samedi, 16 février 2013
Comme un lion
Ce lion est un jeune Sénégalais, Mitri Diop, passionné de football, pour lequel il semble avoir des aptitudes (c'est un peu la vedette de son village). Pour l'incarner, le réalisateur Samuel Collardey (remarqué naguère pour son excellent documentaire-fiction L'Apprenti) a choisi un acteur non professionnel, habile au maniement de la balle, qu'il est allé chercher en Afrique :
Il vit avec sa grand-mère, sans que l'on sache ce qu'il est advenu de ses parents. La première partie du film nous montre quelques aspects de la vie au village (où l'on cause dans un wolof mâtiné de français), entre les gamins qui ne pensent qu'au foot et les (grands)mères qui gèrent l'économie locale. (Les hommes adultes sont peut-être nombreux à être partis dans une pirogue.)
Le film s'est inspiré d'une histoire vraie qui, hélas, s'est souvent produite ces dernières années : le trafic de jeunes joueurs africains, par des agents (européens et africains) véreux. On voit donc débarquer un prétendu détecteur de champions, ancien professionnel camerounais, qui va embobiner tout son monde... et escroquer la grand-mère.
La deuxième partie du film montre l'arrivée en Europe, où les ennuis vont s'accumuler pour le héros. Deux personnages vont jouer des rôles antagonistes : l'agent français, incarné avec brio par Jean-François Stévenin, et une jeune (et ravissante) Africaine pleine de répartie, Fatou. L'action se déroule dans l'agglomération parisienne, entre barres de HLM et foyers d'immigrés. On découvre le fonctionnement de la législation française.
La troisième partie est celle des occasions, ratées ou pas. On se retrouve dans le Doubs, entre Sochaux et Montbéliard. Mitri tente de s'intégrer au club de juniors entraîné par Serge, ancien jeune talent qui a mal tourné (interprété par l'excellent Marc Barbé, déjà vu dans Cloclo et L'Ennemi intime) :
Les scènes d'entraînement et de jeu sont vraiment bien filmées. On sent que Collardey connaît un peu le foot et qu'il a compris qu'il fallait mettre en scène la représentation du sport. Il n'oublie pas qu'il est documentariste : cette partie du film dresse un portrait social de la région de Montbéliard, entre fête de province (un mariage qui pourrait se tenir dans n'importe quelle petite ville de France) et travail à l'usine, la "Peuge".
On se rend compte que les deux protagonistes principaux ont leurs failles et, si l'intrigue tourne toujours autour du possible succès du jeune surdoué du foot (qui s'entraîne comme un malade), un coup de projecteur est donné sur la vie des anciens, pas assez riches pour vivre sur un grand pied et frustrés de la (relative) gloire perdue.
C'est donc un "petit" film remarquable, qui a l'intelligence de ne pas traiter du football que sur le mode sportif, dans un monde de mecs où les femmes jouent un rôle important.
P.S.
Parmi les histoires qui ont inspiré Samuel Collardey, il y a sans doute celle d'un Camerounais de 20 ans, Stéphane, qui a eu un parcours encore plus chaotique que celui du héros du film.
P.S. II
L'association Foot Solidaire tente de protéger les jeunes joueurs des maquignons du football, qui s'enrichissent sur le talent et la crédulité d'autrui.
15:36 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
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