dimanche, 09 avril 2023
Le Capitaine Volkonogov s'est échappé
Moins de trois ans après L'Ombre de Staline, centré sur la famine en Ukraine, la répression stalinienne est de nouveau à l'écran, dans cette fiction à caractère historique, une coproduction internationale tournée en russe... mais qui n'a pas été diffusée en Russie.
La première partie nous fait découvrir le capitaine Volkonogov : c'est un cadre du NKVD (ancêtre du KGB) de Leningrad, athlétique, plein d'avenir. Il est plutôt beau gosse, fier dans son uniforme... et il sait se faire craindre. Le problème est qu'en cette époque de Grande Terreur stalinienne, les purges touchent aussi le Parti communiste et ses satellites. Le jour même, Volkogonov voit son supérieur se suicider et ses collègues de la brigade subir un entretien inquisitorial. Il décide de s'enfuir avant que ne vienne son tour.
C'est d'abord un polar historique, avec pour toile de fond un régime totalitaire parmi les plus horribles que la Terre ait connus. Au NKVD, on sait tuer vite et pas cher, on n'a pas besoin de moyens hyper-sophistiqués pour faire avouer un suspect coupable... et l'on est devenu expert en disparition de cadavres.
(Je trouve intéressant que, dans une fiction destinée a priori à un public non spécialiste, on ait intégré à ce point les résultats de la recherche historique.)
Mais ce n'est là qu'un arrière-plan. La deuxième partie (plus longue) met en scène, de manière parfois virtuose, la quête de Volkogonov (qui cherche à se faire pardonner ses crimes pour ne pas finir en enfer) et la traque dont il est l'objet de la part d'un commandant cancéreux. Sa quête débute à l'issue de l'enterrement de cadavres, pour lequel le NKVD a réquisitionné des vagabonds et des passagers des transports en commun. Sans le savoir (au départ), Volkogonov (dont l'identité est inconnue des autres) participe à l'enfouissement de ses anciens camarades ! La séquence est saisissante, tout comme le surgissement d'un rescapé.
C'est à l'occasion de la rencontre des proches de ses anciennes victimes que Volkonogov se rappelle ses "exploits" et nous permet de toucher du doigt l'abjection du régime qu'il a servi. Ces séquences sont particulièrement marquantes, qu'il s'agisse de l'ouvrier plaisantin, du bureaucrate soupçonneux, de l'enfant questionneuse ou de l'épouse statufiée. On prend une sacrée claque !
C'est de surcroît brillamment mis en scène. En deux plans trois mouvements, le duo de réalisateurs nous fait comprendre ce que sont l'oppression, la crainte, le désespoir, le sentiment d'injustice. Les décors sont particulièrement réussis.
Même s'il y a quelques longueurs, même si certaines scènes sont à la limite du soutenable, je recommande vivement ce film, une véritable œuvre d'art au service d'une vérité historique pas suffisamment enseignée.
20:44 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire, russie
Commentaires
Je suis en rage. J'ai écrit à mon art et essai pour savoir quand serait programmé ce film que j'attendais. La réponse, débile, est : on a choisi Los reyes del mondo.
Je ne vois pas en quoi l'un empêche l'autre.
Je crois que les effets de la nouvelle direction récente se fait sentir.
Je ne te lis pas, ça va encore plus me mettre en pétard.
Écrit par : Pascale | dimanche, 09 avril 2023
Bonsoir Henri Golant, merci pour ton com sur mon billet et merci pour ton article ci-dessus qui j'espère incitera les gens à aller voir Le capitaine Volkogonov s'est échappé. Un immense film à ne pas rater. Bonne soirée.
Écrit par : dasola | dimanche, 09 avril 2023
Les commentaires sont fermés.