vendredi, 25 novembre 2022
Le Menu
Cela commence comme une énigme gastronomique, dans une ambiance à la Agatha Christie. Une douzaine de happy few, triés sur le volet, ont obtenu (contre 1250 dollars...) le droit de vivre la nouvelle « expérience culinaire » proposée par un grand chef étoilé, dans son emblématique restaurant, situé sur une île reculée. Assez vite, on comprend que quelque chose cloche. Le film d'épouvante commence à poindre le bout de son nez.
Avant que les choses ne deviennent vraiment intéressantes, il faut se fader les quarante premières minutes. Oh, elles ne sont pas inutiles à l'intrigue, puisqu'elles nous présentent les antipathiques clients du restaurant, qui seront bientôt pris au piège. Sans surprise, il y a une critique gastronomique (sorte de pendant du personnage interprété par Meryl Streep dans Le Diable s'habille en Prada), accompagnée d'un veule sous-fifre. Tous deux sont amenés à croiser trois mafieux, un acteur dont la carrière patine, deux membres de l'élite bon teint (très "Côte Est"), un fan absolu du chef... et une invitée surprise, pas prévue au programme.
La dénonciation du snobisme, mariée à un éloge visuel de la haute cuisine, constitue le hors-d’œuvre de cette intrigue, construite comme un banquet s'étalant sur plusieurs heures. Les convives finissent pas comprendre qu'ils sont tous là pour une "bonne" raison. Cela devient vraiment réjouissant à partir du moment où l'on sert des galettes mexicaines. Il y a une incontestable gradation dans la tension et l'action au sein du restaurant... et à ses environs : à deux reprises, on nous fait prendre un bon bol d'air... histoire de rendre l'atmosphère encore plus irrespirable.
C'est très bien joué, de Ralph Fiennes à Janet McTeer, en passant par Anya Taylor-Joy (qu'on peut voir aussi actuellement dans Amsterdam) et Nicholas Hoult (qui prouve qu'il peut jouer autre chose que le Fauve des X-Men).
Je ne suis toutefois pas totalement emballé, d'abord parce que trouve que le ton est un peu trop sentencieux. De plus, on aurait pu resserrer l'intrigue en 1h30... et peut-être tisser encore plus de liens entre les clients et le restaurateur (par leur passé). Enfin, j'aurais aimé que ce soit un peu plus saignant. Le film est globalement brutal, mais un peu trop sage à mon goût. Il n'en constitue pas moins un agréable divertissement.
22:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Commentaires
Très bien joué ??? Je les ai trouvés bien mal digérés tous ces pantins.
Et régler leur compte à des gens blindés de thunes juste parce qu'ils sont blindés de thunes, c'est vraiment d'une audace !!!
Écrit par : Pascale | dimanche, 27 novembre 2022
Ce n'est pas uniquement parce qu'ils sont riches que les clients du restaurant ont été ciblés.
La critique et son sous-fifre ont fait et défait des carrières. On les juge responsables de la fermeture de plusieurs restaurants et donc de la ruine de certains collègues du chef.
Les trois blaireaux en goguette sont en fait des employés d'un mafieux local qui a investi dans le restaurant. Il n'est pas nécessaire d'être très imaginatif pour comprendre qu'ils ont déjà dû s'occuper de quelques "gêneurs" pour leur patron.
Le couple de grands bourgeois symbolise l'hypocrisie d'une certaine classe dominante. L'homme fréquente des prostituées, l'une ressemblant à sa fille qui, chose curieuse, a rompu avec ses parents. On n'ose imaginer pourquoi... L'épouse et mère semble avoir longtemps fermé les yeux sur les errements de son mari, peut-être pour conserver son standing.
En y repensant, je suis d'avis que l'intrigue peut aussi se lire de manière métaphorique. En réalité, ce n'est pas de gastronomie qu'il est question, mais de cinéma.
Le réalisateur règle ses comptes avec les critiques chichiteux qui descendent tant de films pour des raisons contestables. Il semble aussi avoir une dent contre ceux qui financent les films, les producteurs se réservant souvent le "final cut", au détriment du metteur en scène.
Une partie du public est aussi visée, à travers le couple de vieux bourgeois, du genre à aller voir des films chiants et prétentieux parce que cela correspond à leur "consommation de classe" (comme le resto gastronomique et l'art contemporain, sans doute).
Le fan envahissant du cuisinier pourrait représenter certains cinéphiles férus d'érudition, qui ne peuvent s'empêcher d'évoquer un film à travers moult références plus ou moins justifiées, quitte à en perdre le plaisir de la découverte de l’œuvre.
Je crois que tous les personnages actifs dans l'histoire peuvent être analysés comme des décalques d'intervenants dans le monde du cinéma.
La consommation alimentaire est aussi une image pour celle des films. Parfois, au lieu d'aller ingurgiter un pensum prétentieux encensé par la critique, il vaut mieux s'enfiler un film d'action à l'ancienne, un peu bourrin certes, mais savoureux comme un bon hamburger.
Écrit par : Henri G. | mardi, 29 novembre 2022
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