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mercredi, 30 octobre 2013

Turbo

   Au départ, je n'avais pas l'intention d'aller voir cette nouvelle animation de chez DreamWorks. Et puis j'ai croisé une collègue qui a coutume d'emmener sa progéniture voir ce genre de film. Tout comme moi, elle avait aimé le premier Cars (le second volet étant un peu moins réussi). Turbo lui a plu, alors qu'elle a été déçue par Planes.

   L'histoire démarre de manière comique dans ce jardin où une colonie d'escargots gère la récolte des tomates. La vie des gastéropodes est d'une monotonie affligeante : même les attaques foudroyantes des corbeaux sont intégrées dans le train-train quotidien. De son côté le héros, qui s'appelle en réalité Théo, rencontre quelques difficultés avec les solanacées les plus mûres... On notera aussi la présence d'un personnage négatif, celui d'un petit garçon très très con... mais un peu trop sûr de lui.

    Le schéma narratif est classique. L'individu qui se sent exceptionnel veut sortir de la routine dans laquelle son entourage est engoncé. Le film rend hommage à l'esprit d'initiative, au dépassement de soi et à l'amitié. Il est rempli de clins d'oeil cinématographiques. La séquence qui voit Théo acquérir ses super-pouvoirs est une référence évidente à Fast and Furious... ainsi (sans doute) qu'à Spiderman. Les courses automobiles m'ont fait immanquablement penser à Cars... et je me demande si la présence d'un avion un peu lourdeau, dans une scène, n'est pas une manière de se moquer de Planes.

   Heureusement, cette omniprésence des bagnoles est contrebalancée par un humour efficace. J'ai particulièrement aimé la mise en scène du contraste entre la perception (notamment de la vitesse) des escargots et la vision "objective" qui est donnée ensuite.

   Par contre, je n'ai guère apprécié de voir qu'encore une fois le méchant est un Français. Cela semble être une tendance lourde chez certains tâcherons d'outre-Atlantique. DreamWorks est même un récidiviste, puisque Madagascar 3 était marqué par la même francophobie stupide.

   Ici, elle est concentrée dans le personne de Guy La Gagne, champion automobile égocentrique, toujours vêtu de rouge :

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   C'est un mélange de Michael Schumacher (pour sa grande taille élancée et l'omniprésence du rouge) et d'Alain Prost (pour le visage aux traits marqués et la fierté tricolore, soulignée jusque sur le circuit d'Indianapolis) :

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   Observez bien le sourire de Guy La Gagne dans le film : c'est un décalque évident de celui d'Alain Prost. Le personnage est pourtant présenté au début sous un jour positif : c'est le modèle de Théo et il défend cet esprit d'initiative si cher aux auteurs. On s'aperçoit assez vite qu'il est surtout soucieux d'attirer les caméras et les photographes. Il devient un rival impitoyable pour Turbo... jusqu'au bout du bout !

   Si l'on supporte ces aspects déplaisants, on pourra jouir de la virtuosité de certaines scènes (notamment sur le circuit automobile) et goûter les interventions piquantes des acolytes de Turbo, les escargots (une bande de voyous sympathiques) comme les humains (pas des lumières, mais des gens à tempérament).

20:21 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 29 octobre 2013

Ma maman est en Amérique...

   ... elle a rencontré Buffalo Bill ! Tel est le titre complet de cette animation franco-luxembourgeoise, autobiographique, qui nous plonge dans la France des Trente Glorieuses. Le héros est un petit garçon, Jean, fils d'un chef d'entreprise surtout préoccupé par son travail.

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   Doté d'une imagination débordante, il s'invente des histoires. Il est très influencé par le cinéma américain... et les westerns spaghettis ! Il a un frère cadet, avec lequel il ne s'entend pas toujours très bien... et il regrette l'absence de sa maman. Il y a quand même une femme à la maison : la nounou, Yvette, à la fois inventive et patiente avec les enfants. Julie Depardieu lui prête sa voix, avec talent :

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   Mais la partenaire de jeux que Jean préfère est la (grande) fille des voisins (visiblement moins riches), Michèle, une rouquine à fort tempérament qui se fait coiffer par le garçon... et lui raconte plein d'histoires :

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   Curieusement, c'est elle qui reçoit les cartes postales envoyées par la mère de Jean, partie faire le tour du monde. Comme le garçon ne sait pas lire, il est très dépendant de ce que veut bien lui dire sa jeune voisine. Il y a donc un mystère familial à éclaircir.

   En même temps, ce film restitue très bien l'ambiance qui règnait jadis entre les garçons dans les cours de récréation et l'incroyable rivalité qui portait sur le jeu de billes, celles-ci savamment classées en fonction de leur matériau (terre, verre, métal...) :

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   J'ai failli oublier les heures de classe (bien plus nombreuses à l'époque qu'aujourd'hui, sans que l'on songe à se plaindre...) et cette maîtresse "à l'ancienne" (déjà à l'époque... je vous laisse imaginer le personnage !). L'histoire introduit même la notion de différences culturelles (autour de la fête de Noël).

   Entre roman familial, tranches de vie et tableau historique, ce court film (1h15) est décidément très riche... et à réserver à des enfants déjà un peu grands... ainsi qu'aux parents nostalgiques !

20:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

lundi, 28 octobre 2013

Astérix chez les Pictes

   Les aventures des héros créés par René Goscinny et Albert Uderzo ont bercé mon enfance. Lorsque le dessinateur s'est retrouvé seul pour continuer la série, j'ai suivi, au départ. Mais j'ai été assez rapidement déçu. Avant aujourd'hui, l'album le plus récemment sorti que j'avais lu était Astérix chez Rahazade, que l'on m'avait offert. A l'époque, j'avais remercié pour le cadeau, mais la lecture m'avait convaincu de définitivement arrêter. C'est la présence de Jean-Yves Ferri au scénario qui m'a incité à retenter l'expérience.
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   J'avais aimé son De Gaulle à la plage et les extraits du nouvel album qui ont été diffusés m'ont encouragé à l'acheter. Le dessin y est en effet fidèle à la tradition : les personnages n'ont pas physiquement changé. En revanche, au cours de l'histoire, les hommes du village, sous la pression de leurs femmes, vont devoir troquer les braies gauloises contre des habits plus "tendance", dont la mode a été introduite par un drôle d'invité, le Picte Mac Oloch.

   Le nom "Picte", sans doute d'origine latine, désignait les habitants du nord de la Grande Bretagne restés indépendants de Rome. Sur le terrain, le terme est plutôt un générique sous lequel on regroupait différentes populations "peintes", c'est-à-dire tatouées :

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   On ne sera donc pas étonné de constater que Mac Oloch arbore de curieux dessins sur son torse :

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   Notons que cet "indigène" n'est pas sans rappeler un autre grand costaud créé par Goscinny et Uderzo, l'Indien des plaines Oumpah-pah :

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(extrait de Oumpah-pah et la mission secrète)

   Comme l'Indien, le Picte sait se battre, même si on le voit peu à l'oeuvre dans cette histoire. De plus, ses cheveux sont arrangés de manière particulière et il lui arrive régulièrement de lancer un cri de ralliement qui n'est pas sans rappeler le cri de guerre de l'Indien.

   Ici s'arrête la ressemblance. Mac Oloch est un personnage somme toute secondaire. L'intrigue, si elle tourne autour d'une rivalité au sein de sa tribu, est portée par les deux héros, le chien Idéfix ne participant pas à l'expédition outre-mer... et, au vu de la pratique sportive qu'affectionnent les Pictes (le lancer de tronc d'arbre), c'est sans doute mieux. Par contre, on voit souvent Astérix et Obélix se chamailler. C'est parfois un peu outrancier.

   Du côté des réussites, il faut signaler les jeux de mots et les clins d'oeil anachroniques, marque de fabrique de cette bande dessinée. Du centurion Taglabribus au petit frère de Mac Oloch, nommé Mac Mini, on ne s'ennuie pas à déchiffrer ces traits d'esprits.

   Ceci dit, cela manque un peu de folie. C'est bien conçu, mais de manière assez sage, presque scolaire. Même l'intervention d'un célèbre monstre, pour pertinente qu'elle soit, manque de relief. On n'a sans doute pas voulu prendre le moindre risque pour l'album de la passation des pouvoirs. Espérons que, par la suite, les auteurs "se lâcheront" un peu plus.

samedi, 26 octobre 2013

Heimat 1 et 2

   Au départ, Heimat fut une série télévisée d'Edgar Reitz, qui connut un grand succès en R.F.A. puis dans l'Allemagne réunifiée. Par le biais de la fiction (et d'un village imaginaire), elle relatait le siècle tumultueux que la population allemande avait vécu, de 1919 aux années 1980, puis 1990, enfin 2000.

   Le film en deux parties qui vient de sortir en France en constitue une sorte de prologue, situé au début des années 1840. A cette époque, l'Allemagne n'existe pas en tant qu'Etat. Le sentiment national est lui bien vivant, mais la "patrie" (traduction imparfaite du mot "Heimat") est plus le petit pays qui sert d'horizon aux ruraux qui se tuent quotidiennement à la tâche.

   L'action se déroule dans la part occidentale du royaume de Prusse, en Rhénanie (aujourd'hui partagée entre deux Länder, la Rhénanie-Palatinat et la Rhénanie-du-Nord-Westphalie), dans une région appelée Hunsrück (dont l'étendue correspond à la moitié de celle de l'Aveyron) :

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   La première partie est sous-titrée "Chronique d'un rêve". Pour les Aveyronnais, il faut imaginer l'Allemagne profonde cent ans avant Farrebique, dans un pays qui n'a pas connu la Révolution française (certains privilèges n'ont pas été abolis), même si, la guerre aidant, les troupes françaises ont laissé des traces dans la région. (Trente ans après, une femme a encore en sa possession le savon d'un officier tricolore !)

   C'est un magnifique noir et blanc, d'où émerge de temps à autre un détail coloré, comme une pièce d'or, un morceau de verre déformant, un drapeau ou les pétales d'une fleur :

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   Mais, alors que Georges Rouquier, au-delà "des travaux et des jours", avait voulu montrer la communion des hommes et de la nature, Edgar Reitz fait plutôt oeuvre d'historien, reconstituant la vie au village dans ce qu'elle avait de pénible et de joyeux, de routinier et de changeant. L'Ouest de la future Allemagne est sur le point de s'ouvrir à la modernité.

   Le noble du coin, auquel on doit respect, n'est pas présenté au départ comme un mauvais bougre. Il sait même se montrer généreux à l'occasion. On découvre la vie simple et globalement difficile de ces ruraux qui n'ont rien d'exceptionnel, à première vue.

   Tout le monde est un peu paysan, même ceux qui ont une activité principale autre, comme le forgeron, père du héros. Celui-ci, Jakob, est le fils indigne. Alors que l'aîné s'est illustré dans l'armée et, une fois de retour, se dévoue à l'entreprise familiale, le cadet est le plus souvent le nez dans les bouquins, au désespoir de son père. Le jeune homme s'est vite rendu compte qu'il parvenait à apprendre vite beaucoup de choses, grâce à ses lectures. Il dévore notamment les récits de voyageurs... et apprend petit à petit à déchiffrer des langues étrangères. Les confrontations avec son père constituent souvent des moments de comédie.

   Mais il y a aussi cet amour naissant pour Henriette, une ravissante blonde, dont la réserve naturelle cache un tempérament fougueux. Elle et sa meilleure amie brune sont l'objet de l'attention des deux fils du forgeron. Une soirée festive va sceller le sort d'au moins un couple, mais pas dans le sens auquel les spectateurs se seraient attendus.

   Pour Jakob, la déception amoureuse et la répression des revendications républicaines des révolutionnaires allemands vont être des déclencheurs.

   La seconde partie du film est sous-titrée "L'Exode". Plus longue, elle donne à voir les causes multiples du mouvement d'émigration qui a frappé les territoires germaniques au XIXe siècle. On a plus souvent entendu parler de l'installation en Amérique du Nord. Ces personnages-ci ambitionnent de partir au Brésil. Cela nous vaut une séquence pittoresque, au cours de laquelle des Portugais viennent faire de la retape pour l'empire sud-américain.

   Auparavant, on aura vu le village traverser les pires épreuves, de l'hiver glacial à l'épidémie, en passant par la prison royale, pour quelques-uns des héros. De retour, Jakob comprend qu'il aura du mal à s'intégrer à nouveau à la communauté. Un mariage est célébré. Dans le même temps, le frère aîné est tenté par la modernité : il met au point une machine à vapeur. Mais, dans le village, beaucoup songent à partir.

   L'histoire alterne moments de joie et de douleur. La mort et la maladie frappent, sans parler même des déconvenues sentimentales. Incidemment, on perçoit aussi les tensions religieuses, entre catholiques et protestants, qui ne cohabitent pas dans le village, mais peuvent se croiser dans la contrée. La seule soeur survivante de Jakob (les parents ont perdu six enfants en bas âge) a été reniée parce qu'elle a épousé un "papiste" (un gars de la Moselle par dessus le marché !). La situation évolue dans cette partie du film.

   L'une des dernières séquences montre le départ de l'expédition. Elle doit rejoindre d'autres convois issus eux aussi de Rhénanie, direction la mer du Nord puis, au terme de plusieurs étapes, le Brésil. On ne les voit désormais plus à l'écran, mais, grâce à des lettres, on finit par savoir ce qu'ils sont devenus.

   Sur presque quatre heures, cela constitue une fresque impressionnante, d'une grande qualité plastique, très bien jouée. La grande histoire se marie parfaitement avec la petite, celle du quotidien de ces gens ordinaires auxquels on finit par beaucoup s'attacher.

23:59 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 25 octobre 2013

Sur le chemin de l'école

   Ce documentaire suit en alternance quatre types d'enfants, tous nés dans un "pays en développement" : Jackson et Salomé dans la savane kényane, Zahira et ses copines dans les montagnes marocaines, Samuel et ses frères dans la campagne indienne, Carlos et sa soeur en Patagonie.

   Le montage est habile : on retrouve chaque groupe d'enfants à plusieurs reprises, à chaque fois à un stade différent de son périple. Trois des quatre groupes effectuent leur trajet (de 10 à 20 kilomètres) chaque jour, aller et retour, alors que les Marocaines partent le lundi pour ne revenir que le vendredi. Dans la salle, les parents sont accompagnés de leurs petits... alors que c'est aux ados blasés, gâtés pourris, rivés à leur téléphone portable (ou à leur console de jeux) que cette projection ferait le plus grand bien.

   Qu'en retenir ? Que le Kényan Jackson est d'une vive intelligence, qui transparaît en particulier dans l'une des scènes de la dernière partie du film. Au passage, son périple (et celui de sa soeur cadette) nous aura permis d'accéder à de superbes images de la savane, avec ses girafes et ses éléphants.

   De leur côté, les gamines de l'Atlas doivent faire preuve d'inventivité pour arriver à l'internat dans les temps. On s'aperçoit aussi que la société marocaine est devenue très individualiste. Chacun vaque à ses occupations, sans se préoccuper de l'autre. Je vous laisse aussi découvrir le rôle de la poule que Zahira transporte dans un sac.

   Les plus méritants sont les Tamouls (originaires du Sud-Est de l'Inde), l'un des frères étant sévèrement handicapé sur le plan physique (mais brillant sur le plan intellectuel), les deux autres joignant tant bien que mal leurs forces pour l'emmener jusqu'à l'école, où il reçoit un accueil qui fait chaud au coeur. C'est dans cette partie de l'histoire que sont glissés quelques moments de comédie.

   En Argentine, les paysages sont aussi magnifiques, mais je dois avouer que j'ai été moins touché par ce chapitre-là.

   Le gros défaut du film est le doublage en français, vraiment mauvais (il sonne très artificiel). Il aurait mieux valu procéder comme dans certains reportages télévisés : garder les vraies voix des protagonistes en fond sonore et leur superposer la traduction. On sent aussi à plusieurs reprises le côté scénarisé de certaines scènes, que l'on a visiblement demandé aux gamins de rejouer. Mais cela reste globalement un divertissement plaisant... et civique.

21:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mercredi, 23 octobre 2013

Eva

   Par le plus grand des hasards, j'ai découvert ce petit film espagnol, sorti l'an dernier. Avec une économie de moyens et beaucoup de talent, l'auteur nous livre un bijou de science-fiction, un peu à l'image de ce que fut [Rec] pour le genre horrifique et Insensibles pour le drame historique.

   Nous sommes en 2041. Des voitures électriques circulent en grand nombre. Dans leur vie quotidienne, les humains côtoient des robots plus ou moins évolués. Perdu dans les montagnes enneigées, un centre de recherche innove dans ce domaine. L'histoire commence avec le retour d'un ancien jeune prodige, incarné par Daniel Brühl :

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   Et là vous vous dites que vous connaissez ce type. Il s'agit de l'acteur révélé par l'excellent Good Bye, Lenin !, qui a fait du chemin depuis. On a pu le voir notamment dans Joyeux Noël, 2 Days in Paris et John Rabe. Etrangement, cet acteur allemand parle un espagnol parfait. Ce serait oublier qu'il est né à Barcelone, d'une mère espagnole !

   Face à lui se trouve principalement une jeune fille d'une dizaine d'années, la fameuse Eva, interprétée avec conviction par une actrice à surveiller, Claudia Vega :

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   Plusieurs mystères planent dès le début. On ne sait pas pourquoi le héros est parti il y a dix ans. On sent que quelque chose s'est passé entre lui, son frère et la femme de celui-ci, qui était sa partenaire autrefois. A ce non-dit familial se rajoutent les recherches secrètes. Sur quel projet travaillait-il autrefois ? Est-ce le même que celui pour lequel il vient d'être engagé ? Pourquoi Lana (la compagne de son frère) a-t-elle renoncé à la recherche pour se consacrer exclusivement à l'enseignement ? Et qui est réellement Eva, cette gamine pour laquelle le héros ressent immédiatement de l'affection ?

   Le film fonctionne sur la base d'un long retour en arrière. La fin permet d'éclairer la séquence du début. Entre temps, on aura découvert cette Espagne futuriste, où un scientifique vit en compagnie d'un chat-robot :

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   Signalons que s'il miaule et ronronne comme un vrai sac-à-puces, il n'urine pas ! (Vive le progrès !)

   Dans l'univers du héros gravite aussi un domestique d'un genre très particulier, Max. C'est un robot très perfectionné, d'une obséquiosité extrême, mais capable d'initiatives. Il est précieux au quotidien, même s'il semble parfois inquiétant :

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   Les effets spéciaux, peu nombreux mais bien dosés, sont remarquables. J'ai particulièrement apprécié la représentation de la construction de "l'âme" des robots (leur mémoire émotive), à l'aide d'une animation numérique qui évoque une architecture neuronale de cristal :

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   Pendant 1h30, je suis resté littéralement scotché à mon fauteuil. A voir absolument si vous en avez l'occasion.

20:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 22 octobre 2013

L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet

   Jean-Pierre Jeunet se fait rare. Il a fallu attendre quatre ans après Micmacs à tire-larigot. Malheureusement, c'est outre-Atlantique que le créateur français a trouvé l'inspiration : cette histoire se déroule aux Etats-Unis, du Montana jusqu'à Washington, en passant notamment par Chicago.

   C'est donc une sorte de road movie, ou plutôt un railway movie, puisque que le jeune héros voyage principalement par train. Il veut se rendre dans la capitale fédérale pour y présenter son invention. En même temps, il fuit le contexte familial, marqué par le décès de son frère, dont il se sent responsable.

   Le film embrasse plusieurs thèmes. C'est d'abord une comédie familiale, qui présente une drôle de tribu, bien dans l'esprit de Jeunet. Le père est un cowboy mutique mais aimant. La mère (Helena Bonham Carter, vraiment très bien) est une scientifique hyper pointilleuse, qui travaille à la maison. La soeur aînée rêve de concours de beauté... et surtout de sortir de ce pays de "bouseux" ! Le jeune T.S., qui se désespère de ne pas être le fils idéal qu'aurait aimé avoir son père, se réfugie dans ses inventions et ses obsessions.

   A l'écran, en 3D, cela donne des plans magnifiques. Jeunet sait utiliser la technologie pour mettre en valeur certains éléments du décor ou certains objets. Voilà enfin un film qui mérite le supplément de deux euros !

   L'intrigue regorge de moments cocasses, qui rappellent Amélie Poulain. Jeunet a le sens du détail. Mais en route, il perd un peu le jeune public qui, dans la salle, a eu tendance à demander des explications aux adultes. De plus, j'ai trouvé que le héros s'exprimait de manière trop littéraire. Ajoutez à cela les gros plans, qui permettent de se rendre compte du doublage, et vous aurez les quelques défauts du film.

   L'intérêt remonte dans la dernière partie. Le gamin va être "pris en mains" par des ambitieux (Judy Davis et Rick Mercer, excellents cabots). Si l'émotion nous prend au moment du discours, l'humour nous saisit lors de l'avant-dernière séquence, qui se déroule sur un plateau de télévision.

   C'est un film sympathique, souvent drôle, brillant sur le plan formel, où l'on sent malgré tout poindre un mélange de tristesse et de nostalgie.

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lundi, 21 octobre 2013

Merci Groland !

   L'émission du 12 octobre dernier fut d'un bon niveau. Parmi les reportages marquants, il faut relever celui consacré à une retentissante affaire de détournement de fonds, dite "affaire Bitencourt" :

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   Les enquêteurs grolandais peinent à démontrer l'abus de faiblesse dont la milliardaire aurait été victime de la part d'un ancien candidat à la présidence de la République.

   L'actualité "chaude" traite de la délinquance, sous toutes ses formes. La fine équipe d'humoristes a mis au point une séquence qui, tout en se payant la tête d'une chaîne populiste (admirez le logo, en haut en droite), pointe les vrais voyous qui ruinent nos sociétés :

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   Après les vieux, place aux jeunes ! C'est avec ironie que le journal évoque les emplois d'avenir hollandiens, à travers le "contrat d'emploi cool", une manière de stigmatiser la fainéantise d'une partie de la jeunesse française d'aujourd'hui :

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   Du côté des actifs, on ne chôme pas. Des voleurs s'en sont pris à un caviste... mais ils ont commis l'erreur de consommer très vite une partie du produit de leur larcin :

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   La remise des prix Nobel étant d'actualité, l'équipe de Made in Groland s'est intéressée aux recherches portant sur l'accouchement masculin... une entreprise risquée :

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   Enfin, les bruits de guerre devenant le quotidien des informations, l'armée grolandaise a décidé de se préparer au pire, face aux troupes brésiliennes (dotées de sacrés obus !) :

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   Mais le titre de ce billet est en relation avec une autre séquence de l'émission, consacrée au comportement de certains spectateurs de cinéma :

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   Cela fait du bien qu'à une heure de grande écoute, une émission prenne une partie du public à rebrousse-poil. D'ailleurs à Rodez, depuis l'ouverture du multiplexe, on sent que l'on pousse les clients à manger sur place, quitte à ce que les salles soient jonchées de détritus à la fin de la séance... parce que figurez-vous que les consommateurs de pop-corn, non contents d'être des petits-bourgeois égoïstes adeptes de la junk food, sont mal élevés et en renversent plein dans l'allée, quand ce n'est pas sur les sièges... Et voilà les opérateurs du cinéma, désormais priés d'être polyvalents. Ils font donc office de projectionnistes, caissiers, vendeurs de confiseries... et "techniciens de surface" dans les salles.

dimanche, 20 octobre 2013

Blue Jasmine

   Le nouveau film de Woody Allen marie l'anglo-américain et le français, dans une comédie douce-amère qui tourne autour des rapports entre les hommes et les femmes. L'héroïne, bien qu'incarnée (à la perfection) par la superbe Cate Blanchett, est antipathique. Si je ne répugnais pas à être grossier, je dirais que le film aurait pu s'intituler Grandeur et misères d'une pétasse.

   Jasmine est une snob de la côte Est, fascinée par l'Europe... surtout la France (Paris, Saint-Tropez, Cannes...). Coup de bol pour elle, elle s'appelle French. Elle porte même un prénom français, à l'origine : Jeanette. C'est aussi une inconditionnelle de la mode d'outre-Atlantique (Hermès, Louis Vuitton...). De temps à autre, les dialogues sont émaillés de mots français (dans la version originale sous-titrée). On découvre ce personnage dans toute sa splendeur grâce aux retours en arrière, qui, judicieusement placés, éclairent un passage de l'histoire qui se déroule sous nos yeux, celle d'une dame de la haute société en pleine déchéance.

   Cate Blanchett est épatante à tous les niveaux. Elle livre une excellente interprétation aussi bien de la mondaine sûre d'elle et de son bonheur, que de l'ex-madame au purgatoire chez sa sœur méprisée (Sally Hawkins, très bien) et de la femme perdue, entre ses mensonges et ses rêves de grandeur.

   L'intrigue est agrémentée d'un humour acide, fondé sur le fossé socio-culturel (caricatural) entre les classes supérieures de la côte Est, richissimes, arrogantes et la conscience tranquille malgré leur malhonnêteté et les gagne-petit de la côte Ouest, à la fois hostiles et fascinés par les premières.

   Le film se veut aussi moral. Le mensonge ne mène pas au bonheur. Certains personnages vont en faire l'expérience cruelle. On découvre aussi petit à petit la complexité de la personnalité de Jasmine, que le réalisateur place dans beaucoup de situations inconfortables. (Il reste toutefois assez indulgent avec elle, les défauts des autres prenant parfois le pas sur les siens.)

   Ce n'est pas un grand Woody Allen, mais l'on passe un bon moment, dans une ambiance jazzy (avec pour fil conducteur le morceau  Blue Moon), en compagnie d'une actrice qui n'a jusqu'à présent pas été reconnue à sa juste valeur.

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samedi, 19 octobre 2013

Panpan cucul sur la propagande

   Ces derniers temps, on a beaucoup parlé de la récente condamnation d'un père qui a administré une fessée "cul nu" à son fils récalcitrant. Au passage, les médias se sont parfois gardés de souligner que cet incident s'inscrit dans une histoire familiale difficile (la séparation d'un couple)... et que c'est la mère (et pas l'enfant, bien entendu) qui a porté plainte. Je ne suis pas loin de penser qu'au-delà du rejet du châtiment corporel, la mère cherche à s'appuyer sur une décision de justice dans une procédure de divorce.

   N'allez pas croire que je sois un fervent partisan de ce genre de correction. Il existe bien des manières de faire comprendre à un-e enfant qu'il(elle) a dépassé les bornes. La violence physique ne doit être qu'un ultime recours. Mais vouloir l'interdire quelle que soit la situation me paraît aussi stupide que la croyance que c'est à coups de ceinturon qu'on dresse efficacement sa progéniture. Dans le cas qui nous occupe, d'après ce que j'ai pu lire ici et là, il semble que le père se soit un peu emballé ; il aurait pu agir autrement. (Ceci dit, il est facile pour moi de lui faire la leçon, confortablement assis devant l'écran de mon ordinateur...)

   Si les médias ont fréquemment évoqué l'affaire, certains n'en sont pas restés aux faits. Ils ont visiblement voulu peser sur l'opinion, qui reste attachée au "droit de correction". Le supplément "Culture et idées" du Monde de ce samedi 19 octobre (version papier) fait sa "une" sur le sujet :

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   L'illustration n'est pas datée. Ce n'est évidemment pas une photographie "spontanée", comme en témoigne le regard de l'enfant tourné vers l'objectif. Elle a d'ailleurs déjà servi, puisqu'on la retrouve dans un article du quotidien gratuit 20minutes du 27 avril 2011. C'est une scène simulée. En pages intérieures, l'article du Monde est accompagné d'une gravure française de 1900 :

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   Sur le site internet du quotidien, on peut trouver un billet du blog "Big Browser" consacré à l'affaire, illustré par une image italienne de la seconde moitié du XIXe siècle :

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   Curieux de nature, je suis allé jeter un oeil à la version numérique de l'article que j'ai évoqué plus haut. O surprise, elle n'est pas introduite par la même photographie :

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   Cette différence n'est pas anodine. D'habitude, elle est due à des questions de droits. Ici, il y a volonté de guider subrepticement l'interprétation des faits. La légende de la photographie est là pour montrer au public cultivé que seuls des esprits barbares peuvent fesser leurs enfants. Pensez donc ! La photo a été prise "vers 1935", c'est-à-dire sous le régime nazi. Quelle subtilité !...

   Ce n'est pas la première fois que je surprends le quotidien en flagrant délit de manipulation. L'an dernier, j'avais remarqué ce genre d'attaque discrète au détour de la campagne de Marine Le Pen (mais elle ne fut pas la seule visée). Quelques temps plus tard, les illustrations d'un article consacré au vote préférentiel étaient marquées par la même subjectivité.

   P.S.

   L'émission Made in Groland de ce samedi a abordé (brièvement) le sujet avec tact et délicatesse :

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9 mois ferme

   Cela fait quatre ans que l'on attendait la nouvelle réalisation d'Albert Dupontel. Entre temps, il a (bien) fait l'acteur, dans Le Bruit des glaçons et Le Grand Soir. Il réitère certains choix de casting : on retrouve des têtes connues dans les rôles secondaires et, comme dans Le Vilain, Dupontel partage l'affiche avec une actrice de renom, ici Sandrine Kiberlain.

   On aurait pu craindre que le "choc des cultures" entre ces deux pointures ne soit pas très productif. Ce serait oublier que La Kiberlain a de la ressource. (Si vous ne l'avez pas vu, courez télécharger, louer ou acheter Romaine par moins 30 !) De surcroît, dans un premier temps, on lui fait incarner une magistrate coincée, totalement dédiée à son travail... et intransigeante dans le boulot. Une cuite monumentale, lors du réveillon 2012-2013, va changer sa vie.

   Il faut aller voir ce film pour les performances d'acteurs. Celle de Dupontel ne sort pas particulièrement du lot. On a l'impression de retrouver l'un des personnages de ses sketchs qui aurait mûri (mais quand même mal tourné). Ce n'est pas déplaisant. Kiberlain est vraiment excellente, aussi bien en juge inflexible qu'en célibataire bourrée et en future maman désemparée.

   Que dire aussi des seconds rôles ! C'est avec plaisir que l'on retrouve Nicolas Marié (qui en fait toutefois un peu trop) et Bouli Lanners, hilarant dans la séquence de visionnage des bandes de vidéo-surveillance ! Ces deux compères étaient déjà présents dans Le Vilain. Il faut ajouter Philippe Uchan (un vieux complice de Dupontel), qui s'en prend plein la tête, au propre comme au figuré !

   Je laisse à chacun découvrir les apparitions des multiples invités. Je signale juste celles de Terry Gilliam (en admirateur... mais de qui ?) et de Jean Dujardin, excellent dans le rôle du traducteur en langage des signes (un procédé pas nouveau nouveau, mais toujours efficace !).

   J'ajoute l'apparition d'une non-professionnelle, Michèle Bernard-Requin, ex-magistrate (qui incarne la supérieure hiérarchique de l'héroïne) que le grand public a découverte naguère dans le documentaire de Raymond Depardon 10e Chambre, instants d'audience.

   Je conseille aussi d'être attentif aux scènes qui font intervenir la télévision, en particulier à ce qui défile en bas de l'écran !

   C'est donc une comédie (brève : moins d'1h30) tonique, aux dialogues bien écrits, parfois inventive sur le plan visuel. Enfin un film français qui sort du lot !

17:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 18 octobre 2013

Diana

   Je ne suis pas "client" de ce genre de film, a priori. De plus, la bande-annonce doublée en français est mauvaise. Mais il y a Naomi Watts... et une histoire que je ne connaissais pas, celle de l'amour né entre l'ex-femme du prince Charles et un chirurgien pakistanais.

   L'histoire fonctionne sur la base d'un grand retour en arrière. A la fin, on reverra la première séquence, assez énigmatique. Sans trop en dire, je peux révéler qu'elle accentue le côté mélodramatique du film. Ce n'est pas ce qu'il a de meilleur.

   Le meilleur (en version originale sous-titrée) ? La comédie romantique qui occupe le coeur de l'intrigue. J'ai ri sincèrement à la naissance de cette passion entre la vedette et l'inconnu, entre la protestante et le musulman. Toutefois, le couple d'acteurs ne resplendit pas du même éclat. J'ai trouvé Naveen Andrews assez fade, alors que Naomi Watts est épatante (et bien plus jolie que celle qu'elle incarne). Elle est particulièrement charmante quand elle invente des stratagèmes pour retrouver son homme :

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(Ici, elle s'est déguisée en Laure Adler jeune.)

   Cependant, le film est un peu trop en empathie avec l'héroïne, même s'il ne cache pas qu'elle a usé de sa notoriété à des fins autres qu'humanitaires. La relation ambiguë qu'elle a nouée avec la presse poubelle n'est qu'esquissée. De plus, l'action de celle-ci n'est dénoncée que parce qu'elle pourrit la vie de Diana. Rien n'est dit de son côté abrutissant. Le paradoxe est que ces médias qui la harcèlent contribuent à faire d'elle une icône. Pas de cohortes de fans sans photos et articles racoleurs...

   On semble aussi avoir soigneusement évité de trop évoquer la famille royale d'Angleterre. La reine n'est même pas mentionnée et l'on entraperçoit à peine les fils de l'héroïne.

   Les voyages de celle-ci sont toutefois prétextes à de jolies tranches de vie, que ce soit dans un champ infesté de mines antipersonnel ou au Pakistan, chez les parents de son chéri d'amour, dans une séquence vraiment très enlevée.

   Cela se regarde comme certains bons films sentimentaux avec Julia Roberts. Sans plus.

20:33 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 17 octobre 2013

L'enfance de l'art

   En cette fin d'après-midi ensoleillée, je déambulai paisiblement dans le vieux Rodez lorsque, passant par la rue Louis Blanc, je croisai une femme d'âge moyen, tenant celle qui était sans doute sa fille par la main. Voici ce que j'entendis :

- Dis, nous, on n'est pas en France, là ?

- Mais si, puisqu'on est dans l'Aveyron !

   Je vous souhaite le bonjour, nous vivons une époque moderne.

dimanche, 13 octobre 2013

Shérif Jackson

   Le héros éponyme est un homme de loi peu conventionnel : il chante et il danse, y compris pendant qu'il exerce ses fonctions. Sa coupe de cheveux détonne dans le monde du Far West. Il est incarné par un Ed Harris (un vieux routier des seconds rôles) très inspiré :

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   Il débarque dans ce coin paumé de l'Amérique à la recherche de deux frères (interprétés par les réalisateurs), l'un étant le petit ami de la fille du gouverneur. Il va falloir qu'il cherche beaucoup, puisque, dès la deuxième séquence, les spectateurs ont pu constater qu'il leur arrivait quelques bricoles !

   Au cours de l'enquête, le shérif va se muer en Gil Grissom et utiliser les méthodes les plus modernes de l'époque pour identifier les responsables des crimes qui sont commis. La séquence qui aboutit à l'analyse de la composition de quatre balles est particulièrement réussie. J'ai aussi beaucoup apprécié la manière dont est mis en scène le recouvrement des balles. La scène la plus réjouissante est sans conteste l'exploration du cadavre d'un commerçant. Le shérif est filmé de dos, mais je peux vous dire qu'il y a eu un gros travail sur le son !

   Le deuxième personnage principal est le prophète Josiah, un homme à qui l'on serait tenté de donner le bon Dieu sans confession... et l'on aurait tort. C'est une véritable pourriture, un chef de bande qui s'est construit une petite secte fanatisée par la lecture de la Bible, secte dans laquelle il puise sans vergogne pour satisfaire ses besoins sexuels...

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   Il faut relever l'interprétation très convaincante de Jason Isaacs, dont le nom ne vous dit peut-être rien, mais qui s'est rendu célèbre naguère dans le rôle de Lucius Malefoy (dans la saga Harry Potter) :

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   Il s'est aussi fait remarquer en lieutenant Briggs, dans l'excellent Green Zone :

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   On pourrait ajouter à ce tableau masculin le personnage de l'épicier libidineux (promis à un sort particulier) et celui du banquier véreux. Bref, l'histoire déconstruit le mythe des pionniers du Far West. Ce n'est pas nouveau nouveau, mais cela ne fait pas de mal... d'autant plus qu'est ajoutée une satire du fondamentalisme protestant. Mais tous ces bonshommes vont se faire damner le pion par la véritable héroïne de ce film :

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   January Jones (déjà vue dans Good Morning England, Sans Identité et X-Men : le commencement) ne paie pas de mine, de prime abord. Elle est l'épouse aimante d'un fermier sans doute originaire du Mexique. Seul petit détail : elle tire beaucoup mieux que lui au révolver, élément qui a son importance dans la suite de l'histoire.

   Très vite, on comprend qu'elle cache un lourd passé... et que les mecs du coin ont terriblement envie de lui mettre le grappin dessus. Sachez qu'ils seront punis par où ils ont péché. J'ai en mémoire cette scène merveilleuse, qui montre Sarah en train de se baigner nue dans un étang isolé. On ne la voit que de dos. Deux acolytes du prophète pensent que c'est l'occasion à saisir. Les spectateurs qui possèdent plus de dix neurones se disent que tout cela est bien louche... et ils ont raison !

   Moins glorieuse pour l'héroïne (mais très maîtrisée du point de vue de la réalisation) est la troisième rencontre entre le prophète et Sarah. Le religieux se montre d'une incroyable hypocrisie, accentuée par la mise en scène : il est souvent filmé en contre-plongée ou de biais. Soyez notamment attentif au réveil de l'héroïne...

   Je ne peux pas terminer ce billet sans évoquer la scène du dîner, chez le prophète. Le shérif fait partie des invités, presque tous obséquieux avec l'homme fort de la contrée, qui a fait installer à grand frais une magnifique table en bois dans son salon. Notre bon vieux Jackson va se montrer d'une urbanité désopilante au cours du repas...

   Ce western atypique est l'excellente surprise de cet automne. Il est bien filmé, bourré d'humour... et les "méchants" en prennent pour leur grade !

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vendredi, 11 octobre 2013

Jimmy P.

   C'est un film d'Arnaud Desplechiant, avec Mathieu Amalric... tout pour me faire fuir, donc. Mais l'histoire, inspirée de faits réels, a piqué ma curiosité et les extraits vus ont achevé de me convaincre de tenter l'expérience.

   Pourtant, la première scène qui fait intervenir Mathieu Amalric m'a fait craindre le pire. L'un des médecins de l'hôpital américain le contacte par téléphone. Le psychanalyste se trouve dans un bar, visiblement sans domicile fixe ni travail. L'acteur exprime maladroitement un enthousiasme exacerbé. Heureusement, cela s'améliore par la suite, notamment lors du premier entretien entre les deux héros, qui voit le psy utiliser ses connaissances anthropologiques pour nouer le contact avec son patient.

   Le film est principalement composé de scènes de dialogues. Les plus nombreuses sont celles qui font intervenir l'Indien Blackfoot (Benicio Del Toro, excellent) et le psy européen juif (Amalric, qui a trouvé le ton juste). D'autres confrontent chacun des deux héros aux femmes, le premier à sa soeur ou à son ex, le second à sa maîtresse. On comprend que, malgré leurs différences, ils éprouvent des difficultés semblables à gérer leurs relations avec la gent féminine. Cet aspect du film a suscité des réactions, parce que les portraits de femmes (les trois citées, plus quelques autres) ne sont pas très positifs. Le plus beau personnage est sans conteste celui de la grande soeur de Jimmy, femme de tête, forte et faible à la fois. Elle est incarnée par Michelle Trush.

   Un autre élément rapproche les deux hommes : l'appartenance à deux peuples qui ont subi un massacre de masse. Il est amusant de constater qu'ils communiquent dans un anglais abâtardi. L'Indien acculturé s'exprime difficilement, avec une syntaxe approximative. Le psy a un langage plus fluide, mais un accent prononcé, censé évoquer une origine centre-européenne.

   J'ai du mal à l'expliquer, mais je ne peux que le constater : le montage réussit à faire toucher du doigt ce que peut être une thérapie s'appuyant sur certains acquis de la psychanalyse. Mais le grand talent du film est de montrer que les deux hommes en tirent profit. L'Indien se débarrasse de ses cauchemars et envisage de redonner un sens à son existence. Le psy obtient la reconnaissance de ses compétences (avec un poste en fac en bout de piste) et peut espérer refaire sa vie en Amérique, loin de cette Europe guerrière, raciste et à moitié détruite.

   C'est donc un beau film, bien joué, mais de facture classique. Il nécessite un certain effort de la part des spectateurs. Mais il le mérite.

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jeudi, 10 octobre 2013

The Place to be

- Allo, Riri ? Devine ce que je viens de récupérer !

- Euh... comment veux-tu que je sache ?

- Allez, essaie !

- Euh... la bague de ta grand-mère ? Tu m'as bien dit que tu l'avais perdue ?

- Non... enfin si, mais ce n'est pas ça ! Pense plutôt à l'actualité !

- ... Ne me dis pas que tu as réussi à mettre la main sur le programme d'Yves Censi pour les municipales ?

- Mais qu'il est con !!!! Pense à tes centres d'intérêt !

- Mmmm... aurais-tu un abonnement ciné pour le nouveau multiplexe ?

- Presque ! J'ai deux places pour l'inauguration de mardi ! Je pense y aller avec un mec sympa, drôle... et surtout pas trop râleur !

- Tu as ça dans tes relations ?

- Il paraît... mais je suis pas sûre pour le "pas trop râleur"... Bon, ça commence à 18 heures, sur l'esplanade. Tu pourras m'y rejoindre ?

- Attends, je réfléchis... Ils font quand même chier... encore un horaire pour fonctionnaires, femmes au  foyer, retraités et chômeurs ! Et puis je suis fatigué, moi !

- L'apéritif est offert par la municipalité... et, dans le cinéma, une collation gastronomique sera servie après le concert.

- OK, j'y serai.

   Vint le mardi. Autour de l'esplanade, du Foirail à la salle des fêtes, des policiers municipaux orientaient piétons et automobilistes. Il y avait un monde fou. On parle de plus de 600 invitations lancées ce qui, avec les accompagnateurs, fait plus de 1 000 pékins.

   Au départ, je n'avais même pas vu le buffet planté devant l'entrée du cinéma, tant la foule était compacte. Une fois ce détail stratégique assimilé, j'ai enfilé mon costume de chevalier servant et j'ai tenté une approche, en quête de victuailles. Il a fallu un peu jouer des coudes, d'autant plus que plusieurs groupes semblaient maîtriser la tactique d'occupation du territoire : toujours proches du buffet, mais jamais vus en train de se servir, ils buvaient et mangeaient à volonté. Pendant un instant, j'ai été presque admiratif. Vite, j'ai réalisé qu'il ne fallait pas trop rêvasser, sinon je risquais d'être percuté par l'une des innombrables sommités politico-économico-administratives qui hantaient cette foule. Eux sont habitués à ce que l'on s'écarte sur leur chemin. L'un d'entre eux me parut plus habile encore. Il s'agit de Passepartout Manuel Cantos, qui évoluait dans la foule avec une facilité déconcertante, passant sans problème entre les jambes des invités.

   Arrivé au buffet, je respirai un peu. La nourriture était composée d'amuse-gueule bon marché. Je reconnais là la gestion Teyssèdre, qui veut bien prendre la peine de régaler l'assemblée... mais à moindre coût. Du côté des liquides, on trouvait les traditionnels jus de fruit, de l'eau et, heureusement, du vin blanc et de la crème de cassis.

   C'est au moment où j'ai dû me saisir des deux gobelets remplis d'un liquide rougeâtre que je me suis rendu compte qu'il allait être difficile d'emporter du solide avec. Comment faire ? Je songeai à poser les gobelets pour me remplir les poches de cochonneries aux acides gras insaturés. J'envisageai aussi de récupérer une assiette en plastique pour la garnir d'un florilège desdites cochonneries. La crainte du scandale me retint. Finalement, je choisis de commencer à boire mon kir, puis de transvaser un peu du second dans le premier verre. Ensuite, je pus tenir les deux gobelets avec les doigts d'une seule main, sans les faire tremper dans le précieux liquide. De l'autre, j'emportai de quoi grignoter.

   Revenu auprès de Dulcinée, je constatai qu'elle avait été abordée par l'une de ses connaissances, un individu louche de sexe masculin.

- Tiens, Henri ! Quel plaisir de voir ta gueule d'abruti ! Comment vas-tu ?

- Ca va, ça va. Tu es venu seul ?

- Non, avec ma copine. D'ailleurs, je l'ai perdue. Je crois qu'elle est partie chercher du vin blanc.

- Il paraît qu'il est très correct. Désolé, je n'en ai pris que pour nous deux. Sinon, tu penses bien que j'aurais pris plaisir à cracher dans un troisième gobelet !

- Bon, ben, je vais voir si je la trouve. A plus !

- C'est ça, casse-toi, pov' con ! Bonne soirée !

   Peu après, des applaudissements ont retenti. Le ruban était coupé. La masse des invités pouvait commencer à entrer dans le multiplexe. Très vite, un groupe s'est mis en tête de faire le siège des entrées de la salle 1, négligeant d'effectuer la visite des locaux. L'explication n'allait pas tarder à venir : le nombre de places étant limité, seuls les "pipoles" et les premiers entrés auraient droit au concert, les autres devant se contenter de la retransmission dans la salle 2.

   Et pourtant, la visite valait le coup. Nous avons déambulé entre les salles, testant les fauteuils, regardant et écoutant les bandes-annonces. Conclusion : on est bien assis, les sièges sont disposés en gradins, les écrans sont grands et le son est bon. Cerise sur le gâteau : les toilettes, très jolies, fonctionnelles. Elles donnent envie d'aller dans le multiplexe rien pour y uriner ! Ah, j'oubliais : le sèche-mains automatique, merveille de technologie... avec un petit écran sur lequel s'affiche la durée de courant d'air asséchant !

   Après les discours, après le concert, après la première séance (offerte aux invités), la collation a été servie. On a retrouvé les mêmes pique-assiette. Mais, là, le menu était plus haut de gamme. Ce fut la ruée. J'ai plus tard entendu dire qu'on avait prévu la présence de 300 convives. On avait visiblement sous-estimé la gloutonnerie de certains invités. Seule note positive : le champagne, abondamment servi, était délicieux.

   Bon, c'était pas tout ça, mais les gens normaux travaillaient le lendemain. Nous sommes donc partis avant le feu d'artifice, dont je ne sais même pas s'il a eu lieu. En quittant le cinéma, j'ai croisé un visage qui me disait quelque chose. Je me suis souvenu l'avoir vu dans un mini-multiplexe aveyronnais, pas très éloigné de Rodez. Une mienne connaissance m'a appris qu'il avait candidaté pour la direction du nouveau cinéma ruthénois, mais qu'il avait été finalement engagé au poste de directeur-adjoint. Voilà au moins une personne qui est persuadée que ce multiplexe est destiné à un grand avenir !

mercredi, 09 octobre 2013

Le Majordome

   A la base, il y a l'histoire (vraie) d'Eugene Allen, un Noir né dans une plantation qui a fini par devenir majordome à la Maison Blanche. Il a servi sous une brochette de présidents : Harry Truman (ce qui n'apparaît pas dans le film), Dwight Eisenhower, John Kennedy, Lyndon Johnson, Richard Nixon, Gerald Ford, Jimmy Carter et Ronald Reagan.

   Le film entremêle l'histoire familiale de cet homme ordinaire au destin exceptionnel (incarné avec talent par Forest Whitaker) et la lutte pour les droits civiques, à laquelle l'un de ses fils va activement participer. Au second niveau, le film pose la question de l'efficacité de l'action politique. Qu'est-ce qui a le plus fait progresser la cause des Noirs ? La révolte des activistes, parfois violemment injuste, ou les accommodements de la majorité silencieuse, qui ont rendu la cohabitation avec les Blancs acceptable ? Les scènes de dispute entre le père majordome et le fils étudiant sont des moments clés.

   On suit avec plaisir les pérégrinations familiales parce que des individus ordinaires sont incarnés par des acteurs de renom... ou des célébrités de la Communauté. Jetez un oeil au casting !

   Attention toutefois. Pour les besoins de la dramatisation, la vie du héros a été quelque peu scénarisée. Un billet publié sur un blog du site américain Slate propose d'intéressantes mises au point.

   Même si le film dure plus de deux heures, on passe assez rapidement sur les différents présidents. Je suis tout de même satisfait que l'on rende justice à l'administration (républicaine) Eisenhower, qui a réellement enclenché la lutte contre la ségrégation. Robin Williams est un bon interprète de ce président humaniste. Sans surprise, hélas, il n'est donné qu'une version hagiographique de son successeur, John Fitzgerald Kennedy. Quelques anecdotes (réelles, comme celle de la cravate) donnent du relief à cet épisode convenu. On ne sera donc pas étonné que le portrait de Lyndon Johnson (Liev Schreiber, truculent) soit essentiellement à charge, comme souvent dans le cinéma américain, qui ne pardonne pas l'enlisement au Vietnam. C'est oublier un peu vite que l'essentiel de la "déségrégation" est dû à l'action de ce président sudiste, un peu brut de décoffrage, mais soucieux du bien commun... et des deniers publics !

   On passe très vite sur le bilan de Richard Nixon, d'abord présenté comme un vice-président (d'Eisenhower) arriviste et sans scrupule, puis comme un alcoolique magouilleur. Ce n'est pas dénué de fondement, mais je pense qu'il méritait mieux. On ne fait qu'entr'apercevoir Gérald Ford et Jimmy Carter, bien que ce dernier (et son épouse) aient laissé un très bon souvenir au vrai majordome. Mais ils sont tellement moins "glamour" que les Kennedy...

   La carrière du serviteur zélé s'achève sous Reagan, montré comme un mec sympa mais aux convictions parfois très arrêtées. On laisse à l'un de ses opposants le soin d'évoquer les ravages sociaux de sa politique. Il faut souligner la qualité de l'interprétation d'Alan Rickman et Jane Fonda, qui ressuscitent Ronald et Nancy avec brio. La fin du film montre le vieux couple noir soutenir Barack Obama. C'est un peu trop "politiquement correct"...

   On peut aussi lire ce film comme une histoire de la lutte des Noirs pour les droits civiques. Là encore, deux figures majeures sont à peine esquissées : Martin Luther King et Malcolm X. On nous propose une vue plus fouillée des militants de base et de leurs actions coup de poing. Cela nous vaut certains des meilleurs moments du film.

   A plusieurs reprises, celui-ci dénonce la violence dont les Blancs racistes sont les auteurs. Cela commence dans la plantation (un épisode fictif)... On  se croirait plutôt au temps de l'esclavage que dans l'Entre-deux-guerres. Anachronisme ? Cela se poursuit par ces petits Blancs de base qui ne supportent pas que des manifestants pacifiques remettent en question la ségrégation. Le summum est atteint lors de l'intervention de membres du Ku Klux Klan.

   Tout cela forme un ensemble plutôt bien fichu, un peu convenu... et parfois gâché par une musique trop insistante. Mais, pour moi, la qualité de l'interprétation emporte l'adhésion et cette petite leçon d'histoire mérite le détour.

   P.S.

   Après discussion avec d'autres cinéphiles, qui n'ont pas tous eu le même ressenti à propos de ce film, une conclusion s'impose : il faut le voir en version originale sous-titrée, la VF étant assez mauvaise.

lundi, 07 octobre 2013

La cantonale du désamour

   On a dit et écrit quelques bêtises à propos du premier tour de l'élection cantonale partielle de Brignoles (dans le Var). Pour bien en comprendre les enjeux, il convient de comparer les résultats de 2013 avec ceux de 2012 et ceux de 2011... parce que, eh oui, dans ce canton, les électeurs ont été appelés trois fois aux urnes en deux ans, pour le même scrutin.

   Si l'on ajoute à cela deux tours de présidentielle et deux tours de législative, on réalise qu'avec dix consultations en un peu plus de deux ans, la lassitude a peut-être gagné une partie de l'électorat. Qu'en est-il de l'abstention ? En 2011, elle était déjà de presque 52 %. En 2012 (pour la première partielle), elle est montée à 62 %, pour culminer à presque 67 % en 2013. La montée de la non-participation est donc une tendance lourde. Elle désavantage le candidat arrivé troisième, qui ne peut réunir 12,5 % des inscrits. C'est aujourd'hui le cas de Laurent Carratala, qui n'atteint même pas 5 % des inscrits... mais aussi de la candidate UMP Catherine Delzers, qui a recueilli un peu moins de 7 % des inscrits.

   Seul le frontiste Laurent Lopez dépasse la barre fatidique... mais de très peu : 13,11 % des inscrits. Ce n'est donc pas un triomphe, loin s'en faut. La lecture des précédents résultats me confirme dans cette analyse. Ainsi, en 2011, le candidat FN Jean-Paul Dispard avait recueilli 2 757 voix, soit 39 de plus que Laurent Lopez en 2013.. En 2012, le même Dispard avait quasiment maintenu son score : 2 734 voix (16 de plus que Lopez aujourd'hui). De plus, l'abstention aidant, en dépit de sa très légère baisse, il avait vu son pourcentage des exprimés augmenter et passer de 32,97 à 34,9. Cependant, cette semaine, deux concurrents FN s'opposaient : l'officiel Laurent Lopez et l'ex-officiel Jean-Paul Dispard, qui a été suspendu de son parti.

   Comme à Villeneuve-sur-Lot (pour la législative partielle), la direction du FN a misé sur un candidat plus jeune, plus "propre sur lui", quitte à laisser de côté le militant bien implanté, qui, pourtant, avait déjà été victorieux une fois et n'avait été battu que d'extrême justesse lors du scrutin précédent. Qui a dit que l'UMP et le PS avaient le monopole des conflits d'appareil ? En tout cas, le choix s'est révélé encore plus payant qu'à Villeneuve. Si l'on ajoute les voix obtenues par les deux candidats d'extrême-droite, on obtient 3 330, soit une progression de plus de 20 % par rapport à 2012. Mais... ces voix sont-elles à comptabiliser à l'extrême-droite ? Figurez-vous que l'ancien conseiller général FN vient d'appeler à voter UMP au second tour !

   L'ancien parti présidentiel n'est pas en grande forme. Il a présenté trois candidats différents aux trois cantonales. En 2011, Jean-Michel Rousseaux avait recueilli 1 981 voix. En 2012, Annie Giusti avait fait à peine mieux, avec 1 991 voix, résultat toujours insuffisant pour pouvoir se maintenir au second tour. Le paradoxe est qu'aujourd'hui, avec un score médiocre (et plus bas !) de 1 397 voix, Catherine Delzers est qualifiée pour le second tour ! Ceci dit, pour la première fois, elle avait un candidat divers droite dans les pattes.

   Cela nous amène à observer l'effondrement de la gauche, véritable clé du scrutin. En 2011 comme en 2012, le communiste Claude Gilardo avait fait bonne figure, recueillant respectivement 2 636 et 3 100 voix, soit 31,53 % et 39,6 % des suffrages exprimés. On peut attribuer cette petite progression à la disparition, entre les deux scrutins, de la candidature écologiste, qui avait recueilli 987 voix en 2011. Mais, en 2013, Magda Igyarto-Arnoult a décidé de remettre le couvert. Il n'est donc pas étonnant de constater la baisse du résultat du candidat communiste, qui chute à 981 voix ! Il n'est cependant pas juste d'attribuer cette diminution à la seule candidature écologiste. Les électeurs de gauche (notamment socialistes) sont restés massivement à la maison. Quant à ceux qui ne sont gère politisés, ils n'ont visiblement pas fait la différence entre un candidat communiste (quasi dans l'opposition) et un candidat PS (émanation du gouvernement).

   On peut apporter d'autres éléments d'explication. Le candidat communiste manquait sans doute d'expérience. Le PCF et le PS n'ont de plus sans doute pas suffisamment accordé leurs violons. On peut aussi penser qu'une partie de l'électorat socialiste n'a pas voulu voter pour un candidat communiste. Enfin, il n'est pas exclu qu'au-delà de certaines divergences idéologiques entre écologistes et communistes, certains dirigeants des Verts aient décidé de torpiller des candidatures communistes, pour affaiblir le PCF et consolider la place des Verts aux côtés du PS. En clair, les bisbilles à gauche font le lit du FN.

   En théorie, les jeux ne sont pas faits pour le second tour. Si plus de 1 300 voix séparent le candidat FN de son adversaire UMP, cela représente moins de 7 % des inscrits. La dynamique est du côté de Lopez, mais sa rivale dispose sans doute d'un plus grand réservoir de voix. Il n'est pas certain qu'elle parvienne à mobiliser les abstentionnistes.

dimanche, 06 octobre 2013

Groland contre le rugby

   Ce samedi, l'émission le plus déconneuse du PAF a dû céder la place au ballon oval.  C'est donc l'occasion de revoir celle de la semaine dernière, un excellent cru.

   Jules-Edouard Moustic a commencé par une leçon de morale : au Groland, on a depuis longtemps résolu la question Rom... de manière assez inattendue (admirez la petite touche, à l'arrière-plan) :

1 Roms.jpg

   La question fiscale a été abordée à travers le cas de Liliane Bettencourt, un sujet qui a permis à l'inénarrable Francis Kuntz de faire une fois de plus la démonstration de son grand talent d'analyste :

2 Bettencourt.jpg

   Les questions de société furent très présentes dans le journal, à travers notamment la laïcité à la grolandaise, dont on ne sait s'il faudrait s'en inspirer :

3 laïcité.jpg

   De la religion au mariage... et au divorce, il n'y a qu'un pas, allègrement franchi par l'équipe, toujours très au fait de l'innovation technologique :

4 divorce.jpg

   Il a quand même fallu ensuite revenir aux "sujets lourds", comme la guerre civile en Syrie, qui est l'objet de sondages divers et variés :

5 Syrie.jpg

   Autre sujet capital (surtout à Groland), les vendanges, qui ont lieu tardivement cette année. On se demande si la récolte sera bonne, si les vins seront de qualité. Au vu des images, il semble que le contenu de certaines bouteilles soit à réserver aux amateurs avertis :

6 vendanges.jpg

   Toujours en avance sur son époque, le Groland a déjà dépassé le débat sur la reconnaissance des empreintes digitales par les téléphones portables. Un système bien plus perfectionné a été mis au point, même s'il n'est pas sans inconvénient :

7 Appal.jpg

   La TNT est encore et toujours un sujet d'ébahissement. La quête d'originalité semble guider les directeurs des programmes :

8 Friends.jpg

   On ne sait plus quoi inventer pour retenir l'attention des débiles qui restent collés à leur poste de télévision. En tout cas, on ne se cache plus de faire des émissions de merde, au "propre" comme au figuré :

9 loft.jpg

   Allez, Banzai !

samedi, 05 octobre 2013

Bernard d'Angers à Conques... en 1013

   Tel était le thème de la conférence prononcée par Frédéric de Gournay, vendredi 4 octobre, à Conques même. L'historien le faisait remarquer en introduction : Bernard d'Angers est un illustre inconnu, coauteur d'un texte qui eut un grand retentissement au Moyen Age... alors qu'à l'heure où j'écris ces lignes, aucune page Wikipédia ne lui est consacrée !

   Il effectua trois voyages à Conques, le premier étant le seul datable avec précision. Dans son introduction, Frédéric de Gournay a expliqué en détail comment il arrivait à la conclusion que le premier séjour rouergat s'était déroulé en 1013, Bernard d'Angers étant notamment présent pour la sainte Foy, célébrée le 6 octobre (un mardi, cette année-là).

   On dispose de très peu de données biographiques sur lui. De surcroît, il portait un prénom assez courant à l'époque (y compris en Rouergue), ce qui peut prêter à confusion, tant le risque d'homonymie est grand. Il est sans doute né vers 970-980, décédé avant 1050. A Chartres, il a suivi l'enseignement de l'évêque Fulbert, auquel il a d'ailleurs dédié le premier livre des miracles de sainte Foy. Revenu à Angers, il est devenu écolâtre, c'est-à-dire directeur d'école (celle de la cathédrale). On sait aussi que son frère Robert fut abbé de Saint-Paul-de-Cormery, en Touraine.

   La suite de l'exposé était organisée de manière thématique. Bernard d'Angers a été successivement présenté comme un pèlerin, un écrivain et un historien.

   C'est un pèlerin sceptique qui débarque à Conques en 1013. Bernard doute de la réalité des miracles attribués à sainte Foy, dont le retentissement est grandissant en Europe. L'un d'entre eux paraît particulièrement extravagant, celui qui aurait touché un habitant d'Espeyrac (dans l'Aveyron), Guibert l'illuminé, à la fin du Xe siècle. Il est raconté par le médiéviste Pierre Bonnassie, dans un entretien accordé à L'Express en 1999.

   C'est au cours de ce séjour de trois semaines et demi que Bernard commence à rédiger le Livre des Miracles de Sainte Foy (qui est en fait un assemblage de livres écrits à des périodes différentes). Il y évoque l'accueil bienveillant qu'il a reçu à Conques. Il semble qu'à cette époque (et dès le Xe siècle), deux types d'accueil aient été proposés aux pèlerins, l'un destiné aux seigneurs, l'autre aux pauvres. Il existait donc deux "portiers", qui prenaient en charge deux sortes d'arrivants. On peut en déduire que Bernard a été classé dans la "bonne" catégorie...

   A l'époque, les journées... et les nuits semblent parfois longues à Conques, y compris aux pèlerins. Beaucoup chantent. Si les vocalises des religieux ne soulèvent aucune contestation, celles des pèlerins pauvres (qui sont souvent d'inspiration profane...) suscitent parfois des réactions d'hostilité, à l'image de celle d'un abbé de Conques, qui parle des "vociférations sauvages des paysans".

   La suite de la conférence aborde la rédaction des livres consacrés aux miracles de sainte Foy. Bernard aurait écrit les six premiers durant ce voyage de 1013, les laissant à Conques, avec interdiction d'y toucher ou d'évoquer leur contenu. Vu que les réflexions et anecdotes qu'ils contiennent se sont répandues comme une traînée de poudre en Occident, on peut en conclure que les prescriptions de Bernard n'ont pas été suivies à la lettre... A l'occasion de son deuxième séjour (avant 1020), Bernard écrit six nouveaux récits. Le troisième et dernier séjour (en 1020) donne naissance à neuf autres. Comme on estime qu'au total il en a écrit une cinquantaine, c'est donc un peu moins de la moitié de son oeuvre qui aurait été composée à Conques.

   Bernard dit retranscrire les propos des habitants du coin et ceux de l'abbé Adalguier (Adalgerius). Cela explique la profusion d'anecdotes que son texte contient. Il va en être question plus loin, puisque cet assemblage hagiographique peut-être analysé sous un angle historique. C'est d'ailleurs ce qui fait affirmer au conférencier que l'on peut considérer Bernard d'Angers (dans une modeste mesure) comme un historien.

   En effet, il s'appuie sur des témoignages, en particulier pour établir les miracles. Il fait preuve d'un indéniable esprit critique vis-à-vis de ceux-ci (dans certaines limites)... et il n'hésite pas à exprimer son scepticisme, à l'occasion. Il serait même allé jusqu'à "tester" une miraculée, qui prétendait avoir recouvré la vue. Voilà Bernard qui lui tend un denier...

   Il s'est de plus efforcé de vérifier les affirmations contenues dans les témoignages, tentant de croiser les sources, quand c'était possible. Frédéric de Gournay a cité une anecdote éclairante à ce sujet. Elle vient du sixième récit du Livre I. L'érudit se serait rendu à la cour du duc d'Aquitaine (sise à Poitiers) et y aurait interrogé (avec insistance !) une aristocrate nommée Béatrice. Celle-ci lui aurait confirmé les propos tenus par des moines de Conques.

   Le conférencier a ensuite élargi le champ de vision. Bernard n'est pas le seul à livrer ce genre d'oeuvre, à l'époque. Rien que dans le voisinage, saint Vivien de Figeac et saint Privat de Mende ont subi un traitement semblable à celui de sainte Foy. Ces récits ont été répandus pour attirer les pèlerins, qui sont source de revenus. On espérait aussi bénéficier de donations. N'oublions pas que des communautés monastiques ont très tôt développé le sens du commerce ! Voilà pourquoi l'ouvrage commencé par Bernard d'Angers a été continué, par celui que l'on nomme couramment "l'anonyme de Conques". Frédéric de Gournay n'est pas loin de penser qu'il s'agit de l'abbé Odolric II, l'initiateur de la construction de la nouvelle église abbatiale, celle qui fait les délices des touristes encore aujourd'hui.

   Les récits de miracles n'ont pas été forcément bien reçus, y compris par les religieux. Beaucoup de personnes contestent les miracles attribués à sainte Foy, y compris ceux rapportés par Bernard d'Angers. Il semble toutefois que l'on ait accordé du crédit à ses livres, puisqu'il nous en est parvenu onze manuscrits (souvent partiels), dispersés en Europe. On peut légitimement avancer que d'autres copies ont été faites... et ont malheureusement disparu. Quand on sait qu'il n'existe de certains textes médiévaux célèbres qu'une ou deux versions connues, il apparaît que l'oeuvre de Bernard a eu un grand retentissement dans l'Occident chrétien.

   Frédéric de Gournay a conclu son exposé par trois exemples de données historiques fiables fournies par les livres de Bernard. il a cité le cas d'un comte du Rouergue (Raymond II), mort en 961 sur la route du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.

   Il est aussi revenu en détail sur le seigneur Hugues de Cassagnes, qui a tenté de voler le vin des moines (entreposé du côté d'Escandolières, en bordure du vallon de Marcillac... eh, oui, déjà !). Dans cette affaire, il a perdu deux hommes... ce qui prouve que, soit ils s'y sont mal pris, soit les moines tenaient vraiment beaucoup à leur pinard ! L'histoire ne s'arrête pas là. Le seigneur furieux s'en serait pris à son épouse Sénégonde, qui était hostile à l'équipée. Il l'aurait frappée... mais, accident malencontreux ou punition divine, il se serait blessé par la suite.

   La séance des questions du public a été l'occasion d'aborder des aspects "pointus", mais qui suscitent la réflexion des historiens. Au vu des anecdotes racontées par Bernard d'Angers dans ses ouvrages, on est amené à se demander si certains éléments du tympan de l'église abbatiale, censés illustrer de manière générale les péchés du monde, ne sont pas inspirés par ses écrits. Le cas du chevalier désarçonné a été cité.

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   A l'époque, il a vraiment existé un de ces nobles, qu'une chute malencontreuse (alors qu'il harcelait des paysans) aurait fait passer de la vie à trépas. Des questions subsistent aussi à propos du couple adultère représenté à ses côtés :

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   L'homme pourrait-il être ce seigneur pèlerin, qui, lorsqu'il venait à Conques, trompait son épouse sans vergogne... et qui a été mêlé à plusieurs rixes ? Soyons toutefois prudents. Il existe d'autres interprétations de cette partie du tympan (ce serait un prêtre nicolaïte).

   On s'est aussi demandé si le mauvais évêque-abbé (tonsuré, tenant une crosse) châtié sur le tympan ne serait pas celui de Clermont, réputé voleur, qui aurait fini par être chassé de Conques :

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   Les trois personnages situés à l'arrière-plan seraient des proches ou des neveux. Mais ce ne sont que des supputations.

   La question la plus tendancieuse est paradoxalement venue d'un père prémontré présent dans la salle. Il s'est interrogé sur une étrange forme génitive présente dans un extrait du texte latin de Bernard d'Angers. Cela se rapporte à sainte Foy, mais la déclinaison semble erronée. Le religieux a émis l'hypothèse que cette forme pourrait ne pas être le résultat d'une erreur, mais une allusion à la véritable origine du prénom de la sainte. En effet, celle-ci était issue d'une famille "païenne" (non chrétienne). Les parents l'auraient nommée Fides, non pas en référence à la foi ou l'espérance (fides, fidei, en latin), mais en référence à un instrument de musique, la lyre (fides, fidium). Comme on le voit, l'étude de l'histoire de Conques n'a pas fini de réserver des surprises.

vendredi, 04 octobre 2013

Nostalgie aveyronnaise

   L'an dernier, j'avais signalé la parution d'un excellent livre consacré à l'Aveyron des années 1950-1960, illustré par les photographies prises jadis par Jean Ribière. Le succès (mérité) rencontré par l'ouvrage explique sans doute que les éditions du Rouergue aient décidé de décliner la formule en fascicules thématiques. Quatre sont récemment sortis, au prix de 12 euros l'unité.

   Celui qui a pour titre Dans les burons de l'Aubrac est particulièrement bien conçu.

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   Après une introduction de Daniel Crozes, le travail des éleveurs est décrit avec minutie, le tout s'appuyant sur de magnifiques photographies en noir et blanc, toujours issues du fonds Jean Ribière. Voici par exemple comment on brisait le caillé :

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   Plus mystérieuse, l'image suivante montre le début du salage, une opération stratégique dans le processus de fabrication de la tome :

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   Daniel Crozes a aussi signé la préface du volume Dans les fermes et caves de Roquefort :

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   Les cabanières sont à l'honneur dans ce livre, qui, coïncidence, paraît au moment où leur fonction est supprimée chez Lactalis...

   Les deux autres fascicules sont présentés par Marie-Claude Dupin-Valaison, qui avait déjà signé les légendes du livre Le Temps de la terre (1950-1960). On reste dans le Sud Aveyron avec Chez les gantiers de Millau :

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   Cet ouvrage suscitera peut-être plus d'intérêt parce que les gestes qui sont montrés ont été en grande partie oubliés aujourd'hui. Voici par exemple l'étirement des peaux, par le coupeur, armé d'un couteau à déborder :

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   Les femmes sont très présentes dans le processus de fabrication. En général, on nous les montre installées devant une machine à coudre de marque Singer. Certains travaux nécessitent encore plus de doigté et sont exécutés à la main :

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   Le quatrième volume est intitulé Sur les chemins de Saint-Jacques :

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   C'est celui où l'imprégnation religieuse est la plus grande, par exemple lorsqu'il est question des préparatifs de la procession d'Estaing :

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   Les curieux observeront avec attention les images de l'église abbatiale de Conques, dont les vitraux n'avaient pas encore été remplacés par ceux de Pierre Soulages :

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   Heureuse époque ?

   P.S.

   Cette fois-ci, les ouvrages ont été imprimés en France, plus précisément à Péronnas, dans l'Ain, alors que le livre paru l'an dernier sortait d'une imprimerie espagnole. Les mois suivants, une mini-polémique avait agité le département, à propos du (trop ?) grand nombre de livres consacrés à l'Aveyron imprimés sous des cieux plus exotiques...

mercredi, 02 octobre 2013

"La Morinade" a réussi son transfert

   L'émission humoristique de la radio "jeune" Le Mouv' a subi quelques vicissitudes. L'an dernier, la quotidienne avait vu son positionnement horaire changer à plusieurs reprises. Puis, fin juin, ce fut l'annonce, terrible, de la suppression de l'émission, dont la dernière diffusée a été enregistrée en public.

   On se demandait ce qui pouvait justifier cette éviction, alors que ce programme était de loin le plus téléchargé du Mouv'. Jalousies ? Mépris pour l'humour potache et décalé dont l'émission regorge ? Toujours est-il qu'il y a un peu moins d'un mois, la bonne nouvelle est tombée : La Morinade était de retour, toujours sur le Mouv', mais en diffusion hebdomadaire, le dimanche (de 18h à 20h), à partir d'un enregistrement public réalisé dans la semaine.

   J'ai laissé passer quelques numéros, pour voir. La technique s'est améliorée. Il a fallu concilier le côté intime de la plupart des chroniques avec l'ambiance d'une salle vivante. Il a fallu aussi que les humoristes s'adaptent à leurs nouvelles conditions d'exercice. Le résultat s'est sans cesse amélioré.

   L'émission diffusée dimanche 29 septembre est un excellent cru. Elle a commencé par le portrait vachard (et plein d'autodérision) de l'invitée (Sophie Marie Larrouy) réalisé par une Anne Ma en pleine forme. Lui a succédé une reprise de la chanson satirique des Inconnus (C'est toi que je t'aime) par le groupe Les Gars Dans L'Coin. Les musicos ont assuré et, côté texte, ils ont eu la bonne idée d'adapter certaines références, Jacques Chirac devenant Jean-François Copé, Patrick Sabatier devenant Laurent Ruquier, le Sacrée Soirée de Jean-Pierre Foucault étant remplacé par The Voice et "3615 Ulla" par Youporn !

   A ce grand moment en a succédé un autre, plus... spirituel. Le Père Albert est intervenu, pour rendre compte de la "formation champignon" qu'il a créée, pour les jeunes en recherche qui fréquentent sa caravane...

   Puis, ce fut le tour de Frédéric Martin de nos proposer un nouvel épisode du Débile Mentaliste... ou comment faire de la télévision haut de gamme à la radio !

   Le retour d'Albert Algoud nous a valu la suite des aventures du cowboy gay Robert Michou (avec Anne Ma en faire-valoir), qui ne manque jamais de rappeler la présence de son fidèle destrier, Golden Shower...

   Face à ces accès de débauche, on avait bien besoin de romantisme. C'est Daniel Morin lui-même, ou plutôt son double chtimi Jacky, qui s'est chargé de relever le niveau... avec tendresse.

   Un peu avant la fin de la première heure, on nous a proposé deux fausses pubs (une de Fred Martin, l'autre de Thomas Croisière) particulièrement réussies. Le journal arriva peu après. Ce fut l'occasion d'entendre deux personnages hauts en couleur, Jaquette et le maréchal Ganache, chacun à l'honneur dans son style inimitable. Le second est repassé à l'antenne, pour le décrochage radio-anal de Radio Caca.

   C'était décidément un peu la soirée Albert Algoud, que l'on revit à l'occasion de l'arrivée du chanteur maison de La Morinade, j'ai nommé l'incommensurable Jean-Pierre Aznavour. Une performance inoubliable ! Et, comme la grande musique était à l'honneur, Les Gars Dans L'Coin sont revenus, pour une reprise pêchue de Que je t'aime.

   Au-delà de la gaudriole, l'émission se veut de service public. Chaque semaine, l'équipe tente d'aider l'incurable célibataire forcée Anne Ma à trouver chaussure à son pied. La séquence "Tournez Nadège" a permis à certains spectateurs de se mesurer aux exigences de la dame... Dame que l'on a vite retrouvée dans sa chronique télé. Celle-ci a été consacrée à un programme qui m'a l'air particulièrement vulgaire et racoleur, Les Grandes Histoires, sur NRJ 12 (parfois judicieusement surnommée "NRJ Bouse"). Je ne sais pas ce qui est le pire dans cette émission, ou la bêtise des personnes qui se laissent filmer (et manipuler), ou le cynisme de ceux qui font du blé sur la misère intellectuelle d'une partie de la population française.

   Thomas Croisière est arrivé à point pour redonner le moral à tout le monde. Il a concentré ses jeux de mots dans une reprise très personnelle de Femme, femme, femme de Serge Lama.

   L'assemblage de ces talents disparates me rappelle les grandes émissions d'humour qui se sont succédé sur France Inter depuis le début des années 1980. Pourvu que ça dure !