vendredi, 16 novembre 2012
Ne pas vendre la peau de l'ours...
... avant que la promotion ne soit obtenue ! Telle pourrait être la maxime que pourraient suivre certains élus un peu trop flagorneurs. Souvenez-vous : il y a environ deux mois, dans l'hebdomadaire Le Ruthénois, l'un des adjoints au maire de Rodez félicitait par avance celui-ci pour sa promotion au rang de vice-président du Conseil régional de Midi-Pyrénées.
Hélas ! Trois fois hélas ! Le mois dernier, Le Nouvel Hebdo révélait (dans le numéro 250) qu'il n'en serait rien. Les trois vice-présidences dont les titulaires changeaient étant détenues par des femmes, parité oblige, il était évident que le maire de Rodez (à moins de subir une opération lourde) ne pouvait en briguer une.
Ce jeu de chaises musicales résulte des élections législatives de juin 2012. Les trois femmes qui abandonnent leur vice-présidence ont toutes été (ré)élues députées : Monique Iborra et Carole Delga en Haute-Garonne, Marie-Lou Marcel dans l'Aveyron. Signalons que la première avait même carrément démissionné du Conseil régional, dès mars 2012, soit avant d'être réélue. Voilà une attitude qui ne manque pas de panache. Les deux autres ne sont pas allées jusque-là, continuant à cumuler mandats (et indemnités...) de députées et conseillères générales.
Il a fallu attendre un petit moment pour que le nom des remplaçantes soit introduit sur la liste des vice-présidences (alors que Le Nouvel Hebdo les avait donnés dès octobre dernier). En cherchant bien, on pouvait trouver un communiqué laconique.
Les nouvelles sont Janine Loïdi, Nadia Pellefigue et Viviane Artiglias. Sans surprise, on constate que les deux premières sont des élues de Haute-Garonne. Mais la troisième n'est pas aveyronnaise, elle vient des Hautes-Pyrénées. Il n'y a donc plus d'Aveyronnais titulaire d'une vice-présidence. Faut-il s'en attrister ? La fonction est surtout honorifique (et pourvoyeuse d'une indemnité un peu plus élevée).
Mais pourquoi diable Martin Malvy n'a-t-il pas puisé dans la liste aveyronnaise pour remplacer Marie-Lou Marcel ? Peut-être parce qu'elle ne compte pas d'autre femme socialiste. (Les trois partantes sont membres du PS.) Nicole Fréchou est au Front de Gauche (de surcroît haut-garonnaise... et parachutée sur la liste aveyronnaise à l'issue d'une manoeuvre que j'avais dénoncée en son temps). Andréa Goumont est au PRG et Marie-Françoise Vabre est membre d'Europe-Ecologie. Il a donc fallu piocher ailleurs.
Voilà qui a dû doucher les espoirs des socialistes aveyronnais, qui louchent sur la présidence du Conseil régional en 2015. Certains voyaient déjà Christian Teyssèdre succéder à Martin Malvy (à condition bien sûr que la gauche remporte ces élections). Déjà, en mars 2010, j'avais émis des doutes sur cette possibilité : la première vice-présidente, Nicole Belloubet, semble (pour l'instant) la mieux placée, même si rien n'est joué.
Si l'on veut avoir confirmation de la faiblesse des chances du maire de Rodez, on peut se reporter à un récent papier publié dans Le Journal Toulousain, un hebdomadaire plutôt de droite qui tente de survivre dans un environnement de gauche.
Le numéro du jeudi 25 octobre dernier avait une couverture accrocheuse :
L'article principal, sans écarter l'idée d'une nouvelle candidature de Martin Malvy (qui serait tout de même âgé de 79 ans...), présente ceux qu'il estime être les plus sérieux prétendants. Il s'agit de Nicole Belloubet, de Kader Arif (le ministre des Anciens combattants), de Jean Glavany (actuellement député des Hautes-Pyrénées), et de Philippe Martin (le président du Conseil général du Gers). Même si l'on peut trouver que la liste est très restrictive et qu'elle met l'accent sur des politiques déjà connus, il est intéressant de noter l'absence du maire de Rodez.
Ceci dit, toutes ces candidatures putatives vont devoir s'accommoder d'une nouvelle loi sur le cumul des mandats (que l'on espère ambitieuse). Bien de l'eau va couler sous les ponts...
20:55 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, presse, médias, journalisme
samedi, 10 novembre 2012
Feu le conseiller territorial
Dans Le Nouvel Hebdo paru vendredi 9 novembre, une contribution de Bernard Dufay contient plusieurs approximations à propos de la réforme envisagée naguère par le gouvernement Fillon et passée à la trappe depuis le changement de majorité.
L'auteur rebondit (de manière assez agressive) sur l'entretien (assez complaisant) accordé par la ministre Anne-Marie Escoffier au Ruthénois (peut-être aussi paru dans Le Progrès Saint-Affricain), il y a une quinzaine de jours. Il semble ne voir que des qualités dans cette réforme avortée, la première étant de faire diminuer le nombre d'élus.
C'est vrai, mais il s'emmêle un peu les pinceaux dans les chiffres. Si l'on fait la somme des conseillers régionaux de Midi-Pyrénées et des conseillers généraux des huit départments de la région (Ariège, Aveyron, Haute-Garonne, Gers, Lot, Hautes-Pyrénées, Tarn et Tarn-et-Garonne), on aboutit à 384 élus (91 + 22 + 46 + 53 + 31 + 31 + 34 + 46 + 30), dont 293 conseillers généraux. B. Dufay en a compté 379, dont 288 conseillers généraux. Même si l'on retranche du total les deux élus qui siègent dans les deux assemblées (deux Aveyronnais : Régis Cailhol et Jean-Claude Luche), on est à 382 personnes.
De même, il commet une erreur en cette fois-ci surestimant le nombre de conseillers territoriaux attribués à Midi-Pyrénées : 261, contre 251, d'après la loi de juillet 2011. Il n'a fait que reprendre le nombre cité dans l'entretien... Il aurait dû vérifier !
Ceci dit, la rectification des chiffres va dans le sens de l'article de B. Dufay ; l'écart entre le nombre d'élus actuels et celui envisagé par la réforme Sarkozy est encore plus grand : 134 au lieu de 118. Mais cela ne permet pas d'affirmer que ladite réforme aurait fait faire des économies.
Au niveau des indemnités, on pourrait penser que, comme le nombre d'élus aurait diminué, c'est sur ce poste-là que les dépenses auraient fortement baissé. En fait, non. Les conseillers territoriaux auraient été mieux indemnisés que les actuels conseillers régionaux et surtout généraux : leur indemnité aurait correspondu à celle d'un conseiller régional, augmentée de 20 %. Comme Midi-Pyrénées compte quelque 2 900 000 habitants, cette indemnité est d'environ 2 300 euros par mois. (Mais, dès que la région atteindra les 3 millions d'habitants -ce qui ne saurait tarder, l'indemnité dépassera 2 500 euros !). Si l'on ajoute 20 %, on obtient environ 2 760 euros par mois (3 200 si la région compte 3 millions d'habitants)...
... A comparer aux indemnités des conseillers généraux : environ 1 500 euros dans les départements comptant moins de 250 000 habitants (Ariège, Gers, Lot, Hautes-Pyrénées ainsi que Tarn-et-Garonne). Si on laisse de côté présidences et vice-présidences, actuellement, les 32 conseillers régionaux et les 148 conseillers généraux issus de ces départements coûtent, en indemnités, environ 295 000 euros par mois. Avec la réforme Sarkozy, ces élus auraient été remplacés par 99 conseillers territoriaux, indemnisés en moyenne 2 760 euros, soit un coût total d'environ 273 000 euros. L'économie serait d'environ 20 000 euros par mois. Cependant, à partir du moment où la région atteindrait les 3 millions d'habitants, la réforme serait plus dépensière que l'ancien système puisqu'on aboutirait à des coûts respectifs (avant / après) de 308 000 et 317 000 euros, soit un surcoût de près de 10 000 euros par mois.
Passons aux cas de l'Aveyron et du Tarn, qui entrent dans la tranche 250 000 - 499 999 habitants. Les conseillers généraux "de base" y touchent environ 1 900 euros par mois. La réforme Sarkozy aurait permis de réaliser une économie d'environ 50 000 euros (par mois) sur les indemnités, avec une population régionale inférieure à 3 millions d'habitants. Avec une population régionale atteignant la barre fatidique, l'économie n'est plus que d'environ 35 000 euros par mois.
Il nous reste le département -atypique- de la Haute-Garonne. Sa population est sur le point de dépasser le seuil de 1 250 000 habitants, ce qui fera passer l'indemnité de ses conseillers généraux de 2 500 à 2 700 euros par mois. La réforme aurait avantagé ce département, qui aurait conservé grosso modo ses élus (36 conseillers régionaux et 53 généraux remplacés par 90 territoriaux). Si l'on prend les estimations basses (ni le département ni la région ne franchissent le seuil de population qui déclenche l'augmentation des indemnités des élus), la réforme coûterait entre 30 000 et 35 000 euros par mois : le total des indemnités passerait de 215 000 à 248 000 euros. Si l'on prend en compte le franchissement des seuils, le surcoût serait de près de 50 000 euros par mois.
Comme moi, vous en arrivez à la conclusion que, pour la région Midi-Pyrénées, la réforme des collectivités locales que le gouvernement Fillon avait concoctée ne faisait réaliser aucune économie au niveau des indemnités. (Bernard Dufay sort de son chapeau une économie de 5,5 millions d'euros... Quel joli tour de magie !) Elle aurait même occasionné davantage de dépenses de transport (les 251 conseillers territoriaux -au lieu des 91 conseillers régionaux- devant se rendre régulièrement dans le chef-lieu régional). Je ne vous parle même pas des hémicycles à reconstruire, des hôtels de région à adapter... autant de dépenses à la charge, non pas de l'Etat, mais des régions (tenues majoritairement par ceux qui formaient l'opposition de gauche, à l'époque).
On arrive là au coeur du problème. Sous une apparence de rationalisation, cette réforme poursuivait des buts politiques. Les conseillers territoriaux auraient été élus au scrutin majoritaire, comme les actuels conseillers généraux. Le scrutin proportionnel, utilisé pour les élections régionales, aurait été supprimé. Cela aurait eu pour conséquence de faire chuter la représentation des formations minoritaires (Front de Gauche, Verts, Modem, Front National). On peut aussi penser que le gouvernement comptait sur le découpage des super-cantons pour avantager ses troupes. A terme, l'objectif semblait de garantir la victoire de l'UMP dans un minimum de régions... et de permettre la reconquête quasi-générale en cas de mauvais report des voix à gauche.
P.S.
Il faudrait pourtant réformer les collectivités territoriales françaises. Les communes sont trop nombreuses dans notre pays. Du coup, on peine à trouver des conseillers municipaux bénévoles, ou alors certains, une fois élus, se désintéressent vite d'une fonction qui joue un faible rôle, le pouvoir étant détenu par le maire et les adjoints.
Les élus (rémunérés) qui siègent dans les assemblées départementales et régionales sont eux aussi trop nombreux. Combien sont payés à ne rien faire ? (On pourrait faire la même remarque à propos des députés et des sénateurs : 400 députés et une centaine de sénateurs non absentéistes suffiraient largement.)
La réforme du gouvernement Fillon aurait été plus crédible si elle avait conduit à diminuer aussi le nombre de conseillers régionaux et si le scrutin proportionnel n'avait pas été mis à la trappe.
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samedi, 03 novembre 2012
La chasse au couteau
Ce n'est pas une blague de la Toussaint : le 1er novembre, le quotidien Midi Libre a signalé que le célèbre mensuel Le Chasseur Français consacre, dans son numéro de novembre, un petit dossier à ce qu'il est convenu d'appeler "l'affaire Laguiole", signalé en "une" du journal :
L'éditorial d'Antoine Berton (au titre gaullien : "L'appel de Laguiole") est consacré à ce même sujet :
J'y ai souligné deux éléments importants : l'engagement du mensuel de ne plus utiliser d'articles de contrefaçon lors de ses opérations promotionnelles et le lancement d'une pétition en faveur du village aveyronnais.
Je me rappelle qu'il y a des années de cela, une célèbre marque de saucissons secs "offrait" avec sa marchandise un exemplaire de couteau censé avoir été fabriqué sur l'Aubrac. Quand on sait que les babioles chinoises et pakistanaises peuvent se vendre (aujourd'hui) à 1 euro en grande surface, on mesure la valeur du "cadeau". (Pour la petite histoire : cette pratique commerciale a contaminé jusqu'aux identitaires corses, qui avaient lancé, l'an dernier, des porte-clés nationalistes... fabriqués en Chine...)
Pour ceux que la pétition du Chasseur Français tenterait (ou qui voudraient la faire circuler), voici l'encadré qui a été publié dans le numéro du mois de novembre :
A présent, venons-en au mini-dossier. Il commence sur les propos de Thierry Moysset, le directeur de la Forge de Laguiole, très en pointe dans l'affaire. Plus loin dans l'article, il est question d'une autre coutellerie qui a pignon sur rue, Honoré Durand & fils. La parole est aussi donnée au maire et conseiller général, Vincent Alazard. Une chronologie complète le propos, illustré par des photographies des personnes interrogées, mais aussi de l'actuel (Gilbert Cestrières) comme de l'ancien (André Valadier, accompagné d'une vache Aubrac) président de la coopérative Jeune Montagne, ainsi que de Michel Bras (dont on connaît la passion pour les couteaux).
Le mensuel ne donne pas la parole à Gilbert Szajner et ne cite pas non plus la voix discordante de Gérard Galtier (du Nouvel Hebdo). L'article s'achève sur l'évocation du projet d'extension des IGP aux produits non agroalimentaires, qui nécessite une loi.
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dimanche, 28 octobre 2012
Cirage de pompes
J'aurais plutôt dû titrer "Cirage d'escarpins". En effet, le numéro de cette semaine du Ruthénois consacre plus de deux pages (ainsi que sa "une") à la ministre Anne-Marie Escoffier :
J'en connais qui vont dire : "Mais qu'est-ce qu'il a (encore) à râler ? N'avait-il pas rapidement souligné la nomination de la sénatrice au gouvernement Ayrault ?" Certes. Je reconnais que j'ai de l'estime pour la personne. Mais ce n'est pas une raison pour tomber dans la complaisance.
Les articles comme l'entretien ont été réalisés par un certain Benoît Garret. Première surprise. On se serait attendu à ce que Benjamin Laumaillé officie. Même si l'on a déjà vu (notamment à l'occasion des élections régionales de 2010) la signature de B. Garret dans Le Ruthénois, les entretiens politiques sont d'habitude menés par B. Laumaillé. Il n'est d'ailleurs pas membre de la rédaction de l'hebdomadaire du Piton, mais de celle du Progrès Saint-Affricain, dont les propriétaires sont identiques. Voici ce à quoi il ressemblait en 2004, d'après le numéro 28 de La Gazette, publication des anciens de l'Ecole Supérieure de Journalisme de Lille (page 7) :
(Notons que son nom est mal orthographié : il manque un "r".)
Mais assez de fouinage. Revenons au fond des articles. Ils sont uniquement élogieux. Si, page 3, certaines questions peuvent passer pour (un peu) dérangeantes, elles servent principalement à permettre à Mme Escoffier d'énoncer ses idées. Page 4, c'est pire. On suit la journée de la ministre. C'est du publireportage.
La flatterie pousse même le journaliste à afffirmer que Mme Escoffier a raté de peu la présidence du Conseil général en 2008. Tout dépend de ce que l'on veut dire par "de peu"... Plus loin, la perspective départementale est rappelée. On sous-entend que la ministre pourrait à nouveau briguer la présidence en 2015 (ce dont elle se défend).
Je crois qu'à gauche on se fait beaucoup d'illusions sur le résultat des élections à venir. En 2014, l'actuelle majorité risque de prendre une jolie claque aux municipales, ainsi qu'aux européennes, dont les extrêmes pourraient sortir grands vainqueurs. A la suite de cela, il n'est pas impossible que le Sénat rebascule à droite. Quant aux cantonales, si elles ont lieu en 2015, je doute qu'elles débouchent sur la promotion d'une candidate de 73 ans...
Signalons pour terminer quelques approximations. Cela commence page 4, dans la biographie de la ministre. On ne peut pas écrire "En 2001, Anne-Marie Escoffier est écartée de la préfecture ruthénoise par Nicolas Sarkozy." En 2001, c'est le socialiste Daniel Vaillant qui était ministre de l'Intérieur. La mutation de la préfète n'avait donc rien d'une sanction politique. Par contre, elle a effectivement été nommée ensuite dans l'Yonne.
Page 5, il ne fallait pas écrire que les départements ont été créés "au sortir de la Révolution française", mais pendant, puisque cela s'est passé en 1790. Quant aux régions administratives, elles ont une histoire plus ancienne et plus complexe que ce qui ressort de l'encadré. Si les Conseils régionaux sont nés en 1972, c'est dès 1963 que l'on a délimité les "régions administratives" (et pas en 1982, quand elles deviennent des collectivités territoriales). En cherchant bien, on trouve leurs ancêtres, les "régions de programme", dès les années 1950.
22:56 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, journalisme, médias
samedi, 20 octobre 2012
Laguiole et le concours national Aubrac
La politique locale et la polémique récente se sont invitées à la manifestation agricole. C'est le dimanche que les élus locaux sont venus montrer leur bobine sous le chapiteau. Ils s'agglutinaient autour d'André Valadier, dont certains espéraient sans doute capter une partie de l'aura (y a du boulot...).
Ils en ont profité pour clamer leur amour de la petite région et leur solidarité avec le maire de Laguiole, ravi d'être l'objet de tant d'attentions. Du coup, la presse a finalement peu parlé du fond de la manifestation (la promotion d'une race rustique jadis vouée à la disparition) et l'on a (en général) plus vu les politiques que les éleveurs sur les photographies, à l'image de celle publiée dans le Bulletin d'Espalion de cette semaine :
Et voici ce que l'on pouvait voir dans La Dépêche du Midi de mardi dernier :
(Le quotidien toulousain me pardonnera cet emprunt : c'est pour la démonstration.)
Vous ne rêvez pas. Il ne s'agit pas d'une "photographie soeur", à l'image de ce que l'on constate quand les différents journaux envoient leurs photographes sur le lieu d'un événement marquant : les prises de vue, bien que ressemblantes, sont légèrement différentes ; on sent même parfois qu'elles ont été prises à quelques secondes d'intervalle. Ce n'est pas le cas ici. L'un des deux organes de presse a utilisé les services de l'autre. Lequel ?
Qu'en pensent les participants au concours ? Les journaux se gardent bien de le dire. Pourtant, le monde paysan pourrait servir de modèle à bien des égards. Cela fait déjà plus de 50 ans que le fromage Laguiole a obtenu son AOC (devenue AOP - au niveau européen - dès 1992). De leur côté, les éleveurs de bovins-viande ont créé le label rouge "Boeuf Fermier Aubrac" et ont récemment (2010) obtenu l'IGP pour le label "Fleur d'Aubrac".
C'est cet exemple qui pourrait être suivi par les couteliers. Pour cela, il faudrait que des produits autres qu'agricoles (ou agroalimentaires) puissent obtenir une IGP (Indication Géographique Protégée). D'où la nécessité d'une loi (et d'une validation par l'Union européenne), ce que Gérard Galtier écrit depuis un petit moment dans Le Nouvel Hebdo (je le trouve néanmoins bien indulgent à l'égard de Gilbert Szajner).
Viendra alors le moment de l'élaboration d'un cahier des charges. C'est là que de nouveaux problèmes pourraient surgir. Parmi les couteliers de Laguiole, combien fabriquent entièrement leurs produits sur place ? Quelle pourrait être la réaction de leurs homologues de Thiers, qui fournissent en pièces certains couteliers aveyronnais... mais qui ont délocalisé en Chine une partie de leur production ?
La création d'une IGP (moins restrictive qu'une AOP) pourrait concilier les "Layolais 100 %" et ceux qui utilisent des pièces provenant de Thiers. Par contre, les couteliers du Puy-de-Dôme pourraient se voir interdire de vendre sous le nouveau label... En clair : on n'a pas fini de causer de cette affaire. Il faudra penser à ériger une statue à celui ou celle qui parviendra à élaborer un label qui concilie les intérêts de tous les (bons) couteliers du Massif Central.
Et pourquoi pas un label "Laguiole MC" ?
22:12 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, médias, société, économie
mercredi, 10 octobre 2012
"Ceux qui ont le pouvoir à Rodez"
Sous ce titre pompeux se cache un "décrochage régional" du mensuel d'information économique L'Expansion, couverture accrocheuse à la clé :
Que les Ruthénois qui croient que le chef-lieu aveyronnais fait la une de la presse nationale redescendent immédiatement sur terre : cette couverture est à destination locale. La majorité de nos concitoyens s'est retrouvée face à ceci :
En consultant le sommaire en ligne, on peut vérifier (page 2) que plusieurs régions ont bénéficié du même traitement :
Nous avons eu récemment une autre déclinaison de ce procédé, avec l'hebdomadaire L'Express, qui a consacré un encart à la polémique qui entoure l'installation d'éoliennes dans la région :
La couverture officielle était celle-ci :
Les 7 petites pages consacrées au dossier local, pour intéressantes qu'elles fussent, étaient noyées dans un océan de médiocrité. Je n'avais pas lu cet hebdomadaire depuis un petit moment... et je reconnais que je ne risque pas de l'acheter avant longtemps, tant les articles m'ont paru superficiels.
Signalons que L'Expansion et L'Express appartiennent au même groupe (Roularta). Aurait-on mutualisé les compétences pour sortir, à un mois d'intervalle, deux dossiers enracinés dans la même région ? En tout cas, cela doit payer, puisque L'Express renouvelle ainsi une expérience tentée l'an dernier, avec le maire de Rodez en vedette, à l'époque.
Toujours est-il que le mensuel contient plus de fond que son grand frère hebdomadaire. Ainsi, le numéro d'octobre propose :
- une enquête plutôt favorable au gaz de schiste (vu du côté américain)
- un article sur l'évolution du secteur automobile, accompagné d'un autre sur la réussite de Dacia
- un coup de projecteur sur le guayule, source d'une gomme naturelle promise à un grand avenir
- une étude sur la Camorra
On est d'autant plus déçu quand on arrive aux pages "aveyronnaises". On nous propose une suite de classements de "gens qui comptent" (chefs d'entreprise, scientifiques, politiques, familles), sans qu'on sache sur quels critères les positionnements ont été effectués. Du coup, on est en droit de soupçonner un concours de doigts mouillés... bref, un truc pas scientifique pour deux sous... avec des risques de copinage.
J'ai ainsi été très surpris de ne retrouver Albert Weitten (le futur ancien patron de l'usine Bosch, implantée aux confins de Rodez et d'Onet-le-Château) qu'en huitième position du classement des chefs d'entreprise.
Du côté des politiques, on n'a pas pris de risque en plaçant en tête Christian Teyssèdre et Jean-Claude Luche. Certains s'étonneront peut-être que le petit paragraphe consacré au président du Conseil général contienne la mention de l'endettement du département : 175 millions d'euros (chiffre qui figure dans la tribune publiée par l'opposition de gauche dans le numéro de juillet 2012 du magazine L'Aveyron).
Pourtant, que ce soit en valeur comme en moyenne par habitant, la dette aveyronnaise ne fait pas du département l'un des plus mauvais élèves. (Il est un peu au-dessus de la moyenne : il s'en sort un peu mieux que les autres.) C'est l'évolution récente qui est inquiétante. En 2009, si l'on se fie aux chiffres publiés naguère par Capital, l'endettement s'élevait à environ 131 millions d'euros. Entre 2009 et 2011 (en deux ans, donc), il aurait progressé d'environ 33 %, alors qu'entre 2001 et 2009 (en huit ans), il avait progressé de presque 37 %.
Le début de la présidence de Jean-Claude Luche (qui a pris les rênes du Conseil général en 2008), crise et transfert de compétences obligent, se révèle aussi déséquilibré que les dernières années du règne de Jean Puech, qui a ceci dit bénéficié de conditions plus favorables que son successeur.
Ceux qui pourraient trouver choquant qu'un mensuel de la bienséance économique semble préférer le centre-gauche "moderne" à une droite modérée traditionnelle seront rassurés par le portrait de Bernard Saules, qui a des airs de cirage de pompes.
Le nouveau conseiller général (qui fait quoi à l'assemblée départementale, au fait ?) et conseiller municipal d'opposition (qui redécouvre les plaisirs du siège au fur et à mesure que les échéances électorales se rapprochent) est présenté comme une sorte de vigie de la gestion municipale socialiste. Il pointe l'absence de "vraie politique pour l'enseignement supérieur", alors que la majorité départementale à laquelle il appartient a torpillé la cogestion qui fonctionnait jusque-là avec l'agglomération ruthénoise. Il a aussi le culot de déplorer le retard pris en matière d'aménagements routiers (au niveau de Rodez), alors qu'on ne peut pas dire que le Conseil général (dont dépendent certains tronçons) fasse quoi que ce soit pour décongestionner les grands axes qui desservent le chef-lieu aveyronnais. Au passage, le mensuel nous apprend que M. Saules aurait mis fin à son activité professionnelle principale (il est présenté comme un "ancien cadre bancaire")... une info à confirmer, tant le monsieur a pris l'habitude de cumuler les activités diverses.
Bref, si ce numéro de L'Expansion réserve de bonnes surprises à ceux qui s'intéressent à l'économie, il accumule les poncifs dans son palmarès des élites locales.
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dimanche, 07 octobre 2012
Double dose de "Charlie Hebdo"
On peut encore trouver dans les kiosques un drôle de numéro de Charlie Hebdo, paru le mercredi 26 septembre, une semaine après celui qui a tant fait polémique. En fait, deux numéros ont été publiés (et vendus au même prix... il n'y a pas de petits profits) ce jour-là, l'un qualifié de "responsable", l'autre d' "irresponsable" :
Le "journal responsable" est en grande majorité blanc, les caricatures ayant été auto-censurées, à l'image de ce qu'on voyait dans la presse au cours de la Première guerre mondiale, après le passage par les bureaux de la censure :
Mais il y a eu du travail au niveau des textes d'accompagnement. Ce ne sont évidemment pas les véritables titres et commentaires qui figurent dans ce numéro, mais des détournements, par exemple page 4 :
Au lieu de brocarder les politiques, l'hebdomadaire satirique "responsable" les remercie. L'économiste maison relaie le discours dominant et, cerise sur le gâteau, une information indispensable est fournie en haut de page : le résultat du tiercé ! Page 13, dans la rubrique "Culture", c'est le tirage du loto qui nous est donné. Je regrette que les rédacteurs n'aient pas songé à nous proposer un horoscope bidon (pléonasme).
Page 6, on reconnaît la "patte" d'Antonio Fischetti dans la rubrique scientifique "L'empire des sciences", qui n'aborde que des sujets de fond :
La double-page centrale est occupée par un autre dossier de poids : "Fallait-il montrer les seins de la reine d'Angleterre ?". Deux points de vue s'opposent, celui d'Alain Finkielkraut ("Qu'aurait répondu Hannah Arendt ?") et celui d'André Glucksmann ("Le silence assourdissant d'Heidegger sur la question me trouble"). Rappelons que ce sont deux des têtes de Turc privilégiées du journal. (Précisons que la formule à propos d'Heidegger fait allusion à ses sympathies nazies.)
Face à cela se dresse le numéro "irresponsable", qui continue son oeuvre de caricature. On n'y trouvera cependant que très peu de dessins dénigrant l'intégrisme musulman. C'est le catholicisme et le Front national qui sont les principales cibles des dessinateurs. Je dois avouer que la caricature (par Luz) des propos du cardinal Barbarin m'a bien fait rire :
Mais c'est sans doute Catherine qui a été la plus pertinente, avec sa réflexion sur Marine Le Pen en nouvelle disciple (gênante) de la laïcité :
Les textes parus dans l'hebdomadaire satirique du 26 septembre répondent à la polémique, en particulier à ceux qui ont accusé Charlie Hebdo d'en faire trop, de mettre de l'huile sur le feu. On sera plus ou moins convaincu.
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lundi, 01 octobre 2012
Un collégien journaliste à "La Dépêche du Midi" ?
Je me suis posé la question, ce matin, lorsque j'ai lu un article consacré à une compétition de rugby opposant des jeunes de nationalités différentes : Top 12 : Argentins et Sud-Africains sont arrivés (à Rodez).
Ecrit dans un style alerte (et signé), ce papier n'en est pas moins truffé de fautes de français, ainsi que je me suis plu à le faire remarquer sur le site internet du quotidien. Voici ce que cela donne quand on met celles-ci en valeur :
Dans le premier paragraphe, nous avons droit à une belle rupture de syntaxe, la deuxième partie de la phrase étant orpheline d'un verbe principal. Du coup, cela devient presque compliqué à lire.
Le début du paragraphe suivant voit un "se" remplacer un "ce". Plus loin, on sent que l'auteur de l'article était à la recherche d'une expression consacrée. Etait-il installé sur un mini-canapé (style clic-clac) ? Toujours est-il que le "claquement de doigts" a été quelque peu amputé. Le paragraphe se termine sur une autre phrase sans verbe principal.
La suite du texte nous offre deux expressions impropres. Il aurait fallu écrire que les Sud-Africains (avec un tiret, a priori) ont contribué à ranimer la flamme et que si les Argentins ont assisté à un entraînement de rugby, c'était à l'invitation du coach du Racing. Un esprit pointilleux rétablira l'accent circonflexe de "côté".
Est-ce la fatigue ? Les maladresses de construction s'accumulent en fin de texte. Mais le comble est atteint avec un morceau de phrase incompréhensible : "je souhait unanime était un lit douillé". Voilà de quoi laisser perplexe un ancien judoka français... On termine par une floppée d'erreurs bêtes, la plus croquignolesque étant sans conteste la "grâce matinée". Grasse soit rendue au matelas douillé !
Je reconnais que ce que je viens de faire est assez facile. Mais, tout de même... cela fait beaucoup de fautes pour un modeste article. Je me suis demandé qui pouvait bien être ce journaliste, qui avait signé de ses initiales "J-M N". Je n'ai pas trouvé trace de lui (je pense que c'est un Jean-Marc ou Jean-Michel Kekchose) dans la liste des rédacteurs du quotidien.
C'est alors que je me suis souvenu d'une conversation que j'ai eue naguère avec une personne qui connaît un peu le milieu journalistique. Un jour que je râlais contre la médiocrité de certains articles de la presse locale, il me dit :
- Voyons, Riton ! Tu devrais savoir que la presse locale emploie peu de vrais journalistes ! Beaucoup d'articles sont écrits par des correspondants, même s'ils sont retouchés après. Pire : certains papiers sont fournis "clés en mains" par divers interlocuteurs du journal (entreprises, associations, syndicats...). Après, c'est du copié-collé ! Ne t'étonne pas d'y lire un peu tout et n'importe quoi.
Si je suis ce raisonnement, l'article incriminé aurait été écrit par l'un des adultes encadrant ces jeunes rugbymen étrangers.
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vendredi, 28 septembre 2012
Devinette
Elle est posée en dernière page du Nouvel Hebdo de cette semaine, au coeur d'un long article consacré aux récents déboires juridiques de la commune de Laguiole :
La photographie est extraite du quotidien auvergnat La Montagne qui, le 19 septembre dernier, a consacré un papier à ce qu'il convient d'appeler "l'affaire Laguiole". Il n'est pas illogique que le chef cuisinier, qui a contribué à la notoriété du village aveyronnais et qui soutient la démarche engagée par la municipalité et certains artisans locaux, soit choisi pour illustrer l'article. Mais... est-ce bien un couteau Laguiole qu'il tient dans la main ? Regardons de plus près :
Si l'hebdomadaire satirique pose la question, c'est sans doute parce qu'il se doute que non. Au départ, j'avais pensé à un couteau originaire de Thiers, ville dont les liens avec Laguiole sont anciens. On y fabrique de très bons produits, mais pas ce couteau-là.
C'est alors que je me suis souvenu de la passion qu'éprouve le cuisinier pour le Japon (perceptible dans le documentaire Entre les Bras, sorti cette année). A partir de là, ma recherche n'a pas été longue. Je suis arrivé sur un blog dédié à la consommation. On y apprend que Michel Bras s'est fait faire ses propres couteaux, par le japonais KAI. C'est même devenu une gamme, dont on peut faire l'acquisition sur un site internet spécialisé. Pour la petite histoire, l'exemplaire de la photographie semble être un couteau à volaille :
C'est (involontairement) bien choisi, puisque, dans cette affaire, la commune de Laguiole se fait plumer !
Pour terminer, je me suis intéressé au retentissement de "l'affaire Laguiole". Elle a été évoquée par certains médias nationaux, notamment France Info. Je suis aussi allé voir ce qu'en disait un site d'information du Val-de-Marne. Pourquoi diable ? Eh bien, parce que l'entreprise de Gilbert Szajner est basée à Saint-Maur-des-Fossés, juste à côté de Créteil :
Curieusement, les sites d'entreprises comme manageo.fr donnent une certaine Etsuko Nakazawa comme présidente de "Laguiole Licences SAS". Mais cette société n'a été fondée qu'en 2009. Elle doit dépendre de Laguiole SA, qui, d'après verif.com, a été créée en 1986 et a son siège dans le premier arrondissement de Paris. Si Etsuko Nakazawa en est la directrice générale, le Conseil d'administration est présidé par Gilbert Szajner. Quand on regarde la liste des administrateurs, on se dit que les choses se passent en famille : à Etsuko Nakazawa s'ajoutent Nathalie et Yaël Szajner, visiblement les filles du patron.
Mais revenons à l'article du site val-de-marnais (improprement titré "Victoire juridique pour le Laguiole made in Val de Marne" !). Il qualifie Gilbert Szajner d' "entrepreneur inventif", tout en précisant qu'il a profité du vide juridique qui entourait le nom Laguiole. L'auteur ajoute que le récent verdict est un coup dur pour la petite commune aveyronnaise. Il cite les éléments qui appuient la décision de justice... mais se garde bien de révéler où les produits vendus par l'entreprise de Gilbert Szajner sont fabriqués... (Je conseille aussi la lecture des réponses d'internautes, certains visiblement aveyronnais.)
Signalons que cette affaire a été évoquée, jusqu'au Royaume-Uni (en 2010), dans un article du Daily Telegraph, un quotidien conservateur très lu outre-Manche.
23:08 Publié dans Aveyron, mon amour, Presse | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : presse, médias
jeudi, 27 septembre 2012
Caricatures de Mahomet, le retour
Comme en 2006, l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a rebondi sur une provocation droitière pour exprimer son anticléricalisme viscéral. En 2006, il avait pris la suite d'un quotidien conservateur, le Jyllands Posten (plus agressif envers l'islam qu'envers les autres religions). En 2012, les caricaturistes jouent avec la vague d'indignation suscitée par le (très mauvais) film islamophobe L'Innocence des musulmans. Le numéro de mercredi 19 septembre a été rapidement épuisé. J'ai pu me le procurer grâce au retirage effectué en fin de semaine :
A la lecture du journal, je dois dire que j'ai eu du mal à comprendre pourquoi l'affaire avait pris de telles proportions. (Je me fais la même réflexion à propos du film, un navet déjà un peu ancien, qui a sciemment été remis en avant.) La couverture est bien gentille... et ne fait qu'énoncer une vérité : il est aujourd'hui mal vu de s'en prendre aux religions minoritaires. L'association au film Intouchables est pleinement justifiée : le dessinateur a voulu critiquer une forme de "politiquement correct". Ce n'est pas une insulte au film que de dire qu'au-delà de la qualité de ses interprètes, le succès qu'il a rencontré est lié au sentiment de culpabilité éprouvé par nombre de personnes vis-à-vis des handicapés... et ce fut aussi l'occasion de tresser des couronnes à un acteur (fort sympathique au demeurant) issu d'une "minorité visible".
La page 2 est dédiée aux caricatures anti-intégristes (et pas antimusulmanes). La déception vient du fait qu'elles ne sont pas très drôles.
La quatrième de couverture est elle remplie de dessins dénigrant Mahomet et l'islam. On sent clairement l'intention de rabaisser, de faire mal. Mais rien n'oblige un musulman pieux à acheter ou lire cet hebdomadaire. Ces caricatures sont de surcroît d'un niveau médiocre. Une seule a vraiment éveillé ma curiosité :
Là, il y a du fond !
L'intérêt est de voir comment d'autres organes de presse ont réagi. En 2011, quand le siège du journal avait été incendié (et le site internet piraté, déjà), c'est la solidarité professionnelle qui l'avait emporté sur les divergences d'opinion. Aujourd'hui, le rappel (nécessaire) de la défense de la liberté d'expression a été quelque peu étouffé par un discours plus critique à l'égard de la démarche de Charlie Hebdo.
Le quotidien Le Monde illustre assez bien cette attitude. Le 19 septembre, le ton est donné par celui qui est devenu, à mon avis, le meilleur caricaturiste du journal, Xavier Gorce :
Ses "indégivrables" pingouins occupent la page 2 de la version papier du journal. La lecture de ses strips est très souvent un pur délice.
Celui que j'ai reproduit ci-dessus est un éditorial à lui seul. Comment des musulmans qui se disent choqués par ceux qui dénigrent leur religion (l'accusant de propager le fanatisme et la violence) peuvent-ils espérer être crédibles s'ils commettent précisément des actes qui confirment le cliché qu'ils dénoncent ?
Mais, dès le lendemain, Xavier Gorce montre qu'il n'adhère pas pour autant à la démarche de Charlie Hebdo :
Est-ce vraiment faire oeuvre de satiriste, aujourd'hui en France, que de dénoncer sans cesse les aspects rétrogrades de la religion musulmane ?
Le jour d'après, en "une", c'est au tour de Plantu de régler ses comptes :
Charb y est représenté en beauf' et le dessinateur associé au Monde (souvent égratigné par ses collègues "de gauche" dans le passé) ne se prive pas d'aller dans le sens de Xavier Gorce. En clair pour lui, c'est de la provocation à deux balles. Le "coup de pied de l'âne" est donné par la souris, alter ego de Plantu. Elle sodomise sans complexe un drôle de chien... qui n'est autre que Maurice (de Maurice et Patapon), animal fétiche de Charb. Et pan dans les fesses !
Dans le même numéro du Monde, Sergueï s'en prend plutôt aux intégristes chrétiens qui ont conçu le film antimusulman :
Sur la Toile, on peut trouver des propos approchants sur le site de Bakchich, qui estime qu'en France il y a quand même deux poids, deux mesures :
J'en reviens toujours à Xavier Gorce, qui a bien perçu le risque qu'il y avait à laisser Marine Le Pen se présenter en défenseure de la laïcité à la française :
Mais laissons la parole à Charb, qui n'a pas tort de rappeler, dans un entretien accordé au Monde, que ses dessins sont moins dangereux pour la santé que l'activisme des militants intégristes. On a de plus oublié aujourd'hui que, si le catholicisme tolère (de gré ou de force) la critique acerbe, c'est le résultat de décennies de luttes, d'oppositions parfois très violentes. Nous ne sommes peut-être qu'au début d'une ère de questionnements abrupts à propos de la place de l'islam et des musulmans en France...
20:57 Publié dans Politique, Presse, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, société, médias, presse, france, islam, religion, charlie hebdo
vendredi, 21 septembre 2012
Oh le fayot !
C'est ce que j'ai pensé en cette fin d'après-midi, à la lecture du dernier numéro du Ruthénois. Page 8, entre la bobine des nouveaux-nés, une tribune de Guilhem Serieys (contre Bernard Saules, fantomatique conseiller municipal et général de Rodez) et le dessin de la semaine de Stéphanie Gras, on peut lire ceci :
En tout cas, le sixième adjoint du maire de Rodez (en charge des travaux, de l'urbanisme et de l'habitat) semble bien informé.
Pourtant, sur le site du Conseil régional de Midi-Pyrénées, lorsque l'on consulte la liste des vice-présidents, la seule personne aveyronnaise présente est Marie-Lou Marcel :
De même, lorsque l'on tombe sur la liste des élus aveyronnais du Conseil régional, sur la fiche de Christian Teyssèdre, on ne trouve, à l'heure où j'écris ces lignes, nulle mention d'une vice-présidence :
(Ceci dit, la fiche de Marie-Lou Marcel ne porte pas mention de son poste de vice-présidente.)
Une telle précipitation dans l'éloge, de la part de quelqu'un qui n'est pas membre du même parti que le premier magistrat ruthénois, est sans doute la marque d'un grand désintéressement.
21:47 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, actualité, presse, médias
jeudi, 20 septembre 2012
Petit coup de chapeau...
... à Stéphane Mazars, devenu sénateur de l'Aveyron suite à la nomination d'Anne-Marie Escoffier dans le gouvernement Ayrault. En lisant Centre Presse aujourd'hui, on apprend en effet qu' il va renoncer à ses indemnités d'adjoint au maire de Rodez :
Si l'on se fie au compte-rendu du Conseil municipal du 10 mai 2010, le nouveau sénateur se prive d'un peu plus de 1 400 euros par mois :
Cette somme ne sera hélas pas économisée sur le budget ruthénois : l'article annonce que, conformément à ce que permet la loi, elle sera reventilée entre les autres élus de sa majorité. Voilà qui va contribuer à ressouder l'équipe municipale !
Quant au nouvel élu de la Nation, même s'il a décidé de mettre un peu en sommeil sa carrière d'avocat, il va voir ses revenus augmenter, grâce au généreux statut des sénateurs : à une indemnité nette mensuelle de près de 5 400 euros s'ajoutent environ 6 000 euros d'aide à la représentation (somme qui n'est pas soumise à l'impôt sur le revenu...)... et 7 500 euros pour rémunérer ses collaborateurs.
Stéphane Mazars va a priori sans doute aussi continuer à siéger au Conseil d'agglomération du Grand Rodez (il n'en est pas vice-président), fonction qui, à ma connaissance, n'est pas rémunérée, le territoire intercommunal abritant moins de 100 000 habitants :
Il a commencé, dès juillet dernier, à oeuvrer pour limiter le cumul des mandats... dans le temps. Il a cosigné (avec une brochette d'élus du Sud-Ouest, dont Alain Bernard, le tombeur de Jacques Blanc en Lozère) une proposition de loi organique visant à limiter à trois le nombre de mandatures parlementaires.
Je suis plutôt partisan d'interdire l'exercice d'une autre fonction. Après tout, si une personne fait l'affaire, pourquoi vouloir s'interdire de la réélire plus de deux fois ?
Ces propositions, tout comme la démarche personnelle de Stéphane Mazars, pour louables qu'elles soient, sont assez timides. C'est révélateur des blocages qui persistent dans le monde politique français (droite et gauche confondues). A cet égard, la mauvaise volonté manifestée récemment par certains élus socialistes n'est pas de bon augure. Il va falloir que le président et le Premier ministre tapent du poing sur la table, s'ils veulent vraiment réformer la vie politique de ce pays.
21:17 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : politique, actualité, presse, médias
lundi, 17 septembre 2012
Yves Censi épinglé par "Le Canard enchaîné"
En réalité, il semble que la cible de la journaliste de l'hebdomadaire satirique, Isabelle Barré, soit surtout Michel Bouvard, co-auteur (avec le député aveyronnais) d'un dispositif fiscal dit parfois "loi Censi-Bouvard".
Il faut chercher dans le coin bas-gauche de la page quatre du numéro du 12 septembre pour lire cet article, titré "Les fées du logis étudiant", dont voici un extrait :
En clair, si l'on a les moyens d'investir au moins 100 000 euros, on peut économiser plusieurs milliers d'euros d'impôt sur le revenu, pendant plusieurs années. Notons que plus l'investissement est élevé, plus l'avantage fiscal est important.
En échange de quoi accorde-t-on cette faveur aux contribuables aisés ? De la construction de logements... Au départ, il était question de rénover des villages vacances. Aujourd'hui, on bâtit des résidences pour étudiants... pas nécessiteux : de 450 à 900 euros pour un studio de 18 m² ! (Moi qui me plains de la cherté des loyers ruthénois...) Et voilà un bel exemple de contournement (légal) de la politique de redistribution : des grands bourgeois (des députés de l'ancienne majorité... mais je ne suis pas emballé par leurs successeurs...) font voter un dispositif qui avantage des ménages fortunés... et dont les produits sont destinés à être utilisés par les rejetons des familles aisées. C'est quand même beau, la République !
22:05 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, médias
lundi, 03 septembre 2012
Prédictions à la con
Parfois, le hasard de la navigation internautique réserve d'agréables surprises. Ainsi, récemment, j'effectuais quelques recherches sur Barack Obama lorsque je suis tombé sur le site de France Soir, plus précisément des articles de décembre 2011 présentant les prédictions de supposés voyants pour l'année 2012 :
Commençons avec Meredith Duquesne :
Vivre entre New York et Paris ne donne visiblement pas plus de hauteur de vue, puisque la dame voyait Nicolas Sarkozy (difficilement) réélu... après avoir devancé de justesse Marine Le Pen au premier tour. Or, si tout le monde a bien évidemment en tête la défaite du président sortant au second tour, certains ont peut-être oublié qu'il a précédé Marine Le Pen de plus de trois millions de voix au premier tour :
Passons à Claude Alexis, qui officie pour un journal de référence, à savoir Télé Magazine :
Lui aussi "voyait" Nicolas Sarkozy réélu mais là n'est pas la perle de ses prédictions. J'ai souligné la chose tellement c'est énorme. Je cite : "Pour Jean-Luc Delarue, c'est la fin de la descente aux enfers. Bonjour le renouveau ! Il revient avec de nouvelles productions sur plusieurs chaînes. Côte vie privée, je lui vois un second enfant à venir."
Je n'ai qu'un mot à dire : bravo !
Isabelle Viant se place dans la continuité des deux hommes : elle aussi "voyait" Nicolas Sarkozy reconduit à l'Elysée... accompagné de "cadors" de l'UMP !
Quant à Monsieur Olivier, s'il sentait que François Hollande allait être élu, il s'est fourré le pendule dans l'oeil, puisqu'il a "vu" Marine Le Pen au second tour... et une (autre) femme devenir Premier ministre !
Je ne vous parle même pas des considérations sur la monnaie. Notons que ce charlatan est assez habile, noyant certaines de ses prédictions dans un flou artistique, ou s'appuyant sur l'actualité de 2011 pour tenter d'extrapoler.
Pour conclure, je me contenterai de citer un illustre contempteur des astrologues et autres escrocs de l'avenir sur commande, François Rabelais, qui, dans sa Pantagrueline Prognostication (1535), écrivait ceci :
"Cette année les aveugles ne verront que bien peu, les sourds ouïront assez mal, les muets ne parleront guère, les riches se porteront un peu mieux que les pauvres, et les saints [valides] mieux que les malades. [...] Vieillesse sera incurable cette année à cause des années passées. [...] Ceux qui auront flux de ventre iront souvent à la selle percée [...] ; le mal des yeux sera fort contraire à la vue [...]. Et attendu la comète de l'an passé et la rétrogradation de Saturne, mourra à l'Hospital un grand maraud tout catharré et croustelevé, à la mort duquel sera sédition horrible entre les chats et les rats, entre les chiens et les lièvres, entre les faucons et les canards, entre les moines et les oeufs."
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samedi, 01 septembre 2012
Le gaz de schiste toujours d'actualité
C'est l'un des feuilletons de l'été, moins médiatique certes que la guerre civile en Syrie, les Jeux olympiques de Londres ou l'augmentation du prix de l'essence à la pompe, mais le débat n'est pas clos, contrairement à ce que certains beaux esprits ont cru, en France notamment.
La (bonne) presse fait son travail sur le sujet. Il me semble même qu'au sein de la rédaction du Monde, des dissensions existent sur cette question, peut-être entre les économistes et les journalistes en charge de la rubrique "Planète".
C'est à la fin du mois de juillet que les articles ont commencé à paraître en nombre. Le 25 a été mis en ligne un éditorial intitulé N'enterrons pas le débat sur les gaz de schiste. On se dit que son auteur a observé avec attention la mini-révolution en cours dans l'énergie aux Etats-Unis, qui a vu ce pays devenir le premier producteur mondial de gaz en quelques années. L'édito renvoie à un reportage (de Jean-Michel Bezat) placé au début de la version papier du quotidien, Bienvenue à Fort Worth, Texas, la capitale du gaz de schiste (accès payant), dont voici un aperçu :
Le lendemain, Stéphane Foucart signe un papier traitant d'un rapport bidonné (favorable au gaz de schiste) publié aux Etats-Unis, et dont l'auteur est accessoirement actionnaire d'une société de forage...
Peu de temps auparavant, Audrey Garric, une autre journaliste de sensibilité écologiste, avait publié, sur son blog officiel, un billet sur la voracité des compagnies gazières, désireuses de forer jusque dans les cimetières...
Le sujet rebondit au mois d'août. C'est Alain Faujas qui a dégainé le premier, avec un article intitulé Le charbon américain victime du gaz de schiste : l'exploitation de nombreux forages de gaz non conventionnel a fait chuter le prix de l'énergie et les sociétés charbonnières en sont réduites à trouver de nouveaux clients à l'exportation... notamment en Europe, où la volonté de certains dirigeants de sortir du nucléaire donne un nouvel essor à l'énergie produite à partir de houille... Bonjour la pollution !
Fort logiquement, la rubrique "Idées" voit surgir le débat. On a pu y lire une tribune de Noël Mamère, Non, le gaz de schiste n'est pas la "nouvelle frontière". On sent le député écologiste lecteur attentif du Monde, où la parution d'articles aux perspectives différentes a dû l'inquiéter.
Deux semaines plus tard, le sujet s'enrichit de nouveaux "papiers". On doit à Julien Bouissou, talentueux correspondant du journal à New Delhi, un article très instructif sur les conséquences de l'essor de la fracturation hydraulique sur les paysans indiens : Le haricot de guar indien dopé par le gaz de schiste. (L'article est plus balancé que ce qu'indique le titre.)
Dans la version papier, au bas de la même page, une correspondance américaine signale l'émergence d'un nouveau problème, qui pourrait, bien plus que l'opposition des militants écologistes, limiter le développement de l'exploitation de gaz de schiste : Aux Etats-Unis, l'eau manque pour permettre la fracturation hydraulique. Il est piquant de voir deux puissants lobbys (l'agribusiness et le secteur pétrolier) entrer en conflit à ce sujet... (Et vive le réchauffement climatique !)
Cela nous mène à la dernière chronique du médiateur (Pascal Galinier), Ecolos de vacances (joli titre !), grâce à laquelle on peut se rendre compte qu'une partie du lectorat du quotidien voudrait que celui-ci ne transmette qu'une vision militante du sujet. Ces lecteurs semblent ne pas avoir conscience que la rédaction est composée de personnes de sensibilités différentes... et c'est très bien comme ça !
Le "quotidien de référence" n'est pas le seul à avoir suivi la question du gaz de schiste cet été. Ainsi, le numéro du 27 juillet de La France agricole contient un article de trois pages (Gaz : une révolution dans les tuyaux) annoncé en "une" :
Le papier se veut neutre, abordant à la fois les avantages que retirent les pays exploitant les gaz non conventionnels et les conséquences environnementales. Le contexte français (cherté du gaz, son importation) est précisé. Incidemment, on peut lire que le gaz naturel représente 50 à 80 % du coût des engrais azotés.
On retrouve cette préoccupation dans une vidéo mise en ligne sur le site de l'hebdomadaire agricole. L'intervenant, Joël Morlet, est le président de l'Unifa, l'Union des industries de la fertilisation. Il est aussi directeur général de Yara France, une filiale d'un grand groupe norvégien (principal fournisseur d'engrais chimiques)... ainsi que PDG (et administrateur) de la SOCOFER, une entreprise fabricant des engrais, basée dans l'Indre.
Et dans nos régions ? A la mi-août, les opposants ont organisé une marche entre Lozère et Aveyron, pour ranimer la vigilance du public. Ils sont inquiets à cause de ce qu'ils estiment être l'ambiguïté du gouvernement. Si le président de la République, François Hollande, a réaffirmé son opposition à la fracturation hydraulique, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a précisé que l'exploitation des gaz de schiste n'était toutefois pas définitivement écartée.
Nos dirigeants ont en tête la crise économique, qui se prolonge, et le déficit de notre balance commerciale, principalement dû à l'importation d'hydrocarbures : au premier semestre 2012, ce déficit approche les 35 milliards d'euros...
... alors que la facture énergétique de notre pays dépasse légèrement les 34 milliards d'euros :
(J'ai ajouté au graphique la ligne violette, pour mieux mettre en évidence que, lors des deux premiers trimestres de l'année 2012, la facture énergétique avait légèrement dépassé les 15 milliards d'euros, ce qui nous donne un total d'environ 34 milliards pour le semestre.)
Je pense que nos dirigeants ont aussi reçu des informations provenant de milieux scientifiques moins épidermiquement hostiles au gaz de schiste que les militants écologistes. On peut en avoir un écho dans le numéro 301 de la revue Science... et pseudo-sciences, publié en juillet 2012 :
On y trouve une présentation claire de ce que sont les gaz non conventionnels... et l'on découvre, au passage, que l'expression "gaz de schiste" est incorrecte. Six pages sont consacrées aux impacts environnementaux. On rentre dans le détail, puisque, par exemple, on y distingue la fracturation de la stimulation hydraulique, avec leurs éventuelles implications sismiques. Une autre partie du dossier compare la situation en France et aux Etats-Unis. Quelques réserves sont émises à propos du film Gasland.
La revue se demande enfin s'il est possible d'exploiter "proprement" le gaz de schiste, ou avec quels coûts, environnementaux, sociétaux. (On arrive à la conclusion que, dans les régions marquées le relief calcaire, il est souhaitable, dans l'état actuel des choses, de ne pas procéder à l'extraction de gaz de schiste.) L'ensemble des articles n'a pas pour but de défendre les industriels, mais de replacer le sujet d'abord dans son contexte scientifique.
14:03 Publié dans Economie, Politique, Presse, Science, Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : société, politique, presse, médias, actualité, sciences, écologie, environnement
vendredi, 24 août 2012
Bienvenue chez les riches !
C'est le titre du dossier du Canard enchaîné (le n°124) publié cet été :
En quelque 120 pages (contre 80 à 100 d'habitude), les journalistes de l'hebdomadaire satirique proposent un panorama synthétique de la "France des riches". Les articles sont courts (une à deux pages, illustrées d'un à trois dessins) et foumillent d'anecdotes.
Cela commence par la définition de la richesse, entreprise hasardeuse. Pour les plus fortunés, on peut se reporter au classement des milliardaires du magazine Forbes. Deux Français font partie des vingt premiers : Bernard Arnault (4e) et Liliane Bettencourt (15e) :
Pour avoir plus d'informations sur les riches Français, on peut se tourner vers le magazine Challenges, qui publie un classement des 500 plus grandes fortunes professionnelles :
En comparant les deux palmarès, on relève des incohérences, tant au niveau de l'ordre qu'au niveau des montants : les deux classements ne se fondent pas exactement sur les mêmes critères.
On peut aussi s'intéresser aux assujettis à l'ISF. Il y a quelques années de cela, Le Figaro a publié un tableau statistique des villes peuplées de plus de 20 000 habitants comprenant plus de 50 assujettis. Voici ce que l'on peut lire à propos de l'Aveyron (page 5) :
Rien que dans ces deux communes (les seules du département à dépasser les 20 000 habitants), on note la présence de près de 400 assujettis à l'ISF. Combien d'autres résident dans une commune moins peuplée ?
Le document est aussi intéressant parce qu'il mentionne la somme moyenne versée au fisc : 4-5000 euros par an... on ne peut vraiment pas parler d'un impôt confiscatoire.
Ces données sont à comparer avec les revenus de l'ensemble des Français. D'après l'INSEE, en 2009, les ménages français ont en moyenne un revenu de 34 540 euros, soit un peu moins de 2 900 euros par mois. Pour plus de justesse, la colonne suivante donne le revenu médian, celui qui partage la population en deux groupes égaux (en clair : la moitié gagne moins, l'autre moitié gagne plus). Et là, on constate que ce revenu n'est que de 28 740 euros, soit environ 2 400 euros par mois... merde, je suis au-dessous !
Cet écart s'explique par les grandes inégalités : beaucoup de ménages gagnent entre 1 500 et 2 500 euros par mois, mais une minorité gagne infiniment plus, ce qui fait remonter la moyenne. Le Canard précise d'ailleurs que 90 % des Français (pas des ménages, semble-t-il) gagnent moins de 37 000 euros par an. 1 % des Français gagnent plus de 7 350 euros par mois. (Que l'on me présente leurs filles !) Quant à ceux qui culminent au-delà d'un million par an, ils ne seraient que 3 000 foyers, soit 0,0008 % du total. Dire que certains ont osé déclarer que la taxe à 75 % (qui ne ponctionnera pas 75 % des revenus : ce sera une tranche supplémentaire... avec des aménagements) s'attaquait à la classe moyenne...
Le journal satirique revient aussi sur ces très riches qui avaient appelé à une fiscalité plus lourde (dans un appel publié par Le Nouvel Observateur). Combien sont aujourd'hui révulsés par les projets fiscaux du gouvernement Ayrault ? Sur le même sujet, la tribune signée par Warren Buffett dans The New York Times avait quand même plus de gueule. Il y écrit notamment ceci :
"People invest to make money, and potential taxes have never scared them off. And to those who argue that higher rates hurt job creation, I would note that a net of nearly 40 million jobs were added between 1980 and 2000. You know what’s happened since then: lower tax rates and far lower job creation."
Traduction : "Les gens investissent pour gagner de l'argent, et les impôts éventuels ne les ont jamais dissuadés. A ceux qui soutiennent que les taux [d'imposition] élevés nuisent à la création d'emplois, je dirais qu'un volant d'environ 40 millions d'emplois ont été créés entre 1980 et 2000 [en clair : sous Reagan, Bush père et Clinton]. Vous savez ce qui s'est passé depuis : des taux d'imposition plus bas et beaucoup moins de création d'emplois."
L'argumentation mériterait d'être affinée, discutée, mais, venant d'un super-riche, elle ne manque pas de sel. Voici encore ce qu'écrit Buffett, un peu plus bas :
"But for those making more than $1 million — there were 236,883 such households in 2009 — I would raise rates immediately on taxable income in excess of $1 million, including, of course, dividends and capital gains."
Traduction : "Mais pour ceux qui gagnent plus d'un million de dollars (236 883 ménages en 2009) j'augmenterais immédiatement le taux d'imposition du revenu excédant un million de dollars, en incluant, bien sûr, les dividendes et (autres) revenus du capital."
Alors, Warren Buffett hollandien ?
Le journal satirique ne se prive cependant pas d'égratigner l'actuel président sur ses déclarations de patrimoine. Il semble avoir été plus honnête en 2012 qu'en 2007, sans doute pour éviter, à l'époque, de payer l'ISF... Le paradoxe est que c'est à la réforme initiée par Nicolas Sarkozy que François Hollande doit sans doute de n'y être pas assujetti aujourd'hui !
La suite du dossier est composée de portraits des familles/individus les plus riches, de Bernard Arnault à Elisabeth Badinter, en passant par Serge Dassault et Pierre Bergé, par exemple. On y apprend incidemment une foule de choses, comme par exemple l'origine du succès de la famille Bolloré, dans le papier très fin (utilisé pour les cigarettes roulées et l'impression des bibles), auquel elle a en partie donné son nom : O.C.B. pour Odet Cascadec Bolloré.
On peut dire que c'est Arnaud Lagardère qui reçoit le traitement le plus "acide". Ceux qui s'intéressent à l'information économique liront avec profit les pages consacrées aux familles de la grande distribution. Les "nouveaux entrepreneurs" ne sont pas oubliés, avec notamment Xavier Niel et Matthieu Pigasse, auquel un strip de Lefred-Thouron est consacré :
La troisième partie du dossier traite des manières de s'enrichir, de la banque à l'édition en passant par le show-business. Au passage, certains découvriront peut-être le train de vie (et les exigences professionnelles) de quelques vedettes, en particulier Dany Boon. Ceci dit, ils ne font a priori rien d'illégal, contrairement à d'autres, dictateurs africains (avec l'affaire des "biens mal acquis") ou hommes d'affaires qui sentent le soufre (vous avez dit Bernard Tapie ?). Il est aussi question de certains footballeurs, de riches agriculteurs (céréaliers) et de la famille régnante qatarie.
La quatrième partie est plus bling bling : elle aborde les "moeurs des riches". Le dossier se termine par les soucis des fortunés, parfois proportionnels à leur richesse.
C'est bien écrit, truffé d'informations, émaillé de traits d'humour et richement illustré... et cela ne coûte que six euros !
mardi, 21 août 2012
Retour sur la "guerre des affiches"
Lors de la dernière campagne des élections législatives, une affaire avait secoué le landernau ruthénois. Rappelez-vous : on a accusé des militants UMP d'avoir tapissé les panneaux concurrents (et quelques autres lieux inappropriés) avec les affiches de leur candidat Yves Censi. Plainte a été déposée. (Au fait, où en est l'enquête ?) Gênées au départ, les instances de l'UMP avaient fini par accuser des voleurs d'affiches...
Et voilà ce sur quoi je suis tombé en lisant le numéro 10 du bimensuel satirique Zélium (dont l'ancien supplément Z Minus a pris son envol) :
L'un des journalistes s'est infiltré dans une section "jeunes" de l'UMP. La personne qui s'exprime, Anaïs, est une militante ardente. La voici se vantant d'avoir accompli ce dont l'UMP aveyronnaise se plaint d'avoir été victime. Que les militants appliquent donc ce sage précepte, que l'on trouve dans maintes civilisations : "Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l'on te fasse".
Notez que le journaliste infiltré a l'honnêteté de préciser qu'il n'a jamais vu les militants commettre ce genre de geste.
L'ensemble du reportage mérite le détour. Il est notamment illustré par un dessin que je ne résiste pas au plaisir de vous montrer :
00:27 Publié dans Politique, Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, médias, société, elections, humour
dimanche, 19 août 2012
Z Minus n°2
Toujours "100 % dessin 0 % article", le bimensuel satirique est à nouveau dans les (bons) kiosques :
Comme le premier numéro m'avait bien plu, j'ai sorti les 4 euros 90 (ben oui, le talent, ça se paie)... et je ne le regrette pas.
A la volée, que trouve-t-on, dans ce numéro ? De la politique, du pipi-caca, du sexe (beaucoup), avec des poils, des teubs, des nichons. L'humour noir est toujours aussi présent, à travers par exemple les dessins de Giemsi :
Institutions obligent, il est désormais davantage question de François Hollande que de Nicolas Sarkozy, mais les deux présidents sont "croqués" avec la même acidité.
Pages 4 et 5, les amateurs se régaleront avec deux reportages judiciaires. Le premier narre une affaire jugée par le tribunal correctionnel de Nantes, mettant aux prises trois chauffeurs de taxi agressifs et le client de l'un d'entre eux (qui a donné sa version de l'histoire). Le second reportage traite d'une affaire sordide (digne d'un épisode des Experts ou d'Esprits criminels), jugée par la cour d'Assises de la Dordogne.
Une page est plus spécifiquement consacrée à l'actualité internationale, à la violence qui règne sous différentes latitudes. Un peu plus loin, vous saurez enfin ce que Mohamed Merah a réellement dit aux policiers venus l'arrêter à Toulouse, en mars dernier.
J'ai aussi beaucoup aimé la page de Marsault, dont le talent n'est pas sans rappeler celui de Gotlib :
Dans la lignée de Hara Kiri et Charlie Hebdo, le cul vient alterner avec des thématiques "sérieuses" :
Si vous en voulez davantage, il faut vous tourner vers la double-page de Rifo, La Planète des bêtes immondes, qui louche sur les films Planète Terreur et Boulevard de la mort. Le même dessinateur est l'auteur d'un supplément très bien foutu, qui raconte les origines possibles d'un super-héros pas comme les autres : Hiroshiman.
Je vais m'arrêter là, mais sachez que ce numéro contient bien d'autres choses, comme la mini-histoire des truands à la recherche d'un trou du cul, les aventures d'une mémé et de sa télé, la conquête spatiale version suppositoire ou encore la romance débutant entre un garçon et une fille... et se terminant de manière inattendue !
11:17 Publié dans Politique, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, médias
samedi, 04 août 2012
José Bové et le loup
"Pour moi les choses sont claires, hein : c'est que si le loup risque d'attaquer un troupeau, la meilleure façon de faire, c'est de prendre le fusil et de tirer."
Les propos tenus courant juillet par le député européen aveyronnais, sur les ondes de la radio Totem, ont fait des vagues, un peu avec retard. Ce n'est que dans Le Monde du vendredi 3 août qu'un article s'empare de l'affaire. Le journaliste Hervé Kempf s'est d'ailleurs un peu emmêlé les pinceaux, qualifiant Totem de "radio lozérienne". Si l'ex-12 FM émet bien en Lozère (comme dans une dizaine d'autres départements), son siège est situé à proximité de Rodez, à Luc-La Primaube très exactement.
C'est une association de protection des animaux sauvages qui vient de relancer l'affaire. D'après Midi Libre, une plainte a été déposée contre José Bové au tribunal de Mende.
Rappelons que, selon les études officielles, les chiens divagants (parfois qualifiés à tort d'errants), s'ils attaquent moins fréquemment les troupeaux domestiques que les loups (dans les zones où ceux-ci sont présents), sont responsables de davantage de pertes. Et encore, on néglige la surdéclaration d'attaques de loups.
L'affaire n'en est pas moins délicate. Je ne vois pas comment on pourrait interdire à des éleveurs de tenter de se débarrasser d'un loup, à partir du moment où une série d'attaques clairement identifiées se produit dans une région marquée par l'élevage. Le tout est de rester dans la mesure.
A suivre...
lundi, 16 juillet 2012
Le barrage de Sarrans
Le quotidien aveyronnais Centre Presse vient de lancer une série d'articles sur les grands barrages qui ont été construits jadis dans le département :
Dans le numéro de ce lundi, une double-page est consacrée au barrage de Sarrans. On peut y trouver un historique de la construction, plusieurs documents d'époque et d'autres informations. C'est richement illustré.
Il est notamment question de la presqu'île de Laussac et d'une curiosité touristique : des chalets flottants, développés par Gérard Sol à Thérondels :
On nous suggère une lecture, La Vallée noyée, les chantiers de Sarrans, d'Annick et Louis Le Bail :
Il a été publié par ces Cantaliens en 2011. Très agréable, imprimé sur papier glacé ("issu de forêts gérées durablement", nous précise-t-on en fin d'ouvrage), il regorge de documents. EDF a semble-t-il soutenu sa parution... et il se trouve que, depuis quelques années, l'entreprise semi-publique s'efforce d'améliorer son image, puisque l'exploitation des barrages est soumise à concurrence, le dernier groupe à s'être manifesté étant le finlandais Fortum.
21:52 Publié dans Aveyron, mon amour, Economie, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualite, histoire, économie, presse, médias
mardi, 19 juin 2012
Plus de femmes
La nouvelle Assemblée nationale est donc plus féminine, puisque la part des élues est passée de 18,5 à 26,9 %, comme l'a rappelé une partie de la presse, par exemple La Voix du Nord :
(Espérons surtout que le pourcentage de député-e-s honnêtes et travailleurs augmente.)
Il convient toutefois de tempérer les exercices d'autosatisfaction : la comparaison avec les autres pays européens, voire avec le reste du monde, nuance la "performance", concernant le poids des femmes en politique.
L'illustration publiée par La Voix du Nord place la France entre la Suisse et le Royaume-Uni, plutôt à la traîne en Europe, mais au-dessus de la moyenne mondiale. Selon les chiffres de la Fondation Robert Schuman, à l'issue des élections législatives, la France se situe désormais légèrement au-dessus de la moyenne de l'Union européenne (marquée d'une ligne rouge, ci-dessous), entre l'Autriche et le Portugal :
Si vous avez été attentifs, vous avez sans doute remarqué de légères discordances entre les deux sources, qui ne remettent toutefois pas en cause le classement global : le pourcentage suédois varie entre 44,7 et 44,99 ; celui des Pays-Bas entre 40,7 et 39,33 ; celui de la Belgique entre 38 et 39,33... jusqu'à la Hongrie, où la part des députées varie entre 8,8 % et 9,07 %.
L'article du quotidien de Lille s'appuie sur les statistiques que l'on peut trouver sur le site de l'Union interparlementaire. On peut donc élargir la comparaison au reste du monde. Avant les dernières législatives, la France se situait à la 70e place. Elle se trouve désormais entre... l'Afghanistan et la Tunisie !
En Afghanistan, la Constitution (chapitre V, article 83) impose qu'au moins deux sièges par province (celles-ci au nombre de 34) soient réservés aux femmes. Comme le nombre de députés est plafonné à 250, on arrive à un peu plus du quart du total.
En Tunisie, où la situation des femmes était déjà plus enviable sous le régime de Ben Ali, la toute jeune Assemblée constituante compte une proportion semblable de femmes (au final 58 sur 217, d'après le rapport d'une ONG états-unienne), parce que la loi électorale a imposé la parité (à la mode française, "chabada-bada", un homme et une femme en alternance). Cependant, comme les élections se sont déroulées suivant un scrutin de liste et que les candidatures ont été très nombreuses, très souvent, la plupart n'ont pu faire élire que la personne placée en tête... un homme dans l'écrasante majorité des cas. Le paradoxe est que c'est un parti islamiste, Ennahda (qui se veut moderne... on verra à l'usage), qui compte le plus de députées, parce que c'est celui qui, le plus souvent, a réussi à faire élire au moins deux personnes d'une même liste.
Ceci dit, il ne faut pas, à mon avis, faire une fixation sur le pourcentage de députées. Même si, dans les démocraties les plus avancées (en Europe du Nord, par exemple), on approche de la parité, il arrive que l'on trouve un pourcentage flatteur dans une dictature. Mais comme, en France, nous entretenons une pléthore d'élus (très) âgés, cumulards de surcroît, l'augmentation de la part des femmes a le gros avantage (pour l'instant) de rajeunir l'Assemblée, d'y introduire de nouvelles têtes et de la diversité.
20:30 Publié dans Politique, Presse, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, société, législatives, france, presse
dimanche, 17 juin 2012
Une voiture à chier
C'est à de petits signes comme celui-là que je me rends compte que je suis abonné à un journal dont une partie non négligeable du lectorat est pétée de thunes. Voici donc ce que j'ai trouvé dans mon "quotidien de référence" il y a peu :
Vous ne remarquez rien ? Bon, alors, je vous aide un peu. Voici quelle était l'annonce :
Et figurez-vous que les pubards qui travaillent pour Audi ont choisi pour slogan : "Le courant passe." Moi je dirais plutôt la "courante" ! Il paraît que, dans les milieux automobilistiques, cela fait plusieurs années que l'on discute du nom de ce véhicule.
Les francophones scatologues peuvent se déchaîner, il n'en reste pas moins que le nom évoque le concept de cette voiture électrique. L'article de Wikipédia prend toutefois soin de prévenir les internautes qu'il y a risque de confusion :
Du coup, certains commentateurs s'en sont donné à coeur joie. On commence par le moins subtil (mais efficace), trouvé sur Agoravox :
On monte un peu en gamme avec Patrick Garcia, sur Caradisiac :
On atteint un niveau plus relevé avec le billet d'Emmanuel Genty, sur Cnetfrance :
Les Anglo-Saxons ont fini par s'intéresser à la chose, des coïncidences malencrontreuses dans le choix du nom d'un modèle de voiture s'étant déjà produites, aussi bien en français que dans d'autres langues.
En psychanalyse, la merde et l'argent sont souvent associés. Eh bien, figurez-vous que la voiture-excrément n'est pas donnée, puisque le prix plancher du modèle de base est de 16 000 euros.
14:51 Publié dans Presse, Vie quotidienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, presse, allemagne, photos
mercredi, 13 juin 2012
Z Minus n°1
C'est un nouveau périodique satirique, bimensuel, composé uniquement de dessins (très divers), exécutés par les caricaturistes de Zélium, un "irrégulomadaire" (comme ils disent) réalisé notamment par d'anciens de Siné Hebdo et de La Mèche, qui étaient selon moi nettement moins réussis.
La tendance est libertaire, souvent potache. C'est donc du dessin engagé, mais drôle. Voici mon préféré :
Dans le genre "politiquement incorrect", j'aime aussi celui-là :
Le journal propose aussi des reportages BD, l'un dans une classe "Français langue d'accueil" (destinée aux demandeurs d'asile), l'autre en infiltration à l'UMP... Excellent !
L'ancien président de la République est évidemment une cible privilégiée. Mais l'intérêt de ce nouveau périodique réside dans la très grande variété des styles, qui vont de l'épure au dessin fouillé, en passant par la schématisation numérique et les portraits tracés à grands traits. Certains dessinateurs bénéficient d'une page entière, où ils peuvent laisser libre cours à leur imagination. Je préviens les bonnes âmes : l'humour développé dans les caricatures est très souvent à connotations sexuelles...
Je dois reconnaître que c'est en lisant la presse locale que j'ai appris le lancement de Z Minus. Figurez-vous que, dimanche dernier, dans l'édition ruthénoise de Midi Libre, on pouvait lire un article sur l'un des dessinateurs, Giemsi, qui est aveyronnais (ou travaille dans l'Aveyron). Ses oeuvres semblent révéler l'influence d'illustres prédécesseurs :
Ce couple de "Français (très) moyens", qui revient assez souvent sous ses crayons, n'est pas sans rappeler les Bidochon de Binet. On sent aussi qu'il doit aimer Tex Avery et l'humour "crade" de la série Maurice et Patapon, de Charb :
On peut encore trouver dans les kiosques le numéro 9 de Zélium (dont Z Minus est un supplément, à l'origine) :
Les dessins ne sont pas les seules productions qui méritent le détour. Je recommande tout particulièrement :
- le "micro-crottoir", dans lequel on peut tenter d'identifier certaines personnalités en vue... (page 2)
- "Tchèque et mat", un article passionnant sur un rebelle des feux rouges (page 3)
- une page presque complète consacrée au vin (supposé) bio (page 6)
- "La légende grecque des Unes menteuses", une petite leçon de déontologie journalistique (page 7)
Mais la perle de ce numéro est sans conteste la page intitulée "Le candidat, cette espèce en puéril", qui propose la mini-biographie de six ténors de la présidentielle. Morceaux choisis :
- "Eva Joly fut repérée très tôt à la crèche en Scandinavie par les psychologues pour son refus de manger les petits pots pour bébé à la viande, et cette propension insensée à vouloir punir les enfants qui volaient ses joujoux"
- "Ecrire sur François Bayrou, c'est comme rédiger sur une boule de billard, un pet de nonne, un étui à lunettes, un papier de bonbons. [...] C'est en voyant, à l'âge de 4 ans, une fourchette rangée dans un tiroir à couteaux que le petit François se mit d'un coup à bégayer."
- "[...] la petite Marine se prit d'une réelle passion pour les pauvres, les dégradés, les oubliés de la croissance, les moches, les cons, les débiles, les dégénérés, les obèses, les anorexiques, les incestueux [...], les prolapsés du rectum, les vaginites puantes et les racistes."
- "Jean-Luc Mélenchon refuse à sa naissance de sortir par la voie royale et naturelle que lui offrait une Madame Mélenchon regrettant déjà d'avoir procréé [...]. Il fallut bien utiliser moult forceps et pinces diverses qui donneront au bébé un air renfrogné"
- "[...] A sa naissance, le petit François est très blanc, un peu laiteux et peu tonique. Ses parents s'inquiètent d'autant que l'enfant cherche sans cesse à s'insérer dans de petits pots de verre. Très vite les médecins détecteront le syndrome du yaourt (dit Yogourt syndroma) qui frappe essentiellement les socialistes, les employés de la Sécurité sociale et les journalistes du service public."
- " [...] Madame Sarkozy de Nagy-Bocsa mit au monde le petit Nicolas dans un bain de sang, une piscine de raisiné, une mare d'hémoglobine. Ce fut une tuerie, ce fut un carnage. On mit plusieurs jours à nettoyer le bébé traumatisé, pendant que l'on fermait l'hôpital définitivement."
01:18 Publié dans Politique, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, élections, médias, humour
vendredi, 08 juin 2012
Pas très classe
On va un peu causer des élections législatives dans l'Aveyron, mais pas à Rodez, plutôt dans la troisième circonscription, celle de Millau - Saint-Affrique. C'est la lecture de l'hebdomadaire gratuit Le Saint-Affricain du 6 juin 2012 qui m'a fait réagir.
On y trouve, bien en place dans le journal, la propagande électorale classique en période de scrutin. Cette semaine, les soutiens au député sortant sont nombreux. Il bénéficie de surcroît, page 6, d'un entretien avec l'une des rédactrices du Saint-Affricain ("VS") :
La dame est une récidiviste, puisqu'en octobre dernier, elle nous avait gratifié d'un beau publireportage à la gloire du député - vice-président du Conseil général de l'Aveyron.
En toute décontraction, Alain Marc nous la joue grand seigneur magnanime. Peut-être poussé par la journaliste ou trop en confiance, il finit quand même par lâcher quelques vacheries :
Il dézingue successivement Marie-Thérèse Foulquier, candidate écologiste (soutenue par le PS), Brigitte Marre (candidate "PS-bis" pourrait-on dire) et Norbert Castelltort, qu'il doit bien connaître, puisqu'ils ont longtemps appartenu tous deux au Parti radical valoisien. A la lecture des propos du député, on se dit que les relations entre les deux hommes n'ont pas dû toujours être des plus amicales...
C'est peut-être parce que l'ancien président de la section aveyronnaise du PRV (Castelltort) estime que le mandat de député d'Alain Marc est davantage positionné à droite qu'au centre. Il est vrai que, même si, dans ses votes, le député s'est montré moins suiviste qu'Yves Censi, il a quand même été un soutien indéfectible de la politique menée par le duo Sarkozy-Fillon. De plus, lorsque celui qui était à l'époque président de la République était venu dans le Nord Aveyron, l'élu du sud du département s'était arrangé pour figurer souvent à ses côtés. Tout récemment même, lors du meeting de Toulouse, il était visible, au premier rang des soutiens du sortant. Il n'est donc pas illogique qu'un centriste estime qu'Alain Marc (en dépit de l'image qu'il s'efforce de construire, avec l'aide de médias locaux complaisants) est trop marqué à droite dans son action.
Certains des propos parus dans Le Saint-Affricain sont peu oecuméniques... et même limite méprisants à l'égard de celle qui est présentée comme sa principale concurrente, Marie-Thérèse Foulquier. (Il avait déjà "fauté" dans Midi Libre en mai dernier.) Ce ne doit pas être la première fois qu'il dénigre la gestion municipale de sa rivale, puisqu'une réponse des élus de la commune de Saint-Jean-et-Saint-Paul est publiée dans le même journal... page 32 !
Le traitement n'est tout de même pas égal. Ajoutons que cette attitude n'est pas sans rappeler celle des élus UMP qui, avant l'élection de François Hollande, insistaient sur son manque d'expérience, son absence d'exercice de la moindre fonction ministérielle, lui qui n'était que président du Conseil général de Corrèze, département de surcroît criblé de dettes. (Ces bonnes âmes, y compris aveyronnaises, oubliaient au passage de préciser que la dette de la Corrèze a été creusée par les prédécesseurs UMP de François Hollande. )
Remarquons aussi que le député sortant se garde d'attaquer d'autres rivaux, pourtant bien partis pour réaliser un assez bon score : Philippe Ramondenc (qui avait failli créer la surprise à Millau-Ouest, aux cantonales de 2011) et Marie-Claude Fayard. Le premier est un faux "sans étiquette", modéré sans doute, mais jugé proche du président du Conseil général Jean-Claude Luche (qui a néanmoins apporté son soutien à Alain Marc). La seconde est la candidate du Front National. Il va sans dire que le député sortant compte sur de précieux reports de voix pour l'emporter au second tour.
Du coup, il fait flèche de tout bois. Sa stratégie est de se présenter comme le candidat du terroir. Cela lui avait réussi contre Béatrice Marre, en 2007... et c'est ainsi qu'il apparaissait dans un mini-reportage de la chaîne LCP. Dans les entretiens qu'il accorde, il prend donc soin d'évoquer sa maîtrise de l'occitan et ses racines rouergates. Dans un récent article paru dans Centre Presse (le 31 mai), il est même précisé que sa naissance à Paris n'est qu'accidentelle (c'est donc bien un gars de chez nous, hein !) :
23:56 Publié dans Politique aveyronnaise, Presse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, presse, médias, législatives, législatives 2012, élections
mercredi, 06 juin 2012
Bande de morfales !
On s'indigne (à juste titre) de l'avidité de certains actionnaires, cadres et chefs d'entreprise. Le nouveau président de la République a même décidé de limiter le salaire des patrons du public. Inconsciemment, il est possible que certains collégiens aient été inspirés par le nouvel état d'esprit qui souffle sur la France, si l'on se fie à ce qu'a rapporté le quotidien Sud-Ouest :
Ah ces jeunes...
18:26 Publié dans Presse, Société, Vie quotidienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, société, moralisation, presse
jeudi, 10 mai 2012
Toujours cette obsession...
Google est décidément un moteur de recherche très utilisé... y compris par les cons. Certains d'entre eux ont une véritable obsession antisémite, au point de leur faire systématiquement chercher si telle ou telle personnalité connue est juive. Du coup, quand l'internaute moyen est en quête d'information sur une vedette du moment ou un homme de pouvoir, il n'a pas le temps de terminer d'écrire sa requête que Google lui propose plusieurs propositions pour l'achever... parmi lesquelles figure presque toujours la mention "juif" ou "juive".
J'en ai déjà parlé en octobre 2011 mais cela m'a à nouveau sauté aux yeux lors de la campagne des élections présidentielles. Voici ce que j'ai pu voir en effectuant une recherche sur François Hollande :
Rebelote quand je me suis intéressé au cas de sa compagne, Valérie Trierweiler :
C'est d'autant plus ridicule que le nouveau président de la République est le fils de "Normands pur sucre", son père Georges ayant même milité à l'extrême-droite, dans la mouvance de Jean-Louis Tixier-Vignancour, dont on ne peut pas dire qu'il se signalait par une grande affection pour les juifs.
Concernant Valérie Trierweiler, on peut penser que c'est son patronyme, à consonnance germanique, qui a éveillé les "soupçons" des antisémites... sauf que c'est le nom de son ancien mari (le second), Denis (qui a lui aussi travaillé pour Paris Match). Elle est née Valérie Massonneau, dans une famille angevine. Attention toutefois : elle a des ancêtres banquiers, mais leurs descendants vivent de manière beaucoup plus modeste !
23:18 Publié dans Politique, Presse, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hollande, politique, société, presse, médias
mardi, 08 mai 2012
Le 6 mai en caricatures
L'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo (qui n'est pas forcément ma tasse de thé), a laissé carte blanche à ses dessinateurs le soir du second tour de l'élection. Cela nous donne une floppée de caricatures plus ou moins inspirées.
Trois thèmes principaux émergent : la victoire d'un mou (François Hollande), l'éjection du "petit" (Nicolas Sarkozy) et la menace FN.
Sans surprise, le nouveau président est représenté comme un type sans relief. Deux dessinateurs ne peuvent s'empêcher de réutiliser l'image de Flanby (qui a un aspect ambivalent, comme je l'ai déjà écrit). Voici (selon moi) le meilleur des deux dessins (dû à Jul) :
Notons que sa supposée mollesse est mise en relation avec son ancienne compagne :
Un des dessins retourne toutefois l'image de François Hollande :
Le trait d'humour (appuyé...) mis à part, on peut y voir le désir de maintes personnes de la gauche radicale de voir le candidat de leur camp (pas forcément de leur coeur) la jouer virilement, bref prendre le dessus sur son adversaire... à la manière d'un Sarkozy.
Sans surprise, le sortant essuie une volée de bois vert. On remarque l'insistance mise sur sa petite taille. Cela devient intéressant quand un deuxième sens est sous-entendu :
Bien évidemment, ici, il est question de sa mort politique, puisqu'il a annoncé vouloir prendre du recul. (Mais va-t-il réellement renoncer à toute action politique ? J'en doute. Le premier signe sera sa participation -ou non- aux séances du Conseil constitutionnel, dont il devient membre de droit en tant qu'ancien président... ça va devenir sympa si VGE et J. Chirac font aussi acte de présence !). Quant à l'épitaphe, si elle comporte une part de vérité au premier degré (Pompidou exclu, il est le président qui est resté le moins longtemps en fonction), elle est aussi une allusion transparente à sa taille.
Je trouve que c'est Luz qui a visé le plus juste :
Le côté bling bling, ami des riches de Nicolas Sarkozy lui a coûté cher, y compris à droite. Finalement, son discours le plus digne a été celui du soir du 6 mai 2012. Je reste convaincu que la fonction l'a amélioré (tout comme elle va grandir le vainqueur du 6 mai) et que le travail du gouvernement Fillon n'a pas été que mauvais, même si le bilan est "globalement négatif". Sur la vidéo, vous noterez le manque de discipline des militants UMP, déjà perceptible lors du meeting de Toulouse, en avril dernier.
Le dernier angle d'attaque des caricatures est la dénonciation du Front national, de ses chefs, de ses idées et de ses électeurs. On s'aperçoit en fait que les dessinateurs ont été marqués par les tentatives de récupération du vote FN :
Cette volonté de placer l'homme politique de droite dans une position inconfortable, associée au rapport sexuel, m'a rappelé une caricature de Cabu, qui doit dater de la fin des années 1980, représentant Valéry Giscard-d'Estaing en train de prodiguer une caresse buccale à Jean-Marie Le Pen. La fille de celui-ci ne bénéficie pas d'un traitement plus favorable :
Il est d'ailleurs question de quatre femmes dans ces caricatures, dont trois réelles. Outre Ségolène Royal (évoquée plus haut) et Marine Le Pen (de manière très disgracieuse), les dessinateurs ont surtout représenté Carla Bruni-Sarkozy, jamais de manière négative. Il y a comme une petite tendresse de ces gauchistes pour l'ancien mannequin nymphomane, supposée vaguement de gauche, rafistolée par la chirurgie esthétique.
Il en manque une (de femme), celle qui n'existe pas physiquement, mais qui s'incarne très souvent. Nooon, ce nest pas la Vierge Marie... mais son équivalent laïc : Marianne (Marie-Anne) :
Elle a aussi inspiré Christian Creseveur, un blogueur dont j'avais déjà relevé le talent à propos des tentatives de récupération de Jeanne d'Arc à l'occasion de la célébration du 600e anniversaire de sa naissance :
Cette Marianne-là a bien évidemment un air de ressemblance avec la nouvelle Première Dame : Valérie Trierweiler.
Mais c'est une autre Marianne, inconnue du grand public, qui a crevé l'écran ce dimanche : une manifestante de Rennes. Je l'avais remarquée à la télévision et je l'ai retrouvée sur une photographie de Damien Meyer, de l'AFP (un petit coquin qui a eu du nez), publiée aussi bien dans Le Parisien que Le Nouvel Observateur :
Pour la petite histoire, sachez que d'autres photographies de la manifestante ont été prises, aussi bien par Damien Meyer...
... que par François Destoc, pour Le Télégramme :
Cela m'amène à la question suivante : si, en dépit du bonnet phrygien, cette jeune femme n'avait pas été dotée d'une aussi belle poitrine (de surcroît mise en valeur par le décolleté), aurait-elle été l'objet d'une telle attention ? Le doute m'habite...
17:15 Publié dans Politique, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élection présidentielle, presidentielle, présidentielle, presse, médias, photo, photos
lundi, 07 mai 2012
Certains y ont cru jusqu'au bout
Il y a moins de quatre mois apparaissait un nouveau site d'information, atlantico, rapidement classé à droite par les spécialistes. Il ne se revendique toutefois d'aucun parti. Si, en général, il ne produit guère d'information brute, certains de ses contributeurs apportent de temps à autre un éclairage intéressant, moins consensuel dirons-nous.
Bon, ça, c'était avant la campagne des présidentielles. Force est de reconnaître que, depuis plusieurs semaines, le site est devenu farouchement anti-gauche... au point que, jusqu'à hier soir, les articles les plus mis en valeur pointaient les risques d'une surprise au second tour de l'élection (en faveur du président sortant, bien entendu). L'un d'entre eux, Le modèle qui trouve Nicolas Sarkozy gagnant à 50,2%, a été rédigé par un prof de Panthéon-Assas (haut lieu du progressisme universitaire)... économiste de spécialité !
L'autre article-phare de ces derniers jours s'intitule Pourquoi l'élection n'est pas jouée. Il a été écrit par un physicien, spécialiste du désordre (qui risque d'avoir du boulot avec l'UMP dans les semaines qui viennent...). Cet éminent scientifique (membre du CNRS, attention, hein) développe le concept de "sociophysique", qu'il fonde principalement... sur l'analyse de sondages. Autant je peux partager les réflexions sur la volatilité d'une partie de l'électorat, la part du hasard dans les revirements de votes, autant je trouve que cet article-là s'apparente plus à une prophétie auto-réalisatice.
Cet après-midi, si ces textes ont disparu de la liste des plus lus, l'un d'entre eux figure encore en tête de celle des plus partagés :
13:29 Publié dans Politique, Presse, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, élection présidentielle, présidentielle, presidentielle
mercredi, 18 avril 2012
La science du vote
Elle a fait l'objet d'une double page dans le supplément "Science et techno" du Monde du 7 avril dernier. Les mathématiques, la logique notamment, sont mises à contribution pour comparer différents modes de scrutin. Le coeur du problème est l'insatisfaction procurée par le scrutin majoritaire à deux tours (le nôtre, dans la plupart des élections), illustrée par le paradoxe de Condorcet : un candidat peut-être exclu du second tour, alors que c'est celui qui, des trois arrivés en tête, serait préféré par le plus grand nombre en cas de face-à-face (exemple : F. Bayrou en 2007 qui, s'il avait été qualifié, aurait vaincu n'importe lequel des deux finalistes... même chose sans doute pour L. Jospin en 2002... et peut-être pour R. Barre en 1988).
Mais le plus intéressant est l'application, par les journalistes du "quotidien de référence", des autres modes de scrutin aux candidats de 2007 et de 2012. Pour éviter toute accusation de partialité dans la présentation des résultats des simulations, ceux de cette année sont placés par ordre alphabétique, de Nathalie Arthaud à Nicolas Sarkozy.
Voici ce que cela donne pour le vote par approbation, qui permet aux électeurs de choisir deux (ou trois) candidats :
Un test réalisé en 2007 en Normandie et en Alsace a débouché sur des résultats différents du vote réel (mais les électeurs testés auraient-ils agi de la même manière si ce mode de scrutin avait été réellement appliqué ?), au bénéfice de François Bayrou, mais aussi de Dominique Voynet et d'Olivier Besancenot.
Une autre possibilité est de voter par note. Les électeurs attribuent à chaque candidat une note, soit entre 0 et 2, soit entre 0 et 20 :
Appliqué en 2007, ce système aurait pu avantager les petits candidats et aurait désavantagé Jean-Marie Le Pen qui, s'il recueille l'adhésion d'une proportion non négligeable de l'électorat, suscite le rejet d'une part encore plus importante.
Le système du jugement majoritaire fonctionne selon un principe similaire. Au lieu d'être quantitative (numérique), l'évaluation des candidats est qualitative :
En 2007, ce mode de scrutin aurait placé François Bayrou devant Ségolène Royal. Les candidats des extrêmes auraient été pénalisés. (Ils sont plus souvent que les autres jugés peu crédibles ou dangereux, et donc affublés de l'appréciation "Insuffisant" ou "A rejeter".)
Il reste le vote alternatif (ou vote préférentiel transférable), qui exige des électeurs qu'ils classent les candidats par ordre de préférence. Il est utilisé en Irlande et en Australie :
Dans ce cas, les résultats obtenus lors du test ne diffèrent pas forcément de ceux issus du scrutin de 2007. Cela dépend de la méthode de dépouillement et de la manière d'éliminer successivement les plus mauvais candidats et de répartir les voix qui se sont portées sur eux.
Mais laissons là la fiction politique. Bien après la lecture de l'article, quelque chose a fini par me venir à l'esprit. Les illustrations sont orientées. En effet, ces petites croix, ces numéros et ces bulles ne sont pas toujours placées au hasard. D'abord, leur disposition ne dépend pas du contenu de l'encadré qu'elles accompagnent. Par contre, toutes ont un point commun. Alors que 7 candidats sur 10 figurent alternativement dans les favoris ou les rejetés des électeurs fictifs, une seule est systématiquement placée dans la catégorie la plus négative : Marine Le Pen. (Nicolas Dupont-Aignan est à peine mieux traité.)
Ainsi, elle ne fait pas partie des trois exemples entourés dans le cas du vote par approbation. Elle est l'un des quatre auxquels la note 0/2 (la plus mauvaise) est attribuée dans le vote par note. Elle est (apparemment) la seule à être classée dans la catégorie la plus infamante du vote par jugement majoritaire : "A rejeter". Enfin, elle n'est même pas retenue dans les six candidats préférés de l'exemple du vote alternatif.
On retrouve ici un procédé déjà observé à propos des rapprochements photographiques effectués par Le Monde (entre autres) : si les journalistes s'interdisent l'expression d'une opinion personnelle dans le coeur de l'article, cette rigueur intellectuelle est moins souvent à l'oeuvre dans les illustrations.
P.S.
Si vous avez bien compté, il manque un candidat : 7 sur 10 tour à tour bien ou mal classés + 1 systématique mal classée + 1 autre presque toujours mal classé = 9. Il nous reste le cas Eva Joly : elle fait partie des trois candidats sélectionnés dans l'exemple du vote par approbation ; elle est notée 2/2 dans l'exemple du vote par note ; elle bénéficie de l'appréciation "Très bien" dans l'exemple du jugement majoritaire et elle est classée 4e (sur 10) dans l'exemple du vote alternatif. Etonnant, non ?
14:16 Publié dans Politique, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, presse, médias, presidentielle, élections, présidentielle, présidentielles
dimanche, 11 mars 2012
Fukushima, un an après
L'hebdomadaire Courrier international consacre cette semaine un petit dossier papier très intéressant à la catastrophe de Fukushima et à ses conséquences, dossier annoncé en couverture par l'extrait d'un manga inspiré par les événements :
Le coeur du dossier est une longue enquête menée par l'un des principaux quotidiens japonais, Asahi Shimbun : "Le jour le plus long pour les sinistrés". On y découvre la vie quotidienne des habitants d'une zone a priori préservée des radiations (mais qui allait en recevoir une bonne dose), les jours suivant la première explosion dans la centrale. Un groupe de réfugiés a eu le réflexe de partir encore plus loin, incité par la personne qui les accueillait, et qui avait rencontré de curieux hommes en tenues blanches devant chez elle... A lire.
Le numéro papier est richement illustré. Avec le recul d'un an, l'ensemble constitue une bonne base pour comprendre les tenants et aboutissants de cet accident nucléaire majeur.
En flânant sur le site de l'hebdomadaire, on peut trouver d'autres articles, un peu plus anciens, tout aussi intéressants. Du même quotidien a été traduit "Comment un pays irradié est devenu pronucléaire". Sachez aussi que les Etats-Unis ont jadis envisagé la construction d'un réacteur nucléaire... à Hiroshima ! C'était le bon temps de la Guerre froide...
On nous propose en sus une brochette de caricatures internationales. Sur le fond, les deux plus réussies, pour moi, sont celles parues dans un journal autrichien (Der Standard) et un néerlandais (Het Parool) :
Mais, d'un point de vue graphique, je préfère celle parue dans le Philadelphia Daily News, qui recycle la figure de Godzilla, un monstre issu de la culture japonaise contemporaine, dont la naissance est liée à l'énergie nucléaire :
Je regrette toutefois que l'on ne trouve aucun dessin issu de la presse japonaise (ou des blogueurs locaux).
Les Occidentaux ont tendance à parler du "Tchernobyl japonais" (en oubliant un peu vite que l'écrasante majorité des personnes décédées ont été victimes du tsunami). Au pays du soleil levant, on a pu aussi comparer la catastrophe au 11 septembre américain, comme le suggère la couverture de cet hebdomadaire :
Parmi la floppée d'émissions diffusées à l'occasion de cet anniversaire, je me permets de recommander un numéro d'Interception, le magazine de la rédaction de France Inter, "Les enfants de Fukushima", diffusé le 4 mars dernier.
Mais revenons à la catastrophe nucléaire. La perception de sa gravité, aujourd'hui encore, varie selon l'endroit où l'on se trouve. Cela a conduit des blogueurs nippons ("les pirates barbus") à proposer une cartographie ironique de la chose. (Je suis arrivé là grâce à un autre blog, français, consacré à la culture nipponne : Kanpai.)
Ainsi, les habitants de la région du nord-est (où se trouve la centrale de Fukushima-Daichi) imagineraient que la zone sinistrée est assez restreinte, limitée à leur environnement proche :
Les habitants de Tokyo auraient bien conscience que les "dégâts collatéraux" sont plus étendus... mais plutôt vers le nord, pas vers chez eux !
C'est un optimisme que ne partageraient pas les habitants de la grande île du nord, Hokkaido, qui voient plus de la moitié de Honshu contaminée... sans que le détroit de Tsugaru, qui sépare les deux îles, ne soit franchi !
A l'inverse, du côté d'Osaka et de Kobe, si l'on imagine bien Tokyo touchée, on ne croit pas Hokkaido épargnée :
Les plus pessimistes des Japonais seraient les habitants d'Okinawa, une des îles du Sud-Ouest (représentées à droite sur la carte). S'ils imaginent le Japon presqu'entièrement contaminé, ils en exemptent bien entendu sa partie méridionale :
Selon les auteurs du blog, les étrangers n'auraient pas de ces préventions : ils estiment que la totalité du pays est touchée, jusqu'aux îles les plus excentrées :
De la part des auteurs, il faut voir ce dessin comme le résultat des observations faites au moment de la crise : les expatriés ont fui le pays en masse (même si nombre d'entre eux sont restés par solidarité envers leurs collègues japonais), peut-être parce qu'ils étaient mieux informés que les nationaux quant à la gravité de la catastrophe.
Mais le blog se veut surtout critique de l'attitude du gouvernement et de l'entreprise Tepco. Voici qu'elle était l'étendue de la contamination selon les autorités publiques :
Pour la Tokyo Electric Power Company, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes :
Pour terminer sur une note un peu plus joyeuse, je vous conseille de visionner un petit film conçu pour expliquer aux enfants les enjeux de la catastrophe nucléaire... sans trop les alarmer. Alors, Fukushima, caca boudin ou prout-prout ?
14:22 Publié dans Japon, Presse, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : presse, médias, actualité, société, écologie, environnement