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samedi, 29 décembre 2012

Touristes

   Ben Wheatley est un réalisateur qui explore le "côté obscur" de l'âme humaine. De lui, on a déjà pu voir cette année l'étonnant Kill List, à la limite du polar social et du thriller. Avec Touristes, on passe à l'humour noir, sarcastique, dérangeant, dans un style qui n'est pas sans rappeler l'excellent God Bless America, même si ce dernier film a une portée morale plus grande.

   Les deux héros, qui forment rapidement un couple, sont deux "petits blancs", à la marge de la société de consommation. Lui, plutôt charismatique, n'est pas très beau. Elle est d'un physique quelconque... et surtout elle est d'une assez grande immaturité affective. Cet improbable duo devient une redoutable équipe de tueurs en série... un peu par hasard, lors d'un périple touristique dans le nord de l'Angleterre.

   C'est là que l'on voit que le réalisateur nous a tendu un piège. Leur première victime (un enculé de première... si, si, je vous assure) nous est volontairement, caricaturalement, présentée comme antipathique. On est censé croire que son décès résulte d'un malencontreux accident, mais on a tout fait pour que les spectateurs accueillent sa mort avec joie.

   Cela se complique avec les victimes suivantes, dont le meurtre est à chaque fois prémédité par l'un des membres du duo. Ils ne sont pas franchement odieux, ont visiblement tous fait des études supérieures (l'un d'entre eux reconnaît même être passé par une école privée), ne veulent faire de mal à personne... Certains sont écolos sur les bords. Bref, ce sont des bobos ! Malaise dans la salle de l'Utopia de Toulouse (où j'ai vu le film) : une bonne partie du public pourrait se retrouver à la place des trucidés !

   Plus qu'une revanche morale, ces meurtres (sanglants... et montrés comme tels... super !) sont une revanche sociale. Les assassins sont des ratés : lui est au chômage et ne parvient pas à écrire son livre ; elle, à plus de 30 ans, vit encore chez sa mère. Leurs victimes sont bien insérées dans la société, elles sont du "bon côté" : elles ont une plus belle caravane, pratiquent la randonnée, le vélo ou le jogging, ont des "valeurs"... Le réalisateur met en scène la révolte de petits bourgeois en voie de prolétarisation contre la moyenne bourgeoisie.

   Le film est aussi intéressant sur le plan psychologique : on voit évoluer la relation trouble (et intense !) qui lie les meurtriers. Au départ, il est clair que Tina tombe sous la coupe de Chris (qui tue les deux premières fois). Le rapport de domination semble s'inverser au fur et à mesure que la jeune femme coupe les ponts avec la "civilisation".

   On peut néanmoins se contenter de voir ce film comme une bonne comédie sardonique. Il n'en reste pas moins très troublant sur le fond.

22:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

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