-temps, jouant avec les nerfs des spectateurs : quand on pense que le héros a surmonté la principale difficulté, en voilà une nouvelle, aussi insurmontable, qui lui tombe dessus... L'histoire prend un tour métaphorique : de la même manière qu'Ethan Hunt voue sa vie à sauver l'humanité et les personnes qu'il aime, Tom Cruise acteur a voué sa vie à divertir l'humanité et les personnes qu'il aime. Cette autocélébration, pour narcissique qu'elle soit, ne manque pas de souffle.

   P.S.

   Ce n'est pas la première fiction à mettre en scène une intelligence artificielle malveillante. Étant donné que ce genre de programme s'entraîne sur les productions humaines accessibles en ligne, il serait bon que quelques créateurs aient la bonne idée d'imaginer des fictions dans lesquelles les IA sont au service de l'humanité, histoire que, dans quelques dizaines d'années, on ne considère pas les romans et les films de la fin du XXe et du début du XXI siècle comme des prophéties autoréalisatrices...

17:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Rumours (Nuit blanche au sommet)

   Le sommet en question n'est pas celui d'une montagne. Il s'agit d'une réunion du G7 (le "club" des sept pays les plus industrialisés... enfin, ceux qui l'étaient à l'époque où ce type de réunion a été créé, dans les années 1970), qui se déroule dans une zone marécageuse, en Allemagne. Pour choisir les protagonistes de son histoire, le trio de réalisateurs a mélangé deux sommets du G7 (ayant eu lieu outre-Rhin), celui de 2015 (le 41e), auquel étaient présents Angela Merkel, François Hollande, Shinzo Abe et Donald Tusk, et celui de 2022 (le 48e), auquel ont participé Ursula von der Leyen, Joe Biden et Justin Trudeau.

   Ces dirigeants occidentaux, à l'identité à peine masquée, sont donc les "héros" de cette comédie politique qui mélange les genres. On a droit à de la Telenovela, de l'épouvante, du polar... Je crois que le projet des réalisateurs était de mettre les grands de ce monde dans la position d'une bande d'adolescents ou de citoyens (très) lambdas, confrontés à des événements exceptionnels.

   En effet, très vite après la rencontre des sept, le service de sécurité comme les employés du château de plaisance disparaissent. En revanche, d'autres êtres, plus inquiétants, débarquent...

   Sur le papier, avec la distribution qui a été recrutée, c'était sans doute alléchant... mais, Dieu que le résultat est mauvais ! La plupart du temps, ce n'est même pas drôle, les dialogues sont extrêmement mal écrits et l'intrigue est chiante comme la pluie.

   Les deux meilleurs/seuls gags se trouvent au début. Le premier survient lors du tour de table, quand chaque participant évoque un moment de sa vie au cours duquel il a eu honte. Ce que raconte le Premier ministre italien (qui a le physique de Berlusconi, mais pas son tempérament) ne manque pas de saveur. Un peu plus loin, Charles Dance (qui incarne le président des États-Unis) a réussi à me faire sourire en Joe Biden. Mais c'est à peu près tout.

   C'est globalement extrêmement caricatural (sans être drôle). Le Premier ministre canadien (dans lequel on est censé reconnaître Trudeau, sans qu'il lui ressemble le moins du monde) est un bogosse qui transforme ses collègues féminines en véritables midinettes. Le président des États-Unis mange avec une serviette aux couleurs du drapeau de son pays... La Première ministre britannique se veut rigoureuse et organisée, l'Italien un peu emprunté, le Japonais idéaliste, la chancelière allemande ayant plutôt le beau rôle... et ça tombe bien, puisque son interprète, Cate Blanchett, coproduit le film !

   Le plus dégradant des traitements est réservé au président français, Denis Ménochet faisant ce qu'il peut (maladroitement) pour incarner François Hollande. Presque tous les ridicules lui sont attribués, le petit gros faisant figure de gentil crétin dans cette auguste assemblée où les personnalités anglo-saxonnes (allemandes incluses) sont minces et belles.

   J'aurais dû me méfier avant d'aller voir ce film : il est dû au même trio qui a "pondu", naguère, La Chambre interdite, archétype d’œuvre pour cultureux.

   Si je devais établir un anti-palmarès, je crois que ce film-ci serait bien parti pour décrocher non pas le Riton, mais le Super-étron de l'année 2025.

14:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

dimanche, 08 juin 2025

Ballerina

   Il ne s'agit pas d'un remake du film d'animation sorti il y a un peu moins de dix ans, mais d'un dérivé de John Wick (pas la suite du Chapitre IV, plutôt une histoire parallèle à Parabellum, le troisième volet de la série).

   Cela commence de manière intéressante. Sur une île mystérieuse, dotée d'une grande demeure, un papounet (qui a des airs de Keanu Reeves jeune) vit avec sa fille chérie, celle-ci fascinée par une boîte musicale incluant une danseuse d'opéra. Mais, bientôt, débarque une bande de mecs armés, masqués et musclés... qui ne sont visiblement pas venus écouter du Tchaikovsky. Cela nous donne une bagarre survitaminée comme je les aime. (Il convient toutefois de ne pas se laisser bercer par la chorégraphie mortuaire de cette introduction : on y entend certaines informations capitales pour la suite de l'intrigue.)

   La gamine, prénommée Eve, se retrouve plus tard dans le dortoir d'une école de théâtre russe, avec d'autres jeunes filles passionnées par le ballet, comme elle. Cette école est en fait une dépendance de la redoutable Ruska Roma, qui, sous couvert de former des danseurs classiques, recrute ses plus redoutables tueurs. Durant la deuxième partie du film, on voit donc la petite Eve chier sa race, sous le regard à la fois tendre et impitoyable de la Directrice (Anjelica Huston). Cette histoire de gamine tombée plus bas que terre et qui, à la force du poignet des mollets, va se redresser et réclamer vengeance, est assez rebattue. J'ai quand même trouvé cette version féminine séduisante, avec, dans le rôle principal, Ana de Armas, très badass, surtout quand elle dézingue d'horribles masculinistes. (J'ai pu constater que les formateurs de la Ruska Roma, tout comme moi, donnent ce -pertinent- conseil aux demoiselles se retrouvant confrontées à un mec hostile : viser les couilles. Il y a donc quelques éléments de réalisme dans cette intrigue où pourtant les invraisemblances foisonnent.) La conclusion de la formation d'Eve est mise en scène de manière percutante.

   La troisième partie montre l'apprentie tueuse dans ses premières missions... en parallèle desquelles elle mène sa propre enquête. La voilà donc qui se met à fréquenter les hôtels du cartel criminel de La Table... et l'on n'est pas déçu du résultat.

   La quatrième partie, la plus virtuose, nous mène au cœur de l'Europe. Un village des Alpes autrichiennes sert de refuge à la plus impitoyable des mafias, qui constitue une sorte de secte. La première bonne idée est d'avoir fait de tous les habitants du village des membres de cette mafia. (Soyez attentifs à ce qu'on voit d'une école...) La seconde est d'avoir situé les scènes à trois niveaux : dans les rues, dans les bâtiments et sous terre. Cela donne une belle diversité de situations de combat. (Après ce film, on ne voit plus les patins à glace de la même manière...) Les bastons sont impeccablement chorégraphiées (même si le réalisme cède un peu trop souvent le pas à la volonté de faire un plan spectaculaire)... et émaillées d'humour. L'un des meilleurs moments voit Eve découvrir un truc "très cool" dans l'arsenal de la mafia. Son utilisation rend l'intrigue incandescente... et certaines scènes graphiquement superbes. On retrouve la patte de Len Wiseman, qui  réalisa jadis l'excellent Die Hard 4.

   Et John Wick dans tout ça ? Eh bien, il fait deux apparitions, l'une plus marquante que l'autre. Les scénaristes nous ont fort opportunément épargné l'histoire d'amour entre un mec et une fille qui a 20-25 ans de moins que lui. Leur relation prend plutôt le tour d'un rapport maître/élève, voire père/fille (même si Eve reste très attachée à son défunt géniteur). On en saura peut-être plus dans le cinquième volet des aventures de "Baba Yaga", qu'on nous annonce pour 2027. Keanu Reeves aura... 63 ans !

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vendredi, 06 juin 2025

The Shameless

   Le réalisateur bulgare Konstantin Bojanov est allé tourner en Inde, en hindi, cette fiction à caractère documentaire, centrée sur la vie de deux femmes aux origines différentes.

   L'histoire commence avec l'une d'entre elles qui, dans un premier temps, se fait appeler Renuka. Prostituée à New Delhi, elle fuit la capitale indienne après avoir tué un client violent. Mais celui-ci a des relations...

   Elle débarque dans le nord de l'Inde, dans un gros bourg qui a sa rue aux prostituées, qui occupent l'un des côtés, d'autres personnes logeant en face. Parmi celles-ci se trouve une sorte de communauté matriarcale, fonctionnant selon des règles religieuses et sollicitée par la population locale. Mais leur situation économique semble précaire, si bien que la fille aînée de la famille est envoyée "travailler" à Dehli. La cadette, Devika, très jolie, reste sur place, des rêves pleins la tête, mais on comprend que sa mère fait l'objet de sollicitations de la part de plusieurs familles de notables.

   On est donc loin de Bollywood. C'est un film dur, sur la condition féminine (sous différents aspects) et sur l'histoire d'un amour impossible. Exploitation économique, prostitution, insultes, agressions, viols... on ne nous épargne pas grand chose des mésaventures des femmes de condition modeste, musulmanes comme hindoues d'ailleurs.

   Toutefois, sur ce tas de fumier sociétal parviennent à pousser deux belles fleurs. Renuka ne se comporte pas comme les femmes qui acceptent la domination masculine ; elle sait se défendre... et surmonter (plus ou moins bien) les humiliations. Sa rencontre avec Devika donne naissance à quelque chose de beau et fragile. Les deux comédiennes sont formidables, tout comme celles et ceux qui incarnent les seconds rôles. (Certains personnages masculins sont particulièrement infects.)

   Politiquement, le film n'est pas neutre. L'un des prédateurs sexuels est candidat aux élections locales. On comprend qu'il est soutenu par un parti prônant "l'hindouité", brandissant la couleur safran. C'est une allusion au BJP (du Premier ministre Narendra Modi) et à son allié le RSS (que certains assimilent à un mouvement fascisant), ou bien au Bajrang Dal, moins connu mais très violent.

   Pendant près de deux heures, on se prend un sacré choc frontal, à peine agrémenté par la relation naissante entre les deux héroïnes.

   Voilà une œuvre qui figurera sans doute dans mon palmarès 2025.

dimanche, 01 juin 2025

Ce nouvel an qui n'est jamais arrivé

   ... pour Nicolae Ceausescu, puisqu'il a été exécuté à la Noël 1989. Mais, ça, les Roumains ordinaires comme les serviteurs de la dictature communiste ne pouvaient pas le savoir à l'avance. Cette comédie politique nous présente donc les destins croisés d'une quinzaine de personnages, aux origines, aux métiers et aux opinions diverses. Dans les jours qui précèdent le 25 décembre 1989, ils vont se croiser, parfois interagir et leur vie va en être (souvent) bouleversée.

   Le procédé rappelle celui mis en œuvre par Robert Altman dans Short Cuts (sorti en 1994... Mon Dieu comme le temps passe). Ici, les protagonistes sont :

- un agent de la Securitate et sa mère

- un employé d'une entreprise d’État, sa femme et son fils (qui a écrit au Père Noël)

- une quasi-voisine, actrice de théâtre, recrutée pour une émission de propagande

- le metteur en scène, accessoirement son amant

- le réalisateur de l'émission de propagande, son épouse et son fils rebelle

- le meilleur ami de ce fils rebelle, qui rêve de quitter la Roumanie

   L'action se déroule donc juste avant celle du récent Libertate. La manière dont la terrible police politique espionne, contrôle et brutalise la population est très bien mise en scène. On pense aussi à la Stasi et à ce qu'en montrait La Vie des autres.

   Le fond est donc dur, mais aussi bourré d'humour, noir de préférence. Ainsi, l'ouvrier commence à perdre les pédales quand il découvre ce qu'a demandé son fils au Père Noël. Les agents de la Securitate ne savent pas comment faire pour effacer des écrans la principale intervenante de l'émission de propagande (déjà enregistrée pour Noël)... qui a fui le pays. L'équipe de télévision vit sous leur pression et déploie des trésors d'imagination. Le réalisateur lui-même se demande jusqu'où il doit aller pour prouver sa fidélité au régime... sans insulter l'avenir, les nouvelles du reste de la Roumanie tendant à montrer que le régime vacille...

   C'est donc passionnant : on ne sait pas ce qu'il va arriver à chaque personnage ; on ne sait pas à l'avance qui va croiser qui et l'on est plongé dans la Roumanie des années 1980, où circulent de vieilles Renault, dont les fameuses R12, produites par une entreprise qui, par la suite, a pris le nom de Dacia.

   Les 2h15 passent très facilement. Je recommande vivement.

samedi, 31 mai 2025

The Phoenician Scheme

   J'étais à la fois excité et anxieux avant d'aller voir ce film. Il y a deux ans, Wes Anderson m'avait déçu avec Asteroid City, mais les deux précédents (L'Ile aux chiens et The French Dispatch) m'avaient emballé.

   Les deux premières scènes sont un régal. On y voit le premier accident d'avion (traité avec cet humour à froid qu'affectionne le réalisateur) et une salle de bains, filmée du dessus, comme une maquette, au ralenti, pendant que se déroule le générique. On y retrouve les effets géométriques caractéristiques du style d'Anderson... à ceci près que la symétrie apparente n'est jamais totale. Dans chaque plan, il y a quelque chose qui cloche, ou un détail comique, sur lequel le réalisateur attire plus ou moins l'attention.

   Sur le fond, l'intrigue est relativement simple. Un richissime homme d'affaires, Korda (Benicio del Toro, excellent) aussi ingénieux que peu scrupuleux, s'est lancé dans le projet le plus ambitieux de sa carrière (une combinaison de projets, en fait). Il veut y associer la seule fille de ses dix enfants, Liesl, une apprentie religieuse (maquillée !) qu'il a quelque peu négligée, mais qui lui semble avoir l'étoffe pour prendre sa succession. C'est une certaine Mia Threapleton qui incarne (efficacement) la religieuse. En l'observant, je ne cessais de me demander où je pouvais avoir vu auparavant cette jeune actrice (dans Le Jeu de la reine ?), dont le visage me disait quelque chose... peut-être parce qu'elle ressemble un peu à sa talentueuse môman !

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   Korda embarque donc sa progéniture (qui a l'espoir de moraliser son empire économique) dans un incroyable périple. Ils vont à la rencontre des principaux associés de l'entrepreneur, avec lesquels il n'a pas été très franc du collier. Au cœur de l'histoire se trouve le devenir de cet empire, contre lequel agit, en sous-main, le gouvernement des États-Unis. En coulisse, un autre complot est à l’œuvre, visant à assassiner Korda.

   Comme d'habitude chez Anderson, cette intrigue, pour intéressante qu'elle soit, est secondaire. C'est la construction des plans et la cocasserie de certains dialogues (vraiment bien écrits... privilégier la V.O.) qui méritent le détour. Je signale notamment les retrouvailles entre le père et la fille, pleines de sous-entendus. J'ai aussi beaucoup apprécié les interventions d'un groupe de guérilleros marxistes... qui se découvrent des points communs avec le tycoon.

   Parmi les gags récurrents, il y a la remarque faite par chaque nouvel interlocuteur à Liels :  « J'ai bien connu ta mère. » Le sous-entendu est clair, la défunte épouse de Korda étant connue pour avoir eu des amants (son époux la trompant lui-même allègrement). Du coup, l'incertitude plane sur la paternité biologique de Liesl. Son géniteur est-il Korda ? Son demi-frère ? Un ancien secrétaire particulier ? Quelqu'un d'autre ? La filiation est donc au cœur de l'histoire, le voyage d'affaires étant une manière pour le père et la fille d'apprendre à se connaître vraiment.

   Au passage, on appréciera la galerie de personnages pittoresques qui nous sont proposés, incarnés par une pléiade d'invités... parmi lesquels j'ai eu du mal à reconnaître Benedict Cumberbatch !

   Même si ce n'est pas le meilleur film de Wes Anderson, je l'ai trouvé plus accessible et plus intéressant qu'Asteroid City.

17:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

La Venue de l'avenir

   Le dernier film de Cédric Klapisch commence (et se termine) au musée de l'Orangerie, mais dans des circonstances très différentes. La séquence inaugurale nous présente un shooting, au cours duquel on croise l'un des protagonistes de cette improbable histoire familiale, Seb le photographe, incarné par Abraham Wapler (qui a des airs de François Civil).

   Cette séquence fait intervenir des personnages assez antipathiques, pour lesquels le musée semble avoir été privatisé. Leur suffisance transparaît dans la manière dont ils considèrent l’œuvre du peintre impressionniste, qui sert de "fond d'écran" aux évolutions du mannequin. De manière très gentille, Klapisch met en scène la superficialité de ce petit monde, ainsi que la fragilité de la relation qui lie le photographe au mannequin. Le projet du cinéaste est une sorte de retour aux sources, dans tous les sens du terme.

   Ce retour s'effectue par l'entremise d'un héritage, celui d'une maison délabrée de la campagne normande, dont une notaire a fini par retrouver tous les ayants droit, au nombre de... quarante. Ils descendent des trois enfants de la personne qui l'habita jadis, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Quatre d'entre eux (dont le jeune photographe) sont désignés pour explorer la demeure, avant qu'elle ne soit vendue (avec le terrain) pour permettre l'agrandissement d'une zone commerciale.

   Autant la découverte du passé des occupants de la maison est passionnante, autant l'intrigue contemporaine, très "politiquement correcte", est peu palpitante. Chacun des quatre héritiers est un cliché ambulant : le vieux prof de français qui corrige ses copies dans le train, la cadre commerciale scotchée à son ordinateur portable, le photographe de mode rivé à son smartphone et aux réseaux sociaux... le pire étant atteint avec l'apiculteur altermondialiste, incarné, ô surprise, par Vincent Macaigne (qui fait du Macaigne... une fois de plus).

   Cette trame contemporaine alterne avec des plongées dans le Paris de 1895. Là, cela devient intéressant, puisqu'on se demande comment certains objets découverts dans la maison normande (des photographies, un tableau) ont pu arriver là, et dans quelles circonstances.

   Au début, l'esthétique du Paris de la Belle époque est un peu agaçante, chaque personnage semblant sortir de chez la costumière, avec des habits impeccables, quelle que soit la catégorie de population. Cela s'arrange par la suite.

   Je fais partie des spectateurs qui aiment les reconstitutions historiques. Je suis donc client de cette vision d'un Paris en bord de campagne, sans tags ni déchets divers jonchant les trottoirs (qui d'ailleurs, la plupart du temps, n'existaient pas). La plongée dans l'univers des peintres et des photographes mérite vraiment le détour, même si certains aspects sont un peu schématiques ou convenus. (Par exemple, la mère comme la fille, à vingt ans d'intervalle, ont le cœur qui balance entre un peintre et un photographe).

   En 1895, la jeune Normande Adèle est partie à Paris à la recherche de ses parents, qu'elle n'a jamais connus. Sur cette quête familiale, Klapisch et son scénariste Santiago Amigorena greffent un roman d'apprentissage, une histoire d'amour et... une intrigue artistique.

   Les deux trames (celle du XXIe siècle et celle du XIXe) s'intercalent assez élégamment... et finissent par se croiser, au cours d'une séquence au départ totalement improbable... mais qui tient la route. Je ne dirai pas dans quelles circonstances, mais les héritiers finissent par se retrouver immergés dans le Paris des années 1870. C'est franchement cocasse.

   Je trouve d'ailleurs que, globalement, l'humour sauve le film (qui, sinon, serait très plan-plan, trop gentillet). Klapisch a régulièrement inséré de petites touches qui pointent les ridicules de ses personnages (sans les dénigrer) ou de certaines situations. Cela donne de la saveur à cette histoire rocambolesque, qui, à défaut d'emballer, se suit sans déplaisir.

   PS

   A celles et ceux que l'ennui gagnerait, durant la projection, je recommande un petit jeu, celui de l'identification de tous les invités prestigieux qui font une apparition dans le film.

   Celles et ceux qui sont mieux introduits dans le petit monde du Septième Art hexagnal s'amuseront à reconnaître les "fils et fille de" dont la distribution est parsemée... Cela nous vaut d'ailleurs une scène (ratée) à double sens, celle du grand restaurant parisien, au cours de laquelle l'héroïne Adèle (interprétée par Suzanne Lindon, fille de Sandrine Kiberlain et Vincent Lindon) croise la route de Sarah Bernhardt, que la mère biologique de la comédienne vient d'incarner à l'écran.

   Quelle belle et grande famille que celle du cinéma français !

vendredi, 30 mai 2025

L'Ultime Braquage

   Ce film danois, à la distribution internationale, évoque non pas un, ni deux, mais trois braquages, le troisième, « l'ultime », étant la conséquence des deux précédents.

   Le film commence donc par l'attaque d'un fourgon blindé, filmée de l'intérieur, en plan-séquence. C'est brillant, de la montée de tension à l'éclatement de la violence, avec, en conclusion, une caméra qui s'arrête lorsqu'un véhicule quitte le cadre, ne restant dans le champ que ce qu'on aperçoit de l'autre côté du pare-brise et dans le rétroviseur extérieur droit. J'ai retrouvé le brio de la mise en scène de Shorta. Frederik Louis Hviid est décidément un réalisateur à suivre.

   La deuxième partie du film consiste en la préparation du gros casse. On découvre la vie quotidienne d'un boxeur, jeune père de famille, qui peine à percer, tandis que revient dans la région celui que l'on surnomme "le Marocain" (Reda Kateb), un type pas franchement rassurant. D'autres individus vont se greffer au projet, notamment des jeunes issus de l'immigration. C'est donc une équipe multiculturelle et polyglotte que l'on voit se constituer. (Dans la version originale, on entend parler danois, suédois, anglais et arabe.)

   La troisième partie montre le casse qui, évidemment, ne va pas se dérouler comme prévu.  Les braqueurs, pour précautionneux qu'ils soient, n'ont pas la virtuosité de ceux qui sont à l’œuvre dans Ocean's eleven, mais ce ne sont pas des pieds nickelés pour autant. Juste des gars pas très bien partis dans la vie, qui succombent à l'envie de se faire rapidement un max de pognon.

   J'ai bien aimé cet aspect bancal du braquage, qui semble correspondre à la réalité, puisqu'il s'agit d'une histoire vraie, qui date d'une vingtaine d'années. C'est mis en scène avec nervosité... et c'est palpitant jusqu'à la fin, qui réserve une ou deux surprises.

   Cela ne va pas plus loin que cela, mais l'on passe un bon moment, si l'on aime ce genre de film.

23:37 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

dimanche, 25 mai 2025

La Chambre de Mariana

   Mariana est une prostituée ukrainienne, à Czernowitz (Cernauti), en Bucovine, une région à l'histoire tourmentée et à la population particulièrement mélangée, ancienne province austro-hongroise, tiraillée ensuite entre la Roumanie et l'URSS. En 1943, elle est repassée sous domination roumano-allemande et l'extermination de son importante population juive est entamée depuis plus d'un an. Voilà pourquoi la mère du jeune Hugo décide de le confier à une personne de confiance... une prostituée ! (Bien plus tard, on finit par découvrir le lien entre les deux femmes.) Le gamin se retrouve dans un hôtel de passe, dissimulé la plupart du temps dans un cagibi. De là, il perçoit les sons du bordel et, par de petits trous, observe tantôt la rue, tantôt la chambre où Mariana reçoit ses clients.

   L'idée de mettre (un peu) les spectateurs dans la peau de l'observateur confiné est très bonne, et bien mise en scène, par Emmanuel Finkiel, dont j'avais déjà apprécié Voyages et Je ne suis pas un salaud (en revanche, La Douleur...). Plusieurs types de scènes nous sont proposés : les souvenirs d'Hugo s'entremêlent de fantasmes (notamment celui de la présence de ses proches, disparus) et d'éléments de la réalité, qu'il a du mal à accepter.

   Le film repose aussi beaucoup sur les (gracieuses) épaules de Mélanie Thierry, très convaincante en ukrainophone (mais je me demande ce qu'en pensent les locuteurs naturels de cette langue). Je trouve en revanche moins réussies les interactions avec le gamin (surtout dans la première partie).

   L'intrigue nous propose un double basculement progressif, dans la relation Mariana-Hugo. Au début, celui-ci est perçu comme un enfant et la prostituée devient une sorte de mère de substitution. Le dernier tiers de l'histoire voit le garçon devenir adolescent (il est passé de 12 à 14 ans) et son regard changer sur sa protectrice, pour laquelle il ressent des sentiments nouveaux. Dans le même temps, l'ancien protégé devient le protecteur (parfois excessif) de la jeune femme. Son activité de prostituée lui a permis de survivre sous l'occupation roumano-allemande, mais le retour des troupes soviétiques (déjà présentes dans la région en 1940-1941, quand le pacte germano-soviétique s'appliquait) la met en position difficile.

   J'ai trouvé l'histoire assez belle, forte, même si je n'ai pas trop aimé le dernier quart d'heure. Ce fut aussi un peu long (voire languissant) à mon goût. J'attendais peut-être un peu trop de ce film, qui bénéficie de critiques favorables et d'un bon bouche-à-oreille. J'ai été un peu déçu.

samedi, 24 mai 2025

Libertate

   C'était le mot d'ordre des Roumains qui, en décembre 1989, manifestaient contre la dictature communiste de Nicolae Ceausescu, qui s'est rapidement effondrée. Mais ce ne fut pas sans dégâts : environ 1 000 morts au total, dont une centaine dans la ville de province de Sibiu, située au centre du pays.

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   Plus de trente ans après les événements, beaucoup d'incertitudes subsistent quant à l'origine des premiers tirs... et des suivants, personne ne revendiquant la responsabilité de la centaine de victimes, sauf quand ce furent des agents du régime communiste lynchés par la foule, ou exécutés par des révolutionnaires autoproclamés.

   La première partie, le plus souvent caméra à l'épaule, est donc obscure, brouillonne, même quand on connaît un peu l'histoire de cette époque. On perçoit bien la fébrilité des fonctionnaires du régime, divisés quant à l'utilisation des armes à feu... et qui attendent des ordres clairs pour se couvrir... ordres qui n'arrivent pas... ou qui sont contradictoires. De surcroît, les différentes forces armées du régime ne sont pas synchronisées, ni en phase quant à la gestion des manifestations. Ajoutez à cela quantité de fausses informations qui circulent, soit involontairement (en raison des délires d'une population habituée à croire au pire), soit volontairement, par des personnes qui cherchent soit à sauver leur peau, soit à tirer les marrons du feu... et vous obtenez une situation explosive. J'ai trouvé cette première partie intéressante sur le fond, mais pénible à suivre sur la forme.

   Heureusement, la deuxième partie est plus emballante. Les soutiens présumés du régime, capturés par les "révolutionnaires" et l'armée (qui a lâché le régime... après avoir sans doute tiré sur la foule...), sont emprisonnés dans la piscine municipale vidée de son eau (celle que l'on voit au tout début, ainsi qu'à la fin). Ils croient leur dernière heure venue... mais leurs geôliers ne savent pas trop quoi en faire. La situation met plusieurs semaines à se décanter.

   Le réalisateur Tudor Giurgiu met en scène un gigantesque panier de crabes, où se côtoient policiers "classiques", miliciens, gendarmes, membres (autant haïs que redoutés) de la Securitate (souvent comparée à la Stasi est-allemande, et qui semble tout aussi proche de la Gestapo de sinistre mémoire)... ainsi que des enquêteurs de la Brigade des affaires économiques ! Mais qui est qui ? Certains n'auraient-ils pas une double casquette ? Dans ce bassin asséché où s'entassent des dizaines d'hommes blessés, affamés et assoiffés, on ne peut pas faire confiance à grand monde... sans parler des troufions qui n'hésitent pas à pointer leur mitrailleuse du haut des plots de départ. Du coup, ce sont ces présumés agents du communisme (qualifiés de "terroristes") qui se mettent à leur tour à crier "Libertate" !

   Cette deuxième partie est vraiment passionnante. Petit à petit, on comprend mieux les fonctions de chacun, même si plusieurs mystères persistent. La situation évolue quand il s'avère que les gradés de l'armée qui soutiennent le "nouveau" régime (réussissant par là à évacuer la question de leur action sous Ceausescu...) n'ont pas l'intention de faire exécuter leurs prisonniers... d'autant que, dans le lot, certains sont des manifestants anti-communistes, arrêtés et tabassés par erreur, parfois à l'initiative des habitants d'un quartier, complètement paranoïaques.

   J'ai aussi trouvé intéressante la manière de traiter cet arrière-plan, qui fait écho à notre époque. Des personnes ordinaires propagent avec une extraordinaire conviction des informations bidons et la violence des anonymes se déchaîne la plupart du temps sans raison. C'est donc bien plus qu'une œuvre à caractère historique qui nous est proposée. C'est aussi une réflexion sur le temps présent, qui ne prête guère à réjouissance. Il y a une vingtaine d'années, 12h08 à l'est de Bucarest abordait la même période, mais avec plus d'humour.

vendredi, 23 mai 2025

Destination Finale - Bloodlines

   Je suis un "vieux" spectateur (en salles) des premiers films de cette lucrative et pittoresque franchise, à la fois horrifique et comique. Elle était un peu tombée dans l'oubli, jusqu'à ce que des producteurs avides de pognon désireux de poursuivre l'aventure artistique ne décident de financer une nouvelle version, sans réel lien avec les films précédents.

   La séquence inaugurale, qui se déroule dans les années 1960, est de toute beauté. Au cœur de cet épisode se trouve une tour d'aspect futuriste. (On a l'impression de découvrir, avec près de trente ans d'avance la Perle de l'Orient shanghaïenne.) Très vite, la jeune Iris, invitée en ces lieux par son charmant petit ami, ressent comme un mauvais pressentiment. Les spectateurs qui ne sont pas totalement ignorants du contenu de la franchise comprennent très vite ce que les "petits signes" montrés à l'écran signifient. La suite est particulièrement spectaculaire et (déjà) assez gore. Les cinéphiles percevront les allusions à des films catastrophe (notamment à Titanic), ainsi qu'aux attentats du 11 septembre 2001.

   Cette agréable mise en bouche est suivie d'une ellipse, puisqu'on se retrouve à notre époque. L'héroïne de cette partie est la petite-fille de celle de la précédente. Le scénario se fait malicieux et l'on retrouve les ingrédients qui ont fait le succès des premiers films : la mise en scène d'un effet papillon (toujours accompagné d'un effet domino particulièrement sanglant). Comme les scénaristes partent du principe qu'on a déjà vu au moins l'un des cinq films précédents, ils ménagent le suspens concernant la manière dont tel protagoniste va mourir... et c'est kiffant.

   Pour moi, ce fut d'autant plus jouissif que la nouvelle héroïne appartient à ce qu'on pourrait appeler une famille de beaufs, des membres de la classe moyenne qui trouvent parfaitement normal d'organiser un barbecue à la suite des obsèques de la grand-mère. On ne s'attriste guère de ce qui leur arrive ensuite...

   Les comédiens sont dans leur rôle (certes souvent caricatural) et les effets spéciaux sont au point, rendant les décès horriblement et délicieusement grotesques. On nous ménage des surprises jusqu'au bout... d'autant qu'on découvre qu'il existe deux manières de déjouer la vengeance de la Mort contrariée. L'une de ces deux manières consiste à briser un tabou, l'autre à (tenter de) se montrer plus malin(e) que la Faucheuse. Je laisse à chacun(e) découvrir ce que choisissent les personnages. L'ultime séquence fait intervenir un train et une voie ferrée, référence au premier opus, celui de 2000.

21:03 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 17 mai 2025

Accident domestique

   Ce titre pourri ne va sans doute pas aider la carrière de ce film espagnol, une comédie macabre qui traite, entre autres, du couple, de la maternité et de la paternité. En version originale, il s'intitule La Mesita del comedor (La Table de salon), une manière plus appropriée d'évoquer l'intrigue, qui va beaucoup tourner autour de ce meuble à monter soi-même, acheté dans un magasin d'une grande marque suédoise.

   C'est au cours de la deuxième scène que ledit meuble fait son apparition. (Je laisse à chacun.e le plaisir de découvrir ce par quoi commence le film.) C'est une scène de vaudeville, du théâtre de boulevard, avec un vendeur très malin, volubile, et un couple de clients en désaccord. J'ai beaucoup aimé, notamment parce que l'épouse a la langue acérée.

   C'est l'un des attraits de ces belles vingt premières minutes : découvrir au quotidien ce couple déséquilibré, composé d'un homme (à moitié) déconstruit et d'une femme de tête, qui a choisi la décoration de leur nouvel appartement, le prénom (horrible) de l'enfant qu'ils viennent d'avoir, le moment de la conception de celui-ci... Il ne reste au gars qu'à choisir le meuble du salon, un immense espace de libre arbitre que sa chère et tendre peine à lui laisser.

   La suite est moins joyeuse. Il se produit un événement en général tabou dans le cinéma contemporain, qui fait déraper la soirée. Il clôture la première partie du film... la seule pleinement réussie à mes yeux.

   Il faut ensuite se fader un tunnel d'environ cinquante minutes, avec des discussions nourries de tensions et de sous-entendus. Le couple reçoit le frère du mari, accompagné de sa nouvelle copine (qui a la moitié de son âge). Surgissent aussi la voisine du dessus et sa fille caractérielle et envahissante, sans oublier le vendeur du début, qui revient faire un petit coucou (passage assez réussi, ma foi). Le comédien mérite que je le cite : il s'agit d'Eduardo Antuña, remarqué jadis dans une autre comédie sardonique, Mes Chers Voisins (avec Carmen Maura).

   Le seul intérêt que j'ai trouvé à ce cœur de l'histoire est le malaise suscité par les différents niveaux d'information des personnages présents. Un seul (bientôt deux) sait ce qui s'est passé quelques temps auparavant dans l'appartement. Trois personnages sont au courant d'une histoire impliquant deux des voisins. Deux autres ont un petit secret à avouer... et ainsi de suite. On finit par s'apercevoir que celle qui en sait le moins est la nouvelle maman, celle qui dirige le foyer, sans être consciente que plusieurs informations importantes lui passent sous le nez.

   Cela rebondit dans le dernier quart d'heure, de manière presque aussi réjouissante qu'au début. Du coup, j'ai aimé la fin et je suis sorti assez satisfait de ce tout petit film irrévérencieux.

22:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 16 mai 2025

Marco, l'énigme d'une vie

   C'est l'histoire d'un garagiste au départ ordinaire. Il a survécu à la guerre civile espagnole, s'est très bien accommodé du régime franquiste, durant lequel il a acquis une petite aisance. Il s'est remarié et a eu une nouvelle fille. Mais il aspire à autre chose. Il se rapproche de jeunes enfants de la bourgeoisie qui manifestent contre le franquisme finissant... et leur fait croire qu'il est un ancien combattant anarchiste... avant de découvrir qu'il est un autre statut qui valorise encore plus celui qui l'incarne : le statut de résistant déporté. Paré de sa fausse modestie, de sa gouaille et d'une gentillesse factice, Enric Marco va tromper son monde pendant plus de vingt ans.

   Cette fiction à caractère documentaire montre d'abord le poids qu'avait acquis le personnage, avant qu'une succession de révélations ne démonte le mythe. Dans le rôle-titre, Eduard Fernández est sensationnel d'ambiguïté, incarnant à la perfection la mauvaise fois de l'affabulateur... mais le rendant toutefois un peu trop sympathique à mes yeux.

   Ce film traite de choses très sensibles pour moi (le mensonge, la mémoire de la Seconde Guerre mondiale). C'est sans doute pourquoi je dois dire que j'ai à plusieurs reprises éprouvé une colère sourde durant la projection.

   Même si le duo de réalisateurs (auquel on doit Une Vie secrète) a veillé à faire surgir la duplicité du personnage principal, je trouve la mise en scène trop empathique. C'est trop indulgent avec le narcissisme de Marco, dont on souligne le besoin de reconnaissance (de visibilité médiatique, dirait-on aujourd'hui). On affirme un peu trop vite qu'il a contribué à faire connaître le drame de la déportation à des Espagnols auxquels c'était alors peu enseigné. C'est oublier les dégâts que ses centaines d'interventions dans les écoles, collèges, lycées ont dû faire rétrospectivement, quand les jeunes ont découvert que la personne qu'on leur avait présentée comme étant une référence n'était en fait qu'un mythomane.

   Je pourrais aussi souligner une ou deux faiblesses historiques, comme la confusion entre camp de concentration et camp (centre) d'extermination (ou plutôt le manque de distinction nette entre les deux).

   Le fil n'est à voir que si l'on ne connaît pas cette histoire rocambolesque... et pour la performance de l'acteur principal. Le reste ne suscite que dégoût.

mercredi, 14 mai 2025

Tu ne mentiras point

   Le comédien Cillian Murphy (naguère oscarisé pour sa performance dans Oppenheimer) a coproduit cette histoire irlandaise, qui remonte aux années 1980 et n'est pas sans rappeler The Magdalene Sisters, de Peter Mullan.

   Murphy s'est attribué le premier rôle, celui d'un petit patron charbonnier, très impliqué dans son travail, empathique avec ses employés et les pauvres gens qu'il croise sur sa route. On le voit aussi mari fidèle et père attentionné. On ne s'étonne donc pas quand, au détour d'une livraison, il se prend d'intérêt pour une jeune femme qui semble maltraitée, dans le couvent local.

   On comprend assez vite quel est le double propos engagé de ce "film de gôche", qui dénonce d'abord les inégalités sociales et, à un second niveau, le sort particulièrement difficile des femmes d'origine populaire. S'ajoute à cela le parcours personnel du héros, qui a oublié (refoulé ?) une partie de son enfance, que cette histoire de jeune femme maltraitée fait remonter.

   C'est filmé en noir et blanc et c'est ma foi assez beau... mais Dieu que c'est (parfois) ennuyeux ! J'ai trouvé la plupart des personnages fades, en particulier ceux des femmes (alors que, dans mon souvenir, The Magdalene Sisters proposait quelques beaux portraits féminins), à l'exception de la mère supérieure du couvent, interprétée par Emily Watson. Celle-ci est particulièrement marquante lors de la scène "au coin du feu", lorsqu'elle reçoit le héros, dans un entretien pétri de sous-entendus. De son côté, Murphy n'est pas étincelant. Il s'est construit un personnage de saint homme, qui finit par phagocyter tout le reste.

   Ce n'est pas un mauvais film, mais je le trouve au final plutôt anodin. Sur un sujet approchant, on vibre bien davantage avec La Jeune Femme à l'aiguille.

samedi, 10 mai 2025

Bergers

   J'ai enfin pu voir ce film canadien, tourné en France, entre Alpes et Provence et dont l'intrigue s'inspire d'une histoire vraie, celle d'un jeune Québécois, arrivé dans la région un peu par hasard, et qui va se lancer dans la délicate activité d'encadrement de troupeaux.

   Il faut d'emblée souligner la pertinence du choix de l'acteur, pour interpréter Mathyas, le personnage principal. Félix-Antoine Duval est tout aussi crédible en jeune citadin romantique qu'en néo-rural, de moins en moins maladroit avec les bêtes. Il convient d'ajouter que, pour une partie des seconds rôles, on a recruté des personnes du cru. Cela donne une incontestable authenticité aux scènes pastorales... ainsi qu'à celle du café.

   Cela prend donc un peu le tour d'une comédie romantique, puisque le héros est d'abord maladroit, à la fois ridicule et touchant... et aussi parce qu'il croise la route d'une charmante employée de sous-préfecture, avec laquelle, une fois installé dans une ferme, il entretient une correspondance intime. Mathyas a le projet secret d'écrire un livre sur son expérience. Il n'est donc pas forcément décidé à rester éternellement berger, même si la rude vie champêtre semble davantage correspondre à ses aspirations que l'exubérante et déshumanisante vie citadine.

   J'ai aussi apprécié que cette histoire ne soit pas un conte de fées. D'abord seul, puis accompagné, Mathyas va être confronté à une multitude de difficultés, de la gestion au quotidien d'un troupeau à celle des intempéries, en passant par l'attaque des loups.

   La réalisatrice, Sophie Deraspe, ne nous livre pas une version aseptisée de la campagne française. Trois exploitations nous sont successivement présentées. La première est relativement moderne, de grande taille (limite capitalistique) et ne supporte pas l'amateurisme. La seconde est vieillotte, familiale, rugueuse, fragile sur le plan financier. La troisième est un peu entre les deux... et gérée par une femme, interprétée avec talent par Guilaine Londez.

   On prend un bon bol d'air, on sourit et l'on est ému par le difficile exercice du métier d'éleveur... et l'histoire d'un amour naissant, confronté à l'âpreté de la nature.

Thunderbolts

   Disney-Marvel nous sort une nouvelle équipe de super-héros, composée principalement de... criminels. C'est un "gentil" (Bucky Barnes, l'ex-Soldat de l'hiver) qui se charge du recrutement. En sous-main, la directrice d'une agence gouvernementale a monté un programme visant à contrôler les êtres dotés de pouvoirs extraordinaires... Tout cela ne vous rappelle rien ? Eh, oui, il s'agit grosso modo de la trame de The Suicide Squad, de chez Warner-DC. Cela explique d'ailleurs que James Gunn, qui était déjà aux manettes de ce film-ci, ait refusé de tourner celui-là. Il a été remplacé par Jake Schreier qui, ces dernières années, s'est plutôt consacré à des séries télévisées, mais que les cinéphiles connaissent pour son (excellent) Robot and Frank (qui a peut-être un peu inspiré le scénariste du récent Un Monde merveilleux).

   Tout ça pour dire qu'au niveau de la mise en scène, c'est réglé comme du papier à musique, en particulier dans les scènes de baston, avec ce qu'il faut d'effets numériques.

   L'héroïne est Yelena (sœur de Natasha Romanoff), que l'on a vue pour la première fois dans Black Widow. A l'époque, je trouvais Florence Pugh un peu au-dessous de ses partenaires. Elle a bien progressé depuis et, même si je regrette de ne plus voir Scarlett Johansson assommer des méchants en tenue moulante, je dois reconnaître que la petite Anglaise assure dans son nouveau rôle badass.

   La première partie du film conduit plusieurs tueurs irréguliers d'un sous-traitant de la CIA dans un mystérieux complexe souterrain, où, dans une grande confusion (pour les personnages comme pour les spectateurs d'ailleurs) va se déclencher une bagarre générale. C'est malgré tout assez réjouissant à regarder.

   Ces têtes brûlées hyper-individualistes vont rapidement comprendre que, pour sortir vivants du bunker souterrain, il leur faut coopérer. Cela donne une deuxième partie assez cocasse.

   La suite réserve quelques colossales surprises, avec, en particulier, l'éclosion d'un super-méchant, qui semble presque invincible. Comme les aventures de la bande de bras cassés sont destinées à durer, on se dit qu'ils vont bien finir par en venir à bout, mais que cela risque de ne pas être par la force. Intelligence, travail de groupe et empathie sont donc au programme dans la troisième partie, visuellement assez bluffante (les personnages se retrouvent prisonniers de la conscience du super-méchant), mais pas terrible en terme de dialogues. Je trouve aussi que l'un des acteurs n'est guère convaincant. (Pas de chance, c'est celui qui incarne le super-méchant.)

   Du coup, j'étais plutôt impatient que cela se termine. Je conseille toutefois aux spectateurs de ne pas quitter la salle trop vite. Le générique de fin est interrompu une première fois, par une scène dans laquelle on retrouve le papounet lourdingue de l'héroïne (toujours très bien interprété par David Harbour). A la toute fin, on a droit à une scène plus longue, qui pourrait servir d'introduction à l'épisode suivant. Il y est question de deux autres groupes de super-héros, l'un étant en conflit avec les Thunderbolts pour une question de droits d'auteur !

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vendredi, 09 mai 2025

Un Monde merveilleux

   Le titre de ce long-métrage (sans doute inspiré du Meilleur des mondes d'Aldous Huxley) est évidemment une antiphrase. C'est dans un monde cauchemardesque qu'estime vivre Max (Blanche Gardin, en forme). C'est une ex-enseignante, qui a été remplacée par un robot. On constate d'ailleurs rapidement que, dans la vie quotidienne de cette France (légèrement) futuriste, les êtres mécaniques exercent de nombreuses fonctions : soigneur en EHPAD, policier, chauffeur... sans parler des tâches assignées à ceux qui ont été achetés par des ménages fortunés : faire la cuisine, aider les enfants dans leurs devoirs, sortir les poubelles, promener le chien... Certains des gags du film montrent soit les ratés de ces machines ultra-perfectionnées, soit au contraire leur performance, ramenant les humains à leurs propres manques...

   Max est aigrie... et rebelle. Elle vivote entre deux plans foireux, auxquels elle associe sa fille. Celle-ci aimerait bien avoir un compagnon de jeu : pas un chien ou un chat, mais un robot. Je me garderai bien de révéler les circonstances dans lesquelles son vœu va être exaucé.

   J'ai apprécié que la mise en scène ne fasse pas de Max une héroïne parfaite. Elle est d'ailleurs parfois assez antipathique, même si (évidemment) son personnage va évoluer au contact d'un robot, T-0...

   La première moitié de l'histoire est un peu dans le style Groland, centrée sur Max la rebelle, anticapitaliste et bordélique. Le scénariste lui a écrit quelques répliques bien senties, comme lorsqu'elle se trouve face à une policière, qui lui déclare : "Savez-vous pourquoi je suis ici ?". Max lui répond, crânement : "Parce que vous étiez nulle à l'école ?"

   Concernant le monde des robots, j'avais peur que ce soit très kitsch, pas du tout réaliste. En fait, en dépit du manque de moyens, je trouve le résultat probant, notamment grâce aux bruitages. Les robots sont crédibles, dans leurs actions comme dans leur expression.

   La seconde partie voit Max séparée de sa fille. Du coup, elle qui cherchait à se débarrasser du robot va le garder... et tenter de le rééduquer (à sa manière). Au contact de la machine, elle s'humanise, tandis que T-0 devient un peu moins à cheval sur les règles, acquérant lui aussi une part d'humanité.

   Du coup, cette comédie loufoque, un brin grossière au départ, réussit à susciter de l'émotion, vers la fin... et tout ça en moins d'1h20.

mercredi, 07 mai 2025

Anges & Cie

   Chaque être humain est accompagné au quotidien (et même "guidé"), sans le savoir, par un(e) ange-gardien. Sont donc présents en même temps, à l'écran, deux catégories de personnages (les humains et les anges) qui évoluent dans deux dimensions différentes. L'un des ressorts comiques de cette romance teintée de surnaturel est constitué des interventions des anges dans la vie de leur "protégé(e)". Les gardiens ne sont pas toujours bien inspirés... et c'est parfois réjouissant.

   Pendant le premier quart d'heure, j'ai espéré me trouver face à une comédie transgressive, notamment en raison de la scène d'ascenseur, un petit moment de folie douce, à l'humour "épicé"...

   Hélas, la suite est moins scabreuse, sans être toutefois déplaisante. Les anges-gardiens que nous voyons évoluer n’œuvrent pas tous dans le même sens et leur rivalité est cocasse à observer... tout comme ses conséquences sur la vie des pauvres Terriens qui ne comprennent pas trop ce qui leur arrive. J'ajoute que le fonctionnement de la "maison mère" des anges ressemble quelque peu à celui d'une grosse boîte faisant passer l'idéologie avant l'intérêt réel de ses "clients". Une autre source de gags réside dans la découverte, par certains anges, des petits (et grands) plaisirs de la vie humaine...

   Dans les rôles principaux, Elodie Fontan, Romain Lancry, Shirine Boutella et Julien Pestel sont convaincants. On peut ajouter les savoureuses prestations, dans des seconds rôles, de Zabou Breitman et François Berléand, ce dernier incarnant un (vieux) Cupidon baba cool...

   L'intrigue est parsemée de rebondissements, parfois très surprenants. Toutefois, à mesure que la conclusion de l'histoire se rapproche, le film se fait plus conventionnel, certaines des ultimes scénettes sacrifiant même à une forme de "politiquement correct".

   Cela dure 1h30. J'ai passé un bon moment, sans plus.

   P.S.

   Le film sort la veille du pont du 8 mai, alors qu'un mouvement de grève est lancé, en France, dans les transports publics... ce à quoi fait écho la situation du début de l'intrigue, puisque deux personnages vont covoiturer faute de train en circulation !

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Les Linceuls

   Trois ans après Les Crimes du futur, David Cronenberg revient avec un nouveau polar sociétal mâtiné de science-fiction. Les linceuls en question sont des enveloppes bardées de technologie, des sortes de cocons numériques pour défunts friqués, dont les proches peuvent (grâce à une appli) suivre la progressive décomposition, sous terre, dans un cimetière spécialement créé pour ce type de cercueil.

   L'inventeur de ce procédé, Karsh (Vincent Cassel, belle gueule cassée au physique irréprochable), y voit un moyen de se faire du blé... et de gérer son deuil, le décès de son épouse l'ayant laissé inconsolable. Ladite épouse, incarnée par Diane Kruger, est bien sûr divinement gaulée.

   Mais les choses ne se passent pas comme prévu, le cimetière expérimental étant victime de dégradations... et d'un vol de données. Karsh comprend assez vite qu'au moins deux complots sont à l’œuvre, la mise en scène de Cronenberg suggérant l'existence d'un troisième.

   C'est du cinéma bien léché, aux dialogues ciselés, le luxe apaisant masquant de sourdes pulsions, prêtes à éclater. Cronnie aime toujours autant filmer les corps nus... et la modification de ceux-ci. (Âmes sensibles s'abstenir.) J'ajoute qu'entre deux scènes réalistes sont glissées quelques fantasmagories. En général, il n'est pas difficile de distinguer les deux... mais, parfois, on se demande si le réalisateur ne joue pas un peu avec vous.

   Les investigations menées par le héros se doublent d'une quête de l'amour, avec, en invitées, la sœur jumelle de sa défunte épouse, une intelligence artificielle aussi serviable qu'intrusive et une charmante aveugle, potentielle cliente à la base, mais qui pourrait tout chambouler.

   Je me suis laissé emporter par ce polar sophistiqué, très stylisé, un peu à l'image du récent The Insider. Je regrette cependant qu'une fois de plus, Cronenberg ne se soit pas trop foulé pour conclure son film, peut-être parce qu'il veut laisser à chaque spectateur la possibilité de se construire sa propre interprétation de l'histoire... ou peut-être parce qu'au montage, une ou deux scènes ont sauté, empêchant le plus tordu des complots d'apparaître dans toute sa splendeur.

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dimanche, 04 mai 2025

Drop Game

   Intitulé tout simplement Drop dans la version originale, ce petit thriller sociétal s'appuie sur une fonctionnalité des smartphones d'une célèbre marque : le partage de fichiers entre appareils se trouvant dans un certain rayon d'action (de dix à quinze mètres). Ce rayon est celui de la salle principale d'un restaurant très chic, situé au trente-huitième étage d'un gratte-ciel de Dublin Chicago.

   L'héroïne, Violet, est une ravissante mère célibataire, habitant une maison de luxe et exerçant à domicile la fonction de thérapeute. Mais, prise entre son métier et son enfant, elle n'a plus de vie sociale... d'autant qu'elle est très méfiante vis-à-vis des hommes : c'est une ancienne femme battue. J'ai trouvé intéressant qu'un film de genre parfois très conventionnel s'appuie sur ce fait de société (le harcèlement et les violences dont sont victimes certaines femmes).

   L'habillage visuel est soigné : le restaurant haut de gamme baigne dans une ambiance feutrée (et luxueuse, bien entendu), tandis qu'à l'écran, en différents endroits, les messages voire les images reçus par les téléphones s'affichent, parfois de manière biscornue. C'est bien foutu.

   Le scénario ménage bien le suspens pendant un peu plus d'une heure. On comprend assez vite que deux personnes (au moins) ont mis au point le stratagème dont Violet est la victime : une a pénétré à son domicile (où se trouvent sa sœur et son fils), l'autre au restaurant... mais de qui s'agit-il ? Entre le charmant photographe avec lequel elle a rendez-vous, le serveur un peu bizarre, la barmaid un poil intrusive, les clients masculins qui l'abordent, le pianiste aussi alcoolique qu'entreprenant et l'hôtesse d'accueil, à l'air mystérieux, les suspects ne manquent pas.

  J'ai été pris à la fois par le mystère (il n'est pas facile de deviner qui est le maître-chanteur infiltré) et par le suspens (va-t-elle s'en sortir ? son fils aussi ? qu'en est-il du photographe ?). Du coup, j'ai été indulgent pour les petites invraisemblances et les clichés dont l'intrigue est émaillée (avec, parfois, une grosse tendance au mélo). De surcroît, la dernière partie de l'histoire prend un tour mouvementé, délicieusement sanglant.

   Dans la salle, j'étais le seul "vieux", au milieu d'une flopée d'adolescents et de jeunes adultes, qui ont été (à ma grande surprise) captivés. Je pense que cette histoire leur a "parlé", comme on dit.

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samedi, 03 mai 2025

Des Jours meilleurs

   C'est ce qu'espèrent connaître les femmes alcooliques envoyées dans un centre de désintoxication, où elles seront encadrées par des infirmières, une psychiatre addictologue (Myriem Akkhediou, très bien)... et un coach sportif, lui-même ancien alcoolo (Clovis Cornillac, une fois de plus épatant).

   Pour incarner ces femmes en souffrance, on a mélangé les visages connus à de quasi-anonymes. Incontestablement, Valérie Bonneton sort du lot, à la fois pathétique et touchante. Michèle Laroque est très bien aussi, dans un rôle qui est toutefois moins de composition. Quant à Sabrina Ouazani, elle est toujours aussi formidable, incarnant un personnage à la fois explosif et plein de failles.

   Les auteurs, (Elsa Bennett et Hippolyte Dard) sont plutôt des habitués du petit écran. Ils ont notamment réalisé plusieurs épisodes de séries comme L'Art du crime et Astrid et Raphaëlle. Pour le personnage de Suzanne, ils se sont inspirés d'un cas réel.

   Le début présente des femmes à la dérive. La plupart du temps sans maquillage, les comédiennes acceptent d'incarner des personnages fracassés, aux visages déformés par l'alcool, la honte et la souffrance. La mise en scène les montre surtout comme des victimes, même si elle ne masque pas les dégâts que leur addiction a provoqués dans leur entourage. (C'est peut-être pour moi la seule limite de ce film : assez peu montrer les conséquences sur les proches et trop insister sur les difficultés rencontrées par les alcooliques.)

   Habilement, le montage alterne les scènes dures avec d'autres, de pure comédie, ou d'autres encore, touchantes sans être tristes. J'ai trouvé originales les quasi-improvisations, face caméra, lors des entretiens avec la psy. J'ai aussi aimé que le scénario ne prenne pas la forme d'un conte de fées. Cette période de réhabilitation est parsemée d'échecs (des rechutes, voire des abandons).

   Toutefois, l'élan créé par le projet monté par le coach sportif donne un sacré tonus à l'intrigue, qui culmine dans la seconde partie, se déroulant au Maroc. Là encore, le parcours du combattant des héroïnes va être semé d'embûches. Je trouve qu'il y a une belle intensité dans ces scènes de rallye, avec, en bonus, un petit moment de grâce, en plein désert, avec un groupe d'enfants.

   Du coup, en dépit de quelques appréhensions, j'ai été emballé par cette histoire, à la fois terrible, drôle et porteuse d'espoir... et en plus la musique est chouette !

mercredi, 30 avril 2025

Until Dawn : la mort sans fin

   Cinq étudiants effectuent un road trip mémoriel, en hommage à la sœur de l'une d'entre eux, disparue plusieurs mois auparavant. Perdus au fin fond d'une région boisée, ils tombent sur un vieil hôtel abandonné, où ils se réfugient, le temps d'un orage. Ils ignorent que cet hôtel est à peu près tout ce qui reste d'un village abandonné, enseveli depuis l'effondrement de galeries minières, vingt ans auparavant.

   Ce petit film horrifique, aux effets spéciaux bien conçus, puise dans la tradition des films d'horreur : Massacre à la tronçonneuse, bien sûr, mais aussi toutes les productions faisant intervenir un objet maléfique (ici, un mystérieux sablier), avec, en bonus, le recours à une (fausse) boucle temporelle : tant qu'ils ne parviennent pas à échapper à la mort, durant la nuit d'horreur, les cinq étudiants sont condamnés à la revivre, mais jamais de manière totalement identique... et avec un état de santé qui se dégrade progressivement.

   Il n'y a donc rien de bien nouveau là-dedans, si ce n'est l'association inédite de ces ingrédients. Du coup, on n'est pas étonné de retrouver certains clichés : les jeunes qui commencent par faire des "groupes de 1" (la première fois qu'ils découvrent l'hôtel... et son dangereux invité), l'égoïsme qui, au départ, l'emporte sur la nécessaire entraide, qui seule peut permettre d'échapper à la malédiction... J'ajoute que la caractérisation des personnages est rudimentaire. On comprend très vite qui des cinq est l'héroïne de l'histoire : celle qui a perdu sa sœur... et qui, de surcroît, est la mieux gaulée des trois jeunes femmes. Du côté des mecs, on oppose de manière caricaturale le semi-moche à lunettes (amoureux transi de l'héroïne) au bogosse musclé, adepte de la manière forte, un poil connard sur les bords... mais qui, bien entendu, va s'améliorer.

   J'ai pris du plaisir à ce machin d'abord parce que c'est correctement écrit, joué et filmé. Les scènes d'intérieur sont vraiment bien maîtrisées... et il faut reconnaître aux scénaristes une certaine inventivité dans la manière de faire mourir les différents personnages. C'est parfois très sanglant, grotesque... voire franchement dégueu. Bien évidemment, les protagonistes font tous au moins une grosse connerie au cours de leurs nuits de cauchemar éveillé.

   Qui va survivre à cette répétitive boucherie ? Suspens...

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mardi, 29 avril 2025

Promesse

   Ce documentaire familial est composé de trois types d'images : celles (récemment) tournées par le réalisateur, celles tournées par sa sœur jumelle quand elle était malade et celles issues de films familiaux ou de vidéos d'amis. Le montage de cet ensemble hétéroclite, accompagné du commentaire du frérot, est surprenant, à plus d'un titre.

   C'est d'abord une histoire poignante, celle d'une adolescente, Laurène, frappée par la leucémie, qui finit par la vaincre... avant qu'une autre maladie ne touche ses poumons. La jeune femme, issue d'une famille aisée, solidaire (et sans doute croyante, même si le film se fait discret là-dessus), a tenté de mener une vie (presque normale), reprenant ses études, sortant faire la fête, essayant de goûter à tous les plaisirs de la vie (sans toutefois qu'un.e petit.e ami.e n'apparaisse officiellement à l'écran).

   C'est aussi l'histoire du frère, jadis fusionnel avec sa jumelle, dont il s'était éloigné au début de son adolescence, avant que la maladie ne les rapproche. On sent qu'il s'en est voulu de ne pas avoir détecté la dégradation de l'état de santé de sa sœur, tout comme il culpabilise pour avoir, plus tard, pendant la période de rémission, pris le large pour vivre sa vie de jeune homme, loin des soucis familiaux.

   C'est enfin l'histoire d'une tribu, au départ composée des deux parents et de leurs cinq enfants, auxquels se sont ajoutés, plus tard, des conjoints et des petits-enfants. En dépit de la perte immense, le message passé est celui que la vie doit prendre le dessus, à l'image de la manière dont Laurène a voulu vivre sa maladie.

   C'est beau, mais, pour moi, entaché par le côté "télé réalité familiale" que prennent certaines séquences. J'ai été gêné par quelques scènes, durant lesquelles des personnes filmées manquaient de naturel, soit parce qu'elles étaient mal à l'aise (ce qui est compréhensible, vu le sujet), soit parce qu'elles m'ont semblé en faire trop ou manquer de sincérité. Ce n'est pas l'impression dominante que m'a laissée le film, mais cela m'a un peu gâché le plaisir.

16:30 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 26 avril 2025

La Revanche des Sith

   Cela fait presque vingt ans que ce film est sorti dans les salles françaises, époque à laquelle je l'ai vu pour la première fois. Les cinémas CGR se sont associés à l'anniversaire et ont proposé une ressortie limitée... très limitée même à Rodez, puisqu'une seule séance a été programmée, ce vendredi à 20 heures. (Dans d'autres cinémas CGR, des séances supplémentaires sont prévues, notamment ce week-end.)

   Avant la projection, nous avons échappé aux tunnels de publicités et de bandes annonces traditionnels. (Ouf !) A la place, des animations étaient proposées, avec un peu de cosplay et une série de parties de jeu vidéo en ligne, en direct, projetées sur le très grand écran de la salle 1. (Le jeu, Battlefront II, datant lui aussi de vingt ans, permettait d'incarner soit un défenseur de la République, soit un partisan de l'Empire.)

   J'allais oublier : juste avant le début du film, nous avons quand même eu droit à la promotion de la partie 2 du dernier Mission : impossible... et ça a l'air de dépoter grave ! (Vivement le 21 mai !)

   Ensuite, enfin, dans une salle quasi archi comble (où, curieusement, dominait la tranche d'âge des 15-30 ans), la projection a pu commencer.

   Je ne suis pas un grand fan de cette prélogie (l'action des trois épisodes, sortis après la trilogie originelle, se déroulant avant), en particulier du premier épisode, La Menace fantôme. Je les trouve plus faibles que les trois films d'origine... mais je dois dire qu'après avoir vu ce que Disney a fait de la franchise, j'ai un peu réévalué mon jugement, surtout pour ce troisième film, qui voit Anakin Skywalker devenir Dark Vador, dans une fin d'histoire aux accents shakespeariens.

   Vingt ans plus tard, je trouve toujours aussi cucul-la-praline l'histoire d'amour entre Padmé et Anakin... mais elle est indispensable pour la suite. Je trouve aussi trop abrupt le basculement de Skywalker, peut-être en raison de l'interprétation maladroite d'Hayden Christensen, dont je ne cesse de penser qu'il était une erreur de casting. Quant au machiavélique chancelier, il est plutôt bien interprété par Ian McDiarmid, mais le comédien avait trop vieilli entre les deux trilogies, alors qu'il était censé incarner la version plus jeune de son personnage.

   Outre la partie sur la planète Mustafar (lieu de l'épique duel final), j'ai aimé toutes les scènes où figure Yoda (peut-être mon personnage préféré de la saga), ainsi que la séquence (très enlevée) sur Utapau. Je dois aussi reconnaître que la séquence introductive a toujours autant de gueule.

   Bref, ce fut une bonne soirée. A la fin, la salle s'est peu à peu vidée de ses spectateurs (certains exhalant une prégnante odeur de transpiration), laissant le sol jonché de débris de pop corn...

00:10 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films