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Rechercher : christian Lemasson

Hostiles

   Cela démarre fort. Quelque part dans l'Ouest profond, à la fin du XIXe siècle, une bande d'horribles sauvages d'Indiens rebelles (des Comanches) attaque une ferme isolée et en tue presque tous les occupants. Dans le même temps, à des kilomètres de là, dans une garnison de l'armée américaine, un capitaine taciturne et (très) moustachu, spécialisé dans la traque d'Indiens (des Apaches, dans la région), est chargé de veiller au voyage d'un chef cheyenne jusque sur ses terres natales. Celui-ci est sur le point de mourir, mais le capitaine n'a pas oublié les pertes qu'il a infligées jadis à son camp.

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   C'est l'équipage formé par les militaires et la famille du chef qui rencontre la jeune veuve éplorée, incarnée par l'exquise Rosamund Pike (vue récemment dans HHhH et, surtout, remarquée dans Gone Girl). Elle a beau se laisser aller depuis le massacre de sa famille, on se dit qu'à sa vue, n'importe quel homme normalement constitué se précipiterait sur son beau cheval blanc et brandirait son gros glaive bien dur pour venir à son secours.

   Rosamund Pike fait bien le job, mais son personnage n'est pas construit avec assez de finesse. Elle ne met que quelques jours à passer de l'hostilité profonde à l'amitié envers les Indiens. Certes, ceux qu'elle côtoie dans le convoi ne lui veulent aucun mal, mais le changement paraît trop soudain à l'écran.

   Celui du capitaine (Christian Bale, aussi énigmatique que mal rasé) est plus subtil et met plus de temps à se produire. A travers lui, le réalisateur tente de donner un visage humain aux crimes commis par les Yankees, qui ont contribué à l'extermination partielle des tribus indiennes. D'autres personnages viennent renforcer ce discours, comme celui du second du capitaine ou encore celui du prisonnier, ajouté au convoi à l'occasion d'une étape.

   Le film prend son temps... et ce n'est pas pour me déplaire. La photographie est superbe, sublimant des paysages minéraux dans la première partie (la forêt constituant l'arrière-plan de la seconde partie). Les personnages sont en général bien caractérisés, malgré quelques facilités. (Par exemple, on sent très vite que l'arrivée du prisonnier -qui est un ancien combattant- va orienter l'intrigue dans un sens dramatique.) Pour moi, outre les deux personnages principaux, la figure qui se détache est celle du chef cheyenne, dont le visage, vu de profil, ressemble à ces gigantesques portraits sculptés dans la roche du Mont Rushmore.

   Bien évidemment, tous ceux qui partent du Nouveau-Mexique n'arriveront pas vivants dans le Montana. On peut s'amuser à deviner quel va être le prochain personnage à sortir de scène. L'auteur aurait néanmoins pu nous épargner la dernière tuerie. Mais je crois que celle-ci se situe dans la droite ligne de son propos : elle achève la mutation du capitaine et rend possible sa rédemption... mais Dieu que la scène de train est mal foutue !

   Je suis sorti de là partagé. Le dernier quart-d'heure ne m'a pas plu, mais j'ai aimé ce qui a précédé.

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mardi, 01 mai 2018 | Lien permanent | Commentaires (3)

L'Affaire Farewell

   "Farewell" est un nom de code, attribué à un officier du K.G.B. idéaliste, qui a décidé de trahir le régime soviétique pour mieux servir son pays. Comme il a été en poste en France, qu'il parle français et qu'il admire la culture française, c'est aux services secrets français qu'il s'adresse pour dévoiler les secrets de son organisation.

   L'un des ressorts comiques (pas inventé) est que son "agent traitant" n'est pas un professionnel (c'est un ingénieur travaillant chez Thomson)... et c'est d'ailleurs pour cela qu'il n'a pas été repéré ! Guillaume Canet joue donc les candides au pays des Soviets, face à un Emir Kusturica impressionnant, tout de granite. L'autre fil rouge comique, en quelque sorte, est l'ampleur de la pénétration soviétique en Occident. Grâce à Sergeï Grigoriev (alias Farewell), Français puis Américains vont comprendre d'abord à quel point ils ont été bernés pendant des années, puis à quel point leur adversaire est finalement affaibli.

   Les seconds rôles sont excellents. On a bien choisi les acteurs qui campent Mitterrand et Reagan. David Soul (oui, Hutch !) et William Dafoe sont parfaits en membres de l'administration américaine. Les femmes sont très bien aussi, même si l'on doit noter qu'elles sont au second plan. Cette histoire d'espionnage est d'abord une affaire de burnes !

   Christian Carion, bien que né à Cambrai, n'a pas tourné que des bêtises ! J'avais préféré son Une Hirondelle a fait le printemps à Joyeux Noël, film tout à fait honorable mais plus inégal que le précédent. J'ai retrouvé dans L'Affaire Farewell des qualités entrevues dans ces deux derniers. Carion nous propose quelques très belles scènes "en pleine nature", notamment sous la neige. En intérieur, il manie avec dextérité les contrastes, jouant sur les visages des protagonistes pour accentuer une atmosphère particulière. C'est d'abord un film à suspense, même si les initiés connaissent déjà la fin. C'est aussi un film d'espionnage : on n'apprendra cependant rien d'étourdissant sur les techniques mises en oeuvre, les deux héros étant finalement assez basiques dans leur relation clandestine... et, pour tout dire, maladroits.

   Il faut, pour terminer, évoquer la musique d'accompagnement. Elle est formidable et signée Clint Mansell, illustre inconnu pour moi, mais qui a une bonne cote dans le métier apparemment.

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dimanche, 27 septembre 2009 | Lien permanent | Commentaires (1)

Exodus : Gods and Kings

   Ridley Scott est de retour avec une superproduction hollywoodienne. Ses dernières œuvres m'ont un peu laissé sur ma faim, de l'agaçant Robin des Bois au très réussi American Gangster, en passant par les corrects (sans plus) Prometheus et Mensonges d'Etat.

   L'une des premières séquences confirme, s'il était nécessaire, le savoir-faire du réalisateur dans les scènes d'action. Il est question de la bataille de Qadesh, qui opposa les Egyptiens aux Hittites. Le tout est servi par une pléiade d'acteurs connus, Christian Bale se détachant nettement du lot dans le rôle de Moïse. Par contre, on ne peut que regretter le choix de Joel Edgerton pour incarner Ramsès. D'autres personnes avaient été pressenties. Dommage... d'autant plus que le doublage n'est pas très réussi.

   Ceux qui ont vu Les Dix Commandements ne seront pas surpris par le déroulement de l'intrigue. Scott introduit toutefois une nouveauté qui a produit son petit effet : la présence d'un enfant, qui parle comme un adulte et que Moïse est le seul à voir (ainsi que les spectateurs, bien sûr). Cette incarnation divine est une excellente idée, d'autant plus qu'elle commence à apparaître à Moïse après qu'il a été victime d'un accident (avec plaie à la tête). Le scénario joue sur les deux tableaux, tentant de satisfaire aussi bien les croyants que les sceptiques.

   Cela se vérifie lors de la grande séquence de la mer Rouge. On peut interpréter le retrait des eaux aussi bien comme un phénomène naturel que comme le résultat d'une intervention divine. La suite est plus classique, mais elle a été précédée d'une éblouissante scène de poursuite en chars égyptiens, à flancs de montagne.

   Tout aussi impressionnante est la représentation des dix plaies d’Égypte. Cela constitue un véritable morceau de bravoure, une des plus belles réussites visuelles de ces derniers mois. Toujours aussi habile, Ridley Scott présente ces catastrophes comme des punitions divines mais, par la voix de l'un des personnages, il en propose aussi une explication rationnelle (ce en quoi il rejoint certains scientifiques).

   Ces moments épiques sont entrecoupés d'intermèdes intimes. Au palais, les scènes sont assez convenues, plutôt clinquantes, mais convaincantes. On retrouve avec plaisir la délicieuse Golshifteh Farahni (naguère étincelante dans Syngué Sabour) en reine Nefertari. Les péripéties qui se déroulent dans la ville du vice-roi Hegep sont plus palpitantes. Moins vraisemblable est par contre l'intrigue conjugale, qui vise le public "familial".

   Malicieux, au moment où il est question de la remise des Dix Commandements, Ridley Scott abandonne la surenchère numérique pour donner une version somme toute sobre de la gravure du texte sacré. C'est un peu à l'image du film, une grosse machine bien huilée dans laquelle le réalisateur a introduit quelques grains de sable personnels.

   Un soir, pour se détendre, dans une grande salle (après avoir vidangé la vessie), c'est idéal.

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lundi, 12 janvier 2015 | Lien permanent

30 jours max

   Tarek Boudali est un membre de la "bande à Lacheau" (que, selon un documentaire instructif récemment diffusé sur W9, il conviendrait plutôt d'appeler la "bande à Fifi"). Habitué des seconds rôles, il passe à présent au premier plan, en tant qu'acteur et réalisateur, accompagné de ses acolytes.

   Il applique les mêmes recettes qui ont fait le succès des films de Philippe Lacheau, de Babysitting à Nicky Larson, en passant par Alibi.com.

   Du coup, on ne s'étonnera pas que le héros (Rayane) soit, au début de l'histoire, un loser de chez loser, qui se fait manger la laine sur le dos par son ex, les mecs de son quartier et les collègues du commissariat. La mise en scène de quelques unes de ses gaffes ne manque pas de saveur. Bien évidemment, dans la suite de l'histoire, l'image du héros s'améliore, sur le plan physique (merci le banc de muscu !) comme sur le plan moral. Je pense qu'il y a des références à Shazam.

   Dans des circonstances que je ne raconterai pas, Rayane attrape une maladie mortelle. Il décide, dans les trente jours qu'il lui reste à vivre, de changer de destin. Le plus intéressant est, qu'au départ, il se la joue gros beauf, à Las Vegas. C'est de retour en France qu'il essaie de devenir un héros.

   C'est l'occasion de signaler une belle galerie de personnages secondaires. Le mieux servi par l'histoire est José Garcia (en truand "kébabesque"), qui, dans le rôle du grand ancien venu épauler la bande de jeunes, succède à Gérard Jugnot (Babysitting), Christian Clavier (Babysitting 2) et Didier Bourdon (Alibi.com et Nicky Larson). Le Splendid est toujours représenté, avec Marie-Anne Chazel, en grand-mère déjantée. On retrouve aussi avec plaisir Chantal Ladesou (sorte de fil rouge gaguesque de l'intrigue) et Philippe Duquenne. (J'ai adoré toutes les scènes avec le médecin !)

   Tous les personnages en prennent pour leur grade, les hommes comme les femmes, les jeunes comme les vieux, les Blancs comme les "minorités visibles"... et même les animaux ! (Pauvre hérisson...) C'est réjouissant, voire choquant pour une partie du public de la salle. Par contre, certains ont adoré, comme les deux retraités assis pas très loin de moi, pliés de rire pendant plus la moitié du film.

   Comme je sais qu'il y a des âmes délicates qui lisent de temps à autre ce blog, je me dois de signaler que l'humour est (assez souvent) à base de vomi, de caca, de sperme... et même de pus. On entend fréquemment les mots "seins", "nichons" et "bite". C'est potache et assumé comme tel. Le réalisateur recourt aussi au comique de situation. Pour les spectateurs qui ont compris le principe (chaque scène d'apparence sérieuse se conclut par une chute), le jeu est deviner d'où va venir le trait d'humour.

   En même temps, c'est un film d'aventures, avec gros flingues et poursuites en voitures. Cela dure moins d'1h30 et permet d'oublier un temps la pandémie et ses conséquences.

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mercredi, 28 octobre 2020 | Lien permanent | Commentaires (2)

Irréductible

   Quand on est humoriste et comédien, qu'on entre dans la deuxième phase de sa carrière sans avoir atteint le sommet et qu'on en a un peu marre de jouer les utilités dans des comédies faciles, le salut peut venir de la réalisation. Voilà donc Jérôme Commandeur pour la première fois seul aux manettes (son premier film étant une coréalisation) et qui, avec son équipe de scénaristes, a pu se garantir de bonnes répliques.

   Durant les vingt premières minutes, on (re)voit quasiment tous les gags de la bande-annonce, mais dans le désordre. Sans trop en révéler, je peux dire que l'une des situations montrées est le point de départ de l'histoire, mais qu'elle donne naissance à une série de retours en arrière. Le héros ne se trouve pas forcément à cet endroit pour la raison qu'on imagine.

   Curieusement, il y a donc une (petite) part de mystère dans ce qui semblait être de prime abord une comédie très balisée, un poil graveleuse. J'ai été agréablement surpris par le scénario, plus étoffé que ce que laisse présager la bande-annonce.

   A la base, il s'agit quand même d'une comédie facile, qui tape sur les fonctionnaires (surtout les municipaux et ceux de préfecture). On rit de bon cœur, même si l'on est conscient que le trait est (très) appuyé. Commandeur peut se reposer sur une brochette de seconds rôles caricaturaux, mais visiblement interprétés avec plaisir par des invités comme Gérard Darmon, Valérie Lemercier, Christian Clavier et Pascale Arbillot. C'est de surcroît plutôt bien écrit. Les dialogues font souvent mouche et le rythme est assez soutenu.

   Sur le fond, l'intrigue nous conduit à prendre du recul vis-à-vis du héros, assez égoïste au départ (jusqu'à son combat pour garder son poste de fonctionnaire). Il change parce qu'il rencontre l'amour, en la personne d'une chercheuse au mode de vie... particulier (Laeticia Dosch, très bien). On s'oriente vers une fin un peu trop bien-pensante pour moi, mais cela contribue à faire de ce film une comédie familiale, parfois un peu corsée, mais sans vulgarité.

   P.S.

   Quand on découvre, au début du film, la scène se déroulant à l'école (avec le héros jeune), on s'aperçoit que, dans la bande-annonce, on a coupé la réponse de l'une des camarades de classe du héros, une petite blonde qui a des ambitions politiques... C'est absurde sur le plan chronologique (le héros et la personne représentée ayant presque dix ans d'écart dans la réalité)... mais c'est savoureux.

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jeudi, 30 juin 2022 | Lien permanent | Commentaires (1)

The Batman

   Moins de dix ans après la sortie de The Dark Knight Rises, la Warner a décidé de relancer une série de films sur le plus rentable populaire de ses super-héros. Aux manettes se trouve Matt Reeves, qui s'est précédemment illustré avec La Planète des singes. Tout de même... il fallait des couilles pour tenter de succéder à Christopher Nolan... et peut-être aussi un max de thunes, comme le susurre fielleusement ma voisine de droite (200 millions de dollars, selon les estimations les plus récentes).

   Concernant la distribution, je suis partagé. Robert Pattinson (pour lequel le rôle principal aurait été réécrit) et Zoë Kravitz s'en sortent assez bien, mais ils ne font pas oublier certains de leurs prédécesseurs. (Christian Bale était un meilleur Batman et Michelle Pfeiffer une Catwoman bien plus inspirante.) De plus, j'ai beau apprécier Andy Serkis, dans le rôle d'Alfred Pennyworth, je regrette Michael Caine. Je ne suis pas non plus emballé par la nouvelle version du Pingouin (Rendez-nous Danny DeVito !) ... mais qui sait ce que nous réserve la suite ?

   Heureusement, certains seconds rôles relèvent le niveau : Jeffrey Wright fait un bon lieutenant Gordon, John Turturro un mafieux très convaincant et Paul Dano un psychopathe redoutable, particulièrement machiavélique.

   Cependant,  les véritables qualités du film sont ailleurs. C'est d'abord d'une grande beauté formelle. L'image est souvent sombre, tout en restant parfaitement visible (contrairement à ce que j'ai pu voir dans d'autres grosses productions). La photographie est superbe, servie par de bons effets spéciaux, très bien intégrés à l'action. Cela m'amène à la mise en scène, épatante. J'ai presque envie de retourner voir le film pour en savourer de nouveau certains plans. Reeves a un vrai talent pour choisir ses cadrages et les angles de prise de vue. Pour moi, les scènes (quasi) statiques (le plus souvent des vues urbaines) sont plus belles que les scènes d'action, pourtant très réussies. On attend bien sûr celle avec la Batmobile. (Au début, le héros ne se déplace qu'à moto.) On est cueilli par la beauté d'un combat rapproché, dans l'obscurité, sporadiquement éclairé par le fonctionnement des armes à feu. Enfin, je recommande particulièrement la séquence finale, dans le stade, un moment d'anthologie.

   Le tout est accompagné d'une musique bien choisie (due à Michael Giacchino, l'Alexandre Desplat américain), parfois fascinante... parfois un brin humoristique (avec une allusion au personnage de Dark Vador). Surtout, j'ai aimé qu'on nous propose une histoire à rebondissements, pas aussi linéaire qu'on pouvait le craindre... même si je déplore la peinture quasi systématiquement négative des élites, une tendance lourde du cinéma contemporain (mais qui est conforme à ce qu'on trouve dans la BD d'origine).

   Bref, c'est un très bon spectacle, dans la veine du Joker de Todd Philips, avec une pincée du Seven de David Fincher.

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mercredi, 02 mars 2022 | Lien permanent | Commentaires (1)

Discount

   Cette comédie sociale bien de chez nous regarde du côté de Ken Loach et d'une brochette de films au casting pas forcément très glamour, mais à l'histoire prenante. C'est une plongée dans la "France d'en-bas", celle qui se trouve à la lisière du chômage et ne parvient pas à joindre les deux bouts. Elle est incarnée ici par les employés d'un "maxi-discompte", qui pourrait être Leader Price ou Lidl.

   Les "prolos" sont confrontés à la modernité : celle du discours du "management", celle du chronométrage en caisse, celle de la vidéo-surveillance et celle des futures caisses automatiques.

   De la demi-douzaine de rebelles se détache Christiane, très soupe-au-lait, à la gouaille parfois joyeuse. Elle est incarnée par Corinne Masiero, une habituée des productions télévisuelles qu'on a pu voir aussi au cinéma, par exemple récemment dans La Marche. Elle y avait déjà croisé M'Barek Belkouk, doté d'un bon potentiel comique.

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   Tous les autres acteurs sont bons. On les sent très impliqués dans ce film, qui a bénéficié d'un financement participatif. Parmi les figures connues, on trouve Pascal Demolon, vu naguère dans Radiostars. Cela pourrait donner un film "de gauche" très "politiquement correct". C'est mieux que cela.

   L'histoire est tout sauf angélique. L'image de prolos solidaires alterne avec celle de personnes finalement très individualistes, un peu paumées certes, mais pas forcément altruistes. Le lien qui se noue entre les membres de la bande est d'abord forgé par l'appât du gain. Habilement, l'intrigue suggère (à travers l'exemple des vigiles) que le système dans lequel ils évoluent a tendance à les monter les uns contre les autres. Mais, bien sûr, il y a autre chose, d'autant plus que la population de la région va soutenir ces Robins des bois des temps modernes. On reste toutefois dans le cadre de la société de consommation et dans la recherche des produits les moins chers possibles. Il n'y a aucune réflexion sur la manière dont ils sont fabriqués.

   L'autre angle intéressant de l'histoire est constitué par tout ce qui touche au personnage de la patronne, très bien interprétée par Zabou Breitman (vue récemment dans 24 jours). Bien qu'étant officiellement la responsable des malheurs des héros, elle est présentée comme quelqu'un de complexe. C'est une ancienne chômeuse, de surcroît mère célibataire... et musulmane. Elle s'en est sortie à la force du poignet, mais elle est soumise à de fortes pressions, n'étant que la directrice d'un établissement franchisé.

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   Cela donne une comédie savoureuse, qui tente d'introduire un peu de fantaisie dans un monde de plus en plus sérieux, où les êtres humains sont réduits à des chiffres dans des colonnes.

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jeudi, 12 février 2015 | Lien permanent

Amsterdam

   C'est un film à voir en version originale sous-titrée, ne serait-ce que pour la manière dont les acteurs anglophones prononcent le nom de la ville néerlandaise. En français, c'est haché, comme des montagnes russes (Am-ster-dam), alors qu'en anglais, l'accent tonique est placé sur première syllabe. Cela donne (surtout dans la bouche de Margot Robbie, mais pas que) une aura sensuelle à ce nom, qui évoque une période heureuse, faite de créativité artistique, d'amour et de liberté.

   Mais ça, c'est le passé, que l'on découvre par l'un des retours en arrière. Le paradoxe est que ces moments de bonheur sont nés par accident, juste après la Première Guerre mondiale, alors que deux des trois héros sortent fracassés du conflit. (Ils se sont battus en France.)

   L'intrigue principale se déroule au début des années trente, outre-Atlantique, lors du premier mandat de Franklin Roosevelt. Il s'agit d'une histoire vraie, celle d'un complot menée par certaines élites économiques pour installer un régime fasciste aux États-Unis.

   David O. Russel (qui réalisa jadis Les Rois du désert) choisit de mettre cela en scène avec beaucoup de dérision. C'est l'une des réussites de ce film, de mêler des tons différents, celui du drame (autour du complot politique et des assassinats), celui de la comédie (ce sont des bras cassés qui tentent de le déjouer) et celui de la romance (celle entre Valerie et Harold et celle, à peine naissante, entre Burt et Irma).

   Russel s'appuie sur une distribution brillante. J'étais bien entendu transi devant Margot Robbie (en brune ce coup-ci), très à l'aise dans la peau d'un personnage qui associe force et faiblesses. J'ai aussi beaucoup apprécié la composition de Christian Bale, dont le réalisateur a su exploiter le potentiel comique. Dans ce registre, il faut noter la prestation d'un improbable duo, les Laurel & Hardy de l'espionnage, interprétés par Michael Shannon et Mike Myers. Du côté des dames, il faut signaler Zoe Saldana et Anya Taylor-Joy (délicieusement vénéneuse). Chez les messieurs, Washington Junior, Rami Malek, Chris Rock, Matthias Schoenaerts et Robert de Niro font bien le job.

   Le choix des acteurs et l'écriture des personnages révèlent un autre aspect de l'histoire : les relations interethniques. Du côté des "gentils", on a deux couples mixtes et des soldats/officiers qui ne se laissent pas guider par les préjugés racistes. Du côté des "méchants", les modèles sont certes européens, mais ceux des années 1930... On note que le trio de héros, en plus de franchir la "barrière des races", transcende les inégalités de condition sociale.

   Du coup, même s'il y a des longueurs, même si le scénario suit parfois des détours qui pourraient paraître inutiles, je me suis régalé. Russel a visiblement voulu profiter au maximum des interprètes qu'il avait sous la main. On sent le plaisir de jouer et de faire jouer. Finalement, au-delà de la politique et du social, c'est peut-être tout simplement un film sur le bonheur.

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samedi, 19 novembre 2022 | Lien permanent | Commentaires (2)

Cumul mon amour !

   Les socialistes ont fini par s'y mettre. Ils ont mis le temps, ils se sont montrés très timides, mais ils ont accouché d'une nouvelle loi limitant le cumul des mandats. Attention toutefois : votée par l'Assemblée nationale, elle doit encore passer devant le Sénat, dont les membres semblent majoritairement hostiles aux principes de bon sens que le texte contient.

   Rappelons tout d'abord qu'il s'agit d'une promesse du candidat Hollande, contenue dans l'engagement numéro 48 (au passage, je conseille à ceux qui ont joué la surprise quand le gouvernement a mis au programme le mariage homo de lire l'engagement numéro 31) :

"J’augmenterai les pouvoirs d’initiative et de contrôle du Parlement, notamment sur les nominations aux plus hauts postes de l’État afin de les rendre irréprochables. Je ferai voter une loi sur le non-cumul des mandats. Je renforcerai la parité entre les femmes et les hommes en alourdissant les sanctions financières contre les partis politiques qui ne la respectent pas. J’introduirai une part de proportionnelle à l’Assemblée nationale."

   Le formulation était vague, contrairement à ce qui est écrit dans d'autres articles. J'aurais aimé que le gouvernement aille plus loin, mais, pour l'instant, il faut se contenter de la loi que vient de voter la majorité absolue des députés. Le principe est simple : à partir de 2017, on ne pourrait plus être député (ou sénateur ou député européen) ET maire, adjoint, (vice) président de Conseil départemental, de Conseil régional ou d'un établissement intercommunal (genre la Communauté d'agglomération du Grand Rodez).

   Le diable se niche dans les détails... et dans ce qui n'est pas écrit. Cela veut donc dire que l'on pourra être parlementaire et conseiller départemental ou régional, mandats qui sont rémunérés. Les parlementaires pourront aussi rester conseillers municipaux ou intercommunaux, ces fonctions étant très souvent (mais pas toujours) bénévoles. Voilà qui ruine l'un des arguments des opposants (comme le sénateur Stéphane Mazars, qui s'est récemment exprimé dans les colonnes de Centre Presse), qui prétendent qu'un parlementaire déconnecté des réalités locales fait du moins bon travail. Grâce à cette loi sur le non-cumul, les parlementaires pourront garder un pied en province. (Selon moi, on aurait dû seulement tolérer les fonctions de conseiller municipal ou intercommunautaire... ou alors interdire le cumul des indemnités.) Notons que la loi ne change rien aux règles actuelles de cumul des mandats locaux.

   Il va être intéressant de suivre le passage au Sénat. En effet, d'après Le Monde, le texte a été voté par la grande majorité des députés PS, Verts et Front de Gauche, alors que ceux du PRG ont plutôt voté contre (en compagnie de l'UDI et de l'UMP). Quelle va être l'attitude des sénateurs radicaux du groupe RDSE (dont S. Mazars) ?

   Le piquant dans cette affaire est que les récentes péripéties de la vie politique ruthénoise ont conduit le maire de Rodez, Christian Teyssèdre, qui est aussi (depuis mars 2013) vice-président du Conseil régional de Midi-Pyrénées, à s'emparer de la présidence de la Communauté d'agglomération du Grand Rodez. A droite, on avait déjà "Cumuluche". Faudra-t-il désormais aussi parler de Christian "Excèdre" ?

   Blague à part, cette loi sur le cumul des mandats, bien que positive, n'en est pas moins révélatrice du conservatisme des élus de gauche comme de droite et du manque d'autorité de l'exécutif parisien. On a déjà pu le constater à propos de la transparence des richesses. Rappelez-vous : en avril dernier, tous les membres du gouvernement avaient dû publier leur déclaration de patrimoine. Ce fut indéniablement un pas important, mais, à la lecture desdites déclarations, il était clair que certains ministres avaient rusé. (Sur ce sujet, je conseille les articles que Donato Pelayo a signés, les 19 et 26 avril ainsi que le 3 mai 2013, dans Le Nouvel Hebdo.)

   En dépit (entre autres) de l'affaire Cahuzac (et de ses conséquences électorales), beaucoup de députés ont persisté à s'opposer à l'application de la transparence à leur patrimoine. La loi votée fin juin par l'Assemblée (actuellement examinée par le Sénat) est pourtant modérée dans son ambition. Si la déclaration concerne un grand nombre d'élus (ainsi que des hauts fonctionnaires), la publicité du contenu est interdite : le citoyen lambda pourrait consulter mais pas révéler publiquement ce qu'il a lu...

   Nos parlementaires sont décidément bien cachottiers... Certains jouent un peu plus franc-jeu, comme Stéphane Mazars. Dans l'entretien publié dans Centre Presse, il affirme : "Je gagne mieux ma vie en étant avocat que sénateur !" Examinons la chose. L'an dernier, j'ai salué sa décision de renoncer à ses émoluments d'adjoint au maire de Rodez. Du coup, il ne touche plus que son indemnité de sénateur, soit environ 5 500 euros nets par mois... auxquels il faut ajouter environ 6 000 euros d'I.R.F.M. (Indemnité Représentative de Frais de Mandat)... non soumise à l'impôt sur le revenu.

   Comparons aux revenus des avocats. En 2008, en moyenne, il s'agissait d'environ 6 200 euros par mois. Mais, comme les écarts sont énormes dans la profession, il peut être utile de comparer avec le revenu médian, celui qui sépare en deux groupes égaux les membres de la profession : 3 800 euros. Je pense que les revenus du sénateur aveyronnais se rapprochaient plutôt du premier chiffre, ce qui explique qu'il affirme gagner (un peu) plus en exerçant sa profession... si l'on ne compte que l'indemnité de base (6 200 euros contre 5 500). Ou alors, il gagnait vraiment très très bien sa vie et ses revenus dépassaient le cumul des deux indemnités, soit 11 500 euros par mois. Bigre ! Voilà que je me mets à regretter de ne pas porter la toge !

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mercredi, 10 juillet 2013 | Lien permanent | Commentaires (2)

Rodez dans ”L'Express”

   Ce mercredi, des Aveyronnais ont pu penser que la politique du chef-lieu suscitait l'intérêt de la France entière. Evidemment, il n'en est rien et, si la cité des Ruthènes fait la "une" de L'Express, c'est uniquement dans notre département (et peut-être les limitrophes, allez savoir).

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   Les "news magazines" sont coutumiers de ces couvertures locales, conçues pour faire vendre davantage de papier. A l'intérieur de l'hebdomadaire a été placé un petit cahier détachable de 8 pages, dont la première ressemble à ceci :

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   On commence par une double page titrée Un programme pas si commun, qui présente la situation politique générale sur le Piton, rappel de la conquête teyssèdrienne à la clé. Les pages suivantes analysent la mise en application des promesses du candidat Teyssèdre. Puisqu'on est dans la paraphrase historique, on peut se laisser à dire que, pour l'hebdomadaire centriste, le bilan est "globalement positif".

   Vient en premier la fiscalité, un point-clé pour l'équipe en place (après les années Censi qui avaient vu une croissance importante de la ponction fiscale locale). Le maire ne cache pas sa satisfaction et il rappelle l'évaluation louangeuse publiée cette année par le magazine Challenges.

   En terme de transport, les résultats sont aussi là, même si j'attends avec impatience de voir quels projets vont émerger au niveau de l'agglomération suite à l'adhésion de nouvelles communes, au premier rang desquelles Baraqueville. Il m'apparaît comme une évidence que la mise en place de dessertes cadencées Baraqueville - La Primaube - Rodez (par bus... mais pourquoi pas par train ?) serait un bon moyen de désengorger cet axe routier où circuler est devenu problématique à certains moments de la journée.

   L'élargissement de l'agglomération fait l'objet de remarques plus critiques. Et pourtant... C'est peut-être le début de la construction d'un territoire cohérent, qui pourrait regrouper entre 15 et 20 communes, et faire du Ruthénois un pôle d'attraction régionale.

   Le gros point noir reste le grand contournement de Rodez, dont la réalisation semble renvoyée aux calendes grecques. Sur ce sujet, je continue à penser que l'on n'a pas assez pointé les responsabilités de l'Etat et du Conseil général de l'Aveyron. L'accord tacite entre les services de la préfecture et la Majorité départementale pour enterrer le projet est à mon avis une connerie monumentale.

   La dernière page du mini-dossier est consacrée spécifiquement à l'opposition de droite, désunie... et pas franchement motivée. C'est un sujet de conversation sur le Piton, où les méchantes langues glosent sur l'absentéisme des élus des trois listes vaincues en 2008. Voyons ce qu'il en est.

   Grâce au site de la mairie de Rodez, on peut accéder aux comptes-rendus des séances du Conseil municipal depuis mars 2008 (l'An 1 de la Nouvelle Ere de Gauche Pitonnesque). Au début de chaque fichier figure la liste des présents et absents, excusés ou non. On peut donc se livrer à un petit calcul sur les 28 séances qui se sont tenues entre le 14 mars 2008 et le 21 octobre 2011.

   La palme de la non -présence revient à deux personnes, Hélène Boulet (seconde élue de la liste menée par Frédéric Soulié) et Jean-Philippe Murat (ex-numéro 3 sur la liste conduite par Jean-Louis Chauzy), qui n'ont assisté qu'à 5 des 28 séances ! Le second a peut-être souvent été retenu par des obligations professionnelles (et les difficultés de l'entreprise Drimmer). La première n'a pas été vue au Conseil depuis le 3 novembre 2008 !

   Derrière ces deux champions arrive l'une des têtes de liste de 2008, Frédéric Soulié, plutôt pugnace au début du mandat de Christian Teyssèdre, mais qui s'est progressivement effacé. Il n'a assisté qu'à 16 des 28 séances, dont 5 des 14 dernières.

   Lui succède un duo au profil similaire : Jean-Louis Chauzy et Bernard Saules, qui n'ont assisté qu'à 18 des 28 séances. Tous deux ont été plus assidus au début de la nouvelle mandature (J-L Chauzy n'a même manqué aucune des 9 premières séances), puis ont laissé leurs autres activités prendre le dessus. Si le président du CESER fait régulièrement parler de lui dans la presse et paraît toujours se soucier de l'avenir de Rodez, Bernard Saules semble la jouer plus perso. Il n'a de plus assisté qu'à 3 des 9 dernières séances dont le compte-rendu a été publié à la date où j'écris ces lignes. Il est vrai qu'entre le football, le Crédit agricole, le Conseil général et le Conseil municipal de Rodez, le bonhomme a largement de quoi s'occuper...

   Juste derrière se positionne Maïté Laur, ex-numéro 2 sur la liste Chauzy, qui a "séché" 9 des 28 séances.

   Il reste la bonne élève du groupe, Régine Taussat, qui n'a manqué que 5 des 28 séances. Que l'on partage ou pas ses opinions, on ne peut que la féliciter pour l'authenticité de son engagement politique. Qu'il me soit aussi permis de rappeler que, des "grands" candidats, elle fut la seule à émettre publiquement de fortes réserves sur le projet Soulages, s'engageant à consulter la population.

   P.S.

   Les curieux pourront s'amuser à consulter d'anciens articles consacrés à Rodez, non pas par L'Express, mais par Le Point, en septembre 2008. Trois méritent particulièrement le détour :

- La ville au banc d'essai, qui traite de la transformation du centre-ville, des écoles, du logement social, de la RN 88 et du sport

- Christian Teyssèdre se lâche, un portrait plutôt flatteur du premier magistrat municipal

- Musée Soulages : la polémique, un papier pas suffisamment critique à mon goût

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mercredi, 23 novembre 2011 | Lien permanent

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