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Du monde au balcon

   C'est ce que j'ai pensé en regardant les photographies de la manifestation des Femen place des Pyramides, à Paris, notamment cette exquise contre-plongée, publiée dans un article du Monde :

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   Ce coup d'éclat avait pour but de parasiter l'une des sempiternelles tentatives de récupération de Jeanne d'Arc par l'extrême-droite. Il y a bien sûr la manifestation du 1er mai, autour du Front National... et puis il y a l'action de certains groupuscules (qui peinent à réunir quelques dizaines de personnes), en ce deuxième dimanche de mai. Mais pourquoi diable cette discordance entre les dates ?

   Depuis la Troisième République, l'extrême-droite a pris l'habitude de manifester autour de la statue d'Emmanuel Frémiet. Le choix du premier mai s'explique par la volonté de contrebalancer la fête des travailleurs, initiée par la gauche. De plus, c'est au début du mois de mai 1429 que Jeanne d'Arc, à la tête des troupes du Dauphin (futur Charles VII) mena la délivrance d'Orléans. Cette victoire se commémore le 8 mai ou, plus fréquemment, le deuxième dimanche du mois. Le 10 juillet 1920 (année de sa canonisation), une loi a créé officiellement cette deuxième fête nationale.

   Voilà pourquoi, tous les deuxièmes dimanches du mois de mai, les bâtiments publics sont pavoisés aux couleurs nationales, tout comme la statue de la place des Pyramides, ainsi qu'on peut le voir dans une vidéo mise en ligne sur le site du quotidien gratuit Metro :

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   Je ne suis pas un inconditionnel des Femen, mais je n'aime pas la récupération dont la Pucelle fait l'objet de la part de l'extrême-droite. A cet égard, j'ai trouvé fort pertinent l'un des "touittes" publiés par les Femen :

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   De surcroît, le dévoilement de la poitrine, marque de fabrique des Femen, est un hommage à la féminité de Jeanne d'Arc. Plusieurs témoignages, émis lors du procès en réhabilitation (en 1456), accréditent l'idée qu'elle était bien pourvue de ce côté-là.

   Jean d'Aulon, à la fois garde du corps et chevalier-servant, fut sans doute celui qui la côtoya le plus. A la fin de son témoignage, il parle d'elle comme d'une "jeune fille, belle et bien formée" (il évoque même ses "tétins" !). Le duc d'Alençon fut quant à lui plutôt un partenaire de combat. Il eut l'occasion de la voir s'habiller et se déshabiller. Voici ce qu'il déclare : "parfois il voyait ses seins, qui étaient beaux". Il nous reste la déposition d'Aymond (ou Haimond) de Macy, du parti adverse des Bourguignons, alliés du roi d'Angleterre. Cet enfoiré a essayé de lui tripoter les nibards ! (C'est donc qu'ils lui semblaient "appétissants"...) : "Plus d'une fois, par manière de jeu, j'ai essayé de lui toucher les mamelles, en m'efforçant de lui mettre les mains dans le sein. Jeanne ne voulait pas le souffrir ; elle me repoussait de toutes ses forces."

   Mais revenons aux Femen. L'exhibition de leur poitrine est un acte ambigu. D'un côté, elles affirment ainsi la maîtrise de leur corps. D'un autre côté, elles choquent bien de peu de monde en Occident. Elles excitent même plutôt la curiosité des mâles avides de chair fraîche... parce que ces dames sont mignonnes ! Elles ont bien compris comment fonctionne notre société du spectacle : jolies femmes + poitrines exhibées = retentissement médiatique assuré.

   Terminons par leur positionnement idéologique. On les a étiquetées un peu vite "gauchistes". Elles s'opposent au néo-stalinisme florissant en Europe de l'Est (Ukraine, Biélorussie et Russie). Elles rejettent violemment la droite extrême en Occident et s'opposent tout aussi fortement à l'islamisme. C'est à l'évidence un mouvement anti-totalitaire et anticlérical, qui peut tout à fait s'apparenter à une forme de libéralisme politique.

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dimanche, 12 mai 2013 | Lien permanent | Commentaires (2)

Les Aventures de Rabbi Jacob

   L'été, les salles obscures ont tendance à se vider (sauf pour les grosses productions regorgeant d'effets spéciaux), ce qui laisse de la place pour de "vieux" films, en général dans une version restaurée. A l'origine, cette pratique était peu répandue dans les cinémas français de province et se limitait à des classiques étrangers (comme Chinatown, Blade Runner ou, plus récemment, Memories of murder de Bong Joon Ho, qui vient de recevoir la Palme d'or pour l'excellent Parasite).

   Depuis quelques années, y compris à Rodez, on peut (re)voir aussi des classiques français. Ce fut le cas, il y a trois ans, de La Grande Vadrouille, que je n'avais jamais vu au cinéma... tout comme Rabbi Jacob. Va donc pour une séance rétro !

   Autant le dire tout de suite : le film a vieilli, bien plus (à mon avis) que La Grande Vadrouille. Mais il n'est pas sans intérêt. Le début se passe à New York, dans le quartier juif orthodoxe de Brooklyn. A ma grande surprise (je n'ai pas vu le film depuis plus de quinze ans), cette séquence, principalement tournée en anglais, n'est pas sous-titrée (pas plus que les quelques dialogues en yiddish). Mais ce n'est pas gênant pour la compréhension de l'intrigue. A titre d'anecdote, je signale que l'on voit à plusieurs reprises les anciennes tours du World Trade Center, notamment dans un plan pris du pont de Brooklyn qui n'est pas sans rappeler l'un de ceux présents dans Shoah (tourné quelques années plus tard), au début de la séquence au cours de la quelle Claude Lanzmann interroge Rudolf Vrba, un évadé d'Auschwitz.

   En France, c'est Victor Pivert et son entourage que l'on découvre. De Funès fait du De Funès, mais un peu en roue libre. C'est excessif, moins bon que dans d'autres films tournés par le comédien... peut-être parce qu'il n'y a pas assez de répondant chez ses partenaires. Les personnalités qui sortent du lot sont celles de son épouse dentiste (incarnée par Suzy Delair) et celle du révolutionnaire Slimane (incarné par Claude Giraud, dont le visage est beaucoup moins familier que la voix : il s'est beaucoup illustré dans le doublage).

   L'humour fonctionne sur le principe du comique de situation, avec des quiproquos. C'est moyennement réussi dans l'usine de chewing-gum. A partir du moment où le duo Pivert-Slimane "devient juif", cela décolle un peu. Nous voilà transportés dans le quartier parisien du Marais, notamment rue des Rosiers (devenue tristement célèbre dix ans plus tard). On redécouvre avec plaisir la célèbre danse (récemment remise au goût du jour). Parmi les scènes que je trouve toujours réussies, il y a celle de la synagogue quand, pour aider les fugitifs à échapper aux policiers, les participants lèvent tous leur talit (châle de prière).

   On croise beaucoup de visages connus, de Claude Piéplu (en commissaire borné) à Jacques François (en officier traditionaliste), en passant par Popeck, Xavier Gélin, Miou-Miou, Henri Guybet et même Gérard Darmon. Quant aux cascades, elles ont été réglées par Rémy Julienne. C'est aussi un film d'action !

   Au-delà de la comédie, le film est une ode à ce que l'on appelle aujourd'hui "le vivre ensemble". Catholiques conservateurs, juifs traditionnels et musulmans vont dépasser leurs préjugés pour échapper aux méchants de l'histoire. 45 ans plus tard, on peut trouver cela naïf, mais cette comédie bon enfant a eu un retentissement énorme (elle a même été nommée aux Golden Globe).

   P.S.

   La musique de Vladimir Cosma est chouette.

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samedi, 13 juillet 2019 | Lien permanent | Commentaires (1)

Bilan des César 2020

   Le palmarès de cette année n'a pas particulièrement mis l'accent sur un film. Il semble qu'on ait tenté de concilier les contraires, sur le plan artistique (avec une réjouissante diversité de lauréats) comme sur le plan moral.

   Tout d'abord, on remarque que les récompenses obtenues par des femmes ne se sont pas limitées à des catégories réservées (meilleure actrice ou espoir féminin). Ainsi, la réalisatrice Mounia Meddour est venue chercher le César du meilleur premier film (pour Papicha), tandis que Yolande Zauberman était récompensée pour son documentaire M. De son côté, Pascaline Chavanne a été primée pour les (excellents) costumes de J'accuse. En face (si j'ose dire), Claire Mathon a été distinguée pour la photographie de Portrait de la jeune fille en feu. A cette liste s'ajoutent les César du meilleur montage (Flora Volpelière, pour Les Misérables) et du meilleur court-métrage (Lauriane Escaffre pour Pile Poil, dans lequel joue notamment Grégory Gadebois).

   Une autre tendance de la soirée est la mise en valeur des "minorités visibles". Ainsi, on peut considérer comme (petit) vainqueur de ce palmarès Les Misérables qui, en plus du meilleur montage, a reçu le César du meilleur espoir masculin, celui du public et celui du meilleur film. (Le paradoxe est qu'il n'a été distingué ni pour ses premiers rôles, ni pour le scénario, ni pour la réalisation...) On peut placer dans la même catégorie Papicha, primé aussi au titre du meilleur espoir féminin.  Enfin, Roschy Zem a réussi à décrocher une statuette, pour son interprétation dans Roubaix, une lumière.

   La troisième leçon à retenir de cette soirée est que, globalement, les quelque 4 000 électeurs de l'Académie ont su résister aux pressions qui se sont exercées sur eux, pressions dont le but était d'empêcher J'accuse de décrocher la moindre récompense. Je pense néanmoins que cela a privé Jean Dujardin de la couronne de meilleur acteur... et peut-être le film du sacre de meilleur long-métrage de l'année passée. Roman Polanski aura quand même le plaisir de recevoir le César du meilleur réalisateur et celui de la meilleure adaptation (avec Robert Harris).

   Au titre des satisfactions, je signale les deux récompenses reçues par J'ai perdu mon corps : meilleur long-métrage d'animation et meilleure musique originale. Je recommande aussi la vision de La Nuit des sacs plastiques, distingué dans la catégorie meilleur court-métrage d'animation. C'est une fable fantastico-philosophico-écologique, assez flippante, d'un jeune homme à suivre : Gabriel Harel. Un autre César (celui du meilleur son) a été attribué au Chant du loup., tout aussi logiquement que le prix du meilleur film étranger, revenu à l'incontournable Parasite.

   Il reste à signaler ce qui est apparu (y compris à celle qui en a été bénéficiaire) comme une énorme surprise, voire une incohérence : l'attribution du César de la meilleure actrice à Anaïs Demoustier, pour son rôle dans Alice et le maire. J'apprécie cette comédienne, mais je pense que ce n'est pas lui faire injure que d'écrire que certaines de ses concurrentes avaient réalisé des performances bien plus marquantes. Je pense en particulier à Eva Green, formidable dans Proxima. Mais mon petit doigt me dit que le choix d'Anaïs Demoustier résulte peut-être d'une manoeuvre d'électeurs désireux d'éviter la désignation de l'une des deux actrices principales du Portrait de la jeune fille en feu : Adèle Haenel et Noémie Merlant. La sortie théâtrale (et... ratée) de la première, après l'attribution du César du meilleur réalisateur à Roman Polanski, pourrait tout aussi bien être due au dépit de ne pas avoir été distinguée.

   C'est tout pour les nouvelles du petit monde narcissique du cinéma français.

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samedi, 29 février 2020 | Lien permanent | Commentaires (3)

Les ”Riton” 2019

   Il m'est toujours aussi difficile de dresser un palmarès restreint des films qui m'ont le plus plu sur une année. Tant d'entre eux m'ont procuré du plaisir !... et (trop souvent) n'ont pas rencontré leur public. C'est le moment de leur rendre hommage.

   Cette année 2019, les films sociaux ont été nombreux et (parfois) de qualité.

- Riton du film dénonçant les conséquences de la politique de l'enfant unique : So long, my son

- Riton du film mélenchoniste : Joker (un des dix films de l'année, selon moi)

- Riton du film dénonçant la naissance d'un terroriste : Le Jeune Ahmed

- Riton du film dénonçant la petite délinquance : L'Homme à la moto

- Riton du film carcéral : Nevada

- Riton du film dénonçant les inégalités sociales : Les Invisibles

- Riton du film dénonçant une mafia rurale : Mjolk

- Riton du film dénonçant les difficultés dont sont victimes les paysans : Au nom de la terre

 

   Certains films à contexte social (ou sociétal) ont pris la forme du drame ou du thriller.

- Riton de la violence rurale : Les Moissonneurs (un des dix films de l'année)

- Riton de la violence forestière : La Miséricorde de la jungle

- Riton de la violence scolaire : L'heure de la sortie

- Riton de la violence familiale : Wedding Nightmare

- Riton de la violence urbaine : Parasite (pas loin du top 10)

- Riton de la violence californienne : Once upon a time in Hollywood

 

   Un arrière-plan historique a souvent contribué au succès de certains films.

- Riton du film sur la ségrégation : Green Book

- Riton du film sur les femmes et le pouvoir : Mary Stuart, reine d'Ecosse (tout près du top 10)

- Riton du film en costumes : La Favorite (qui passe juste devant le précédent pour devenir l'un des dix films de l'année)

- Riton du film politico-judiciaire : J'accuse (un des dix films de l'année)

- Riton du film qui nous en apprend encore sur la Seconde Guerre mondiale : Les Témoins de Lendsdorf

- Riton du film de femmes victimes des conséquences de la guerre : Une Grande Fille

- Riton du film antitotalitaire : L'Oeuvre sans auteur (un des dix films de l'année)

- Riton du film de rebelles : Companeros

 

   Complète cette catégorie celle des documentaires.

- Riton italo-chilien : Santiago, Italia

- Riton franco-catholique : Lourdes

- Riton franco-international : Le Regard de Charles (pas loin du top 10)

- Riton franco-germano-américain : Chichinette, ma vie d'espionne (pas loin du top 10 non plus)

- Riton agricole : Tout est possible

- Riton trumpiste : Monrovia, Indiana (pas loin du top 10)

 

   Mais ce sont parfois les polars qui parlent le mieux de la réalité.

- Riton de la réalité new-yorkaise : Brooklyn Affairs (encore un qui n'est pas loin du top 10)

- Riton de l'illusion new-yorkaise : Les Faussaires de Manhattan

- Riton des beaux parleurs : El Reino

- Riton des bons menteurs : The Operative

- Riton des faux-semblants : Seules les bêtes (un des dix films de l'année)

- Riton des faux-jetons : Un Eté à Changsha

- Riton des vrais barjots : Qui a tué Lady Winsley ?

 

   Cela m'amène tout naturellement aux comédies, en général plutôt des produits de consommation courante que des chefs-d’œuvre.

- Riton de la comédie à la sauce aigre-douce : Rebelles

- Riton de la comédie à la sauce pénienne : Nicky Larson et le parfum de Cupidon (eeeeeh oui ! J'ose classer ce film furieusement potache dans mon top 10 de l'année !)

- Riton de la comédie sauce harissa : Tel Aviv on fire

- Riton de la comédie sauce tomate : Ne coupez pas !

 

   Ce film japonais expérimental me conduit fort logiquement aux œuvres d'animation, catégorie dans laquelle, une fois de plus, les productions nipponnes se sont illustrées.

- Riton de l'enfance disparue : Miraï, ma petite soeur (tout prêt du top 10)

- Riton des orphelins disparus : Les Enfants de la mer (un des dix films de l'année)

- Riton du monde disparu : Wonderland, le royaume sans pluie

- Riton de l'amour disparu : Millennium Actress

- Riton de la main disparue : J'ai perdu mon corps (un des dix films de l'année)

- Riton du chien découvreur : Stubby

- Riton du jouet fugueur : Toy Story 4 (un des dix films de l'année)

- Riton du pigeon voyageur :

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mardi, 31 décembre 2019 | Lien permanent | Commentaires (2)

Incertitude à Mur-de-Barrez

   C'est l'un des cantons les plus disputés du département de l'Aveyron. Composé des communes de Brommat, Lacroix-Barrez, Mur-de-Barrez, Murols, Taussac et Thérondels, il est situé à la frontière avec le Cantal :

Mur-de-Barrez.jpg

   Jusqu'à il y a un ou deux ans, peu de personnes auraient songé que le résultat du vote des habitants de ce canton puisse faire basculer la majorité du Conseil général (et, quel que soit le résultat de dimanche, cela ne se produira finalement sans doute pas) : la région passe pour être un bastion de la droite (Nicolas Sarkozy l'a même choisie l'an dernier pour se faire mousser auprès des paysans) et le conseiller titulaire (le maire de Brommat Francis Issanchou) était bien implanté. Mais voilà : celui-ci ne se représente pas et, aux dernières élections régionales, la gauche est arrivée en tête dans le canton. Or, il se trouve qu'en 2010, au premier tour, sur la liste conduite par Marie-Lou Marcel figurait (en dernière position) Daniel Tarrisse, originaire de Thérondels. Cette commune a d'ailleurs, ô surprise, placé la liste PS-PRG loin devant les autres. Seules les communes de Mur-de-Barrez (de justesse) et de Murols avaient accordé leur préférence à la droite, pourtant conduite par Jean-Claude Luche.

   Il est donc apparu naturel que le même Daniel Tarrisse défende les couleurs de la gauche sur le canton. Il a mené une campagne dynamique, sur la Toile avec son blog et sur le terrain, réalisant notamment une enquête auprès de ses concitoyens.

   A droite, on ne s'est pas bousculé pour l'affronter. Francis Issanchou s'est dit qu'il avait fait son temps. L'UMP n'a pas réussi à convaincre l'ancien président de la Chambre d'agriculture, Jean Laurens (qui a des attaches dans la région), de se lancer. Comme souvent à droite, c'est le "patron" qui décide et Jean-Claude Luche a choisi, pour contrecarrer la poussée de la gauche, de miser sur une femme, Marie-Pierre Guimontheil, adjointe au maire de Mur-de-Barrez. Il a peut-être compté sur la notoriété de sa famille : elle est la belle-fille d'un ancien maire de Thérondels (ben oui, il fallait torpiller la candidature Tarrisse) et la fille d'un ancien élu UMP des Yvelines. Bon sang ne saurait mentir...

   Pour soutenir sa candidate, comme souvent, J.C. Luche a mobilisé les maires et la presse locale :

Mur-de-B CPresse 09 03 2011.JPG

   Cet article a été publié dans Centre Presse le 9 mars dernier. A l'époque, il était censé illustrer le soutien sans faille dont bénéficiait la "candidate officielle". Avec le recul, il montre que, dernière la façade d'unité affichée, des craquements se faisaient sentir. Seuls trois des six maires étaient présents à cette réunion de propagande... ah pardon quatre, comme on prend bien soin de le préciser dans l'article. Mais pourquoi diable n'est-il pas sur la photo ? De plus, chez les présents, on ne remarque pas un enthousiasme délirant : regardez comme ils sont crispés ! Cela ressemble plus à une convocation chez le dirlo qu'à une réunion de potes autour d'un bon verre. Il se dit d'ailleurs (Le Nouvel Hebdo de cette semaine s'en fait l'écho)  que le sortant ne s'est pas démené en faveur de la "candidate officielle". Aurait-il soutenu discrètement quelqu'un d'autre ? Enfin, il faut signaler l'absence à la réunion des maires de Lacroix-Barrez et surtout de Mur-de-Barrez, le chef-lieu.

   Il s'avère que, dans le coin, on n'apprécie pas trop la méthode Luche... et des querelles de personnes viennent parasiter le joli scénario conçu par le président du Conseil général. On a donc vu surgir la candidature de Pierre Miquel, conseiller municipal de Brommat ("Une candidature d'importation !" tonnent certains) et celle de Joseph Chayrigues... maire de Mur-de-Barrez (depuis 1995), qui vient donc concurrencer sa propre adjointe ! Signalons qu'il avait tenté d'emporter le canton en 1998, mais qu'il n'avait terminé qu'en troisième place, à l'issue du premier tour. Et puis, je me dis, qu'au-delà des questions de personnes, certaines histoires locales pourraient permettre de comprendre des conflits en apparence inexplicables...

   Résultat du premier tour : Daniel Tarrisse est assez largement en tête... et n'affrontera pas la candidate de la "Majorité départementale" au second tour : Marie-Pierre Guimontheil n'arrive qu'en troisième position, mais devant "son" maire. On peut penser toutefois que, même sans la candidature Chayrigues, c'est Pierre Miquel qui serait arrivé deuxième. C'est l'adversaire le plus dangereux pour Daniel Tarrisse, parce qu'il est en tête dans quatre des six communes du canton, avec certes peu d'avance sur son rival du second tour. Murols a donné ses suffrages de préférence à Marie-Pierre Guimontheil, dont le suppléant était Roland Cazard, adjoint dans cette commune.  (Le devenir de ces voix est une des clés du scrutin). Thérondels a plébiscité Daniel Tarrisse : il y obtient environ 67 % des suffrages exprimés !

   La vraie question est : pour qui vont voter les électeurs de Joseph Chayrigues ? Celui-ci est arrivé en troisième position dans sa commune, ainsi qu'à Taussac et Lacroix-Barrez. Je vous laisse imaginer les sollicitations dont il a fait l'objet. Il y a répondu par voie de presse, dans le Bulletin d'Espalion du 25 mars :

Bulletin E. 25 03 2011.JPG

   Il ose dire tout haut ce que bon nombre de petits maires n'osent la plupart du temps révéler que tout bas, loin des regards indiscrets : la vie politique locale s'apparente parfois à un marécage nauséabond. Il a le courage de ses opinions et déclare ne pas choisir entre les deux candidats présents au second tour. Voilà qui peut servir les intérêts de Daniel Tarrisse.

   Finalement, cette élection très particulière est symbolique. Pour faire battre Daniel Tarrisse, Jean-Claude Luche, qui a partout clamé (contre l'évidence) que l'enjeu n'était que local, appelle au rassemblement de la droite contre la gauche... et soutient le moins aveyronnais des deux candidats !

 

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vendredi, 25 mars 2011 | Lien permanent | Commentaires (1)

Les Gamins

   Au départ, je m'étais dit : voilà le genre de comédie formatée, destinée à passer en première partie de soirée sur TF1, que je vais éviter d'aller voir. Malgré Chabat. Finalement, le bouche-à-oreille (favorable) et les extraits vus sur la Toile m'ont incité à tenter le coup.

   Cela fait presque un mois que le film est sorti et la salle était pourtant presque comble. La première partie est le début d'une comédie sentimentale, l'intrigue essayant de sortir (un peu) des sentiers battus. Cela marche : j'ai bien aimé les tourtereaux qui se vannent, leurs petits jeux d'amoureux et la scène de demande en mariage.

   La deuxième partie voit intervenir le père de la (future) mariée, incarné par un Alain Chabat au sommet de sa forme.

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   Il est très bon en vieux mari dépressif et bougon. Il est encore meilleur en quinqua qui fait sa crise et veut de nouveau kiffer la life. Je recommande les deux premières virées avec son futur gendre (Boublil, en général bon, bien que parfois trop "politiquement correct"). La première sortie voit d'abord les deux hommes s'énerver l'un contre l'autre, avant qu'ils ne deviennent les meilleurs amis du monde. A cette occasion, ils font la connaissance d'un dealer très spécial de sa race, un dénommé Abdelkader (Thomas Soliveres, un nom à retenir) qui a dû en surprendre plus d'un !

   J'ai toutefois un gros bémol à apporter à cet enthousiasme : la vision clinquante de la fête, qui passe visiblement par la fréquentation de la "haute" et les dépenses inconsidérées. C'est l'un des aspects démagos du film. C'est de surcroît un brin misogyne : Sandrine Kiberlain incarne une horrible bobo castratrice et sa fille, pour sérieuse qu'elle soit, passe l'essentiel de son temps à sourire ou pleurer.

   La suite nous met en contact avec le monde du show-biz, où naviguent nombre de parasites et de dégénérés. Là encore le film est ambigu, hésitant entre le portrait satirique et l'empathie. On retiendra l'insupportable chanteuse-enfant Mimi Zozo, interprétée avec conviction par Mélusine Mayance.

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   La fin voit tout ce beau monde renter dans le rang, avec quand même une séquence au domicile des parents qui se termine d'une manière digne de Mary à tout prix !

   Je pourrais m'arrêter là et m'en tenir à la "critique" cinématographique. Les scénaristes ont pourtant tenu à insérer de la politique dans l'histoire. A trois reprises, un personnage incarnant un dirigeant iranien est l'objet de moqueries assez faciles. La première fois, on le voit tenter de parler en français à ses interlocuteurs. On veut visiblement nous montrer qu'il est assez imbu de lui-même. La scène tombe à plat ; la salle rit peu, contrairement à ce qui se passe dans la deuxième séquence, qui met en scène Thomas (Max Boublil) traduisant à sa manière le discours de l'Iranien (qui s'exprime cette fois en farsi). Je reconnais que c'est assez tordant, bien qu'un peu trop appuyé (et limite invraisemblable).

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   Alors, pourquoi tant d'insistance ? Ce personnage est-il une caricature d'un dirigeant iranien réel ? Il ne me semble pas que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad se soit jamais vanté de pouvoir parler français. Ce pourrait être le négociateur du dossier nucléaire Saïd Jalili, réputé polyglotte. Précisons que, dans le film, la future épouse du héros travaille au gouvernement, sans doute au ministère des Affaires étrangères. Mais cette volonté de stigmatiser le dirigeant iranien cache peut-être autre chose.

   Il se trouve que l'équipe au pouvoir (en Iran) depuis 2005 s'est souvent "distinguée" par sa grande hostilité à l'Etat d'Israël. Or, les producteurs du film (Alain Goldman et Simon Istolainen) sont juifs (jusque là, rien à dire), le premier étant un ancien militant du Bétar et un fervent défenseur d'Israël. Quant au scénario, il a été coécrit par le réalisateur, Anthony Marciano et Max Boublil. Le premier est l'un des cofondateurs de MyMajorCompany, aux côtés de Simon Istolainen et de Michael Goldman (l'un des fils de Jean-Jacques). Il est possible qu'il ait été victime d'une agression antisémite, il y a une dizaine d'années de cela. Le second est fils d'un médecin juif d'origine tunisienne.

   Mine de rien, cette petite comédie a donc un arrière-plan communautaire. Le reste du casting renforce cette impression. On y croise bien sûr Alain Chabat (né en Algérie), mais aussi Arié Elmaleh (frère de Gad) et Patrick Bruel, dans une séquence-hommage de mauvais goût. Cela ne m'a pas empêché de profiter du film, exemple convaincant de bonne comédie à la française. Mais j'ai quand même éprouvé un petit malaise, dû à l'impression que l'humour servait à faire passer un message politique, presque à l'insu des spectateurs.

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samedi, 11 mai 2013 | Lien permanent

Les premiers légionnaires de 2016

   Le Journal Officiel a publié les décrets comportant les noms des nommés et promus, que l'on peut aussi trouver sur le site de la Grande Chancellerie. La presse (notamment Le Monde) s'est comme d'habitude amusée à faire le compte des politiques connus et des "pipoles" distingués par le pouvoir social-démocrate. Elle a aussi relevé la place réservée aux victimes des attentats du 7 janvier 2015 et aux sauveteurs des rescapés (ceux de l'attentat raté du Thalys ayant été décorés en août dernier).

   Les lecteurs aveyronnais des décrets remarqueront la présence de certains noms. Le premier qui saute aux yeux (dès la page 2 du décret principal) est celui de Chantal Jourdan, promue sur le contingent du Premier ministre Manuel Valls :

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   L'ex-préfète de l'Aveyron (de 2004 à 2007) n'est pas présentée à ce titre, mais comme ancienne directrice de cabinet d'un ancien président du Sénat. Il s'agit de Jean-Pierre Bel, naguère élu ariégeois qui, avant Chantal Jourdan, avait utilisé les services d'un autre haut-fonctionnaire passé par l'Aveyron : Pierre Besnard (ancien secrétaire général de la préfecture), qui lui était devenu chef de cabinet. (Celui-ci gère l'agenda de la personnalité à laquelle il est attaché ; c'est une sorte de secrétaire, alors que le directeur de cabinet est un petit Premier ministre, qui a autorité sur les autres membres du cabinet.)

   Coïncidence troublante, quelques pages plus loin, c'est Pierre-René Lemas, le prédécesseur de Chantal Jourdan auprès de Jean-Pierre Bel, qui apparaît, sur le contingent du ministère des Finances :

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   C'est en tant que directeur général de la Caisse des dépôts et consignations qu'il est distingué. Cependant, au vu de son pedigree, il est évident que François Hollande récompense un fidèle parmi les fidèles, qui fut, rappelons-le, secrétaire général de l'Elysée de 2012 à 2014.

   Indirectement, ces nominations confirment la proximité entre Jean-Pierre Bel et l'actuel président de la République. La seconde promotion est d'autant plus gênante que Pierre-René Lemas est en fonction, tout comme, par exemple, Sylvie Pierre-Brossolette, promue sur le contingent du Premier ministre :

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   A première vue, cette promotion pourrait apparaître comme un signe d'ouverture (à droite) : Sylvie Pierre-Brossolette est une ancienne journaliste à L'Express, passée ensuite au Figaro et au Point, dont elle a été rédactrice en chef. Mais elle est aussi la petite-fille du résistant Pierre Brossolette (panthéonisé par François Hollande en 2015) et, surtout, elle a été nommée au CSA en 2013, par le président de l'Assemblée nationale, l'ineffable Claude Bartolone (défait aux élections régionales de décembre dernier, en Ile-de-France).

   N'est-il pas inconvenant qu'un gouvernement distingue un membre d'une autorité supposée être indépendante, alors que ce membre est encore en fonction ? De mauvais esprits seraient tentés d'y voir une forme de connivence, voire de faire le lien avec la récente décision du CSA d'autoriser le passage à la TNT gratuite de la chaîne LCI. Rappelons que ledit CSA est présidé par Olivier Schrameck, grand serviteur de la République, certes, mais aussi ancien directeur de cabinet de Lionel Jospin (le mentor de François Hollande) pendant toute la période de cohabitation, de 1997 à 2002. Comme le hasard fait bien les choses, Lionel Jospin figure en tête des nouveaux promus : il obtient la dignité de grand'croix :

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   Mais revenons à nos moutons aveyronnais. L'ancienne préfète Chantal Jourdan n'est pas la seule à avoir été distinguée. On trouve dans la liste l'actuel occupant du poste, Louis Laugier. L'ancien militaire est nommé chevalier sur le contingent du ministère de l'Intérieur :

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   Un autre de ses prédécesseurs figure sur la liste : Anne-Marie Escoffier, préfète entre 1999 et 2001. Elle est promue officier, elle aussi sur le contingent du ministère de l'Intérieur. On se souvient d'elle parce que, par la suite, elle fut conseillère générale (du canton de Rignac), sénatrice de l'Aveyron et membre du second gouvernement Ayrault.

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   Si sa présence sur la liste des promus n'est pas une surprise, il est un autre nom que l'on s'étonne de retrouver, celui de l'un des actuels vice-présidents du Conseil départemental de l'Aveyron, Jean-François Galliard :

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   D'après vous, ce contempteur de la politique gouvernementale va-t-il pousser la cohérence idéologique jusqu'à refuser la breloque ? Les paris sont ouverts !

   Une autre personnalité de droite du Massif Central figure dans le décret, une certaine Eliane Wauquiez-Motte, maire de la commune du Chambon-sur-Lignon (en Haute-Loire) depuis 2008 (difficilement réélue en 2014) :

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   A ceux qui l'ignoreraient, j'apprendrai donc qu'il s'agit de la mère de Laurent Wauquiez. Elle n'est pas originaire du département (pas plus que son fils, né à Lyon et qui a fréquenté des établissements scolaires parisiens...), mais elle a jadis acheté une résidence secondaire pas très loin de là, en Ardèche. Touchée sur le tard par le virus de la politique, la maman n'accepte-t-elle pas en fait de jouer le rôle de marchepied pour son fils adoré, si doué... et si arriviste ? A travers elle, le gouvernement veut sans doute récompenser la maire qui a soutenu le projet de mémorial qui rend hommage à tout une région qui a sauvé des juifs pendant la Seconde guerre mondiale. (On notera toutefois qu'en 2013, le gouvernement n'avait envoyé qu'une ministre déléguée à l'inauguration.)

   Il est d'autres personnes que l'on aurait souhaité ne pas voir figurer sur la liste des nommés et promus. Que vient donc faire ici la communicante Anne Méaux ? Elle symbolise avec d'autres le règne d'une faune de parasites de la politique, qui contribuent à faire passer la forme avant le fond. Aujourd'hui promue officier sur le contingent du ministre de l'Economie (socialiste), elle avait été nommée chevalier en 2007, par Dominique de Villepin, alors Premier ministre de Jacques Chirac. Quoi d'étonnant pour cette proche de François Pinault, ami intime de celui qui était alors président de la République ?

   Quant à ceux qui croiraient encore aux propos du style "Mon véritable adversaire [...] c'est le monde de la finance", je leur conseille de lire la page 9 du décret principal. Ils y trouveront Xavier Rolet, qui n'est autre que le directeur de... la Bourse de Londres.

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   Croquignolesque est aussi la présence au tableau d'honneur d'une certaine Marie-Jeanne Caudron de Coqueréaumont, "sous directrice des privilèges et immunités diplomatiques et consulaires au ministère" [des Affaires étrangères] :

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   Mais c'est un autre décoré figurant sur le contingent du ministre des Affaires étrangères qui est pour moi la source du meilleur gag de la promotion : James Bond en personne !

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   Evidemment, il ne s'agit pas d'un agent des services secrets britanniques. (Encore que... en est-on sûr ?) Le James Bond en question est un financier du développement durable, activité bien plus honorable que l'assassinat ciblé sur commande.

   Je suis persuadé que François Hollande a signé ce décret avec un petit sourire aux lèvres...

   P.S.

   J'ajoute une note aveyronnaise, pour conclure. L'architecte montpelliérain Emmanuel Nebout est lui aussi nommé chevalier de la légion d'honneur (page 21 du décret). A Rodez, on lui doit la nouvelle salle des fêtes, le cinéma multiplexe (et le parking) ainsi que le réaménagement du jardin public du Foirail. Toutes ces réalisations sont d'ailleurs présentées sur le site professionnel de l'architecte, dans l'onglet "projets", aux années 2012, 2013 et 2014.

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vendredi, 01 janvier 2016 | Lien permanent

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