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vendredi, 26 novembre 2021

L'Événement

   Je n'ai pas lu le roman d'Annie Ernaux, mais le sujet du film m'a incité à tenter l'expérience. Derrière la caméra se trouve Audrey Diwan, scénariste de Cédric Jimenez (et, accessoirement, sa compagne).

   Anne est étudiante, sans doute en propédeutique Lettres. (Aux jeunes qui liraient ce billet, je signale qu'il y a bien longtemps, pour les étudiants se destinant à la fac, il existait une année de transition entre la terminale et le début de la licence à proprement parler.) Elle est belle, intelligente et indépendante. Elle a envie de tout vivre : ses études, son amour de la littérature, les sorties rock'n'roll... et les garçons. Hélas pour elle, nous sommes en 1963, au début de la Ve République, sous le premier mandat de Charles de Gaulle. Contraception comme avortement sont illégaux. Quant à l'enseignement des "choses de la vie", il s'effectue plutôt par l'intermédiaire des revues de charme...

   La première partie est saisissante. La caméra suit l'héroïne (incarnée par Anamaria Vartolomei, déjà remarquée dans L'Échange des princesses et La Bonne Épouse), de dos, de face, de côté, du dessus. Je rassure les cinéphiles qui auraient le mal de mer, on n'est pas chez les Dardenne grande époque. Ces mouvements de caméra sont parfaitement justifiés. Ils instillent du mystère autour de la personnalité de cette jeune femme, assez mutique. Ils nous font aussi comprendre quel poids pèse sur ses épaules : celui du patriarcat, de la pesanteur sociale, du conservatisme religieux et de la chosification des jeunes femmes, surtout si elles sont jolies.

   Autour d'Anamaria gravite une brochette de comédiens de talent. Sandrine Bonnaire interprète une mère traditionnelle, besogneuse et aimant sa fille, qu'elle a de plus en plus de mal à comprendre. Pio Marmai prête son physique avantageux à un prof de fac qui a repéré l'étincelle de talent chez Anne. (Bien que je doute que le film rencontre un grand succès public, il pourrait néanmoins contribuer à l'augmentation du nombre d'inscriptions de lycéennes en fac de Lettres. Une cruelle déception les y attend...)

   J'ai trouvé que la deuxième partie patinait un peu. Enceinte, l'héroïne ne sait trop comment s'en sortir. Petit à petit, elle se coupe de toutes les personnes qui pourraient l'aider.

   Fort heureusement, l'intérêt rebondit dans la troisième partie, qui prend quasiment la forme d'un thriller. Anne se rend chez une "faiseuse d'anges", qui a la voix rocailleuse d'Anna Mouglalis. La séquence est extraordinaire d'intensité, avec une étonnante économie de moyens. À partir de ce moment-là, la tension ne retombe plus, portée par une actrice formidable... jusqu'à une conclusion que je ne révèlerai pas.

   Je recommande vivement ce film coup-de-poing, bourré de talents.

Commentaires

Tu appelles extraordinaire d'intensité ces scènes de supplice qui n'en finissent pas ?
L'interprétation d'Anamaria ne casse pas les briques qu'on prétend, je trouve. Et j'ai souvent eu du mal à comprendre son attitude mutique. Même si évidemment c'était difficile de faire confiance à quiconque. Surtout aux hommes.
Et dire que les filles s'inscriraient en fac de lettres parce qu'un prof pourrait ressembler à Pio Marmai... non, rien, je préfère ne rien dire.

Écrit par : Pascale | samedi, 27 novembre 2021

Je veux dire qu'à partir du moment où l'héroïne entre chez l'avorteuse, cela devient particulièrement prenant. J'étais scotché sur mon siège. Dans un premier temps, les deux personnages sont dans la retenue, évitant de prononcer certains mots. Aux yeux de certains, cela va peut-être sembler exagéré, mais j'ai eu l'impression de me trouver en face de deux résistantes, sous l'occupation allemande.

Quant à Pio Marmaï, je sais qu'il suscite des réactions contrastées... mais j'ai dans mon entourage quelques dames qui le trouvent très à leur goût. Il n'y a pas très longtemps, j'ai même croisé un couple qui a prénommé son enfant... Pio !

Que la Force soit avec lui !

Écrit par : Henri G. | samedi, 27 novembre 2021

Oui j'ai déjà entendu ce parallèle entre ces femmes et la résistance... Mouais.

Je ne doute pas que Pio plaise. Il est absolument charmant.
Ce que je voulais dire c'est à propos de cette allusion au fait que les filles choisissent leurs études en fonction du physique des profs !
ah oui elles votent aussi en fonction du physique des candidats ce qui est largement plus problématique !

Écrit par : Pascale | dimanche, 28 novembre 2021

Ce comportement n'est pas exclusivement féminin. J'ai déjà entendu des collègues et des connaissances (hommes hétéros) s'exprimer à propos de femmes politiques, leur appréciation du physique de la dame (Ségolène R. ou Valérie P.) jouant un rôle dans leur vote futur ou ayant joué un rôle dans leur vote passé !

Il y a des années de cela, en formation, je me suis retrouvé dans un groupe "coaché" par une femme absolument ravissante. Alors que, de l'avis général, ce stage, sans être inutile, ne cassait pas des briques, l'un des membres du groupe (composé en grande majorité d'hommes) ne tarissait pas d'éloges sur la partie de la formation encadrée par la ravissante dame...

Écrit par : Henri G. | dimanche, 28 novembre 2021

Problématique pas dans le sens politique mais au vu du physique des candidats !

Écrit par : Pascale | dimanche, 28 novembre 2021

Les commentaires sont fermés.