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lundi, 17 juin 2013

Poussée du FN à Villeneuve-sur-Lot ?

   Les médias se sont peut-être enflammés un peu vite quand ils ont obtenu les premiers résultats de l'élection législative partielle de la troisième circonscription du Lot-et-Garonne (celle de Villeneuve-sur-Lot).

   En pourcentage des suffrages exprimés, d'après le quotidien Sud-Ouest, le candidat du Front National Etienne Bousquet-Cassagne arrive clairement en deuxième position, avec un résultat de 26,04 %. Cela correspondrait à 11,38 % des inscrits... ce qui est peu. J'ai calculé que cela fait 8 554 voix. Comparons avec les scrutins précédents.

   En 2012, dans la même circonscription, le FN avait investi Catherine Martin. A l'issue du premier tour, celle-ci était arrivée en troisième position (avec 7 566 voix, représentant 15,71 % des exprimés mais seulement 9,90 % des inscrits). Elle avait été nettement devancée par Jérôme Cahuzac et Jean-Louis Costes, qui avaient recueilli respectivement 22 572 et 13 006 voix. Pour la partielle de 2013, la commerçante de Villeneuve-sur-Lot a été gentiment écartée, au profit du jeune homme dont nous allons parler. Visiblement, elle "a eu les boules", puisqu'elle a refusé d'en être la suppléante. (Ce rôle a échu à Géraldine Richard.) En guise de lot de consolation, elle devrait être tête de liste FN aux municipales de 2014, à Villeneuve-sur-Lot.

   Passons à présent au "bébé Marine". Il n'a pas le profil des "archéos" du FN. L'un des sites officiels du parti nous le présente comme un jeune "normal", plutôt marqué à droite certes, mais sans excès. On notera son passage par des établissements secondaires privés. Son nom n'est pas inconnu dans le département, puisque son père, Serge Bousquet-Cassagne, est l'un des piliers du syndicat agricole la Coordination rurale... et il vient d'être élu à la tête de la Chambre d'agriculture. Le choix du jeune Bousquet-Cassagne est donc tactiquement très réfléchi : l'étudiant a un profil moins clivant que Catherine Martin ; par son âge, il incarne le renouveau... tout en étant issu d'une famille connue dans les campagnes.

   Il s'est présenté à une élection pour la première fois en 2011, aux cantonales, à Tonneins (où il habite). Il souhaitait faire aussi bien qu'Eddy Marsan, candidat FN sur le même canton en 1998 (et qui fut l'époux de Catherine Martin). A l'issue du premier tour, celui-ci était arrivé deuxième, derrière le maire (socialiste) de Tonneins, avec 20,2 % des voix. Au second tour, il avait culminé à 38,05 % des suffrages. Dans le même temps, Catherine Martin livrait bataille à Villeneuve-Sud. Arrivée troisième, elle avait pu se maintenir au second tour, sans améliorer son score (environ 18 % des suffrages). Déjà à cette époque, Jérôme Cahuzac l'avait emporté, haut la main.

   En 2011, Etienne Bousquet-Cassagne n'est arrivé qu'en troisième position, avec tout de même 26,11 % des suffrages exprimés, mais moins de voix qu'Eddy Marsan 13 ans plus tôt (1 228 contre 1 293). Il lui a manqué 13 voix pour pouvoir se maintenir au second tour. Dans le même temps, Catherine Martin, à Villeneuve-Sud, se qualifiait pour le second tour (elle était en deuxième place à l'issue du premier), où elle était battue, mais en ayant recueilli près de 40 % des suffrages exprimés.

   Cela nous ramène aux législatives de 2012. Etienne Bousquet-Cassagne était bien candidat, pas dans la circonscription de Villeneuve-sur-Lot (échue à Catherine Martin, comme on l'a vu), mais dans celle de Marmande (la numéro 2, celle de Villeneuve étant la numéro 3), dont dépend le canton de Tonneins (entouré en marron) :

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   Le jeune candidat FN est arrivé en troisième position, recueillant 8 572 voix, correspondant à 17,93 % des suffrages exprimés... mais seulement 11,03 % des inscrits (il fallait atteindre les 12,5 % pour pouvoir se maintenir au second tour). Son aventure s'est donc arrêtée là.

   Quelles conclusions en tirer ? Tout d'abord que, sur la circonscription de Villeneuve-sur-Lot, le jeune Bousquet-Cassagne a fait mieux que la candidate traditionnelle du FN : environ 1 000 voix. Ensuite qu'il ne peut se maintenir au second tour que parce qu'il est arrivé en deuxième position et donc parce que l'électorat PS est resté à la maison. Rappelons que le candidat FN ne dépasse pas la barre des 12,5 % des inscrits. Qui plus est, en analysant l'historique des résultats du FN dans le Lot-et-Garonne, on se rend compte que les scores y étaient déjà élevés avant la promotion du jeune homme, qui ne progresse pas par rapport à sa précédente candidature aux législatives (certes, dans une autre circonscription). Enfin, on constatera qu'au FN comme dans les autres partis, il existe une tentation bureaucratique et un poids de la com', qui ont eu pour conséquence d'écarter une candidate bien implantée au profit d'un semi-parachuté (un voisin toutefois).

   C'est seulement si Etienne Bousquet-Cassagne parvient à augmenter significativement son score au second tour que l'on pourra parler de réussite pour le Front National. D'ici là, on peut se contenter de pointer l'immense désaveu qui touche le PS, dont le candidat recueille trois fois moins de voix que J. Cahuzac un an plus tôt. Cela ne profite pas pour autant à l'UMP, qui a présenté le même candidat qu'en 2012 (Jean-Louis Costes), qui perd lui plus du quart des voix obtenues un an plus tôt.

mercredi, 29 mai 2013

F. Hollande et les mouches ruthénoises

   La visite (très médiatisée localement) du président de la République à Rodez a donné lieu à une compétition acharnée entre les politiques locaux... pour apparaître sur les photographies aux côtés de François Hollande. Celui-ci devrait s'en réjouir car c'est le signe que, à gauche au moins, il n'est pas démonétisé.

   Le quotidien aveyronnais Centre Presse a très vite mis en ligne deux diaporamas consacrés aux deux visites principales du président. Le plus intéressant des deux est sans conteste celui qui est composé des photographies prises sur le chantier du musée Soulages.

   J'ai compté que sur les quinze photographies apparaissent au moins une fois 11 figures politiques locales... et celui dont la bobine est la plus présente n'est pas celui que l'on croit : il s'agit de Ludovic Mouly, le président de la Communauté d'agglomération du Grand Rodez, visible (totalement ou partiellement) sur 12 des 15 photographies ! Ce pro de la com' (récemment passé chez le coiffeur) remporte haut la main la compétition. Notons que sa présence s'explique car le musée Soulages est un projet communautaire et que, plus tôt dans la journée, le président ne se trouvait pas dans le chef-lieu, mais à Onet-le-Château, autre commune du Grand Rodez. Une question subsiste néanmoins : est-il un grand pote (ou un cousin éloigné) du photographe de Centre Presse ?

   Sur le podium des politiques, la médaille d'argent est décernée à la ministre et conseillère générale Anne-Marie Escoffier, visible huit fois, malgré sa petite taille... et très souvent juste à côté de François Hollande. Quel métier ! Son expérience est perceptible dans le choix de ses habits. La veste qu'elle porte, d'un bleu très particulier, se remarque dans n'importe quel coin de photo !

   A côté de ces deux renards, les autres font figure d'amateurs. Ancienneté et prestige oblige, on voit tout de même cinq fois le président du Conseil régional Martin Malvy. Juste après lui se trouve le maire de Rodez (et tout récent vice-président du même Conseil) Christian Teyssèdre, qui semble un peu faire la gueule. Se serait-il aventuré à demander une rallonge pour le musée Soulages et l'aurait-on éconduit ? Mystère.

   En cinquième position, ô surprise, ce n'est pas un local de l'étape que l'on rencontre, mais le maire de Millau, Guy Durand, dont le teint étrangement hâlé contraste fortement avec la pâleur de l'assistance. Ce n'est pourtant pas dans les rues de la cité du gant qu'il a pu attraper de coup de soleil ces dernières semaines !

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   Avec trois apparitions, il est ex-aequo avec le maire d'Onet-le-Château (et 2e vice-président du Grand Rodez), Fabrice Geniez, stratégiquement placé à côté de la maquette du site du Foirail, une position que l'on imagine conquise de haute lutte.

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   Ce duo devance d'une courte tête un quatuor hétéroclite. On entraperçoit Jean-Louis Chauzy, le président du conseil économique, social et environnement régional (un conseiller municipal d'opposition en très bons termes avec le maire de Rodez). Le Sud Aveyron est à nouveau présent à travers le sénateur-maire de Saint-Affrique, Alain Fauconnier, accessoirement grand connaisseur des arcanes du PS midi-pyrénéen. Dans ce groupe, la parité est respectée, avec la députée de Villefranche-de-Rouergue (et conseillère régionale) Marie-Lou Marcel et la maire de Sébazac-Concourès (3e vice-présidente du Grand Rodez) Florence Cayla. Toutes deux ont fourni des efforts méritoires pour ne pas laisser aux mâles le monopole de la représentation politique :

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   Sur cette photographie, elles ne sont pas les seules à tendre le cou. Entre F Cayla et A-M Escoffier, on distingue nettement Jean-Philippe Sadoul, le maire (divers droite) de Luc-Primaube et premier vice-président de la Communauté d'agglomération. Sans sa présence, l'hégémonie radicale-socialiste aurait été totale !

   Pour croiser les représentants locaux de l'opposition, il fallait se rendre, plus tôt, à l'usine Bosch. L'une des photographies du premier diaporama nous permet de repérer Jean-Claude Luche (le président du Conseil général) et Yves Censi (député UMP de Rodez).

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   Ils ont l'air un peu perdus dans cette ambiance ouvrièro-socialiste. Seraient-ils entrés par effraction ?

   Incidemment, lorsque j'ai visionné le diaporama en grand format, dans le coin en haut à droite, une mention est apparue. D'habitude, c'est tout ce qu'il y a de plus innocent, mais, vu le contexte, j'ai trouvé cela cocasse.
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   Mais... mais, voilà que je me rends compte que j'ai oublié quelqu'un. Et pour cause : on le distingue à peine, une fois, sur l'une des photographies du diaporama "muséal" :

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   Vous ne voyez pas de qui il s'agit ? Bon, allez, je vous aide : un grand gaillard, sportif, dont la coupe de cheveux est (secrètement) jalousée par le Dalaï-lama... Oui, c'est le sénateur Stéphane Mazars !

samedi, 25 mai 2013

Bienvenue chez les Frères !

   Ce vendredi soir, au théâtre La Baleine d'Onet-le-Château, s'est  tenue une conférence-débat sur la franc-maçonnerie, à l'occasion de la célébration du 250e anniversaire de la loge "la Parfaite-Union", fondée officiellement en juin 1762 à Rodez.

   La salle était copieusement garnie. Je dirais que peut-être 450 des 500 places étaient occupées. Même si l'on compte la soixantaine de francs-maçons locaux et leurs proches, cela veut dire que la majorité des spectateurs n'étaient pas membres de l'organisation. Certains même lui étaient sans doute hostiles.

   La soirée a commencé par un discours du maire d'Onet-le-Château, Fabrice Geniez. Fiches à la main, le premier magistrat municipal a lié son action politique au thème de la conférence, évoquant la devise républicaine (liberté égalité fraternité), qu'il il s'est félicité d'avoir fait inscrire au fronton de la mairie. Dans la dernière partie de son allocution, il a rappelé l'origine du nom du lieu et la symbolique de la baleine. Il a terminé par une évocation combative de la laïcité, tout en annonçant sa volonté de briguer à nouveau les suffrages des Castonétois : au cas où certains ne l'auraient pas encore compris, la campagne des municipales est lancée.

   Dans la salle, d'autres politiques étaient présents, notamment le conseiller général et conseiller municipal Jean-Louis Roussel, le conseiller régional et élu du Grand Rodez Guilhem Serieys, le conseiller municipal Serge Bories représentant Christian Teyssèdre. Ces figures de la gauche étaient accompagnées du député UMP Yves Censi, qu'on s'attendrait plutôt à rencontrer à une réunion de la Grande Loge de France ou de la Grande Loge Nationale Française, deux obédiences classées à droite, alors que la loge ruthénoise fait partie du Grand Orient de France, classé à gauche. D'ailleurs, au cours de la soirée, à plusieurs reprises, il a été question de l'engagement des maçons en faveur de la réduction des inégalités sociales. Cerise sur le gâteau, José Gulino, Grand maître du Grand Orient de France, présent à la conférence, a rappelé et justifié son soutien au "mariage pour tous"... contre lequel Yves Censi a manifesté.

   Coïncidence (?), à l'extérieur, un groupe de jeunes hommes (bien habillés, plutôt coupés court) distribuait des tracts contre la loi Taubira :

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   On notera la tentative de récupération de Marianne, symbole républicain, souvent représentée le sein dénudé, qui évoque pour moi davantage la liberté sexuelle que la stricte orthodoxie familiale telle que les religions monothéistes l'ont imposée en Occident. On peut aussi remarquer l'amalgame entre la loi Taubira (qui ne légalise que le mariage et l'adoption - qui, soit dit en passant, ne sera pas plus facile pour les couples homosexuels que pour les couples hétérosexuels) et deux mesures qui n'ont pas été adoptées : la procéation médicalement assistée et la gestation pour autrui. Un esprit mal intentionné serait tenté de croire que les auteurs de ce tract masquent leur opposition au mariage homosexuel derrière le refus de la PMA...

   Au verso, le propos se fait plus largement politique :

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   Une partie des Français qui auraient pu être tentés de défiler a déjà compris que certains organisateurs des manifestations ne cherchent pas vraiment à obtenir gain de cause sur ce sujet-là, l'affaire étant pliée depuis un petit moment. Il s'agit plutôt de capitaliser sur un sujet de société et sur la déception des électeurs vis-à-vis de François Hollande pour renforcer des partis politiques aujourd'hui (en partie) discrédités. Qui croira que c'est au seul gouvernement Ayrault que l'on doit la forte hausse du chômage et l'échec partiel du système scolaire français ? C'est à croire que dix ans de chiraco-sarkozysme n'ont fait que du bien à la France...

   Mais revenons à la conférence. Au discours de Fabrice Geniez a succédé un exposé d'environ une heure, faisant l'historique de la loge ruthénoise, de la monarchie absolue à la Ve République. Je n'ai malheureusement pas retenu le nom de l'intervenant, alors que sa communication était vraiment très intéressante, nourrie d'anecdotes et dite sur un ton vivant.

   L'orateur a commencé par évoquer les origines. En fait, ce n'est pas en 1762, mais dans les années 1740 que la loge aurait été fondée. Un texte de 1749 sous-entend que dès 1748 elle était constituée. Un autre évoque, en 1746, la loge ruthénoise comme une fille de celle d'Albi, née un an plus tôt. Pourtant, d'après un site maçonnique, quand elle a rejoint le Grand Orient de France (en 1789), c'est semble-t-il sous le patronnage de Montauban.

   Qui étaient ces premiers Aveyronnais francs-maçons ? Des cadets de famille, aux origines sociales aisées ou assez aisées. Certains francs-maçons aveyronnais se sont enthousiasmés pour les débuts de la Révolution (même s'il en existait de royalistes). Ils se sont divisés sous la Terreur, entre jacobins (comme François Chabot) et modérés (comme le chevalier de Panat).

   Sous Napoléon Bonaparte, l'organisation est passée sous la coupe des autorités. Les maçons ont perdu leur liberté, mais certains y ont gagné une jolie carrière. Ainsi, le premier préfet Sainthorent était membre de la confrérie. A la même époque, les quatre sous-préfets (trois d'après Jean-Michel Cosson, dans son Dictionnaire de l'Aveyron), le directeur des postes et les ingénieurs d'Etat nommés dans le département étaient tous francs-maçons !

   La loge ruthénoise n'a pas profité de la chute de l'empire. Les débuts de la Restauration (sous Louis XVIII) ont été marqués par une chasse aux révolutionnaires. A cette occasion, le conférencier a évoqué l'affaire Fualdès sous un jour méconnu, celui des rivalités francs-maçonnes. La victime était un notable de l'Empire, dont auraient cherché à se venger certains royalistes locaux, revenus au pouvoir en 1815. Signalons que, dès le départ, on a cherché à étouffer le crime : bien que le cadavre ait été retrouvé ligoté, il avait été demandé au policier menant l'enquête de classer l'affaire en suicide. Il a refusé et, peu de temps après, a été muté...

   Sous Louis-Philippe (1830-1848), la loge retrouve des couleurs. Mais c'est sous la IIe République (1848-1852) qu'elle semble s'épanouir. On n'est donc pas étonné d'apprendre que certains francs-maçons locaux ont été déportés par Louis-Napoléon Bonaparte, devenu Napoléon III après son coup d'Etat.

   Sous la IIIe République, la loge se porte bien. Rodez est une "ville rouge" (dirigée par un maire radical, Louis Lacombe, de 1886 à 1925) dans un département très conservateur, réputé être la "Bretagne du Midi". Le tempérament local semble d'ailleurs avoir grandement surpris les frères venus célébrer en Aveyron le 150e anniversaire de la fondation de la loge, en 1912. Le conférencier a lu plusieurs extraits de rapports écrits à cette occasion, l'un d'entre eux qualifiant même les Ruthénois d' "aborigènes" ! Dans le département, les polémiques s'observaient à travers les journaux, La Dépêche étant réputée être l'organe des francs-maçons, leur adversaire le plus irréductible étant L'Union Catholique. Les débats sur l'école publique et la séparation des Eglises et de l'Etat furent leurs terrains privilégiés d'affrontement.

   Les sources concernant cette période sont abondantes, parce qu'on ne cherchait pas à se dissimuler. D'après l'orateur, c'est la répression mise en oeuvre par le gouvernement de Vichy qui a poussé les maçons à développer la culture du secret qui est devenue par la suite leur marque de fabrique.

   Dès août 1940, les organisations maçonniques sont dissoutes et leurs biens confisqués. Les membres de la loge ruthénoise se font discrets, certains se repliant sur eux-mêmes. D'autres s'engagent dans la Résistance. Ils semblent cependant avoir évité la déportation... et aucun n'a été mis en cause pour faits de collaboration. Cependant, en 1945, lorsque la loge reprend ses activités, seules neuf personnes sont présentes. Il a fallu vingt ans pour reconstituer une équipe étoffée.

   A cet intéressant exposé a succédé le Grand maître du Grand Orient, qui a tenu à revenir sur certaines des idées reçues qui circulent au sujet des francs-maçons. Il a aussi évoqué l'origine mythique du mouvement, remontant au Moyen Age, à la construction des cathédrales. Mais l'essentiel de son intervention a été consacré aux travaux actuels de l'organisation, à sa méthode. Il s'est montré inquiet de la montée de l'intolérance, de l'extrémisme religieux et du retour de la violence politique en France. Deux anecdotes sont venues noircir le tableau, en fin de soirée.

   La première a été racontée par José Gulino. Il a révélé à l'assistance qu'un curé franc-maçon venait d'être révoqué par l'Eglise catholique, sans doute sur ordre du Vatican. Il n'a pas donné son nom ni la situation géographique de la cure. Sachez que cela s'est passé en Haute-Savoie. Une telle attitude rappelle les temps d'affrontement "musclé" entre l'Eglise et les Frères, sous la IIIe République. Est-elle l'annonce d'un durcissement doctrinal du clergé ? Je pense plutôt qu'elle témoigne de l'orientation prise par l'Eglise sous les deux précédents pontificats. Ainsi Benoît XVI, quand il n'était que le cardinal Josef Ratzinger, avait rappelé l'incompatibilité entre l'adhésion à la franc-maçonnerie et l'appartenance à la communauté catholique.

   La seconde anecdote a été racontée par le maire d'Onet, inaugurant la séance des interventions du public. Assistant à des obsèques hors du département, il a été choqué par les propos tenus par le curé, durant la messe. Celui-ci, faisant allusion aux temps troublés que nous vivons, aurait dénoncé l'action de "loups", présents jusque dans les plus hautes sphères de notre pays.

   D'autres spectateurs sont intervenus par la suite. L'un d'entre eux a bien fait rire la salle. Ce papy catholique, visiblement guère partisan de la franc-maçonnerie, s'est réjoui que la loi de séparation des Eglises et de l'Etat ait été votée en France. Grâce à elle, c'est à la puissance publique qu'incombe l'entretien de la grande majorité des bâtiments religieux. Sans cela, beaucoup seraient tombés en ruine. Le vieil homme malicieux s'est d'ailleurs réjoui que les francs-maçons participent à cette oeuvre, par leurs impôts !

   Pour être juste, il faudrait préciser que ce sont les communes qui ont en charge l'entretien des églises (construites avant 1905), les cathédrales relevant de l'Etat. On se doit d'ajouter que José Gulino a rappelé, à plusieurs reprises, son attachement  la liberté de culte et son respect pour toutes les convictions religieuses, pour peu qu'elles demeurent dans le cadre démocratique.

   Il reste la question que j'avais l'intention de poser, mais que j'ai préféré garder sous le coude, pensant que la réponse risquait de ne pas sortir d'une forme de "politiquement correct". Ma question aurait été : "Le cas de Jérôme Cahuzac est-il révélateur de l'attitude d'une partie des membres de votre organisation ?"

   Comment, vous ne saviez pas ? Pourtant, dès janvier dernier, la possible appartenance du ministre du budget avait été évoquée par la presse. Notons que Jérôme Cahuzac refusait de confirmer l'information, une attitude qui, on l'a découvert par la suite, est assez coutumière chez lui. Par contre, quand le scandale a occupé le devant de la scène, la référence franc-maçonne a été presque gommée. Le 6 avril, c'est par un minuscule entrefilet, en bas de page intérieure, que Le Monde informe ses lecteurs que Jérôme Cahuzac a été suspendu du Grand Orient de France (ce qui a sans doute permis à nombre d'entre eux d'apprendre qu'il en était membre) :

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   Voilà que je vieillis... je n'ai pas voulu "casser" l'ambiance conviviale de cette réunion, finalement fort instructive.

vendredi, 07 décembre 2012

J-C Luche et les conseillers départementaux

   Le ministre de l'Intérieur du gouvernement Ayrault, Manuel Valls, a présenté fin novembre un projet de loi relatif aux collectivités territoriales. Il y est question des départements. Hélas, il n'est pas prévu de diminuer le nombre de conseillers généraux. Ils sont 46 dans l'Aveyron et verraient leur nom changer : on les appellerait désormais "conseillers départementaux", ce qui n'est pas idiot, soit dit en passant.

   Concernant leur mode d'élection, le projet a l'habileté de concilier le mode de scrutin majoritaire (à deux tours) avec l'exigence d'une plus grande parité. Ainsi, dans l'Aveyron, les nouveaux conseillers départementaux seraient élus par "couple" (un homme et une femme), dans 23 circonscriptions. (Rappelons qu'à l'heure actuelle, les femmes ne représentent qu'environ 14 % des conseillers généraux français.) A première vue, l'idée semble devoir séduire à la fois les partisans d'un relatif statu quo (farouchement opposés à la réforme sarkozyenne qui voulaient créer des conseillers territoriaux) et ceux qui ne se satisfaisaient plus de l'ancienne situation, jugée pas adaptée à la France du XXIe siècle.

   On est donc à moitié surpris de l'opposition exprimée par le président du Conseil général de l'Aveyron, Jean-Claude Luche, par exemple dans le communiqué publié dans Le Villefranchois de cette semaine :

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   (Au passage, je recommande la lecture de ce numéro, riche en informations. On y  trouve notamment une réponse de Martin Malvy aux interrogations des Aveyronnais concernant l'absence d'élu de notre département au sein du nouvel exécutif régional.)

   Le diable va se nicher dans les détails. Deux aspects de la réforme font tiquer Jean-Claude Luche : le renforcement de la parité et le redécoupage cantonal... peut-être pour d'inavouables raisons. En effet, à l'heure actuelle, sauf erreur de ma part, le Conseil général compte 10 femmes pour 36 hommes, soit environ 22 %. La réforme proposée par le gouvernement conduirait donc au moins 13 de ces élus à abandonner leur siège en 2015. Adieu veaux, vaches, cochons ! Adieu belle indemnité et copieux gueuletons ! Comme les conseillers de sexe masculin sont un peu plus nombreux du côté de la majorité départementale que de l'opposition (21 contre 15, si je ne m'abuse), on imagine sans peine quel camp risque de se déchirer quand il va s'agir de former les "tickets" pour 2015. (De surcroît, à gauche, certains vétérans de sexe masculin sont susceptibles de ne pas se représenter, ce qui faciliterait la tâche des socialistes et de leurs alliés.)

   Mais c'est peut-être le redécoupage cantonal qui risque de mettre le feu aux poudres de la majorité départementale. On pense qu'il va s'effectuer sur une base démographique : des cantons peu peuplés pourraient être fusionnés. Il faut dire qu'ils sont très inégalement peuplés, de 894 habitants (pour Saint-Chély-d'Aubrac) à 23 678 pour Rodez-Ouest, d'après l'INSEE. Je veux bien qu'il faille assurer la représentation des territoires, mais un tel écart (de 1 à 26) est excessif !

   Quant à l'argument de la proximité, il fait sourire. Le découpage cantonal est pour l'essentiel un héritage de la première moitié du XIXe siècle, époque à laquelle l'automobile n'existait pas. La possession quasi généralisée d'un véhicule, couplée aux moyens de communication modernes (téléphone et internet), rend possible la création de territoires de proximité un peu plus vastes qu'il y a 150-200 ans.

   Je ne sais pas encore comment le gouvernement compte procéder, mais il y a fort à parier qu'en Aveyron, les cantons moins peuplés que la moyenne (6 000 habitants) soient regroupés. Or, que constate-t-on lorsque l'on s'intéresse à l'orientation politique des élus desdits cantons ? Ceci :

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   J'ai retouché la carte publiée en première page de Centre Presse le lundi 28 mars 2011. Le quotidien aveyronnais avait attribué une couleur à chaque canton en fonction de l'orientation politique de son élu : rose pour la gauche, bleue pour la droite. J'ai ajouté des points blancs sur le territoire des cantons peuplés de moins de 6 000 habitants.

   L'impression visuelle est nette : ce sont majoritairement des cantons "bleus" (tenus par la droite) qui sont peu peuplés et qui risquent donc d'être fusionnés avec l'un de leurs voisins (21, contre 8 à la gauche). J'ajoute que, parmi les cantons les plus proches de la barre des 6 000, on trouve ceux détenus par la gauche (Cassagnes-Bégonhès, Naucelle, Réquista et Rignac). Il y a donc fort à parier que, si le gouvernement choisit de placer la barre un peu plus bas, la quasi-totalité des cantons aveyronnais susceptibles de fusionner pourraient être ceux détenus par des proches de Jean-Claude Luche (lui-même inclus). Voilà sans doute la véritable raison du rejet de la réforme qu'il a exprimé.

lundi, 28 mai 2012

La guerre des affiches

   La campagne des législatives est bien lancée dans la première circonscription de l'Aveyron, où se présentent huit candidats :

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   Les panneaux d'affichage ruthénois se sont garnis de belles images en couleurs, collées, arrachées, puis recollées... Précisons qu'il existe deux types de panneaux : les officiels, avec un numéro attribué à chaque candidat, et les non officiels, dédiés à l'affichage libre, occasionnellement politique (les affiches politiques y sont d'ailleurs régulièrement et rapidement recouvertes par d'autres, annonçant qui un concert, qui un repas, qui une animation diverse...).

   En fin de semaine, en passant à proximité de la gare SNCF, j'ai machinalement jeté un coup d'oeil aux panneaux officiels... et j'ai été surpris par ce que j'y ai vu :

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   Et encore, la photographie ayant été prise samedi, après le passage de militants du Front de Gauche et du PS, une partie des "dégâts" avait été réparée. Mais l'on peut quand même constater que quelques membres de l'UMP auraient laissé libre cours à leur fougue militante... et recouvert tous les panneaux d'une affiche à la gloire du député sortant ce qui, d'après KaG (alias "Olivier le Jardinier"),  a quelque peu embarrassé son équipe.

   Ces fervents militants n'avaient apparemment pas été interloqués par le fait que les colleurs d'affiche du Front de Gauche, des Verts, du Parti Radical de Gauche et de Lutte Ouvrière s'étaient contentés d'un panneau numéroté pour leur propagande. On peut d'ailleurs en voir deux conséquences cocasses. Si vous regardez attentivement la photographie ci-dessus, vous verrez que de deux des affiches apposées frauduleusement dépasse une partie de l'originale, au point de provoquer une certaine confusion.

   Voici donc Yves Censi devenu un chantre de l'écologie :

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   Le plus drôle est que vendredi, tous les panneaux étant recouverts de la même affiche, le slogan "Votre voix pour une autre voie", prenait un sens tout particulier !

   Un peu plus loin, Yves Censi semble avoir complètement retourné sa veste :

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   Si les militants ne sont même pas capables de recouvrir correctement l'affiche du candidat du PRG, c'est à désespérer de tout !

   Plus loin, en se rapprochant de la gare SNCF, on rencontre un panneau d'affichage libre, d'où la propagande en faveur du député sortant a été rageusement arrachée... ou seulement recouverte, ce qui là encore peut donner naissance à une situation assez ubuesque :

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   La palme revient toutefois aux militants UMP. Figurez-vous qu'ils ne se sont pas contentés "d'arroser" les panneaux, officiels ou non. Ils se sont aussi permis de laisser une trace de leur passage  à certains endroits inattendus. Ainsi, lorsqu'on se trouve devant les panneaux susmentionnés, il suffit de se retourner pour voir, sur le trottoir d'en face, ceci :

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   Faut-il en conclure que le député sortant (en place depuis 10 ans) est à ranger au rayon des vieilleries ? En tout cas, cet affichage sauvage n'a pas laissé indifférent un-e passant-e (que je soupçonne d'être venu-e coller une affiche pour un-e autre candidat-e), qui a griffonné un message :

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dimanche, 27 mai 2012

La Turquie veut l'Union européenne

   Je ne pensais pas que la consommation d'un kébab me mènerait à discuter de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. (J'en suis plutôt à essayer de gérer l'une de mes contradictions : je suis contre la viande halal... mais je m'offre, de temps à autre, le plaisir de manger un kébab... qui a de très fortes chances d'être à base de viande abattue rituellement !)

   Cette semaine, donc, au moment de régler ma commande dans un restaurant ruthénois, j'aperçus, sur le comptoir, un drôle de dépliant, rédigé en français, mêlant les drapeaux européen et turc : "La Turquie, une clé pour l'avenir de l'Europe". Il émane du Bureau du Premier ministre turc.

   La première page est illustrée par une photographie prise en décembre 2004, au Parlement européen :

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   On reconnaît sans peine Daniel Cohn-Bendit (à droite)... et Harlem Désir, à gauche (il tient une pancarte où le mot "OUI" est écrit en turc), député européen depuis 1999 et numéro 2 du PS. Soutient-il toujours l'adhésion de la Turquie aujourd'hui ? Voilà une question qui pourrait être posée à celui qui prétend prendre les rênes du premier parti de France.

   Tournons la page et commençons la lecture. Les auteurs affirment que c'est dès 1959 (soit à peine deux ans après la signature du traité de Rome, fondateur de la CEE) que la Turquie a posé clairement sa candidature. Ce n'est pas ce qui ressort de la lecture des documents communautaires, notamment de celui qui a été publié en juin 2011, et qui est consacré à l'élargissement de l'UE. Voici ce qu'on peut y lire page 5 :

"La Turquie est liée à la Communauté (CEE) par un accord d'association depuis 1963.
Elle a posé sa candidature à l'adhésion en 1987. Une union douanière a été établie
en 1995. Le Conseil européen d'Helsinki de 1999 a accordé à la Turquie le statut de
pays candidat."

   Le document a néanmoins raison quand il affirme que c'est à l'unanimité que la candidature turque a été acceptée, en 1999 : le Conseil européen se prononce sur ce type de sujet à l'unanimité. Ce sera encore le cas si la question de l'adhésion effective se pose.

   On passe ensuite à des questions économiques. La Turquie est présentée comme la 16e économie mondiale et la 6e d'Europe. D'après la Banque mondiale, en 2010, le PIB de la Turquie était le 17e mondial. Six pays européens (sept, si l'on compte la Russie... mais n'exagérons pas, hein) sont classés devant : Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Espagne et Pays-Bas. Si l'on divise par la population, on obtient un tout autre classement, la Turquie se retrouvant 93e, avec un total trois fois plus faible que celui du Danemark. Si le pays est bien un producteur de richesses (il est considéré comme un "pays émergent" - et pas "émergeant", comme écrit dans le document), le niveau de vie de la majorité de ses habitants est assez faible. En masquant ces éléments, on cherche donc à rassurer le lecteur français.

   La même démarche est à l'oeuvre dans les paragraphes suivants. On cite la (relative) faible part du secteur agricole dans le PIB (10 %... mais en France c'est 2,5 %) et le poids du commerce et des services... mais on laisse de côté la répartition de la population active, dont le tiers environ travaille dans le secteur agricole. Voilà qui compliquerait encore plus la gestion de la PAC, en cas d'adhésion.

   On peut aussi contester l'affirmation que l'entrée de la Turquie "augmenterait les dimensions du marché intérieur européen, ainsi que la compétitivité globale de l'UE". Comme une union douanière existe déjà entre l'UE et la Turquie, l'adhésion de celle-ci ne jouerait que marginalement sur le développement du commerce. Par contre, elle pourrait rendre plus faciles les délocalisations, dont ont déjà bénéficié les pays d'Europe de l'Est depuis 2004.

   La page suivante s'ouvre sur une autre photographie, mettant en scène le Premier ministre Erdogan et le commissaire européen en charge de l'élargissement (et de la politique de voisinage), le Tchèque Stefan Füle.

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   L'accent est mis sur le caractère occidental de la Turquie, présentée comme une "démocratie laïque", une affirmation à nuancer. (Je conseille aussi une passionnante intervention de Jean-François Bayart sur France Culture, en février 2011.)

   Mensongère aussi est l'affirmation que l'adhésion turque faciliterait la lutte contre l'immigration clandestine. A l'heure actuelle, la Turquie, loin d'être un obstacle, est la principale porte d'entrée dans l'Union :

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   On rirait presque à la lecture des paragraphes faisant l'éloge du pays multiculturel... où il vaut mieux être un Turc musulman sunnite. Bien entendu, rien n'est dit du génocide arménien, ni des revendications kurdes.

   Plus intéressante est la partie consacrée au rôle stratégique du pays dans l'approvisionnement des membres de l'Union en hydrocarbures. Elle est illustrée par une carte :

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   Si elle a l'avantage de présenter une vue large du problème, elle laisse de côté le concurrent russe (à peine évoqué dans le texte d'accompagnement) et mélange l'existant et le projet : les Européens aimeraient diminuer leur dépendance à l'égard du gaz russe grâce au projet Nabucco :

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   Ce projet est à mon avis vital pour l'UE, dont les dirigeants n'ont pas suffisamment compris le danger que représenterait une position hégémonique de la Russie dans nos approvisionnements énergétiques. Mais, a-t-on besoin d'aller jusqu'à l'adhésion de la Turquie pour le mener à bien ? Non.

   La brochure se termine par le rappel du poids démographique de la Turquie... un peu sous-estimé pour le coup : 72 millions d'habitants, contre près de 75 millions selon l'INED. Ce n'est pas dit dans le document, mais ce poids démographique donnerait à la Turquie, en cas d'adhésion, la même place que l'Allemagne dans les institutions européennes. Le texte se contente de faire allusion à la jeunesse de la population, à la force de travail, véritable aubaine pour les entreprises en quête de délocalisation de proximité...

Le PS et les gonzesses

   La presse se savoure souvent davantage avec le recul. On ne le prend pas suffisamment. Cela m'est arrivé involontairement aujourd'hui, en triant des journaux à jeter. Je suis tombé sur un article du Monde du 5 mai dernier, intitulé "Ces femmes qui pourraient être ministres si François Hollande est élu". La version papier de l'article est illustrée par une photographie de groupe :

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   Tout l'intérêt, trois semaines plus tard, est de voir si les prévisions du journaliste se sont vérifiées. Force est de constater que plusieurs des femmes présentes ici sont entrées dans le premier gouvernement Ayrault :

- Marisol Touraine (habillée de rouge, presque au centre de l'image)

- Aurélie Filippetti (assise en haut, à droite, contre la fenêtre)

- Najat Vallaud-Belkacem (debout au fond, derrière M. Touraine)

- George Pau-Langevin (la première debout, à gauche)

- Delphine Batho (assise derrière la table ronde, avec l'écharpe blanche)

- Fleur Pellerin (debout à côté de N. Vallaud-Belkacem)

   Ajoutons à cet aréopage Valérie Fourneyron, qui ne figure pas sur la photographie, mais était, d'après l'article, pressentie pour le portefeuille des Sports.

   Les autres n'ont pas été retenues :

- Laurianne Deniaud (au premier rang , à gauche)

- Laurence Dumont (sans doute debout derrière elle, à côté de G. Pau-Langevin)

- Charlotte Brun (assise derrière, à côté de D. Baltho)

- Safia Otokoré (deuxième assise en partant de la droite)

- Marie-Hélène Aubert ? (assise à l'extrême-droite)

   Sur les onze (et même douze) femmes, seules deux ne figuraient pas sur l'organigramme de l'équipe de campagne du candidat Hollande (L. Dumont et C. Brun, qui font toutefois partie de l'équipe des secrétaires nationaux du PS).

   On remarque cependant que la présence sur cet organigramme n'explique pas la nomination au gouvernement, puisque plusieurs ministres femmes n'y figurent pas :

- Cécile Duflot (ce qui est logique, puisqu'elle soutenait Eva Joly)

- Nicole Bricq (une des bonnes surprises de cette équipe)

- Geneviève Fioraso

- Michèle Delaunay

- Dominique Bertinotti

- Yamina Benguigui (une contrepublicité vivante pour la chirurgie esthétique)

   Mais cela ne représente que 6 des 17 ministres. Donc, 65 % des ministres femmes figuraient sur l'organigramme. Chez les hommes, rares aussi sont les ministres qui en étaient absents. Il s'agit de :

- Laurent Fabius

- Arnaud Montebourg

- Pascal Canfin (connais pô çui-là)

- Frédéric Cuvillier

   ... soit 4 sur 18 (en incluant le Premier ministre). Donc 78 % des ministres hommes figuraient sur l'organigramme de campagne.

   On peut en conclure que François Hollande et Jean-Marc Ayrault sont allés davantage "taper" à l'extérieur du premier cercle pour composer la partie féminine du gouvernement. Et pourtant, environ 50 % des femmes qui figuraient sur l'organigramme de campagne n'ont pas été nommées.

   Cela nous ramène à l'article du Monde, qui n'a pas toujours vu juste. Les journalistes avaient fini par comprendre que le futur président n'allait pas nommer Premier ministre son ancienne rivale (de surcroît bien implantée dans l'appareil du PS), mais ils l'imaginaient quand même à la tête d'un grand portefeuille...

   Parmi les autres favorites du journal, on distingue deux élues de grandes villes (Adeline Hazan à Reims et Anne Hidalgo à Paris), à qui on assigne sans doute un destin plutôt municipal. L'autre catégorie des recalées est composée d'anciennes ministres de Lionel Jospin, Elisabeth Guigou et Catherine Trautmann. Hollande a poussé le soin jusqu'à renouveler les figures féminines. On lui en sait gré...

mardi, 24 avril 2012

Flanby strikes back !

   Le candidat du Parti socialiste a été souvent moqué durant cette campagne électorale. Qualifié de "mou", de "fade" voire de "capitaine de pédalo", il a même fini par être associé à un dessert peu glorifiant. Voilà que le résultat du premier tour donne lieu à un retournement de sens. De péjorative, la référence au "Flanby" devient valorisante, au second degré. C'est la revanche du Mou !

   On partait de loin. Fin 2011, non sans talent, un blogueur gauchisant greffait une tête de François Hollande (non amaigri) sur un corps "flanbesque", plutôt pour suggérer le pathétique du personnage :

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   Six mois plus tard, la même image peut se lire comme un surgissement victorieux inattendu... et plutôt sympathique. Cela n'a sans doute pas vaincu les réticences de ceux qui se voyaient mal glisser un bulletin "François Hollande" dans l'urne. Encore fallait-il parvenir à réaliser ladite opération :

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   Alors, pas assez mou pour rentrer dans une enveloppe... mais trop pour faire prise à une persécution vaudoue ? Les avis divergent sur la Toile (et, comme tous les fans de Desproges le savent, "dix verges, ça fait beaucoup") :

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   Du coup, on est moins étonné de voir Sondron dessiner le dessert en question remporter une course aussi importante :

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   A l'extrême-gauche (!) de la caricature sont disposés deux éléments de l'anatomie du troisième de la course : une jambe féminine et un groin, allusion peu délicate à Marine Le Pen, bien entendu.

   De vainqueur, Flanby devient même source d'humiliation pour son concurrent direct :

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   Notons que l'internaute s'appuie ici sur une caractéristique importante du désormais célèbre dessert. Il manque toutefois une référence à la languette. Ajoutons que le perdant est mauvais joueur. S'il est devancé, c'est forcément que les gens ont mal compris ou voté pour de mauvaises raisons. Il y a aussi l'idée que Nicolas Sarkozy ne supporte pas d'être mis en difficulté par quelqu'un qu'il méprise.

   Du coup, Flanby jubile, tantôt discrètement...

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   ... tantôt plus ostensiblement :

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   Devrait-on désormais écrire "Flamby" le flambeur, nouveau candidat rayonnant ? Le paradoxe est que ces deux dernières représentations, qui pourraient rendre compte fidèlement de l'humeur du candidat arrivé en tête du premier tour de la présidentielle, datent des primaires socialistes. Faut-il en conclure que Nicolas Sarkozy et l'UMP ont, tout comme ses camarades socialistes, sous-estimé le potentiel du Corrézien d'adoption ?

   Mais le symbole le plus réussi est à mon avis le détournement du poing à la rose, devenu "poing au Flanby", dans un geste aussi culinaire que révolté :

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   Ici encore, à l'origine de l'image se trouve un blogueur (de gauche... décidément) très critique vis-à-vis du supposé manque de fermeté des convictions de François Hollande. Aujourd'hui, après le premier tour de la présidentielle, ce symbole peut être retourné en faveur du candidat rassembleur, qui a su passer outre le mépris de certains bien-pensants de son propre camp.

samedi, 21 avril 2012

L'affiche de François Hollande

   Celle de Nicolas Sarkozy a suscité beaucoup de sarcasmes... et de détournements. Celle de son adversaire social-démocrate, si elle se prête moins à ce genre de plaisanterie, est par contre plus riche de sens.

Hollande 2012.jpg

   Je me retrouve en partie dans les analyses publiées dans un article de L'Express et le billet d'un blog consacré à l'image.

   On a très vite tracé un parallèle avec l'affiche de 1981 de François Mitterrand (la photographie prise dans la Nièvre ayant été légèrement retouchée) :

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   C'est le paysage rural, situé à l'arrière-plan, qui a incité les commentateurs à faire le rapprochement. On note toutefois l'absence du clocher sur celle prise en Corrèze pour François Hollande. D'autres différences apparaissent. Le candidat de 1981 se positionne clairement à gauche, alors que celui de 2012 est en position centrale (-iste ?). De plus, si Mitterrand regarde vers la gauche de l'affiche, Hollande fixe les passants du regard.

   Il est tout de même sidérant qu'aucun des candidats (à part peut-être Jacques Cheminade) ne fasse figurer un paysage urbain sur son affiche de campagne, alors que 80 % de la population française vit en ville !

   Mais revenons à celle de François Hollande. Son positionnement centriste se trouve confirmé par l'absence de rose et de rouge, le bleu étant la couleur dominante (habituellement monopolisée par la droite). On aurait pu s'attendre à une cravate rosée. C'est la continuation de ce qui était déjà apparu au cours des primaires socialistes.

   Une analyse plus serrée de l'image permet de tirer d'autres conclusions :

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   Commençons par l'arrière-plan. La tête du candidat se dégage bien, dans le ciel... et même au-dessus des nuages, histoire sans doute d'éviter les plaisanteries faciles. Le buste se trouve au niveau du paysage rural. On présume que les pieds sont solidement posés sur le sol. Le message est clair : le candidat est au contact de la "vraie vie", mais il est aussi capable d'évoluer dans les "hautes sphères".

   Je note que, malgré ses 57 ans et demi, François Hollande ne semble pas avoir de cheveux gris, à l'exception de la tempe droite. Hum...  Les lunettes font "moderne". Il apparaît là encore que l'on veut rassurer les électeurs : ce personnage ancré dans la tradition est censé permettre à la France de se moderniser dans la douceur.

   Il reste ce sourire énigmatique, à peine esquissé, que certains observateurs ont rapproché de celui de la Joconde. Encore faut-il recadrer les images de manière à pouvoir les comparer :

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   Outre le sourire, il y a le paysage rural indéfini en arrière-plan et cette espèce "d'enfumage" (sfumato), le flou artistique qui ne permet pas de bien distinguer les contours. Par contre, les deux visages (tout comme les regards) ne sont pas orientés de manière identique.

   Finalement, je me demande si les socialistes n'auraient pas pu utiliser un autre fond pour l'affiche...

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samedi, 03 décembre 2011

Législatives 2012 en Aveyron : la gauche a-t-elle enclenché la machine à perdre ?

   Les forces de gauche s'y sont prises à l'avance : 6 mois avant la tenue des législatives (qui s'annoncent serrées), les principaux candidats sont déjà connus. On pourrait en conclure que l'opposition semble enfin faire preuve de professionnalisme, qu'elle a compris qu'une partie de la population attend qu'on lui propose une alternative crédible à la politique actuelle... ben pas forcément, en fait.

   C'est dans la première circonscription (dont le titulaire est l'UMP Yves Censi, que l'on commence à revoir dans le département depuis quelques semaines...) que les têtes d'affiche semblaient se bousculer. A droite, il est évident que le sortant va se représenter. Il reste à savoir si d'autres sensibilités du centre et de la droite vont avoir un porte-parole dans ce scrutin. A l'heure actuelle, il est impossible d'être afffirmatif.

   A gauche, deux rumeurs circulaient : la première évoquait l'attribution de la circonscription à un-e candidat-e PRG ; la seconde émettait l'hypothèse d'une candidature féminine pour le PS, comme ce fut le cas en 2002, avec Anne-Marie Cluzel, dont le résultat ne fut pas déshonorant. (Depuis, la dame semble s'être éloignée de la vie politique, peut-être pour des raisons personnelles.) L'incertitude augmentait en même temps que le nombre de prétendants issus du PS (visiblement pas décidés à laisser le PRG tenter seul l'exploit d'enlever le siège au fiston de l'ancien maire de Rodez) : aux Speedy Gonzalez Patrick Palisson et Jean-Louis Stadler se sont ajoutés Ludovic Mouly, Monique Bultel-Herment, Matthieu Lebrun... et même l'adjoint au maire de Rodez Maurice Barthélémy, selon Le Nouvel Hebdo de la semaine dernière.

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   Les adhérents du PS viennent de trancher : ce sera Mme Bultel-Herment, qui est passée devant Ludovic Mouly à la faveur du second tour. On s'est beaucoup réjoui, à droite et à gauche, de la féminisation des candidatures... mouais. Moi je vois surtout cela comme la confirmation que le PS a fait une croix sur la première circonscription (comme sur la troisième). Mme Bultel-Herment est trop identifiée à l'équipe municipale ruthénoise, pour le meilleur comme pour le moins bon. Ce n'est donc pas une candidature susceptible de faire le plein sur le Piton. Je ne vous parle même pas du Nord Aveyron...

   Yves Censi peut-il dormir sur ses deux oreilles et sa barbe mal taillée ? Pas sûr... Après tout, rien ne dit que la candidate socialiste sera présente au second tour. Cela va dépendre de la tournure que prendra la campagne de son camarade de Conseil municipal Stéphane Mazars, s'il se confirme qu'il portera les couleurs du PRG. En voilà un qui pourrait créer la surprise.

   Il faudra toutefois qu'il se sorte du marigot de la gauche, puisqu'à ces deux postulants, il faut ajouter Guilhem Serieys pour le Front de Gauche et Bruno Bérardi pour Europe-Ecologie/Les Verts. Et ce n'est pas fini...

   Dans la deuxième circonscription, le PRG, pourtant présent dans la zone, la joue confraternel et laisse la sortante Marie-Lou Marcel défendre les couleurs de la gauche modérée. Mais, contre elle, au premier tour, il y aura sans doute un candidat écolo (Jean-Louis Calmettes apparemment) et un du Front de Gauche. En cas de réélection de Nicolas Sarkozy et de présence d'un-e candidat-e UMP particulièrement pugnace, la partie pourrait être risquée pour la députée (élue de justesse en 2007) que l'on annonce un peu vite comme assurée d'être reconduite.

   Dans la troisième circonscription (celle de Millau), on sait enfin qui va incarner l'alliance PS-PRG-Europe-Ecologie/Les Verts : Marie-Thérèse Foulquier, maire de Saint-Jean-et-Saint-Paul (un village situé dans le canton de Cornus) :

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   J'ai déjà dit ce que je pensais de l'attribution (par la gauche) de la circonscription à une candidature EELV. Je ne connaissais pas le nom de la personne choisie. Il me semble l'avoir déjà croisée, notamment lors de la projection du film Les Brebis font de la résistance, au cinéma "Les Lumières de la ville", à Millau, en 2009. Après la séance, la réalisatrice avait répondu aux questions des spectateurs présents dans la salle. Plusieurs d'entre eux avaient apporté un témoignage sur ce qu'ils avaient vécu à l'époque de la lutte contre l'extension du camp militaire de La Cavalerie (bien restituée dans le récent documentaire Tous au Larzac). Je me demande si elle-même n'était pas intervenue. (Mais je la confonds peut-être avec quelqu'un d'autre.)

   Quoi qu'il en soit, la campagne sera difficile pour cette dame. En l'état actuel des choses, sans la victoire du candidat socialiste à la présidentielle, je ne vois pas comment Alain Marc pourrait être déboulonné.

dimanche, 23 octobre 2011

Vers des législatives serrées en 2012 ?

   Dans son édition datée du mercredi 19 octobre, Le Monde a commenté les résultats d'une étude réalisée par l'Observatoire de la vie politique et parlementaire (que l'on peut retrouver aussi sur le site vielocale-viepublique). Cet article est illustré par une carte des circonscriptions, avec leur possible orientation. En voici la version papier (région parisienne et outre-mer exclus) :

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   Cela a dû demander un gros travail d'analyse. La méthodologie n'est toutefois pas parfaite parce que, même si l'on a croisé les résultats des dernières élections locales et nationales, on n'a pas tenu compte du résultat des municipales dans les communes peuplées de moins de 3 500 habitants. Alors, même si les choix de ces électeurs sont pris en compte dans les autres scrutins, on peut légitimement penser que le vote rural a été légèrement sous-évalué.

   Au fait, pourquoi cette étude, si tôt ? Parce que la nouvelle carte des circonscriptions est désormais connue. Le 24 février 2010 est paru au Journal officiel le texte de la loi fixant la délimitation de ces circonscriptions, ratifiant l'ordonnance du 29 juillet 2009. Et, en avril 2011, est paru le texte de la loi ratifiant le mode d'élection des députés des Français de l'étranger.

   L'Aveyron n'est pas touché par ces modifications. Mais, en gros, à partir d'avril dernier, les observateurs de la vie politique française ont pu commencer à faire tourner les machines...

   Intéressons-nous à présent aux résultats projetés. En général, je me méfie beaucoup de ce genre de démarche. La réalité du terrain contredit souvent le travail de bureau dans ce domaine... et les électeurs sont parfois imprévisibles. Et puis tant de choses peuvent changer d'ici mai 2012 !

   En gros, quel que soit le vainqueur du scrutin présidentiel, l'étude prévoit une poussée de la gauche aux législatives, ce qui fait dire aux journalistes que l'on pourrait se retrouver face à une cohabitation, avec un président de droite (si Nicolas Sarkozy est réélu) et une majorité parlementaire de gauche, ou bien avec un président de gauche (si François Hollande est élu) face à une majorité de centre-droit au Palais Bourbon (si le PS et ses alliés ne parviennent pas à remporter suffisamment de sièges aux législatives qui suivront la présidentielle).

   Qu'en est-il à propos de l'Aveyron ? Zoomons sur la carte :

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   Les situations s'annoncent très contrastées dans les trois circonscriptions. Sans surprise, l'étude voit la première (qui va de Rodez au Carladez et à l'Aubrac) rester ancrée à droite. On imagine sans peine que le sortant Yves Censi aura le vent en poupe si Nicolas Sarkozy est reconduit. Sa réélection pourrait s'avérer plus délicate si François Hollande l'emporte et, à mon avis, s'il prend l'envie à un-e candidat-e centriste crédible de tenter sa chance, une partie de l'électorat nord-aveyronnais étant orpheline de la démocratie-chrétienne.

   Du côté de la gauche, le panier de crabes des candidatures ne fait pas bonne impression. On peut voir cela comme un signe de vitalité démocratique, mais aussi comme une nouvelle illustration de la "course à l'échalote". J'y ajoute cette réflexion : certaines candidatures ne me paraissent pas crédibles. N'y voyez pas du mépris vis-à-vis des personnes qui se sont manifestées, mais un constat effectué à partir des résultats des dernières élections cantonales, où deux des socialistes ont essuyé une cuisante défaite : Patrick Palisson à Estaing (où il a recueilli moins de 13 % des suffrages exprimés au premier tour) et Jean-Louis Stadler (qui a légèrement dépassé les 17 % à Saint-Amans-des-Côts). Même si cette élection était très locale, il n'est pas stratégique de désigner comme candidat aux législatives quelqu'un qui a pris une telle veste deux ans auparavant. A Rodez même, certains croient dans les chances de Ludovic Mouly, le président (temporaire ?) de la Communauté d'agglomération. En cas de victoire de F. Hollande, peut-être, à la rigueur. D'autres misent sur une femme, ruthénoise adjointe au maire... Monique Bultel-Herment pour ne pas la nommer. Sur l'agglomération, elle pourrait rallier une majorité, mais je pense que dans le reste de la circonscription elle suciterait plutôt le rejet. Pour que la gauche gagne, il lui faudrait un-e candidat-e qui ait à la fois des attaches sur le Grand Rodez et le Nord Aveyron, quelqu'un de relativement neuf en politique et qui incarne une gauche moderne. Mais peut-être que le P.S. n'a pas envie de faire chuter Yves Censi...

   A l'opposé, la circonscription de Villefranche-de-Rouergue est donnée comme acquise à la gauche. En cas de victoire de F. Hollande, on peut penser que la réélection de Marie-Lou Marcel (ex-soutien de Martine Aubry à la primaire) sera favorisée. En cas de second mandat de Nicolas Sarkozy, rien ne sera joué. Certes, son principal adversaire de droite dans la circonscription, Serge Roques, ne semble pas avoir le vent en poupe, mais il a déjà prouvé qu'il avait de la ressource et, sans lui, les dirigeants locaux de l'UMP doivent pouvoir trouver un jeune loup de la droite, bien implanté localement, qui saura jouer sa carte à fond.

   La circonscription qui paraît être la moins solidement arrimée à un camp est celle de Millau. L'étude la classe dans la catégorie de celles qui seraient gagnables par la gauche. Pourtant, en 2007, l'UMP (radical) Alain Marc a été facilement élu : au premier tour, il lui avait manqué moins de 300 voix (selon mes calculs) et au second, il a largement distancé sa rivale socialiste, une parachutée de prestige qui ne faisait pas l'unanimité dans son propre camp. En face, l'UMP l'avait jouée fine, en remplaçant le sortant, le vieux routier Jacques Godfrain, par son suppléant, plus modéré, plus "terroir". La tactique fut payante. Mais en 2012 ? Peut-être faut-il comprendre la récente parution, dans Le Saint-Affricain, d'un reportage à la gloire d'Alain Marc comme le premier jalon de la campagne électorale.

  

samedi, 17 septembre 2011

On reparle de Paul Ramadier (1888-1961)

   Il est mort voilà bientôt 50 ans. Il joua un rôle important au plan national et aussi dans l'Aveyron, où il occupa des fonctions électorales variées durant sa longue carrière politique.

   Le Nouvel Hebdo de cette semaine publie une tribune de Maurice Barthélémy, quatrième adjoint au maire de Rodez :

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   Il faut dire qu'à l'approche de l'élection présidentielle, les socialistes pourraient s'inspirer de ce grand ancêtre, authentique homme de gauche, antitotalitaire (il n'avait pas que des amis chez les communistes...) et d'une grande probité. Il a appartenu à plusieurs gouvernements du Front populaire. Il est surtout connu comme l'un des 80 parlementaires à avoir voté contre l'octroi des pleins pouvoirs à Philippe Pétain, le 10 juillet 1940.

   Durant la guerre, il a appartenu à la Résistance et contribué (avec son épouse Marguerite) à sauver des juifs, ce qui lui a valu, bien plus tard, d'être reconnu "Juste parmi les Nations". Son nom (parmi des milliers d'autres) est ainsi honoré à Yad Vashem.

   Après guerre, il est devenu le premier président du Conseil de la IVe République et a rompu l'alliance nouée en 1944-1945 avec le Parti communiste. Une dizaine d'années plus tard, ministre des Affaires économiques et sociales, il fut à l'origine de la création de la vignette automobile, dans un but louable au départ :

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   Mais la presse locale n'est pas la seule à faire écho à cet auguste politique. Cette semaine, son nom est apparu au détour de la critique d'un livre, parue dans Le Monde daté du 16 septembre. En effet, La Bataille du Sénat évoque, parmi d'autres choses, l'existence de réseaux francs-maçons au sein de la haute assemblée. On apprend donc qu'il existe une Fraternelle parlementaire, qui semble transcender le clivage gauche-droite.

   Paul Ramadier aurait été à l'origine de sa création (à l'époque où il était président du Conseil)... si bien, qu'aujourd'hui encore, il existe un Cercle Ramadier, évidemment maçonnique. Je ne sais pas ce qu'en aurait pensé l'ancien maire de Decazeville...

   Ajoutons que l'homme, contrairement à nombre de politiques, était doté d'une culture certaine. Il lui est arrivé de signer des articles dans la prestigieuse Revue du Rouergue, une publication érudite de tendance plutôt conservatrice.

   Esprit indépendant, il s'était rallié au retour au pouvoir de Charles de Gaulle (en 1958), sans pour autant se départir de son regard critique. C'est cependant la période qui le voit perdre tous ses mandats, à cause principalement de la division de la gauche : le siège de député en 1958 (avec une habile manoeuvre de la droite locale), la mairie de Decazeville en 1959.

   Moins connue est l'action de son fils, Jean Ramadier qui, fait exceptionnel, ne bénéficie d'une notice biographique que sur la version anglaise de Wikipedia (à la date où j'écris ces lignes). Je dois  reconnaître que j'ignorais totalement l'existence de ce fils, ainsi que ses actes.

   Pour ceux qui ne lisent pas l'anglais, voici ce que dit, en gros, la notice : Jean Ramadier a résisté à l'occupation japonaise, en Indochine. Il a même été torturé par la Gestapo nippone, la Kempeitaï. Il est par la suite devenu gouverneur de colonies françaises d'Afrique subsaharienne : le Niger, la Guinée puis le Cameroun (où il eut le titre de haut commissaire : ce n'était pas officiellement une colonie, mais un mandat, attribué par feue la S.D.N. après la Première guerre mondiale). A ces postes, il s'est fait remarquer par son attachement aux droits des peuples. Il est mort précocement, à 54 ans.

   Mais l'histoire politique familiale ne s'arrête pas là. En parcourant l'excellent ouvrage de Roger Lajoie-Mazenc, Maires de famille, j'ai découvert que le petit-fils de Paul Ramadier, qui porte les mêmes nom et prénom que lui, a tenté sa chance devant le suffrage universel, notamment aux élections municipales, à Decazeville, sans succès.

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mercredi, 11 mai 2011

François Mitterrand en photos

   L'édition datée du 10 mai 2011 du Monde propose une intéressante page sous le titre "Mitterrand photos taboues". Le trentième anniversaire de l'accession à la présidence de la République a suscité une inflation d'articles (dont le site Arrêt sur images propose un échantillon).

   Les quatre photographies parues dans "le quotidien du soir" ont été bien choisies, je  trouve. Les commentaires qui les accompagnent sont soignés. Sont évoqués la rencontre Pétain-Mitterrand (en 1942), l'amitié jamais reniée pour René Bousquet, le décès de l'ancien président et sa fille Mazarine. C'est cette dernière image qui a le plus éveillé mon attention :

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   La photographie aurait été prise en septembre 1981. Le commentaire porte sur le culte du secret et la révérence des journaux de l'époque, puisque seul l'organe d'extrême-droite Minute a rapidement évoqué cette affaire.

   On peut d'ailleurs lire avec profit la version de l'histoire de l'ancien rédacteur en chef de l'hebdomadaire, feu Serge de Beketch. Il faut faire la part des exagérations (il n'hésite pas à qualifier la présidence Mitterrand de "régime le plus corrompu de l'après-guerre") et des affirmations péremptoires (il se trompe sur l'âge de Mazarine : elle avait quasiment 7 ans à l'époque, alors qu'il lui en donne moins de 5). Plusieurs détails méritent néanmoins le détour.

   La publication de cette touchante photographie est dans le ton de cette célébration. On chante les louanges de l'ancien président et on le présente comme un homme qui, certes a mené une double-existence, mais pour qui "l'autre femme" (Anne Pingeot, la mère de Mazarine) aurait été le grand amour de sa vie.

   En réalité (comme je l'ai déjà écrit à l'occasion du décès d'Annie Girardot, une des nombreuses ex de Tonton), si François Mitterrand est resté attaché à la mère de sa fille, sa liaison ne l'a nullement empêché de continuer à "cavaler" à droite et à gauche...

   Halte aux images d'Epinal !

mercredi, 09 février 2011

Yves Censi, socialiste ivoirien ?

   Décidément, on en apprend tous les jours. Voilà-t-y pas que trois députés UMP (dont un Aveyronnais) se sont fait taper sur les doigts pour avoir envisagé une petite virée en Côte-d'Ivoire, à l'invitation du "président" Laurent Gbagbo.

   Il est intéressant de comparer les versions des faits rapportées par la presse locale, La Dépêche du Midi en l'occurence, et la presse nationale, Le Figaro. Le choix des journaux n'est pas neutre : le quotidien de Toulouse est réputé de gauche (on pourrait donc s'attendre à ce qu'il épingle la faute des députés UMP), alors que Le Figaro est sans doute l'organe le plus proche de l'UMP. Finalement, l'article le plus dur n'est pas celui que l'on croit...

   Un site ivoirien confirme les informations publiées dans Le Figaro : c'est bien Laurent Gbagbo qui a invité les députés UMP et le programme de visites est centré sur le camp pro-Gbagbo. Ce voyage était donc une faute politique.

   Au passage, on apprend qu'Yves Censi est un "spécialiste de l'Afrique". Ah bon ? Si je me fie à son profil, c'est un élu membre de la Commission des Finances, plutôt spécialisé dans les questions liées à l'enseignement (privé) et au monde rural. Mais qu'allait-il faire dans cette galère ? (Est-ce au titre de la francophonie ? Mmmm... Cela paraît un peu tiré par les cheveux.)

   C'est d'autant plus étonnant que Laurent Gbagbo n'est a priori pas proche de l'UMP française. Il a plutôt des accointances avec le Parti socialiste. C'est un membre (encombrant) de l'Internationale socialiste (qui en compte d'autres). Si la direction du PS a pris ses distances avec l'ancien opposant à Félix Houphouët-Boigny, certains de ses cadres ont commis la faute que les députés UMP s'apprêtaient à imiter...

   Y aurait-il des raisons sous-jacentes, inconnues du grand public, à ce projet de visite ?