dimanche, 29 juin 2025
A Normal Family
Le titre est bien entendu une antiphrase, puisque, par bien des aspects, cette famille, composée d'une grand-mère, de ses deux fils, de leurs épouses et de leurs enfants, frise l'anormalité dès le départ, avant de s'y plonger complètement, les apparences demeurant toutefois (presque) complètement lisses.
Contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre ici et là, l'opposition des deux ménages (des deux frères) n'est pas une nouvelle version de Rich man, poor man. Si l'aîné, avocat pénaliste, est visiblement fortuné, le cadet, chef de service en chirurgie dans un hôpital, n'est pas un miséreux, loin de là. La véritable opposition se situe à un autre niveau : l'engagement, l'intégrité professionnelle. L'avocat, qui pourrait choisir de défendre de nobles et belles causes, accepte surtout des clients qui paient bien. De son côté, le chirurgien essaie de sauver tous ses malades, même ceux qui n'ont pas les moyens de payer.
Leurs enfants semblent encore plus dissemblables. La fille de l'avocat, très émancipée, est une bonne élève, qui ambitionne de poursuivre ses études à Cambridge. C'est aussi une fêtarde, réputée bien tenir l'alcool... et une menteuse de première. Le fils du médecin, lui, est timoré, victime de harcèlement à l'école... et les coûteux cours particuliers payés par ses parents ne suffisent pas à améliorer ses résultats scolaires.
Tout cela vole en éclat suite à deux faits divers : la mort d'un automobiliste colérique, renversé par un jeune chauffard en voiture de sport, et l'agression d'un SDF, une nuit, par deux adolescents.
Le début du film ne fait intervenir que le premier fait divers. Le chauffard est défendu par le frère avocat, tandis que la fille de la victime est soignée dans le service du frère chirurgien.
Là, vous vous rendez compte que je ne parle pas des épouses, qui pourtant jouent un rôle non négligeable dans l'intrigue. Je trouve les trois principaux personnages féminins très caricaturaux. L'épouse de l'avocat est en fait sa deuxième compagne. C'est l'archétype d'une "femme trophée" (version XXIe siècle) : elle est jeune, belle, cultivée, mais ses propos ne révèlent pas une grande intelligence. L'épouse du chirurgien est une (ancienne) travailleuse humanitaire, une figure très positive au début de l'histoire. Mais, à partir du milieu du film, son personnage évolue de manière grotesque (prélude à l'évolution, tout aussi grotesque, du personnage du mari). Quant à l'adolescente, je crois avoir rarement rencontré un jeune personnage aussi faux et détestable sur grand écran. L'actrice est plutôt bonne. Elle réussit à maintenir un peu d'incertitude au départ, mais quiconque a déjà fréquenté des ados comprend très vite ce que cache cette apparence BCBG.
Finalement, c'est peut-être le personnage du gamin le plus intéressant. C'est une victime qui se mue en potentiel prédateur (enfin quelque chose de sociologiquement fondé dans la caractérisation ultra-schématique des personnages). Je trouve que le jeune comédien joue très bien le garçon mutique, dont on ne sait trop ce qu'il pense, même quand il a l'air d'être sincère.
J'ai trouvé le film savoureux quand il met en scène les écarts (financiers, éthiques, culturels, sexuels...) entre les deux couples. En revanche, pour moi, il ne devrait pas y avoir de dilemme, alors que c'est tout de même le soubassement des lonnnnnnnngs atermoiements des deux couples. De surcroît, on sent venir le coup de théâtre final, après le second dîner.
Du coup, je suis sorti de là mitigé. C'est du bon boulot, bien filmé, bien joué, mais cela ressemble plus à la mise en scène d'une théorie plaquée sur des personnages qu'à la représentation d'une situation réelle.
18:29 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, cinéma, cinema, film, films
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