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mercredi, 20 décembre 2023

Perfect Days

   J'ai enfin pu accéder à la dernière fiction de Wim Wenders (qui m'a récemment enchanté avec son documentaire Anselm : le bruit du temps).

   Les dix premières minutes sont sans dialogue. On y découvre l'anti-héros, Hirayama, quinquagénaire taiseux, solitaire, qui vit dans un appartement modeste, aménagé (avec d'autres) dans ce qui ressemble à un ancien entrepôt. Très vite, on comprend qu'il a habilement tiré profit du moindre centimètre carré de son habitat. Chaque chose est à sa place.

   Le matin, il se réveille au bruit du balayeur. Il enchaîne le même rituel, qui le conduit du brossage de dents à sa camionnette de fonction, en route pour nettoyer les toilettes publiques de Tokyo.

   Une fois par semaine, cette succession d'actes habituels cède la place au jour de "repos", consacré au ménage, à la lessive, aux courses... et au développement des photographies prises avec un appareil argentique.

   Hirayama est consciencieux, méticuleux. Il nettoie avec soin les cabinets de toilettes, du sol au plafond, en passant par les glaces et les parois extérieures. (On notera toutefois que les "lieux", quand il les prend en charge, ne sont pas d'une saleté repoussante. Viens en France, mon gaillard, on verra si tu kiffes autant !)

   La mise en scène est d'une grande limpidité, ce qui ne signifie pas qu'elle soit insignifiante. A l'image de son personnage principal (interprété par Koji Yashuko, prix amplement mérité à Cannes), Wenders est parfois sur un nuage. Il réussit à rendre sa dignité aux gestes du quotidien et met en scène la beauté du simple (à moins que ce ne soit la simplicité belle).

   Ce personnage m'a un peu rappelé un facteur, que j'ai connu autrefois. On avait discuté de nos boulots respectifs et lui s'était déclaré content de son sort. Certes, il se levait très tôt le matin, mais il aimait l'ambiance des débuts de journée endormis. Il adorait faire sa tournée, discutant au passage avec les gens. Il terminait son travail en début d'après-midi ; il avait ainsi le reste de la journée à lui, sachant qu'il lui fallait se coucher tôt.

   Hirayama est de cette trempe. Après son travail, il va aux bains publics, boire un coup, se balade, lit un peu. C'est un habitué des commerces qu'il fréquente. Avec cette routine, il s'est constitué un triple cocon : celui de l'appartement, celui du travail et celui des loisirs. Tout cela est filmé avec empathie. On perçoit comme une petite musique du bonheur, rythmée par des titres anglo-saxons, souvent de style glam-rock.

   Bien que côtoyant des centaines de ses contemporains, le héros semble vivre sur une autre planète, sans télévision, ni ordinateur, ni smartphone, écoutant de vieilles cassettes, achetant des livres d'occasion, se déplaçant le plus souvent à bicyclette. Cette "sobriété heureuse" a visiblement séduit au moins autant que les qualités strictement cinématographiques du film.

   Et puis... cette rassurante petite routine va un peu se gripper. A cause de ce jeune collègue (IN-SU-PPOR-TABLE), paresseux et égocentrique. A cause de la nièce envahissante, qui compte sur l'oncle dont la famille a honte pour vaincre son mal-être. Il y a aussi de belles rencontres, comme celle de la petite copine du collègue, celle de la tenancière du bistrot et celle de son ex-mari. On attend (espère) aussi la rencontre avec l'auteur(e) du jeu glissé dans un recoin d'un cabinet.

   C'est beau, apaisant, parfois un peu agaçant (quand le petit con est à l'écran), parfois longuet. (Wenders étire un peu trop ses effets.) Mais c'est un film à nul autre pareil, d'un septuagénaire à l'apogée de son art, qui ne cherche à suivre aucune mode, aucun conformisme ambiant.

22:40 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Commentaires

Bonjour Henri Golant, heureusement que le petit "con" n'est pas trop présent à l"écran. J'ai aimé ce film qui donne de visiter Tokyo. Bonne journée.

Écrit par : dasola | jeudi, 21 décembre 2023

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