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vendredi, 06 mai 2016

Du bruit autour des éoliennes

   Ce bruit est d'abord celui d'une série d'articles parus ce vendredi dans La Dépêche du Midi, sur une double page. Ils sont illustrés par une carte (fort instructive) des implantations d'éoliennes dans l'Aveyron (en service, en attente, en cours d'instruction) :

LaDépêche 06 05 2016.jpg

(Une version grand format est disponible dans l'édition papier.)

   Que constate-t-on ? Que l'ouest, le nord-ouest et le nord du département sont exempts d'implantation. Pour le nord, on n'est pas étonné, puisque les promoteurs aveyronnais du PNR Aubrac n'en veulent pas (contrairement  à certains de leurs voisins lozériens). Concernant les installations en attente, on remarque que sont concernées les communes proches de la partie est de la RN88 et (surtout) celles du Sud Aveyron, le projet le plus important portant sur la commune de Mélagues. Le quotidien oublie de rappeler qu'une discrète décision de justice (relayée, à ma connaissance, uniquement par L'Hebdo) entrave la réalisation dudit projet.

   Cette énergie renouvelable semble ne plus avoir le vent en poupe dans le département : le commissaire-enquêteur désigné pour évaluer à nouveau le dossier de Bertholène vient de rendre un avis défavorable. Notons que cela ne clôt pas l'affaire : il y a trois ans, un autre commissaire-enquêteur, analysant la première version du dossier, avait donné un avis favorable, ce qui n'avait pas empêché le projet d'être bloqué. (Le quotidien publie un autre papier utile pour comprendre les méandres de la procédure.)

   Bien conçue, la double-page de La Dépêche s'efforce d'aborder le plus grand nombre d'aspects possible. Ce sont surtout les aspects négatifs qui sont évoqués, notamment dans un entretien avec un opposant au projet des Palanges. C'est intéressant parce que c'est argumenté, à l'exception toutefois de la question touristique. J'aimerais bien connaître l'identité de ces "professionnels du secteur du tourisme installés au Lévézou" qui auraient cessé leur activité à cause de la mauvaise image des éoliennes. Là, on est dans l'exagération.

   Il faut aussi revenir sur certaines affirmations, notamment celles portant sur la supposée dévalorisation du patrimoine immobilier à cause de l'implantation d'éoliennes à proximité. Voilà qui mériterait une argumentation chiffrée, qui s'appuierait, par exemple, sur les données rassemblées par les notaires. Rendez-vous compte ! Des bourgeois s'offrent une chaumière dans une campagne dynamique, comptant la revendre avec un joli bénéfice ! On est loin des ruraux bien implantés, dont la maison, véritable patrimoine familial, n'est pas destinée à être vendue, mais léguée aux enfants.

   Tout cela n'empêche pas qu'il faille rester vigilant quant au développement de l'éolien, à mon avis indispensable. Mais il doit s'effectuer en suivant des règles strictes, qui concilient notre avenir énergétique avec le bien-être des habitants.

vendredi, 29 avril 2016

Antisémitisme ordinaire

   Hier, dans La Dépêche du Midi (mais l'information est parue dans d'autres journaux), une petite colonne, située en bas à gauche de la page 7, portait le titre : "Passé à tabac car juif et donc... riche". On pourrait se contenter de hausser les épaules et se dire que, dans le torrent de violence et d'incivilités qui marque notre époque, ce n'est qu'une goutte d'eau supplémentaire. Certains "esprits forts" pourraient même suggérer la prudence, puisque, ces dernières années, quelques unes (très rares) des agressions rapidement qualifiées d'antisémites se sont révélées fausses. (On pense notamment à la jeune femme du RER, en 2004, et à l'enseignant marseillais, en 2015.)

   Mais l'affaire qui nous occupe (et qui remonte à novembre 2015, pour l'agression) est éclairante à bien des égards. Elle est d'abord révélatrice des préjugés antisémites qui existent au sein d'une partie de la population française : l'employé de la serrurerie était présumé riche car juif. On retrouve ici le même type de préjugés que ceux qui ont été à l'oeuvre dans l'enlèvement puis le meurtre d'Ilan Halimi, en 2006. (Notons que la plupart des agresseurs sont déjà sortis de prison...) Le pire est que l'homme n'est pas juif, mais a été supposé tel parce que son patron avait fait de la publicité sur Radio J. Là, c'est révélateur d'un mode de raisonnement communautaire, une autre des plaies de notre époque : les juifs avec les juifs, les musulmans avec les musulmans etc.

   Le troisième élément qui saute aux yeux est une absence : celle de la moindre allusion à l'origine ou la culture des accusés. Les deux principaux sont qualifiés d'adolescents (ils ont 16 ans, mais en avaient 15 lors de l'agression). Ils habiteraient Bussy-Saint-Georges (ils sont scolarisés dans le lycée local), une ville de la banlieue parisienne, située dans une partie de la Seine-et-Marne proche de la Seine-Saint-Denis. Vous voyez où je veux en venir : on se demande si les agresseurs ne seraient pas musulmans. L'affirmer, à ce stade, est faire preuve de préjugés... mais aucun élément n'a été publié dans la presse permettant de se faire une idée sur la question (ni prénom, ni initiales, ni lieu d'habitation ou situation familiale). Je sais bien qu'il faut protéger l'identité des mineurs, mais là, il me semble que l'excès de précaution masque quelque chose...

   P.S.

   Le jeune homme agressé a récemment témoigné sur Europe 1.

jeudi, 21 avril 2016

Une "nouvelle" statue-menhir

   Elle a été découverte à la frontière du Tarn et de l'Aveyron (côté tarnais), dans la commune de Montirat, située grosso modo à mi-chemin de Villefranche-de-Rouergue et d'Albi :

Carte.jpg

   A ma connaissance, c'est Centre Presse qui a sorti l'information en premier, dans son numéro de mardi :

CPresse 19 04 2016.jpg

   L'article nous révèle deux autres choses, d'abord que la véritable découverte est beaucoup plus ancienne, ensuite que c'est parce qu'il était venu au (superbe) musée Fenaille qu'un chasseur du coin a compris l'importance de l'objet. (On peut aussi déplorer que ce modeste paragraphe n'ait pas été relu avec plus d'attention...)

   Pour savoir à quoi ressemble la statue-menhir, on peut se rendre sur le site de France 3 Midi-Pyrénées, qui en a parlé le même jour que Centre Presse (mais plus tard, dans l'après-midi) :

2016 a.jpg

2016 e.jpg

   On nous dit que la statue aurait environ 5 000 ans et qu'elle serait inachevée. La courte vidéo montre un archéologue examinant l'objet. Il penche pour une statue féminine, bien qu'il manque nombre de détails. Peut-être qu'après son nettoyage d'autres éléments (même ténus) apparaîtront.

   P.S.

   Rappelons qu'en 2013 une autre statue-menhir avait été découverte, à la limite de l'Hérault et du Tarn. A l'époque, on en a beaucoup parlé parce qu'elle a été trouvée enterrée (ce qui pourrait fournir de précieuses informations sur le contexte de sa création) et parce qu'elle comporte une bouche (ronde), une première chez une statue masculine :

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   P.S. II

   Quelques années auparavant (en 2010 ?), une autre statue avait été découverte dans le Tarn, à Montalet (du côté de Lacaune), pas très loin des rives du lac où la précédente était enfouie. Elle a fait l'objet d'une analyse détallée par Jean Gasco et Michel Maillé.

mercredi, 20 avril 2016

Cauval au bord du gouffre ?

   Le groupe d'ameublement français ne cesse de défrayer la chronique (économique). Il y a quelques années, on en a beaucoup parlé dans l'Aveyron, jusqu'à la déconfiture de l'usine de Sévérac-le-Château, au profit (pensait-on) de celle de Bar-sur-Aube. Les difficultés n'ont cependant pas cessé, avec, l'an dernier, un conflit avec les enseignes But à la clé. Du côté de la Champagne, on a aussi pu constater la baisse progressive des effectifs.

   Le patron Gilles Silberman était à la recherche de nouveaux partenaires et semblait avoir trouvé le bon, une société portugaise qui évolue dans le même secteur... mais qui s'est finalement désistée. Faute d'apport financier, le groupe a été placé en redressement judiciaire, dans l'attente d'un (ou plusieurs) repreneur(s). Les candidatures ne se sont pas fait attendre. On a parlé de six puis de dix repreneurs potentiels, aucun ne s'engageant à garder l'intégralité des sites, à l'exception de deux anciens cadres de Cauval, soutenus par un  fonds d'investissement.

   Certains (comme le suédois Hilding Anders ou Arcole Industries) semblent avoir peu de chances. On s'étonne aussi de voir figurer la holding Verdoso, contrôlée par... l'un des fondateurs de Cauval (Franck Ullmann). De très mauvaises langues se demandent s'il n'y aurait pas là une manoeuvre concertée avec G. Silberman, pour conserver le groupe Cauval après l'avoir "dégraissé" à moindres frais. Autre surprise : la candidature du portugais Aquinos... le partenaire avec lequel Cauval envisageait tout récemment de se "marier" ! Là, on se demande si le secteur de l'ameublement n'est pas devenu un lac aux requins. Aquinos est-il de bonne foi et a-t-il renoncé à l'alliance avec Cauval pour de bonnes raisons (la crainte d'avoir affaire à un partenaire peu scrupuleux) ? Ou bien le groupe portugais n'est-il qu'un opportuniste, qui a jugé que, devant les difficultés de Cauval, mieux valait laisser pourrir la situation, pour n'en garder que les bons morceaux ? C'est difficile à dire, d'autant plus qu'il est possible que les deux soient vrais !

   Cependant, il semble que ce soit un autre candidat qui tienne la corde : le groupe sud-africain Steinhoff. Il y a moins d'un mois, Le Monde a consacré un portrait plutôt flatteur à Christoffel Wiese, le premier actionnaire du groupe. Celui-ci est à la manoeuvre en France depuis au moins le début des années 2010, quand il a racheté Conforama au groupe Pinault (PPR). Cela a d'ailleurs contribué à dégrader la situation de Cauval, dont c'est l'un des principaux clients, qui s'est désormais davantage fourni ailleurs. On a récemment reparlé de Steinhoff, qui tente de souffler Darty à la FNAC. Pour la petite histoire, précisons que la FNAC est une autre ancienne pépite du groupe PPR (aujourd'hui Kering), dont le premier actionnaire reste la holding Artemis, qui gère les intérêts de la famille Pinault.

   Pour compléter ce mécano industriel, ajoutons que Darty est à l'origine une entreprise française, passée (dans les années 1990) sous la coupe du britannique Kingfisher... tout comme But, autre entreprise tricolore (et le principal concurrent de Conforama en France, après Ikea). Les deux ont été intégrées dans une filiale, Kesa, qui s'est séparée de But en 2008.

   L'autre indice qui me fait penser que c'est Steinhoff qui tient la corde dans la reprise de Cauval est que le groupe sud-africain a amélioré son offre (sur des conseils venus de France ?) : alors qu'il proposait, à l'origine, de ne reprendre que trois des usines, il est monté à quatre puis à cinq. Par contre, il ne garderait qu'un peu plus de la moitié des employés. C'est dû au fait qu'il laisse de côté le principal site de Cauval, l'usine de Bar-sur-Aube qui, malgré toutes les aides publiques versées depuis moins de dix ans, risque donc de fermer définitivement. Chez Cauval, c'est le secteur des matelas (et les marques) qui intéresse les éventuels repreneurs, pas celui des canapés et fauteuils.

   Un autre site est menacé de fermeture : celui de Flaviac, en Ardèche. Il y a quelques années, Cauval y avait arrêté la fabrication de matelas Simmons. Une soixantaine d'emplois avaient été maintenus grâce à la reconversion du site, devenu Ecoval, avec un projet innovant (autour du recyclage)... financé par de l'argent public, le groupe Cauval s'étant là encore débarrassé des locaux en les vendant à la communauté de communes.

   Qu'est-ce qu'il ressort de tout cela ? Que la gestion du groupe Cauval n'est pas des plus limpides. Même si le secteur de l'ameublement traverse une période difficile, il y a sans doute des causes internes aux problèmes du groupe. L'arrivée de Steinhoff pourrait se révéler bénéfique, si elle assure davantage de débouchés aux produits des usines. Mais peut-être vaudrait-il mieux que ce soit une équipe qui connaisse l'entreprise qui la reprenne. Il faudrait voir le détail du projet des anciens cadres, jugé crédible par la CGT.

   A une échelle beaucoup plus réduite, à Sévérac-le-Château, dans l'Aveyron, le site a naguère été relancé par d'anciens employés, qui ont fondé ITA Moulding Process. Il va de son bonhomme de chemin et communique, de temps à autre. Il sera partenaire du ROC Laissagais 2016, qui servira de support au championnat du monde de VTT marathon :

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Centre Presse, 19 avril 2016

   P.S.

   Pour en savoir plus sur le site de Sévérac-le-Château (et l'entreprise qui l'occupe actuellement), on peut lire les articles qui viennent de paraître dans Centre Presse.

   D'après un encadré présent dans la version papier, un livre et un DVD sont en préparation.

mercredi, 30 mars 2016

"Le Monde" coquinou

   Je fais partie des lecteurs du "quotidien de référence" qui apprécient modérément le supplément magazine du samedi. Celui-ci est essentiellement constitué de publicités tape-à-l'oeil pour des produits moches et chers. Sont intercalés des articles d'intérêt extrêmement variable. Parfois, ce sont des entretiens lèche-cul, parfois, ce sont des reportages originaux. Du coup, en général, je survole les pages en papier glacé, réservant mon attention au véritable contenu rédactionnel, celui imprimé sur les feuilles pourries qui tachent les doigts.

   Ce week-end, en mettant un peu d'ordre dans les vieux journaux avant de les apporter à la borne dédiée, je me suis replongé dans certains exemplaires, dont le magazine du samedi 12 mars 2016. Je suis retombé sur des photographies de mode d'un Japonais excentrique qui, dans la plupart de ses clichés, avait associé des objets anodins ou des poupées démembrées à des accessoires de mode. L'une des photographies faisait exception : on pouvait y voir un sac à main sans doute onéreux, que l'on pourrait qualifier de bien membré :

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mardi, 23 février 2016

Le coutelier de l'ombre

   L'idée de ce billet a commencé à germer dans mon esprit à la lecture d'une double-page du quotidien Centre Presse du jeudi 4 février dernier. Insérée dans la rubrique "AUBRAC - CARLADEZ : SPECIAL LAGUIOLE", cette double-page était en fait une apologie de la coutellerie de... Thiers. Au détour de l'un des articles, il était question d'un coutelier aveyronnais, Christian Valat, en place à Espalion depuis les années 1990.

   Cela nous ramène à l'histoire de la Forge. Elle est née en 1987, sous le nom de SARL Laguiole. D'après l'ouvrage de Daniel Crozes Le Laguiole, Eloge du couteau, quatre fées se sont penchées sur son berceau... des fées avec du poil aux pattes, puisqu'il s'agit de quatre messieurs : l'Aveyronnais Christian Moulin, le Thiernois Jean-Michel Mazelier (qui a fourni les premières machines), le cafetier parisien Jean-Louis Costes (qui a apporté les fonds) et Gérard Boissins, qui a dirigé le tout.

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   En 2003 se produit le premier changement de direction. Gérard Boissins et ses associés se retirent, au profit d'un certain Bernard Divisia, un ancien de LVMH. Quelques années plus tard, on comprend que le succès n'est plus au rendez-vous : le PDG cherche de nouveaux actionnaires (et de l'argent frais).

   C'est à ce moment-là (en 2007) que Christian Valat est entré en scène. Enfin... cela dépend des sources. La plupart (comme L'Usine nouvelle) citent les noms des cinq nouveaux actionnaires : Jean-Luc Bessodes (agent immobilier), Jean-Marc Calvet (maire de Rignac, aussi présent dans le secteur de l'immobilier), Thierry Moysset, Honoré Durand (un ancien photographe qui s'est lancé avec succès dans la coutellerie, à Laguiole) et... un certain Philippe Valat, qui est parfois présenté comme coutelier. En 2008, au moment du retrait d'Honoré Durand, il est toujours question de ce Philippe Valat. Le problème est que je n'ai pas trouvé trace de ce coutelier-là et que, dès 2009, c'est Christian Valat qui est présenté comme l'actionnaire majoritaire de la Forge. Donc, soit il a succédé à un membre de sa famille, soit il était, dès 2007, l'un des cinq, comme le sous-entend un récent article suisse.

   Si c'est le cas, l'erreur commise par presque tous les médias de l'époque est révélatrice de la discrétion du personnage (et de la relative opacité qui a entouré les changements d'actionnaires de la Forge). Il n'est d'ailleurs pas facile de dénicher une photographie du coutelier. J'ai fini par en trouver une (qui date de quelques années), sur le site d'un passionné :

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   Comme le précise le rédacteur du site, elle a été prise par Christian Lemasson. Elle est même présente (page 182) dans sa monumentale Histoire du couteau de Laguiole, parue il y a un peu plus d'un an... et qui rend principalement hommage aux couteliers thiernois. Précisons que le livre a été publié aux éditions des Monts d'Auvergne.

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   L'auteur y consacre quelques pages à ceux qui, comme Christian Valat, défendent aujourd'hui le couteau Laguiole de qualité, sans être très connus. Et pourtant, c'est un entrepreneur d'envergure, qui a investi dans un grand nombre de sociétés, comme en témoigne la fiche qui lui est consacrée sur le site de bfmtv. Le vaisseau amiral est bien entendu la coutellerie espalionnaise, dont le chiffre d'affaires n'est pas très éloigné de celui de la Forge de Laguiole.

   Cela nous mène tout naturellement à 2014. Christian Valat et Jean-Marc Calvet ont vendu leurs parts (de la Forge) à une holding suisse. (Il n'est pas question de Jean-Luc Bessodes.) Les rumeurs les plus folles ont couru sur l'Aubrac, à tel point que le coutelier espalionnais avait pris la peine de démentir dans Centre Presse... alors qu'il allait bien vendre ses parts. Pour combien ? On ne sait pas. Secret des affaires. Chut. En théorie, on doit pouvoir se baser sur le chiffre d'affaires et les bénéfices. Le premier, d'après tous les sites spécialisés (comme Manageo), est d'un peu moins de 5 millions d'euros. En fonction du secteur concerné et du profil de l'entreprise, cela peut constituer une base de départ, la fourchette s'étalant peut-être entre 2,5 et 6 millions d'euros (de 50 % à 120 % du C.A.). Mais les bénéfices sont relativement faibles, autour de 100 000 euros. Cela me conduit à penser que le prix de vente était plus proche de 3 millions que de 5 millions d'euros... à moins que les investisseurs suisses n'aient vu en la Forge une pépite sous-valorisée.

   Quoi qu'il en soit, les actionnaires vendeurs ont dû empocher un joli paquet. Est-ce pour autant l'appât du gain qui a motivé cette vente ? C'est difficile à dire. La Forge a le vent en poupe. En 2014, une décision de la Cour de justice de l'Union européenne lui a donné raison contre Gilbert Szajner. La même année, la loi sur la consommation a entériné la création des indications géographiques pour les produits manufacturés, une décision qui ne peut que favoriser commercialement la production française.

   C'est à mon avis justement là que le bât blesse. Dans la région, personne n'ignore les tensions qui existent entre certains couteliers laguiolais (au premier rang desquels la Forge) et leurs homologues de Thiers (rejoints par quelques Aveyronnais mi-assembleurs mi-couteliers). Je pense que Christian Valat fait le pari qu'il n'y aura pas d'IG Laguiole-Aveyron, mais une IG Laguiole-France (dont l'aire géographique engloberait les deux bassins couteliers). Cela expliquerait son désengagement de la Forge.. et son rapprochement des couteliers thiernois... ce qui nous ramène au début de ce billet, à l'article de Centre Presse, dans lequel on peut lire que la coutellerie "David de Thiers" (propriété de... Christian Valat) a rejoint le Claa (l'association "Couteau Laguiole Aubrac Auvergne"), qui milite pour une IG unique, sur une zone large. Tout un symbole !

dimanche, 14 février 2016

Délinquance juvénile (suite)

   Cela fait partie des petits bonheurs de la lecture d'anciens journaux. Chaque semaine, l'hebdomadaire aveyronnais Le Villefranchois propose, dans un encadré, un extrait d'un numéro datant d'environ 100 ans. A l'époque, le journal s'appelait Le Narrateur. Voici ce qu'on peut lire dans l'exemplaire sorti jeudi dernier :

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   Comme cet organe de presse a été entièrement numérisé, on peut se rendre sur le site des Archives départementales de l'Aveyron pour vérifier que la citation est exacte :

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   Il s'agit bien d'un extrait du numéro du 12 février 1916. (Notons qu'une petite coupure a été pratiquée.) Dans la partie aveyronnaise des informations, on peut lire un article sur une nouvelle marraine de guerre, qui a accepté de correspondre avec un soldat prisonnier en Allemagne, père de six enfants. Un peu plus loin, il est question d'une éclipse de soleil et de nouvelles machines agricoles, dont la maniabilité a été testée.

   La première page du journal est consacrée aux informations nationales et internationales. Les nouvelles des combats sont assez vagues et peu intéressantes. Au niveau des anecdotes, on retiendra les funérailles des victimes des bombardements opérés par les dirigeables allemands (les fameux Zeppelins). A l'étranger, c'est la guerre civile en Chine qui est l'honneur, ainsi qu'un mystérieux incendie du parlement canadien, à Ottawa. L'article penche pour un complot allemand.

   Mais revenons à nos moutons aveyronnais. Les incivilités de 1916 ne sont pas sans rappeler (hélas) celles de notre époque, preuve que, d'un siècle à l'autre, la bêtise ne change guère. On en avait d'ailleurs déjà eu la preuve dans un précédent numéro du Villefranchois, paru il y a environ deux ans et demi.

   P.S.

   Concernant le Journal de l'Aveyron, dont les exemplaires ont eux aussi été numérisés, il conviendrait de mettre un peu d'ordre dans le classement des numéros. Quand on recherche ceux d'une année précise, on trouve les exemplaires présentés non pas par mois, mais en fonction du jour de parution, quel que soit le mois... si bien que, dans l'ordre des réponses pour l'année 1916, le numéro du 1er octobre arrive en tête, suivi de ceux du 2 janvier, du 2 avril, 2 juillet, 3 septembre, 3 décembre, 4 juin...

vendredi, 22 janvier 2016

Féminisme assyrien

   Il y a environ 4 000 ans, dans la région de Mossoul, où sévissent actuellement les nervis de l'Etat islamique, des femmes jouissaient d'une assez grande liberté, comme on peut le constater en lisant l'un des articles du dernier numéro des Cahiers de Sciences & Vie (celui de janvier 2016) :

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   C'est grâce à la traduction de milliers de tablettes d'argile que l'on en a appris davantage sur cette prestigieuse civilisation. On découvre ainsi des bribes de correspondance au sein de familles de marchands. Le père ou mari étant souvent en déplacement, une grande autonomie était laissée aux épouses et aux filles qui, de surcroît, avaient appris à lire, écrire et compter (autant de compétences qu'on serait ravi de voir maîtrisées par les élèves qui sortent de l'école primaire française du XXIe siècle...).

   Les extraits proposés dans l'article témoignent de l'aplomb avec lequel les marchandes s'exprimaient : elles n'étaient visiblement pas des épouses ou des filles soumises et effacées. Elles pouvaient d'ailleurs décider de divorcer. Ajoutons qu'à cette époque, le monde assyrien tend vers la monogamie (contrairement à ce qui existe dans bien d'autres civilisations de l'Antiquité, du Moyen Age... voire de l'époque contemporaine). Il existait même des femmes adultes célibataires, qui pouvaient posséder des terres et hériter des biens de leur père.

   Ce numéro des Cahiers de Sciences & Vie comporte d'autres articles enrichissants. Certains d'entre eux n'apprendront pas grand chose à ceux qui s'intéressent à des sujets comme le Saint Suaire de Turin ou les conséquences de l'éruption du Vésuve à Pompéi en 79. Le dossier qui fait la Une (consacré aux "invasions barbares") fait le point sur une question controversée, en s'appuyant sur de nombreux documents. Je recommande aussi l'article consacré à la violence à l'époque néolithique et celui qui évoque les pilleurs de patrimoine.

   Pour moins de six euros, cela vaut le coup !

mercredi, 13 janvier 2016

Déchéance de nationalité

   La Une du Canard enchaîné sorti aujourd'hui comporte un joli scoop (pour ceux qui ne connaissaient pas ce détail de l'Histoire) : un extrait du Journal Officiel (daté de 1940) évoquant la déchéance de nationalité qui a frappé, à l'époque, un certain Charles de Gaulle.

   On peut retrouver l'intégralité du décret sur le site de la Fondation de la France Libre. Notons que sa republication n'a rien à voir avec le débat qui agite actuellement l'opinion publique : il a été mis en ligne en juin 2010.

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    Cette avanie n'était que la dernière d'une série que le gouvernement de Vichy avait fait subir à Charles de Gaulle. Le général de brigade (à titre provisoire) a été successivement dégradé, mis à la retraite d'office, condamné à de la prison (par un conseil de guerre réuni à Toulouse) puis à mort, par contumace, à Clermont-Ferrand. (Cela veut dire que s'il avait été fait prisonnier par Vichy au cours de la guerre, il aurait sans doute été exécuté.)

   Cette condamnation à mort a d'ailleurs été évoquée par certains organes de presse. C'est le gros titre du numéro de Paris-soir paru le 4 août 1940 :

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   On la retrouve aussi en première page du quotidien catholique conservateur La Croix, le même jour :

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   Même le très sérieux journal économique Le Temps aborde le sujet, mais indirectement, dans un discret article situé en page 2 du numéro daté lui aussi du dimanche 4 août 1940 :

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samedi, 09 janvier 2016

La Poste menacée à Rodez

   Aujourd'hui, il fallait avoir de bons yeux, quand on est lecteur de La Dépêche du Midi, pour y dénicher, dans un coin de la page 36, un tout petit article qui aborde pourtant un grand sujet :

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   Selon le syndicat FO, l'existence même du bureau de Poste du Faubourg serait menacée, la direction de l'entreprise de service public étant tout acquise au fanatisme libéral qui fait des ravages dans notre pays. Derrière, on sent poindre l'argument de la "rentabilité" et, sans doute, le fait que la commune de Rodez (peuplée de 24 à 26 000 habitants, selon la méthode de comptage) possède deux autres bureaux de poste, un petit dans le "nouveau" quartier de Bourran et un grand (le principal, l'historique) au coeur du Piton, à proximité de la cathédrale :

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   Pourtant, le bureau du Faubourg ne me semble pas sous-utilisé. A chaque fois que je m'y rends, il y a du monde... certes, pas autant qu'à la poste centrale, mais tout de même ! De surcroît, ce bureau  a récemment (en 2012) bénéficié d'importants investissements (plus de 250 000 euros). Il ne faudrait pas que la municipalité ruthénoise se fasse berner comme sa voisine castonétoise, il y a environ trois ans. Je ne voudrais pas que l'on tente de faire avaler aux usagers la fermeture du bureau du Faubourg en échange de l'ouverture d'un relais-commerçant qui serait une régression en matière de service public.

samedi, 21 novembre 2015

Le 13 novembre, tragédie mondiale

   Les journaux se sont mis à publier la liste des victimes des attentats de vendredi dernier. La plus complète que j'ai trouvée est celle du Parisien (que l'on peut croiser avec celle du Monde). Notons qu'un 130e nom (le dernier, espérons-le) vient de s'ajouter : l'une des personnes gravement blessées au Bataclan est décédée jeudi, à l'hôpital.

   Sur 130 personnes assassinées, 30 sont de nationalité étrangère ou nées à l'étranger, soit 23% du total. Quand on s'intéresse aux pays d'origine, on constate que quatre continents ont été touchés : l'Europe, l'Amérique, l'Afrique et (un peu) l'Asie.

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   D'outre-Atlantique, ce sont des Latino-Américains qui ont été tués. L'une d'entre eux, Nohemi Gonzalez, est états-unienne (avec des origines mexicaines semble-t-il). On remarque que l'autre Mexicaine (Michelle Gil Jaimez) et le Vénézuélien (Sven Silva Perugini) ont des liens avec l'Espagne, ce qui peut expliquer leur présence en France. Le cas de la Franco-Chilienne Patricia San Martin est le plus frappant : jeune femme, elle avait fui la dictature de Pinochet... et elle est morte tuée par des islamo-fascistes.

   On est moins étonné de voir la place qu'occupe l'Afrique dans le cortège des victimes. A l'exception de l'Egypte, tous les pays d'origine sont d'anciennes possessions coloniales françaises, d'où sont ensuite parties les vagues de migrants économiques : Maroc, Algérie et Tunisie au nord, Mali, Burkina Faso et Congo au sud du Sahara. Ce dernier pays est à l'honneur, en raison du comportement héroïque de la victime, Ludovic Boumbas, mort en protégeant une amie. Signalons que d'autres personnes (françaises, celles-là) ont fait preuve du même courage. Dans la liste publiée par Midi Libre, on repère les noms de Nicolas Catinat, Julien Galisson, Gilles Leclerc et Richard Rammant.

   Concernant l'Afrique, les médias ont surtout insisté sur le cas de la cousine du footballeur Lassana Diara, la Franco-Malienne Asta Diakité. On aurait tout aussi bien pu mettre à l'honneur Kheireddine Sahbi, violoniste algérien.

   Sans surprise, l'Europe occupe la part du lion, avec certains de nos voisins (Allemagne, Belgique, Espagne, Italie, Royaume-Uni), d'autres victimes étant issues de pays un peu plus lointains (Portugal et Roumanie). Notons que l'un des deux Portugais décédés, Manuel Dias, est la seule victime du Stade de France. On peut rattacher à ce groupe les personnes de culture euro-asiatique, la jeune Franco-Arménienne Lola Ouzounian (l'une des dernières à avoir été identifiées) et Nathalie Mouravieva, une Russe devenue l'épouse du Français Serge Lauraine.

vendredi, 20 novembre 2015

Crétins Academy

   A la suite de l'action des barbares de l'Etat islamique à Paris vendredi dernier, il a été décidé, en France mais aussi ailleurs dans le monde, d'organiser un recueillement autour d'une minute de silence, au début des rencontres de football. En général, cela a donné des scènes émouvantes.... ce qu'il est important de rappeler avant d'évoquer les tristes sires qui profité de l'occasion pour révéler au monde à quel point ils sont stupides.

   On a surtout parlé de ce qui s'est passé à Istanbul, à l'occasion du match Turquie-Grèce. De nombreux crétins congénitaux supporteurs mal élevés ont sifflé la minute de silence, voire ont proféré des "Allah Akhbar". On a aussi entendu des chants favorables au président (islamiste présumé modéré) Erdogan. Une journaliste d'Europe 1 rappelle que ce n'est pas la première fois que cela se produit dans une enceinte sportive turque.

   Sur le site 20minutes, on apprend qu'il s'agirait d'un chant hostile aux rebelles du PKK et que ces vocalises auraient pour but de souligner la différence de traitement entre les victimes des attentats de Paris et Istanbul (qui ont pourtant été eux aussi abondamment médiatisés). Le problème est que les attentats d'Istanbul n'ont pas été perpétrés par le PKK, mais par l'Etat islamique. Il y a donc une confusion (volontaire ?) entre l'action de ces deux groupes, qui rappelle la propagande du gouvernement Erdogan. C'est un chant hostile aux islamo-fascistes de Daech qu'il aurait été cohérent d'entonner... mais le mieux aurait surtout été que ces imbéciles ferment leur gueule. (Au passage, on remarque la similitude de la politique de désinformation pratiquée par Erdogan en Turquie et el-Assad en Syrie, chacun faisant volontairement l'amalgame entre tous ses opposants pour les réduire au vocable de "terroristes".)

   Dublin a connu des événements comparables à ceux d'Istanbul, mais on en a moins parlé. Avant le coup d'envoi du match Irlande-Bosnie, ce sont des supporteurs bosniens qui ont manifesté leur "beaufitude". Précisons que la majorité du public a eu plus de classe... et le résultat de la rencontre (2-0 pour la République d'Irlande) sonne comme une petite revanche : la Bosnie est éliminée de la course à l'euro 2016. L'été prochain, les stades français seront au moins libérés de cette catégorie d'abrutis-là. (Il risque hélas d'en y avoir bien d'autres...)

   Ne croyons pas cependant que l'imbécillité soit le privilège d'étrangers. La France a aussi été le théâtre de comportements inciviques... jusque dans mon bel Aveyron. Cette semaine, alors je prenais mon repas de midi dans l'agglomération ruthénoise, j'ai capté quelques bribes d'une conversation qui se tenait pas très loin de ma table. Il y était question de rencontres de football qui se sont déroulées le week-end dernier en Aveyron, entre équipes de jeunes. A l'occasion de la minute de silence (décrétée par le District), certains joueurs d'une équipe, issus d'un quartier de Rodez, auraient manifesté leur mauvaise volonté voire leur hostilité. A confirmer.

   Encore plus stupide est le comportement qui m'a été signalé par un commerçant ruthénois. Samedi 14 novembre au soir, à Cap Cinéma, lors d'une projection du film Spectre 007, un individu aurait profité de l'obscurité pour crier "Allah Akhbar". Il aurait quitté la salle avant la fin de la séance. Je pense que cela valait mieux pour lui, parce que sinon, il aurait eu quelques petits problèmes une fois la lumière revenue dans la salle...

   Mais assez parlé des cons, réjouissons-nous plutôt des mouvements de solidarité dont la France a été bénéficiaire. L'un des plus extraordinaires est sans conteste cette Marseillaise chantée (notamment) par des Anglais, à Wembley ! (En regardant attentivement les images filmées à cette occasion, on remarquera qu'une partie du public anglais  semble mieux connaître les paroles de notre hymne national que certains joueurs français...) Mon coeur continue toutefois de pencher pour l'interprétation de l'Opéra de New York, dont j'ai déjà parlé.

vendredi, 30 octobre 2015

Qui est le pigeon ?

   C'est la question que tout le monde se pose à Rodez et dans les alentours, depuis la semaine dernière, quand, dans le quotidien Centre Presse, est paru un article évoquant l'abracadabrantesque escroquerie dont a été victime un élu de l'agglomération. Le quotidien, pas plus que ses confrères, n'avait publié l'identité de la victime... "soulagée" au total de 49 000 euros !

   L'Hebdo paru ce vendredi a vendu la mèche, sans nommer explicitement l'élu en question... mais son profil est tracé avec une précision telle qu'il est impossible de se tromper. Voyez plutôt : cet élu serait vice-président de Rodez Agglomération, il aurait (eu) en charge la culture... serait-ce Jean-Michel Cosson ? Sans doute que non, puisqu'un autre article de L'Hebdo évoque la commune d'Onet-le-Château, tandis que Gérard Galtier parle du promoteur de l'installation d'un cinéma d'art et d'essai. Cela correspond donc plutôt à Fabrice Geniez, l'ancien maire d'Onet-le-Château, toujours conseiller communautaire mais plus vice-président depuis 2014.

   Au-delà de l'anecdote, cette affaire révèle la sophistication de certaines arnaques, même si, en la matière, l'élu local s'est montré naïf et imprudent. J'ai déjà reçu le type de courriel auquel il s'est laissé prendre... et je suis sûr que je ne suis pas le seul. On aura quand même appris qu'il disposait d'une coquette somme sur ses comptes bancaires.

   Si cette histoire rocambolesque contribue à rendre les gens plus prudents dans leur usage d'internet, elle aura servi à quelque chose malgré tout.

lundi, 26 octobre 2015

Des travaux à effectuer

   Samedi, dans Midi Libre (édition de Rodez), est paru un article consacré à l'un des quartiers du chef-lieu aveyronnais et intitulé "Saint-Eloi - Ramadier : le grand malaise des habitants". (Il est depuis aujourd'hui accessible sur le site de Centre Presse.)

   Disons-le tout de suite : à Rodez, ce quartier n'a pas bonne réputation. Régulièrement, les forces de l'ordre sont amenées à s'intéresser aux activités de certains de ses habitants et, sur la commune de Rodez, il est des commerçants qui ne livrent pas dans cette zone, certes un peu excentrée, mais surtout mal famée... à tel point que j'ai déjà entendu une très mauvaise langue user du surnom de "Racailladier" à son sujet. C'est évidemment une généralisation abusive.

   Récemment, deux drames ont marqué certains habitants. Cet été, un enfant s'est tué à proximité des immeubles, en faisant du VTT. Au niveau local, l'émotion avait été forte et au niveau national, les médias s'étaient fait l'écho de l'événement (avec des articles dans Le Parisien, Ouest France, 20minutes, Metronews...). Le mois dernier, un jeune délinquant originaire du quartier s'est suicidé dans sa cellule de la prison de Druelle, à proximité de Rodez.

   Dans l'article de Midi Libre, il est question de promesses non tenues de la municipalité. Le grillage qui entoure l'école maternelle serait troué en (au moins) un endroit, laissant la possibilité à des enfants de sortir dans la rue... ou à un intrus de pénétrer dans l'établissement. De plus, aucune mesure de sécurité supplémentaire n'aurait été prise au niveau des lieux de l'accident du vététiste.

   C'est la première adjointe au maire, Monique Herment-Bultel, qui répond aux questions du journal. Elle m'a semblé botter en touche, se contentant de rappeler les projets à moyenne échéance, trop lointaine pour les habitants. Rappelons (si besoin est) que l'action d'une mairie ne se mesure pas qu'aux grandes réalisations médiatisées. Les petits travaux du quotidien occupent une place importante aux yeux des habitants d'un quartier. Il ne devrait pas être bien difficile (ni très coûteux) de remplacer un bout de grillage de l'école (surtout en période de vacances) ni d'installer un dispositif de sécurité (haie ou grille de protection) sur les lieux du récent accident. Un peu de bonne volonté, que diable !

   Ce manque de réactivité est d'autant plus étonnant que la première adjointe est candidate aux élections régionales qui approchent (elle est numéro 2 sur la liste aveyronnaise PS-PRG). On n'attend pas de l'équipe municipale qu'elle accepte toutes les demandes des habitants (certains récriminant parfois comme des enfants gâtés), mais un peu de bon sens devrait conduire les élus à être plus à l'écoute.

   Ces menus travaux auraient le mérite de témoigner de l'intérêt porté par la municipalité à ce quartier, et ce alors que, visiblement, les adultes peinent à "tenir" les jeunes désoeuvrés, qui peuvent se transformer en fouteurs de merde. On a bien vu, à l'occasion du suicide de la prison, que certains d'entre eux pouvaient tenir des propos farfelus. (On voit qu'ils ne se rendent absolument pas compte de ce que c'est que de passer 23 heures sur 24 dans une cellule d'une dizaine de mètres carrés, certes confortable, mais dans un relatif isolement.)

   Si j'avais un conseil à donner aux habitants du quartier qui ont accès à internet, c'est d'utiliser les ressources proposées par la municipalité. Sur le site de la ville de Rodez, on peut remplir un formulaire ou trouver les coordonnées téléphoniques du service "Mairie Intervention Rapide"... à user tant que les petits travaux n'auront pas été réalisés ?

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mercredi, 21 octobre 2015

Prostitution à Rodez

   Ce mercredi (jour des enfants), dans Centre Presse, un article évoquait les conséquences plutôt désagréables d'une activité discrètement implantée sur le Piton. La lecture apprendra aux Ruthénois qui l'ignoreraient qu'il ne s'agit pas d'une légende urbaine et que la prostitution existe bel et bien dans le chef-lieu aveyronnais.

   La version papier de l'article est un peu plus complète que la version numérique. On peut s'appuyer sur les deux (et sur un plan de Rodez digne de ce nom) pour cartographier l'activité de "charmes tarifés" dans la ville natale de Pierre Soulages :

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   Le premier "lieu de perdition" mentionné dans l'article est situé avenue Victor-Hugo (donc pas très loin du musée Soulages), plus précisément entre la rue Planard et la place d'Armes... c'est-à-dire dans le pâté de maisons où se trouve le siège de Centre Presse ! Seules les mauvaises langues prétendront que les journalistes détiennent là une information de première main...

   Le deuxième lieu de délinquance spécialisée (qui fait l'objet de l'essentiel de l'article) est situé boulevard Paul-Ramadier, plutôt vers le haut, donc en direction du centre-ville. Je penche pour le long immeuble du côté ouest, pas très éloigné d'Aquavallon et du dojo. N'oublions pas qu'après les militaires, les sportifs (en concurrence avec les routiers et les cadres commerciaux) constituent une clientèle privilégiée du commerce d'esclaves sexuelles.

   Enfin, la version papier de l'article évoque les soupçons qui pèsent sur un bâtiment de la rue Béteille. Au vu de ce qui précède, on serait tenté de penser que c'est le haut de la rue qui est concerné, à proximité de la place d'Armes. Mais on ne peut pas exclure non plus la partie basse, l'une des zones où certains commerces changent fréquemment de localisation (et de gérant ?), un endroit où l'on a pu remarquer la présence de ce qui ressemble à des guetteurs. Il s'y vend peut-être des substances illicites, auxquelles serait éventuellement associée la prostitution.

   Quant aux "quartiers périphériques" où se dérouleraient des rencontres tarifées, leur localisation reste imprécise. D'instinct, on aurait tendance à penser aux abords de la gare SNCF, mais il se murmure qu'il faudrait plutôt chercher du côté de la rocade...

   En guise de dessert, sur le plan, j'ai aussi mis en valeur (dans le coin sud-est) l'ancien pôle de prostitution de Rodez, la rue de la Bullière, où des générations de bourgeois sont allés enrichir leur microfaune pubienne.

dimanche, 18 octobre 2015

Mort d'un journal aveyronnais ?

   Dans le dernier numéro de l'hebdomadaire aveyronnais Le Ruthénois, on peut trouver un surprenant encadré, page 17 :

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   Cela confirme l'information publiée le mois dernier par un site professionnel :

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   Actuellement, la presse en général connaît d'assez grandes difficultés. Dans l'Aveyron, depuis 2015, les trois quotidiens (Centre Presse, Midi Libre et La Dépêche du Midi) font partie du même groupe (celui de La Dépêche). Par le passé, on a vu la disparition de plusieurs périodiques, comme Le Rouergat et L'Aveyronnais.

   En mars 2010, j'avais salué la parution du nouvel hebdomadaire, à l'époque dirigé par Hugues Robert. En un peu plus de cinq ans, il a connu une histoire assez mouvementée. Dès août 2010, le directeur était viré. Il y avait sans doute conflit entre ce qu'il voulait faire du Ruthénois (un hebdomadaire irrévérencieux) et la recette plus classique que les propriétaires voulaient suivre (un journal d'infos locales voire ultralocales).

   2013 fut une année charnière. Le journal ne rencontrant pas le succès escompté, la formule a été modifiée (en mai) et le personnel réduit. En juillet, l'hebdomadaire est devenu bimensuel. Mais on ne peut pas dire que la qualité n'ait pas été au rendez-vous. Le principal rédacteur, Benjamin Laumaillé, a tenté de concilier une plume un brin contestataire avec le cahier des charges qui lui était imposé. Il a levé quelques lièvres, notamment celui du candidat FN ayant tenu des propos antisémites.

   Mais, à Rodez, la sauce n'a pas trop pris. De nos jours, le lectorat urbain se contente trop souvent de ce qu'il trouve gratuitement sur la Toile ou en médiathèque. De plus, Le Ruthénois ne dispose pas d'une zone de diffusion assez large. Il aurait peut-être fallu davantage axer les informations sur le rural périurbain, du côté de Salles-la-Source, Marcillac-Vallon, Moyrazès, Flavin, La Loubière voire Laissac.

   Résultat ? A tout casser 2 000 exemplaires vendus chaque semaine (comme on l'apprend dans un article du Nouvel Economiste de 2013). Les (modestes) aides de l'Etat n'ont visiblement pas suffi. A ce sujet, on remarque, quand on consulte les chiffres fournis par le gouvernement, que Le Ruthénois n'était pas l'hebdomadaire le plus richement doté, alors qu'il était sans doute le plus en difficulté. En 2014 (comme en 2012 et 2013), c'est Le Journal de Millau qui a le plus touché (5 919, puis 6 064 et 6 367 euros). Le Villefranchois arrive en deuxième position, devant un trio dont la composition a évolué. En 2012 et 2013, il s'agit du Bulletin d'Espalion, du Progrès Saint-Affricain et du Ruthénois. Ils ont reçu 2 820 puis 2 940 euros. En 2014, Le Nouvel Hebdo a remplacé [dans la liste des bénéficiaires] l'hebdomadaire devenu quinzomadaire. Chacun des membres du trio a touché 3 125 euros.

   A titre de comparaison, Le Tarn Libre a touché 8 478 euros en 2014, loin toutefois du Courrier Cauchois et de La Manche Libre, qui ont chacun bénéficié d'une obole de 31 250 euros !

   A ceux qui ne connaîtraient pas bien Le Ruthénois, j'en conseille la lecture. Cette semaine, il est question (entre autres) des élections régionales qui approchent, du nouveau préfet de l'Aveyron, du recours du FN contre Jean-Claude Luche, de la création d'un site de traitement des déchets, de la gauche de la gauche etc. Je recommande le papier, assez caustique, sur la venue du secrétaire d'Etat aux sports !

dimanche, 11 octobre 2015

Petits branleurs

   Je suis tombé par hasard sur un article pittoresque du quotidien La Provence. Il est question de lycéens d'Aix-en-Provence qui ont manifesté jeudi et vendredi derniers. Si, le premier jour, le mouvement semblait organisé et "conscientisé" (avec des revendications visibles et, semble-t-il, assez légitimes), le lendemain, on se demande vraiment pourquoi les adolescents ont défilé dans les rues. (Et encore, "défilé" est un bien grand mot.)

   Le meilleur vient des réponses aux questions posées par la journaliste envoyée sur place. Alors que, la veille, le mouvement avait dénoncé les classes "surchargées", le vendredi, le même adjectif n'évoque, pour le lycéen interrogé, que l'excès de travail ! De sa part, il ne faut visiblement pas attendre trop de précisions sur la nature du travail (supposé) excessif que l'on attend de lui. On comprend surtout qu'il estime passer trop de temps en classe. Voilà sans doute ce que ce jeune homme appelle "travailler" ! La suite de sa réponse est du même tonneau. Ce lycéen modèle regrette que, dans son établissement "on peut pas faire ce qu'on veut"... et ça, c'est vraiment pas cool !

   Les lecteurs attentifs auront remarqué l'absence du "ne" de négation dans sa réponse. Quand on lit certains des commentaires des internautes, en particulier celui de l'un des participants aux manifs, on ne peut que constater que, loin d'avoir trop travaillé ou subi des enseignants trop sévères, ces jeunes souffrent d'abord d'une maîtrise très approximative de la langue française :

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   Je recommande tout particulièrement les "allégations de rentre scolaire"...

   Pour terminer, signalons que, ce vendredi-là, les services météorologiques annonçaient une journée radieuse et l'on imagine combien la perspective de passer une partie de cette journée en classe a pu paraître pénible à ces lycéens motivés.

mercredi, 23 septembre 2015

Aveyron : la sécurité routière priée d'être plus "relaxée" ?

   C'est ce que l'on peut se demander après que la Cour d'appel de Montpellier a rendu son jugement dans l'affaire du "groupe qui te dit où est la police en Aveyron". Alors que le tribunal correctionnel de Rodez avait (mollement) condamné la douzaine de personnes en 2014, l'appel s'est conclu par une relaxe générale. Depuis, on a appris que le Parquet s'est pourvu en cassation. Il a sans doute raison.

   Une première ambiguïté réside dans la dénomination du groupe, qui s'est surtout fait connaître pour révéler la position des radars mobiles et des contrôles routiers. Il a donc joué le rôle d'un dispositif appelé "avertisseur de radars", dont l'utilisation est interdite depuis 2012. L'interdiction s'étend à la fonction communautaire de certains appareils, rôle que joue une page Facebook. La Cour n'ayant pas encore publié les attendus du jugement, il est difficile d'analyser celui-ci en détail. Je pense néanmoins que les avocats des prévenus ont dû jouer sur la distinction (fictive dans ce cas) entre une page Facebook et le mode de fonctionnement d'un avertisseur de radars.

   Les promoteurs de la page Facebook sont d'ailleurs conscients que celle-ci n'était pas "dans les clous", puisqu'en dépit de la procédure judiciaire qui leur est (pour l'instant) favorable, ils ont supprimé le groupe pour en créer un autre, officiellement dédié au signalement des "zones de danger"... ce qui est autorisé. Il restera à confirmer que le nom de ce nouveau groupe n'est pas qu'un paravent destiné à masquer le même acharnement anti-radars (et la même immaturité).

   Une autre raison explique que le Parquet se soit pourvu en cassation, et qu'il ait des chances de gagner. Avaliser ce genre de groupe aurait pour conséquence d'accepter la fin de tout effet de surprise au niveau des contrôles routiers. Dans un premier temps, nombre d'automobilistes à mauvaise conscience (et à l'autodiscipline flageolante) se réjouiraient... avant qu'un accident dramatique ne vienne tout remettre en cause.

   Pour la police comme pour la justice, il n'est pas possible d'accepter que certains conducteurs puissent se croire autorisés à rouler à leur convenance en toute impunité. Parce que c'est à cela que mène la révélation de l'emplacement des radars mobiles et des contrôles routiers. Une fois le contrôle surprise passé (et déjoué grâce à l'information transmise en temps réel), les Ayrton Senna de comptoir risquent de se croire affranchis du respect des règles de prudence. Elles sont certes contraignantes, mais elles sont faites pour le bien de tous et pas le petit plaisir narcissique de conducteurs en mal de sensations. Si, par malheur, un jour, survient un accident grave, à la suite duquel on découvre que le conducteur (ou son passager) avait, peu de temps avant, déjoué un contrôle routier grâce à l'info consultée sur un smartphone, on parlera autrement de cette supposée liberté d'expression.

   A ce sujet, rappelons à ceux qui l'ignoreraient qu'en droit français, la "liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits." Traduction : la liberté ne consiste pas à pouvoir faire tout ce que l'on veut ; la liberté de chacun s'arrête là où commence celle des autres. Sur la route, la liberté de conduire à sa guise s'arrête là où commence la sécurité d'autrui.

   Il est une troisième raison qui justifie le pourvoi en cassation. En informant tout le monde de la localisation des forces de l'ordre, les Alain Prost de pacotille rendent un sacré service à nombre de délinquants (criminels ou trafiquants). Par le passé, il est arrivé (plus souvent qu'on ne l'imagine) qu'un contrôle au départ anodin débouche sur une arrestation dans une tout autre affaire. Avaliser les groupes anti-radars reviendrait à donner un avantage supplémentaire aux délinquants. Mais de cela, certains conducteurs inciviques aveyronnais ne se soucient visiblement pas.

mercredi, 16 septembre 2015

Un très bon dessin

   Je veux bien évidemment parler de celui réalisé par Riss et publié la semaine dernière dans Charlie Hebdo. Il détourne le drame survenu à une famille de migrants kurdes de Syrie... et il a été (volontairement ?) souvent mal interprété :

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   La technique utilisée est un grand classique du dessin de presse : le télescopage de deux événements que rien a priori ne devait faire se rencontrer. Chaque jour paraissent quantité de dessins construits sur ce principe.

   La question qui se pose est : sur quoi porte réellement l'ironie ? Certains chevaliers blancs de la bien-pensance affectent de croire que Riss dénigre l'enfant décédé. En réalité, le caricaturiste pointe une contradiction sur laquelle beaucoup de gens feraient bien de méditer. Un grand nombre de migrants proche-orientaux, fuyant la guerre ou les persécutions, se dirigent vers l'Europe, perçue comme un havre de paix, de culture et de prospérité. Or, ils y trouveront surtout une société marchandisée, où la qualité de vie se dégrade.

   L'allusion aux "restaurants" MacDonald's renforce cette impression. L'attention qui est portée aux enfants dans ce genre d'établissement pourrait les faire passer pour une sorte de petit paradis sur Terre, alors qu'ils font prendre de mauvaises habitudes alimentaires à leurs jeunes clients. Tout comme ce genre d'établissement est un miroir aux alouettes, l'image de l'Europe en paradis pour victimes de la guerre en Syrie est (au moins en partie) une illusion.

   Mais la réflexion de Riss ne s'arrête pas là. Dans le même numéro, il a tourné en dérision l'emballement médiatique qui a accompagné la découverte de l'histoire du petit Aylan. On peut voir les fausses couvertures qu'il a imaginées sur un site canadien (dont l'article s'efforce de présenter l'affaire avec impartialité).

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   Bilan ? Ceux qui l'ignoreraient encore réalisent que, parmi les centaines de millions de personnes qui publient sur la Toile et notamment les réseaux sociaux, il en est un bon paquet qui sont soit incultes soit d'une éclatante mauvaise foi. Les dessins de Charlie Hebdo ne sont évidemment pas destinés à être vus par les proches (encore en vie) du garçon décédé. Pour les voir, il fallait, à l'origine, acheter le journal satirique et en ouvrir les pages. Ce sont les imbéciles et autres intégristes de la bien-pensance qui, en prétendant dénoncer ces dessins, les ont répandus sur la Toile, les rendant visibles par des millions de gens qui n'auraient jamais songé à acheter Charlie Hebdo. Là est la manipulation.

    P.S.

   La seule critique que l'on pourrait formuler à l'égard de Riss est la relative incohérence géographique de son dessin. L'affiche publicitaire aurait dû se trouver à gauche de l'image (vers l'Europe occidentale), alors qu'elle a été placée à droite, sur le territoire turc. Je pense que c'est lié au choix de calquer le dessin sur la désormais célèbre photographie de l'enfant décédé. On aurait pu imaginer une autre mise en scène, avec toujours le petit Aylan, sur la plage, côté droit, mais avec en plus, à gauche, au loin, un autre élément évoquant les illusions des migrants.

jeudi, 03 septembre 2015

Des émules de Pierre Soulages

   Etrangement, c'est dans Le Canard enchaîné paru le 2 septembre 2015 que j'ai trouvé une référence au chantre de l'outre-noir :

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   Ce qu'Isabelle Barré qualifie (page 3) d' "oeuvre d'art digne de Soulages" n'est autre qu'un document, en théorie communicable au public, en réalité amplement censuré avant sa transmission.

   Cette histoire a inspiré Aurel, l'un des dessinateurs publiés dans l'hebdomadaire satirique :

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   Cette anecdote confirme que, dans beaucoup de médias, la couleur noire semble désormais associée à Pierre Soulages. Un autre exemple en avait été donné cet été dans une émission de France Culture, Les animaux ont aussi leur histoire. Le 26 juillet dernier, il a été question du corbeau. On pouvait entendre l'historien Michel Pastoureau évoquer de très grands corbeaux (aujourd'hui rares en Europe), au plumage d'un noir "plus noir que noir... outre-noir, dirait Soulages".

 

dimanche, 30 août 2015

"Paris Match" du 27 août

   Je ne suis pas un lecteur régulier de cet hebdomadaire, mais je reconnais qu'à certaines occasions, j'aime me plonger dans ses photoreportages, en général de qualité quand ils traitent de l'actualité. Le numéro sorti jeudi est principalement consacré à l'attentat déjoué du Thalys :

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   Sans surprise (comme je l'ai remarqué la semaine dernière), on retrouve les trois jeunes héros, légion d'honneur et drapeaux au polo... et l'oreillette discrète, comme on peut le voir sur la photographie prise avec le président de la République :

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   Le journal revient sur l'enfance et l'adolescence du trio, issu de familles qualifiées de conservatrices (c'est-à-dire très croyantes, pro-gun et patriotes). Ils sont devenus très tôt amis, lorsqu'ils se trouvaient dans une école privée religieuse de Californie, la Freedom Christian School.  L'étudiant Anthony Sadler (dont le père est pasteur) s'est même fait tatouer "Je vis pour Dieu, pas pour moi-même" sur le haut du torse.

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   Notons qu'à l'époque, le futur colosse Spencer Stone est un petit "boulot" qui, à l'adolescence, va se mettre à écouter surtout du rap et du R'N'B. (Le site de l'hebdomadaire propose un diaporama très intéressant.)

   C'est fou d'ailleurs comme leur profil n'est finalement pas si éloigné que cela de celui du terroriste, Ayoub el-Khazzani, dont l'imprégnation religieuse ne semble pas avoir structuré la personnalité. Elle l'a plutôt porté à des actes extrêmes. Au Maroc, la famille ne comprend pas son geste. On nous le présente comme un bon petit gars, pas particulièrement chanceux dans la vie et qui est sans doute tombé sous la coupe de types pas recommandables. Mouais... Retenons qu'il a quitté l'école très tôt (à onze ans !) et qu'il s'est adonné au trafic de stupéfiants. Notons aussi la facilité avec laquelle lui et d'autres membres de sa famille ont pu s'installer en Europe...

   Paris Match met l'accent sur la personnalité d'un autre héros du jour, l'universitaire Mark Mooligan, qui avait réussi à s'emparer de la kalachnikov du terroriste, avant d'être sérieusement blessé. Les événements nous sont racontés de son point de vue et de celui de son épouse, avec, en illustration (outre les photos), une infographie des wagons concernés. A cette occasion, j'ai appris que deux autres personnes ont joué un rôle bénéfique dans le Thalys, deux employés de la SNCF. On pourra regretter que le "huitième homme", le jeune Français qui souhaite rester anonyme, soit désigné par son prénom et l'initiale de son nom de famille...

   Une double-page est aussi consacrée au cas Jean-Hugues Anglade, qui a suscité pas mal de moqueries pour sa blessure anecdotique. L'hebdomadaire est particulièrement bien renseigné sur son cas parce que la compagne de l'acteur travaille... pour Paris Match, auquel elle livre ses impressions !

   Ce numéro contient d'autres reportages qui méritent le détour. Il y a l'inévitable sujet sur les migrants coincés dans les Balkans, qui s'intéresse plus particulièrement aux Syriens. Un peu plus loin, un passionnant papier est consacré à une gigantesque mine d'or d'altitude, située au Pérou, dans la ville de La Rinconada.

   Je conseille aussi le mini-dossier consacré au Panthéon, qui évoque aussi bien sa construction, les principales "entrées" que les travaux en cours pour restaurer le bâtiment. Plus étonnant, au détour d'une page, on nous propose un article sur Ronda Rousey, une ancienne judoka qui s'est reconvertie dans les arts martiaux mixtes (démonstration ici)... article illustré par une photographie qui ne laisse rien ignorer de l'étendue de l'épilation pratiquée par la demoiselle...

   A ce sujet "sportif" succèdent des papiers plus intellos, l'un étant consacré à un dispositif permettant de capter le dioxyde de carbone, inventé par un physicien allemand. On peut terminer par la lecture d'un hommage à Khaled al-Assaad, l'ancien gardien des antiquités de Palmyre. Il est bien évidemment question des destructions opérées par les barbares de Daech, ainsi que du commerce illicite de ce genre de marchandises.

   Finalement, entre deux articles sur les "pipoles", on peut trouver son bonheur dans ce numéro assez bien conçu.

mercredi, 05 août 2015

Journaux de guerre n°50

   Cela va bientôt faire un an qu'en partenariat avec la Bibliothèque Nationale de France est publiée, chaque semaine, une sélection de journaux parus pendant la Première guerre mondiale. Le florilège de jeudi dernier est regroupé sous le titre "Le retour des provinces perdues".

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   On commence avec L'Homme Libre du 18 novembre 1918. Sans surprise, le quotidien fondé par Georges Clemenceau (à l'époque président du Conseil) fait l'éloge de l'action gouvernementale. Il va jusqu'à signaler la démarche du conseil municipal de Toulon, qui rend hommage au chef du gouvernement qui, accessoirement, est sénateur du Var... La deuxième couche est apportée par les membres du Cabinet et leurs collaborateurs qui, à l'occasion de l'anniversaire de la constitution du gouvernement, adressent de nouvelles félicitations au Tigre. Le reste du journal se contente de signaler les manifestations d'intense patriotisme des habitants des provinces libérées de l'oppression allemande. Dans un coin de la page 2, une publicité pour Banania apporte une touche humoristique aux informations sérieuses.

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   Poursuivons avec Le Figaro daté lui aussi du 18 novembre 1918. Là aussi il est question de la réintégration de l'Alsace-Lorraine et de l'enthousiasme des populations. Le quotidien publie (comme L'Homme Libre d'ailleurs) l'intégralité du discours prononcé à cette occasion par le président de la République Raymond Poincaré, qui était lorrain. Signalons qu'à Mulhouse (dans le Haut-Rhin), un curé est décédé d'une crise cardiaque, tant il était heureux du retour à la France.

   A Paris, les manifestations d'allégresse ont été massivement suivies. Les soldats américains présents sur place y ont participé, chantant l'hymne américain... et la Marseillaise. Il est d'ailleurs question des Etats-Unis à plusieurs reprises. Un article évoque la diplomatie parallèle que certains dirigeants allemands ont tenté de mettre en place avec le président Wilson.

   On part ensuite en province avec Le Petit Marseillais du 21 novembre 1918. L'un des premiers articles déplore le maintien d'une censure prégnante en France, alors que les journaux américains et britanniques ont la liberté de publier davantage d'informations. Page suivante, on apprend que le général Pétain vient de recevoir la dignité de maréchal de France. Les deux dernières pages sont farcies de publicité... mais on peut aussi y trouver une brochette d'annonces "personnelles". Sachez qu'à l'époque, on perd visiblement beaucoup d'objets dans les cinémas. Un sommet est atteint dans l'annonce déplorant la perte d'un chien policier, envoyée par... un capitaine.

   On termine avec Le Petit Journal du 26 novembre 1918. Le gros titre est consacré à l'entrée officielle de l'armée française dans Strasbourg, sous la conduite de deux hauts gradés : le tout nouveau maréchal Pétain et le général Curières de Castelnau, originaire de Saint-Affrique (dans l'Aveyron). Un dessin illustre l'information du jour.

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      La suite contient une foule de nouvelles. il est notamment question du complot allemand de 1914, de la nécessité d'augmenter les rendements agricoles et de la révolution spartakiste en Allemagne. Je recommande aussi les "conseils pratiques", où il est question des jeunes Français (et surtout des jeunes Françaises) tenté-e-s par l'expatriation.

   En bonus, ce numéro offre la reproduction d'une affiche rendant hommage aux petites Alsaciennes :

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lundi, 27 juillet 2015

Les enfants gâtés de l'Estivada

   Ces derniers jours, les médias locaux (notamment Centre Presse) se sont fait l'écho de la mauvaise humeur de Patric Roux, le directeur (démissionnaire) du festival musical occitaniste organisé chaque année à Rodez. Est-ce le résultat d'un petit coup de pompe (classique après une période d'efforts intenses), de la lassitude qui vient (après des années de dévouement) ou bien la manifestation d'autre chose ?

   A lire les articles, on perçoit un certain ressentiment à l'égard de la mairie de Rodez. Est-ce une question d'argent ? Apparemment non. Cette année, la subvention votée par le conseil municipal (lors de la séance du 27 avril dernier) est de 200 000 euros (!), la même que celle qui a été attribuée l'an dernier (lors de la séance du 10 juillet 2014).

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   Il n'y a donc pas de baisse, alors que nombre de manifestations et d'associations ont vu leurs financements publics s'étioler. (Rappelons qu'en 2013, c'est le Conseil général de l'Aveyron qui avait "sucré" 75 % de la somme qu'il versait auparavant au festival, ce qui avait créé une petite polémique.)

   A cela il faut ajouter la mise à disposition gratuite de salles : la MJC, l'Amphithéâtre, la (superbe) salle des fêtes... plus un local à proximité de la place de la Cité... et l'annexe du Multiplexe (dont on n'a heureusement pas exigé cette fois-ci qu'il cesse toute activité cinématographique). Notons que cette annexe donne sur l'esplanade des Rutènes, un endroit particulièrement convoité et dont l'usage n'est pas accordé à tout le monde. D'ailleurs, si, de 2011 à 2013, le festival a été "exilé" à Bourran (Mon Dieu !), il a retrouvé le centre-ville dès la fin des travaux d'aménagement du Foirail.

   Au total, on peut estimer que la commune de Rodez supporte environ 50 % du coût réel de l'Estivada, en lui accordant de surcroît une très bonne visibilité. Les récriminations qui sont formulées semblent donc injustifiées.

   Il y a peut-être une raison plus politique derrière. On reproche au maire de Rodez de ne pas faire preuve d'un enthousiasme délirant en faveur de l'occitanisme, alors que, lors de l'inauguration, le président du Conseil régional de Midi-Pyrénées (sur le départ) Martin Malvy s'est montré plus chaleureux. C'est aussi lié à l'ambiguïté du statut de l'Estivada, dont certains veulent profiter pour promouvoir l'occitanisme, tandis que beaucoup n'y voient qu'une agréable animation estivale, teintée d'une couleur locale ou régionale.

   On peut aussi revenir sur le succès de la manifestation. Les organisateurs évoquent 25 000 visiteurs, chiffre invérifiable puisque les concerts sont gratuits. Comment savoir si les personnes qui sont comptées à tel moment ne l'ont pas déjà été à un autre ? Même si l'on se fie à l'estimation donnée, 25 000 participants ne signifient pas 25 000 visiteurs. Certaines personnes sont venues plusieurs jours ou ont assisté à plusieurs concerts. On peut donc légitimement penser que la fréquentation a été plus proche de 20 000 personnes.

   C'est beaucoup, mais pas tant que cela. C'est incontestablement un joli succès pour une équipe de bénévoles et un petit festival local. Le chiffre est moins impressionnant quand on garde en mémoire que les spectateurs n'ont pas payé. Quelle aurait été l'affluence si, à chaque concert, on avait demandé ne serait-ce que 5 ou dix euros de participation ? Ceci dit, le passage (au moins partiel) au payant serait peut-être un moyen d'augmenter les ressources de l'organisation... et de pouvoir faire venir une ou deux têtes d'affiche.

   On pourrait aussi comparer l'Estivada à d'autres festivals musicaux de saison. Bien que payants (pas forcément totalement), les Vieilles Charrues attirent plus de 200 000 personnes, les Eurockéennes de Belfort environ 100 000 et les Francofolies de La Rochelle entre 80 000 et 120 000. Mais là, on ne joue pas dans la même catégorie. On pourrait prendre l'exemple de Garorock, à Marmande (dans le Lot-et-Garonne). C'est un festival payant, qui a accueilli cette année 80 000 visiteurs.

   C'est un débat que devront avoir les organisateurs de l'Estivada. Pour grandir (si grandir ils veulent), ce festival n'a peut-être pas tant besoin d'une ville très peuplée (genre Toulouse ou Montpellier) que d'une réflexion sur le payant/gratuit et sur le lieu des concerts, pour lesquels une zone unique, "encadrable", serait peut-être plus adaptée.

   Cela m'amène à un autre point évoqué par Christian Teyssèdre lors de l'inauguration : les nuisances sonores, un sujet qui préoccupe particulièrement les riverains... et pas qu'eux ! J'habite au Faubourg (donc assez loin des sites des concerts) et je peux garantir qu'à certains moments, en laissant les fenêtres ouvertes, j'avais l'impression que l'un des occupants de l'immeuble avait mis sa chaîne hi-fi à fond la caisse... Les habitants des rues adjacentes au Foirail pourraient en dire bien plus que moi.

   Ce n'est peut-être pas "politiquement correct", mais il n'est pas inutile de rappeler qu'il est des gens qui travaillent au mois de juillet et qui donc ont besoin d'une nuit de sommeil acceptable pour pouvoir exercer leur activité professionnelle. Quitte à passer pour un vieux con, je pourrais ajouter que, travail ou pas, de nombreuses personnes apprécient la quiétude d'une soirée ensoleillée, derrière une fenêtre, sur un balcon ou dans un jardin public, loin du tumulte de la vie quotidienne. On ne respecte pas ces personnes-là.

   Il ne faut donc pas s'étonner que le chef-lieu aveyronnais se vide à cette période de l'année (ce que les commerçants ont d'ailleurs fort bien remarqué). Le retour de l'Estivada sur le Foirail (en 2014) a incité nombre de ménages ruthénois à renouer avec une pratique en vigueur avant 2011 : programmer leur départ en vacances la troisième semaine de juillet. Patric Roux s'en était aperçu, lui qui, en 2011, regrettait la faible participation des Ruthénois à l'Estivada. C'est un secret de Polichinelle sur lequel les médias évitent de s'étendre : une très faible part des 25 000 habitants de Rodez assiste à au moins l'un des concerts. Le public est certes majoritairement constitué d'Aveyronnais (mais pas massivement de Ruthénois), auxquels il faut ajouter des touristes du grand Sud-Ouest et d'au-delà.

mercredi, 15 juillet 2015

Le cinéma du Tour de France à Rodez

   Certaines personnes ont peut-être été interloquées à la lecture de Centre Presse aujourd'hui. Voici ce qu'on peut trouver en haut à droite du second cahier :

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   Après vérification sur la page des horaires du site de Cap Cinéma, il apparaît qu'aucun film n'est programmé vendredi (à l'exception de l'avant-première) et que, samedi, les projections ne démarrent qu'à 18 heures !

   Est-ce une décision de l'exploitant des salles, qui a estimé qu'il ne ferait pas une bonne recette ces jours-là ? J'en doute. Des films "porteurs" sont à l'affiche et je me suis laissé dire que la dernière Fête du cinéma n'a pas super bien marché. (Il faut dire qu'à 4 euros la séance, on ne risque pas d'attirer beaucoup les jeunes spectateurs, qui bénéficient déjà  d'un tarif super-réduit. Pour les autres, c'est certes une bonne affaire, mais le gain n'est pas si important que cela par rapport au tarif abonnés.) Se priver d'une journée et demi de recettes, de surcroît en fin de semaine, ne me paraît pas judicieux.

   Et puis je me suis souvenu que Cap Cinéma n'est que locataire du bâtiment. C'est la mairie de Rodez qui en est propriétaire. Elle a dû demander à l'exploitant des salles de céder la place aux animations du Tour de France... et surtout de ne pas leur faire concurrence.

   En lisant le numéro de juillet-août du magazine Rodez, notre ville, on comprend que le cinéma va se transformer en hall d'exposition (et sans doute aussi en bar-buffet). Le soir, le bon peuple est prié de se ruer place Foch, pour assister à une représentation du Malade imaginaire... avec Gérard Holtz :

Holtz.jpg

   Soyons clairs. Que l'on propose une représentation théâtrale gratuite, dans le cadre de la venue du Tour de France, avec en vedette un animateur populaire, est tout à fait honorable. Mais que, dans le même temps, on s'arrange pour que personne ne puisse aller au cinéma dans la commune me choque. Et je ne parle même pas de l'opération de com' pour le sponsor de la pièce, ni du narcissisme de l'acteur-animateur...

mercredi, 01 juillet 2015

Internet ralenti

   C'est un phénomène assez récurrent, sans même tenir compte de la qualité du matériel que l'on utilise pour se connecter au réseau. Ainsi, aux Etats-Unis, une enquête est actuellement en cours sur des dégradations volontaires commises en Californie, autour de Sacramento et de San Francisco. Quand on connaît le poids de la "net économie" dans cette région, et son impact à l'échelle internationale, on mesure l'importance du sujet.

   Ce n'est pas la première fois que l'état des câbles sous-marins est évoqué à propos de la Toile. Par le passé, on a surtout parlé des dégâts provoqués par les ancres de bateaux imposants. La cause peut être encore plus directement humaine. Il y a un peu plus de deux ans, deux plongeurs avaient coupé (par mégarde, ont-ils affirmé) l'un des plus importants câbles, reliant l'Europe du Sud à l'Asie du Sud-est, en passant par le Moyen-Orient. Les conséquences en avaient été perçues jusqu'à la Réunion, où la situation n'était redevenue normale qu'environ un mois plus tard.

   En juin dernier, c'est encore une gaffe (cette fois-ci, d'un opérateur asiatique) qui a eu des conséquences au niveau mondial. Dans les autres cas, le ralentissement est une conséquence de la croissance du réseau. Ainsi, en 2014, certains routeurs étaient en cause. Une autre fois, c'était la nécessaire mise à jour de certificats de sécurité des navigateurs.

   Mais la cause la plus étrange (et la plus cocasse) que j'ai trouvée est... naturelle. Il s'agit de... morsures de requins, évoquées en août dernier par le site Slate :

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   La courte vidéo qui accompagne l'article montre un énorme squale s'approchant lentement de l'un de ces câbles sous-marins... avant de tenter de le croquer avec appétit ! Le journaliste suggère que les champs électromagnétiques qui s'en dégagent pourraient attirer les requins. Celui-ci n'a par exemple pas du tout été intéressé par un autre câble, plus petit, partant du véhicule sous-marin en train de filmer la scène. Il est tout aussi possible que l'animal, ne possédant pas de mains, utilise sa gueule pour "tâter" l'objet, dont la présence à cette profondeur a dû lui paraître inhabituelle.

mardi, 30 juin 2015

Législative partielle en Aveyron : du neuf ou du réchauffé ?

   La campagne est (officiellement) lancée par les candidats UMP "républicains" Arnaud Viala et Sébastien David. Il est intéressant de comparer la manière dont deux quotidiens ont rendu compte de la chose : La Dépêche du Midi dans un article  daté de samedi 27 juin, Centre Presse dans son numéro de dimanche 28 :

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   Dans l'édition aveyronnaise du quotidien toulousain, Hervé Boucleinville insinue perfidement que c'est parce que le canton dont il était l'élu a été supprimé par la réforme territoriale (et inclus désormais dans un grand ensemble réservé à Alain Marc) qu'Arnaud Viala va briguer le mandat de député.

   De son côté, dans Centre Presse, Damien Solassol ne s'embarrasse pas de ces considérations et insiste sur la jeunesse des candidats, qui, à eux deux, n'atteindraient pas 80 ans. C'est ce qui a fait "tiquer" une de mes connaissances, qui s'est adressée à moi :

- Arnaud Viala n'a que 40 ans ! Tu es sûr ? Je lui aurais donné plus... et puis ça commence à faire un paquet d'années qu'on le voit en politique !

   Pour en avoir le coeur net, je me suis plongé dans la "Bible" des commentateurs politiques aveyronnais, à savoir Fantassins de la démocratie, l'excellent ouvrage de Roger Lajoie-Mazenc (toujours disponible dans les bonnes librairies). Que peut-on y lire ? Eh bien, qu'Arnaud Viala est né à Millau le 4 décembre 1974. On peut aussi y découvrir la brochette de mandats et fonctions exercées par le jeune politique... à tel point que l'un des (anciens) contributeurs d'Aligorchie l'avait appelé "Multi-tâches" ! En voici une représentation schématique simplifiée :

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   Corneille l'a écrit jadis : "aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années". (Vous chercherez, c'est quelque part dans Le Cid.) On peut dire qu'à partir de 2008, la valeur d'Arnaud Viala a été bigrement reconnue, puisqu'il a dû apprendre à se diviser entre la mairie, la communauté de communes, le conseil général et le centre universitaire... sans compter les autres fonctions (plus ou moins) honorifiques... et la vie de famille. Quel homme, n'est-ce pas !

   A la lecture de Centre Presse, on sent toutefois qu'Arnaud Viala a compris dans quel sens souffle le vent : la diminution du cumul des mandats. Et, quand on ne peut pas s'opposer au courant, quoi de mieux que de prétendre en être partie prenante ? On apprend donc que le candidat à la députation a quitté son poste à la fac et ceux qui ne le sauraient pas découvriront qu'il n'a pas participé aux dernières élections départementales... mais sans doute pas de sa propre initiative (contrairement à ce qu'il affirme).

   Son ancien canton avait été fusionné avec ceux de trois autres caciques de la majorité départementale : Alain Pichon (Pont-de-Salars), Jean-Louis Grimal (Salles-Curan) et surtout Alain Marc (Saint-Rome-de-Tarn). En football, on appelle cela "le groupe de la mort". La situation n'a cependant pas dégénéré parce que les deux premiers ont eu le bon goût de ne pas se représenter. Il semblerait qu'on ait (vivement) suggéré à Alain Pichon de prendre sa retraite, tandis qu'on a peut-être fait des promesses à Jean-Louis Grimal... auxquelles il a eu la faiblesse de croire. Restaient les deux coqs, A. Marc et A. Viala. Les dirigeants UMP se sont arrangés pour trouver une basse-cour à chacun d'eux. Depuis une dizaine de jours, on sait que le premier est casé.

   C'est au tour d'Arnaud Viala de (tenter de) décrocher un mandat parlementaire. On lui a attribué un colistier du Sud Aveyron (Sébastien David), qui vient de s'illustrer aux élections départementales. A ceux qui s'étonneraient que deux hommes forment le "ticket" (au lieu d'un homme et une femme), je rappellerai que l'exigence de parité ne s'impose pas dans ce cas de figure, même si l'association de deux personnes de sexes différents a tendance à se répandre. Ainsi, en Aveyron, en 2012, Marie-Lou Marcel a été élue avec un homme (Fabrice Veysseyre) comme suppléant et Alain Marc avec une femme (Danièle Vergonnier). De son côté, Yves Censi avait choisi de se représenter avec André Raynal (inamovible maire de Cantoin depuis 1983) comme suppléant, comme lors des scrutins précédents d'ailleurs.

   Le chemin d'Arnaud Viala vers la députation ne sera pas nécessairement pavé de roses. Même si sa candidature a été "verrouillée" par les instances de l'UMP des Républicains, il se trouve des personnes, à droite, pour penser qu'on fait là un joli cadeau à celui qui, en 2008, avait (déjà) songé succéder à Jean Puech à la tête du conseil général. La Dépêche du Midi comme Centre Presse citent Philippe Ramondenc, un électron libre de centre-droit qui s'est plutôt illustré dans des scrutins locaux (les municipales de 2014, les cantonales de 2011 et les départementales de 2015). Quand il s'est présenté aux législatives, en 2012, il n'a pas rencontré le même succès : il a récolté moins de 5 % des suffrages exprimés. A l'époque, il n'était pas assez connu dans l'ensemble de la circonscription, qui s'étend tout de même des portes de Rodez aux frontières de l'Hérault et du Ségala à la Lozère. Pour que sa candidature tienne la route, il lui faudrait un-e suppléant-e issu-e du monde rural et plutôt de l'ouest de la circonscription.

   Mais l'adversaire pourrait venir du sein même de la majorité départementale Les Républicains - UDI. La Dépêche du Midi donne le nom de Christophe Laborie, conseiller de Causses-Rougiers, de surcroît facilement réélu en 2015. Il est maire de Cornus depuis plus de vingt ans. Fidèle de la majorité départementale, il a peut-être envie de goûter à autre chose... et il est peut-être d'avis que son tour est venu. Il est possible que ce soit en pensant à lui qu'Alain Marc ait récemment déclaré soutenir fermement la candidature d'Arnaud Viala, les autres prétendants n'ayant pas (selon lui) "les qualités intellectuelles" requises pour exercer un mandat de député. Les intéressés apprécieront...

   Parmi ces autres il y a peut-être Miguel Garcia (selon Centre Presse). C'est un pharmacien, maire de Veyreau... et gaulliste. Il n'avait pas apprécié la décision de la commission d'investiture de l'UMP, en 2014. Il avait suggéré l'organisation de primaires pour départager les postulants (lui, A. Viala et Danièle Vergonnier). Cela fait plusieurs mois qu'il dit qu'il va y aller. Il va devoir se décider très rapidement : le scrutin est programmé pour début septembre.

   Et la gauche, là-dedans ? On ne sait pas trop. Les deux noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Pierre Pantanella et de Jean-Dominique Gonzales. Le premier, maire de Saint-Rome-de-Cernon et conseiller régional, n'est pas un perdreau de l'année. Mais il aurait le soutien des élus de gauche et une certaine légitimité dans le monde rural. Le second a été difficilement réélu conseiller départemental (en 2015) et "passe" mal dans les campagnes. Du coup, La Dépêche suggère que, perdue pour perdue, la circonscription pourrait être proposée à un jeune plein d'avenir. Stratégiquement, une candidature millavoise serait la bienvenue.

   Quel que soit l'élu, il faudra lui rappeler qu'il est d'abord en charge de l'intérêt général. Arnaud Viala et Sébastien David semblent l'avoir oublié, d'après les propos publiés par Centre Presse. S'il paraît logique qu'un élu aveyronnais éclaire ses collègues (en majorité citadins) sur les problématiques liées aux territoires ruraux, il n'est pas acceptable d'entendre qu'un député doit être "un commercial de son territoire", "un VRP du Sud Aveyron". Non, messieurs, les parlementaires sont d'abord élus pour faire contrepoids au pouvoir exécutif et pour jouer un rôle dans la gestion politique de la France. (Elle en a bien besoin.) Je reconnais volontiers que c'est moins "vendeur" que le clientélisme local, mais la République est ainsi.

   P.S.

   Je ne voudrais pas terminer sans balancer une petite pique à la gauche, plus particulièrement au maire de Rodez. Dans Le Ruthénois paru vendredi dernier (si vous ne l'avez pas encore acheté, courez-y !), il est question du mandat de conseiller régional détenu par Christian Teyssèdre (qui est même vice-président de l'assemblée midi-pyrénéenne). En 2014, celui-ci s'était engagé à y renoncer s'il était réélu maire et président de la communauté d'agglomération. Ceci fut fait, mais on attend toujours la démission. Dans l'article, il donne ses raisons, qui sont convaincantes. En revanche, il n'est pas très franc du collier quand il avance la charge de travail comme excuse pour ne pas conduire la liste socialiste aveyronnaise aux élections de décembre prochain. Dans ce cas, pourquoi, l'hiver dernier, a-t-il tenté de décrocher la tête de liste régionale ?

 

dimanche, 28 juin 2015

Cavanna, jusqu'à l'ultime seconde, j'écrirai

   C'est le titre du documentaire que le journaliste Denis Robert (dont le travail d'investigation a été récemment l'objet d'une fiction, L'Enquête) et sa fille ont consacré à feu François Cavanna, l'un des "historiques" de Charlie Hebdo. C'est une oeuvre au goût d'inachevé, parce que l'écrivain est mort en janvier 2014... et parce que les journalistes n'ont pas eu le temps d'interroger en profondeur tous ceux qui l'ont connu, les frères Kouachi s'étant chargés (en janvier 2015) de réduire d'un coup la liste des interviouvables.

   Ce sont d'abord les images qui marquent. Il y a celles du Cavanna plus jeune. Je n'ose pas dire jeune, parce qu'il avait déjà la quarantaine quand Hara-Kiri a rencontré le succès. Les gens de ma génération ne l'ont connu que grisonnant, voire blanchi sous le harnais, les moustaches bien pendantes. Le choc principal vient des entretiens filmés peu avant sa mort. Lui qui débordait d'énergie était visiblement très diminué, quoique globalement lucide.

   Le documentaire se concentre sur deux points : les années de gloire (autour de Hara-Kiri et du premier Charlie Hebdo) et le travail de l'écrivain. A ceux qui sont familiers de l'histoire de ces journaux, le film n'apprendra rien, sauf peut-être par la voix de Sylvie Caster (qui a longtemps tenu une rubrique dans Le Canard enchaîné), qui fut très proche de lui, à une époque.

   Quant au travail de l'écrivain, il est abordé essentiellement à partir de la réception de quelques oeuvres emblématiques. Les séquences sont d'ailleurs rythmées par des extraits de sa prose. Toutefois, j'ai trouvé cela un peu convenu. Pourtant, on a essayé d'introduire un peu d'inventivité visuelle dans le documentaire (avec notamment l'incrustation du bonhomme préhistorique), mais il manque la truculence de l'écrivain, que Denis Robert n'est pas parvenu à restituer. Quant aux extraits de la cérémonie d'hommages qui avait été organisée en son honneur, ils n'ont d'intérêt que par leur côté inédit et parce qu'on y retrouve des personnes aujourd'hui disparues.

   Un problème se pose au niveau de la dernière "carrière" de Cavanna : celle de simple chroniqueur dans le Charlie deuxième mouture (sous la houlette de Philippe Val), alors qu'il était devenu officiellement propriétaire du titre. Les productions de cette époque sont totalement absentes du documentaire, alors que l'écrivain s'y est révélé excellent pamphlétaire, s'attaquant aux intégristes de tout bord, à la corrida, à l'inculture...bref à la connerie.

   Denis Robert a choisi une assez grande diversité de témoins. Parmi ceux-ci, il donne beaucoup la parole à Siné. C'est évidemment voulu ainsi. Lorsqu'il est question de la période Val, il tente d'en faire dire le plus de mal possible par Cavanna. Il ne tient pas du tout compte de l'évolution qu'a connue l'hebdomadaire satirique entre sa renaissance, en 1992, et le départ de Philippe Val, en 2009. Les années 1992-2004 ont été pleines de vigueur et de diversité. Ce parti-pris est regrettable, parce que l'on sent bien qu'il manque quelque chose à ce documentaire.

21:07 Publié dans Cinéma, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 26 juin 2015

Petites vacheries en passant

   Alain Marc a beau la jouer modeste, on l'a senti quand même un peu revanchard quand le Conseil constitutionnel a fini par lui donner raison contre le maire de Saint-Affrique Alain Fauconnier. On peut lire ses déclarations notamment dans le numéro du Ruthénois sorti ce vendredi.

   Au premier abord, l'ex-député devenu sénateur adopte le costume du vainqueur magnanime : "Je n'ai rien à dire sur le recours d'Alain Fauconnier, je ne suis pas dans la rancoeur." C'est peut-être vrai, après tout. Les années passées, il s'est murmuré que les deux hommes, bien que n'appartenant pas au même bord politique, ne se détestaient pas. Après tout, ils ont tous les deux oeuvré dans l'enseignement (même si l'un des deux a pris sa retraite bien avant l'autre...). Ils auraient de surcroît certaines "amitiés" en commun. Ils se sont néanmoins affrontés sans ménagement aux sénatoriales de 2014.

   Paradoxalement, Alain Marc est plus virulent avec l'un de ses anciens alliés au Conseil général de l'Aveyron (sans épargner au passage Alain Fauconnier). Jean-Louis Grimal (maire de Curan) est un ancien vice-président du Conseil général, membre de la majorité de Jean-Claude Luche. Il a osé se présenter aux sénatoriales de 2014, obligeant le pourtant député (et vice-président du même Conseil général) Alain Marc à passer par le second tour pour être élu. Celui-ci lui en a gardé rancune... à tel point que, presque un an plus tard, il balance une allusion sournoise en pleine de conférence de presse : "Par qui a été embauchée la fille de Jean-Louis Grimal ?"

   Précisons que Nadège Grimal, fille de Jean-Louis, a été engagée par le Parc Naturel Régional des Grands Causses en janvier 2012 (d'après son profil LinkedIn). Or, celui-ci est présidé (depuis juillet 2011) par Alain Fauconnier. De là à penser que, deux ans et demi plus tard, le papa s'est présenté uniquement pour "remercier" le sénateur, auquel il attribuerait l'embauche de sa fille, il y a un pas énorme qu'Alain Marc semble franchir sans gêne.

   Plusieurs incertitudes planent au-dessus de cette embauche. Est-ce à l'initiative d'Alain Fauconnier que la fille de J-L Grimal a été recrutée ? N'était-ce pas plutôt pour ses compétences ? Et, quand bien même il y a aurait eu du favoritisme dans cette affaire (ce qui reste à démontrer), est-il raisonnable de penser que c'est la raison pour laquelle, deux ans et demi plus tard, le père s'est lancé dans la course aux sénatoriales ? N'est-ce pas plutôt parce que cet élu local d'expérience a pensé qu'il avait le profil du poste... et qu'Alain Marc aurait dû se "contenter" de rester député (et vice-président du conseil général, président d'intercommunalité, adjoint au maire...) ? A l'époque, on sentait qu'il y croyait, allant jusqu'à voguer sur les inquiétudes suscitées par la réforme des rythmes scolaires. Non, décidément, il semble que le ressentiment d'Alain Marc perturbe son jugement.

   Mais c'est à un autre cacique de la droite aveyronnaise, l'ancien député-maire de Millau Jacques Godfrain, qu'il réserve ses flèches les plus assassines. Il faut dire que son ancien mentor lui avait cassé un peu de sucre sur le dos, dans un entretien accordé à Midi Libre. S'inspirant d'une fable de La Fontaine, il avait comparé son ancien poulain plutôt à un corbeau qu'à un aigle. Voici la réplique d'Alain Marc : "La vieillesse peut être sage, elle peut être triomphante, mais, parfois, elle est un naufrage comme le disait Chateaubriand."

   Le sénateur prouve qu'il a des lettres, faisant référence à la préface des Mémoires d'outre-tombe, dans laquelle l'écrivain royaliste confessait : "je dis ce qui est, ce qui est arrivé, sans que j’y songeasse, par l’inconstance même des tempêtes déchaînées contre ma barque, et qui souvent ne m’ont laissé pour écrire tel ou tel fragment de ma vie que l’écueil de mon naufrage."

   Mais, évidemment, tout "républicain" ou "ex-UMPiste" qui se respecte sait que c'est Charles de Gaulle qui a popularisé l'expression. On a oublié parfois qu'elle figure dans le premier tome des Mémoires de guerre, L'Appel, 1940-1942. On sait encore moins souvent que l'expression s'applique à Philippe Pétain, dans un passage de toute beauté (de Gaulle avait une excellente plume) que je ne résiste pas au plaisir de vous citer.

   "Toute la carrière de cet homme d'exception avait été un long refoulement. Trop fier pour l'intrigue, trop fort pour la médiocrité, trop ambitieux pour être arriviste, il nourrissait en sa solitude une passion de dominer, longuement durcie par la conscience de sa propre valeur, les traverses rencontrées, le mépris qu'il avait des autres. La gloire militaire lui avait, jadis, prodigué ses caresses amères. Mais elle ne l'avait pas comblé, faute de l'avoir aimé seul. Et voici que, tout à coup, dans l'extrême hiver de sa vie, les événements offraient à ses dons et à son orgueil l'occasion, tant attendue, de s'épanouir sans limites ; à une condition, toutefois, c'est qu'il acceptât le désastre comme pavois de son élévation et le décorât de sa gloire. [...] Mais, hélas ! les années, par-dessous l'enveloppe, avaient rongé son caractère. L'âge le livrait aux manoeuvres de gens habiles à se couvrir de sa majestueuse lassitude. La vieillesse est un naufrage. Pour que rien ne nous fût épargné, la vieillesse du maréchal Pétain allait s'identifier avec le naufrage de la France."

   C'est donc une vacherie à double détente. Pour le grand public, c'est juste une allusion au grand âge du capitaine : Jacques Godfrain vient d'avoir 72 ans. Mais il est certain que celui qui est président de la Fondation Charles de Gaulle a compris la comparaison humiliante qui était faite avec un dictateur de plus de 85 ans.

   A ceux qui s'étonneraient de l'attitude du nouveau sénateur, je répondrai que ce n'est pas la première fois qu'il dénigre une personne qui lui barre le chemin. Ainsi, en juin 2012, la campagne des législatives avait été marquée par quelques propos peu confraternels... voire carrément méprisants.

jeudi, 18 juin 2015

République exemplaire à Montauban ?

   On peut dire que cela n'a pas tardé. Alors que, le 30 mai dernier, Nicolas Sarkozy célébrait la (re)naissance du parti gaulliste "Les Républicains", dès le 17 juin, La Dépêche du Midi s'est précipitée pour annoncer la mise en examen d'une élue "LR", à savoir Brigitte Barèges, maire de Montauban. Le lendemain, le 18, un nouvel article détaille ce qui est reproché à Mme Barèges et quelques autres personnes... dont le directeur du Petit Journal (pas celui de Canal +, hein !).

   Très vite, quelques mauvais esprits ont fait remarquer que la diligence de La Dépêche dans cette affaire n'est pas anodine. Le quotidien toulousain appartient au Groupe La Dépêche, dirigé par Jean-Michel Baylet, par ailleurs président du PRG et conseiller départemental de Valence, dans le Tarn-et-Garonne, dont il a échoué à conserver la présidence en 2015. Une intense rivalité oppose le radical-socialiste à la maire de Montauban, soutenue par Le Petit Journal local, dont le rythme de parution est plus élevé que dans les autres départements. Dans le "huit-deux", Alain Paga mène un combat plus personnel, à la fois contre l'omnipotence de La Dépêche du Midi et contre l'action politique de J-M Baylet. Tout cela pourrait se dérouler dans les règles. Il n'est pas besoin de lire très longtemps les deux journaux pour comprendre quelles sont leurs inclinations respectives. Mais la justice soupçonne Mme Barèges (et quelques autres personnes) de s'être affranchie de certaines de ces règles.

   La clé est la campagne des élections municipales de 2014. Les précédents scrutins (ceux de 2001 et 2008) avaient été serrés, en particulier celui de 2008, qui n'avait vu la victoire de liste menée par B. Barèges qu'avec moins de 200 voix d'avance (sur près de 27 000 suffrages exprimés). Elle a peut-être jugé que le discrédit dont souffrait (et souffre encore) la gauche n'était pas suffisant pour lui garantir une réélection sans risque. D'où le recours à du publireportage, non présenté comme tel aux lecteurs. Ces petits arrangements seraient peut-être restés inconnus du public si la maire ne s'était fâchée avec son conseiller en communication, Jean-Paul Fourment, qui a dévoilé le pot-aux-roses.

   A partir de là, l'affaire a pris deux directions, une pénale (avec ouverture d'une enquête en février 2014, avant donc le premier tour des municipales), une autre administrative, avec la contestation des comptes de campagne de la candidate, finalement facilement réélue.

   C'est la justice administrative qui s'est montrée la plus réactive. Ainsi, dès juillet 2014, les comptes de campagne de la liste Barèges étaient rejetés par la Commission nationale (la CNCCFP). En octobre 2014, le tribunal administratif de Toulouse avait non seulement confirmé cette sanction, mais aussi déclaré Brigitte Barèges inéligible. Celle-ci a fait appel devant le Conseil d'Etat, qui a rendu sa décision... le 6 mai dernier. (On peut en lire un résumé dans le communiqué publié par la juridiction administrative suprême.)

   Le jugement du Conseil d'Etat est balancé. Tout d'abord, il valide celui qui a été rendu par le tribunal administratif de Toulouse. C'est clair et net. La candidate Barèges a contrevenu au code électoral, notamment à l'article L52-1 : "Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite."

   L'article L52-8 a aussi été enfreint : "Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués." (Rappelons que c'est la mairie de Montauban qui a financé la parution d'articles favorables à la candidate Barèges dans Le Petit Journal.)

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   Je signale aux non-initiés que, dans la décision du Conseil d'Etat, la mention "Mme C..." désigne la tête de liste victorieuse aux dernières élections municipales à Montauban, à savoir Mme Barèges.

   Les curieux qui auraient envie de connaître le détail des sommes trouveront la réponse à leur question un peu plus bas, au point 14. Cela représente neuf factures de 2 052,48 euros et une dixième de 1 552,48 euros. Au total, cela nous donne 9 x 2052,48 + 1552,48 = 20 024,80 euros. (Je profite de l'occasion pour souhaiter bon courage aux candidats qui passent le baccalauréat cette année !)

   Ajoutons que le Conseil d'Etat a aussi rejeté la demande d'une question prioritaire de constitutionnalité : Mme Barèges -ou du moins son avocat- prétendait que la manière dont le code électoral avait été appliqué portait atteinte à ses droits fondamentaux. (Je pense que, dans la marge du papier portant cette demande, au moins l'un des magistrats a dû avoir envie d'écrire la mention "lol" !) Cela explique aussi que le Conseil d'Etat fasse référence à des décisions du Conseil constitutionnel, notamment une réponse à une QPC, de 2011, qui portait sur un sujet très proche.

   Les juges administratifs ont toutefois donné raison à Mme Barèges sur un point : l'inéligibilité de la candidate élue. S'appuyant sur l'article L118-3 du Code électoral, le Conseil d'Etat a estimé que la fraude, pour réelle qu'elle soit, n'a pas été d'une "particulière gravité". Quand on lit entre les lignes, on comprend que les magistrats ont voulu dire que la fraude ne suffit pas à expliquer la victoire de la liste Barèges : sans elle, elle l'aurait quand même emporté.

   L'onction du suffrage universel évite à la maire de Montauban une sanction plus sévère... sur le plan administratif. Désormais, c'est sur le plan pénal que l'affaire va se jouer. On notera que le procureur de la République de Toulouse a sagement attendu que ses collègues parisiens se prononcent avant d'engager sérieusement les poursuites, alors que l'enquête a été ouverte plus d'un an auparavant.

dimanche, 14 juin 2015

Aurtograf

   Le tout nouveau baromètre Voltaire a fait la Une de la presse, notamment de La Dépêche du Midi de vendredi 12 juin. La lecture de ce dossier est d'ailleurs très enrichissante. Dans le premier cahier du quotidien toulousain, l'article occupe une grande part de la page 5. Carte et chiffres à l'appui, on se réjouit du relatif bon classement de Midi-Pyrénées et, globalement, des départements du grand Sud-Ouest.

   Hélas, trois fois hélas ! Dans une nouvelle version de "l'arroseur arrosé" ou de "tel est pris qui croyait prendre", page suivante, en lisant le papier consacré au meurtre horrible de Maureen Jacquier, voici ce sur quoi l'on tombe :

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   Fort heureusement, l'erreur a été corrigée dans la version numérique de l'article. On ne répètera jamais assez qu'avant d'envoyer une lettre, un message ou de publier un article (ou un billet, sur un blog), il est indispensable de se relire... surtout si (comme moi) l'on a plus de difficultés à lire sur un écran que sur du papier.

   Concernant la maîtrise faiblissante de notre langue, le constat n'est pas nouveau... et force est de constater que les ministres de l'Education qui se sont succédé ces dernières années ne se sont pas montrés à la hauteur de la tâche... la dernière en date préférant bricoler les programmes du collège plutôt que de s'attaquer vraiment à l'illettrisme qui gangrène notre pays.

   Les récents articles n'ont en général pas cherché à expliquer cette baisse du niveau. Il est pourtant une constatation simple que les gens de ma génération peuvent faire : les enfants du XXIe siècle ont moins de travail scolaire qu'en ont eu leurs parents. La différence est particulièrement flagrante en français. Il y a quelques années, on faisait porter le chapeau de l'illettrisme aux méthodes d'apprentissage de la lecture. On aurait aussi pu tout simplement faire remarquer qu'à l'école élémentaire, nos têtes blondes reçoivent un enseignement en français très allégé par rapport à ce que nous avons connu.

   Actuellement, les horaires officiels sont de 10 heures par semaine en CP-CE1 et seulement 8 heures en CE2, CM1 et CM2. D'après les instructions officielles de 1945 (appliquées jusqu'au début des années 1970), les générations des "Trente Glorieuses" ont été mieux servies :

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   Quand on fait la somme de toutes les heures affectées au français, on arrive à 15 pour le CP, presque 14 pour le CE et 11 pour le CM, soit entre trois et cinq heures de plus par semaine (par rapport à aujourd'hui). On notera qu'à l'époque, les élèves avaient 30 heures de cours par semaine à l'école élémentaire, contre 24 en 2015...

   Ceci dit, soyons honnêtes, à chaque époque les adultes ont l'impression que la jeunesse montante est moins bien formée que la précédente. On peut en trouver la trace jusque dans le très sérieux Bulletin Officiel de l'Education Nationale. Dans le numéro 62, daté du 29 novembre 1945, un proviseur livre ses réflexions sur l'enseignement du français dans le secondaire (à l'époque réservé à une mince élite). Voici ce qu'il écrit :

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   La différence avec notre siècle tient dans la manière de considérer les jeunes. En 1945, on plaçait clairement les enfants et les adolescents en position subalterne par rapport aux adultes, sans que cela induise du mépris. Voici par exemple le type de conseil que l'on peut trouver dans un autre exemplaire du BO, d'octobre 1945 :

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   Aujourd'hui, nous vivons dans la "civilisation" de l'enfant-roi. Certains gamins et gamines, auxquels on n'a pas inculqué le sens de l'effort et du devoir, deviennent des adultes égocentriques et capricieux. On peut les rencontrer dans la rue, au volant d'une voiture, au restaurant, aussi bien qu'à l'Assemblée nationale.