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lundi, 20 février 2023

Tel Aviv - Beyrouth

   Deux femmes sont dans la même voiture (une Volkswagen antédiluvienne), quelque part au Proche-Orient, en route pour on ne sait où. L'une des deux est israélienne, habitant Tel Aviv. L'autre est libanaise, d'une famille originaire de Beyrouth. La scène se déroule en 2006, mais la suite du film va nous projeter successivement en 1984 puis 2000, avant de revenir au "présent" (de 2006). Ces retours en arrière vont nous permettre de comprendre ce qui lie ces deux femmes et pourquoi elles se sont associées dans ce périple automobile.

   De la réalisatrice Michale Boganim, j'avais bien aimé La Terre outragée. C'était profond et subtil, déjà sur un sujet sensible (la catastrophe de Tchernobyl). Mais là... quelle déception ! Si on laisse de côté la séquence automobile initiale (plutôt bien foutue), la première partie du film est une catastrophe. C'est mal joué, mal écrit, mal dirigé et farci d'invraisemblances. Je vous en cite deux, parmi d'autres. En 1984, une petite fille libanaise suit un groupe de soldats israéliens qui distribue des bonbons à la sortie de l'école... elle va jusqu'à les pister jusqu'au lieu d'une intervention, où sa vie est en danger. Et voilà que débarque un milicien chrétien (maronite), allié des Israéliens... qui n'est autre que le père de la petite ! Plus tard, il est question d'un chat, trouvé par la gamine dans les ruines d'une maison. La famille l'adopte. On le retrouve en l'an 2000, ce qui n'est pas invraisemblable (j'ai possédé un félin qui a vécu plus de vingt ans.)...  à ceci près qu'en seize ans, l'animal n'a pas du tout changé !

   C'est vraiment dommage parce que l'intrigue avait de l'intérêt. La réalisatrice semble avoir voulu montrer que le conflit proche-oriental fracasse les familles de chaque côté de la frontière, sans distinction entre les supposés vainqueurs et les supposés vaincus. Mais Dieu que tout cela est maladroit !

   J'ai eu aussi de la peine pour les acteurs. Ils ont souvent dû jongler entre plusieurs langues (hébreu, arabe, anglais et français), ce qui, là encore, n'est pas invraisemblable sur le fond. Mais la manière dont c'est mis en scène rend tout cela très artificiel, en particulier dans la famille libanaise chrétienne. Je suis conscient qu'il était jadis courant dans la classe moyenne de ce pays d'apprendre la langue de Molière, mais, à l'écran, il y a un trop grand écart de maîtrise entre la mère d'une part (Sofia Essaïdi, qui n'est visiblement pas habituée à étendre du linge sur une corde), son mari et ses filles d'autre part. C'est moins flagrant (et plus justifié par le contexte) au niveau de la famille israélienne, la mère étant d'origine française. (Elle est interprétée par Sarah Adler, vue notamment dans Foxtrot.)

   Le film prend enfin son envol quand on retrouve les deux femmes en 2006, en expédition quelque part dans le nord d'Israël, en pleine période de tensions. Cela devient plus intéressant, mais, hélas, la réalisatrice retombe ensuite dans ses travers. La fin est très prévisible, avec l'accent mis sur la symétrie de destins de deux personnages masculins. Décidément, les bons sentiments ne suffisent pas à faire un bon film.

   P.S.

   En effectuant quelques recherches (après avoir vu le film), j'ai eu la confirmation d'une approximation supplémentaire, qui survient dès le début de l'histoire. Dans leur périple automobile, les deux femmes suivraient le tracé d'une ancienne voie ferrée, qui reliait jadis Tel Aviv à Beyrouth, "avant la guerre"... C'est beau sur le plan symbolique... mais c'est selon complètement bidon sur le plan historique.

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   La carte ci-dessus (que j'ai légèrement modifiée) est extraite d'une étude sur les chemins de fer au Proche-Orient au début du XXe siècle.

   En bleu, j'ai matérialisé les lieux où se déroule l'action, dans le film : Jaffa-Tel Aviv (celle-ci pas encore très développée à l'époque de la carte) et Beyrouth encadrées, deux étoiles marquant le Sud-Liban (occupé dans les années 1980-1990 par Israël) et la ville côtière (israélienne) de Nahariya, où des familles de miliciens chrétiens ont pu se réfugier, quand Tsahal a quitté le Liban.

   Les traits rouges de différentes formes signalent les voies ferrées, d'écartement différent. Il n'y a pas d'axe Tel Aviv - Beyrouth. Pour se rendre d'une ville à l'autre, il faut changer plusieurs fois de train et traverser différents territoires, le Liban étant entre 1920 et 1943 un mandat français, La Transjordanie et la Palestine des mandats britanniques.

Commentaires

Bien des recherches auraient pu être épargnées en étant attentif. La partie israélienne ne se déroule pas à Tel Aviv mais à Haifa et au nord! Le train existait bien et mon père l'a pris autrefois en venant du Caire à Beyrouth.
les acteurs ne sont pas si "maladroits" que cela Shlomi Elkabetz n'est pas un perdreau de l'année, Avishai Cohen non plus! pas besoin d'"avoir de la peine pour les acteurs en ce qui concerne le passage du Français à l'Hébreu, ils maîtrisent les deux langues.
Et puis le passage d'une langue à l'autre est très courant. Si on parle de l'armée cest plus facile en hébreu si on parle de la sorbonne c'est plus facile en français...Cela dépend aussi des autres personnes dans la pièce..

Écrit par : miriam | lundi, 27 février 2023

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