vendredi, 15 juillet 2022
Les Nuits de Mashhad
Tourné en farsi, mais en Jordanie (et en Turquie semble-t-il), ce film "iranien" est en réalisé une coproduction franco-germano-suédo-danoise... et le pouvoir en place à Téhéran a fait savoir à quel point cette œuvre lui déplaisait.
De quoi s'agit-il ? D'un polar... iranien, sorti l'été, où il est question de drogue... Cela ne vous rappelle rien ? Bon sang, mais c'est bien sûr ! La Loi de Téhéran, l'un des meilleurs films de 2021. La différence est qu'ici, on n'a pas le point de vue de la police, mais de prostituées, d'une journaliste... et d'un assassin.
Inspirée d'une histoire vraie, l'intrigue croise les regards. On suit d'abord une prostituée, mère de famille, accro à l'opium, très maquillée. On passe ensuite au point de vue du tueur, que l'on ne voit que fugacement. Un indice nous est donné : une bague, portée à l'annulaire gauche (sans doute en signe de piété). Le problème est qu'au moins trois hommes peuvent faire figure de suspect : un artisan-maçon (vétéran de la guerre Iran-Irak), un officier de police (harceleur) et un juge (religieux... et hypocrite). Assez vite, les spectateurs vont savoir qui est le coupable, puisque le mystère autour de son identité n'est pas le propos principal du film. (A plusieurs reprises, on se demande toutefois s'il n'y a pas un second tueur, qui aurait profité de la série de crimes pour y ajouter le sien.)
Le réalisateur s'intéresse au vécu de l'assassin... et à la traque menée par une journaliste intrépide (imprudente, même). Celle-ci est incarnée par Zar Amir Ebrahimi, qui a obtenu le prix d'interprétation à Cannes, cette année. (Il est vrai que la comédienne est formidable.) On a aussi droit à un portrait de société, une partie des habitants de Mashhad/Mechhed (la deuxième ville du pays, abritant des lieux saints de l'islam chiite) se montrant favorable à l'action du tueur, qui débarrasse la ville de "putes indésirables".
Le scénario ménage donc des surprises, mais pas forcément là où on l'attendait. Au niveau de la mise en scène, c'est assez cru, limite putassier parfois. On sent la volonté de montrer des images chocs (notamment dans les scènes de meurtre), sans que cela apporte grand chose à l'intrigue. Sur le fond, ces ajouts ne sont pas neutres. En général, ils sont dégradants pour les victimes. On se demande parfois dans quelle mesure le regard du réalisateur diffère de celui du tueur présumé. Heureusement, le combat de la journaliste vient contrebalancer cet aspect. Mais tout le monde en prend pour son grade. C'est peut-être une manière, pour le metteur en scène, de détourner les attaques le présentant comme un "valet de l'Occident".
Quoi qu'il en soit, c'est un bel ouvrage, d'une force indéniable, à voir en dépit de certains aspects contestables.
P.S.
Récemment, un autre fait divers scabreux (une série de viols) a défrayé la chronique, en Iran.
16:00 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Commentaires
Bonjour Henri Golant, j'ai trouvé ce film très fort même so cela n'a rien à voir La loi de Téhéran. Les scènes de meurtres sont assez insoutenables. Bonne après-midi.
Écrit par : dasola | jeudi, 21 juillet 2022
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