samedi, 30 juin 2018
Sicario - La Guerre des cartels
Il y a presque trois ans, j'avais bien aimé le premier volet des aventures des tueurs au pays des trafiquants de drogue. Pour le deuxième film, on a changé le réalisateur et presque toute l'équipe technique... mais pas le scénariste, Taylor Sheridan, qui a récemment réalisé Wind River.
Et on a bien fait. De surcroît, ce film n'est pas un décalque du précédent. L'intrigue est construite différemment, de manière moins linéaire, avec des péripéties inattendues et des pistes qui resteront inexplorées. (Seuls les amateurs de la série Blacklist devineront qu'on leur prépare une fin légèrement différente de ce qui est montré à l'écran concernant l'un des personnages principaux...) On commence avec une prenante séquence liant immigration et terrorisme, assez révélatrice des craintes ressenties par une certaine Amérique blanche. Mais, vu de France, on peut aussi trouver des points de comparaison.
Le fil narratif qui commençait à s'esquisser est assez rapidement brisé, après une séquence africaine qui n'est pas sans rappeler Zero Dark Thirty. Interviennent de plus en plus ce que l'on appellerait chez nous des "barbouzes", des paramilitaires engagés en douce par Oncle Sam.
Un enlèvement va tout faire basculer. On retrouve quelques personnages du précédent opus mais, surtout, on comprend qu'on ne peut se fier à personne... ou presque. Reste à savoir qui va trahir qui, et comment. Cela devient un jeu du chat et de la souris, dans lequel un traqueur peut se retrouver traqué à son tour... et réciproquement.
C'est très bien interprété, notamment par Benicio del Toro et Josh Brolin (aussi à l'affiche de Deadpool 2 et de Avengers - Infinity War). La gamine n'est pas mal, avec du tempérament... C'est surtout un petit canon en puissance. Ah, les directeurs de casting...
Quelque part entre le Traffic de Soderbergh et le Léon de Besson, ce film d'action remplit très bien son office, grâce notamment à une photographie superbe, des décors impeccables et une musique d'accompagnement parfaitement placée. (On la doit à Hildur Gudnadottir, qui avait travaillé sur Hijacking.)
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jeudi, 28 juin 2018
Retour à Bollène
J'ai failli passer à côté de ce petit film sorti le mois dernier. C'est une fiction à caractère autobiographique, le réalisateur Saïd Hamich (producteur entre autre de Much Loved) ayant passé une partie de sa jeunesse à Bollène, une petite ville du département du Vaucluse (en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur) :
L'intrigue repose sur des contrastes. La ville elle-même est partagée entre l'image "vieille France" et proprette qu'elle veut donner (à travers ses dirigeants de la Ligue du Sud) et la présence d'une forte communauté d'origine maghrébine, précarisée.
La famille du héros Nassim est aussi le siège de divisions. La père a eu au moins deux épouses différentes (en même temps). On y parle deux langues (voire trois avec l'anglais) : l'arabe dialectal (dominant chez les parents) et le français (courant chez les enfants). Les premiers rêvent de repartir "au pays" (c'est-à-dire au Maroc), les seconds de s'en sortir, en France.
Le héros lui-même est une contradiction vivante : c'est un fils de la cité qui a réussi à l'école, puis à Paris et enfin aux Emirats arabes unis. D'un côté, il est très bien inséré dans le monde global, parle couramment anglais (langue qu'il préfère utiliser à Dubaï plutôt que l'arabe, avec le chauffeur de taxi), mais ressent le besoin de se ressourcer à Bollène. Pourtant, tout l'oppose à sa famille. Il a réussi, alors que les autres galèrent. Il n'est pas religieux, boit de l'alcool et goûte les concerts de musique classique (ainsi qu'Alain Bashung), alors que ceux qui sont restés en France sont tentés par le repli islamo-conservateur. De surcroît, il a épousé une non-musulmane, une Américaine, qui trouve ce coin de France très "provincial"... voire un peu puant, quand elle entend les propos du maire.
Celui-ci connaît très bien le héros, qu'il a eu comme élève alors qu'il était enseignant dans le lycée public, un enseignant connu pour ses opinions de gauche... Le voilà devenu chantre de la droite identitaire. (Dans la réalité, la commune est gérée par le couple Bompard, issu du FN.) Les retrouvailles entre les deux hommes ne manquent pas de saveur, même si ce n'est pas super bien joué. Je trouve qu'Anas El Baz est plus expressif quand il ne parle pas ou quand il débite juste des monosyllabes. Il a du charisme, mais n'est pas très à l'aise avec les longues répliques.
Signalons que c'est bien filmé, avec de jolies scènes de nuit... et une belle musique d'accompagnement, que l'on doit à Pauline Rambeau de Baralon. Je conseille vivement cet essai pseudo-autobiographique, qui pose de bonnes questions sur l'identité, en évitant les idées préconçues.
16:37 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société, politique
mercredi, 27 juin 2018
Sans un bruit
Je ne vais plus trop voir les films d'épouvante, sauf s'ils semblent se distinguer par un soupçon d'originalité (une denrée rare dans les productions de ce genre, qui, en général, se contentent de recycler du matériau ancien, avec un poil de technologie). Il y a deux ans, je m'étais laissé tenter par The Witch. Ici, outre l'argument principal (ne pas faire de bruit pour échapper aux monstres), c'est l'affiche qui m'a attiré, avec la charmante Emily Blunt (vue récemment dans Edge of tomorrow, Sicario et La Fille du train) et la jeune pousse Millicent Simmonds, remarquée dans Le Musée des merveilles.
Autant le dire tout de suite, cette histoire, pour originale qu'elle soit, est nourrie de clichés. Certaines péripéties se voient venir à des kilomètres, comme le gamin avec son avion à piles, le coup du clou dans l'escalier ou encore l'usage qui va être fait d'un fusil. S'ajoute à cela une certaine tendance à abuser du "juste à temps".
Et pourtant... j'ai trouvé cela prenant. C'est d'abord dû à la qualité de l'interprétation, celle d'Emily Blunt en tête. Millicent est aussi très bien, dans un rôle moins lisse que dans le film qui l'a révélée. C'est une pré-adolescente un brin rebelle, mal dans sa peau, mais qui va jouer un rôle clé dans l'intrigue.
Cela se passe dans un futur proche. De redoutables extraterrestres (des sortes d'hommes arachnoïdes) ont débarqué aux Etats-Unis sur Terre... et ils ont bigrement faim. Ils sont rapides, cruels, carapaçonnés... mais aveugles. Ils se guident en se fiant à leur ouïe ultra-développée. C'est leur point fort... et cela pourrait devenir leur point faible.
On suit une famille de rescapés (un couple avec trois gosses). Les parents sont très ingénieux. Ils ont développé une série de stratagèmes pour ne pas éveiller l'attention des envahisseurs omnivores. C'est là que naît la tension, parce qu'évidemment, il est impossible à une famille normalement constituée de vivre au quotidien sans produire le moindre bruit. Cette famille-là bénéficie quand même d'un atout : elle a appris à vivre avec l'infirmité dont souffre la fille aînée, ce qui lui a été d'une grande utilité lors du débarquement des visiteurs affamés.
Au niveau du son, on a veillé à alterner les scènes quasi-silencieuses avec celles où l'on entend de la musique d'accompagnement et celles où l'on perçoit des bruits (plus ou moins naturels). Cela contribue à rendre le film facile à suivre.
La conclusion est toutefois abrupte. Je suis un peu resté sur ma faim, d'abord parce que j'aurais aimé en savoir davantage sur les circonstances de l'arrivée des extraterrestres. Cela reste néanmoins un spectacle tout à fait correct.
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mardi, 26 juin 2018
Une année polaire
Cette fiction à caractère documentaire est signée Samuel Collardey, auquel on doit notamment Comme un lion et L'Apprenti. Comme dans ce dernier film, le héros (ici Anders, jeune instit) joue son propre rôle, dans une histoire qui, si elle s'inspire fortement de la réalité, a été inventée par l'auteur.
Le professeur des écoles danois, fils de paysans (peu désireux de prendre la suite de ses parents), décide de tenter sa chance au Groenland, où trois postes sont libres. On lui suggère de choisir celui de Nuuk (sur la côte ouest), le chef-lieu où se concentre un tiers des quelque 55 000 habitants du gigantesque territoire (et où l'on trouve toutes les commodités). Mais il lui préfère le village de Tiniteqilaaq, situé sur la côte est, la plus sauvage :
La rencontre est un petit choc culturel. Le jeune homme va en baver, entre des enfants récalcitrants, des parents absents (pour des raisons culturelles que l'instit va mettre du temps à comprendre), une population au mieux indifférente (qui le voit comme un colon)... et des conditions matérielles pas idéales. Il est un peu dans la situation d'enseignants français métropolitains, qui demandent une mutation outre-mer sans y être toujours bien préparés. Pour le public francophone, il est important de signaler que deux sous-titrages différents sont utilisés, le blanc pour la traduction du danois, le jaune pour celle du dialecte inuit.
L'intrigue nous fait donc suivre le professeur des écoles, un bon gars, (trop) gentil, souvent maladroit, qui tente de s'acclimater à la vie du village. Le sentier n'est pas pavé de roses mais, parfois, le jeune homme reçoit un coup de main. C'est son implication personnelle et son empathie qui vont lui permettre de gagner progressivement sa place.
Entre temps, on aura eu droit à de magnifiques vues du territoire, du ciel (ah, les aurores boréales...), de la neige, de la glace et de l'eau. (Je pense que c'est encore plus beau que dans Le Voyage au Groenland, sorti il y a un an et demi.) L'aspect documentaire est renforcé par la description d'activités traditionnelles : la chasse, la pêche, le dépeçage... et la conduite d'un traineau. L'une des plus belles séquences voit un groupe de personnages partir à la chasse, se faire prendre dans une tempête de neige, construire un igloo de fortune... et croiser une maman ours avec ses petits. J'ai aussi été particulièrement attendri par les chiens.
Bref, c'est un très bon film, particulièrement rafraîchissant en ce début d'été.
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lundi, 25 juin 2018
Bienvenue en Sicile !
Une fois n'est pas coutume, je trouve le titre français meilleur que l'original (At War for Love ou In Guerra per amore), que l'on pourrait traduire par "A la guerre par amour". Celui-ci fait allusion à l'histoire d'amour contrariée qui sert de squelette à l'intrigue, alors que le titre français évoque, sur le ton de la comédie, le débarquement des Américains en Sicile, en 1943.
C'est donc d'abord une comédie à l'italienne, avec ses caricatures, son exubérance, sa joie de vivre (et cette langue si musicale). Arturo le charmeur sans le sou rêve d'épouser la belle Flora, que son oncle envisage de marier au fils de l'une de ses relations. On est dans le petit monde des Italo-américains new-yorkais, limite (voire franchement) mafieux. Or, à la même époque, les Alliés préparent l'opération Husky. Du côté américain, on compte s'appuyer sur les liens qui existent entre certains immigrés et le pays d'origine de leurs parents. D'ailleurs, le propre père de Flora vit encore là-bas. Sa bénédiction serait bien utile à Arturo pour empêcher le mariage arrangé par l'oncle. Mais le (possible) futur beau-père de Flora possède lui aussi des relations dans son pays natal. Il va tenter de contrecarrer le projet du rival de son fils.
L'aspect comédie est renforcé par la truculence des villageois qui vont voir débarquer les Yankees. Il y a cet étrange duo, composé d'un aveugle et d'un boiteux, qui seront mêlés à la plupart des péripéties siciliennes. Il y a ce père de famille, dont le fils porte l'uniforme italien (fasciste) et qui garde religieusement une statue du Duce dans un placard. Une intense rivalité l'oppose à sa voisine qui, au moindre bombardement, sort mettre à l'abri une statue de la Vierge. Il est aussi souvent question d'ânes, des vrais, des symboliques... et ceux d'une chanson pour enfant, à laquelle un garçon est particulièrement attaché. C'est l'un des fils rouges de l'intrigue, avec une photographie d'amoureux (maladroitement) prise devant un pont new-yorkais. Cet ancêtre du selfie devient le running gag de l'histoire.
Et puis il y a ces trognes de mafieux. Ah, pour sûr, ils sont gratinés ! Le chef local est une pourriture débonnaire et ventripotente. Ses sbires portent d'horribles moustaches et froncent les sourcils. Vous avez compris que l'on rit souvent à cette comédie... avant que le ton ne change, dans le dernier tiers de l'histoire. Celle-ci s'appuie sur des faits réels. Le gouvernement américain, soucieux de se ménager des soutiens sur place, a conclu un pacte avec le chef mafieux Lucky Luciano. Résultat : le débarquement allié s'est très bien passé (avec peu de pertes). En contrepartie, les conquérants du jour vont confier les clés du pouvoir à des truands, certains se parant des couleurs d'un nouveau parti tout propre, la Démocratie chrétienne.
C'est l'une des forces de ce film (hélas passé quasi inaperçu) que de parvenir à mêler une bluette sentimentale (inspirée de la commedia dell'arte) et une réflexion politique sur un sujet qui a, aujourd'hui encore, un impact sur la société italienne.
00:54 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 23 juin 2018
Manifesto
C'est du cinéma expérimental. Le réalisateur a voulu mettre en scène une douzaine de textes littéraires engagés, des manifestes artistico-politiques. Pour cela, il a créé autant d'historiettes, dont l'héroïne est toujours incarnée par la même actrice, Cate Blanchett. Celle-ci s'est mise dans la peau d'une clocharde, d'une chercheuse, d'une employée de déchetterie, d'une mère ultra-conservatrice, d'une tradeuse, d'une punk, d'une présentatrice de télévision, d'une reporter, d'une chorégraphe, d'une marionnettiste, d'une oratrice funèbre, d'une organisatrice de soirées "prout prout" et d'une professeure des écoles.
Chaque séquence se veut l'illustration du propos sur le fond, mais parfois aussi sur la forme. Ainsi, le discours marxiste dénonçant l'art bourgeois est plaqué sur une scène montrant une clocharde traversant un site industriel à l'abandon, d'autres femmes (âgées et riches) s'amusant à tirer des feux d'artifice à quelques pas de là. Mais la forme reste classique.
La suite a de quoi déprimer. Les extraits des mouvements dadaïste, surréaliste et futuriste dépeignent un monde en pleine décrépitude, dont il faudrait quasiment faire table rase... et il m'a semblé que le film était parfois (volontairement ?) en contradiction avec ce qu'il défendait. Ainsi, à plusieurs reprises, il est dit qu'il ne faut plus faire référence aux oeuvres du passé... et voilà-t-y pas que, dans la séquence de la chercheuse, l'héroïne se retrouve dans une pièce dont le décor est composé de trompe-l'oeil géométriques, avec, au centre, un grand monolithe noir. (Il s'agit bien entendu d'une allusion à 2001, L'Odyssée de l'espace, de Stanley Kubrick.) Ceci dit, il est quand même troublant que certains textes écrits il y a 80-100 ans fassent autant écho à notre époque.
Vers la fin, il est question de Jean-Luc Godard et du Dogme (Lars von Trier). L'artiste est censé-e s'effacer derrière son oeuvre et ne pas la signer. Peu de temps après, on pourra constater que le générique de fin commence par les noms de Cate Blanchett et Julian Rosefeldt...
En changeant de séquence, on passe parfois d'un extrême à l'autre, entre ceux qui finissent par affirmer que l'art n'existe plus et ceux qui pensent (pour différentes raisons) que tout peut être art. On en arrive fort logiquement à l'art conceptuel, mis en scène... et démonté au cours d'un faux journal télévisé, plein de malice, dans lequel l'éblouissante Cate incarne à la fois la présentatrice permanentée et la journaliste en extérieur, sous la pluie. Le but de la séquence est de dénoncer le toc, le prétentieux...
Si on ne goûte guère les débats intellectuels autour de l'art et de sa place dans la société, on peut se contenter de jouir de la performance de l'actrice... surtout quand on sait que l'ensemble a été tourné en moins de deux semaines. Rien que pour cela, c'est un film à voir.
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mercredi, 20 juin 2018
Avengers - Infinity War
Je me suis finalement décidé à voir la grosse machine hollywoodienne, censée être le couronnement de dix ans de remise à jour de l'univers de super-héros marvelliens. J'ai raté plusieurs épisodes en cours de route (concernant Captain America, Spider-Man, Black Panther... et le précédent Avengers), mais j'ai pu suivre sans problème l'intrigue.
C'est d'abord un bon film d'aventures, qui suit un schéma rôdé jadis par les productions Lucasfilm : la mise en parallèle de plusieurs fils narratifs, liés les uns aux autres, qui finissent par se rejoindre. L'un de ces fils est constitué par les pérégrinations de Thor (dont le personnage a acquis une épaisseur qui n'est pas que physique), en compagnie d'une partie des Gardiens de la galaxie (mes petits chouchous). L'autre partie de l'équipe va très vite se frotter au méga-hyper-giga-super vilain Thanos... avant de tomber sur Iron Man et Spider-Man, qui font cause commune avec Docteur Strange. De son côté, Hulk va retrouver Captain America et Black Panther (entre autres).
Tout ce beau monde doit donc se coltiner Thanos et ses affidés. Je reconnais que ce personnage contribue à l'intérêt de l'intrigue. Ce n'est pas un vulgaire tyran génocidaire. Il a une conception "réaliste" (je dirais plutôt cynique) de la vie des peuples. En massacrer une partie permet de sauver l'autre. Il ne cherche même pas l'enrichissement ou l'accumulation de conquêtes féminines. Sur le fond, c'est effrayant, mais c'est mis en scène avec (une relative) subtilité.
Le problème est que l'ensemble a beau être assaisonné d'humour, le gros du film est constitué de bastons plus ou moins numériques, parfois très proches du jeu vidéo. (Ce n'est pas un compliment.) De plus, certains acteurs ne m'ont pas paru très convaincants... au premier rang desquels je place Chris Pratt (le moins bon des Gardiens) et Mark Ruffalo (qui fait pitié). Et puis le vieux cinéphile que je suis en a un peu marre de ces dialogues creux dont l'objet est de faire comprendre aux spectateurs que le sort du monde dépend d'une boule de feu, d'une toile d'araignée ou d'un énorme pain dans la gueule...
Ceci dit, comme c'est bien foutu, cela se regarde sans déplaisir... mais figurez-vous qu'il y a une suite ! Déjà, au cours du film, on comprend (notamment grâce à Strange) que ce que l'on voit n'est qu'une version de l'histoire. Il va donc falloir patienter un peu pour assister à la suite ou, si vous préférez, à la fin alternative, une trèèèèès longue fin, puisqu'elle promet de durer plus deux heures.
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mardi, 19 juin 2018
La Révolution silencieuse
Cette "salle de classe silencieuse" (titre originel, en allemand) est celle de lycéens de RDA (l'Allemagne communiste), sur le point de passer leur Abitur (baccalauréat), en 1956. Un jour, par solidarité avec les Hongrois révoltés contre la domination soviétique, ils décident de se taire pendant deux minutes, en cours d'histoire. Ce battement d'ailes de papillons va déclencher une tempête politique.
Ce n'est pas la première fois que le cinéma allemand se lance dans l'analyse de la période de Guerre froide. Les cinéphiles se souviennent de l'excellent La Vie des autres, en 2007. Plus récemment, on a eu droit à De l'autre côté du mur (dont l'actrice principale est présente ici) et D'une vie à l'autre. L'originalité du film est de se situer avant la construction du Mur de Berlin, quand seuls des contrôles policiers séparaient les deux parties de la ville.
L'univers adolescent est bien restitué, montrant des garçons qui cherchent à voir des femmes nues et des couples qui se forment, avec la maladresse des premières amours et des malentendus. L'habileté du scénario consiste à intégrer l'aspect sentimental à l'intrigue politique. On est visiblement dans un lycée au recrutement populaire (et provincial), avec un public mélangé, puisque les enfants d'un vétérinaire et le fils d'un membre éminent du conseil municipal côtoient des rejetons d'ouvriers. Compte tenu de la relative uniformisation vestimentaire qui régnait à l'époque, il n'est pas facile de les distinguer à leur apparence.
Les auteurs ont aussi voulu éviter le film uniquement à charge. D'un côté, ils montrent quand même que ce pays dirigé par d'anciens opposants au nazisme est devenu une prison pour une grande partie de sa population (la Stasi se comportant quasiment comme la Gestapo). D'un autre côté, les défenseurs du régime communiste (et contempteurs de la démocratie bourgeoise, assimilée au fascisme...) ont voix au chapitre. Concernant l'éducation, le propos n'est pas sans faire écho à notre époque, où se pose la question de la réussite scolaire des enfants des catégories populaires.
Mais il s'agit surtout de l'histoire d'une rébellion pacifique, celle de lycéens en quête d'absolu, mais auxquels on va tenter d'imposer des préoccupations plus terre-à-terre. Le harcèlement moral qu'ils subissent est particulièrement bien mis en scène. (Le réalisateur, Lars Kraume, est aussi l'auteur de Fritz Bauer, un héros allemand, dans lequel joue celui qui incarne le père de l'un des lycéens) Cela fait remonter les vieilles histoires du passé, celui de l'Entre-deux-guerres (avec les allusions au Front Rouge, auquel a appartenu le père de l'un des élèves), celui de la Seconde guerre mondiale... et celui, plus récent, de la révolte ouvrière de Berlin-Est.
C'est dire la richesse des thématiques abordées par ce film qui, de surcroît, s'inspire d'une histoire vraie. (Restez pendant le générique de fin.) Alors, même si c'est parfois un peu mélo, j'ai beaucoup aimé, tant les acteurs sont convaincants et l'arrière-plan historique soigné.
21:16 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, histoire, film, films
Se protéger de Facebook
Si l'on n'est pas adepte de l'attitude radicale qui consiste à quitter définitivement le célèbre réseau social, il existe d'autres moyens de se prémunir de la présence envahissante de la firme transnationale. L'un d'entre eux est proposé par la fondation Mozilla, qui édite le célèbre navigateur Firefox.
Depuis peu, elle propose une nouvelle extension, appelée "Facebook Container", qui met des bâtons dans les roues du système de pistage du réseau social, devenu expert dans l'exploitation des données personnelles que les internautes lui fournissent... gratuitement.
Une fois installée, l'extension est visible dans la barre d'adresse, lorsque l'on se connecte au réseau social :
09:45 Publié dans Blog, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, médias
lundi, 18 juin 2018
La chapelle des brebis
C'est d'un édifice peu connu des Ruthénois qu'il va être question : la chapelle Notre-Dame de Pitié, qui dépendait autrefois de la Chartreuse, dont les bâtiments ont été récupérés par l'Etat lors de la Révolution pour devenir ensuite, sous l'Empire, le siège du haras de Rodez, hélas fermé depuis l'an dernier.
Les touristes ont plus de chance de connaître l'édifice que les Ruthénois, puisqu'il fait partie du circuit patrimonial proposé aux visiteurs du chef-lieu aveyronnais (avec le numéro 29). Pour les locaux, le lieu est ouvert au moins le 13 de chaque mois. Pendant des années, c'est un employé municipal féru d'archéologie, Roger Trémouilles, qui a veillé sur l'édifice.
Ce samedi 16 juin 2018, exceptionnellement, la chapelle a été ouverte au public, dans le cadre d'une manifestation agricole : la (mini-)transhumance des brebis du lycée agricole La Roque, situé sur la commune voisine d'Onet-le-Château.
La première partie du trajet a mené les ovins du gué de Salelles (numéro 1 ci-dessous) à la place du Bourg (numéro 2), en passant par Layoule, le carrefour Saint-Cyrice, la rue Béteille et la place d'Armes.
Le parcours du petit troupeau (une cinquantaine de bêtes) ne fut pas de tout repos. Le long des berges de l'Aveyron, la tendance des brebis à se précipiter brusquement dans une direction inattendue était facilement gérable. C'est devenu un peu plus délicat dans la montée de la rue Béteille, où les passants et les riverains ont eu droit à un étonnant spectacle. (Un des animaux se serait blessé lors d'une bousculade à l'entrée d'une boulangerie-sandwicherie. Un peu de sang a coulé, mais ce serait sans gravité.)
Arrivées place du Bourg, les brebis ont été parquées dans un enclos amovible, où elles ont rapidement été entourées d'une foule considérable... et mitraillées par les téléphones portables. Durant presque deux heures, elles ont pu se reposer et se désaltérer, pendant qu'une animation était proposée à proximité, avec des oies et des chiens de berger.
C'est en fin d'après-midi que les brebis se sont remises en marche, direction l'avenue Victor-Hugo puis le chemin de la Boriette, où les attendaient de vertes prairies, jouxtant la chapelle Notre-Dame de Pitié (numéro 3 ci-dessous).
A l'intérieur de celle-ci, on peut voir un fort joli plafond étoilé (de style marial, je crois) :
Plusieurs statues sont également visibles, certaines plus anciennes que d'autres. Ainsi, l'une d'entre elles représente Jeanne d'Arc. C'est un modèle de série qui doit dater du début des années 1920, peu de temps après la canonisation de la Pucelle (et la création d'une seconde fête nationale, celle du patriotisme).
Une autre sculpture est beaucoup plus ancienne, puisqu'elle date du XVIe siècle. Il s'agit d'une Vierge à l'enfant, classée monument historique. Mais je ne me souviens pas si elle se trouvait dans la chapelle lorsque je l'ai visitée.
17:39 Publié dans Aveyron, mon amour, Histoire, Jeanne d'Arc | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, médias, presse, journalisme, occitanie, société, culture
dimanche, 17 juin 2018
Le Cercle littéraire de Guernesey
... et de la tarte aux pelures de pommes de terre, puisque tel est le nom complet du club éponyme, composé d'habitants de l'île anglo-normande de Guernesey, qui fut occupée par l'armée allemande durant la Seconde guerre mondiale.
Il y a donc un aspect historique à l'intrigue. Pour les Britanniques, l'Allemand est surtout vu comme l'envahisseur que l'on repousse ou celui que l'on va combattre en France. A Guernesey, la population restée sur place a dû cohabiter, tant bien que mal, avec un occupant qui a pu se révéler odieux... ou sympathique. C'est ce que l'on découvre à la suite d'une série d'allers-retours entre les années 1940-1944 et l'après-guerre.
A Londres, une jeune écrivaine (Lily James, vue récemment dans Baby Driver), qui commence à rencontrer le succès, échange des lettres avec un habitant de l'île. Grâce à lui, elle découvre une partie de l'histoire des habitants, mais elle meurt d'envie d'en savoir plus, pensant de surcroît en faire le sujet d'un article. Dans le même temps, sa vie personnelle est sur le point de basculer, en compagnie du dévoué mais très pressant Mark, un riche et séduisant Américain.
Le séjour de Juliet sur l'île va tout changer. Elle est d'abord surprise de ne pas être aussi bien accueillie que ce qu'elle escomptait. C'est l'occasion pour le réalisateur Mike Newell (auteur jadis de Quatre Mariages et un enterrement) de nous dresser le portrait ironique de la vie provinciale sur cette île reculée, avec un entrelacs de relations humaines complexes, ses petits secrets et ses jalousies rances.
Les personnages sont très bien campés, de la logeuse bigote au postier débonnaire, en passant par la veuve acariâtre, la vieille fille un peu fofolle et Dawsey, le charmant éleveur de cochons, qui ne laisse pas l'héroïne indifférente. Sur le groupe plane l'esprit de la plus rebelle de la bande, Elizabeth, dont l'absence est inexpliquée.
Mêlant comédie romantique et drame historique, le film est subtil, emprunt de douceur. Il est furieusement moderne, parce que son intrigue suit les actions de deux femmes indépendantes, l'écrivaine et la rebelle, la Londonienne et la Guernesiaise, les hommes jouant un rôle plus secondaire. Il est toutefois d'un autre temps par la manière dont les sentiments sont exprimés (à entendre de préférence en version originale sous-titrée). C'est aussi un hommage à la littérature et à la lecture, à travers ces personnages ordinaires, qu'un festin de porc grillé va réunir, mais que la mort pourrait finir par séparer.
C'est l'une des excellentes surprises du moment (avec Trois Visages).
19:55 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 16 juin 2018
Comment tuer sa mère
Cette comédie franchouillarde est l'adaptation d'une pièce de théâtre, dans laquelle le rôle principal était interprété par Eva Darlan. Dans le film, c'est Chantal Ladesou qui reprend les rênes, avec un bel entrain, ma foi. Derrière la caméra se trouve David Diane, qui a notamment travaillé sur Babysitting (en tant que premier assistant-réalisateur). Comme on trouve aussi au générique Vincent Desagnat, Julien Arruti et Joséphine Drai, certains ont franchi le pas et parlé de "la bande à (Philippe) Lacheau", bien que celui-ci ne soit pas lié au film. (Il travaille actuellement sur une adaptation du manga Nicky Larson.)
L'intrigue fonctionne sur la base d'une opposition, entre une mère égocentrique et méprisante (bref, castratrice) et des enfants complexés (à divers degrés), qui vont se rebeller. C'est incontestablement Chantal Ladesou qui s'en sort le mieux. Face à elle, en général, Desagnat tient la route, mais on ne peut pas en dire autant des deux autres. Je crois que le moins crédible est Julien Arruti. En fait, le problème vient que trop de scènes sont approximatives. Il aurait fallu réaliser plus de prises, faire davantage rejouer les comédiens... et améliorer certains dialogues.
Ceci dit, je reconnais que le film contient quelques moments savoureux et des répliques qui font mouche. J'ai souri et parfois franchement ri. Mais c'est trop inégal, mal maîtrisé. Il reste toutefois une (contre)morale, que la mère tente d'inculquer à ses enfants : l'aîné chef d'entreprise perd sa vie à vouloir la gagner, la cadette se meurt dans une vie familiale peu épanouissante et le benjamin passe à côté du bonheur en se mentant sur son identité sexuelle.
A tenter si vous êtes un-e inconditionnel-le de l'actrice principale ou un jour de Fête du cinéma.
12:07 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 15 juin 2018
Ocean's 8
Steven Soderbergh a décidé de produire une version "féminine" d'Ocean's 11 (prolongé par Ocean's 12 puis Ocean's 13), avec tout plein d'actrices connues, du strass, des paillettes, des "pipoles", de la frime, de la bonne zique... et (surtout) des arnaques.
La première partie raconte la formation de l'équipe, sous la houlette de Debbie, supposée sœur de Danny (Sandra Bullock, très à son aise, en dépit d'un visage dont certains traits ne sont pas sans évoquer Michael Jackson... après le bistouri), et de son acolyte Lou (Cate Blanchett, délicieuse en garçon manqué, portant pantalon et chevauchant moto). Chaque recrue est dotée de qualités particulières. Au niveau de la distribution, on a mélangé les femmes d'expérience (Helena Bonham Carter et Sarah Paulson) aux jeunes pousses talentueuses (l'inconnue Awkwafina et Rihanna, plus convaincante ici en hackeuse qu'en pin-up dans Valérian).
La deuxième partie montre les préparatifs de l'arnaque... enfin, pas tous. Mais je me garderai bien de révéler ce qui est -provisoirement- caché aux spectateurs, histoire de préserver l'effet de surprise. Au niveau du scénario, on passera sur quelques facilités, indispensables si l'on veut que le "casse" se déroule bien (pour nos cupides héroïnes). C'est très bien filmé, par le réalisateur de Free State of Jones et de Pleasantville. Les dialogues claquent. (A Rodez, quelques séances sont proposées en version originale sous-titrée.) On ne s'ennuie pas.
La troisième partie voit le projet se réaliser... pas tout à fait comme prévu d'ailleurs. Cela pimente un peu l'action, d'autant qu'un autre personnage féminin voit son rôle augmenter : il s'agit de Daphne Kluger, interprétée par la délicieuse Anne Hathaway.
A l'image des films avec George Clooney, c'est brillant et clinquant, sans être enthousiasmant. On passe un bon moment, ce qui n'est déjà pas si mal.
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jeudi, 14 juin 2018
Trois Visages
J'ai un faible pour le réalisateur Jafar Panahi. Quelque part entre Buster Keaton et Droopy, il réussit à mener sa barque, malgré les tracasseries des culs-bénis iraniens qu'il s'ingénie à titiller. Ces dernières années, on l'a vu à l'oeuvre dans Le Miroir et surtout dans l'excellent Taxi Téhéran.
Le film présenté cette année à Cannes (où il a reçu le prix du scénario) se situe dans cette lignée. Panahi a tourné avec une économie de moyens : un ordiphone (utilisé par la jeune femme qui appelle au secours), une mini-caméra fixée à l'avant de la voiture et une autre, plus haut-de-gamme, manipulée par un technicien (ou Panahi lui-même).
L'action se déroule loin de Téhéran (et de la police du régime des mollahs) dans le nord-ouest de l'Iran, où vit une population turcophone :
Pour un public peu attentif, cela n'a guère d'importance. Ceux qui tendent l'oreille s'apercevront que les sonorités changent selon la personne qui parle. Les villageois s'expriment majoritairement en turc, les citadins en farsi (persan). Le réalisateur est d'ailleurs originaire de cette région, berceau de sa famille.
Cela conduit les spectateurs à se poser des questions. Est-ce bien une fiction qui se déroule sous leurs yeux ? Ne s'agit-il pas plutôt d'un documentaire ? Ou bien le réalisateur ne mêle-t-il pas les deux ? L'actrice principale, qui joue son propre rôle (celui d'une comédienne célèbre dans tout le pays, qu'une jeune femme a appelée au secours), se demande dans quelle galère elle s'est embarquée, d'autant plus qu'elle n'a pas la même vision des choses que Panahi. Elle en vient même à contester son expertise de la vidéo qui a été envoyée par téléphone, vexant le réalisateur, qui sort de la voiture et continue à pieds, boudeur !
C'est la première séquence qui a tout déclenché. Une jeune femme (visage n°1) se filme dans un endroit isolé et vide son sac. Elle était sur le point de réaliser son rêve (intégrer la très sélective école des Beaux-Arts de Téhéran... une sacrée performance pour une fille de paysans azéris), mais voilà que sa famille et le village se liguent contre elle, la traitant d'écervelée. On veut la forcer à se marier très vite. La séquence, filmée au téléphone, est d'un réalisme troublant.
La suite est une conversation en automobile, entre la fameuse actrice (visage n°2) et Panahi, dont la voix vient la plupart du temps du hors-champ. C'est beaucoup moins intéressant. Il convient cependant de ne pas négliger cette partie : l'image que l'on a du personnage de l'actrice va changer par la suite.
C'est en s'approchant du village où habite la jeune femme que le duo fait diverses rencontres. Il y a tout d'abord un sympathique passant, qui lui fait utiliser un étrange code, à l'aide du klaxon de l'automobile. Il y a ensuite le grand-père accueillant, dont la famille semble célébrer un événement. Puis c'est au tour d'une vieille femme qui sent sa fin approcher... et qui commence à s'habituer à sa future nouvelle demeure...
C'est à ce moment qu'on se rend compte que c'est trop bien joué pour être parfaitement naturel. Panahi et l'actrice sont accueillis comme des rois par des villageois qui croient d'abord qu'ils sont venus pour les aider à rétablir le gaz ! Dès qu'il est question de la jeune fille rebelle, les visages se ferment. Aussi bienveillants soient-ils, les villageois ont une vision traditionaliste de la société, l'étudiante en arts rejoignant l'actrice dans la catégorie des quasi-prostituées... même s'ils admirent la vedette du petit écran.
Panahi et sa complice vont passer la nuit au village. Cela nous vaut un plan magnifique de la nuit tombant sur une misérable bicoque, où s'est réfugiée une ancienne actrice, mise au rancart après la Révolution islamique. On ne verra pas ce troisième visage, juste le personnage de dos, peignant dans un pré. Le fil est ainsi remonté, de la jeune "écervelée" à l'ancêtre qui a connu l'Iran au temps du Shah, la vedette actuelle permettant de tisser les liens.
On comprend que c'est une histoire engagée, de nouveau en faveur de la liberté des femmes. Incidemment, Panahi règle quelques comptes. C'est notamment le cas dans la séquence nocturne au village. L'actrice vedette est allée au café local pour téléphoner à la production du film dont elle a quitté le tournage pour partir à la recherche de sa jeune fan. C'est le moment où réapparaît le grand-père du début. Il invite l'actrice à boire un thé. S'engage alors une discussion à la fois sociologique et surréaliste autour d'un... prépuce ! C'est subtil et délicieux... et cela débouche sur une critique du régime iranien. Le grand-père se désole que son acteur fétiche (Behrouz Vossoughi) ne soit pas accessible (il vit exilé aux Etats-Unis). Il ne comprend pas que Panahi ne puisse pas le joindre (il lui est interdit de quitter l'Iran).
D'un point de vue visuel, le début m'est apparu assez cheap. Mais, dès que la caméra embarquée dans la voiture prend le dessus, les plans prennent une tout autre ampleur. Les vues nocturnes sont superbes. J'ai aussi encore en mémoire cette plongée sur la route sinueuse, où il peut se passer tant de choses.
C'est un film superbe, foisonnant, caustique... qui aurait peut-être mérité la Palme d'or.
01:40 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 13 juin 2018
Un billet pour la cathédrale
J'en ai appris une bien belle en lisant la presse aveyronnaise aujourd'hui (notamment La Dépêche du Midi) : la cathédrale de Rodez a son billet, d'une valeur de... 0 euro. Il s'agit bien entendu d'un gadget touristique, appelé aussi "billet souvenir", ce dernier mot figurant d'ailleurs à des dizaines d'exemplaires sur le billet en question :
En bas à droite figure la signature du chef d'entreprise qui a lancé l'idée de ce produit touristique, Richard Faille (auquel on doit aussi les médailles souvenirs, pour moi d'un intérêt moindre). L'objet est fabriqué en coton... et en France, d'après ce que garantit le site internet de l'entreprise.
D'ailleurs, le nom de l'imprimeur figure sur l'autre côté du billet. Il s'agit d'Oberthur Fiduciaire, lointain héritier de l'entreprise bretonne fondée au milieu du XIXe siècle, qui dut sa renommée aux tonnes d'almanachs et d'annuaires téléphoniques qui sortirent de ses locaux.
Cette partie du billet est illustrée de monuments européens (qui ont déjà eu droit à leur version du produit). On reconnaît, de gauche à droite, la Porte de Brandebourg (1), la Tour de Belem (2), le Colisée de Rome (3), la Tour Eiffel (4), la Sagrada Familia (5), le Manneken Pis (6) et, en filigrane, un demi-visage (7) faisant sans doute allusion à la Renaissance (à un tableau de Sandro Botticelli ou de Léonard de Vinci).
C'est sympatoche et cela ne coûte que deux euros. Voilà une excellente (et parcimonieuse) idée-cadeau pour la Fête des Pères !
22:31 Publié dans Aveyron, mon amour, Loisirs, Société, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, actualité, presse, médias, journalisme, occitanie
samedi, 09 juin 2018
Jurassic World - Fallen Kingdom
Environ trois ans après l'opus précédent (qui fut extrêmement rentable, à défaut d'être un grand film), revoilà les dinosaures créées/ressuscités, avec un nouveau réalisateur aux manettes. L'île sur laquelle on avait laissé les gros lézards connaît une intense activité volcanique, signe de son proche effondrement (l'une des grandes réussites du film). La question est : que faut-il faire des dinos ?
Mais, avant que l'on ne se lance dans cet intense débat existentiel (entre des bobos écolos et des militaires caricaturaux), une piquante introduction nous plonge dans un océan de références aux Dents de la mer. (Il est question d'humains qui explorent le fond marin et de gigantesques portes que l'on ferme... ou pas.) On sent à peu près tout arriver à dix kilomètres... sauf l'ultime péripétie, qui associe horreur et humour, la marque de fabrique de cet épisode très réussi sur le plan formel.
Les effets spéciaux sont vraiment excellents (vus en 2D). Les grosses bêtes sont criantes de vérité et l'on a parfaitement su gérer leurs interactions avec les acteurs en chair et en os. Notons que l'on a doté certains dinosaures d'attitudes qui les font ressembler à des mammifères. Je ne suis pas certain que cela soit conforme à l'histoire naturelle... mais, après tout, on n'est pas là pour rédiger une thèse de troisième cycle.
Les spectateurs familiers du genre savent que les dinos (à l'image du grand requin ou des aliens) sont des succédanés de tueurs en série... d'autant plus que les derniers modèles "mis en service" réfléchissent aussi bien (voire mieux) que des bipèdes. C'est une nouvelle fois l'occasion pour les scénaristes de fustiger les apprentis-sorciers de la science... et les milliardaires sans scrupules. Dans une production grand public, ce n'est pas désagréable.
Le problème est que les personnages humains sont peu convaincants C'est stéréotypé au possible. On retrouve le duo du précédent film, incarné par Bryce Dallas Howard et Chris Pratt, pas mauvais mais sans saveur. On leur colle une gamine entre les pattes... qui a dû être sélectionnée sur sa capacité à hurler de manière stridente. C'est in-sup-por-table ! De surcroît, on crée un faux suspens la concernant. A plusieurs reprises, elle échappe de justesse aux griffes du tout nouveau, redoutable et impitoyable Indoraptor. On sait bien qu'il ne va pas parvenir à la boulotter, hein !
Reste à savoir qui, parmi les nombreux seconds rôles et figurants, va servir de pâtée pour dinosaure. C'est un aspect de l'histoire qui a retenu mon attention, d'autant plus que c'est brillamment mis en scène, avec un zeste d'humour. Cela suffit pour passer un bon moment... et attendre la suite, hyper prévisible compte tenu du geste irresponsable commis par l'une des protagonistes à la fin.
13:24 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 08 juin 2018
Des urnes (faussement) catalanes
Bien qu'étant abonné au Monde, je rechigne un peu à lire le supplément du samedi, appelé "M Le magazine du Monde". La plupart des pages sont constellées de publicités chics et toc. Rares sont les articles réellement informatifs. Du coup, parfois, je me contente d'un survol... et il m'arrive de rater quelque chose.
Je m'en suis rendu compte récemment, en classant de "vieux" journaux, avant de les apporter à la borne de collecte. J'étais passé à côté d'un article fort intéressant, "Les urnes catalanes qui venaient du Nord". En réalité, la journaliste Sandrine Morel (qui avait sans doute en tête le roman -ou le film- L'Espion qui venait du froid) aurait dû intituler son article "Les urnes catalanes qui venaient d'Orient".
En effet, à la lecture de son papier, on découvre que les urnes en plastique qui ont été utilisées lors du référendum d'indépendance du 1er octobre dernier ont été fabriquées en Chine et ont été débarquées en Europe dans le port de... Marseille :
De là, elles ont gagné la région de Perpignan (dans les Pyrénées-Orientales), plus précisément la commune d'Elne d'où elles ont ensuite été expédiées clandestinement de l'autre côté de la frontière franco-espagnole :
Cette commune était déjà apparue au détour d'articles traitant de la crise catalane. C'est en effet dans une imprimerie située à Elne qu'ont été édités les bulletins du référendum, transportés ensuite en Espagne par le col du Perthus, en empruntant la départementale 900, plus discrète que l'autoroute A9 qu'elle double.
Je vois dans cette histoire une nouvelle confirmation que l'un des effets de la mondialisation est de favoriser les replis identitaires, l'égoïsme sacré des bourgeoisies locales. Au passage, rappelons que, si le référendum a débouché (à l'issue d'une campagne médiatique outrageusement dominée, en Catalogne, par les partisans de l'indépendance) sur la victoire écrasante du "oui" (à 90 %), cela représente moins de 39 % des inscrits.
Les élections législatives qui ont suivi ont confirmé la division des habitants de la Catalogne en deux camps quasiment équivalents : si les partisans de l'indépendance ont obtenu (de justesse) la majorité absolue des sièges, ils sont (légèrement) minoritaires en voix dans la Généralité. Si, en face, il n'y avait pas eu cet autocrate corrompu de Rajoy, mais un-e dirigeant-e pondéré-e et ouvert-e, la crise serait sans doute déjà résolue entre gens raisonnables.
La composition du nouveau gouvernement, présidé par Pedro Sanchez, me semble encourageante. Mais cet exécutif va devoir naviguer entre de multiples écueils, puisqu'il ne dispose pas vraiment de majorité stable aux Cortes (élus en 2016).
17:09 Publié dans Politique, Politique étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, actualité, presse, médias, journalisme
mercredi, 06 juin 2018
Foxtrot
J'ai enfin pu voir ce film, qui a débarqué à Rodez plus d'un mois après sa sortie nationale... Il est signé Samuel Maoz, auquel on doit l'excellent Lebanon, qui date de déjà presque dix ans. Sans surprise, le titre est à sens multiple : c'est le nom du poste de contrôle auquel des appelés du contingent israéliens sont affectés ; c'est évidemment aussi le nom d'une danse... et une métaphore de ce qui se passe (ce que l'on ne comprend pleinement qu'à la fin).
L'histoire est divisée en trois parties, complétées par un court épilogue. L'appelé du contingent Yonatan est le héros de la deuxième partie, qui répond à la première, où l'on voit principalement ses parents, incarnés par deux acteurs chevronnés, Lior Ashkenazi et Sarah Adler (vue il y a trois ans dans Self Made).
La première partie tourne autour du deuil. En dépit de quelques longueurs, j'ai été touché par le personnage du père, vraiment très bien interprété. Ce bloc de granit, peu expressif, masque des failles que la suite va nous faire découvrir. Vers la fin du premier tiers, un coup de théâtre survient, qui change le ton de l'histoire.
C'est à travers le fils que l'on va découvrir l'une des failles du père. Un soir, dans le container rouillé (et instable) qui sert de caserne aux appelés du contingent, le jeune homme raconte à ses camarades une stupéfiante anecdote, qui permet de surcroît de comprendre l'hostilité manifestée (dans la première partie) par la grand-mère vis-à-vis de son père.
Cette deuxième partie met en contact les soldats avec des Palestiniens (sans doute du Sud de Cisjordanie), qui empruntent une de ces routes réservées, dont l'armée israélienne garde la possibilité de bloquer la circulation. Dès la première scène, on comprend que c'est tendu entre les soldats et les adultes qu'ils contrôlent. L'abus de pouvoir n'est pas loin... mais c'est plutôt l'inexpérience et la maladresse qui sont à redouter.
C'est dans cette partie que la réalisation est la plus brillante. Je n'ai jamais vu un vieux poste de radio aussi bien filmé. J'ai aussi en tête la scène qui se conclut par le surgissement d'une canette de bière. Les plans sont remarquablement construits et la lumière est superbe.
Dans la troisième partie, on retrouve les parents, après une ellipse. Cette fois-ci, c'est sur la douleur de la mère que le réalisateur insiste. J'ai beau apprécier l'actrice, j'ai été moins touché. J'ai quand même aimé la scène qui voit intervenir une substance hallucinogène, à la grande surprise de la fille du couple qui débarque à l'improviste. Quant au père, il finit par faire une révélation qui éclaire les parties précédentes.
C'est vraiment un très bon film, pas toujours facile d'accès, mais parfois virtuose au niveau de la mise en scène.
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dimanche, 03 juin 2018
Opération Beyrouth
Le Liban sert de cadre à ce thriller politique, qui est aussi un peu un film d'espionnage. Derrière la caméra se trouve Tony Gilroy, auquel on doit notamment Michael Clayton, mais que l'on connaît surtout comme scénariste des Jason Bourne (et de Rogue One).
L'intrigue se déroule en deux temps, dans les années 1970 puis dans les années 1980. La première partie, assez brillante sur le plan formel, ressuscite la ville libanaise avant la guerre civile. A l'époque, on parlait du pays comme d'une petite Suisse du Proche-Orient. Voitures, vêtements et coupes de cheveux rétro sont de sortie...
Mais le drame n'est pas loin, qui va transformer le héros d'agent gouvernemental vibrionnant en commercial alcoolique et désabusé. C'est ainsi que l'on retrouve Mason Skiles une dizaine d'années plus tard. Dans le rôle, Jon Hamm (vu récemment dans Baby Driver) est excellent, même s'il nous ressert une énième version du mec brillant qui a perdu ses illusions, porté sur l'alcool fort, barbe de trois jours et sourire engageant à la clé. Il le fait très bien, quelque part entre Jeffrey Dean Morgan et Robert Downey Jr.
Il est entouré par une brochette de seconds rôles de très bonne qualité, avec Rosamund Pike et quelques vieux routiers comme Dean Norris, Shea Whigham et Jonny Coyne (ainsi que Leïla Bekhti, dans la première partie). A noter que, dans la version française, on n'a doublé que les dialogues en anglais, laissant les discussions en arabe sous-titrées.
Le scénario, en béton armé, s'inspire (sans la suivre de trop près) d'une histoire vraie, celle de l'enlèvement du chef de poste de la CIA à Beyrouth, William Buckley. Mais les auteurs ont choisi de changer partiellement l'arrière-plan. Le conflit israélo-palestinien (et ses multiples ramifications) prend le dessus sur le contexte strictement libanais. Cela conduit à minorer le rôle du Hezbollah et de la Syrie (dirigée par Hafez el-Assad, le papa de Bachar).
Mais l'on peut parfaitement ignorer ces considérations et se contenter de suivre un excellent suspens, sur fond de manipulations et de corruption.
12:03 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 01 juin 2018
Solo : a Star Wars story
Disney continue à exploiter le filon de La Guerre des étoiles, ici avec un épisode situé entre La Revanche des Sith et Rogue One, le précédent film dérivé de cet univers. On nous conte une partie de la jeunesse de Han Solo (adulte) et l'on nous révèle quelques-uns des secrets de la saga.
Ainsi, on découvre pourquoi il s'appelle ainsi. On assiste à sa rencontre avec Chewbacca, l'un des meilleurs moments du film, plein d'humour... et avec une scène très "intime" entre les deux personnages... On apprend enfin dans quelles circonstances Solo a piqué le Faucon Millenium à Lando Calrissian (Donald Glover, très bien). On comprend aussi pourquoi Calrissian est viscéralement attaché au vaisseau... et l'on "vit" de l'intérieur l'exploit qui l'a rendu célèbre, une course spatiale au travers d'un impressionnant maelstrom.
Les décors sont superbes (bien que pas toujours assez éclairés... je plains ceux qui l'ont vu en 3D). Les scènes d'action "dépotent" avec, en tête de liste, l'attaque du train double, virevoltante, comprenant l'intervention d'une bande de trafiquants concurrents de ceux auxquels Solo et "Chewie" se sont liés. (A noter l'excellente composition de Woody Harrelson, vu récemment dans La Planète des singes : suprématie et surtout 3 Billboards.)
C'est aussi assez drôle, avec notamment l'apparition d'un nouveau droïde (de sexe féminin), L3-37, qui a noué une relation très spéciale avec son maître Calrissian... mais qui est prête à tout plaquer pour lancer la révolte des robots !
Au niveau du sous-texte, je signale une dénonciation du pillage de l'Afrique par les firmes transnationales. (C'est suffisamment développé pour éviter d'avoir à se cogner l'intégralité de Black Panther.)
Bref, on ne s'ennuie pas, même s'il faut reconnaître qu'Alden Ehrenreich n'arrive pas à la cheville d'Harrison Ford. Il n'est pas mauvais, mais son interprétation n'est pas enthousiasmante. Il est vrai que les scénaristes ont voulu nous le montrer en évolution. On le rencontre jeune homme, un peu naïf. On le voit devenir de plus en plus débrouillard, mais pas encore cynique. (L'histoire d'amour ne m'a cependant pas transporté.) Le film s'achève d'ailleurs sans que toutes les ficelles aient été tirées... et l'on aperçoit, peu avant la fin, une vieille connaissance.
J'attends la suite !
16:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films