samedi, 04 janvier 2025
Six jours
Au début de l'histoire, ces six jours sont ceux qu'il reste à la police pour boucler une enquête criminelle (ou, du moins, trouver de nouveaux éléments permettant d'obtenir le prolongement du délai) avant que la prescription ne soit atteinte. Aujourd'hui, le délai a été porté à trente ans mais, à l'époque, il ne courait que sur dix ans.
Une partie du film est donc constituée d'une course contre la montre, celle que mènent un commandant de police obstiné (Sami Bouajila, impeccable) et la mère d'une enfant (Julie Gayet, surprenante), une cadre sup' qui n'a pas coutume de renoncer. A cette trame principale se mêlent des événements s'étant déroulés dix ans auparavant... et d'autres, se produisant, à l'inverse, des mois plus tard. C'est l'occasion de souligner la qualité du montage, à deux niveaux. D'une part, il croise habilement les époques, celles-ci étant identifiables sans peine. D'autre part, à certains moments, une scène est volontairement coupée pour que nous n'en connaissions pas immédiatement la conclusion. Cela provoque un effet de suspens et nous oblige à nous poser des questions quand on voit une scène ultérieure, sans savoir exactement comment la précédente s'est achevée.
Vous me sentez emballé par ce film (et c'est le cas)... et pourtant, au début, j'ai eu très peur. La première séquence m'est apparue trop mélo, larmoyante, avec une grosse musique pour souligner le drame. De surcroît, j'avais du mal à comprendre précisément comment un personnage pouvait être décédé. Il convient toutefois d'être très attentif à ce qu'on nous montre, parce que nous allons revivre cette séquence à deux reprises. Du point de vue d'une femme, on passe à celui d'un homme (qui revit ce moment traumatique), puis à celui d'un troisième personnage, vers la fin.
C'est donc une histoire très bien conçue, bien filmée (par l'auteur d'Insensibles), même si l'on a parfois un peu abusé de la pluie (ce qui peut s'expliquer par le fait que l'intrigue est inspirée de celle d'un film sud-coréen). Les acteurs sont épatants. Bouajila et Gayet sont (efficacement) épaulés par des figures de la fiction télévisuelle : Marilyne Canto, Manon Azem (une ex de Section de recherches), Philippe Resimont, Dimitri Storoge, Yannick Choirat, Gilles Cohen.
Je ne vais pas trop en rajouter, mais sachez que l'intrigue comporte une sorte de twist et que celui-ci est porteur de sens. Comme dans le récent Juré n°2 d'Eastwood, à un moment, certains personnages se demandent si la morale est compatible avec le strict respect de la loi. Même si leurs histoires sont différentes, ces deux films mettent en scène de manière convaincante un dilemme moral. Cela permet à ce modeste polar d'attendre un niveau inattendu. C'est l'excellente surprise de ce début d'année 2025.
23:28 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Commentaires
J'ai trouvé ce film insupportable de bout en bout.
J'y suis allée pour Sami Bouajila que j'adore et qui parvient à ne pas se ridiculiser malgré notamment des dialogues aussi pauvres.
Rien ne va dans ce film surtout les détails : téléphones filaires et cabines téléphoniques, la mère censée vivre dans un taudis mais vit dans une maison bourgeoise de Roubaix, la même qui met une heure à répondre au téléphone quand elle sait que c'est le ravisseur qui appelle, les appart et maison qui restent ouverts pour qu'on puisse aisément y pénétrer et j'en passe.
Le summum : le moment où Julie Gayet pénétre sans effraction chez le grand-père (normal la porte est ouverte)... le grand-père arrive, voit sa porte ouverte... ne fait rien, fume une clope... sa fille et sa petite fille arrivent... et Julie brandit un couteau derrière la porte ouverte. Comment se sort elle de la situation ?
Je suis surprise que ton acuité habituelle ait supporté tout cela sans rire.
Écrit par : Pascale | dimanche, 05 janvier 2025
Répondre à ce commentaireConcernant les téléphones, il faut tenir compte du fait que les scènes se déroulent soit en 2005, soit en 2015-2016. En 2005, il était parfaitement normal que tous les ménages aient un filaire au domicile. C'était devenu moins fréquent en 2015-2016, mais c'est plausible, surtout si l'on veut sous-entendre que le ménage concerné n'est pas très fortuné. (Au passage, en 2005, le personnage incarné par Julie Gayet, plutôt riche, possède un Blackberry, ce qui, pour l'époque, est tip-top.)
Concernant la deuxième famille (celle du deuxième enlèvement), il nous est dit qu'elle s'est appauvrie et que, du coup, elle peine à se chauffer. Son aisance ancienne peut expliquer qu'elle ait pu acheter la "maison bourgeoise". Je n'y ai pas vu d'incohérence.
Concernant certains logements dont la porte d'entrée n'est pas verrouillée, je vois une explication possible. La maison du père (fumeur) est protégée par un portail (certes lui aussi non verrouillé) ; elle se situe dans un quartier qui semble tranquille et le père semble ne l'avoir quittée que brièvement, pour une course. Il n'est pas impossible que, dans la précipitation, il ait fermé les portes sans les verrouiller, puisqu'il avait l'intention de revenir rapidement. (Cela se fait dans mon département, plutôt à la campagne il est vrai.) Quant à la maison du personnage incarné par Julie Gayet, je n'ai perçu une incohérence que vers la fin, quand le policier y pénètre sans y avoir été invité... et, effectivement, la porte d'entrée n'est pas verrouillée. Pris dans le rythme de l'intrigue, je n'ai pas trouvé cela si choquant.
C'est globalement mon point de vue sur le film : il n'est pas parfait, mais ses qualités emportent mon adhésion (un peu comme toi avec "Un Ours dans le Jura").
Écrit par : Henri G. | dimanche, 05 janvier 2025
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