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dimanche, 17 janvier 2010

Agora

   C'est donc le dernier film d'Alejandro Amenabar, un talentueux Espagnol dont on a déjà pu apprécier Tesis, Ouvre les yeux et Les Autres. Il a coécrit un scénario dans lequel se mêlent la fresque historique (sur un christianisme de plus en plus puissant), une histoire d'amour contrarié et la recherche scientifique (rendue avec beaucoup de pédagogie, je trouve).

   Mais c'est d'abord une histoire de femme. Au singulier, puisque, si on laisse de côté l'héroïne, les autres ne sont que des figures effacées, à l'image de la place qui leur est dévolue dans la société de l'époque, celle de l'Egypte romaine de la fin du IVe siècle. (Mais le film a été tourné à Malte, comme Gladiator et Troie.) Je dois avouer que je ne connaissais pas cette Hypatie, flamboyante intellectuelle et femme libre. Rachel Weisz (oscarisable, même si le film ne rencontre pas son public) incarne à la perfection cette icône féminine de l'indépendance et la libre-pensée.

   Le film se veut d'abord une démonstration, celle de l'intolérance de ce jeune christianisme qui, persécuté puis toléré, est sur le point de devenir la religion officielle de l'empire... et même d'enfiler à son tour les habits du persécuteur. L'acteur qui joue l'évêque Cyrille est à cet égard excellent, tout comme celui qui interprète Ammonius, son exécuteur des basses oeuvres (remarquable Ashraf Bahrom, déjà vu dans La Fiancée syrienne, Paradise now et Le Royaume). Les autres nous permettent aussi de comprendre la force de cette communauté, de ses convictions, face à la haute société polythéiste, pétrie de pensée grecque et jugée décadente.

   Paradoxalement, pour un film grand public, l'aspect sentimental passe plutôt au second plan. Il est très présent dans la première partie du film, mais ne revient réellement au premier plan qu'à la toute fin, dans des circonstances que je me garderai bien de révéler. (Sachez seulement que les auteurs du film, sur ce point précis comme sur quelques autres, n'ont pas fidèlement suivi l'Histoire.)

  Si les débats et l'enseignement philosophiques tels qu'ils sont mis en scène ne m'ont pas paru passionnants (peut-être aussi parce que le doublage n'est pas toujours très réussi), par contre, la recherche astronomique est abordée de manière originale (j'ai beaucoup aimé les maquettes du système solaire et l'usage qui est fait d'un carré de sable). Je ne suis pas du tout spécialiste de la question... et j'ai tout compris !

   Amenabar a aussi tenu à nous montrer qu'il savait tenir une caméra. C'est parfois un peu agaçant, quand il multiplie les vues du dessus, pas toujours justifiées. C'est beaucoup plus convaincant quand il traite des mouvements de foule, ou quand il aborde certaines péripéties, comme les deux traquenards qui opposent chrétiens et juifs. (Par contre, j'ai été un peu déçu par le saccage et l'incendie de la célèbre bibliothèque d'Alexandrie.)

   Derrière la fiction se cache un propos politique. Au-delà de la peinture de l'intégrisme chrétien des débuts, il y a la dénonciation de l'instrumentalisation du religieux à des fins politiques et le rejet de toutes les formes de fanatisme, notamment celles qui s'en prennent à la liberté de pensée et à l'indépendance des femmes. Comment ne pas voir dans cette milice obscurantiste et misogyne vêtue de noir un pendant des actuels fondamentalistes musulmans ? Au-delà des empires, des républiques, des époques et des religions, la connerie humaine prend souvent des formes identiques...

16:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, histoire

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