mercredi, 30 octobre 2019
Abominable
C'est l'un des films d'animation proposés aux spectateurs adultes et enfants en cette période de congés scolaires. Même s'il comporte des scènes comiques, il joue moins sur l'humour qu'Angry Birds 2 et La Ferme contre-attaque.
L'intrigue mêle le merveilleux à l'admiration pour la nature. Cela peut paraître paradoxal pour une production DreamWorks, mais je pense que les auteurs ont été influencés par des longs-métrages de chez Disney-Pixar... plutôt pour le meilleur. (La réalisatrice Jill Culton a d'ailleurs débuté chez Pixar.)
J'ai vu le film dans une grande salle et je reconnais que l'image est, en général, jolie. Concernant la musique, je suis plus partagé : les morceaux interprétés au violon sont assez chouettes, mais la musique d'accompagnement est très moyenne. Je profite de l'occasion pour signaler une bourde relevée dans la rubrique "secrets de tournage", sur Allociné :
C'est évidemment d'un instrument datant de plus de 300 ans (et non 3 000) que les musiciens ont pu jouer...
L'intrigue est classique. L'héroïne est une enfant unique de Shanghaï, dont le papa est décédé, et qui rêve d'accomplir un périple, en hommage à son père. Elle fait la rencontre d'un drôle de Yéti, dont on finit par comprendre que c'est un jeune mâle : il aime se goinfrer, rote de manière effroyable... et fait des bêtises. Le début nous présente d'autres jeunes citadins chinois du XXIe siècle : un petit gros attiré par la malbouffe et une bande d'abruti.e.s fasciné.e.s par leurs ordiphones...
Les aventures que vont vivre l'héroïne, le petit gros et le bogosse superficiel vont les faire mûrir... et nous faire découvrir une partie de la Chine, à tel point que l'on pourrait considérer le film comme un très long spot publicitaire pour le "pays du milieu". C'est de plus idéologiquement orienté, puisqu'il n'est dit nulle part que l'Everest se trouve à la frontière du Népal et du Tibet. Seule la Chine est mentionnée... Mais les protestations les plus vives ont été émises en Asie du Sud-Est, en raison de la présence (sur la carte murale située dans l'abri de l'héroïne) de la fameuse "ligne en neuf traits", expression de l'impérialisme chinois, dont les revendications maritimes empiètent considérablement sur les zones économiques exclusives de ses voisins.
Ci-dessus, on remarque que les tirets (que j'ai surlignés en rouge) incluent l'île (indépendante) de Taïwan dans le territoire chinois, sans même parler des espaces maritimes des Philippines, du Vietnam, de l'Indonésie et de la Malaisie...
Si l'on fait abstraction de ces considérations géopolitiques, on peut profiter du spectacle entraînant et d'une histoire sympathique. Notons qu'il est affirmé à plusieurs reprises qu'une espèce sauvage (comme le Yéti) a vocation à vivre dans son environnement naturel (donc loin des humains).
J'ai quand même tiqué devant un autre biais idéologique : les personnages positifs sont tous des Chinois et les méchants ont quasiment tous une tête d'Occidental. Moralité ? Le soft power chinois est en marche, et DreamWorks lui sert de cheval de Troie !
22:28 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, politique
mardi, 29 octobre 2019
Fahim
Ce film, que certaines mauvaises langues qualifient d' "immigrationniste", est inspiré d'une histoire vraie, celle de Fahim Mohammad, jeune sans-papiers bangladais... et joueur d'échecs prodige. Réalisé par Pierre-François Martin-Laval, il bénéficie de la présence au générique d'Isabelle Nanty et Gérard Depardieu.
La première partie de l'histoire plante le décor au Bangladesh. On n'est pas du tout dans un film français. Les scènes ont été tournées en langue locale. C'est assez bon dans la manière de décrire un pays en développement. La famille de Fahim n'est ni riche ni miséreuse... mais son père milite dans les rangs de l'opposition. Le départ est vécu comme un déchirement et, hélas, mis en en scène avec beaucoup de pathos.
La filière suivie pour arriver en France métropolitaine n'est pas décrite dans le détail. On saura juste que le père et le fils sont d'abord passés en Inde (en graissant quelques pattes).
Le ton de la comédie l'emporte quand le gamin entre au contact d'un prof d'échecs aussi obèse que grande gueule. Dans le rôle, Depardieu est vraiment bon (meilleur encore que dans Thalasso). Les camarades de jeu de Fahim sont aussi bien campés. Le gros point faible est le personnage d'Isabelle Nanty, qui incarne une sorte de Mère Teresa laïque... et qui en fait des tonnes.
Entre deux séances de cours (ou de parties) d'échecs, on découvre à travers les pérégrinations du duo les difficultés rencontrées par les migrants en France. La plus surprenante est liée au comportement étrange du traducteur employé par la préfecture ! (Précisons tout de même qu'on nous présente des migrants pétris de qualités : le fils est une sorte de surdoué, le père un modèle de pudeur, travailleur de surcroît et la mère restée au pays est une musulmane non voilée.)
Bref, même si l'on ne partage pas tous les a priori qui ont guidé la création de ce film, on peut quand même savourer ce quasi-conte de fées.
P.S.
Il y a un mois et demi, Le Parisien a publié (sous la plume d'Agnès Vives) un excellent article (incluant un podcast très complet) revenant sur l'ensemble du parcours de Fahim, avant et après le film.
P.S. II
Il faut savoir "rendre à César, ce qui appartient à César". A sa toute fin, le film évoque l'action d'un ancien Premier ministre, celui qui était en poste en 2011, mais sans le nommer. A ceux qui ne maîtriseraient pas l'histoire récente de la Ve République, je conseille d'aller jeter un œil à un article du Figaro.
23:11 Publié dans Cinéma, Politique, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Fahim
Ce film, que certaines mauvaises langues qualifient d' "immigrationniste", est inspiré d'une histoire vraie, celle de Fahim Mohammad, jeune sans-papiers bangladais... et joueur d'échecs prodige. Réalisé par Pierre-François Martin-Laval, il bénéficie de la présence au générique d'Isabelle Nanty et Gérard Depardieu.
La première partie de l'histoire plante le décor au Bangladesh. On n'est pas du tout dans un film français. Les scènes ont été tournées en langue locale. C'est assez bon dans la manière de décrire un pays en développement. La famille de Fahim n'est ni riche ni miséreuse... mais son père milite dans les rangs de l'opposition. Le départ est vécu comme un déchirement et, hélas, mis en en scène avec beaucoup de pathos.
La filière suivie pour arriver en France métropolitaine n'est pas décrite dans le détail. On saura juste que le père et le fils sont d'abord passés en Inde (en graissant quelques pattes).
Le ton de la comédie l'emporte quand le gamin entre au contact d'un prof d'échecs aussi obèse que grande gueule. Dans le rôle, Depardieu est vraiment bon (meilleur encore que dans Thalasso). Les camarades de jeu de Fahim sont aussi bien campés. Le gros point faible est le personnage d'Isabelle Nanty, qui incarne une sorte de Mère Teresa laïque... et qui en fait des tonnes.
Entre deux séances de cours (ou de parties) d'échecs, on découvre à travers les pérégrinations du duo les difficultés rencontrées par les migrants en France. La plus surprenante est liée au comportement étrange du traducteur employé par la préfecture ! (Précisons tout de même qu'on nous présente des migrants pétris de qualités : le fils est une sorte de surdoué, le père un modèle de pudeur, travailleur de surcroît et la mère restée au pays est une musulmane non voilée.)
Bref, même si l'on ne partage pas tous les a priori qui ont guidé la création de ce film, on peut quand même savourer ce quasi-conte de fées.
P.S.
Il y a un mois et demi, Le Parisien a publié (sous la plume d'Agnès Vives) un excellent article (incluant un podcast très complet) revenant sur l'ensemble du parcours de Fahim, avant et après le film.
P.S. II
Il faut savoir "rendre à César, ce qui appartient à César". A sa toute fin, le film évoque l'action d'un ancien Premier ministre, celui qui était en poste en 2011, mais sans le nommer. A ceux qui ne maîtriseraient pas l'histoire récente de la Ve République, je conseille d'aller jeter un œil à un article du Figaro.
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lundi, 28 octobre 2019
Terminator - Dark Fate
Quelques semaines après l'ultime (?) prestation de Sylvester Stallone en John Rambo, c'est au tour d'Arnold Schwarzenegger de refaire un tour de piste sur nos écrans, dans l'un de ses rôles emblématiques. Mais les spectateurs doivent faire preuve de patience avant de voir débarquer le vétéran à l'écran.
La première demi-heure est trépidante à souhait. Elle associe cascades spectaculaires et effets spéciaux numériques bluffants, pour un grand spectacle... ultraviolent. La (demi) nouveauté est que, dans cet opus, ce sont les femmes qui sont aux manettes. Linda Hamilton (brute de décoffrage... j'adore) revient incarner Sarah Connor, épaulée cette fois-ci par une humaine "augmentée", venue du futur (Mackenzie Davis, excellente). Toutes deux doivent protéger la jeune Dani Ramos (Natalia Reyes, une révélation) des griffes du nouveau méchant envoyé du futur, un Terminator ultime dernière génération, aussi redoutable que peu émotif (Gabriel Luna).
Ne nous voilons pas la face. Il s'agit d'abord d'un divertissement pour ados et adultes. On y remarque donc quelques grosses ficelles. Il n'est pas vraisemblable que ces trois femmes réussissent à échapper à leur insubmersible poursuivant aussi longtemps. Qui plus est, le scénario abuse du "juste à temps". Enfin, j'ai trouvé trop schématiques certaines oppositions. Au début, la blonde Grace (l'humaine augmentée) paraît impitoyable et forte, en comparaison de la faible et pleurnicharde Dani. Évidemment, celle-ci va prendre du poil de la bête, tandis que sa gardienne va laisser entrevoir quelques faiblesses. (Mais les retours en arrière sont dans l'ensemble bien fichus.)
De la même manière, la haine que Sarah Connor éprouve pour le "vieux" Terminator va petit à petit se transformer en respect. Il faut dire que l'ancien modèle a acquis un vernis d'humanité (un aspect déjà développé dans Terminator Genisys). On a réservé à Schwarzy quelques belles répliques et des scènes parfois assez cocasses. Aux fans de la première heure, je signale qu'on lui fait dire (dans la version originale) "I won't be back", LA phrase d'anthologie étant prononcée par un autre personnage, féminin.
Cela m'amène aux retouches apportées au schéma d'origine. L'intrigue est clairement plus féministe... et favorable aux minorités hispaniques. Le grave danger qui guette les États-Unis le monde développé ne vient pas des migrants, mais de la fuite en avant technologique associée à un esprit belliqueux. (Non, mais, franchement, Hollywood est un véritable repaire de gauchistes !)
L'ensemble constitue donc un très bon spectacle, non dénué de sens.
23:18 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Terminator - Dark Fate
Quelques semaines après l'ultime (?) prestation de Sylvester Stallone en John Rambo, c'est au tour d'Arnold Schwarzenegger de refaire un tour de piste sur nos écrans, dans l'un de ses rôles emblématiques. Mais les spectateurs doivent faire preuve de patience avant de voir débarquer le vétéran à l'écran.
La première demi-heure est trépidante à souhait. Elle associe cascades spectaculaires et effets spéciaux numériques bluffants, pour un grand spectacle... ultraviolent. La (demi) nouveauté est que, dans cet opus, ce sont les femmes qui sont aux manettes. Linda Hamilton (brute de décoffrage... j'adore) revient incarner Sarah Connor, épaulée cette fois-ci par une humaine "augmentée", venue du futur (Mackenzie Davis, excellente). Toutes deux doivent protéger la jeune Dani Ramos (Natalia Reyes, une révélation) des griffes du nouveau méchant envoyé du futur, un Terminator ultime dernière génération, aussi redoutable que peu émotif (Gabriel Luna).
Ne nous voilons pas la face. Il s'agit d'abord d'un divertissement pour ados et adultes. On y remarque donc quelques grosses ficelles. Il n'est pas vraisemblable que ces trois femmes réussissent à échapper à leur insubmersible poursuivant aussi longtemps. Qui plus est, le scénario abuse du "juste à temps". Enfin, j'ai trouvé trop schématiques certaines oppositions. Au début, la blonde Grace (l'humaine augmentée) paraît impitoyable et forte, en comparaison de la faible et pleurnicharde Dani. Évidemment, celle-ci va prendre du poil de la bête, tandis que sa gardienne va laisser entrevoir quelques faiblesses. (Mais les retours en arrière sont dans l'ensemble bien fichus.)
De la même manière, la haine que Sarah Connor éprouve pour le "vieux" Terminator va petit à petit se transformer en respect. Il faut dire que l'ancien modèle a acquis un vernis d'humanité (un aspect déjà développé dans Terminator Genisys). On a réservé à Schwarzy quelques belles répliques et des scènes parfois assez cocasses. Aux fans de la première heure, je signale qu'on lui fait dire (dans la version originale) "I won't be back", LA phrase d'anthologie étant prononcée par un autre personnage, féminin.
Cela m'amène aux retouches apportées au schéma d'origine. L'intrigue est clairement plus féministe... et favorable aux minorités hispaniques. Le grave danger qui guette les États-Unis le monde développé ne vient pas des migrants, mais de la fuite en avant technologique associée à un esprit belliqueux. (Non, mais, franchement, Hollywood est un véritable repaire de gauchistes !)
L'ensemble constitue donc un très bon spectacle, non dénué de sens.
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mardi, 22 octobre 2019
Alice et le maire
Je me suis finalement décidé à aller voir cette fiction politique, qui a pour cadre Lyon, mais dont certains éléments de l'intrigue (concernant le passé du maire ou la personne à laquelle il pourrait laisser les rênes) renvoient à la commune de Paris sous Bertrand Delanoë.
J'ai été attiré par le duo d'acteurs principaux qui, globalement, ne m'a pas déçu. Lucchini est très bon en politicien chevronné, qui se pose des questions existentielles. Anaïs Demoustier a plus de mal à exister face à lui, un peu comme son personnage, très effacé au départ, puis qui peu à peu prend de l'ampleur, aussi bien au sein de l'équipe du maire qu'à l'écran.
Sur le fond, je trouve le film intéressant parce qu'il ne tombe ni dans la flagornerie, ni dans le poujadisme antiparlementaire, si répandu de nos jours. Cela reste néanmoins bourgeois, sur les "élites". On ne voit quasiment pas les catégories populaires, ni même la petite classe moyenne. Les politiques croisent des journalistes, des communicants et des "cultureux", certains assez gratinés. On rit donc de temps à autre.
Il reste la relation entre la Béotienne et le Patriarche. Le scénario évite de tomber dans le graveleux, genre la petite nouvelle toute fraîche qui redonne vigueur (dans tous les sens du terme) au chef vieillissant. L'écriture du film est elle-même révélatrice du désarroi de ce qu'on appelle la "gauche de gouvernement", écartelée entre un libéralisme modernisé (genre Macron) et un militantisme gauchisant certes sincère, mais très éloigné de la gestion d'une municipalité au quotidien. Hélas, ce questionnement n'est pour moi qu'effleuré. Ce n'est ni aussi profond que L'Exercice de l’État, ni aussi virevoltant que Quai d'Orsay. Mais cela se regarde sans déplaisir.
23:28 Publié dans Cinéma, Politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, politique, france
Alice et le maire
Je me suis finalement décidé à aller voir cette fiction politique, qui a pour cadre Lyon, mais dont certains éléments de l'intrigue (concernant le passé du maire ou la personne à laquelle il pourrait laisser les rênes) renvoient à la commune de Paris sous Bertrand Delanoë.
J'ai été attiré par le duo d'acteurs principaux qui, globalement, ne m'a pas déçu. Lucchini est très bon en politicien chevronné, qui se pose des questions existentielles. Anaïs Demoustier a plus de mal à exister face à lui, un peu comme son personnage, très effacé au départ, puis qui peu à peu prend de l'ampleur, aussi bien au sein de l'équipe du maire qu'à l'écran.
Sur le fond, je trouve le film intéressant parce qu'il ne tombe ni dans la flagornerie, ni dans le poujadisme antiparlementaire, si répandu de nos jours. Cela reste néanmoins bourgeois, sur les "élites". On ne voit quasiment pas les catégories populaires, ni même la petite classe moyenne. Les politiques croisent des journalistes, des communicants et des "cultureux", certains assez gratinés. On rit donc de temps à autre.
Il reste la relation entre la Béotienne et le Patriarche. Le scénario évite de tomber dans le graveleux, genre la petite nouvelle toute fraîche qui redonne vigueur (dans tous les sens du terme) au chef vieillissant. L'écriture du film est elle-même révélatrice du désarroi de ce qu'on appelle la "gauche de gouvernement", écartelée entre un libéralisme modernisé (genre Macron) et un militantisme gauchisant certes sincère, mais très éloigné de la gestion d'une municipalité au quotidien. Hélas, ce questionnement n'est pour moi qu'effleuré. Ce n'est ni aussi profond que L'Exercice de l’État, ni aussi virevoltant que Quai d'Orsay. Mais cela se regarde sans déplaisir.
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Le Regard de Charles
Ce regard est celui de Charles Aznavour. On connaissait l'acteur convenable et le chanteur talentueux. On découvre le vidéaste amateur, à qui Edith Piaf avait offert une caméra portative. L'auteur-compositeur-interprète a tourné des dizaines d'heures de petits films, pendant ses moments de loisir (notamment en famille), mais aussi à l'occasion de ses tournées, qui constituent le principal matériau de ce film.
Ce documentaire d'1h20 est le résultat du montage d'images qui s'étalent des années 1950 au tout début des années 1970. En fond sonore, on entend la musique, parfois les chansons d'Aznavour. Un commentaire a été créé à parti de déclarations de l'artiste. Il est lu par Romain Duris, dont la voix grave et posée se révèle un excellent substitut à la parole d'Aznavour. C'est fou ce que les déclarations d'Aznavour se marient bien avec les images qu'il a tournées !
Il y en a pour tous les goûts. Les fans du chanteur le réécouteront avec plaisir, aussi bien avec des titres célèbres qu'avec des chansons méconnues du grand public. Les adeptes d'anecdotes "pipoles" en apprendront peut-être sur sa vie privée, assez chaotique : l'artiste a d'abord donné la priorité à sa carrière même si, sur le tard (après 40 ans), il a accordé davantage de temps et d'attention au cocon familial. La mort de son fils, à l'âge de 24 ans, a peut-être pesé. A contrario, le jeune artiste paraît totalement détaché des responsabilités familiales quand il s'embarque pour le Canada, où son contrat d'une semaine va se prolonger un mois, une année... On découvre aussi des images rares, celles d'un Aznavour en "jam session". On sent l'amoureux de la musique et du rythme.
Quand il ne se faisait pas filmer, Aznavour prenait la caméra pour montrer son entourage, ses épouses, ses enfants (en particulier l'une de ses filles, qu'il filme de manière attendrissante). On le voit aussi aux côtés de vedettes de l'époque, françaises comme étrangères.
Pour moi, les images les plus intéressantes sont celles qui montrent un pays où il s'est produit, il y a 50-60 ans. Hong Kong et Macao ont bien changé depuis ! Que dire aussi des prises de vue d'Afrique du Nord ou des Etats-Unis (New York et Las Vegas en particulier) ! Elles ont une authentique valeur historique, si bien qu'au bout d'1h20, on regrette que le film s'achève déjà.
Le Regard de Charles
Ce regard est celui de Charles Aznavour. On connaissait l'acteur convenable et le chanteur talentueux. On découvre le vidéaste amateur, à qui Edith Piaf avait offert une caméra portative. L'auteur-compositeur-interprète a tourné des dizaines d'heures de petits films, pendant ses moments de loisir (notamment en famille), mais aussi à l'occasion de ses tournées, qui constituent le principal matériau de ce film.
Ce documentaire d'1h20 est le résultat du montage d'images qui s'étalent des années 1950 au tout début des années 1970. En fond sonore, on entend la musique, parfois les chansons d'Aznavour. Un commentaire a été créé à parti de déclarations de l'artiste. Il est lu par Romain Duris, dont la voix grave et posée se révèle un excellent substitut à la parole d'Aznavour. C'est fou ce que les déclarations d'Aznavour se marient bien avec les images qu'il a tournées !
Il y en a pour tous les goûts. Les fans du chanteur le réécouteront avec plaisir, aussi bien avec des titres célèbres qu'avec des chansons méconnues du grand public. Les adeptes d'anecdotes "pipoles" en apprendront peut-être sur sa vie privée, assez chaotique : l'artiste a d'abord donné la priorité à sa carrière même si, sur le tard (après 40 ans), il a accordé davantage de temps et d'attention au cocon familial. La mort de son fils, à l'âge de 24 ans, a peut-être pesé. A contrario, le jeune artiste paraît totalement détaché des responsabilités familiales quand il s'embarque pour le Canada, où son contrat d'une semaine va se prolonger un mois, une année... On découvre aussi des images rares, celles d'un Aznavour en "jam session". On sent l'amoureux de la musique et du rythme.
Quand il ne se faisait pas filmer, Aznavour prenait la caméra pour montrer son entourage, ses épouses, ses enfants (en particulier l'une de ses filles, qu'il filme de manière attendrissante). On le voit aussi aux côtés de vedettes de l'époque, françaises comme étrangères.
Pour moi, les images les plus intéressantes sont celles qui montrent un pays où il s'est produit, il y a 50-60 ans. Hong Kong et Macao ont bien changé depuis ! Que dire aussi des prises de vue d'Afrique du Nord ou des Etats-Unis (New York et Las Vegas en particulier) ! Elles ont une authentique valeur historique, si bien qu'au bout d'1h20, on regrette que le film s'achève déjà.
lundi, 21 octobre 2019
Angry Birds 2 - Copains comme cochons
Il y a un peu plus de trois ans, j'avais bien aimé le premier volet des aventures des facétieux oiseaux issus d'un jeu vidéo. Ici, dès le début, on nous remet dans le bain avec une séquence assez enlevée de bisbilles entre les habitants des deux îles, celle des cochons et celle des oiseaux. On est dans la surenchère comique, sans guère souci de vraisemblance... mais on s'en fiche !
La situation se complique quand interviennent les habitants d'une troisième île, gelée, inexplicablement (assez) proche des deux précédentes qui connaissent pourtant un climat tropical. Cette troisième île est peuplée de farouches rapaces, dirigés d'une patte de fer par une aigle à la fois terriblement aigrie et diablement inventive.
Face à la terrible menace qui se profile, les oiseaux et les cochons choisissent d'unir leurs forces pour partir à l'assaut (discret) du repaire des aigles. En parallèle, on suit les pérégrinations d'un trio d'oisillons mignons comme tout, des choupinets dont le visage est mangé par des yeux immenses... mais, attention, une fois en colère, ils peuvent "mettre sa race" à un redoutable reptile ! Ce trio assez cocasse se met en route pour récupérer trois oeufs, les futurs frères et soeurs de l'un d'entre eux. La succession de contretemps qu'ils rencontrent dans l'accomplissement de leur mission n'est pas sans rappeler le triste destin de Scrat, dans L'Age de glace.
Notons que leurs aventures ne sont pas que d'agréables intermèdes venant interrompre la marche de l'intrigue principale. Les deux arcs narratifs vont finir par se rejoindre... pour notre plus grand plaisir.
Le rythme de l'action est soutenu. En environ 1h30, on n'a pas le temps de s'ennuyer, même si les péripéties ne sont pas toujours très drôles. Certaines scènes sont quand même tordantes, comme celles qui concernent l'oiseau ultra-rapide, ou celles montrant une étrange substance verte (produite par les cochons, je vous laisse découvrir comment...). Le film est particulièrement réussi quand il met en scène l'arrivée des héros sur l'île des aigles. La "battle dance" recueille tous les suffrages... et que dire de la scène des toilettes masculines !
On n'oubliera pas de préciser que, comme dans le premier opus, il y a une morale à cette histoire, qui traite d'amour déçu, d'amitié et de solitude. Le propos se veut aussi féministe, avec quelques répliques bien senties (comme celles balancées par l'aigle femelle) mais, surtout, le rôle prépondérant tenu par un nouveau personnage, croisé une première fois par le héros lors d'un speed-dating aviaire... Du coup, même si ce film est un peu moins drôle que le précédent, il n'en constitue pas moins un divertissement agréable et éducatif.
13:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Angry Birds 2 - Copains comme cochons
Il y a un peu plus de trois ans, j'avais bien aimé le premier volet des aventures des facétieux oiseaux issus d'un jeu vidéo. Ici, dès le début, on nous remet dans le bain avec une séquence assez enlevée de bisbilles entre les habitants des deux îles, celle des cochons et celle des oiseaux. On est dans la surenchère comique, sans guère souci de vraisemblance... mais on s'en fiche !
La situation se complique quand interviennent les habitants d'une troisième île, gelée, inexplicablement (assez) proche des deux précédentes qui connaissent pourtant un climat tropical. Cette troisième île est peuplée de farouches rapaces, dirigés d'une patte de fer par une aigle à la fois terriblement aigrie et diablement inventive.
Face à la terrible menace qui se profile, les oiseaux et les cochons choisissent d'unir leurs forces pour partir à l'assaut (discret) du repaire des aigles. En parallèle, on suit les pérégrinations d'un trio d'oisillons mignons comme tout, des choupinets dont le visage est mangé par des yeux immenses... mais, attention, une fois en colère, ils peuvent "mettre sa race" à un redoutable reptile ! Ce trio assez cocasse se met en route pour récupérer trois oeufs, les futurs frères et soeurs de l'un d'entre eux. La succession de contretemps qu'ils rencontrent dans l'accomplissement de leur mission n'est pas sans rappeler le triste destin de Scrat, dans L'Age de glace.
Notons que leurs aventures ne sont pas que d'agréables intermèdes venant interrompre la marche de l'intrigue principale. Les deux arcs narratifs vont finir par se rejoindre... pour notre plus grand plaisir.
Le rythme de l'action est soutenu. En environ 1h30, on n'a pas le temps de s'ennuyer, même si les péripéties ne sont pas toujours très drôles. Certaines scènes sont quand même tordantes, comme celles qui concernent l'oiseau ultra-rapide, ou celles montrant une étrange substance verte (produite par les cochons, je vous laisse découvrir comment...). Le film est particulièrement réussi quand il met en scène l'arrivée des héros sur l'île des aigles. La "battle dance" recueille tous les suffrages... et que dire de la scène des toilettes masculines !
On n'oubliera pas de préciser que, comme dans le premier opus, il y a une morale à cette histoire, qui traite d'amour déçu, d'amitié et de solitude. Le propos se veut aussi féministe, avec quelques répliques bien senties (comme celles balancées par l'aigle femelle) mais, surtout, le rôle prépondérant tenu par un nouveau personnage, croisé une première fois par le héros lors d'un speed-dating aviaire... Du coup, même si ce film est un peu moins drôle que le précédent, il n'en constitue pas moins un divertissement agréable et éducatif.
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dimanche, 20 octobre 2019
Martin Eden
Ce film italien est une adaptation du roman éponyme de Jack London, transposé dans l'Italie post-Seconde Guerre mondiale, plus précisément celle des années 1970-1980. (On n'y voit ni ordinateur ni téléphone portable, mais la télévision -d'abord en noir et blanc- a fait son entrée dans les foyers modestes.)
Le héros Martin est un orphelin devenu marin, qui se découvre une passion pour la lecture (puis l'écriture) en même temps que pour la ravissante héritière de la richissime famille Orsini (Jessica Cressy, très bien). Au départ, on ne sait pas si les sentiments du héros sont authentiques. Certes, il ne pouvait pas savoir que le jeune homme qu'il allait sauver d'une agression était le frère de la délicieuse Elena, mais il est suffisamment intelligent pour avoir compris que cette femme-là n'est pas une Marie-couche-toi-là et que, pour la conquérir, le play-boy des bas-quartiers allait devoir fournir des efforts inédits.
Si l'écriture des scènes intimes et la direction d'acteurs sont d'une évidente maladresse, le propos qui sous-tend l'intrigue est plus intéressant. Il y a d'abord la question amoureuse : peut-elle transcender les classes sociales ? D'autre part, est-il possible de concilier une carrière d'écrivain avec un amour partagé et équilibré ? Enfin, un écrivain authentiquement progressiste ne doit-il pas se méfier des idéologies qui prétendent apporter le progrès aux masses populaires ? N'est-ce pas plutôt l'individu qu'il convient d'émanciper (et non une supposée "classe") ? On sent que le réalisateur hésite entre la posture adoptée par le personnage principal (qui est peut-être son double) et la stricte défense des classes populaires, auxquelles des vignettes en noir et blanc (insérées dans l'intrigue) rendent hommage.
J'ai donc été plus intéressé par la lecture socio-politique de l'histoire que par le cadre sentimental, de surcroît assez mal planté. Le début est d'ailleurs plutôt mauvais, avec une scène qui montre le héros en train de pontifier, précédant une séquence qui se conclut par une coucherie mise en scène avec une consternante maladresse.
Cela devient intéressant quand le héros rencontre Elena et se met à dévorer des livres. J'ai aussi beaucoup apprécié son "exil" en périphérie urbaine, chez une veuve matrone fort bien interprétée. Les relations qui se nouent entre le jeune homme et les enfants de celle-ci sont assez touchantes. On sent aussi que le réalisateur est plus à l'aise dans les scènes de propagande, avec les militants communistes.
Bref, même si l'acteur principal Luca Marinelli (déjà vu dans le médiocre Una Questiona Privata) ne manque pas de charisme, même si le casting féminin est bon, même si le fond de l'histoire est intéressant, le résultat global n'est pas très emballant.
P.S.
A la dernière Mostra de Venise, Marinelli a coiffé au poteau Joaquin Phoenix pour le prix d'interprétation masculine. Certains commentateurs crient quasiment au génie... en oubliant que la distribution des prix a obéi à des règles sous-jacentes. La première est, me semble-t-il, de n'accorder qu'une seule récompense par film. Or, si le prix d'interprétation était revenu à Joaquin Phoenix (dont la performance est bien supérieure à celle de Luca Marinelli), cela aurait exclu le Joker du Lion d'or... qui risquait d'être attribué au film de Polanski, ce dont les ayatollahs de la bien-pensance contemporaine ne voulaient pas entendre parler. Il fallait donc que Joker décroche le Lion d'or, un prix moins prestigieux étant attribué à J'accuse. Cela présentait en outre l'immense avantage d'écarter un autre concurrent de Marinelli pour le prix d'interprétation : Jean Dujardin.
19:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Martin Eden
Ce film italien est une adaptation du roman éponyme de Jack London, transposé dans l'Italie post-Seconde Guerre mondiale, plus précisément celle des années 1970-1980. (On n'y voit ni ordinateur ni téléphone portable, mais la télévision -d'abord en noir et blanc- a fait son entrée dans les foyers modestes.)
Le héros Martin est un orphelin devenu marin, qui se découvre une passion pour la lecture (puis l'écriture) en même temps que pour la ravissante héritière de la richissime famille Orsini (Jessica Cressy, très bien). Au départ, on ne sait pas si les sentiments du héros sont authentiques. Certes, il ne pouvait pas savoir que le jeune homme qu'il allait sauver d'une agression était le frère de la délicieuse Elena, mais il est suffisamment intelligent pour avoir compris que cette femme-là n'est pas une Marie-couche-toi-là et que, pour la conquérir, le play-boy des bas-quartiers allait devoir fournir des efforts inédits.
Si l'écriture des scènes intimes et la direction d'acteurs sont d'une évidente maladresse, le propos qui sous-tend l'intrigue est plus intéressant. Il y a d'abord la question amoureuse : peut-elle transcender les classes sociales ? D'autre part, est-il possible de concilier une carrière d'écrivain avec un amour partagé et équilibré ? Enfin, un écrivain authentiquement progressiste ne doit-il pas se méfier des idéologies qui prétendent apporter le progrès aux masses populaires ? N'est-ce pas plutôt l'individu qu'il convient d'émanciper (et non une supposée "classe") ? On sent que le réalisateur hésite entre la posture adoptée par le personnage principal (qui est peut-être son double) et la stricte défense des classes populaires, auxquelles des vignettes en noir et blanc (insérées dans l'intrigue) rendent hommage.
J'ai donc été plus intéressé par la lecture socio-politique de l'histoire que par le cadre sentimental, de surcroît assez mal planté. Le début est d'ailleurs plutôt mauvais, avec une scène qui montre le héros en train de pontifier, précédant une séquence qui se conclut par une coucherie mise en scène avec une consternante maladresse.
Cela devient intéressant quand le héros rencontre Elena et se met à dévorer des livres. J'ai aussi beaucoup apprécié son "exil" en périphérie urbaine, chez une veuve matrone fort bien interprétée. Les relations qui se nouent entre le jeune homme et les enfants de celle-ci sont assez touchantes. On sent aussi que le réalisateur est plus à l'aise dans les scènes de propagande, avec les militants communistes.
Bref, même si l'acteur principal Luca Marinelli (déjà vu dans le médiocre Una Questiona Privata) ne manque pas de charisme, même si le casting féminin est bon, même si le fond de l'histoire est intéressant, le résultat global n'est pas très emballant.
P.S.
A la dernière Mostra de Venise, Marinelli a coiffé au poteau Joaquin Phoenix pour le prix d'interprétation masculine. Certains commentateurs crient quasiment au génie... en oubliant que la distribution des prix a obéi à des règles sous-jacentes. La première est, me semble-t-il, de n'accorder qu'une seule récompense par film. Or, si le prix d'interprétation était revenu à Joaquin Phoenix (dont la performance est bien supérieure à celle de Luca Marinelli), cela aurait exclu le Joker du Lion d'or... qui risquait d'être attribué au film de Polanski, ce dont les ayatollahs de la bien-pensance contemporaine ne voulaient pas entendre parler. Il fallait donc que Joker décroche le Lion d'or, un prix moins prestigieux étant attribué à J'accuse. Cela présentait en outre l'immense avantage d'écarter un autre concurrent de Marinelli pour le prix d'interprétation : Jean Dujardin.
19:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 19 octobre 2019
La Ferme contre-attaque
Trois ans et demi après le premier long-métrage (hilarant) qui lui était consacré, Shaun le mouton est de retour, dans un film mêlant animations traditionnelle et numérique, cette dernière semblant prendre désormais une place déterminante.
Dès le début, nous sommes plongés dans le bain de cette mythique ferme britannique, où les animaux d'élevage vivent une vie autonome, sous le nez d'un fermier toujours aussi excentrique. (Mais quel beau slip rouge !...) Les moutons sont les personnages auxquels sont censés s'identifier les enfants. Ils sont un peu puérils, préfèrent la pizza aux rations végétales, font plein de bêtises, pour la réalisation desquelles il leur est indispensable d'échapper à la vigilance du chien fidèle, un garde-chiourme substitut d'un surveillant d'établissement secondaire...
Pendant environ 1h20, on ne va pas s'ennuyer, d'autant que débarque un être étrange, venu d'une autre galaxie. Il/Elle s'appelle Lu-La... mais n'a rien à voir avec l'ancien président du Brésil ! Ce serait une allusion au cinquantième anniversaire du premier alunissage d'astronautes. Les cinéphiles seront aussi tentés d'y voir une référence à Leeloo, l'héroïne du Cinquième Elément (de Luc Besson) et ce d'autant plus que l'histoire est nourrie d'allusions (notamment visuelles et sonores) à des oeuvres de science-fiction.
C'est d'ailleurs l'un des plaisirs réservés aux adultes que de décrypter ces allusions. Pêle-mêle, on retrouve (liste non-exhaustive) le E.T. de Spielberg, 2001 L'Odyssée de l'espace (de Kubrick), Signes (de Shyamalan), Rencontres du troisième type (Spielberg again), X-Files (dressez l'oreille), Armageddon (de Michael Bay), La Guerre des mondes (encore Spielberg !)... On note plusieurs clins d'oeil à "l'homme de Roswell".
Les enfants, eux, sont plus attentifs aux gags qui échelonnent l'histoire. C'est du comique de situation, visiblement plutôt destiné au jeune public. Cela fait assez souvent sourire les adultes, plus rarement rire. Mais c'est sympatoche. J'ai particulièrement aimé les cerbères de la méchante de l'histoire, pas très futés.
Quant à l'extra-terrestre, elle a des points communs avec les moutons/enfants : elle adore les frites, les pizzas, les bonbons et les boissons sucrées... ce qui nous mène tout naturellement à ce qui a tendance à devenir une figure imposée des films d'animation "familiaux" : le rot gargantuesque. C'est le principal acte de transgression visible à l'écran, les personnages étant le reste du temps du genre bien élevés.
En résumé, c'est bien fichu, cela détend sans prise de tête, mais ça ne restera pas dans les annales.
11:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
La Ferme contre-attaque
Trois ans et demi après le premier long-métrage (hilarant) qui lui était consacré, Shaun le mouton est de retour, dans un film mêlant animations traditionnelle et numérique, cette dernière semblant prendre désormais une place déterminante.
Dès le début, nous sommes plongés dans le bain de cette mythique ferme britannique, où les animaux d'élevage vivent une vie autonome, sous le nez d'un fermier toujours aussi excentrique. (Mais quel beau slip rouge !...) Les moutons sont les personnages auxquels sont censés s'identifier les enfants. Ils sont un peu puérils, préfèrent la pizza aux rations végétales, font plein de bêtises, pour la réalisation desquelles il leur est indispensable d'échapper à la vigilance du chien fidèle, un garde-chiourme substitut d'un surveillant d'établissement secondaire...
Pendant environ 1h20, on ne va pas s'ennuyer, d'autant que débarque un être étrange, venu d'une autre galaxie. Il/Elle s'appelle Lu-La... mais n'a rien à voir avec l'ancien président du Brésil ! Ce serait une allusion au cinquantième anniversaire du premier alunissage d'astronautes. Les cinéphiles seront aussi tentés d'y voir une référence à Leeloo, l'héroïne du Cinquième Elément (de Luc Besson) et ce d'autant plus que l'histoire est nourrie d'allusions (notamment visuelles et sonores) à des oeuvres de science-fiction.
C'est d'ailleurs l'un des plaisirs réservés aux adultes que de décrypter ces allusions. Pêle-mêle, on retrouve (liste non-exhaustive) le E.T. de Spielberg, 2001 L'Odyssée de l'espace (de Kubrick), Signes (de Shyamalan), Rencontres du troisième type (Spielberg again), X-Files (dressez l'oreille), Armageddon (de Michael Bay), La Guerre des mondes (encore Spielberg !)... On note plusieurs clins d'oeil à "l'homme de Roswell".
Les enfants, eux, sont plus attentifs aux gags qui échelonnent l'histoire. C'est du comique de situation, visiblement plutôt destiné au jeune public. Cela fait assez souvent sourire les adultes, plus rarement rire. Mais c'est sympatoche. J'ai particulièrement aimé les cerbères de la méchante de l'histoire, pas très futés.
Quant à l'extra-terrestre, elle a des points communs avec les moutons/enfants : elle adore les frites, les pizzas, les bonbons et les boissons sucrées... ce qui nous mène tout naturellement à ce qui a tendance à devenir une figure imposée des films d'animation "familiaux" : le rot gargantuesque. C'est le principal acte de transgression visible à l'écran, les personnages étant le reste du temps du genre bien élevés.
En résumé, c'est bien fichu, cela détend sans prise de tête, mais ça ne restera pas dans les annales.
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dimanche, 13 octobre 2019
Tout est possible
Ce documentaire militant s'intitule à l'origine The Biggest Little Farm, que l'on pourrait traduire par "La plus grande petite ferme". Le terme "petite" renvoie au mode d'exploitation, "à l'ancienne", en utilisant des méthodes fondées sur les rythmes naturels. Cela veut dire : pas de produits phytosanitaires et pas de hors-sol au niveau de l'élevage. (On ne voit que quelques abris construits pour les poules -dont on récupère les oeufs, les canards et les cochons.) Les animaux sont élevés en plein air. Dans l'espace d'un ancien enclos équestre est implanté un jardin potager.
C'est aussi une "grande" ferme parce que sa surface agricole utile s'étend sur environ 80 hectares. (La moyenne en France est d'environ 55.) Elle fonctionne avec une main-d'oeuvre abondante : les deux exploitants, deux ouvriers agricoles... et pas loin d'une dizaine de stagiaires et volontaires de toutes origines, venus participer à cette aventure agricole, ou se former à un autre mode de production.
A l'origine, il s'agit bien d'une aventure. John et Molly sont ce qu'on appellerait en France des "hors cadre familiaux". Lui a une formation de caméraman et réalise notamment des court-métrages animaliers (ce qui va lui être d'une grande utilité quand il se décidera à filmer au jour le jour l'évolution de leur projet agricole). Elle est une cheffe cuisinière, qui tient un blog très suivi. En 2010, un peu pour changer de vie, un peu sur un coup de tête (et pour continuer à vivre avec le chien Todd qu'ils ont adopté), ils montent un projet agricole, au nord de Los Angeles. L'un des manques de ce film est de ne pas nous en dire plus sur le chiffrage et le financement. On comprend qu'ils ont sollicité l'ensemble de leurs amis, mais on n'en saura pas plus sur les "investisseurs" qui ont contribué au bouclage du projet. Enfin bref, combien ça coûte ? Parce qu'il en a fallu de l'argent pour financer les travaux de remise en état d'une ancienne exploitation fruitière intensive, ainsi que les revenus d'au moins quatre personnes pendant un an. J'aurais aussi aimé en savoir plus sur le parcours et l'engagement des deux néo-ruraux.
Si les images les plus anciennes ont été filmées avec des moyens ordinaires, par contre, dès que les animaux sont installés sur l'exploitation, on remarque la qualité de la photographie, avec de superbes gros plans et ralentis. On sent l'amour de la nature éprouvé par les deux aventuriers agricoles. Pour se lancer, ils sont épaulés par un conseiller en biodynamie, qui a un peu l'allure d'un gourou new age, et qui leur donne de multiples conseils pour mettre en route leur exploitation. Cela commence par la régénération des sols, à l'aide de compost.
De superbes vues aériennes (sans doute filmées à partir d'un drone) permettent de constater les progrès réalisés. On plante des arbres fruitiers (pêchers, citronniers, abricotiers...) et l'on commence à faire venir le bétail. Une grande place est accordée à la truie (une Red Wattle), dont le nom d'origine "Betty la moche" est changé en Emma. Arrivée malade et un peu maigre, elle va donner naissance à d'impressionnantes portées de porcelets. On sent que John s'est particulièrement attaché à la truie, qui développe des relations empathiques avec d'autres animaux, comme le coq poilu et grassouillet, avec lequel elle finit par cohabiter.
Sur l'exploitation (appelée Apricot Lane Farms), on peut aussi croiser des bovins (des Highland), des moutons (de race Dorper), des poules, des canards, des abeilles, des chevaux, des chiens, des chats... et de multiples animaux sauvages, oiseaux, insectes, chouettes, parfois cigognes et, hélas, coyotes.
C'est l'un des paris des fermiers : faire cohabiter de nombreuses espèces (et des races différentes), partant du principe que c'est la diversité biologique (animale et végétale) qui permettra de prévenir et résoudre les crises qui ne manqueront pas de survenir sur l'exploitation. Ainsi, quand le couvert végétal (et une certaine humidité) est rétabli sur les terres, les escargots surgissent en masse. La solution va venir... des canards, qui raffolent des bestioles à coquille. De la même manière, les poules se gavent de larves de mouches. Les chiens vont être dressés à protéger le bétail des incursions des coyotes. Des rapaces, derniers venus sur l'exploitation, boulottent les rats à poche.
Cela pourrait ressembler à un conte de fées. Fort heureusement, le réalisateur ne cache pas les difficultés rencontrées. Dès le début, il montre les ravages qu'un gigantesque incendie pourrait provoquer. Sur la ferme, chaque progrès est montré comme étant issu de la résolution d'un problème. Même si John n'insiste pas beaucoup là-dessus, on devine que l'exploitation est totalement dépendante de la ressource en eau, celle de la nappe phréatique... et d'une main-d'oeuvre nombreuse, en partie bénévole me semble-t-il.
C'est la limite de cette expérience enthousiasmante, qui montre qu'avec un capital, des connaissances, beaucoup de travail et de la créativité, on peut faire revivre un paradis. Mais ce n'est sans doute pas un modèle réplicable partout. Le film n'en est pas moins passionnant, réalisé avec beaucoup de soin.
11:45 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, agriculture, environnement, écologie, développement durable
Tout est possible
Ce documentaire militant s'intitule à l'origine The Biggest Little Farm, que l'on pourrait traduire par "La plus grande petite ferme". Le terme "petite" renvoie au mode d'exploitation, "à l'ancienne", en utilisant des méthodes fondées sur les rythmes naturels. Cela veut dire : pas de produits phytosanitaires et pas de hors-sol au niveau de l'élevage. (On ne voit que quelques abris construits pour les poules -dont on récupère les oeufs, les canards et les cochons.) Les animaux sont élevés en plein air. Dans l'espace d'un ancien enclos équestre est implanté un jardin potager.
C'est aussi une "grande" ferme parce que sa surface agricole utile s'étend sur environ 80 hectares. (La moyenne en France est d'environ 55.) Elle fonctionne avec une main-d'oeuvre abondante : les deux exploitants, deux ouvriers agricoles... et pas loin d'une dizaine de stagiaires et volontaires de toutes origines, venus participer à cette aventure agricole, ou se former à un autre mode de production.
A l'origine, il s'agit bien d'une aventure. John et Molly sont ce qu'on appellerait en France des "hors cadre familiaux". Lui a une formation de caméraman et réalise notamment des court-métrages animaliers (ce qui va lui être d'une grande utilité quand il se décidera à filmer au jour le jour l'évolution de leur projet agricole). Elle est une cheffe cuisinière, qui tient un blog très suivi. En 2010, un peu pour changer de vie, un peu sur un coup de tête (et pour continuer à vivre avec le chien Todd qu'ils ont adopté), ils montent un projet agricole, au nord de Los Angeles. L'un des manques de ce film est de ne pas nous en dire plus sur le chiffrage et le financement. On comprend qu'ils ont sollicité l'ensemble de leurs amis, mais on n'en saura pas plus sur les "investisseurs" qui ont contribué au bouclage du projet. Enfin bref, combien ça coûte ? Parce qu'il en a fallu de l'argent pour financer les travaux de remise en état d'une ancienne exploitation fruitière intensive, ainsi que les revenus d'au moins quatre personnes pendant un an. J'aurais aussi aimé en savoir plus sur le parcours et l'engagement des deux néo-ruraux.
Si les images les plus anciennes ont été filmées avec des moyens ordinaires, par contre, dès que les animaux sont installés sur l'exploitation, on remarque la qualité de la photographie, avec de superbes gros plans et ralentis. On sent l'amour de la nature éprouvé par les deux aventuriers agricoles. Pour se lancer, ils sont épaulés par un conseiller en biodynamie, qui a un peu l'allure d'un gourou new age, et qui leur donne de multiples conseils pour mettre en route leur exploitation. Cela commence par la régénération des sols, à l'aide de compost.
De superbes vues aériennes (sans doute filmées à partir d'un drone) permettent de constater les progrès réalisés. On plante des arbres fruitiers (pêchers, citronniers, abricotiers...) et l'on commence à faire venir le bétail. Une grande place est accordée à la truie (une Red Wattle), dont le nom d'origine "Betty la moche" est changé en Emma. Arrivée malade et un peu maigre, elle va donner naissance à d'impressionnantes portées de porcelets. On sent que John s'est particulièrement attaché à la truie, qui développe des relations empathiques avec d'autres animaux, comme le coq poilu et grassouillet, avec lequel elle finit par cohabiter.
Sur l'exploitation (appelée Apricot Lane Farms), on peut aussi croiser des bovins (des Highland), des moutons (de race Dorper), des poules, des canards, des abeilles, des chevaux, des chiens, des chats... et de multiples animaux sauvages, oiseaux, insectes, chouettes, parfois cigognes et, hélas, coyotes.
C'est l'un des paris des fermiers : faire cohabiter de nombreuses espèces (et des races différentes), partant du principe que c'est la diversité biologique (animale et végétale) qui permettra de prévenir et résoudre les crises qui ne manqueront pas de survenir sur l'exploitation. Ainsi, quand le couvert végétal (et une certaine humidité) est rétabli sur les terres, les escargots surgissent en masse. La solution va venir... des canards, qui raffolent des bestioles à coquille. De la même manière, les poules se gavent de larves de mouches. Les chiens vont être dressés à protéger le bétail des incursions des coyotes. Des rapaces, derniers venus sur l'exploitation, boulottent les rats à poche.
Cela pourrait ressembler à un conte de fées. Fort heureusement, le réalisateur ne cache pas les difficultés rencontrées. Dès le début, il montre les ravages qu'un gigantesque incendie pourrait provoquer. Sur la ferme, chaque progrès est montré comme étant issu de la résolution d'un problème. Même si John n'insiste pas beaucoup là-dessus, on devine que l'exploitation est totalement dépendante de la ressource en eau, celle de la nappe phréatique... et d'une main-d'oeuvre nombreuse, en partie bénévole me semble-t-il.
C'est la limite de cette expérience enthousiasmante, qui montre qu'avec un capital, des connaissances, beaucoup de travail et de la créativité, on peut faire revivre un paradis. Mais ce n'est sans doute pas un modèle réplicable partout. Le film n'en est pas moins passionnant, réalisé avec beaucoup de soin.
11:45 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, agriculture, environnement, écologie, développement durable
samedi, 12 octobre 2019
Joker
Très attendu, ce film est une nouvelle preuve (après Logan) qu'on peut adapter des personnages de comics au cinéma sans se contenter de faire jouer les acteurs en tenues moulantes devant des fonds verts. Cela annonce (peut-être) un reboot de la série Batman... mais, pour en être sûr, il faudra attendre 2021.
D'ici là, on peut admirer la performance de Joaquin Phoenix, acteur protéiforme qui nous propose une nouvelle interprétation du plus terrible ennemi de l'homme chauve-souris. C'était un sacré défi : pas facile par exemple de faire oublier celui-ci.
Phoenix y réussit parce que les scénaristes (notamment Scott Silver, qui a travaillé sur 8 Mile) ont donné un tour sociologique à l'histoire, s'inspirant sans doute de l'oeuvre d'Alan Moore. C'est un peu paradoxal à écrire, mais les multinationales Warner et DC nous offrent un film populiste de gauche (les "minorités visibles" y sont bien traitées). L'intrigue, bien que située dans le passé (on ne voit ni ordinateur ni téléphone portable), entre en résonance avec notre époque.
Dès le début, la talent de Phoenix transparaît dans le personnage d'Arthur Fleck. Celui-ci est une sorte d'intermittent du spectacle (sans le système d'indemnisation : nous sommes aux States !), artiste raté chargé d'animer la liquidation d'un commerce, un anniversaire ou une journée de patients cancéreux. Un plan m'a particulièrement marqué, celui où l'on voit Arthur/Joaquin s'essayer au fameux sourire écarté, passant de la joie à la tristesse avec le même maquillage. La seule petite limite que je pointerais est que le rire exacerbé, nerveux, de l'antihéros n'est pas totalement réussi. On comprend bien en quoi il constitue parfois une défense ainsi que pourquoi il donne de lui une image ridicule, mais il manque un petit quelque chose pour que ce soit totalement réussi. Peut-être est-ce dû aux nombreuses coupes pratiquées au cours du montage final.
Dans la première partie de l'histoire, rien n'est joué. Arthur a un travail relativement régulier, habite avec une mère aimante (quoiqu'un peu détraquée), a l'espoir de percer un jour dans le seul-en-scène... et il semble possible d'envisager une relation avec une locataire du même étage de l'immeuble miteux qu'il habite.
La suite va faire tomber petit à petit toutes ces illusions, au propre comme au figuré, puisqu'il faut éviter d'accorder trop de crédit à ce que l'on voit parfois à l'écran. (Sans en dire trop, je peux quand même révéler qu'un des événements de la première partie fait tache dans la caractérisation du personnage principal, au point que ça en est gênant. Quand la vérité apparaît, nue, tout devient plus cohérent.) Indirectement, le réalisateur nous invite d'ailleurs à nous méfier de ce qui passe sur les écrans, par exemple dans le "night show" animé par Murray Franklin (Robert de Niro, bien meilleur que dans nombre de ses dernières prestations), où seul un extrait tronqué de la performance de Fleck est diffusé.
L'intrigue a été construite de manière à montrer comment une société injuste (ultralibérale, utilisons les gros mots) fabrique un criminel, certes déjà un peu dérangé à la base. Au niveau personnel, celui-ci découvre par hasard qu'il se réalise pleinement non pas en clown de service, ni en "stand-upeur", mais en tueur, voire en chef d'une bande de tueurs. Si je trouve le propos intéressant, et la conclusion logique, je n'en désapprouve pas moins cette quasi-apologie de la violence, d'autant qu'à la fin, les dégénérés qui dévastent les rues de Gotham City s'en prennent à tout ce qui leur tombe sous la main, détruisant au passage les biens de leurs concitoyens modestes.
Même si je n'en partage pas tous les a priori, je reconnais que cette oeuvre est particulièrement forte, servie de surcroît par une musique parfaitement adaptée aux circonstances.
13:35 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Joker
Très attendu, ce film est une nouvelle preuve (après Logan) qu'on peut adapter des personnages de comics au cinéma sans se contenter de faire jouer les acteurs en tenues moulantes devant des fonds verts. Cela annonce (peut-être) un reboot de la série Batman... mais, pour en être sûr, il faudra attendre 2021.
D'ici là, on peut admirer la performance de Joaquin Phoenix, acteur protéiforme qui nous propose une nouvelle interprétation du plus terrible ennemi de l'homme chauve-souris. C'était un sacré défi : pas facile par exemple de faire oublier celui-ci.
Phoenix y réussit parce que les scénaristes (notamment Scott Silver, qui a travaillé sur 8 Mile) ont donné un tour sociologique à l'histoire, s'inspirant sans doute de l'oeuvre d'Alan Moore. C'est un peu paradoxal à écrire, mais les multinationales Warner et DC nous offrent un film populiste de gauche (les "minorités visibles" y sont bien traitées). L'intrigue, bien que située dans le passé (on ne voit ni ordinateur ni téléphone portable), entre en résonance avec notre époque.
Dès le début, la talent de Phoenix transparaît dans le personnage d'Arthur Fleck. Celui-ci est une sorte d'intermittent du spectacle (sans le système d'indemnisation : nous sommes aux States !), artiste raté chargé d'animer la liquidation d'un commerce, un anniversaire ou une journée de patients cancéreux. Un plan m'a particulièrement marqué, celui où l'on voit Arthur/Joaquin s'essayer au fameux sourire écarté, passant de la joie à la tristesse avec le même maquillage. La seule petite limite que je pointerais est que le rire exacerbé, nerveux, de l'antihéros n'est pas totalement réussi. On comprend bien en quoi il constitue parfois une défense ainsi que pourquoi il donne de lui une image ridicule, mais il manque un petit quelque chose pour que ce soit totalement réussi. Peut-être est-ce dû aux nombreuses coupes pratiquées au cours du montage final.
Dans la première partie de l'histoire, rien n'est joué. Arthur a un travail relativement régulier, habite avec une mère aimante (quoiqu'un peu détraquée), a l'espoir de percer un jour dans le seul-en-scène... et il semble possible d'envisager une relation avec une locataire du même étage de l'immeuble miteux qu'il habite.
La suite va faire tomber petit à petit toutes ces illusions, au propre comme au figuré, puisqu'il faut éviter d'accorder trop de crédit à ce que l'on voit parfois à l'écran. (Sans en dire trop, je peux quand même révéler qu'un des événements de la première partie fait tache dans la caractérisation du personnage principal, au point que ça en est gênant. Quand la vérité apparaît, nue, tout devient plus cohérent.) Indirectement, le réalisateur nous invite d'ailleurs à nous méfier de ce qui passe sur les écrans, par exemple dans le "night show" animé par Murray Franklin (Robert de Niro, bien meilleur que dans nombre de ses dernières prestations), où seul un extrait tronqué de la performance de Fleck est diffusé.
L'intrigue a été construite de manière à montrer comment une société injuste (ultralibérale, utilisons les gros mots) fabrique un criminel, certes déjà un peu dérangé à la base. Au niveau personnel, celui-ci découvre par hasard qu'il se réalise pleinement non pas en clown de service, ni en "stand-upeur", mais en tueur, voire en chef d'une bande de tueurs. Si je trouve le propos intéressant, et la conclusion logique, je n'en désapprouve pas moins cette quasi-apologie de la violence, d'autant qu'à la fin, les dégénérés qui dévastent les rues de Gotham City s'en prennent à tout ce qui leur tombe sous la main, détruisant au passage les biens de leurs concitoyens modestes.
Même si je n'en partage pas tous les a priori, je reconnais que cette oeuvre est particulièrement forte, servie de surcroît par une musique parfaitement adaptée aux circonstances.
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vendredi, 11 octobre 2019
Mjolk, La guerre du lait
J'ai enfin réussi à voir ce film islandais de Grimur Hákonarson, un cinéaste dont j'avais remarqué il y a trois ans Béliers, une comédie à froid, manifestant un réel savoir-faire au niveau de la mise en scène.
Le début de ce film-ci présente le quotidien de paysans islandais, des éleveurs de bovins-lait endettés jusqu'au cou. C'est l'épouse qui est l'héroïne de l'histoire. Inga est dotée d'un caractère bien trempé, ce qui lui permet de procéder à un vêlage toute seule, dans une scène impressionnante qui n'est pas sans rappeler Une Hirondelle a fait le printemps.
Assez vite, le mari va disparaître du paysage, laissant Inga (presque) seule face à la puissante coopérative laitière locale. Celle-ci est la seule cliente des éleveurs laitiers du coin, auxquels elle impose de se fournir uniquement auprès d'elle, y compris pour les produits de grande consommation, puisqu'elle contrôle les supérettes rurales où la majorité des habitants va faire ses courses. Il suffit de quelques plans au réalisateur pour suggérer l'opulence de cette coopérative autrefois au service des éleveurs : on aperçoit la maison spacieuse de son président et les voitures luxueuses des cadres.
La suite est un combat du pot de terre contre le pot de fer. Inga se révolte, à l'étonnement de ceux qui ne comprennent pas qu'elle s'obstine sur cette exploitation. Dans la région, une lutte d'influence s'engage entre une poignée de paysans rebelles et la coopérative. C'est quasi documentaire, parfois drôle, comme quand l'héroïne dit "merde" (à sa manière) au gros bras venu faire pression sur elle, ou quand elle se rend au siège de la coopé pour délivrer un "message lactique"... Signalons que le réalisateur a eu l'obligeance de laisser le personnage du directeur de la coopérative développer ses arguments. Le propos n'est pas unilatéral, même s'il est en empathie avec le combat d'Inga.
Le tout a pour cadre la campagne islandaise, magnifiée par des plans d'ensemble à savourer sur grand écran. Je suis sorti de là ravi, le film étant davantage porteur d'espoir qu'Au nom de la terre.
19:24 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Mjolk, La guerre du lait
J'ai enfin réussi à voir ce film islandais de Grimur Hákonarson, un cinéaste dont j'avais remarqué il y a trois ans Béliers, une comédie à froid, manifestant un réel savoir-faire au niveau de la mise en scène.
Le début de ce film-ci présente le quotidien de paysans islandais, des éleveurs de bovins-lait endettés jusqu'au cou. C'est l'épouse qui est l'héroïne de l'histoire. Inga est dotée d'un caractère bien trempé, ce qui lui permet de procéder à un vêlage toute seule, dans une scène impressionnante qui n'est pas sans rappeler Une Hirondelle a fait le printemps.
Assez vite, le mari va disparaître du paysage, laissant Inga (presque) seule face à la puissante coopérative laitière locale. Celle-ci est la seule cliente des éleveurs laitiers du coin, auxquels elle impose de se fournir uniquement auprès d'elle, y compris pour les produits de grande consommation, puisqu'elle contrôle les supérettes rurales où la majorité des habitants va faire ses courses. Il suffit de quelques plans au réalisateur pour suggérer l'opulence de cette coopérative autrefois au service des éleveurs : on aperçoit la maison spacieuse de son président et les voitures luxueuses des cadres.
La suite est un combat du pot de terre contre le pot de fer. Inga se révolte, à l'étonnement de ceux qui ne comprennent pas qu'elle s'obstine sur cette exploitation. Dans la région, une lutte d'influence s'engage entre une poignée de paysans rebelles et la coopérative. C'est quasi documentaire, parfois drôle, comme quand l'héroïne dit "merde" (à sa manière) au gros bras venu faire pression sur elle, ou quand elle se rend au siège de la coopé pour délivrer un "message lactique"... Signalons que le réalisateur a eu l'obligeance de laisser le personnage du directeur de la coopérative développer ses arguments. Le propos n'est pas unilatéral, même s'il est en empathie avec le combat d'Inga.
Le tout a pour cadre la campagne islandaise, magnifiée par des plans d'ensemble à savourer sur grand écran. Je suis sorti de là ravi, le film étant davantage porteur d'espoir qu'Au nom de la terre.
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samedi, 05 octobre 2019
Les Lois de l'hospitalité
L'année 2019 voit la ressortie en salles (en version restaurée) de ce moyen-métrage de Buster Keaton. Celui-ci, un peu oublié aujourd'hui, fut, à l'époque du cinéma muet, le grand rival de Charlie Chaplin, sans doute le meilleur spécialiste du slapstick, un genre comique fondé sur des cascades (Keaton les réalisant lui-même).
Keaton y incarne Willie McKay, un jeune New-Yorkais qui, dans la première moitié du XIXe siècle, se risque dans l'arrière-pays pour y récupérer ce qu'il pense être un héritage magnifique. Une double déception l'attend : l'héritage en question se limite à une bicoque brinquebalante et, sur place, résident encore les membres d'une famille (les Canfield) qui vouent une haine mortelle à la sienne. Or, dans le train qui l'amène depuis New York, le héros fait la connaissance d'une ravissante passagère (avec laquelle il sympathise), Virginia Canfield...
L'intrigue générale est simple (même si elle va suivre quelques détours sinueux). On sent l'influence du Roméo et Juliette de Shakespeare. Et pourtant, à la base, c'est une histoire vraie, celle de la vendetta (feud en anglais) entre les familles McCoy et Hatfield, qui défraya la chronique à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. (Des années plus tard, elle a inspiré Morris et Goscinny, auteurs de l'album Les Rivaux de Painful Gulch.)
La première séquence présente le contexte, au tout début du XIXe siècle. Les réalisateurs (John Blystone et Buster Keaton) campent avec force une opposition de classe entre une famille pauvre (avec un seul enfant), les McKay, et une famille aisée (dont on va découvrir au cours de l'histoire qu'elle se compose d'au moins quatre enfants), les Canfield. Le drame qui se déroule cette nuit de 1810 va relancer la querelle qui oppose les deux camps depuis des lustres, et qui semblait s'être atténuée.
Plus de vingt ans passent et nous voilà projetés dans un New York trépidant, avec quelques clins d'oeil comiques de Keaton : sur la circulation hippomobile qui devient infernale, sur l'urbanisation galopante dans le quartier de Broadway (dont pourtant l'aspect contraste fortement avec celui qu'il a acquis par la suite)... et sur les dangers qu'il y a à quitter la métropole pour l' "Ouest sauvage", situé au-delà de Trenton... à moins de cent kilomètres de là.
Le transport en train (en calèche ferroviaire, devrait-on dire) est source de multiples gags. Du personnel vieillissant à la fumée qui asperge les passagers, en passant par le tracer de la voie, acrobatique (et... modulable), on ne s'ennuie pas. Dans le même temps, Keaton/McKay fait montre de son savoir-faire dans le comique de situation.
L'intrigue prend un tour plus dramatique à l'arrivée dans les Appalaches. Au départ, le jeune McKay ne risque rien, puisqu'il n'est pas attendu et que personne ne connaît son identité. Mais il est du genre très poli, se présentant volontiers à des inconnus. De surcroît, la ravissante passagère, tombée sous son charme, l'a invité dans la demeure familiale des Canfield (sans lui avoir révélé son nom).
On attend donc avec impatience la séquence du dîner, qu'un détail sociologique va contribuer à épicer : les lois de l'hospitalité interdisent de s'en prendre à un invité dans l'enceinte de la maison (mais pas dans le jardin ni devant l'entrée). La tension monte et le héros déploie des trésors d'inventivité pour échapper aux griffes pistolets du père et des frères de sa dulcinée. Cela devient de plus en plus rocambolesque. C'est absolument délicieux.
J'ajoute que l'image restaurée (en noir et blanc) est superbe et qu'on a réenregistré la musique d'accompagnement. C'est un film à ne pas manquer s'il passe près de chez vous !
13:47 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
Les Lois de l'hospitalité
L'année 2019 voit la ressortie en salles (en version restaurée) de ce moyen-métrage de Buster Keaton. Celui-ci, un peu oublié aujourd'hui, fut, à l'époque du cinéma muet, le grand rival de Charlie Chaplin, sans doute le meilleur spécialiste du slapstick, un genre comique fondé sur des cascades (Keaton les réalisant lui-même).
Keaton y incarne Willie McKay, un jeune New-Yorkais qui, dans la première moitié du XIXe siècle, se risque dans l'arrière-pays pour y récupérer ce qu'il pense être un héritage magnifique. Une double déception l'attend : l'héritage en question se limite à une bicoque brinquebalante et, sur place, résident encore les membres d'une famille (les Canfield) qui vouent une haine mortelle à la sienne. Or, dans le train qui l'amène depuis New York, le héros fait la connaissance d'une ravissante passagère (avec laquelle il sympathise), Virginia Canfield...
L'intrigue générale est simple (même si elle va suivre quelques détours sinueux). On sent l'influence du Roméo et Juliette de Shakespeare. Et pourtant, à la base, c'est une histoire vraie, celle de la vendetta (feud en anglais) entre les familles McCoy et Hatfield, qui défraya la chronique à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. (Des années plus tard, elle a inspiré Morris et Goscinny, auteurs de l'album Les Rivaux de Painful Gulch.)
La première séquence présente le contexte, au tout début du XIXe siècle. Les réalisateurs (John Blystone et Buster Keaton) campent avec force une opposition de classe entre une famille pauvre (avec un seul enfant), les McKay, et une famille aisée (dont on va découvrir au cours de l'histoire qu'elle se compose d'au moins quatre enfants), les Canfield. Le drame qui se déroule cette nuit de 1810 va relancer la querelle qui oppose les deux camps depuis des lustres, et qui semblait s'être atténuée.
Plus de vingt ans passent et nous voilà projetés dans un New York trépidant, avec quelques clins d'oeil comiques de Keaton : sur la circulation hippomobile qui devient infernale, sur l'urbanisation galopante dans le quartier de Broadway (dont pourtant l'aspect contraste fortement avec celui qu'il a acquis par la suite)... et sur les dangers qu'il y a à quitter la métropole pour l' "Ouest sauvage", situé au-delà de Trenton... à moins de cent kilomètres de là.
Le transport en train (en calèche ferroviaire, devrait-on dire) est source de multiples gags. Du personnel vieillissant à la fumée qui asperge les passagers, en passant par le tracer de la voie, acrobatique (et... modulable), on ne s'ennuie pas. Dans le même temps, Keaton/McKay fait montre de son savoir-faire dans le comique de situation.
L'intrigue prend un tour plus dramatique à l'arrivée dans les Appalaches. Au départ, le jeune McKay ne risque rien, puisqu'il n'est pas attendu et que personne ne connaît son identité. Mais il est du genre très poli, se présentant volontiers à des inconnus. De surcroît, la ravissante passagère, tombée sous son charme, l'a invité dans la demeure familiale des Canfield (sans lui avoir révélé son nom).
On attend donc avec impatience la séquence du dîner, qu'un détail sociologique va contribuer à épicer : les lois de l'hospitalité interdisent de s'en prendre à un invité dans l'enceinte de la maison (mais pas dans le jardin ni devant l'entrée). La tension monte et le héros déploie des trésors d'inventivité pour échapper aux griffes pistolets du père et des frères de sa dulcinée. Cela devient de plus en plus rocambolesque. C'est absolument délicieux.
J'ajoute que l'image restaurée (en noir et blanc) est superbe et qu'on a réenregistré la musique d'accompagnement. C'est un film à ne pas manquer s'il passe près de chez vous !
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dimanche, 29 septembre 2019
Un Jour de pluie à New York
Un an et demi après Wonder Wheel, ce film constitue une sorte de retour aux sources pour Woody Allen. D'abord parce qu'il tourne de nouveau à New York. Ensuite, parce que c'est une comédie sentimentale verbeuse, comprenant ces fameuses scènes de dialogue où l'humour surgit au détour d'un torrent verbal.
Aller voir le dernier Woody (en V.O. sous-titrée, of course !), c'est un peu comme lire le dernier polar de son auteur préféré ou déboucher une bouteille du dernier cru de son vin de prédilection. On s'enferme bien au chaud, on met sa bonne vieille robe de chambre (celle qui a gardé les odeurs de tant de soirées mémorables), on s'installe dans un bon fauteuil, on pète un coup et puis... on savoure.
Hélas, on ne peut pas respecter ce rituel à la lettre dans une salle de cinéma. Mais ça le fait quand même. Les dialogues, très bien écrits, parfois incisifs comme je les aime, sont servis par de très bons interprètes. Entre les mains de Woody Allen, même le fadasse Timothée Chalamet est crédible en nouvel avatar du réalisateur. De leur côté, Liev Schreiber et Diego Luna font le job en réalisateur dépressif et acteur vedette coureur de jupons. Le meilleur est pour moi Jude Law, qui se fond dans le personnage du scénariste dépassé par les événements (professionnels et personnels).
C'est du côté féminin qu'il faut chercher les perles de ce film. Elle Fanning (How to talk to girls at parties, Les Proies, Mary Shelley) confirme tout le bien que je pensais d'elle. J'ai lu et entendu des commentaires désobligeants à son sujet mais, franchement, je crois que certaines personnes confondent le personnage d'Ashleigh avec l'actrice qui l'incarne. Il n'est pas facile d'interpréter une gourdasse. Ici, elle le fait très bien, avec, en bonus, une scène assez virtuose au restaurant (avec l'acteur bellâtre), durant laquelle elle est censée être un peu pompette. Du grand art.
A ses côtés figurent d'autres jeunes femmes à la fois belles et talentueuses. (Dieu que le travail de la directrice de casting a dû être épuisant !) Clairement, Selena Gomez sort du lot, dans le rôle de la sœur d'une ex-copine du héros, une brune piquante qui en pince pour Gatsby-le-pas-vraiment-magnifique. C'est d'ailleurs la seule faiblesse de l'histoire, qui nous laisse entrevoir très tôt comment tout cela risque fort de se conclure. A noter aussi les prestations d'Annaleigh Ashford (au rire tonitruant) et de Cherry Jones, qui incarne la mère de Gatsby, dont la conversation avec son fils débouche sur une révélation des plus surprenantes.
C'est donc (plutôt) bien écrit, très bien joué, bien filmé, bien éclairé et décoré avec, en sus, une ambiance musicale toujours aussi "cosy". Woody a même trouvé le moyen de faire ironiquement allusion à ses ennuis personnels. Pour parvenir à mettre Ashleigh dans son lit, le bellâtre Francisco Vega ne compte pas que sur son charme (surestimé) et sa renommée (abusive) : il fait boire la jeune femme, qui se retrouve aussi avec un joint en bouche. La manière dont cet épisode se conclut est croquignolesque... Mais ce bon Woody n'a pas pu s'empêcher de rappeler que lui (qu'on accuse de bien des maux) ne s'adonne pas à ce genre de comportement douteux, apparemment assez répandu à Hollywood. Qui sait quelles vedettes du grand écran ont échappé à la vindicte de MeToo ?
00:29 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Un Jour de pluie à New York
Un an et demi après Wonder Wheel, ce film constitue une sorte de retour aux sources pour Woody Allen. D'abord parce qu'il tourne de nouveau à New York. Ensuite, parce que c'est une comédie sentimentale verbeuse, comprenant ces fameuses scènes de dialogue où l'humour surgit au détour d'un torrent verbal.
Aller voir le dernier Woody (en V.O. sous-titrée, of course !), c'est un peu comme lire le dernier polar de son auteur préféré ou déboucher une bouteille du dernier cru de son vin de prédilection. On s'enferme bien au chaud, on met sa bonne vieille robe de chambre (celle qui a gardé les odeurs de tant de soirées mémorables), on s'installe dans un bon fauteuil, on pète un coup et puis... on savoure.
Hélas, on ne peut pas respecter ce rituel à la lettre dans une salle de cinéma. Mais ça le fait quand même. Les dialogues, très bien écrits, parfois incisifs comme je les aime, sont servis par de très bons interprètes. Entre les mains de Woody Allen, même le fadasse Timothée Chalamet est crédible en nouvel avatar du réalisateur. De leur côté, Liev Schreiber et Diego Luna font le job en réalisateur dépressif et acteur vedette coureur de jupons. Le meilleur est pour moi Jude Law, qui se fond dans le personnage du scénariste dépassé par les événements (professionnels et personnels).
C'est du côté féminin qu'il faut chercher les perles de ce film. Elle Fanning (How to talk to girls at parties, Les Proies, Mary Shelley) confirme tout le bien que je pensais d'elle. J'ai lu et entendu des commentaires désobligeants à son sujet mais, franchement, je crois que certaines personnes confondent le personnage d'Ashleigh avec l'actrice qui l'incarne. Il n'est pas facile d'interpréter une gourdasse. Ici, elle le fait très bien, avec, en bonus, une scène assez virtuose au restaurant (avec l'acteur bellâtre), durant laquelle elle est censée être un peu pompette. Du grand art.
A ses côtés figurent d'autres jeunes femmes à la fois belles et talentueuses. (Dieu que le travail de la directrice de casting a dû être épuisant !) Clairement, Selena Gomez sort du lot, dans le rôle de la sœur d'une ex-copine du héros, une brune piquante qui en pince pour Gatsby-le-pas-vraiment-magnifique. C'est d'ailleurs la seule faiblesse de l'histoire, qui nous laisse entrevoir très tôt comment tout cela risque fort de se conclure. A noter aussi les prestations d'Annaleigh Ashford (au rire tonitruant) et de Cherry Jones, qui incarne la mère de Gatsby, dont la conversation avec son fils débouche sur une révélation des plus surprenantes.
C'est donc (plutôt) bien écrit, très bien joué, bien filmé, bien éclairé et décoré avec, en sus, une ambiance musicale toujours aussi "cosy". Woody a même trouvé le moyen de faire ironiquement allusion à ses ennuis personnels. Pour parvenir à mettre Ashleigh dans son lit, le bellâtre Francisco Vega ne compte pas que sur son charme (surestimé) et sa renommée (abusive) : il fait boire la jeune femme, qui se retrouve aussi avec un joint en bouche. La manière dont cet épisode se conclut est croquignolesque... Mais ce bon Woody n'a pas pu s'empêcher de rappeler que lui (qu'on accuse de bien des maux) ne s'adonne pas à ce genre de comportement douteux, apparemment assez répandu à Hollywood. Qui sait quelles vedettes du grand écran ont échappé à la vindicte de MeToo ?
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mercredi, 25 septembre 2019
Rambo : Last Blood
Le titre est évidemment une référence au premier opus (First Blood). On semble nous annoncer que Johnny va boucler la boucle, dans un dernier combat dont on ne perçoit pas comment il pourrait se conclure.
Mais, avant d'en arriver là (et au feu d'artifice final), on retrouve le héros en bon samaritain, toujours prêt à rendre service, comme lors de cette forte tempête, au cours de laquelle on le voit sauver une charmante randonneuse, tout en préservant sa monture.
C'est qu'il aime les canassons, notre Rambo. Dans son ranch, il les dresse avec calme et dextérité. Il a même transmis son savoir à la nièce de la femme qui l'a accueilli. La ravissante Gabrielle est sur le point de prendre son envol, loin de l'Arizona. Mais, auparavant, elle aimerait bien revoir ce père qui l'a abandonnée il y a des années. On sent venir à des kilomètres la désobéissance de la jeune femme, qui n'hésite pas à se rendre au Mexique, dans un quartier mal famé, en petite tenue. Quand elle sort de sa voiture (où elle a laissé son smartphone bien en évidence), elle néglige de verrouiller les portes ! Et après on s'étonne qu'il lui arrive des bricoles...
Pendant ce temps-là, Johnny s'occupe au ranch, histoire de chasser ses idées noires. Il se bourre de cachetons pour tenter de surmonter les crises de délire qui lui laissent peu de répit. Ces dix dernières années (depuis la fin de John Rambo), il en a abattu du boulot, puisque la propriété surmonte un impressionnant réseau de galeries, où il se réfugie, notamment pour dormir.
La première séquence d'action le voit partir au Mexique pour tenter de ramener Gabrielle. Cela nous vaut une délicieuse scène d'interrogatoire à la sortie d'une boîte de nuit. Ce premier séjour est aussi l'occasion pour le héros de faire une rencontre inattendue, celle d'une femme qui pourrait devenir son alliée... voire plus, si affinités. Mais John n'est pas sur son terrain. Pour vaincre les méchants, il va devoir les attirer dans sa tanière.
Tous les mecs présents dans la salle attendent ce moment de bravoure (très gore), qui voit une bande d'horribles voyous s'attaquer au ranch regorgeant de pièges, le plus redoutable se déplaçant sur deux jambes. C'est l'occasion de préciser que Stallone, avec sa gueule de mille ans, est plutôt bien dans le rôle.
Hélas, la production semble avoir donné des consignes drastiques aux monteurs. On a visiblement voulu boucler cela en 1h30 (douche comprise). Du coup, certaines bonnes scènes ne sont pas suffisamment exploitées. On a cependant gardé un petit clin d’œil à la politique américaine : quand les voyous mexicains veulent s'introduire clandestinement aux États-Unis, ils contournent sans peine le mur de séparation déjà en place... en empruntant les tunnels qu'ils ont fait creuser. Quand Rambo se retrouve dans une situation semblable, il utilise une méthode plus "artisanale" : il défonce la barrière frontalière. Hi, Donald !
20:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Rambo : Last Blood
Le titre est évidemment une référence au premier opus (First Blood). On semble nous annoncer que Johnny va boucler la boucle, dans un dernier combat dont on ne perçoit pas comment il pourrait se conclure.
Mais, avant d'en arriver là (et au feu d'artifice final), on retrouve le héros en bon samaritain, toujours prêt à rendre service, comme lors de cette forte tempête, au cours de laquelle on le voit sauver une charmante randonneuse, tout en préservant sa monture.
C'est qu'il aime les canassons, notre Rambo. Dans son ranch, il les dresse avec calme et dextérité. Il a même transmis son savoir à la nièce de la femme qui l'a accueilli. La ravissante Gabrielle est sur le point de prendre son envol, loin de l'Arizona. Mais, auparavant, elle aimerait bien revoir ce père qui l'a abandonnée il y a des années. On sent venir à des kilomètres la désobéissance de la jeune femme, qui n'hésite pas à se rendre au Mexique, dans un quartier mal famé, en petite tenue. Quand elle sort de sa voiture (où elle a laissé son smartphone bien en évidence), elle néglige de verrouiller les portes ! Et après on s'étonne qu'il lui arrive des bricoles...
Pendant ce temps-là, Johnny s'occupe au ranch, histoire de chasser ses idées noires. Il se bourre de cachetons pour tenter de surmonter les crises de délire qui lui laissent peu de répit. Ces dix dernières années (depuis la fin de John Rambo), il en a abattu du boulot, puisque la propriété surmonte un impressionnant réseau de galeries, où il se réfugie, notamment pour dormir.
La première séquence d'action le voit partir au Mexique pour tenter de ramener Gabrielle. Cela nous vaut une délicieuse scène d'interrogatoire à la sortie d'une boîte de nuit. Ce premier séjour est aussi l'occasion pour le héros de faire une rencontre inattendue, celle d'une femme qui pourrait devenir son alliée... voire plus, si affinités. Mais John n'est pas sur son terrain. Pour vaincre les méchants, il va devoir les attirer dans sa tanière.
Tous les mecs présents dans la salle attendent ce moment de bravoure (très gore), qui voit une bande d'horribles voyous s'attaquer au ranch regorgeant de pièges, le plus redoutable se déplaçant sur deux jambes. C'est l'occasion de préciser que Stallone, avec sa gueule de mille ans, est plutôt bien dans le rôle.
Hélas, la production semble avoir donné des consignes drastiques aux monteurs. On a visiblement voulu boucler cela en 1h30 (douche comprise). Du coup, certaines bonnes scènes ne sont pas suffisamment exploitées. On a cependant gardé un petit clin d’œil à la politique américaine : quand les voyous mexicains veulent s'introduire clandestinement aux États-Unis, ils contournent sans peine le mur de séparation déjà en place... en empruntant les tunnels qu'ils ont fait creuser. Quand Rambo se retrouve dans une situation semblable, il utilise une méthode plus "artisanale" : il défonce la barrière frontalière. Hi, Donald !
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samedi, 21 septembre 2019
Les Hirondelles de Kaboul
Ce n'est qu'après avoir vu ce film de Zabou Breitman que j'ai appris qu'il est adapté d'un roman de Yasmina Khadra. Il y a quelques années, j'ai vu l'adaptation d'une autre de ses œuvres, L'Attentat, vraiment prenante.
Ici, il s'agit d'un film d'animation, dont le style évoque pour moi la peinture à l'eau. Cela m'a d'ailleurs déconcerté. L'esthétique semble se rapprocher de celle du conte, alors que tous les sons ajoutés nous plongent dans un réalisme implacable. Je dois dire que, si j'ai été gêné au départ, le procédé a fini par s'imposer à moi, tant c'est réalisé avec talent. (Au pinceau se trouve Eléa Gobbé-Mévellec, naguère animatrice sur Le Chat du rabbin, Le Jour des corneilles, Ernest et Célestine, Avril et le monde truqué ou encore Le Prophète.)
L'action se déroule à la fin du XXe siècle (il est question à plusieurs reprises des exploits d'un certain Zinédine Zidane, en 1998), dans l'Afghanistan dominé par les talibans. On suit plusieurs personnages, notamment deux couples, celui formé par un gardien de prison (ancien moudjahidin quelque peu désabusé) et son épouse frappée par le cancer et celui formé par une (ravissante) artiste libertaire et son époux emprunté. On découvre d'ailleurs assez rapidement celui-ci, au cours d'une séquence où il va faire preuve de lâcheté.
Cela donne le ton de l'histoire, dans laquelle les personnages principaux ne sont pas d'un bloc. On suit plus particulièrement les tourments intérieurs du gardien de prison, dont l'épouse elle aussi va nous surprendre. Je dois reconnaître que j'ai été moins touché par le second couple, plus jeune, moins réfléchi, surtout (pour moi) très imprudent compte tenu du profil des individus qui tiennent la ville.
Du côté des talibans, on ne verra pas le visage d'une seule des gardiennes, réduites à leur tenue "islamiquement correcte". Leurs équivalents masculins sont un peu plus travaillés. Ils ne se sont pas engagés dans leur "cause" pour les mêmes raisons. Si certains sont bien motivés par une quête religieuse (certes extrémiste), d'autres se servent de la religion pour assouvir leurs désirs, ou tout simplement acquérir du pouvoir.
La violence est omniprésente, qu'elle soit physique ou morale. La séquence de la lapidation est pour moi la plus marquante... et nécessaire, pour montrer quel degré de barbarie a atteint ce régime infect. On nous épargne toutefois certains aspects sordides, comme l'égorgement d'un opposant.
Une fois ma gêne quant à la forme surmontée, j'ai été pris par l'histoire. Je ne cache cependant pas qu'elle subit un petit coup de mou, en deuxième partie, avant que l'intérêt ne remonte dans les dix dernières minutes. (Sur un sujet approchant, je trouve Parvana plus réussi.)
Au moment où l'administration Trump est tentée de baisser son froc devant les talibans, la sortie de ce film rappelle à celles et ceux qui l'auraient oublié ce qu'est une théocratie machiste, inculte et occidentalophobe.
20:46 Publié dans Cinéma, Politique étrangère, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Les Hirondelles de Kaboul
Ce n'est qu'après avoir vu ce film de Zabou Breitman que j'ai appris qu'il est adapté d'un roman de Yasmina Khadra. Il y a quelques années, j'ai vu l'adaptation d'une autre de ses œuvres, L'Attentat, vraiment prenante.
Ici, il s'agit d'un film d'animation, dont le style évoque pour moi la peinture à l'eau. Cela m'a d'ailleurs déconcerté. L'esthétique semble se rapprocher de celle du conte, alors que tous les sons ajoutés nous plongent dans un réalisme implacable. Je dois dire que, si j'ai été gêné au départ, le procédé a fini par s'imposer à moi, tant c'est réalisé avec talent. (Au pinceau se trouve Eléa Gobbé-Mévellec, naguère animatrice sur Le Chat du rabbin, Le Jour des corneilles, Ernest et Célestine, Avril et le monde truqué ou encore Le Prophète.)
L'action se déroule à la fin du XXe siècle (il est question à plusieurs reprises des exploits d'un certain Zinédine Zidane, en 1998), dans l'Afghanistan dominé par les talibans. On suit plusieurs personnages, notamment deux couples, celui formé par un gardien de prison (ancien moudjahidin quelque peu désabusé) et son épouse frappée par le cancer et celui formé par une (ravissante) artiste libertaire et son époux emprunté. On découvre d'ailleurs assez rapidement celui-ci, au cours d'une séquence où il va faire preuve de lâcheté.
Cela donne le ton de l'histoire, dans laquelle les personnages principaux ne sont pas d'un bloc. On suit plus particulièrement les tourments intérieurs du gardien de prison, dont l'épouse elle aussi va nous surprendre. Je dois reconnaître que j'ai été moins touché par le second couple, plus jeune, moins réfléchi, surtout (pour moi) très imprudent compte tenu du profil des individus qui tiennent la ville.
Du côté des talibans, on ne verra pas le visage d'une seule des gardiennes, réduites à leur tenue "islamiquement correcte". Leurs équivalents masculins sont un peu plus travaillés. Ils ne se sont pas engagés dans leur "cause" pour les mêmes raisons. Si certains sont bien motivés par une quête religieuse (certes extrémiste), d'autres se servent de la religion pour assouvir leurs désirs, ou tout simplement acquérir du pouvoir.
La violence est omniprésente, qu'elle soit physique ou morale. La séquence de la lapidation est pour moi la plus marquante... et nécessaire, pour montrer quel degré de barbarie a atteint ce régime infect. On nous épargne toutefois certains aspects sordides, comme l'égorgement d'un opposant.
Une fois ma gêne quant à la forme surmontée, j'ai été pris par l'histoire. Je ne cache cependant pas qu'elle subit un petit coup de mou, en deuxième partie, avant que l'intérêt ne remonte dans les dix dernières minutes. (Sur un sujet approchant, je trouve Parvana plus réussi.)
Au moment où l'administration Trump est tentée de baisser son froc devant les talibans, la sortie de ce film rappelle à celles et ceux qui l'auraient oublié ce qu'est une théocratie machiste, inculte et occidentalophobe.
20:46 Publié dans Cinéma, Politique étrangère, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 20 septembre 2019
Ad Astra
Deux ans après Lost City of Z, le réalisateur James Gray s'est lancé dans la science-fiction philosophique. Bien qu'il ne semble pas l'admettre, à l'image, on sent l'influence de prestigieux prédécesseurs, du 2001 de Stanley Kubrick au Gravity d'Alfonso Cuarón, en passant par Mission to Mars de Brian de Palma.
Comme les producteurs ont sorti le chéquier, à l'écran, dans une grande salle, c'est superbe. Dès le début, j'ai été cueilli par la séquence de travail en orbite autour de la Terre. Plus loin, j'ai apprécié la description d'un quotidien futuriste possible, avec l'omniprésence de la commande vocale et des navettes régulières entre Terre et Lune, Lune et Mars. Du côté des scènes d'action, on est servi, avec notamment une embuscade sur la face cachée de la Lune qui mérite le détour.
Brad Pitt assure en super-astronaute au sang froid, qui déconcerte jusqu'à ses proches mais ne se laisse décontenancer par aucune situation imprévue. Je crois que Brad est présent dans toutes les scènes. (Est-il besoin de préciser qu'il a coproduit le film ?)
Le problème est qu'après un début flamboyant, l'histoire s'enlise. J'ai eu de plus en plus de mal à supporter la voix-off (issue des évaluations psychologiques du super-astronaute). Il me semble aussi qu'après avoir mis en place son dispositif, James Gray se laisse dépasser par ses obsessions : la relation père-fils, l'incompatibilité entre l'accomplissement professionnel et le bonheur intime. On finit par comprendre que le papa (incarné par Tommy Lee Jones) considère l'espace comme son foyer. Par contre le fiston, même s'il a marché sur les traces du paternel, aspire à une vie plus "conventionnelle".
L'intrigue ménage quand même un petit suspens. Que va trouver le héros dans sa quête du père ? Celui-ci est-il mort ? A-t-il fait une rencontre du troisième type ? Et qu'est-ce qui est réellement la source de ces soudaines et phénoménales décharges d'énergie qui menacent la Terre ?
Sur le plan esthétique, c'est une oeuvre qui mérite le détour, mais c'est plutôt moyen sur le plan scénaristique.
23:17 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films