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mardi, 15 juillet 2025

Des Feux dans la plaine

   Au premier degré, ces feux sont les incendies de voitures de taxi, dont les conducteurs sont, depuis, plusieurs mois, les victimes d'un tueur en série que la police locale ne parvient pas à coincer. Nous sommes en 1997, en Chine, à Fentun, en pleine période de réformes économiques, dans une région qui se désindustrialise (avec notamment des licenciements dans une manufacture de tabac).

   Au second degré, ces feux sont les sentiments intenses qui animent plusieurs personnages, jeunes comme moins jeunes. Chez certains, il y a de l'amour ou de la colère, chez d'autres l'envie de foutre le camp pour faire sa vie dans le Sud, du côté de Canton (Guangzhou).

   La police a infiltré les compagnies de taxi, espérant prendre le tueur sur le fait. Un soir, il manque de peu de se faire attraper... Cette première partie s'achève, au bout de 45-50 minutes, par un événement qui fait basculer l'intrigue.

   Une ellipse nous projette huit ans plus tard, en 2005. On retrouve la majorité des personnages, mais certains ont quitté la ville industrielle. L'enquête policière reprend. L'un des policiers va se trouver confronté à un choix cornélien...

   Ce polar estival en rappelle d'autres, chinois mais aussi sud-coréens. Il n'est pas le plus abouti de ceux que j'ai vus, mais j'ai lu ici et là des choses un peu sévères pour ce long-métrage plutôt bien troussé. L'ambiance de fin d'un monde, pour cette province industrielle, est bien rendue. Le film vaut aussi le détour pour la performance de l'actrice principale, Zhou Dongyu, qui incarne un personnage à multiples facettes.

   P.S.

   Depuis une dizaine d'années (et notamment la sortie estivale de La Isla minima), les distributeurs français ont l'habitude de profiter de la relative quiétude cinématographique des mois de juillet-août pour sortir à ce moment-là de bons polars, en général étrangers (espagnols, allemands, égyptiens, iraniens...). L'an dernier, la bonne surprise est venue d'Inde, avec Santosh. En 2025, la compétition est encore ouverte, d'autant que, pour l'instant (selon moi), c'est un film français qui tient la corde : Rapaces.

10:55 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

lundi, 14 juillet 2025

Falcon Express

   Sortie aussi sous le titre Pets on a train (« Des Animaux de compagnie dans un train »), cette animation française a été réalisée par une équipe qui a travaillé auparavant notamment sur Pattie et la colère de Poséidon et Les As de la jungle (auquel d'ailleurs plusieurs détails font référence).

   C'est un film d'aventures, dans lequel les animaux (majoritairement domestiques) sont des substituts d'enfants. Ils se retrouvent sans maître(sse) dans un train filant à vive allure. La troupe est constituée d'une grande diversité d'animaux : chiens, chats, perroquets, rongeurs, canard, tortue (pas très ninja, de prime abord), poisson, serpent (une certaine Anna... Conda !). Le héros est un raton-laveur (un raton-voleur, plutôt) et le vilain de l'histoire est un gros blaireau... au propre comme au figuré ! (Quand on vous dit que ça a été créé par des Français !)

   On a aussi pris soin de diversifier les caractères. Rex est, sans surprise, un chien policier, courageux et inflexible, un autre (beaucoup plus petit) étant le complotiste de service. On rencontre aussi un chat raisonneur, un grand chien hautain, un serpent empathique, des rongeurs babas-cools, un canard amateur de rugby (avec l'accent du Sud-Ouest !)... Quelle ménagerie !

   On ne s'ennuie pas un instant. L'action est rythmée, émaillée de gags et de références, soit à d'autres animations, soit à des films tournés en prises de vue réelles. Comme dans les précédentes productions TAT, les voix des principaux personnages paraîtront familières aux spectateurs : ce sont celles de pros du doublage de films ou séries américaines.

   Cela ne dure qu'1h25 ; les petits comme les grands passent un très bon moment. (Signe révélateur : aucune des têtes bondes/brunes/rousses n'a moufté pendant la séance, une fois le film commencé.)

19:37 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Indomptables

   Cette courte (1h20) fiction prend la forme d'un polar sociétal, à Yaoundé, au Cameroun. On y suit le commissaire Billong, un notable d'origine modeste, très attaché au protocole, au respect des règles et de la loi. Il a cinq enfants, sans doute de deux épouses différentes... et le sixième est en route. Il essaie de régir son foyer comme il procède dans son métier, avec méthode, respect... et beaucoup d'autorité.

   Tout dérape quand, une nuit, le corps d'un de ses collègues est découvert, dans un bidonville local. L'enquête se révèle particulièrement délicate : les habitants, qui apprécient peu la police, ne parlent pas, alors que la hiérarchie met la pression sur les enquêteurs, qui ne sont pas tous aussi rigoureux que Billong, loin de là. Dans le même temps, l'ambiance se dégrade au sein de son foyer. Son épouse actuelle et deux de ses enfants se rebellent.

   Je trouve que c'est une bonne idée de placer en parallèle l'évolution de l'enquête et celle de la vie familiale. Leur comparaison n'est pas schématique, chaque arc narratif ayant son existence propre.

   Évidemment, le travail des policiers est l'occasion de montrer les dessous de la vie à Yaoundé : les coupures d'électricité, le trafic de drogues, les combines des uns et des autres, la précarité économique du plus grand nombre. Il y a aussi une vie foisonnante, autour des bars, des petits commerces de bouche (tenus en général par des femmes)... et du football (ici féminin). A travers les personnages des fils du commissaire, Ngijol montre la tension entre tradition (le travail à l'école, le port d'une sorte d'uniforme, le respect du père) et la modernité (le gangsta rap, le smartphone, les programmes télés d'inspiration occidentale...).

   Justement, Ngijol est le principal atout du film, qu'il a coécrit et réalisé. Je l'ai trouvé excellent en commissaire autoritaire, petit à petit dépassé par les événements. Le paradoxe est qu'il est finalement plus à l'aise dans l'enquête criminelle (plutôt complexe) que dans la gestion de ses problèmes familiaux. Même s'il écrase un peu le film, on peut noter la présence de deux beaux personnages féminins : celui de la mère et celui de la fille aînée.

   Ce petit film sort de l'ordinaire. Il mérite vraiment le détour.

07:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

dimanche, 13 juillet 2025

L'homme au (grand) slip rouge

   Douze ans après Man of Steel, était-il nécessaire de re-relancer la saga Superman ? Pas vraiment, affirment les cinéphiles qui en ont vu des vertes et des pas mûres dans ce domaine. Bien sûr que oui, répondent les producteurs, la bave aux lèvres.

   Alors, on prend les mêmes et on recommence ? Pas tout à fait, puisqu'au grand brun musculeux qu'était Henry Cavill a succédé David Corenswet, qui est grand, brun... et très très musclé.

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   Les deux acteurs pourraient passer pour des frères... mais avez-vous noté la différence de costumes ? En 2013, Zach Snyder avait quelque peu innové. (C'était aussi l'époque où Warner-DC essayait de donner un ton plus adulte à ses films de super-héros.) En 2025, retour au costume traditionnel. On nage en pleine nostalgie, confirmation étant attendue bientôt avec Les 4 Fantastiques. (Je compte sur les estivants pour vérifier si, cet été, sur les plages, les messieurs ont massivement adopté le slip de bain écarlate.)

   Quoi qu'il en soit, dès le début du film, Superman se fait voler la vedette par... Superdog... Krypto de son véritable nom. Il n'est pas le chien du super-héros, mais celui-ci en a (temporairement) la garde. Il faut attendre longtemps avant de découvrir à qui M. Muscles rend aussi obligeamment service...

   Krypto est donc un chien doté de super-pouvoirs... mais il est aussi super-câlin, super-bondissant... super-casse-couilles en fait... Je l'adore ! Il donne du tonus à certaines scènes un peu plan-plan et c'est une source de gags. (Je rappelle qu'il y a trois ans, il a eu droit à son film d'animation.)

   L'autre proche de Superman est bien entendu Loïs Lane (Rachel Brosnahan, récemment vue dans The Amateur). Je fais partie des personnes qui, entre les bandes dessinées, les séries, les longs-métrages et les œuvres d'animation ont déjà vu quantité d'incarnations de ce "couple mythique". Celui-ci n'est ni le pire ni le meilleur. J'ai toutefois été un peu gêné par l'une de leurs conversations, celle qui prend la forme d'une vraie-fausse entrevue entre Superman et la journaliste. Sur le fond, la confrontation de deux positions était intéressante (en gros le partisan de la démocratisation par la force contre la défenseuse acharnée des droits constitutionnels), mais j'ai trouvé cela mal écrit (dans la VF) et mal mis en scène (voire pas très bien joué, notamment de la part de Corenswet).

   Heureusement, entre deux scènes de dialogues (souvent inintéressants), il y a de l'action. Et des effets spéciaux. Un tas d'effets spéciaux. C'est vraiment bien foutu et, de surcroît, c'est parfois très beau à voir sur grand écran, comme cette scène de baiser aérien, sur un fond luminescent.

   Et les méchants dans tout ça ? Eh bien ils sont moches et ils constituent une belle bande d'ordures, dont on espère que le héros finira par se débarrasser. En tête de liste se trouve le "nouveau" Lex Luthor. Nicholas Hoult s'est fait la boule à zéro et, ma fois, il est assez convaincant. Il s'appuie sur deux acolytes génétiquement modifiés. L'identité de l'homme demeure longtemps mystérieuse... et c'est une sacrée surprise quand on la découvre. James Gunn n'en fait toutefois pas grand chose, à part des rafales de coups de poings. Je l'ai connu plus inspiré avec The Suicide Squad et Les Gardiens de la galaxie. Il a d'ailleurs ramené de ce dernier film un invité surprise : François Nathan Fillion (ex-Castle, aujourd'hui Rookie de Los Angeles), doté d'une coupe de cheveux que je ne souhaiterais pas à mon pire ennemi ! Fillion incarne Green Lantern, qui compose, avec deux (puis trois) acolytes, un groupe de super-héros de deuxième division (au départ). La ringardise est assumée, parfois comique. A noter que cette "équipe B" prend du galon au cours de l'histoire. Je me demande si la production n'a pas en tête le lancement d'un nouveau "produit dérivé" (en plus de celui qui est suggéré en toute fin d'histoire).

   Du coup, c'est assez plaisant, en dépit de l'ennui suscité par certaines scènes de dialogues et de l'abus d'un schéma (très) conventionnel : on place le héros au fond du trou et le monde au bord du gouffre... et, bien entendu, tout finit par s'arranger.

   P.S.

   Deux scènes bonus nous sont proposées, dont une à la toute fin du générique.

20:58 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 12 juillet 2025

Buffalo Kids

   Cette animation espagnole a été réalisée par l'équipe à laquelle on doit Sacrées Momies. Les héros sont des enfants irlandais, qui débarquent à New York en octobre 1886, en pleine inauguration de la Statue de la Liberté. De là, ils doivent rejoindre la Californie, où vit leur oncle. Leur périple ne sera pas de tout repos...

   Le film est tout public, mais touchera sans doute davantage les jeunes que les adultes. Ceux-ci peuvent agrémenter la projection en essayant de repérer les allusions qui leur sont destinées. Ainsi, la rouquinissime Mary (qui, dans la version originale, est jouée par une actrice irlandaise), en approchant de New York, se prend pour Jack dans Titanic. Plus tard dans l'histoire, un personnage indien se la joue De Niro dans Taxi Driver.

   Hélas, ce double niveau de lecture est rarement présent dans le film. C'est très souvent premier degré, mais avec du fond. La principale originalité est d'avoir composé un trio de héros incluant un garçon gravement handicapé. On est prié de croire qu'il va survivre à toutes les épreuves rencontrées dans un Far-West ô combien dangereux. Toutefois, on a peu atténué les difficultés de sa vie quotidienne et, comme le film doit être vu par un jeune public, je trouve que c'est une belle leçon à lui transmettre.

   La volonté de bien faire est néanmoins trop voyante, pour un(e) adulte. Ainsi, les héros se retrouvent embarqués (clandestinement) dans un train (à destination de la Californie) en compagnie d'une troupe d'orphelins, où Blancs et Afro-américains sont mélangés sans distinction. Certes, depuis 1865, les hommes de toutes les couleurs sont censés avoir les mêmes droits aux États-Unis, mais la fin du XIXe siècle voit la mise en place de la ségrégation, dans les États du Sud. On présume donc que ce train les évite et qu'il relie New York à Sacramento en passant par Chicago et Omaha (en noir ci-dessous) :

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(cliquer sur la carte pour l'agrandir)

      Le ligne transcontinentale, achevée peu après la Guerre de Sécession, évite soigneusement les anciens États esclavagistes et les (futurs) États ségrégationnistes (marqués d'un disque rouge à croix noire, ci-dessus).

   Je me demande tout de même s'il est vraisemblable qu'en 1886, le contrôleur de tous les passagers du train soit afro-américain.

   Les mêmes intentions sont à l’œuvre lors de la rencontre d'Indiens Cheyennes (qui, à l'époque où est censée se dérouler l'intrigue, ont déjà été soumis, voire massacrés. Sur la carte qui figure plus haut dans ce billet, leur territoire est grosso modo délimité avec un tireté vert.) J'ai trouvé cet épisode très réussi. On s'y moque gentiment des enfants d'origine européenne, de leurs préjugés, et l'échange pacifique prend le dessus sur le risque de confrontation.

   Peu avant ce passage on voit apparaître des bisons (buffalo, dans la langue de William Cody). C'est un moment assez touchant et c'est aussi pour moi l'occasion de signaler que les animaux sont, de manière générale, très bien dessinés et animés. Outre les bisons, on voit des chevaux et... un chien, plus précisément un chiot abandonné, dont Mary refuse de se séparer. Il est la source de quelques gags.

   La suite est moins drôle, lorsqu'intervient une bande de braqueurs de trains, accessoirement chercheurs d'or. Ces types odieux vont en faire voir de toutes les couleurs à nos héros... mais ceux-ci ne manquent pas de ressource. Le jeune public sera sans doute conquis par le stratagème "caca-prout" imaginé par Mary pour échapper à ces tristes sires.

   Voilà. Pour un(e) adulte, c'est plaisant, sans plus. Pour les petits, le film allie divertissement à leçons de morale.

vendredi, 11 juillet 2025

Rapaces

   Le titre de ce film (très) noir est à double sens. Ces prédateurs peuvent être les journalistes de la presse à sensation, qui, tels des vautours, se repaissent de la mort qu'ils croisent sur leur chemin. Les rapaces sont aussi des hommes, plutôt jeunes, chassant en meute... un drôle de gibier.

   Derrière ce qui semble être, de prime abord, un thriller du samedi soir se cache un film politique, qui dénonce le masculinisme toxique et le fait que, de nos jours encore, dans de nombreuses villes françaises, les femmes ne puissent pas sortir seules le soir sans appréhension.

   Sami Bouajila incarne à la perfection un rubricard expérimenté, qu'un fait divers sordide (inspiré de l'affaire Élodie Kulik) va pousser à prendre des risques inconsidérés, en compagnie de sa fille, stagiaire au  journal. On croise d'autres membres de l'équipe de "reporters du crime", tous très bien interprétés, par Valérie Donzelli, Jean-Pierre Darroussin et l'étonnante Andréa Bescond, la directrice de la rédaction, que les journalistes, mi-affectifs, mi-craintifs, surnomment "maman".

   Dès le début, la tension est présente. On est saisi et on le reste jusqu'à la conclusion. Entre temps, on suit plusieurs fils narratifs. Il y a la vie quotidienne des journalistes, en général peu épanouissante (en tout cas guère propice à la stabilité familiale). Il y a aussi le tableau d'une région rurale des Hauts de France, qui ne respire pas la franche gaieté. Il y a enfin l'enquête quasi policière menée par Samuel et ses "assistants", le tout sur un fond inquiétant, en particulier pour les femmes.

   Une grande diversité de plans nous est proposée, en extérieur comme en intérieur. Le montage est efficace, la musique soulignant la tension. Comme le scénario s'éloigne un peu, dans la seconde partie, du fait divers qui l'a inspiré, on ne sait pas trop où tout cela va nous mener.

   Dans des genres très différents, le cinéma français nous propose actuellement de belles aventures en salle obscure, avec, outre ce film-ci, 13 jours 13 nuits, L'Accident de piano et Le Grand Déplacement.

jeudi, 10 juillet 2025

L'Accident de piano

   Le Dupieux nouveau est arrivé, un an après une cuvée remarquable, composée de Daaaaaali ! et du Deuxième Acte. L'image du piano suspendu nous est immédiatement proposée, sans que l'on connaisse la suite... et l'on se demande si Quentin va nous la proposer, coquin comme il est.

   En attendant, on suit un étrange duo, composé de Magalie (influenceuse de l'extrême) et de son esclave larbin employé assistant. Au début, j'ai trouvé que le duo d'acteurs ne fonctionnait pas très bien. Il me semble que Jérôme Commandeur (qui sort ici de sa "zone de confort") avait du mal à trouver le ton juste face à Adèle Exarchopoulos, pas complètement convaincante, mais en plein dans son trip.

   Le film commence à devenir intéressant quand débarque la journaliste, incarnée par Sandrine Kiberlain. Je trouve que la joute verbale (à fleurets plus ou moins mouchetés) entre les deux protagonistes féminines mérite le détour, Sandrine me paraissant plus impressionnante qu'Adèle, pas tout à fait libre de son jeu, engoncée qu'elle est dans son attirail (perruque + plâtre + appareil dentaire). A noter aussi la bonne prestation de Karim Leklou, dans un rôle secondaire, mais marquant.

   Je rassure les (potentiels) spectateurs : on finit par découvrir ce en quoi consiste le fameux accident... et cela devient excellent. Le film part un peu en vrille. Pendant la dernière demi-heure, je me suis régalé. 

   Cerise sur le gâteau : la cruauté visuelle s'accompagne d'une double dénonciation, celle de la quête éperdue de célébrité et celle de la cupidité.

   Le film, pour anodin qu'il paraisse de prime abord, est en fait très fort et, une fois n'est pas coutume, Quentin a su conclure son histoire. J'en déconseille toutefois la vision aux âmes sensibles.

10:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 08 juillet 2025

13 jours 13 nuits

   Environ deux ans après les entraînants D'Artagnan et Milady, Martin Bourboulon nous replonge dans une histoire prenante, cette fois-ci pas adaptée d'un célèbre roman, mais d'un livre autobiographique (dont je reparlerai plus loin). Les scénaristes ont choisi de concentrer l'intrigue sur l'évacuation des civils de l'ambassade de France à Kaboul, en 2021, faisant de ce film un thriller géopolitique assez captivant.

   Je n'ai quasiment que des compliments à formuler : l'image est soignée, certains plans sont inventifs, la musique est parfaitement adaptée et la plupart des acteurs sont très bons, notamment Roschdy Zem et Lina Khoudry. Ils sont entourés d'une pléiade de seconds rôles le plus souvent convaincants, qu'ils incarnent des policiers, des civils ou des taliban.

   Je suis un peu moins emballé par la prestation de Sidse Babett Knudsen, qui incarne une journaliste anglo-saxonne qui ressemble plutôt à une travailleuse humanitaire... un personnage qui d'ailleurs ne figure pas dans le livre de Mohamed Bida (interprété par Roschdy Zem).

   J'ai aussi été gêné par le mélo créé artificiellement autour du personnage de l'interprète (jouée par Lina Khoudry) et de sa mère. On a ajouté d'inutiles péripéties et un côté larmoyant dont le sujet n'avait pas besoin, tellement il est fort. (De surcroît, dans le livre, le commandant français n'a que des hommes pour lui servir d'interprètes avec les taliban, dont je doute qu'ils aient accepté de passer par une femme, fût-elle voilée.)

   Cela m'amène donc au bouquin, qui vient d'être réédité en collection de poche :

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   La relation de ses deux dernières semaines à Kaboul est entrecoupée de fragments d'un récit autobiographique, celui d'un fils de harki, dont les parents, réfugiés d'Algérie, sont passés par les camps de Rivesaltes et du Larzac. Ce fils d'immigrés a connu le racisme, dans son quartier et dans la police, qu'il a intégrée un peu par hasard.

   En lisant le texte, on comprend qu'on a affaire à un type tenace, habitué à surmonter d'énormes difficultés depuis le plus jeune âge ce qui, sans qu'il le sache par avance, l'a sans doute préparé à l'incroyable mission de sauvetage de Kaboul.

   Le livre est d'une lecture aisée et il complète formidablement le film. Je recommande donc vivement les deux.

dimanche, 06 juillet 2025

Jurassic World : Recyclage

   Je me faisais une joie de retrouver les dinosaures, sur très grand écran, en V.O. sous titrée, en 4K. J'avais récemment revu les deux premiers Jurassic Park, ainsi que Jurassic World et Fallen Kingdom.

   Autant dire que, dès le début, j'étais en terrain connu... mais pour d'autres raisons. En effet, la première séquence, qui se déroule dans le passé, a un furieux air d'Alien, tandis que la seconde, tournée en plein océan, n'est pas sans rappeler Les Dents de la mer. On nous a pourtant rabâché que, pour inaugurer cette (supposée) nouvelle trilogie, on avait mis du lourd, avec David Koepp (scénariste, entre autres, des deux premiers films de la franchise et du dernier Indiana Jones) à l'écriture et, à la mise en scène, Gareth Edwards (réalisateur béni de Rogue One, mais aussi -hélas- de Godzilla et de The Creator). Ce n'est pas la première fois que j'ai l'impression qu'on a mis une intelligence artificielle à contribution. Celle-ci a donc pioché dans ce qui avait eu du succès jadis et naguère, pour nous pondre un gloubi-boulga familiaro-héroïco-philanthropico-horrifique.

   La bonne nouvelle est l'arrivée de Scarlett Johansson. (Ouf ! On a failli avoir Jennifer Lawrence !). La voir en jolie baroudeuse, cynique au grand cœur, n'est pas du tout déplaisant...

   Son personnage fait partie de l'un des deux groupes humains qui évoluent au large puis sur l'île de Saint-Hubert, censée se trouver à proximité de la Guyane française. (Cela explique que l'un des personnages -employé sur un bateau- cause dans la langue d'Emmanuel Macron.) L'un de ces groupes est constitué principalement de mercenaires, plus ou moins cupides, l'autre d'une famille de gentils touristes. D'après vous, lesquels le scénariste expérimenté a-t-il choisi de faire mourir en nombre ? Le suspens est in-sou-te-nable ! (Cela donne l'occasion à celles et ceux qui s'ennuient ferme d'occuper agréablement leur temps : deviner qui va se faire croquer au cours de la nouvelle séquence.)

   En moyenne, environ un humain (un peu plus, un peu moins...) décède au contact de chaque nouvelle grosse bébête carnivore. Il n'en meurt donc aucun lors de la (très belle) séquence avec les titanosaures, sans doute le meilleur moment du film. J'étais prêt à placer devant la séquence T-Rex, qui commence très bien, mais elle est gâchée par l'abus du "juste à temps" et d'énormes invraisemblances (notamment concernant un canot de sauvetage gonflable... un sommet du ridicule cinématographique).

   La séquence en montagne était elle aussi prometteuse, mais elle devient très vite hyper-prévisible. Elle comporte toutefois une part de mystère : quelle civilisation avait construit l'abri rocheux ?

   De vignette en vignette, on progresse jusqu'au climax qu'on attend depuis le début : quand les rescapés vont se trouver confrontés à ce qu'il faut bien appeler un "alienosaure", un truc très très gros, très très moche... et très très con (en plus d'être pataud). Là, on sent que les spectateurs ne sont pas les seuls à ne plus y croire : les acteurs non plus !

   Si c'était sorti pendant la Fête du cinéma, j'aurais conseillé l'expérience, pour cinq euros, un jour de canicule. Mais il y a beaucoup d'autres films à l'affiche, bien meilleurs que celui-ci.

23:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2)

mardi, 01 juillet 2025

28 ans plus tard

   Danny Boyle signe une (lointaine) suite de 28 semaines plus tard (qu'il n'avait pas réalisé) et de 28 jours plus tard. C'est le résultat d'un vieux projet, remis à plusieurs reprises, et qui devait s'intituler, à l'origine, 28 mois plus tard.

   Dès la première séquence, on a droit aux zombies "infectés". Le savoir-faire est là, mais cela a un air de déjà vu. Soyez bien attentifs à cette partie inaugurale (qui se déroule dans le passé) : l'un des personnages réapparaît dans le film, mais il faut être patient avant de découvrir ce qu'il est devenu.

   La suite nous transporte à la frontière anglo-écossaise, de nos jours. Certains plans montrent le célèbre Ange du Nord (qui apparaît dans plusieurs épisodes de la série Les Enquêtes de Vera), situé à proximité de Newcastle. Dans la version originale, les habitants du village de rescapés parlent la langue de Charles III avec un accent à couper à la tronçonneuse.

   La situation géographique particulière de ce village est très bien exploitée par Boyle. Il se trouve sur une presqu'île, qui devient inaccessible à marée montante, le protégeant de toute incursion venue du continent.

   En revanche, la caractérisation des personnages craint un peu. L'ambiance survivaliste est très masculiniste : les hommes chassent et picolent, les femmes s'occupent de la cuisine et du ménage (et picolent aussi, seul domaine dans lequel s'applique un semblant d'égalité).

   Le héros Jamie (Aaron Taylor-Johnson) est un peu plus ouvert : c'est lui qui fait la cuisine et s'occupe de son fils, à la maison. Mais, le reste du temps, c'est un chasseur d'exception, qui ambitionne de faire de son fils de douze ans un aussi bon prédateur que lui. De son côté, le gamin idolâtre son père, mais il est tout aussi attaché à sa mère, clouée au lit et, qu'au début, on prend pour une demi-cinglée.

   Sans surprise, papounet va emmener fiston en balade, au-delà des remparts, sur le continent. Sans surprise, le fiston se montre maladroit et trouillard. Sans plus de surprise, papounet lui sauve la mise... mais le duo rate la fin de la période de marée basse. Il fait quelques mauvaises rencontres, dont celle d'un Alpha, un "infecté" particulièrement redoutable, à la fois rusé et doté d'une résistance physique exceptionnelle (surtout pour un cadavre ambulant). Les interactions entre rescapés et infectés ont beau être mises en scène avec efficacité, quand on a déjà vu plusieurs films de ce genre, on s'emmerde un peu.

   ... et l'on continue à s'emmerder quand on constate que, plus tard, le garçon continue à se comporter de manière extrêmement prévisible, cette fois-ci avec sa mère (peut-être pas aussi cinglée qu'elle en a l'air).

   Cela nous vaut tout de même le plus joli passage du film : la rencontre d'un drôle de médecin, installé sur le continent, mais qui a (jusqu'à présent) réussi à échapper aux morsures et griffures des infectés, alphas compris. Ce médecin peu orthodoxe a les traits de Ralph Fiennes, qui venait sans doute d'achever le tournage du Retour d'Ulysse : il en avait gardé la musculature... mais pas la tignasse ni la barbe. Blague à part, cette séquence, durant laquelle on croise d'étranges empilements osseux, est emballante, sur la forme comme sur le fond... et l'on entend enfin un personnage parler un anglais distingué !

   La dernière partie est destinée à faire le lien avec l'épisode suivant, qui aurait déjà été tourné. J'ai l'impression que Boyle veut donner une tournure encore plus gore à la franchise... avis aux amateurs.

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lundi, 30 juin 2025

Le Grand Déplacement

   Trois ans après le savoureux Tout Simplement noir, Jean-Pascal Zadi est de retour sur le grand écran avec une nouvelle comédie politico-sociale, un brin fantastique... mais surtout fantasque.

   La Côte-d'Ivoire, pays de naissance des parents du pilote Pierre Blé (et de Zadi, qui l'incarne), est une sorte de Wakanda francophone, un peu cheap, mais qui a mis au point, dans le plus grand secret, un programme spatial très ambitieux. C'est peut-être une allusion au Zaïre du dictateur Mobutu, dont l'activisme spatial a naguère fait l'objet d'une excellente bande dessinée.

   Tout cela n'est qu'un prétexte, pour dénoncer, outre la domination occidentale, les clichés (sur l'Afrique, les Africains, les femmes...) et pour pointer, incidemment, la pauvreté d'une grande partie des habitants. Zadi réutilise une partie du discours "décolonial" et se plonge dans les "luttes intersectionnelles", avec recul. A travers son personnage, celui d'un beauf noir, il met en évidence l'africanité de pacotille de certains descendants de migrants, mais aussi l'homophobie et la misogynie, qui n'existent pas que chez les Blancs Leucodermes. A travers le personnage du psychologue (interprété par Fary, qui a la tête de Spike Lee jeune), il insinue que le racisme va parfois se nicher là où on ne l'attend pas. 

   Du coup, je pense que ce film va faire beaucoup de mécontents. Les racistes vont évidemment détester (sans même l'avoir vu ?), mais, comme Zadi égratigne un peu (beaucoup) le "camp du Bien", je ne suis pas certain que tous ses amis décoloniaux apprécient.

   Cela donne une œuvre un peu foutraque, moins maîtrisée que Tout Simplement Noir, mais avec des effets spéciaux très corrects. J'ai ri à plusieurs reprises, mais je trouve que certaines scènes tombent à plat.

dimanche, 29 juin 2025

Peacock

   Matthias est le co-dirigeant et le meilleur employé d'un service de location très spécial. En effet, l'entreprise haut-de-gamme MyCompanion propose de louer qui un(e) ami, qui un(e) collègue, qui un fils... pour une durée déterminée. Le jeune homme a atteint un tel niveau de perfectionnisme qu'il se fonde dans chaque rôle qu'il endosse... ce qui fait qu'à l'écran, parfois, on a du mal à savoir (au début) si c'est le "Matthias loué" ou le "Matthias de la vraie vie" qui évolue devant nos yeux. C'est aussi ce que finit par se demander sa petite amie. (Le comédien, Albrecht Schuch, est formidable.)

   La première partie du film nous montre le fonctionnement de ce service singulier, sans doute inventé au Japon au tout début du siècle (et arrivé en France il y a quelques années). C'est souvent cocasse, quand on comprend ce qu'il y a d'artificiel dans certaines scènes. La vie de Matthias semble de prime abord parfaite : il est jeune, séduisant, cultivé, riche, vit dans une baraque de folie et a pour compagne une jeune femme séduisante, cultivée, riche. Apparemment, tous deux se comprennent à demi-mots. Ils n'ont toutefois pas d'enfant.

   Évidemment, cela va déraper, à partir du moment où la compagne en a assez de vivre avec un acteur professionnel. L'une des missions joue aussi un rôle, celle au cours de laquelle Matthias doit apprendre à une épouse âgée, qui en a marre d'être dénigrée, à soutenir une dispute avec son mari. La "formation" dispensée par Matthias va avoir des conséquences insoupçonnées...

   Malheureusement, à partir de là, le film devient très prévisible. En dépit d'un début prometteur, on comprend comment va tourner la nouvelle relation esquissée avec une Norvégienne croisée lors d'un concert de "musique d'avant-garde". (Pourtant, la séquence se déroulant le jour du concert était caustique à souhait.) On comprend aussi très vite comment la mission particulière (avec l'épouse rabaissée) va dégénérer... jusqu'au fameux anniversaire, qui ne peut pas bien se passer. Mais la colossale surprise mérite le détour et nous ramène à l'humour à froid du début.

   Du coup, j'ai plutôt aimé.

A Normal Family

   Le titre est bien entendu une antiphrase, puisque, par bien des aspects, cette famille, composée d'une grand-mère, de ses deux fils, de leurs épouses et de leurs enfants, frise l'anormalité dès le départ, avant de s'y plonger complètement, les apparences demeurant toutefois (presque) complètement lisses.

   Contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre ici et là, l'opposition des deux ménages (des deux frères) n'est pas une nouvelle version de Rich man, poor man. Si l'aîné, avocat pénaliste, est visiblement fortuné, le cadet, chef de service en chirurgie dans un hôpital, n'est pas un miséreux, loin de là. La véritable opposition se situe à un autre niveau : l'engagement, l'intégrité professionnelle. L'avocat, qui pourrait choisir de défendre de nobles et belles causes, accepte surtout des clients qui paient bien. De son côté, le chirurgien essaie de sauver tous ses malades, même ceux qui n'ont pas les moyens de payer.

   Leurs enfants semblent encore plus dissemblables. La fille de l'avocat, très émancipée, est une bonne élève, qui ambitionne de poursuivre ses études à Cambridge. C'est aussi une fêtarde, réputée bien tenir l'alcool... et une menteuse de première. Le fils du médecin, lui, est timoré, victime de harcèlement à l'école... et les coûteux cours particuliers payés par ses parents ne suffisent pas à améliorer ses résultats scolaires.

   Tout cela vole en éclat suite à deux faits divers : la mort d'un automobiliste colérique, renversé par un jeune chauffard en voiture de sport, et l'agression d'un SDF, une nuit, par deux adolescents.

   Le début du film ne fait intervenir que le premier fait divers. Le chauffard est défendu par le frère avocat, tandis que la fille de la victime est soignée dans le service du frère chirurgien.

   Là, vous vous rendez compte que je ne parle pas des épouses, qui pourtant jouent un rôle non négligeable dans l'intrigue. Je trouve les trois principaux personnages féminins très caricaturaux. L'épouse de l'avocat est en fait sa deuxième compagne. C'est l'archétype d'une "femme trophée" (version XXIe siècle) : elle est jeune, belle, cultivée, mais ses propos ne révèlent pas une grande intelligence. L'épouse du chirurgien est une (ancienne) travailleuse humanitaire, une figure très positive au début de l'histoire. Mais, à partir du milieu du film, son personnage évolue de manière grotesque (prélude à l'évolution, tout aussi grotesque, du personnage du mari). Quant à l'adolescente, je crois avoir rarement rencontré un jeune personnage aussi faux et détestable sur grand écran. L'actrice est plutôt bonne. Elle réussit à maintenir un peu d'incertitude au départ, mais quiconque a déjà fréquenté des ados comprend très vite ce que cache cette apparence BCBG.

   Finalement, c'est peut-être le personnage du gamin le plus intéressant. C'est une victime qui se mue en potentiel prédateur (enfin quelque chose de sociologiquement fondé dans la caractérisation ultra-schématique des personnages). Je trouve que le jeune comédien joue très bien le garçon mutique, dont on ne sait trop ce qu'il pense, même quand il a l'air d'être sincère.

   J'ai trouvé le film savoureux quand il met en scène les écarts (financiers, éthiques, culturels, sexuels...) entre les deux couples. En revanche, pour moi, il ne devrait pas y avoir de dilemme, alors que c'est tout de même le soubassement des lonnnnnnnngs atermoiements des deux couples. De surcroît, on sent venir le coup de théâtre final, après le second dîner. 

   Du coup, je suis sorti de là mitigé. C'est du bon boulot, bien filmé, bien joué, mais cela ressemble plus à la mise en scène d'une théorie plaquée sur des personnages qu'à la représentation d'une situation réelle.

Once upon a time in Gaza

   Quatre ans après Gaza mon amour, les frères Nasser (Tarzan et Arab) sont de retour avec une sorte de polar, dont la première partie s'apparente à un Le Caire confidentiel palestinien, tandis que la seconde a un air de Ça tourne à Manhattan.

   Il convient de ne pas arriver en retard, sous peine de rater le début, qui est très important. Le film commence par des propos de... Donald Trump (que je laisse à chacun le plaisir de découvrir). La suite est aussi marquée par la masculinité toxique, puisqu'on y voit des militants du Hamas procéder à des "funérailles patriotiques" (islamistes), certains de ces crétins tirant en l'air, à balles réelles, en pleine zone urbaine...

   ...et puis, soudain, on nous propose l'extrait de ce qui semble être un (mauvais) film de propagande, un film d'action faisant l'éloge d'un rebelle palestinien. C'est assez représentatif du style des réalisateurs, marqué par un certain engagement (la dénonciation du sort des Gazaouis) et de l'ironie, qui peut s'appliquer à ceux qui, en 2007-2010, étaient les maîtres de la bande de Gaza.

   La suite constitue donc un polar politico-social, qui tourne autour d'un commerce de bouche, une échoppe réputée pour la qualité de ses falafels... et que certains clients connaissent aussi pour le "petit bonus" que le patron met dans ses produits... pour peu qu'on soit prêt à payer plus cher. Le commerce fonctionne à deux : le patron, trafiquant sur les bords, et son unique employé, un ancien étudiant devenu expert dans la confection des sandwichs orientaux. Le Jordanien Majd Eid est très convaincant dans le rôle de ce patron obèse, gros fumeur, un peu magouilleur, qui s'est pris d'affection pour l'employé qu'il n'oublie pas d'exploiter. De son côté, le Syrien Nader Abd Ahlay apparaît sous plusieurs visages dans le film. Je ne peux pas en dire trop, mais ce comédien inconnu a une palette de jeu très étendue.

   Un troisième homme intervient dans cette histoire, un officier de police (en treillis), sans doute aussi membre du Hamas... et pas très regardant sur les méthodes utilisées. Le film sous-entend qu'il est sans doute corrompu. Quoi qu'il en soit, il est prêt à tout pour arriver à ses fins. Un événement choc clôt la première partie.

   Dans la seconde, on retrouve deux des trois protagonistes, liés au tournage du film de propagande dont on a vu un extrait au début. C'est toujours tendu sur le fond, mais le tournage comporte quelques moments savoureux. Je pense notamment au passage durant lequel on voit un des acteurs (déjà pas très content de devoir incarner un soldat israélien) refusant de jeter un drapeau palestinien. Le réalisateur essaie de lui expliquer de cela fait partie du rôle... tout comme le fait de faire tomber un enfant au sol, sous les yeux de son père, furieux et prêt à casser la figure aux membres de l'équipe. Il faut aussi discipliner les habitants du quartier, qui se mettent parfois à applaudir pendant que ça tourne !

   On se demande comment les réalisateurs vont conclure leur histoire. Ils choisissent une pirouette, tragi-comique, qui nous ramène au début du film.

   Même si celui-ci n'est pas exempt de défauts, je trouve qu'il constitue une œuvre très originale, forte sur le plan émotionnel.

samedi, 28 juin 2025

F1

   Salut. Moi, c'est Brad. Officiellement, j'ai 61 piges. Mais tout le monde me dit que j'en fais vingt de moins. Qu'y puis-je, après tout ? Ma gueule d'ange ravit les dames, ma voix caverneuse fait frémir les clitoris des kilomètres à la ronde et mon regard de braise pourrait incendier à lui seul toute la forêt varoise. Quant à mon torse et à mon abdomen, ils sont divinement sculptés. J'ajoute que je possède une longue, très longue... cicatrice.

   Celle-ci, hélas, n'est pas naturelle, elle est liée à mon dernier rôle, celui d'un pilote automobile sur le retour. Je le dois à Joseph Kosinski, un pote. Un jour, il m'a téléphoné :

- Salut Brad. Je viens de voir ton torse sublime dans One upon a time in Hollywood. Ça te dirait de foutre la honte à de jeunes cons arrogants, au volant d'un truc qui va très vite ?

- Ta proposition est intéressante, Joe, mais cela ressemble bigrement à ce que tu es en train de produire, avec Tom [Cruise].

- Sauf que là ce seront des bagnoles de course, mec ! Avec toi dedans, des caméras embarquées et plein de trucs technologiques pour montrer aux peigne-culs que la F1, c'est pas un sport d'abrutis !

- Présenté comme ça, c'est alléchant. Mais, dis-moi, il n'y a pas que des voitures de course dans ton film ?

- Bien sûr que non, man ! On y parle des valeurs familiales, d'amour, du désir de s'élever, de rivalité, d'entraide... et aussi de pognon, bien sûr !

- Bien sûr. Ton vieux pilote, là, il n'est pas trop coureur de jupons ?

Non, tout ça c'est du passé. Il court après bien autre chose. C'est même l'un des enjeux du film.

- Tu m'as quand même prévu une petite histoire d'amour ?

- Une grande même, si tu veux !

- Et l'amoureuse, elle est comment ?

- Canon.

- Évidemment. Mais encore ?

- Blonde, la quarantaine, divorcée...

- Ce n'est pas le genre groupie, au moins ?

- Non, elle ne pense quasiment qu'au boulot. Elle est d'ailleurs hyper-compétente... mais, que veux-tu, quand ses pas croisent ceux du héros, son regard s'illumine, ses lèvres s'humectent, sa poitrine se soulève, ses cuisses...

- OK, je vois le topo. Qu'y a-t-il d'autre dans ton film ?

- Des courses de bagnoles, un peu partout dans le monde : au Royaume-Uni, en Hongrie, en Belgique, en Autriche, aux Pays-Bas, en France, au Japon et, pour finir, aux Émirats arabes unis.

- Super, on va voir du pays !

- Et tu ne connais pas la meilleure : j'ai obtenu la participation, en tant que figurants, de Lewis, Max, Oscar, Charles, Lando...

- Fiouuu, ça promet !

- Et tu verras, au niveau du son, ça va dépoter. Dans les salles bien équipées, les spectateurs sentiront le sol vibrer sous leurs pieds !

- Banco, Joe ! Je vais de ce pas doubler mes séances de Pilates.

23:50 Publié dans Cinéma, Sport | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 26 juin 2025

L'argent ne fait pas tout, au rugby

   Samedi se jouera la finale du Top14, le championnat de France de rugby. Seront opposées les deux équipes considérées comme les meilleures de cette année : le Stade Toulousain (qui a fini premier de la saison régulière) et l'Union Bordeaux-Bègles (qui a terminé deuxième... mais a remporté la Coupe des champions, après avoir éliminé Toulouse en demi-finale).

   Sur le plan économique, la présence du Stade en finale semble des plus logiques, puisque ce club a le plus gros budget du Top14, avec environ 50 millions d'euros. (C'était 39 millions en 2021-2022.) L'UBB arrive loin derrière, en septième position, avec quelque 34 millions d'euros. Voyons ce qu'il en est des autres clubs français s'étant distingués cette année. (Ce sont ceux qui se sont qualifiés pour les phases finales.)

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   Sur le schéma ci-dessus, chaque numéro correspond au classement du club en terme de budget. Ainsi, lors des barrages (sortes de "demi quarts de finale"), Bayonne (4e de la saison régulière), a éliminé Clermont (5e), dont le budget était pourtant plus élevé d'environ 20 % (35,5 millions contre 29,6). En demi-finale, la logique, tant économique que sportive, s'est imposée, même si les Bayonnais n'ont pas démérité.

   Dans l'autre partie de tableau, l'invité surprise des barrages était Castres, l'antépénultième budget du Top 14 (malgré le soutien des laboratoires Pierre Fabre). Le club tarnais, 6e de la saison régulière, avait arraché le dernier billet qualificatif, coiffant au poteau le Stade Rochelais, 5e budget du Top14. Les Castrais ont été battus par le Racing Club de Toulon, 4e budget du Top14 et troisième de la saison régulière.

   En demi-finale, les quatre-cinq millions de budget supplémentaires du club varois n'ont pas suffi, face à Bordeaux-Bègles. De gros afflux financiers n'ont pas suffi non plus au Stade Français (2e budget du Top14) et à Lyon (3e budget), qui ont terminé respectivement 12e et 11e de la saison régulière, le LOU ayant toutefois disputé la finale du Challenge européen (la "petite" coupe d'Europe), perdue contre les Anglais de Bath.

   La finale de samedi permettra de conclure sur cet aspect : soit l'expérience et la richesse du banc permettront au Stade Toulousain de l'emporter (auquel cas on pourra disserter sur le poids de l'argent dans le rugby professionnel : il y a 16 millions de plus, côté budget, chez les Toulousains), soit l'UBB confirmera son accession au plus haut niveau et le fil rouge de ma chronique en sortira renforcé.

   Ces choses dites, sur le fond, les sommes qui circulent dans le rugby professionnel ne sont pas du même niveau que celles que l'on trouve dans le football. Ainsi, si l'on compare les budgets des clubs du Top14 à ceux des clubs de Ligue 1, on s'aperçoit que le club de rugby le plus riche (le Stade Toulousain) a la masse financière de Brest ou Saint-Étienne (14e et 13e budgets). Quant à Bordeaux-Bègles, ses 34 millions le placent entre Montpellier et Auxerre (15e et 16e budgets), loin, très loin du premier budget de Ligue 1, celui du PSG : 860 millions d'euros... à comparer aux 472 millions que représentent, cumulés, les budgets des 14 clubs de l'élite du rugby hexagonal.

Amélie et la métaphysique des tubes

   Ce film d'animation adapte la fiction autobiographique d'Amélie Nothomb (qui vient d'être rééditée en livre de poche). Jadis, l'auteure d'Hygiène de l'assassin avait imaginé raconter sa vie de 0 à 3 ans. Ce présupposé a été conservé dans l'adaptation, où quelques modifications de détail ont été opérées (notamment dans la chronologie des événements). L'essentiel a été préservé et les auteurs ont tenté de donner une existence visuelle aux doux délires de l'écrivaine.

   A celles et ceux qui ne connaîtraient pas le roman d'origine, il convient d'abord d'expliquer ce que sont ces tubes : une incarnation de Dieu, pour lequel se prend, dans un premier temps, le bébé. Des liens sont établis avec d'autres tubes remarquables, comme le biberon (uniquement dans le roman), le corps d'un aspirateur, des (emblèmes de) carpes...

   Notons que l’œuvre prend parfois une tournure féministe, puisque, dans le Japon du début des années 1970 (où se sont installés les parents d'Amélie), les garçons sont clairement privilégiés par rapport aux filles, comme le prouve la fameuse journée des carpes... mais la (très) petite Amélie ne va pas se laisser faire... surtout pas par son frère aîné, qui n'arrête pas de l'embêter.

   Les personnages masculins (principalement ceux du père et du grand frère) sont toutefois au second plan. L'intrigue insiste sur la relation quasi fusionnelle qui naît entre Amélie et la domestique japonaise de ses parents, qui devient une sorte de mère de substitution. Leurs relations sont l'occasion pour la gamine (et les spectateurs) de découvrir certains pans de la culture japonaise. Cela nous vaut notamment une très belle séquence autour des livres.

   Le roman comme le film ne masquent pas ce qu'ont subi les civils japonais à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à travers le passé de la domestique et celui de celle qui, dans le film, est la propriétaire désargentée de la maison où résident les parents d'Amélie. On a un peu atténué le côté agressif de celle-ci et l'on a évité de représenter les scènes les plus horribles, qui sont pourtant détaillées dans le roman. On a donc voulu faire une œuvre visible par les petits comme les grands.

   L'animation rend hommage aux classiques japonais. Les enfants ont de grosses têtes et de grands yeux. Un soin particulier a été apporté à la représentation de l'univers culinaire et à tout ce qui touche à la nature (animaux comme végétaux). La petite Amélie se découvre un lien particulier avec l'eau et c'est mis en scène avec inventivité.

   Cela ne dure qu'1h20 et je me suis régalé... tout seul dans la salle !

   P.S.

   Voici la couverture de la nouvelle édition de poche du roman :

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   Il est plus noir que le film d'animation, notamment parce qu'il évoque davantage les pulsions suicidaires de l'héroïne.

mardi, 24 juin 2025

Le Répondeur

   Cette comédie sociétale fonctionne sur des bases semblables à d'autres, comme Le Jouet : un homme devient (volontairement) l'instrument d'un autre, le premier étant issu d'un milieu beaucoup plus modeste que le second.

   Les deux premières scènes nous mettent dans le bain, avec Baptiste travaillant comme téléopérateur, puis tentant de percer, dans un "seul en scène". Dans les deux cas, le personnage fait montre de ses qualités d'imitateur. Attention toutefois : le comédien Salif Cissé ne réalise pas les imitations, qui sont dues à d'autres personnes. Un (habile) montage numérique fait croire à la supercherie (notamment quand Baptiste se met à répondre au téléphone à la place de l'écrivain Pierre Chozène). Le talent du comédien est d'avoir assimilé les mimiques et les postures des personnes dont il est censé reproduire la voix. Il est parfaitement crédible en imitateur.

   Cela aurait pu donner naissance à quantité de situations cocasses, mais la réalisatrice Fabienne Godet a décidé d'orienter son film du côté du conte moral. Elle veut traiter d'abord des relations familiales, d'amour et d'amitié. Son intrigue est fondée sur le mensonge : l'écrivain fait croire à ses proches qu'il leur répond au téléphone et son employé très spécial se garde de révéler à sa fille quel rôle il joue pour son père. 

   Baptiste ne se contente pas de suivre les instructions qui lui sont données. Il prend quelques initiatives. L'histoire semble d'abord nous dire que d'un (petit) mal peut surgir un (grand) bien... mais la vérité finit par rattraper tous les personnages.

   C'est agréable à suivre, parfois drôle, notamment dans la peinture du monde culturel germanopratin parisien (écrivains, éditeurs, journalistes, peintres, galeristes...). Toutefois, à partir du moment où Baptiste, engagé par Pierre, commence à officier, c'est très prévisible. J'ai aussi noté une grosse invraisemblance : quand Baptiste commence à (longuement) poser pour Elsa, il a le portable du père avec lui, auquel il est censé répondre, en imitant sa voix. Or, comme par miracle, jamais celui-ci ne sonne pendant ces séances de pose.

   C'est une comédie "sympatoche", pas vulgaire, dans l'air du temps.

16:47 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

lundi, 23 juin 2025

Enquêtes au paradis

   Ce lundi, France 2 commence la diffusion d'une nouvelle série, dérivée de Meurtres au paradis. Il y a quelques mois, on avait déjà eu droit à la décevante Mystères au paradis (Beyond paradise), qui a pour héros l'un des anciens inspecteurs de la série principale, retourné dans son Angleterre natale. Cette fois-ci, c'est en Australie que le spin-off a été tourné, avec une protagoniste inédite, l'inspectrice Mackenzie Clarke, interprétée par Anna Samson.

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   Cette comédienne (inconnue au bataillon) est une Australienne d'origine britannique, ce qui a dû peser dans son recrutement, le personnage qu'elle interprète évoluant entre les deux pays. Pour une raison qu'on ignore au début de la saison 1, elle a quitté sa petite ville d'origine (une station balnéaire de la côte sud-est de l'Australie, entre Sydney et Wollongong) six ans auparavant.

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   Dans le premier épisode (diffusé ce lundi), Un meurtre impossible, l'héroïne est de retour au pays, là aussi pour une raison qu'on ignore. (Dans la version originale, la série a pour titre Return to paradise.) Le lien avec la série mère est établi grâce à un coup de fil passé à son supérieur, au Royaume-Uni, dans lequel les fans reconnaîtront l'inspecteur Jack Mooney, qui a officié pendant trois saisons à Sainte Lucie.

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   Celle que l'on surnomme "Mac" va devoir prolonger son séjour en Australie, où elle n'est pas forcément bien accueillie par ceux qui la connaissent. Elle va s'intégrer à l'équipe de police locale, composée de personnages hauts en couleur : le cheffe de poste est assez autoritaire, l'autre inspecteur est un sympathique barbu, bedonnant, pas très brillant enquêteur. Ils sont assistés par un agent d'origine maorie et une "volontaire civile", une enseignante retraitée habilitée à aider les forces de l'ordre. Prénommée Reggie, elle est un peu la commère du poste de police.

   A cette petite équipe se joint, de temps à autre, le médecin-légiste, un bogosse musclé (et surfeur)... qui n'est autre que l'ex-petit ami de l'héroïne.

   Dans le deuxième épisode, intitulé Raide mort, les policiers enquêtent sur le décès suspect d'un influenceur, à l'issue d'une course locale. Le mystère n'est pas très difficile à éclaircir (contrairement à celui du premier épisode), mais l'intérêt réside dans les méthodes employées par Mac. Cette jeune femme est brillante, tenace, obsédée par le moindre détail. Elle n'est cependant pas très douée pour les relations humaines. Ses interactions avec ses collègues comme avec les autres habitants de la ville ne manquent pas de saveur.

   C'est aussi au cours de cet épisode que l'on découvre un nouveau personnage important, Frankie... un chien, plus précisément une chienne, de race Kelpie :

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   L'animal est adorable, très attachée à Mac.

   Dans les semaines à venir, les épisodes 3 à 6 de la saison 1 seront diffusés. Dans l'épisode 3 (Au bout du rouleau), dont l'intrigue a pour cadre un salon de coiffure, l'enquêtrice va devoir faire preuve de toute sa sagacité pour parvenir à démontrer comment l'assassin a commis son crime. Même si la conclusion est un peu "tirée par les cheveux", elle ne manque pas de saveur.

   Dans l'épisode 4 (Un Climat mortel), les policiers doivent élucider le meurtre d'un activiste écologiste. L'un des indices clés est quelque peu... odorant :

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   Dans l'épisode 5 (Le Tir du Bushranger), il est question d'une partie de bowling en plein air, un jeu à mi-chemin entre le curling et la pétanque, qui se joue sur... du gazon. L'intrigue fait intervenir une légende locale, celle d'un bandit de grand chemin qui redistribuait aux pauvres une partie de ce qu'il volait aux riches. (Cela semble inspiré de la vie d'un certain Ned Kelly.)

   Dans le sixième et dernier épisode de la saison 1 (Le Fantôme de la mine), Mac et ses collègues tentent de résoudre un problème en apparence insoluble : le faux suicide d'un homme enfermé à double tour dans une pièce ne disposant que d'une issue. Ce meurtre en chambre close est un classique des fictions policières. L'enquête est menée tambour battant par Mac, attentive au moindre détail.

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   J'aime beaucoup la manière dont la comédienne incarne cette policière atypique. Elle est d'une beauté peu classique, avec son vissage osseux, et elle porte avec beaucoup d'élégance le gilet de costume. C'est évidemment à écouter en version originale sous-titrée, notamment pour profiter des accents.

   A la fin de cette saison, l'héroïne hésite à retourner à Londres. En Australie, ils ont déjà eu droit à la saison 2. J'espère qu'elle débarquera bientôt sur la télé publique.

samedi, 21 juin 2025

Les Mots qu'elles eurent un jour

   ... mais qui ont été perdus. C'est ainsi qu'on pourrait compléter le titre de ce documentaire consacré à une vingtaine de "moudjahidate", des indépendantistes algériennes qui avaient été emprisonnées, durant la Guerre d'Algérie (1954-1962) .

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   Elles avaient été filmées en 1962, à leur sortie de prison, mais les bobines avaient disparu. Certaines ont été retrouvées par hasard, formant un corpus d'environ 40 minutes, mais sans le son (enregistré à part, à l'époque). Depuis une douzaine d'années, le documentariste Raphaël Pillosio mène l'enquête, dont le déroulement et les résultats sont présentés dans ce film.

   Les extraits du matériau de 1962 alternent avec d'autres images d'archives (notamment d'actualités anciennes) et des entretiens réalisés au XXIe siècle.

   Ces femmes (en 1962) sont jeunes, toutes vêtues "à l'occidentale", mais d'origines et de cultures différentes : arabes, berbères, pieds-noirs, musulmanes, chrétiennes, juives, athées. Celles qui ont été retrouvées, des années après, et qui ont accepté de témoigner, disent avoir voulu "faire la révolution" ou tout simplement se battre contre la domination française. Certaines d'entre elles évoquent l'aspect féministe de leur engagement, le point sur lequel "l'Algérie nouvelle" (indépendante) les a sans doute le plus déçues, puisque les mecs qui sont arrivés au pouvoir ont vu d'un mauvais œil l'activisme de celles qui étaient pour eux d'abord des compagnes et des (futures) femmes au foyer.

   Vous aurez d'ailleurs peut-être remarqué, sur la photographie qui illustre ce billet, la présence de deux hommes (le troisième étant sans doute un technicien), qui ne s'expriment jamais, mais semblent surveiller ce qu'il se passe pendant ce tournage militant. (On finit par apprendre que toute l'équipe est constituée de sympathisants de la cause algérienne, sans doute marxistes.) Ils avaient été envoyés par le nouveau pouvoir algérien, pour rapatrier au plus vite les prisonnières de métropole. Le réalisateur raconte comment il a tenté de retrouver l'un des deux hommes.

   N'étant pas parvenu à mettre la main sur la bande son, il a pensé pouvoir compter sur les souvenirs des participantes. Mais, 50 à 60 ans plus tard, ils se sont le plus souvent effilochés. Du coup, il a eu recours à des spécialistes de lecture labiale, avec des résultats mitigés. (En tout cas, les échanges filmés se sont tenus en français.)

   Certains moments sont poignants, comme l'évocation qu'une séance de torture (par des militaires français). On regrette d'autant plus que ces femmes n'aient pas été davantage interrogées sur les conséquences de leurs actes. Je crois qu'environ la moitié de celles qui s'expriment ont, à un moment ou à un autre, été des porteuses/poseuses de bombes. C'est la principale limite de ce documentaire au demeurant fort intéressant.

   Peut-être qu'un jour, le recours à une intelligence artificielle permettra de décrypter intégralement les conversations de 1962, ces bobines constituant une matière brute de grand intérêt.

vendredi, 20 juin 2025

A l'instinct

   C'est le titre d'une nouvelle série policière, dont l'épisode pilote avait été diffusé en 2023, sur France 2. (Il est reprogrammé vendredi 27 juin prochain.) Deux épisodes inédits nous sont proposés ce mois-ci, avec une distribution modifiée.

   Commençons par l'épisode pilote, accessible en ligne (comme les suivants, d'ailleurs). Il met en scène la rencontre entre deux capitaines presque diamétralement opposés, le Guyanais Téva Royer et la Métropolitaine Ana Kerjouan. Le premier est noir, instinctif, calme, attentif aux informations données par la nature (et pas fermé au surnaturel). La seconde est blanche, cartésienne, branchée technologie, nerveuse et pointilleuse quant à la procédure.

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   J'ai eu un peu peur au début. J'avais l'impression qu'on me proposait un énième duo d'enquêteurs mal assortis, destinés finalement à bien s'entendre (voire plus si affinités). De plus, je trouvais un peu gênante cette forme d'essentialisation, l'homme noir paraissant surtout physique, la femme blanche plus intellectuelle. Mais le binôme d'acteurs (Christopher Bayemi - Charlie Bruneau) emporte le morceau. Ils sont très bons, percutants et le scénario est suffisamment élaboré pour maintenir l'attention.

   La semaine dernière, en regardant le nouvel épisode, En eaux profondes, j'ai eu la surprise de constater que la distribution avait été modifiée. Exit la capitaine nantaise et toute son équipe. Bayemi/Royer, installé en région lyonnaise, travaille désormais avec une commandante brute de décoffrage (qui cache un cœur tendre, bien entendu), incarnée par Juliette Plumecocq-Mech. Elle, je l'adore et je trouve que son association avec Christopher Bayemi fonctionne particulièrement bien.

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   L'intrigue est tortueuse : deux accidents mortels se produisent, à un an d'intervalle, au même endroit. Ce n'est évidemment pas un hasard, mais il va falloir beaucoup d'obstination aux enquêteurs pour dénouer les fils de l'écheveau. Un étrange centre thérapeutique semble jouer un rôle dans cette histoire, tout comme la pratique de l'hypnose.

   Ce vendredi 20 juin est diffusé le troisième épisode, La Mort en marche. On retrouve avec plaisir le binôme formé la fois précédente, avec des liens qui commencent à se tisser... mais pas comme dans les autres séries policières auxquelles nous avons été accoutumés. L'intrigue est très mystérieuse, faisant intervenir des croyances traditionnelles des Antilles (plus précisément d'Haïti), notamment le vaudou. C'est habilement mis en scène, sans effet tape-à-l’œil et l'on a droit à une scène très forte entre les deux héros.

   Ce n'est pas tout à fait du niveau d'Astrid et Raphaëlle, mais c'est bien meilleur que HPI, Capitaine Marleau et les demi-bouses du samedi soir.

mardi, 17 juin 2025

The Beekeeper

   Ce film d'action a été tourné pour une plateforme. Il y a été mis en ligne l'an dernier, mais je ne l'ai vu qu'après sa récente diffusion sur TF1, en replay. Son titre, que l'on peut traduire par "L'Apiculteur", est à double sens. Au sens premier, il désigne un éleveur d'abeilles, comme l'énigmatique Adam Clay, qu'incarne un Jason Statham barbu, au début de l'histoire.

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   Il vit à l'écart du monde, entretenant juste quelques contacts avec la propriétaire des locaux qu'il occupe, une enseignante à la retraite incarnée par Phylicia Rashad, qui fut jadis la délicieuse Clair Huxtable, dans le Cosby Show.

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      Pas de bol pour Adam : le soir où sa proprio l'invite à dîner, il la retrouve morte. Elle n'a pas supporté de se faire dépouiller (elle et l'association caritative dont elle s'occupe) par d'arrogants et habiles escrocs en ligne. Adam décide de la venger.

   Pas de bol pour les escrocs : Adam est un (ancien) Beekeeper, un impitoyable tueur employé naguère par les services secrets états-uniens pour "faire le sale boulot", en toute discrétion.

   A partir de là, David Ayer (réalisateur, entre autres, du premier Suicide Squad et de Fury) nous emporte dans une farandole de violence vengeresse. La première séquence ultra-vitaminée nous conduit dans l'immeuble qui héberge le groupe d'escrocs numériques... qui ne sont que les petites mains d'une entreprise de plus grande envergure, à laquelle Adam décide de s'attaquer aussi. Cela nous vaut d'autres moments d'adrénaline, au QG de la boîte d'escrocs, mais aussi à la campagne, dans une grange, transformée en zone de combat/torture/meurtre (et plus si affinités).

   Dans le même temps, le héros est pourchassé par le FBI, pour lequel travaille... la fille de l'enseignante décédée. Cruel dilemme pour elle (et son partenaire) : elle finit par trouver sa croisade justifiée, mais elle n'en approuve pas les méthodes. Cette policière est incarnée par Emmy Raver-Lampman, qu'on a pu voir dans Blacklight, aux côtés de Liam Neeson. Contrairement à ce dernier, Statham pète la forme et, en un peu plus d'1h30, il va corriger aussi bien des agents de sécurité, des militaires, des commandos du FBI qu'une bande de mercenaires déjantés... sans oublier le plus dingo de ses adversaires, que Clay, officiellement retraité de la CIA, affronte dans une station service : son successeur.

   L'histoire se conclut au cours d'un anniversaire de prestige. Statham croise sur sa route Jeremy Irons et Jemma Redgrave. Tout ce petit monde surjoue un peu mais, franchement, les scènes d'action sont de très bon niveau.

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lundi, 16 juin 2025

Life of Chuck

   Cet étrange biopic (construit antéchronologiquement) est consacré à un illustre inconnu, Charles Chuck Krantz, dont les photographies illustrent quantité de publicités dans les médias états-uniens (notamment au Nevada) de plus en plus présentes à mesure que le monde s'effondre. Toutes ces publicités le remercient pour "ces 39 années". On pense à un départ à la retraite, celui de  ce comptable qui semble sorti tout droit d'un film des frères Coen. Mais il paraît bien jeune pour un futur retraité...

   En attendant d'éclaircir ce mystère, on est plongé dans un monde apocalyptique, où toutes les catastrophes possibles surviennent dans un court laps de temps. C'est évidemment peu vraisemblable, tout comme l'incroyable concentration de connerie humaine chez les parents d'élèves que rencontre un professeur des écoles dévoué (Chiwetel Ejiofor, sans doute tellement emballé par son rôle que, dans la foulée, il a signé pour le dernier Bridget Jones). C'est aussi cocasse, quand l'un des parents révèle ce qui lui manque le plus depuis la coupure d'internet...

   Comme il s'agit de l'adaptation d'une nouvelle de Stephen King (déjà à l'honneur cette année avec The Monkey), on se dit qu'il y a anguille sous roche, le fantastique étant peut-être à l’œuvre... A la fin de cet acte III (proposé donc en premier), les spectateurs les plus vigilants auront compris à quoi correspond ce qu'on vient de nous montrer à l'écran. Allez, comme je suis d'humeur généreuse...

 

 

UN INDICE

 

 

 

CHEZ VOUS

 

 

 

 

AU BAS DE VOTRE ÉCRAN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mulholland Drive

 

   Durant l'acte II, on découvre Chuck à l'âge adulte, en déplacement professionnel. De manière totalement inattendue, le film prend l'aspect d'une comédie musicale... faussement improvisée. (Je ne suis pas un gros fan de La La Land...) La séquence dégage tout de même une belle énergie... et, surtout, quand on sait de quoi il retourne, au fond, elle est poignante. Dans le rôle titre, Tom Hiddleston réussit à faire oublier qu'il a interprété Loki (et je trouve qu'on lui a fait une tête un peu à la Matthew McConaughey).

   L'acte I remonte à l'enfance et à l'adolescence de Chuck, en compagnie de ses grands-parents. J'ai beaucoup aimé cette partie-là, où j'ai trouvé tous les comédiens impeccables, des plus âgés (Mark Hamill et Mia Sara) aux plus jeunes (notamment Benjamin Pajak). Le mystère semble dans un premier temps s'épaissir, d'autant que d'étranges liens avec l'acte III nous sont proposés. La voix-off contribue à éclaircir définitivement les choses pour les plus lents des esprits.

   Au final, la construction inversée se justifie par la volonté de ne pas terminer l'histoire par sa partie la plus sombre. Cela nuit un peu au suspens, mais les éléments disséminés ici et là pour dérouter les spectateurs entretiennent l'intérêt. Cela donne un beau film dans tous les sens du terme : plaisant à voir au plan visuel et baignant dans une belle humanité, avec des valeurs simples, en dépit de la complexité du monde. C'est quasiment une œuvre philosophique.

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samedi, 14 juin 2025

Vacances forcées

   Cette comédie française "familiale" commence par des images d'archives, notamment celles des premiers congés payés, à l'époque du Front populaire (le vrai, pas ses pâles copies). C'est d'ailleurs sous ce gouvernement de gauche que fut créée la SNCF, où travaille (de nos jours) le héros de l'histoire, Cyril (Clovis Cornillac), le roi de l'apéro et de la glande, qui est encore en arrêt maladie... juste avant de partir en congés ! (Mais, méfions-nous, les apparences sont parfois trompeuses...)

   Au début, j'étais inquiet. Les scénaristes nous ont bricolé trois groupes de personnages assez antipathiques (surtout dans la première partie). Cyril a trois enfants, l'aîné (qui ressemble à Adam Driver jeune) commençant à déraper. Heureusement qu'il y a son épouse, incarnée par Aure Atika (scandaleusement bien gaulée), qui gère, comme on dit.

   C'est aussi le cas de Daphné, l'épouse angoissée d'Eric le dentiste des stars, qui, lui, pense essentiellement à son boulot. Elle fait tenir leur couple, gardant un lien privilégié avec son fils diagnostiqué HPI (une véritable tête à claques ambulante). Notons que les parents sont interprétés par deux très bons acteurs : Pauline Clément (qui a des airs de Frédérique Bel) et Bertrand Usclat (qu'on pourrait presque prendre pour Benjamin Lavernhe).

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   Ces deux familles vont se retrouver, le temps des vacances, dans la même (superbe) villa... où les rejoint un étrange duo, composé d'un éditeur pédant (Laurent Stocker, excellent comme d'hab') et d'une influenceuse apprentie-écrivaine (Claïna Clavaron, une révélation).

   Chacun de ces groupes pensait se retrouver seul dans la villa. Dans des circonstances que je me garderai de dévoiler, tout ce beau monde est amené à cohabiter. Les tensions intrafamiliales ressortent, auxquelles s'ajoutent les querelles entre groupes, à fort soubassement social : la villa fait se côtoyer des personnes qui, aujourd'hui, en France, ne se croisent plus, ne se parlent (quasiment) plus : petite bourgeoisie de banlieue, grands bourgeois de Neuilly, intello germanopratin et vedette des réseaux "issue de la diversité", comme on dit.

   Je dois reconnaître que, même si la plupart des personnages m'ont souvent agacé, leurs interactions m'ont beaucoup amusé. C'est vraiment bien joué, avec de bons dialogues, des situations cocasses. Au fur et à mesure se produit ce qu'on pressent depuis le début : le rapprochement entre ceux qui, de prime abord, ne s'appréciaient pas. Pour cela, il faut attendre que les faiblesses de chacun(e) soient dévoilées.

   Le scénario est donc cousu de fil blanc... jusqu'au dernier quart d'heure. Une  péripétie inattendue se produit, qui donne plus de profondeur à l'intrigue.

   Je suis sorti de là de très bonne humeur.

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mardi, 10 juin 2025

Mission : Impossible - The Final Reckoning

   Il a fallu attendre presque deux ans pour que la suite de Dead Reckoning sorte sur nos écrans. Le film commence là où se terminait l'autre, tout en rappelant les éléments clés de l'intrigue, histoire de rassurer celles et ceux parmi les spectateurs qui auraient raté/oublié la première partie. (Elle vient d'être diffusée sur M6.)

   Comme ce n'est pas mon cas (et que je venais de revoir la partie 1), j'ai trouvé le premier quart d'heure un peu redondant, tout comme les explications ajoutées plus loin, en divers endroits, et qui rappellent tel ou tel aspect du précédent volet. Globalement, les 30-45 premières minutes me sont apparues trop verbeuses... et puis il n'y a plus Ilsa Faust (Rebecca Ferguson)...

   Pour moi, le film décolle vraiment à partir du moment où il est question du sous-marin échoué. Toute la séquence aquatique est virtuose (à voir sur très grand écran, de préférence). Même si les effets spéciaux sont (abondamment) mis à contribution, là, McQuarrie nous rappelle qu'il sait mettre en scène, tandis que Tom Cruise repousse ses limites d'acteur, une fois de plus.

   L'autre grand moment est la poursuite en avion. Cette fois-ci, les cascades sont faites à l'ancienne et, à plusieurs reprises, il semble que Cruise se mette presque autant en danger que son personnage. J'ai aussi adoré cette séquence parce qu'elle est le théâtre de la mort d'un type infect, qui ne décède pas de manière shakespearienne, mais pitoyablement. Je trouve que c'est très bien vu.

   C'est donc un film spectaculaire, qui use et abuse du juste-à-temps, jouant avec les nerfs des spectateurs : quand on pense que le héros a surmonté la principale difficulté, en voilà une nouvelle, aussi insurmontable, qui lui tombe dessus... L'histoire prend un tour métaphorique : de la même manière qu'Ethan Hunt voue sa vie à sauver l'humanité et les personnes qu'il aime, Tom Cruise acteur a voué sa vie à divertir l'humanité et les personnes qu'il aime. Cette autocélébration, pour narcissique qu'elle soit, ne manque pas de souffle.

   P.S.

   Ce n'est pas la première fiction à mettre en scène une intelligence artificielle malveillante. Étant donné que ce genre de programme s'entraîne sur les productions humaines accessibles en ligne, il serait bon que quelques créateurs aient la bonne idée d'imaginer des fictions dans lesquelles les IA sont au service de l'humanité, histoire que, dans quelques dizaines d'années, on ne considère pas les romans et les films de la fin du XXe et du début du XXI siècle comme des prophéties autoréalisatrices...

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Rumours (Nuit blanche au sommet)

   Le sommet en question n'est pas celui d'une montagne. Il s'agit d'une réunion du G7 (le "club" des sept pays les plus industrialisés... enfin, ceux qui l'étaient à l'époque où ce type de réunion a été créé, dans les années 1970), qui se déroule dans une zone marécageuse, en Allemagne. Pour choisir les protagonistes de son histoire, le trio de réalisateurs a mélangé deux sommets du G7 (ayant eu lieu outre-Rhin), celui de 2015 (le 41e), auquel étaient présents Angela Merkel, François Hollande, Shinzo Abe et Donald Tusk, et celui de 2022 (le 48e), auquel ont participé Ursula von der Leyen, Joe Biden et Justin Trudeau.

   Ces dirigeants occidentaux, à l'identité à peine masquée, sont donc les "héros" de cette comédie politique qui mélange les genres. On a droit à de la Telenovela, de l'épouvante, du polar... Je crois que le projet des réalisateurs était de mettre les grands de ce monde dans la position d'une bande d'adolescents ou de citoyens (très) lambdas, confrontés à des événements exceptionnels.

   En effet, très vite après la rencontre des sept, le service de sécurité comme les employés du château de plaisance disparaissent. En revanche, d'autres êtres, plus inquiétants, débarquent...

   Sur le papier, avec la distribution qui a été recrutée, c'était sans doute alléchant... mais, Dieu que le résultat est mauvais ! La plupart du temps, ce n'est même pas drôle, les dialogues sont extrêmement mal écrits et l'intrigue est chiante comme la pluie.

   Les deux meilleurs/seuls gags se trouvent au début. Le premier survient lors du tour de table, quand chaque participant évoque un moment de sa vie au cours duquel il a eu honte. Ce que raconte le Premier ministre italien (qui a le physique de Berlusconi, mais pas son tempérament) ne manque pas de saveur. Un peu plus loin, Charles Dance (qui incarne le président des États-Unis) a réussi à me faire sourire en Joe Biden. Mais c'est à peu près tout.

   C'est globalement extrêmement caricatural (sans être drôle). Le Premier ministre canadien (dans lequel on est censé reconnaître Trudeau, sans qu'il lui ressemble le moins du monde) est un bogosse qui transforme ses collègues féminines en véritables midinettes. Le président des États-Unis mange avec une serviette aux couleurs du drapeau de son pays... La Première ministre britannique se veut rigoureuse et organisée, l'Italien un peu emprunté, le Japonais idéaliste, la chancelière allemande ayant plutôt le beau rôle... et ça tombe bien, puisque son interprète, Cate Blanchett, coproduit le film !

   Le plus dégradant des traitements est réservé au président français, Denis Ménochet faisant ce qu'il peut (maladroitement) pour incarner François Hollande. Presque tous les ridicules lui sont attribués, le petit gros faisant figure de gentil crétin dans cette auguste assemblée où les personnalités anglo-saxonnes (allemandes incluses) sont minces et belles.

   J'aurais dû me méfier avant d'aller voir ce film : il est dû au même trio qui a "pondu", naguère, La Chambre interdite, archétype d’œuvre pour cultureux.

   Si je devais établir un anti-palmarès, je crois que ce film-ci serait bien parti pour décrocher non pas le Riton, mais le Super-étron de l'année 2025.

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dimanche, 08 juin 2025

Ballerina

   Il ne s'agit pas d'un remake du film d'animation sorti il y a un peu moins de dix ans, mais d'un dérivé de John Wick (pas la suite du Chapitre IV, plutôt une histoire parallèle à Parabellum, le troisième volet de la série).

   Cela commence de manière intéressante. Sur une île mystérieuse, dotée d'une grande demeure, un papounet (qui a des airs de Keanu Reeves jeune) vit avec sa fille chérie, celle-ci fascinée par une boîte musicale incluant une danseuse d'opéra. Mais, bientôt, débarque une bande de mecs armés, masqués et musclés... qui ne sont visiblement pas venus écouter du Tchaikovsky. Cela nous donne une bagarre survitaminée comme je les aime. (Il convient toutefois de ne pas se laisser bercer par la chorégraphie mortuaire de cette introduction : on y entend certaines informations capitales pour la suite de l'intrigue.)

   La gamine, prénommée Eve, se retrouve plus tard dans le dortoir d'une école de théâtre russe, avec d'autres jeunes filles passionnées par le ballet, comme elle. Cette école est en fait une dépendance de la redoutable Ruska Roma, qui, sous couvert de former des danseurs classiques, recrute ses plus redoutables tueurs. Durant la deuxième partie du film, on voit donc la petite Eve chier sa race, sous le regard à la fois tendre et impitoyable de la Directrice (Anjelica Huston). Cette histoire de gamine tombée plus bas que terre et qui, à la force du poignet des mollets, va se redresser et réclamer vengeance, est assez rebattue. J'ai quand même trouvé cette version féminine séduisante, avec, dans le rôle principal, Ana de Armas, très badass, surtout quand elle dézingue d'horribles masculinistes. (J'ai pu constater que les formateurs de la Ruska Roma, tout comme moi, donnent ce -pertinent- conseil aux demoiselles se retrouvant confrontées à un mec hostile : viser les couilles. Il y a donc quelques éléments de réalisme dans cette intrigue où pourtant les invraisemblances foisonnent.) La conclusion de la formation d'Eve est mise en scène de manière percutante.

   La troisième partie montre l'apprentie tueuse dans ses premières missions... en parallèle desquelles elle mène sa propre enquête. La voilà donc qui se met à fréquenter les hôtels du cartel criminel de La Table... et l'on n'est pas déçu du résultat.

   La quatrième partie, la plus virtuose, nous mène au cœur de l'Europe. Un village des Alpes autrichiennes sert de refuge à la plus impitoyable des mafias, qui constitue une sorte de secte. La première bonne idée est d'avoir fait de tous les habitants du village des membres de cette mafia. (Soyez attentifs à ce qu'on voit d'une école...) La seconde est d'avoir situé les scènes à trois niveaux : dans les rues, dans les bâtiments et sous terre. Cela donne une belle diversité de situations de combat. (Après ce film, on ne voit plus les patins à glace de la même manière...) Les bastons sont impeccablement chorégraphiées (même si le réalisme cède un peu trop souvent le pas à la volonté de faire un plan spectaculaire)... et émaillées d'humour. L'un des meilleurs moments voit Eve découvrir un truc "très cool" dans l'arsenal de la mafia. Son utilisation rend l'intrigue incandescente... et certaines scènes graphiquement superbes. On retrouve la patte de Len Wiseman, qui  réalisa jadis l'excellent Die Hard 4.

   Et John Wick dans tout ça ? Eh bien, il fait deux apparitions, l'une plus marquante que l'autre. Les scénaristes nous ont fort opportunément épargné l'histoire d'amour entre un mec et une fille qui a 20-25 ans de moins que lui. Leur relation prend plutôt le tour d'un rapport maître/élève, voire père/fille (même si Eve reste très attachée à son défunt géniteur). On en saura peut-être plus dans le cinquième volet des aventures de "Baba Yaga", qu'on nous annonce pour 2027. Keanu Reeves aura... 63 ans !

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vendredi, 06 juin 2025

The Shameless

   Le réalisateur bulgare Konstantin Bojanov est allé tourner en Inde, en hindi, cette fiction à caractère documentaire, centrée sur la vie de deux femmes aux origines différentes.

   L'histoire commence avec l'une d'entre elles qui, dans un premier temps, se fait appeler Renuka. Prostituée à New Delhi, elle fuit la capitale indienne après avoir tué un client violent. Mais celui-ci a des relations...

   Elle débarque dans le nord de l'Inde, dans un gros bourg qui a sa rue aux prostituées, qui occupent l'un des côtés, d'autres personnes logeant en face. Parmi celles-ci se trouve une sorte de communauté matriarcale, fonctionnant selon des règles religieuses et sollicitée par la population locale. Mais leur situation économique semble précaire, si bien que la fille aînée de la famille est envoyée "travailler" à Dehli. La cadette, Devika, très jolie, reste sur place, des rêves pleins la tête, mais on comprend que sa mère fait l'objet de sollicitations de la part de plusieurs familles de notables.

   On est donc loin de Bollywood. C'est un film dur, sur la condition féminine (sous différents aspects) et sur l'histoire d'un amour impossible. Exploitation économique, prostitution, insultes, agressions, viols... on ne nous épargne pas grand chose des mésaventures des femmes de condition modeste, musulmanes comme hindoues d'ailleurs.

   Toutefois, sur ce tas de fumier sociétal parviennent à pousser deux belles fleurs. Renuka ne se comporte pas comme les femmes qui acceptent la domination masculine ; elle sait se défendre... et surmonter (plus ou moins bien) les humiliations. Sa rencontre avec Devika donne naissance à quelque chose de beau et fragile. Les deux comédiennes sont formidables, tout comme celles et ceux qui incarnent les seconds rôles. (Certains personnages masculins sont particulièrement infects.)

   Politiquement, le film n'est pas neutre. L'un des prédateurs sexuels est candidat aux élections locales. On comprend qu'il est soutenu par un parti prônant "l'hindouité", brandissant la couleur safran. C'est une allusion au BJP (du Premier ministre Narendra Modi) et à son allié le RSS (que certains assimilent à un mouvement fascisant), ou bien au Bajrang Dal, moins connu mais très violent.

   Pendant près de deux heures, on se prend un sacré choc frontal, à peine agrémenté par la relation naissante entre les deux héroïnes.

   Voilà une œuvre qui figurera sans doute dans mon palmarès 2025.

dimanche, 01 juin 2025

Ce nouvel an qui n'est jamais arrivé

   ... pour Nicolae Ceausescu, puisqu'il a été exécuté à la Noël 1989. Mais, ça, les Roumains ordinaires comme les serviteurs de la dictature communiste ne pouvaient pas le savoir à l'avance. Cette comédie politique nous présente donc les destins croisés d'une quinzaine de personnages, aux origines, aux métiers et aux opinions diverses. Dans les jours qui précèdent le 25 décembre 1989, ils vont se croiser, parfois interagir et leur vie va en être (souvent) bouleversée.

   Le procédé rappelle celui mis en œuvre par Robert Altman dans Short Cuts (sorti en 1994... Mon Dieu comme le temps passe). Ici, les protagonistes sont :

- un agent de la Securitate et sa mère

- un employé d'une entreprise d’État, sa femme et son fils (qui a écrit au Père Noël)

- une quasi-voisine, actrice de théâtre, recrutée pour une émission de propagande

- le metteur en scène, accessoirement son amant

- le réalisateur de l'émission de propagande, son épouse et son fils rebelle

- le meilleur ami de ce fils rebelle, qui rêve de quitter la Roumanie

   L'action se déroule donc juste avant celle du récent Libertate. La manière dont la terrible police politique espionne, contrôle et brutalise la population est très bien mise en scène. On pense aussi à la Stasi et à ce qu'en montrait La Vie des autres.

   Le fond est donc dur, mais aussi bourré d'humour, noir de préférence. Ainsi, l'ouvrier commence à perdre les pédales quand il découvre ce qu'a demandé son fils au Père Noël. Les agents de la Securitate ne savent pas comment faire pour effacer des écrans la principale intervenante de l'émission de propagande (déjà enregistrée pour Noël)... qui a fui le pays. L'équipe de télévision vit sous leur pression et déploie des trésors d'imagination. Le réalisateur lui-même se demande jusqu'où il doit aller pour prouver sa fidélité au régime... sans insulter l'avenir, les nouvelles du reste de la Roumanie tendant à montrer que le régime vacille...

   C'est donc passionnant : on ne sait pas ce qu'il va arriver à chaque personnage ; on ne sait pas à l'avance qui va croiser qui et l'on est plongé dans la Roumanie des années 1980, où circulent de vieilles Renault, dont les fameuses R12, produites par une entreprise qui, par la suite, a pris le nom de Dacia.

   Les 2h15 passent très facilement. Je recommande vivement.

Les mercenaires de la victoire

   La finale de la Ligue des champions, qui a opposé le Paris-Saint-Germain à l'Inter Milan est riche d'enseignements... non sportifs, au sens strict. Tout d'abord, c'est la deuxième fois qu'un club appartenant à un fonds d'investissement moyen-oriental remporte le trophée : le PSG appartient majoritairement au Qatar Sports Investments et le vainqueur de 2023, Manchester City, est la propriété des Émirats arabes unis.

   Cet afflux d'argent moyen-oriental a permis de recruter de nombreux joueurs (présumés) de talent, aux salaires élevés. Ainsi, samedi soir, au coup d'envoi, le PSG alignait onze joueurs dont le total des salaires annuels atteint 111 millions d'euros (d'après les informations glanées sur footmercato), s'étalant de 4,5 millions (Pacho) à 18 millions (Dembélé), soit un écart de 1 à 4. En comparaison, le jeune Français Mayulu (19 ans), rentré en fin de partie, fait figure de prolétaire, avec "seulement" 720 000 euros (hors contrats publicitaires)... En face, l'Inter alignait une équipe ne pesant (d'après mes calculs) "que" 87 millions... petits joueurs ! Notez qu'au sein du Onze italien, les écarts sont plus grands (de l'ordre de 1 à 7), les salaires s'étalant de 2,5 à 16,7 millions d'euros. On semble moins généreux avec le "petit personnel" de l'autre côté des Alpes !

   La composition de l'équipe de départ est tout aussi révélatrice. Concernant le PSG, la nationalité la plus répandue était... la portugaise, avec 3 joueurs, et 4 lusophones si l'on ajoute le Brésilien Marquinhos... qui a acquis aussi la nationalité française. Lui inclus, le total de joueurs français monte lui aussi à trois, avec Dembélé et Doué. (Les autres tricolores sont entrés bien plus tard en jeu, quand le match a été "plié".) Italie, Espagne, Maroc, Géorgie et Équateur complètent l'effectif, ce qui donne ceci :

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   Concernant l'Inter Milan, c'est presque aussi varié, avec 4 Italiens... et 2 Français (Pavard et Thuram, celui-ci né en Italie). Suisse, Arménie, Turquie, Pays-Bas et Argentine complètent les nationalités de départ. Parmi les joueurs entrés en cours de match se trouvent un Allemand, un Albanais, un Brésilien, un Polonais (né en Italie) et un Italien. 

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   Qu'en conclure ? D'abord que les deux équipes finalistes ont massivement misé sur un effectif européen, où les "nationaux d'origine" (Français pour le PSG, Italiens pour l'Inter) sont minoritaires. Le deuxième enseignement est la quasi-absence des joueurs africains. Les dirigeants ont peut-être voulu éviter le risque d'absence, pour participer à la Coupe d'Afrique des Nations ou aux qualifications de la Coupe du monde. 

   Je suis allé voir du côté des clubs demi-finalistes : aucun joueur africain ne figure dans l'effectif du FC Barcelone et un seul (un Ghanéen) chez Arsenal. Je suis donc remonté aux quart-de-finalistes. Aucun joueur africain ne figure dans l'effectif du Bayern et d'Aston Villa. Au Real Madrid évoluent deux Marocains, au Borussia Dortmund un Guinéen, un Algérien et un Marocain.