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mardi, 26 août 2014

Dix par jour

   C'est le titre du documentaire consacré par Yves Garric et Georges Berte (auxquels on doit notamment Estremoni) aux soldats aveyronnais morts pendant la Première guerre mondiale. Cela représente un peu moins de 15 000 tués, sur une durée dépassant légèrement les 1 500 jours. D'où le titre.

   Sur fond de musique classique mélancolique, on nous montre plusieurs très beaux monuments aux morts, en particulier (au début et vers la fin) celui de Sainte-Geneviève-sur-Argence :

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   Mais le principal intérêt réside dans les histoires que ce film raconte, celles de poilus pour la plupart morts au combat (ou de maladie ou des suites de blessures), à travers les yeux et la voix de leurs enfants (ou neveux, nièces), aujourd'hui très âgés.

   Cela commence dans un club de retraités de Villecomtal (au nord de Rodez). On y entend la belle-fille d'un médecin, Maurice Bieulac, qui a dû lui raconter jadis les conditions dans lesquelles il opérait, à la guerre. Plus marquants encore sont les propos de Calliste Dellus, dont le père a survécu au conflit, mais qui a vu mourir devant lui son frère aîné... dont il a épousé la promise ! Son nom figure sur le monument aux morts local. Il fait partie des premières victimes de la guerre : il a été tué le 19 août 1914, pendant la "bataille des frontières", qui fut si meurtrière pour les troupes françaises :

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   Vient ensuite, à Rodez, Marie-Paule Bessière, qui évoque son oncle puis son père. Celui-ci est revenu en vie, mais gravement blessé. On n'a jamais retrouvé le corps de l'oncle, dont il ne reste qu'un portrait d'époque :

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   La fiche du soldat nous apprend qu'il a été tué en mars 1915, dans le département de la Marne. Son frère a survécu, mais non sans souffrances, d'après ce que raconte sa fille.

   A Clairvaux-d'Aveyron, le fils d'un autre survivant a découvert le carnet rempli par son père défunt de notes sur ce qu'il  a vécu durant la guerre. L'homme n'était qu'un modeste muletier, mais il écrivait remarquablement bien.

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   Après une escale à Marcillac-Vallon, pour une cérémonie mémorielle, direction le Sud-Est et la commune de Nant. Cette séquence illustre la tragédie que fut cette époque pour certaines familles, qui perdirent tous leurs hommes jeunes. Dans l'Ouest, à Najac, on perçoit les conséquences sur le monde agricole. La guerre a accentué la déprise rurale. Comme on est en terre militante, le réalisateur en profite pour montrer un couple de néo-ruraux, installés en agriculture biologique. Le fils de poilu lui évoque la place de l'occitan.

   Avec Geneviève Rigal-Saurel, c'est le cas des "gueules cassées" qui est évoqué. En famille, on découvre aussi la correspondance des poilus de la famille. On se souvient aussi du rôle que les femmes ont joué à cette époque.

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   Après le parcours des anonymes, c'est le tour de celui d'un (futur) notable, Raymond Bonnefous, alors étudiant en médecine. (Par la suite, il fut -entre autres- maire de Rodez, député puis sénateur.) Sa petit-fille, Nathalie Bauer, a recueilli une masse impressionnante d'objets et documents divers sur son aïeul, comme cet appareil photographique :

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   De passage à Rodez, le film nous montre une cérémonie au monument aux morts, avant qu'il ne soit question du célèbre soldat inconnu de Rodez, Anthelme Mangin. C'est l'historien local Jean-Michel Cosson qui est mis à contribution pour raconter cet incroyable destin :

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   A Villefranche-de-Rouergue, on nous conte une belle histoire d'amour, entre une Aveyronnaise de bonne famille (Rose) et un soldat originaire du Loiret (Maurice). Je vous laisse découvrir comment les tourtereaux se seraient connus. Un enfant est vite mis en route, puis un second (après le mariage, celui-là)... Maurice, parti au front, écrit souvent à Rose. Leur petite-fille lit quelques-unes de ces missives, qui témoignent de l'intelligence de ce soldat. Il est mort en... août 1918, dans l'Aisne :

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   Une fois de plus, on passe de l'humble au notable, et pas n'importe lequel. Pierre Ginisty évoque la vie d'un membre de sa famille, Charles Ginisty, originaire de La Roque-Valzergues (commune de Saint-Saturnin-de-Lenne), devenu évêque de Verdun et initiateur de la construction de l'Ossuaire de Douaumont.

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   On se rapproche de la fin du film. Les auteurs tracent des ponts entre la Première guerre mondiale et les conflits suivants : guerre d'Algérie et surtout Seconde guerre mondiale. L'avant-dernière séquence (plutôt maladroite) s'attarde dans le Sud du département, en particulier à Saint-Jean-d'Alcas. L'évocation de la Grande Guerre est l'occasion de parler de la transmission aux jeunes générations. On entend aussi parler des fusillés, ces autres victimes dont les noms sont absents des monuments aux morts. Yves Garric termine par une note personnelle : l'un de ses oncles est mort à proximité de Nancy, des suites de ses blessures, dès septembre 1914.

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   C'est un documentaire de bonne facture, riche en anecdotes dont ce billet ne rend que partiellement compte.

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