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jeudi, 30 juin 2022

Irréductible

   Quand on est humoriste et comédien, qu'on entre dans la deuxième phase de sa carrière sans avoir atteint le sommet et qu'on en a un peu marre de jouer les utilités dans des comédies faciles, le salut peut venir de la réalisation. Voilà donc Jérôme Commandeur pour la première fois seul aux manettes (son premier film étant une coréalisation) et qui, avec son équipe de scénaristes, a pu se garantir de bonnes répliques.

   Durant les vingt premières minutes, on (re)voit quasiment tous les gags de la bande-annonce, mais dans le désordre. Sans trop en révéler, je peux dire que l'une des situations montrées est le point de départ de l'histoire, mais qu'elle donne naissance à une série de retours en arrière. Le héros ne se trouve pas forcément à cet endroit pour la raison qu'on imagine.

   Curieusement, il y a donc une (petite) part de mystère dans ce qui semblait être de prime abord une comédie très balisée, un poil graveleuse. J'ai été agréablement surpris par le scénario, plus étoffé que ce que laisse présager la bande-annonce.

   A la base, il s'agit quand même d'une comédie facile, qui tape sur les fonctionnaires (surtout les municipaux et ceux de préfecture). On rit de bon cœur, même si l'on est conscient que le trait est (très) appuyé. Commandeur peut se reposer sur une brochette de seconds rôles caricaturaux, mais visiblement interprétés avec plaisir par des invités comme Gérard Darmon, Valérie Lemercier, Christian Clavier et Pascale Arbillot. C'est de surcroît plutôt bien écrit. Les dialogues font souvent mouche et le rythme est assez soutenu.

   Sur le fond, l'intrigue nous conduit à prendre du recul vis-à-vis du héros, assez égoïste au départ (jusqu'à son combat pour garder son poste de fonctionnaire). Il change parce qu'il rencontre l'amour, en la personne d'une chercheuse au mode de vie... particulier (Laeticia Dosch, très bien). On s'oriente vers une fin un peu trop bien-pensante pour moi, mais cela contribue à faire de ce film une comédie familiale, parfois un peu corsée, mais sans vulgarité.

   P.S.

   Quand on découvre, au début du film, la scène se déroulant à l'école (avec le héros jeune), on s'aperçoit que, dans la bande-annonce, on a coupé la réponse de l'une des camarades de classe du héros, une petite blonde qui a des ambitions politiques... C'est absurde sur le plan chronologique (le héros et la personne représentée ayant presque dix ans d'écart dans la réalité)... mais c'est savoureux.

18:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mercredi, 29 juin 2022

I'm your man

   J'ai hésité à aller voir ce film (sorti en même temps qu'une comédie française lourdingue consacrée au même sujet), parce que j'avais moyennement apprécié Stefan Zweig, adieu l'Europe (un des précédents films de la réalisatrice Maria Schrader). Mais, le bouche-à-oreille étant bon, le sujet alléchant, je me suis laissé tenter.

   C'est donc l'histoire d'une universitaire (mi-archéologue, mi-anthropologue) quadragénaire, célibataire sans enfant, qui accepte d'accueillir chez elle pendant trois semaines un androïde conçu pour être le meilleur compagnon possible. Précisons tout de suite que ledit androïde est un grand brun athlétique, à la voix grave et aux yeux bleus. (Dan Stevens très bien... trop bien même !) Il est organisé, cultivé, propre, doux, prévenant, à l'écoute des désirs de sa "compagne"... N'en jetez plus !

   J'ai bien aimé la séquence de la rencontre, dans un club qui n'est pas tout à fait ce qu'il paraît être... tout comme certaines personnes qui le fréquentent. L'héroïne Alma teste son futur "partenaire", de manière un peu surprenante... y compris pour lui !

   La première partie montre plutôt les réticences de l'universitaire (qui n'est sans doute pas la dernière à dénoncer les -nombreux- travers des véritables hommes) : son compagnon est un peu trop parfait. De plus, elle a du mal à séparer l'expérience (qu'elle doit évaluer) de la modification de sa vie privée, à laquelle elle s'oppose farouchement.

   Sans trop de surprise, elle va finir par prendre goût à son jouet technologique (je ne dirai pas jusqu'à quel point). La séquence pivot est celle de la promenade en forêt, de surcroît très bien réalisée. L'intrigue prend un tour particulier : ce n'est pas l'humanité potentielle ou simulée de Tom (l'homme au zizi synthétique) qui est le cœur du sujet, mais la vie d'une femme intelligente, indépendante, athée, accro au boulot... et qui cache un douloureux secret.

   Le film suit son petit bonhomme de chemin. C'est assez prenant, même si je trouve la fin inaboutie.

dimanche, 26 juin 2022

Elvis (dans la peau)

CRITIQUE FAVORABLE

   La tâche confiée à Baz Luhrmann était ardue : ressusciter la carrière et la vie privée de l'une des icônes de l'Amérique, mettre le tout en scène de manière à la fois crédible et attractive. Il y avait matière à grand film.... encore fallait-il trouver l'interprète. Quasi inconnu du grand public, Austin Butler réalise une performance extraordinaire, de l'ordre de celle de Rami Malek dans Bohemian Rhapsody. Sans être un sosie d'Elvis Presley, il incarne le chanteur et son appétit de vivre... certains diraient même sa "fureur de vivre", puisque l'acteur James Dean semble avoir été une référence pour Elvis, dont le rêve était de briller sur grand écran.

   En attendant la concrétisation de ses espoirs cinématographiques, le jeune homme commence à se faire connaître dans de petits concerts, comme première partie d'une vedette de la country. C'est l'une des influences que le musicien conservera tout au long de sa vie... mais ce n'est sans doute pas la plus importante. La première partie du film montre quel poids a eu la musique afro-américaine dans la genèse de l'artiste. Il a côtoyé (entre autres) BB King, Big Mama Thornton et Little Richard. On découvre un Elvis opposé à la ségrégation, parce qu'elle va contre ses fréquentations et son mode de vie.

   Cette première partie est vraiment excellente. Colorée, variée au niveau de la mise en scène, elle est à la fois riche (sur le fond) et entraînante (sur la forme). Les culs-pincés de la blanche Amérique y sont tournés en dérision. Rien ne semble pouvoir arrêter "Elvis le Pelvis", dont le déhanché fait pâmer les dames et donne des ailes aux messieurs.

   Un autre grand mérite de ce film est de mettre en valeur le rôle du deus ex machina de la carrière de l'artiste, le trouble colonel Parker, vrai manager, mais pas plus Parker que colonel. Tom Hanks est lui aussi formidable dans ce rôle, incarnant avec talent un personnage mêlant cupidité, roublardise et bonhomie.

   Une fois la vedette lancée vers les sommets, le film se fait plus classique et plus prévisible... jusqu'à la chute, qui suscite l'émotion.

   Baz Luhrmann signe une grande réussite, à voir absolument en salle !

 

CRITIQUE DÉFAVORABLE

   Depuis le succès (mérité) de Bohemian Rhapsody et (dans une moindre mesure) de Rocketman (dont Baz Luhrmann avait refusé de prendre en charge la réalisation), Hollywood sent que les films de super-héros et ceux d'animation ne sont plus les seules machines à cash du Septième Art. Le tout est de trouver la vedette qui a vendu beaucoup de disques et un(e) interprète capable d'endosser le rôle.

   C'est chose faite avec Austin Butler, un comédien vu plutôt auparavant dans des séries (même s'il a été aperçu dans Once upon a time... in Hollywood). Le jeune homme réussit à rendre vie à l'Elvis débutant, des concerts de country bas-de-gamme aux premiers gros succès enregistrés chez RCA. Il est beaucoup moins convaincant en "vieil" Elvis (quadragénaire, ceci dit). On a beau lui faire porter les mêmes fringues et les mêmes lunettes que l'ex-idole des jeunes, l'évolution de l'habillage peine à masquer le fait que l'acteur reste svelte tout au long de l'histoire, alors qu'Elvis était devenu empâté et bouffi à la fin. C'est sans doute pourquoi les ultimes images du King sont extraites de vidéos d'archives (le concert durant lequel il peine à tenir debout ou assis), et non pas une dernière incarnation par Butler.

   En revanche, on perçoit bien le vieillissement progressif de l'autre personnage principal, le colonel Parker, un redoutable filou qui, s'il a contribué à lancer la carrière d'Elvis, a bien vécu sur la bête... Dans le rôle, Tom Hanks est formidable, même si, au bout d'un moment, le fait de voir jouer cet excellent acteur avec d'imposantes prothèses devient agaçant.

   Le film est tout à la gloire d'Elvis. Le scénario gomme (sans les effacer, heureusement) les aspérités du parcours. Ainsi, on ne nous présente que brièvement les infidélités du chanteur-vedette à l'amour de sa vie, la ravissante Priscilla. Tel que c'est montré dans le film, on a l'impression que le King "faute" soit parce qu'il est sous l'emprise de drogues, parce qu'il se sent seul en tournée, soit parce que c'est le seul moyen de se redonner l'envie de vivre... Comme tout mari/compagnon infidèle, il est assez pathétique quand il dit que, malgré tout, Priscilla est la seule qu'il aime...

   Le film est aussi assez discret sur le déclin artistique d'Elvis. La carrière cinématographique du King (dans les années 1960) coïncide avec une baisse des ventes musicales (et des recettes des concerts). Elvis Presley commençait à être considéré comme ringard, les nouvelles vedettes s'appelant Beatles et Rolling Stones.

   Sur le plan formel, le film mêle les styles. Baz Luhrmann (auteur entre autres d'Australia) va parfois jusqu'à saturer l'écran pour suggérer l'explosion de vie et de désir que représente l'émergence du rock façon Elvis. Si le résultat est parfois entraînant, il faut quand même dire que le réalisateur en fait des tonnes.

   Quoi qu'il en soit, c'est un film, certes inégal, mais à voir en salle, sur un très grand écran, avec du bon son.

jeudi, 23 juin 2022

Buzz l'éclair

   Quand il apparaissait dans Toy Story, Buzz n'était qu'un jouet un peu grandiloquent, qui prêtait parfois à rire. Ce film-ci nous conte l'histoire du VRAI personnage qui inspira le jouet, un jeune space ranger, héros d'un monde à la technologie de pointe.

   ... et donc, ô surprise, ce Pixar est une œuvre de science-fiction ! Bien évidemment, on y trouve des références à de prestigieux aînés, de 2001, L'Odyssée de l'espace à Interstellar, en passant par Mission to Mars. A l'écran, c'est bigrement bien foutu. Soyez notamment attentifs aux scènes avec les casques d'astronautes : le travail sur les reflets est prodigieux.

   Sur le fond, il est question de réussite et d'échec, d'héroïsme et d'amitié, voire d'amour. On tombe, on échoue, puis on se relève et l'on tente à nouveau de réussir. Pour les enfants, c'est une leçon de vie : même le héros réputé invincible a été un débutant maladroit. On remarque aussi la poursuite du politiquement correct à la sauce Disney : les personnages principaux sont blancs et noirs, hommes et femmes (jeune et moins jeune), hétéro et homo. Quoi qu'on en pense, j'ai bien aimé la bande de bras cassés sur laquelle va s'appuyer Buzz pour tenter de mener sa mission à bien... et puis quel chat extraordinaire, ce Sox !

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   Pendant un peu plus d'une heure trente, on est pris dans un maelstrom d'aventures, de mystères et de relations intenses. A la sortie de la séance, j'ai entendu quelqu'un dire que c'était "le Disney de l'été, voire de l'année". Attendons tout de même les fêtes de Noël pour nous prononcer.

22:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Coeurs Vaillants

   Le titre de cette fiction à caractère historique est une référence à un célèbre magazine destiné (autrefois) à la jeunesse (dans lequel furent notamment publiées les aventures de Tintin et Milou). C'est aussi une allusion au courage dont vont devoir faire preuve les jeunes héros, des enfants et adolescents  juifs (français et étrangers) tentant d'échapper à la déportation.

   J'ai été agréablement surpris par le casting. Les enfants sont bien dirigés et l'on n'a fait de leur histoire ni un drame insoutenable ni une excursion campagnarde édulcorée. Il est néanmoins vrai qu'une fois que le petit groupe s'est réfugié sur une île, dans les bois, l'intrigue navigue entre l'ambiance de scouts et celle de Sa Majesté des mouches. Les gamines et les gamins sont crédibles quand ils sont confrontés à la faim, à la peur et à la crasse. Le scénario ne cache pas que la mort est parfois au bout du chemin.

   Une autre bonne surprise est la composition de Camille Cottin, qui incarne Rose, un personnage inspiré de Rose Valland (la conservatrice du musée du Jeu de Paume qui a contribué à sauver et retrouver quantité d’œuvres d'art pillées par les nazis). D'année en année, le talent de cette comédienne se confirme. Elle a su s'émanciper du rôle de Connasse ! qui l'a fait connaître. (Pour ceux qui ne les auraient pas encore vus, précipitez-vous sur Stillwater et Mon Légionnaire, où son talent est tout aussi éclatant.) Moins glamour que Cate Blanchett dans Monuments Men, Cottin est sans doute plus proche, dans son interprétation, de ce que fut la véritable Rose Valland...

   ... même si les aventures contées dans ce film sont totalement fictives. A ma connaissance, jamais la conservatrice ne s'est occupée du sauvetage d'enfants juifs. Durant toute la guerre (et même après), elle est restée pleinement (et uniquement) investie dans la préservation, le sauvetage et la récupération d’œuvres d'art.

   Au niveau de la mise en scène, Coeurs Vaillants se distingue par la manière habile dont est utilisé le château de Chambord, un labyrinthe qui regorge de cachettes pour des enfants juifs en fuite. Les scènes tournées dans la tanière puis dans le refuge arboricole sont tout aussi réussies. Cela m'a un peu rappelé des épisodes de la série Zora la Rousse.

   Tout ça pour dire que j'ai été pris par cette intrigue... jusqu'à la scène du pont, vers la fin. J'ai trouvé celle-ci ridicule, mal jouée. On sent que même Camille Cottin n'y croit pas. C'est dommage, parce que cela gâche la bonne impression que m'a laissée ce film.

   P.S.

   Concernant Rose Valland, il serait temps qu'on se décide à lui consacrer un biopic. C'était vraiment quelqu'un de hors du commun, dès avant la Seconde Guerre mondiale. Aux amateurs je signale une courte bande dessinée, signée Catel (à qui l'on doit aussi un ouvrage monumental consacré à Olympe de Gouges) :

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   La première partie (dessinée) évoque son action pendant et après la guerre. Lui succède un cahier photographique entrecoupé d'une chronologie détaillée... qui ne passe pas sous silence son orientation sexuelle.

mercredi, 22 juin 2022

Je tremble, ô Matador

   Le titre est un extrait des paroles d'une chanson populaire, qui devient une réplique entre les deux personnages principaux, au cours d'un pique-nique (en apparence) bucolique. Bien qu'habillé en femme, l'un des deux amoureux est un travesti, qui se fait parfois appeler La Doña. L'autre est un jeune révolutionnaire. Nous sommes au Chili, dans les années 1980, sous le régime dictatorial d'Augusto Pinochet.

   A cette époque, il vaut mieux ne pas être un "inverti" ou une "tafiole", comme nous le démontre la séquence initiale. Pourtant, La Doña n'est pas une rebelle. Il (Elle... Iel ?) tente de vivre sa vie, profitant des quelques interstices de liberté qui lui sont accordés. Il vit dans un immeuble délabré, au bord de l'effondrement, dans un quartier pauvre qui a des allures de bidonville. (Joli travail sur les décors et la mise en scène.) Ici, on ne le juge pas. La voisine (la seule à posséder un téléphone fixe) lui rend de menus services... mais elle ne veut pas d'ennui. Le jour, La Doña réalise des travaux de couture ou de broderie, parfois pour des femmes d'officiers du régime. Le soir, elle se prostitue...

   ... jusqu'au jour où elle croise Carlos, un jeune révolutionnaire mexicain plein de charme, tolérant... et qui se pose des questions sur son identité sexuelle. (Une sorte de Che Guevara crytpo-gay.) Ce qui au départ n'est qu'une relation amicale, fraternelle, pourrait prendre un autre tournant.

   ... Mais le mystère subsiste sur les raisons qui ont incité Carlos à se rapprocher du milieu des travestis. Il semble être en mission, au cœur d'une opération qui nécessite qu'il passe sous les radars de la police chilienne. Quelle plus belle couverture que la fréquentation d'un milieu certes interlope, mais qui n'est pas considéré comme menaçant par le régime ? Quant à elle, La Doña se méfie autant des communistes que du pouvoir en place : des deux côtés, on méprise les "déviants" sexuels.

   Ne croyez pas toutefois que l'essentiel du propos du film soit politique. C'est la personnalité du vieux travesti qui est au premier plan. J'ai beau ne pas affectionner ce genre d'ambiance, je dois reconnaître que la performance d'Alfredo Castro est remarquable. La relation trouble qui naît entre lui et Carlos est bien mise en scène, avec toutes ses ambiguïtés. Il faut dire aussi que, par petites touches, les personnages évoluent. Le travesti apolitique devient anti-Pinochet, tandis que le beau révolutionnaire hétéro est de plus en plus attiré par l'homme...

   A une réelle qualité de réalisation s'ajoute une chouette musique d'ambiance, constituée notamment de vieilles chansons populaires, des histoires d'amour que chacun peut interpréter à sa guise.

   Cela donne un film très particulier, pas flamboyant ni tapageur, mais qui mérite d'être vu par les cinéphiles.

El buen patron

   Qu'est-ce qu'un "bon patron" ? Quelqu'un comme Blanco, qui perpétue la tradition familiale, à la tête d'une PME spécialisée dans la fabrication de balances ? Peut-être. Il porte beau, affiche des valeurs humanistes, du respect, soutient la diversité sous toutes ses formes, prône l'équité... mais pas l'égalité, hein. (Faut pas déconner, quand même !)

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   J'ai pris beaucoup de plaisir à voir évoluer Javier Bardem dans ce rôle ambigu, celui de ce patron paternaliste, habile communicant, dont on se demande jusqu'à quel point il croit à ce qu'il raconte. Le film est bien évidemment ironique, mais l'on ne rit pas vraiment à gorge déployée. On sourit et, parfois, on rit.

   La belle mécanique élaborée par Blanco, dans son entreprise comme dans sa vie, est sur le point de se gripper. Son ami d'enfance, chef de projet dans sa boîte, est devenu un boulet... et un ouvrier licencié fait de la résistance, juste devant l'entrée du site de l'entreprise. Ce qui n'est au départ qu'une petite épine dans le pied pourrait se transformer en coup de poignard : Blanco brûle d'obtenir le prix décerné par la région à l'entreprise vertueuse de l'année, le seul qui manque à son palmarès. Une inspection se profile à l'horizon... et tout pourrait être remis en cause si l'on apprenait que le "père de ses employés" menace certains d'entre eux, licencie sans état d'âme et culbute à l'occasion une jeune stagiaire. La dernière en date lui réserve d'ailleurs quelques surprises.

   C'est donc une comédie engagée, perçue sans doute par nos voisins espagnols comme dans la mouvance de Podemos. Dans la manière dont vivent les "petits" dans le monde de l'entreprise, il y a une certaine représentation de la lutte des classes : le vigile sympathise avec l'ouvrier licencié... qui réussit même à mettre une patrouille de police dans sa poche ! (Cela nous vaut une réplique croustillante de Blanco, qui se désole d'être tombé sur un "policier socialiste"...)

   Le scénario s'amuse à plonger le patron dans la merde (au propre comme au figuré). Mais le gars a de la ressource. La dernière partie nous montre ce à quoi il est prêt pour s'en sortir. La morale est que, si l'on privilégie la loi du plus fort à l'esprit d'entraide, tôt ou tard, le baiseur devient le baisé... et parfois l'inverse.

lundi, 20 juin 2022

Incroyable mais vrai

   Non, il ne va pas être ici question de l'antique émission de Jacques Martin ! (Et là je me rends compte que je vous parle d'un temps que les moins de vingt trente quarante ans ne peuveuuux pas connaîîtreuuux ! ) Non, j'ai décidé de consacrer ce billet au dernier film de Quentin Dupieux, l'inclassable réalisateur de Rubber, plus récemment de Mandibules.

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   L'intrigue tourne autour de deux couples. A gauche ci-dessus, en rouge, se trouvent Marie (Léa Drucker, un peu flippante) et Alain (Alain Chabat, débonnaire et parfois cocasse), qui décident d'acheter leur première maison, pour y vivre ensemble. Ce couple entre deux âges n'a pas d'enfant et vit dans une relative aisance, sans être particulièrement fortuné. On ne sait pas si Marie a une activité professionnelle. Alain lui est cadre dans une compagnie d'assurances, dirigée par son ami Gérard (Benoît Magimel), un beauf friqué et flambeur, dont la nouvelle compagne est Jeanne (Anaïs Demoustier, délicieusement méconnaissable), plus jeune et plus superficielle que les habituelles fréquentations du couple, semble-t-il.

   Des événements quasi surnaturels vont changer la vie de ces deux binômes. Alain et Marie cachent que leur maison possède une pièce secrète, en sous-sol. De leur côté, Gérard et Jeanne explorent un aspect inattendu du transhumanisme... Je n'en dis pas plus pour laisser à chacun(e) le plaisir de la surprise... mais sachez que le repas du soir au cours duquel Gérard et Jeanne évoquent leur secret vaut son pesant de cacahuètes.

   La comédie de mœurs mâtinée de fantastique se suit avec plaisir. Évidemment, la situation va déraper. Sans trop en révéler, je peux quand même dire que Dupieux joue sur certaines obsessions masculines (la performance sexuelle) et féminines (l'apparence physique et les affres du temps).

   Le principal problème, comme dans d'autres films du même cinéaste, est que Dupieux a du mal à tenir un scénario sur la longueur. On sent que certaines scènes ont été étirées pour donner un long-métrage. A l'inverse, on aurait aimé que le réalisateur s'étende davantage sur la partie de l'intrigue qui nous est présentée comme un quasi-roman-photo musical.

   Cela donne une œuvre bancale, qui a du style, mais que j'ai trouvée moins marquante que le récent Petite Fleur.  

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dimanche, 19 juin 2022

Le Chemin du bonheur

   Il semble bien tortueux pour le héros de cette histoire, Saül, restaurateur bruxellois juif, dragueur, généreux et dingue de cinéma, dont il est une encyclopédie vivante. Nous sommes en 1987 et ce fringant quinquagénaire, célibataire sans enfant, va voir sa vie bouleversée pour deux raisons. La première est le film que son jeune employé chilien (fils d'une réfugiée politique) veut réaliser sur la période de son enfance, pendant la guerre. La seconde est l'entrée dans son restaurant (et dans sa vie) d'une nouvelle cliente, belle, énigmatique, fuyante... et projectionniste de cinéma !

   Cette histoire vaut surtout le détour pour l'abattage de Simon Abkarian, qui est de toutes les scènes se déroulant dans les années 1980. Il fait montre de son talent, dans presque tous les registres. Mais son personnage est un peu "trop" : trop généreux, trop tombeur, trop érudit (que de citations de films !)... trop "secrètement" torturé. J'ai trouvé les scènes se déroulant dans son "delicatessen" souvent kitsch, surjouées, en dépit des nombreux invités prestigieux (comme Michel Vuillermoz, Mathilda May et Brigitte Fossey, celle-ci très mal utilisée). Je fais aussi partie des spectateurs qui ont été gênés qu'Eric Caravaca interprète deux personnages : celui de l'acteur vedette en 1987 (fils de Brigitte Fossey) et celui du père adoptif du jeune héros, au début des années 1940.

   En revanche, les séquences anciennes, situées entre 1937 et 1945, sont plutôt bien fichues, bien que parfois jouées de manière trop appuyée. Au vu de la qualité de la distribution, je pense que le problème se situe au niveau de la direction d'acteurs. Ceci dit, l'insertion de ses séquences est à mon avis bien pensée. En fonction du moment où elles sont placées, elles évoquent tantôt les souvenirs du Simon âgé, tantôt l'adaptation possible du scénario en cours d'écriture, tantôt le long-métrage en train d'être tourné (dans la dernière partie de l'intrigue).

   Au passif du film, je place la manière différente dont les rescapés du génocide en gèrent le souvenir, plus de quarante ans après. C'est maladroitement mis en scène... et l'on sent venir de très loin la révélation concernant Hannah.

   Enfin, j'ai relevé quelques anachronismes. Ainsi, évoquant le génocide des juifs, Saül utilise à plusieurs reprises le terme Shoah. Certes, l'étonnant (et formidable) documentaire de Claude Lanzmann était sorti en 1985 et il avait très tôt suscité un grand écho. Mais il a fallu pas mal d'années pour que son titre finisse par remplacer, dans le langage courant, d'autres manières de nommer le génocide. De plus, j'ai été étonné que, dans le film, des critiques de cinéma se plaignent de voir « encore » un film sur l'extermination des juifs. A l'époque, ceux-ci n'étaient pas si fréquents. C'est plutôt une attitude typique du XXIe siècle... pas forcément acceptable : un bon film reste un film à voir, quel que soit son sujet, même s'il a déjà été abordé à de multiplies reprises, sous divers angles. Malheureusement, Le Chemin du bonheur ne rentre pas dans cette catégorie.

samedi, 18 juin 2022

Petite Fleur

   C'est l'histoire d'un couple franco-argentin qui s'installe à Clermont-Ferrand, au moment de la naissance de son premier enfant. Lui (argentin) est un dessinateur qui a connu un certain succès, mais qui peine à rebondir. Elle (française) est journaliste et ne se voit pas en mère au foyer. Le couple est assez "ardent", très bien campé par Daniel Hendler et Vimala Pons.

   La situation se complique pour José (le dessinateur), qui se retrouve au chômage et, de plus en plus, dans le rôle de père au foyer. Il a du mal à l'accepter, puis il découvre les joies de la paternité active. C'est assez cocasse, mais là n'est pas le meilleur du film. Il faut attendre l'arrivée à l'écran d'un étrange voisin, Jean-Claude, un cadre sup' dandy, esthète, amateur de jazz et de vin chic... et, accessoirement, victime du défoulement de José. Dans le rôle, Melvil Poupaud est excellent.

   La trouvaille scénaristique majeure est la "résurrection" perpétuelle de ce personnage, sans que cela lui paraisse anormal. Il ne semble pas non plus tenir rigueur à José de la petite habitude qu'il prend : le zigouiller chaque semaine, le même jour (mais de manière à chaque fois différente), sachant que ce rituel annonce une soirée réussie avec sa compagne, de retour du boulot... et totalement ignorante de ce qu'il se passe dans le voisinage. (Notons que, contrairement à ce qui se produit dans Un Jour sans fin, le héros ne revit pas sans cesse la même journée.)

   La mise en scène est taquine, nous faisant croire par certains plans que ce à quoi on s'attend va se produire, faisant durer le plaisir l'attente... Le doute est aussi instillé quant à la nature de « l'amitié » qui finit par se nouer entre José et Jean-Claude.

   A cette première partie très emballante succède une seconde, sur un autre ton. Un personnage sulfureux entre en scène : Bruno (Sergi Lopez, très bien), sorte de gourou adepte des thérapies de groupe... un peu escroc sur les bords. Le personnage féminin regagne alors en importance (pas tout à fait celle qu'il avait au début, avant que José ne rencontre son voisin) et l'on se demande où le scénario est en train de nous entraîner...

   Je ne dévoilerai pas la fin, mais sachez que celle-ci donne sans doute la clé du rôle de Jean-Claude. Quant au titre du film, il est bien évidemment une référence au tube de Sidney Bechet, dont on entend plusieurs versions (dont une par Henri Salvador et une par Benjamin Biolay). Je ne révèlerai pas non plus ce que signifie l'irruption de ce morceau dans l'intrigue, à plusieurs reprises...

   C'est pour moi une très bonne surprise, un film qui tranche au niveau du style et du ton... et ce n'est pas qu'un jeu de mots !

   P.S.

   Si j'ai bien lu le générique de fin, les dessins que l'ont voit José réaliser sont l’œuvre de Mathieu Burniat.

16:32 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 17 juin 2022

Le concours continue !

   Les résultats du premier tour des élections législatives ne cessent de susciter des commentaires (plus ou moins profonds). Cette année, il me semble que le nombre de candidatures atypiques/farfelues (rayer la mention inutile) est plus important que d'habitude. L'une des « minimares » publiées dans le dernier numéro du Canard enchaîné affirme en avoir relevé 14, exemples à l'appui :

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   Le premier, Nicolas Muller (candidat du Mouvement de la ruralité, ex-CPNT) semble s'être un peu emmêlé les pinceaux dans la gestion de sa campagne (qui n'a visiblement pas rencontré le succès).

   Le deuxième, Olivier Roussel, est resté un inconnu pour la quasi-totalité des habitants de sa circonscription. Il semble que ses bulletins aient été absents des bureaux de vote parce qu'il n'avait pas les moyens d'en financer l'impression. (Pourquoi se présenter à l'élection, alors ? Il aurait fallu y songer avant.)

   La troisième, Annie Chassain, étiquetée « divers gauche », est arrivée dernière dans la quatrième circonscription de Charente-Maritime. Au second tour, le député sortant Raphaël Gérard (LReM) est opposé à un candidat RN. Bien que celui-ci le talonne, la candidate Nupes arrivée troisième s'est refusée à toute consigne de vote, d'après la recension effectuée par Le Monde. (On ne s'étonnera pas d'apprendre que cette candidate Nupes est membre de LFI...)

   La quatrième, Élisa Moré, étiquetée « régionaliste », s'est elle aussi présentée dans une circonscription (vosgienne) qui verra un candidat de la « Majorité présidentielle » affronter un RN au second tour. Mais, là, la candidate Nupes éliminée, Charlotte Moreau, sans appeler à voter Ensemble, a déclaré que le vote RN était exclu.

   Toujours dans Le Canard enchaîné, un peu plus bas, sur la même page, il est question d'un autre de ces « candidats à 0 voix » :

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   Son cas rappelle celui de l'Aveyronnais Thierry Noël, qui avait adopté la même attitude... avec le même résultat (1 seule voix recueillie... mais 0 espérée). Les deux hommes ne sont toutefois pas de la même sensibilité politique, comme on peut l'apprendre dans le dernier numéro de L'Agglorieuse, l'hebdomadaire satirique de Montpellier :

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   La démarche de Jean-Luc Duret est bien expliquée dans un article de L'Est Républicain.

   Je termine ce florilège par un cas déjà présent dans un article auquel menait un lien inséré dans l'un de mes précédents billets. Ce cas est cité dans le même numéro de L'Agglorieuse, avec une perspective "historique" :

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   En faisant des recherches sur ce candidat, je suis tombé un billet de blog qui évoque le binôme qu'il formait avec son suppléant... Bruno le Gaulois ! Soit cette candidature est une farce, soit le gars m'a l'air bien allumé !

   ... ou alors, il y a anguille sous roche, me suggère le petit malin assis au fond de la classe, près du radiateur climatiseur. En effet, dans la quatrième circonscription de l'Hérault, l'un des principaux candidats n'était autre que... Sébastien Rome (Nupes-LFI). En ajoutant à la liste (déjà bien fournie) une candidature farfelue, presque homonyme, aurait-on cherché à détourner de Nupes les suffrages d'électeurs mal renseignés ou un peu trop prompts à saisir le premier bulletin dont l'intitulé ressemble à celui pour lequel ils sont venus voter ? Ce serait tomber un peu vite dans le complotisme. Notons toutefois qu'une situation similaire (plus caricaturale encore) s'est produite dans la neuvième circonscription de Paris, où les électeurs ont eu à choisir entre treize prétendant(e)s... dont deux Sandrine Rousseau. Cela n'a pas empêché la candidate Nupes-LFI d'arriver largement en tête.

mardi, 14 juin 2022

Des candidats à 0 voix

   Hier, j'ai reparlé du cas du candidat aveyronnais qui n'a recueilli qu'une voix, au premier tour des législatives, dans la troisième circonscription de l'Aveyron. Eh bien, certains ont fait encore mieux ! Voici ce sur quoi je suis tombé ce matin en lisant Midi Libre :

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(Je sais : la photo est dégueulasse.)

   Vous noterez que, contrairement à son homologue aveyronnais, ce candidat semble avoir veillé à ce qu'aucun bulletin imprimé à son nom ne figure dans les bureaux de vote. Sa démarche n'en est pas moins étrange... et un peu méprisante pour l'exercice du suffrage universel.

   En cherchant un peu, j'ai trouvé d'autres cas de "candidat sans voix", notamment quatre en Bretagne. Les raisons de leur "bulle électorale" ne sont pas les mêmes...

   ... Mais le phénomène est encore plus développé que ce que je croyais, en Midi-Languedoc : on y compterait dix candidats "sans voix" et sept ayant recueilli moins de dix suffrages (dont l'Aveyronnais Thierry Noël).

lundi, 13 juin 2022

Le candidat à une voix

   Hier, j'ai ironisé à propos d'un candidat écologiste de la troisième circonscription de l'Aveyron. Celui-ci n'a obtenu qu'une seule voix au premier tour des élections législatives. Aujourd'hui, en lisant Centre Presse, j'ai découvert que, non seulement la seule voix qui s'est portée sur lui n'était pas la sienne... mais qu'il avait pour objectif de n'en recueillir aucune !

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   Je confirme que c'est dans bien dans la commune de Nant (située dans le Sud-Est de l'Aveyron, aux confins du Gard et de l'Hérault) que Thierry Noël (qui n'y réside pas) a obtenu sa seule voix :

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   La démarche de ce partisan de la décroissance m'apparaît quelque peu contradictoire. Sa candidature, quand bien même elle n'avait vocation à recueillir aucun suffrage, a eu pour conséquence l'impression de bulletins (et peut-être de professions de foi). Pas terrible comme bilan carbone (sans parler du gaspillage de papier et d'encre) !

   D'autre part, je ne suis pas certain que la seule et unique personne à avoir voté pour lui l'ait fait par adhésion à ses idées tout en méconnaissant son souhait de finir à 0. Il n'est pas impossible qu'un mauvais esprit résidant à Nant ait voulu ainsi l'empêcher de réaliser son pari. (« C'est le genre de connerie qu'un sale type comme toi pourrait faire » m'a déclaré une personne qui me connaît bien.) Je rassure ce monsieur : je vote à Rodez et j'y ai dimanche dernier exprimé un suffrage qui ne va peut-être pas dans le sens de ses aspirations profondes.

dimanche, 12 juin 2022

Aveyron : la Nupes bien placée... mais sans député ?

   C'est l'un des enseignements que l'on peut tirer des résultats du premier tour des élections législatives, dans le département de l'Aveyron. Voyons ce qu'il en est dans le détail.

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   Dans la première circonscription (qui s'étend de Rodez à l'Aubrac), le sortant LReM Stéphane Mazars est sans surprise arrivé en tête... et même très largement, recueillant presque deux fois plus de voix que son principal concurrent (un jeune Nupes que, dans le coin, on s'est mis à surnommer "le roi du paracétamol"...).

   Toutefois, par rapport à 2017, Stéphane Mazars a perdu environ 12% des voix qui s'étaient portées sur lui. C'est peut-être l'effet de l'abstention (et c'est beaucoup moins que nombre de ses collègues de la majorité présidentielle). En comparaison, la chute de la droite est bien plus importante : - 45 % pour Magali Bessaou par rapport à Yves Censi. (Les t-shirts près du corps n'ont pas suffi...)

   Paradoxalement, alors que, dans les jours qui viennent, on risque de nous présenter le score de Léon Thébault (Nupes) comme une performance, en comparant celui-ci avec ceux de l'ensemble des candidats de gauche (opposés à Stéphane Mazars) en 2017, on s'aperçoit qu'il y a plutôt baisse, en nombre de voix : 8922 contre 9597 (répartis entre cinq candidats, ceci dit). La baisse de 7 % ressemble plutôt à une stagnation, surtout si l'on tient compte du contexte de l'abstention (passée, en gros, de 42 % à 46 %). Néanmoins, pour un jeune homme de 21 ans, se qualifier pour le second tour à son premier essai reste une prouesse.

   La vraie progression spectaculaire a été réalisée par l'extrême-droite. En cinq ans, le FN-RN a gagné plus de 2000 voix (+ 67 %). La progression est même de 110 % si l'on inclut les suffrages qui se sont portés cette année sur Reconquête. On sait donc où sont passées une partie des voix de droite qui ont manqué à la candidate LR (pourtant soutenue par les caciques locaux).

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   Dès l'annonce de résultats partiels sur la deuxième circonscription, on a pu lire et entendre sur divers médias des déclarations triomphalistes de l'extrême-gauche. En effet, le candidat Nupes arrive en tête... mais pas aussi largement que certaines estimations le laissaient présager. Le score de l'extrême-gauche est toutefois en nette progression par rapport à 2017 (+ 28 % si l'on compare avec les suffrages obtenus par LFI et les écologistes, à l'époque : 10534 contre 8228). L'ensemble de la gauche (en incluant tout le PS et le PRG) est aussi en progression (de 12795 à 14369, soit + 12 %).

   Cependant, la question se pose du devenir des voix qui se sont portées sur Eric Cantournet au premier tour. Celui-ci a refusé l'union sous domination LFI. Son électorat est sans doute écartelé entre la Nupes et LReM. Celle-ci sera présente au second tour, avec un candidat qui a recueilli 45 % de voix de moins que sa prédécesseure en 2017. (Gros désaveu pour Anne Blanc.) Mais le principal déçu de ce premier tour est sans doute André At (LR), finaliste théorique il y a cinq ans, et qui a vu son score baisser de 27 %. Je doute fort que ces électeurs-là se tournent vers le candidat Nupes.

   Ici encore la plus forte progression est celle du RN : + 51 % par rapport à 2017 (en comptant uniquement les suffrages RN : 3212 et 4865), + 89 % en incluant les suffrages qui se sont portés sur Reconquête. Dans cette circonscription-là, lors de la dernière présidentielle, j'ai constaté une certaine porosité entre une partie des électorats de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen. La haine du macronisme sera-t-elle le ciment de la victoire électorale de Nupes ?

   Tant qu'on est sur l'extrême-droite, je signale l'échec cinglant du candidat des Patriotes dans cette circonscription (753 voix... soit 2 %). L'ophtalmologue s'est bien mis le doigt dans l’œil jusqu'au coude...

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   Terminons par la troisième circonscription, orpheline d'Arnaud Viala, qui semble avoir eu raison de s'approprier le fauteuil de président du Conseil départemental : le candidat LR Christophe Saint-Pierre (ancien maire de Millau) termine troisième et est éliminé. Par rapport à 2017, LR a recueilli 53 % de voix en moins (6818, contre 14525) ! On peut penser qu'une partie s'est reportée sur l'extrême-droite : le candidat RN a progressé de 73 % en voix par rapport à 2017... et l'extrême-droite de 111 % si l'on inclut les suffrages qui se sont portés sur Reconquête. La droite aveyronnaise s'est donc fait siphonner une partie de son réservoir électoral par les marinistes et les zemmouriens, ce qui devrait inciter ses dirigeants à quelques remises en question.

   Le second tour opposera les candidats Nupes et LReM. Le premier réalise une progression de 36 % par rapport aux voix obtenues par les candidats de gauche en 2017 (10493 contre 7742). En revanche, le candidat LReM a rassemblé 26 % de voix de moins que son prédécesseur en 2017 (9741 contre 13122)... mais il est peut-être mieux placé pour l'emporter. Je pense que le candidat Nupes dispose de peu de réserves. Je ne crois pas à un sursaut des abstentionnistes d'ici au second tour... mais je peux me tromper. La principale question est le devenir des voix du RN. Dans cette circonscription-là (fortement marquée par l'implantation militaire), je vois mal des électeurs attachés au respect de l'ordre voter pour un candidat membre d'un parti dont certains dirigeants tiennent des propos anti-flics.

   Je ne voudrais pas terminer ce billet de manière trop acrimonieuse. Voilà pourquoi je signale aux amoureux du détail croustillant la dernière place, dans la troisième circonscription. Elle est occupée par un écologiste indépendant (qui s'était déjà présenté en 2015 et 2017), qui a recueilli... une voix (qu'on présume être la sienne) ! Mes amitiés à la famille et aux proches du candidat.

Jurassic World III

   Il aura fallu attendre quatre ans pour voir la conclusion de la trilogie... et de l'ensemble de la saga, puisqu'une partie de la distribution de Jurassic Park a été appelée à la rescousse : Laura Dern et Sam Neill, que viennent compléter B.D. Wong et Jeff Goldblum, déjà présents dans les deux trilogies.

   A la fin de Fallen Kingdom, on avait laissé les héros avec un beau bordel : tout plein de dinosaures relâchés dans la nature. L'histoire commence quelques années plus tard, dans un monde où les humains tentent de vivre avec la présence de ces grosses bébêtes reconstituées. Cela donne à ce début un tour tantôt cocasse, tantôt poétique, tantôt menaçant. C'est bigrement bien foutu... mais ce n'est pas la séquence introductive prévue à l'origine !

   Une autre surprise est la découverte de la famille recomposée formée par Claire (Bryce Dallas Howard), Owen (Chris Pratt) et la jeune Maisie (qui, rappelons-le, est un clone). Celle-ci est en pleine crise existentielle, au moment de l'adolescence qui plus est... bref, la gamine sage et prodigieuse s'est transformée en casse-couilles que ses parents super-intelligents ne savent pas trop comment gérer. Il leur faut de surcroît la protéger, contre des scientifiques rapaces qui ont engagé des hommes de main.

   Je ne sais pas si c'est voulu par la production, mais les deux vedettes incarnant les parents ont l'air d'avoir pris un petit coup de vieux par rapport aux premiers films. Ce sont désormais des quadras, Bryce s'étant un peu empâtée (plus question de piquer un sprint en chaussures à talons en pleine jungle), Chris apparaissant un peu moins punchy.

   Sur le fond, l'intrigue joue sur des idées à la mode, de la lutte antispéciste à la dénonciation des grandes firmes de biotechnologies. L'une d'entre elles sait se présenter sous un jour reluisant... alors que ses intentions réelles sont plus obscures.

   Pour des raisons différentes, les groupes de héros vont chercher à pénétrer dans la sorte de Googleplex de l'entreprise, dont le dirigeant semble être un double de Steve Jobs. Ce n'est pas l'une des moindres invraisemblances de l'histoire que de voir un si petit nombre de personnes (certaines très âgées) parvenir à déjouer les systèmes de surveillance les plus perfectionnés pour, finalement, foutre en l'air un complexe ultramoderne !

   Pour apprécier pleinement ce film, il faut donc laisser un peu de sa raison au vestiaire. Sinon, on risque d'à peine frissonner lorsqu'on verra de vilaines grosses bêtes (avec de grandes dents) tenter de boulotter les héros... qui s'en sortent presque toujours "juste à temps". On risque aussi de ricaner méchamment lors du méga affrontement final (entre deux puis trois monstres), les protagonistes humains en réchappant tous comme par miracle !

   Mais, franchement, dans une grande salle, bien équipée, c'est un sacré spectacle ! Les effets spéciaux sont excellents. Les interactions entre les acteurs et les créatures numériques (ou animées) sont très bien rendues à l'écran. C'est cependant bruyamment mis en musique. (Michael Giacchino, qu'as-tu fait de ta subtilité ?)

   J'ai vraiment passé un bon moment, tout en étant conscient de ne pas voir un chef-d’œuvre.

00:23 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 07 juin 2022

Tandem "soulagien"

   La chaîne France 3 diffuse actuellement la sixième saison de la comédie policière Tandem, dont les héros (un couple d'officiers de gendarmerie divorcés, mais qui continuent à travailler dans la même brigade) sont incarnés par Astrid Veillon et Stéphane Blancafort.

   J'ai découvert cette série à sa quatrième saison, pendant le premier confinement. Je lui suis resté fidèle, contrairement à d'autres (françaises comme américaines) qui, pour moi, se sont essoufflées. J'aime le mélange d'intrigue policière et de comédie familiale, pimentées parfois d'un poil d'Histoire ou de légendes locales.

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   Dans le cinquième épisode de la sixième saison (diffusé ce mardi soir, sous le titre "Cœur de pirate"), ce ne sont pas les démêlés des héros qui ont le plus retenu mon attention, mais une anecdote concernant deux personnages secondaires : à gauche Thomas (le fils des gendarmes qui, au grand dam de ses parents, effectue un stage dans la brigade), à droite Célestin (un enquêteur zélé mais un peu casse-couille, qui essaie toujours de se faire bien voir de la hiérarchie). Le premier ne sait comment attirer l'attention de Nour, la cousine d'une collègue de son père. Il joue la carte culturelle :

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   Le second se propose de lui donner des conseils. Voici ce qu'on entend au cours de l'épisode :

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   Donc, draguer une fille en lui proposant d'aller voir une expo Soulages, c'est un peu ringard (en tout cas, sûrement intello)...

   Au niveau culturel, l'épisode ne manque pas d'intérêt, puisqu'il est question du trésor du pirate Barberoussette... non, pas Barberousse. Barberoussette (alias Gaspard Dot) a bien existé et il n'a pas laissé que de bons souvenirs dans la région. Ah, j'aime quand, au cours d'une enquête, il est question d'archéologie (comme dans le troisième épisode de la saison 4) ou des Templiers (dans le onzième épisode de la saison 3) !

lundi, 06 juin 2022

Evolution

   De Kornel Mundruczo j'avais bien aimé (il y a quelques années) White Dog. L'idée de traiter d'un sujet à travers trois personnages issus de la même famille, à trois époques différentes, m'a incité à aller voir Evolution.

   On est cueilli par la première séquence, qui dure environ vingt minutes, dont plus de quinze sans le moindre dialogue. L'action démarre dans une pièce vide, aux parois maculées, le plafond parcouru de tuyaux se terminant, à intervalle régulier, par une sorte de pommeau de douche. On ne nous dit ni où ni quand on se trouve. (A la toute fin de la séquence, c'est devenu évident, sans qu'aucun nom ni aucune date n'aient été indiqués.)

   Un groupe d'hommes d'âges différents entreprend de nettoyer cette mystérieuse pièce, parois incluses. Aucun déchet n'est visible à l’œil nu... et pourtant, au bout d'un moment, chaque homme finit par extraire quelque chose d'un endroit de la pièce... jusqu'à la découverte finale. Cette séquence, très bien mise en scène, justifie à elle seule d'aller voir le film... mais je ne cache pas qu'on pourrait se passer de la suite, nettement moins brillante.

   Une ellipse nous projette en Allemagne, des dizaines d'années plus tard. Une femme âgée peine à survivre dans un appartement en mauvais état. De plus, elle commence à montrer les symptômes de la maladie d'Alzheimer. L'arrivée de sa fille arrange et complique tout. Entre les deux femmes, il y a un passif, celui du passé. Le passé qui est encore très présent chez la mère... et qu'elle a placé tel un fardeau sur les épaules de sa fille. En théorie, cela pourrait donner quelque chose d'intéressant. Mais c'est mal filmé (sous prétexte de mettre en scène la confusion) et surtout excessivement bavard... pas facile de suivre du hongrois sous-titré !

   Une nouvelle ellipse nous conduit quelques années plus tard. Au cœur de la troisième historiette se trouve un personnage cité dans la précédente, un (pré)adolescent mal dans sa peau et victime de harcèlement. Il ne trouve du réconfort que dans le macabre (l'univers des zombies) et en compagnie d'une camarade d'école, qui elle aussi a un profil particulier. Cette dernière est le personnage le plus intéressant, le garçon étant un enfant gâté par sa mère (et sa chambre un véritable dépotoir, où surnagent nombre d'équipements qui ont dû coûter un bras à sa génitrice). Entre difficultés scolaires et renaissance de l'antisémitisme, cette partie se perd un peu, concluant sur un message certes positif (l'amour rapproche les gens de cultures différentes), mais mis en scène avec des moufles.

   Je trouve que les critiques professionnels ont un peu survendu ce film.

dimanche, 05 juin 2022

J'adore ce que vous faites

   Et c'est parti pour une comédie "à la française", signée Philippe Guillard, qui a déjà dirigé Gérard Lanvin dans Le Fils à Jo et Papi-Sitter. L'intrigue s'inspire sans trop le cacher de L'Emmerdeur et surtout du Boulet (déjà avec Gérard Lanvin), cité au cours de plusieurs dialogues. On ne doit donc pas s'attendre à une originalité folle.

   Gérard Lanvin est dans son propre rôle, celui d'un acteur vieillissant, ancienne gloire des salles obscures pour laquelle les bons rôles se font de plus en plus rares. Une occasion se présente avec le tournage de la partie française de l'intrigue d'un film américain consacré au Débarquement de Provence (celui d'août 1944).

   Au départ, tout semble bien "se goupiller" pour l'acteur. Il va jouer dans une superproduction, est logé dans une villa de standing et s'entend bien avec le réalisateur états-unien. Petit à petit, tout se dégrade... à commencer par l'ambiance à la villa. Y contribue fortement un employé de l'entreprise d'entretien de piscines, "Momo", un gentil lourdaud, d'autant plus envahissant que lui et sa famille (à l'exception d'un beau-frère ou d'un cousin) sont des fans absolus de... Gérard Lanvin. Ses maladresses contribuent à compliquer l'existence du comédien, qui, dans son travail, n'aime rien tant que la rigueur et l'absence de surprise.

   Dans le rôle de Momo, Artus est très bon. On dirait que cela a été écrit pour lui. Il a de l'allant, du bagout et n'a pas peur du ridicule. Comme Lanvin a volontiers adopté le costume de psychorigide qu'on a cousu pour lui, l'association des deux fonctionne bien, sans faire toutefois d'étincelles.

   Sans surprise, on passe de la phase découverte et amusement, à celle de l'agacement, puis de la colère, de la rupture avant que, bien entendu, une réconciliation ne survienne. Il n'y a pas grand chose à attendre de ce côté-ci.

   Sur le fond, l'histoire n'est pas si idiote que ça. Elle rappelle aux vedettes du cinéma populaire que, derrière leur célébrité et leur confort pécuniaire, il y a des spectateurs parfois d'origine très modeste, auxquels ils ont apporté un peu de bonheur. Leur affection,  aussi maladroitement exprimée soit-elle, n'est pas méprisable. La scène qui se passe chez la mère de Momo (avec Lanvin) est à cet égard très réussie.

   Je ne vais pas en rajouter. Ce n'est pas la comédie du siècle, mais un honnête divertissement.

   P.S.

   Le générique de fin contient un clin d’œil aux circonstances dans lesquelles le film a été réalisé : le président Emmanuel Macron y est remercié pour avoir attendu (que s'achève) le dernier jour de tournage pour confiner les Français !

16:58 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Compétition officielle

   Le fait que ce film sorte juste après la tenue du dernier Festival de Cannes n'est évidemment pas le fait du hasard. Il propose une vision assez ironique du petit monde du septième art et, dans sa dernière partie, il contient une scène se déroulant au cours d'un festival de cinéma.

   Sans surprise, le titre est à double sens. A la compétition entre les films s'ajoute celle entre les acteurs, en particulier deux "mâles alphas" aux carrières et aux tempéraments très différents.

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   A gauche se trouve Félix, le beau gosse, mondialement connu, idole d'une partie de la jeunesse, coureur de jupons. A droite se trouve Ivan, qui participe à des productions plus confidentielles, mais dont le talent est salué par la profession. Il donne des cours de théâtre, sans doute pour compléter ses revenus.

   Leur association est due à un milliardaire, propriétaire d'un gros groupe pharmaceutique et désireux de laisser une trace dans l'Histoire. Il sent que son "œuvre" économique ne va pas faire de lui un héros de l'humanité. Alors quoi ? Construire un pont ?... et pourquoi pas financer un film ?

   Ni une ni deux, une brillante réalisatrice est engagée, les droits d'un roman achetés et les deux meilleurs acteurs du pays approchés. Tout les sépare et pourtant tous deux ont intérêt à ce que le projet réussisse : en dépit de ses fanfaronnades, Félix est conscient de ne pas avoir joué dans d'impérissables chefs-d’œuvre et Ivan crève (secrètement) d'envie de toucher enfin le grand public qu'il affirme mépriser. Dans ces deux rôles, Antonio Banderas et Oscar Martinez sont excellents. Cela faisait très longtemps que je n'avais pas vu le premier aussi bon. Le second est connu des cinéphiles pour sa participation aux Nouveaux Sauvages, à La Conspiration des belettes et à Citoyen d'honneur, déjà sous la direction de Mariano Cohn et Gaston Duprat.

   C'est donc un film d'acteurs, durant lequel chacun a droit à ses morceaux de bravoure. L'habileté des auteurs est d'entremêler fiction et réalité. Les répétitions finissent par déborder sur la vie privée qui, de son côté, rejaillit sur la préparation du film. Les répliques sont souvent à double sens...

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   A ce duo masculin il faut ajouter la délicieuse, la pétillante, la frappadingue, l'incontrôlable réalisatrice, incarnée avec entrain par Penélope Cruz, en pleine forme, belle, fine et cinglée. Elle va en faire voir de toutes les couleurs aux deux mâles dominants !

   On attend avec impatience certaines scènes, comme celle du baiser, celle des récompenses ou celle du rocher. On s'intéresse aussi au sous-texte. Il y est évidemment question des "deux cinémas", celui d'auteur et celui grand public. On s'interroge aussi sur la trace qu'on va laisser derrière soi, qu'on soit PDG, comédien, réalisatrice ou auteure de livres pour enfants. L'intrigue semble sous-entendre que tout cela n'est que vanité. C'est donc assez drôle, mais pas aussi sarcastique que ce à quoi je m'attendais. J'ai quand même passé un bon moment.

00:14 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mercredi, 01 juin 2022

Utama, la terre oubliée

   Ce petit film bolivien met en scène un vieux couple d'éleveurs de lamas vivant de manière traditionnelle dans une région reculée du pays, dans le Nord aride... de plus en plus aride. Ils n'ont ni l'eau courante ni l'électricité et se nourrissent principalement de galettes de céréales. Entre eux, ils parlent plus le quechua que l'espagnol. Leur fils unique est parti s'installer en ville (à l'image de la majorité des habitants du coin). C'est le petit-fils Clever (hispanophone strict) qui revient les voir, à la fois par amour pour eux et pour les inciter à prendre une importante décision.

   Même si le contexte est différent, j'ai trouvé que ce film résonnait étrangement avec L’École du bout du monde. Dans les deux cas, un jeune citadin un peu imbu de lui-même se rend dans un village reculé. Dans les deux cas les villageois vivent dans une grande précarité. Dans les deux longs-métrages, les réalisateurs filment avec talent et empathie ces gens de peu, attachés à leurs traditions.

   Utama se distingue toutefois de l’œuvre bhoutanaise sur plusieurs points. Il est d'abord plus militant, ce qui explique que la fiction l'emporte sur l'aspect documentaire, à tel point que, parfois, la mise en scène verse dans l'invraisemblance. On sent que le réalisateur veut nous faire plaindre le couple, notamment à travers la question de l'eau. Mais il se plante quand il montre le tonneau où aboutit la gouttière du toit : alors que la cabane est située en plein soleil, aucun couvercle n'est posé sur le tonneau (d'où sans doute la perte régulière d'une partie du précieux liquide). Pire : alors que les deux paysans semblent se contenter d'une toilette sommaire, obsédés par la réserve d'eau douce, un matin, on voit le grand-père se verser trois grandes rasades puisées dans le tonneau, juste pour se nettoyer le visage. Ce gaspillage évident se justifie par la volonté de réaliser un superbe plan, très signifiant : il faut qu'il y a ait assez d'eau dans la cuvette pour qu'on y voie le reflet du condor, au-dessus de la tête du grand-père.

   Incontestablement, Alejandro Loayza Grisi est un habile formaliste. Ses plans sont souvent très inspirés, comme cette vue de l'unique rivière du coin, qui apparaît comme une artère de sang zébrant une étendue de peau séchée.

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   Beaucoup de choses tournent autour du patriarche Virginio. C'est l'un des irréductibles du village, persuadé que les dieux vont tôt ou tard faire revenir la pluie et qui persiste à vouloir vivre à la dure, en harmonie avec son territoire, refusant de quitter la région. Son petit-fils a beaucoup de mal à le comprendre. Chacun va petit à petit faire un pas vers l'autre. Cela ne se fait pas tout seul... et c'est mis en scène avec subtilité.

   L'autre beau personnage est celui de la grand-mère, Sisa, en apparence soumise à Virgilio, mais qui semble être la seule à pouvoir l'influencer. Après la séance, j'ai été stupéfait d'apprendre que les deux personnages âgés étaient interprétés par des comédiens non professionnels. Ils sont épatants !

   Je recommande donc ce film, certes (pour moi) moins abouti que L’École du bout du monde, mais qui représente une belle expérience cinématographique.

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