dimanche, 09 mars 2014
The Grand Budapest Hotel
Wes Anderson n'est pas un cinéaste extraverti... et il a la réputation de ne pas faire de film tapageur. C'est propre et soigné, parfois incongru. Récemment, on a pu le voir à l'oeuvre dans l'animation (Fantastic Mr Fox) et la fiction nostalgique décalée (Moonrise Kingdom).
Ici, l'histoire prend la forme d'un retour en arrière dans le retour en arrière. De nos jours, un écrivain vieillissant propose de raconter une histoire vraie. Cela remonte à une quarantaine d'années quand, de passage dans un ancien hôtel de luxe, désormais décrépi, il a fait la connaissance de son étrange propriétaire. Celui-ci a fini par lui raconter sa vie, en remontant à ses débuts comme groom à l'hôtel, au temps de sa splendeur, dans les années 1930.
A partir de là, cela devient magistral. A l'écran, les couleurs sont éblouissantes. La mise en scène, qui épouse souvent des figures géométriques (dans le cadrage comme dans les déplacements), est bluffante. Et que dire des acteurs ! Il faut souligner la performance de Ralph Fiennes en "Monsieur Gustave", sorte de chef du personnel de l'hôtel au propriétaire inconnu. (Cela nous change de Lord Voldemort !)
C'est à savourer en version originale sous-titrée, pour profiter de l'accent anglais, onctueux et parfois obséquieux, du personnage principal, le tout mâtiné de mots et expressions français. (Par contre, on oubliera vite les prestations de Léa Seydoux et surtout de Mathieu Amalric, pas très crédible en sous-fifre à la volonté chancelante.)
Fiennes est épaulé par une batterie de seconds rôles, parmi lesquels on retrouve des acteurs fétiches de Wes Anderson : Edward Norton (délicieux en officier habsbourgeois scrupuleux et humaniste)...
... Tilda Swinton, une nouvelle fois métamorphosée (rappelez-vous dans Snowpiercer) et fantastique, en rombière amoureuse et farfelue...
... Jeff Goldblum, en notaire tâtillon...
... Adrien Brody, en aristocrate "fin de race"... et gros connard... un vrai personnage de BD...
... tout comme Willem Dafoe, en tueur grotesque et impitoyable (excellente composition) :
Il faudrait en citer d'autres, à commencer par Harvey Keitel, génial en taulard chef de meute. Signalons aussi Saoirse Ronan, piquante en boulangère-pâtissière et Tony Revolori, qui incarne le jeune protégé du héros.
Ces pointures trouvent à s'exprimer dans une série de scènes plus inventives les unes que les autres. J'ai particulièrement apprécié la séquence de la réunion de famille, consécutive au décès d'une cliente très chère au cœur de Monsieur Gustave (qui a coutume de "besogner" les dames âgées fortunées...). Je recommande aussi l'évasion de la prison, qui accumule les gags divers.
Les scénaristes n'ont pas négligé le contexte. L'essentiel de l'action se passe dans les années 1930, en Europe centrale. Les héros sont donc confrontés à la montée du nazisme. Il y a du Chaplin dans la peinture sarcastique du mouvement totalitaire.
Bref, vous l'avez compris, j'ai été emballé. C'est pour moi l'un des meilleurs films du premier trimestre 2014.
22:31 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
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