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vendredi, 28 janvier 2022

La Leçon d'allemand

   Le réalisateur Christian Schwochow, auquel on doit notamment De l'autre côté du mur, s'est lancé dans l'adaptation du roman éponyme de Siegfried Lenz, dont l'action fait dialoguer deux époques.

   Dans les années 1950, un jeune homme est emprisonné, à Hambourg. Il a l'air un peu perdu et il rechigne à rédiger ce qui ressemble à une autocritique. Nous ne sommes pas en RDA (communiste), mais en RFA (capitaliste), on appelle donc cela une rédaction sur "les joies du devoir". Cela pousse le jeune homme à se replonger dans ses souvenirs...

   L'essentiel de l'histoire se déroule dans la deuxième partie de la Seconde Guerre mondiale. Les personnages vivent en Allemagne du Nord, pas très loin de la frontière danoise si l'on en juge par les patronymes : Jepsen, Nansen... (Il s'agit sans doute du Schleswig-Holstein, une région récupérée par la Prusse au XIXe siècle à l'issue de la "Guerre des Duchés".)

   Jens Jepsen est le chef de la police du village, une charge qui ne lui vaut guère de travail, mais lui procure du prestige et un bel uniforme. L'homme est un père de famille autoritaire, qui tient par-dessus tout à "faire son devoir"... voire à l'imposer aux autres. Il règne en petit tyran sur une famille où la mère est totalement soumise. Leurs trois enfants ont des destins et des personnalités contrastés. L'aîné, sans doute sur la pression du père, s'est engagé dans l'armée et a été envoyé sur le Front de l'Est. La cadette est un peu rebelle. On la sent attirée par la ville et surtout par une vie moins ennuyeuse que celle de son village peuplé de sinistres adultes.

   Le réalisateur focalise son attention sur le second fils, Siggi, qu'on ne voit jamais se rendre à l'école. Il explore les alentours, les prés, les plages, une maison abandonnée (dont il n'est pas difficile de comprendre ce qu'il est advenu des occupants...) et Max, un peintre du même âge que son père, avec lequel il a jadis fait les 400 coups. Mais les temps ont changé et Jens semble désormais prendre un malin plaisir à persécuter son ancien pote, qui a la suprême audace de continuer à produire une peinture qualifiée de "dégénérée" par les autorités nazies.

   Cette plongée dans le passé ressuscite la vie d'un village ordinaire, où l'on accepte le régime hitlérien sans forcément adhérer à son idéologie. D'ailleurs, on s'accommodera facilement de la nouvelle république, d'autant que, d'après ce qu'on nous montre à l'écran, nombre de cadres de l'ancien régime ont pu s'y recycler...

   Mais là n'est pas le plus important. Le film met en scène une lutte entre le principe d'autorité (incarné par le père policier) et la liberté artistique, qui passe par la peinture, mais aussi le chant, la musique, la danse. Le garçon est tenaillé par un conflit d'allégeance : doit-il obéir aveuglément à son père, qui s'occupe de lui et semble vouloir lui indiquer le droit chemin, ou bien, de temps en temps, donner un coup de main au peintre maudit, accompagné de sa délicieuse épouse ?

   J'ai eu du mal à entrer dans cette histoire mais, une fois que j'ai compris les présupposés scénaristiques, j'ai été pris. L'un des intérêts consiste à deviner comment l'enfant sans histoire d'un notable rural a pu se retrouver des années plus tard en prison.

   En revanche, ce n'est pas très bien réalisé. J'ai trouvé la mise en scène pataude, la photographie médiocre (un comble pour un film illustré de tableaux expressionnistes). Les plus belles images (en noir et blanc) sont celles qui accompagnent le générique de fin ! Mais l'intrigue et le jeu des acteurs méritent le détour.

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