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lundi, 19 février 2018

Sugarland

   Cet étonnant documentaire australien se place dans la lignée de Supersize me, de Morgan Spurlock, sorti il y a déjà une quinzaine d'années. Ici, au lieu de s'alimenter uniquement dans une chaîne de restauration rapide, l'auteur-interprète (Damon Gameau) choisit de faire l'expérience d'une alimentation sucrée, en excluant toutefois les produits les plus évidents : bonbons, chocolat, gâteaux, glaces... En théorie, il consomme de "bons" aliments, achetés (en général) en grande surface. On se rend rapidement compte qu'ils regorgent de sucres cachés.

   Comme Damon Gameau a le sens de l'humour, il se met en scène de manière comique, comparant le développement de son embonpoint abdominal à la progression de la grossesse de sa compagne. En deux mois, il aura pris plus de huit kilos... sans consommer davantage de calories (autour de 2 300 par jour) ! Il a pourtant pris soin de ne pas changer de rythme de vie, continuant à pratiquer du sport à intervalle régulier. Pour valider son expérience, il se fait suivre par quatre spécialistes, auxquels il donne des surnoms de super-héros.

   Le documentaire se veut pédagogique. Il explique quels sont les différents types de sucre. Il a aussi recours à des experts, dont les interventions apparaissent souvent en incrustation, sur les étiquettes des produits que consomme Gameau. On a même droit à quelques animations anatomiques, notamment pour découvrir le fonctionnement du foie.

   La première partie du film se déroule en Australie. En moyenne, ses habitants consommeraient l'équivalent de quarante cuillerées de sucre par jour ! Le "régime" auquel s'astreint Gameau le conduit à ingurgiter la chose à travers des aliments transformés. Un des exemples marquants est la comparaison entre la consommation de quatre pommes et celle du volume de jus de fruits correspondant. La différence est, qu'au bout de deux voire trois pommes, le sentiment de satiété se fait sentir, alors qu'avoir bu tout le jus ne suffit pas à couper la faim.

   Une des séquences les plus fortes se déroule dans un territoire aborigène. Les jeunes générations ont complètement rompu avec le modèle ancestral, d'où la consommation de sucre était absente. C'est arrivé à un point que les magasins de la région sont considérés par les plus profitables du monde par les vendeurs de sodas. Un homme a essayé de réagir face à cette situation de dépendance et à ses conséquences (en particulier l'obésité). Le film montre comment il est parvenu (avec d'autres), dans sa communauté, à faire en sorte que les gens reprennent goût à une alimentation saine. Hélas, son association a perdu ses subventions...

   La deuxième partie du film se déroule aux Etats-Unis, siège de la plupart des multinationales de l'agroalimentaire qui dominent le secteur. Sans avoir le talent d'un Michael Moore, Gameau dénonce l'influence néfaste de ce lobby et découvre jusqu'où les transformateurs vont fourrer le sucre (par exemple l'équivalent de quatre cuillerées dans un plat cuisiné à base de poulet !). Ne reculant devant aucun sacrifice, il va, sur une journée, jusqu'à remplacer les plats cuisinés par l'équivalent en sucre réel... à vous dégoûter d'en manger ! (C'est le but, d'ailleurs.)

   Ce séjour états-unien est aussi l'occasion de montrer les méfaits d'une consommation intensive et régulière de produits sucrés. Gameau suit un dentiste qui intervient (bénévolement semble-t-il) dans l'est du Kentucky, une région où le taux de pauvreté est élevé. Je pense qu'aucun des spectateurs de la salle n'oubliera le cas de ce jeune homme, dont toutes les dents sont pourries (et rongées), à cause de sa dépendance à un soda particulièrement sucré créé par Pepsi. (Coca n'est pas la seule boîte à vendre de la m...). Le pire est que le jeune homme n'envisage pas de changer de mode alimentaire, tant celui-ci est ancré en lui... peut-être depuis la plus tendre enfance, certaines mères de famille de la région n'hésitant pas à remplir le biberon de soda !

   Il y aurait encore plein de choses à dire à propos de ce documentaire, parfois un peu surjoué par son auteur, mais vraiment passionnant (et drôle). C'est à voir si vous en avez l'occasion.

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