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dimanche, 12 juin 2011

La Conquête

   On peut voir ce film de deux manières : soit comme une comédie satirique, soit comme une réflexion sur la politique.

   Commençons par la comédie. Elle est grinçante, souvent drôle... et surtout très bien jouée. Denis Podalydès s'est bien coulé dans le moule sarkozyen, même si je trouve que, parfois, il en fait un peu trop. Pour toucher juste, il aurait fallu que le personnage s'éloigne un peu de l'image qu'il VEUT donner et de celle que véhiculent les émissions comme Les Guignols de l'info. Si l'on reconnaît bien le futur président de la République, la manière dont il est incarné ne nous apprend rien sur ses zones d'ombre. Mais c'est peut-être un choix.

   La meilleure interprétation est sans doute à mettre au compte de Samuel Labarthe, excellent en Dominique de Villepin. Il réussit à faire toucher du doigt toute l'ambiguïté du type : un républicain traditionnel, très habile... et surtout sans scrupule, magouilleur comme c'est pas permis. L'une des meilleures scènes est sans doute celle qui le montre sur son rameur d'appartement, écoutant la radio, qui évoque les déboires de son ennemi juré.

   Le ressort de la comédie est la rivalité qui oppose N. Sarkozy à J. Chirac (Bernard Le Coq... mouais) et D. de Villepin. Tout tourne autour d'eux. La pléiade de seconds rôles est une des forces du film. Parmi l'ensemble, on peut distinguer Hippolyte Girardot, tout en sobriété en Claude Guéant.

   Les dialogues fourmillent de bons mots, une bonne partie d'entre eux étant connus. C'est donc assez truculent.

   Par contre, les scènes de couple sont à mon avis souvent ratées, non pas par la faute des comédiens (Florence Pernel est très bien en Cécilia), mais à cause de la direction d'acteurs et d'une musique sirupeuse ou larmoyante, qui devient rapidement insupportable.

   Mais le vrai problème vient de la vision de la politique que ce film véhicule. Les "gens normaux" en sont quasiment exclus. Ce ne sont que des pions dont "l'élite" a besoin pour faire aboutir ses ambitions. Alors, on ment, on manipule, on s'appuie sur des médias complaisants. En lisant cela, on doit avoir l'impression que le film est un véritable brûlot. Pas du tout, en fait ! Ce n'est pas montré de manière critique, juste en passant, le tout noyé dans la pochade, avec une musique de cirque qui fait tout prendre à la légère.

   Pourtant, il y aurait à dire sur la complaisance des médias envers Sarkozy (qui ne cesse de se plaindre d'eux, cela fait partie du jeu). Les liens de celui-ci avec l'oligarchie économique sont à peine abordés, un comble pour le candidat du CAC 40 ! On nous laisse sur notre faim avec une soirée du Fouquet's expédiée et édulcorée. A plusieurs reprises, le film rate l'occasion de mettre le candidat en contradiction avec ses propos, par exemple quand on nous le montre affirmant vouloir effectuer une retraite monastique... en évacuant la véritable "retraite", sur le yacht de Vincent Bolloré.

   Sur le fond, le petit monde parisianiste, qu'il soit de gauche ou de droite, est incapable de prendre le recul suffisant sur un tel sujet. On l'a déjà vu avec Yasmina Reza, finalement très en empathie avec le sujet de L'aube, le soir ou la nuit. Karl Zéro n'a pas échappé à ce travers dans son sTarko.

   Malgré toutes ces réserves, on peut, si l'on veut passer une bonne soirée, se contenter d'aller voir une comédie réussie.

  

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