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vendredi, 23 février 2018

Pas de loup dans le PNR Aubrac ?

   Ça n'a pas traîné. Dès le lendemain de la parution d'une tribune, dans Centre Presse, le même quotidien a publié (aujourd'hui donc), en page 2 (et pas au coeur du journal, là où l'on trouve les contributions des lecteurs), la réaction d'André Valadier aux propos mettant en cause sa passivité sur la question du loup :

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   La mise au point est claire... et elle soulève d'autres questions. Elle rappelle que, si du côté aveyronnais du parc, on refuse les éoliennes, ailleurs (en Lozère), on n'est pas de cet avis. Et puis il y a cette allusion aux "voix discordantes" concernant la place du loup dans le PNR. Cela demande des éclaircissements.

   La fin du texte est une allusion au parc des loups du Gévaudan, situé à Saint-Léger-de-Peyre, en Lozère, dans la région naturelle de Margeride... mais à l'intérieur du périmètre du PNR Aubrac (à l'extrême-est), comme on peut le voir sur la carte officielle, ainsi que sur celle du périmètre d'étude, qui se trouve dans l'atlas cartographique accessible en ligne :

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   Il y aura donc bien des loups dans le PNR Aubrac, mais pas en liberté... enfin, tant que ceux qui se trouvent dans le parc du Gévaudan n'auront pas été relâchés, comme c'est arrivé il y a deux ans. C'est à ce moment-là qu'on a réalisé qu'il y avait plus de loups que ce qui était déclaré par le parc (qui les avait mal comptés ?)... et que donc, on ne savait pas vraiment combien s'étaient retrouvés en liberté. De là à y voir un lien avec  les récentes attaques dans le Nord Aveyron...

   D'après le site internet du parc du Gévaudan, les loups captifs seraient aujourd'hui environ une centaine (admirez la précision), contre 32 déclarés il y a deux ans (en réalité plus de 40). L'effectif aurait donc plus que doublé en moins de deux ans... Espérons qu'aucune personne mal intentionnée ne les aidera à prendre la tangente...

jeudi, 22 février 2018

Plan loup : Macron et Philippe font du Hollande

   Presque dix mois après l'élection d'Emmanuel Macron, on peut affirmer que son mouvement, censé être transcourant, marche principalement (uniquement ?) sur sa jambe droite, à tel point qu'on peut se demander en quoi un gouvernement nommé par François Fillon (et s'appuyant sur une alliance droite-centre) aurait pu se différencier de la politique menée par Edouard Philippe.

   Tel n'est pas le cas de l'attitude face au loup. Le gouvernement semble avoir voulu ménager la chèvre et le chou (ou plutôt la brebis et le loup)... ce qui conduit, de toute façon, à la dégradation inéluctable de la situation des éleveurs extensifs des zones montagneuses. Voici pourquoi.

   Le Plan loup, cité par le quotidien Le Monde, estime à 360 le nombre de ces prédateurs présents en France. Or, l'objectif, à court terme, n'est pas la stabilisation de l'effectif, mais son augmentation, puisque le rapport parle de 500 loups d'ici quatre ans, soit une progression d'environ 40 % ! C'est se moquer du monde, alors que la situation est déjà intenable dans certaines zones de pâturage.

   Le pire est qu'il est sous-entendu que, si l'on veut assurer la pérennité de l'espèce, c'est un effectif de 2 500 à 5 000 loups qu'il faudrait atteindre ! Cela semble être un objectif à moyen-long terme. Du coup, c'est la survie de l'élevage ovin dans le Sud Aveyron (et même une partie de l'élevage bovin dans le Nord) qui est menacée. Ce plan ne tient pas compte d'un récent rapport de l'INRA, fondé sur une méthode rigoureuse et non sur des préjugés environnementalistes, coupés de la réalité du terrain.

   La contrepartie annoncée (des aides à la protection) n'est qu'un affichage, histoire de pouvoir affirmer qu'on ménage les deux parties. Mais le bilan n'est pas neutre. On sait que ne serait-ce que le maintien de l'actuelle population de loups dans les zones d'élevage pourrait, à terme, menacer l'existence de 25 % à 40 % des exploitations, dans un contexte qui est déjà celui d'une déprise agricole. Encore une fois, c'est le monde rural qui risque de trinquer à cause de politiques décidées en haut lieu sous l'influence de lobbys.

   Rappelons qu'au milieu du XXe siècle, le loup avait disparu de France métropolitaine. Cinquante ans plus tôt (comme le précise une vidéo du Monde, qui donne un peu trop la parole à une ethnozoologue plutôt favorable au canidé), il était déjà absent de l'Aveyron :

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   Quoi qu'il en soit, la gestion de ce problème repose sur des observations de terrain. Or, comme on peut le lire dans la version numérique du Plan loup, les agriculteurs ne représentent que 3 % des membres des réseaux de correspondants, contre, par exemple, 10 % pour les associations environnementalistes et 13 % pour les "particuliers"...

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   Ici et là, il se murmure que nombre d'observateurs (censés être neutres) évitent de transmettre une partie de leurs découvertes, pour empêcher la localisation des meutes de loups et aussi pour minimiser leur présence, pour que le grand public ne s'alarme pas de la forte (et récente) augmentation des effectifs.

   Cela permet de comprendre pourquoi une région comme l'Aubrac est désormais touchée. C'est un problème de plus qui va se poser au tout jeune PNR, dont l'objectif principal est de revitaliser la zone en s'appuyant sur la préservation du patrimoine, la valorisation de l'élevage et la promotion du tourisme. Quid du loup là-dedans ? C'est cette ambiguïté qui a sans doute suscité une virulente tribune ("Le loup traumatise la population de l'Aubrac") parue aujourd'hui dans Centre Presse.

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   Elle est, me semble-t-il, signée par un éleveur du Nord Aveyron, qui reproche à André Valadier (le "papa" du PNR) ses tergiversations. Celui-ci n'a pas osé prendre publiquement position contre la présence du loup. Je pense que c'est d'abord une question de contexte : le PNR n'existant pas encore officiellement (sa naissance devant être annoncée lors du Salon de l'agriculture), son promoteur, qui lui a consacré des années de sa vie, redoute qu'une énième contrariété ne vienne repousser à nouveau cette création tant désirée.

Les Très Riches Heures (de cours) du duc d'Auvergne

   Le président du conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, défraie la chronique avec ses déclarations à l'emporte-pièce tenues lors de cours donnés à l'Ecole de management de Lyon. (Rappelons qu'en théorie, ces cours devaient prendre la forme d'interventions apolitiques...) Mais ce n'est pas tant le fond qui a attiré mon attention que le tarif auquel l'intervenant a été payé. D'après Le Canard enchaîné sorti ce mercredi, une fois que Laurent Wauquiez aura achevé sa série de leçons (composée de 24 heures au total), il recevra 1 900 euros... soit 79 euros de l'heure. Pas mal pour soulager ses aigreurs !

   Voilà de quoi mettre du beurre dans les épinards de M. Wauquiez qui, en tant que président de conseil régional, gagne déjà de l'ordre de 5 000 euros par mois. N'étant plus maire, ni vice-président de communauté d'agglomération ni député (merci la loi sur le cumul votée sous la gauche !), il n'a a priori aucun autre revenu, puisque, maître des requêtes au Conseil d'Etat, il s'est (enfin) mis en disponibilité.

   Ah, j'oubliais : il s'est fait voter (par "son" conseil régional) une indemnité de séjour (à Lyon, puisqu'il réside officiellement au Puy-en-Velay) de 60 euros par nuit et 15,25 euros par repas. Précisons tout de suite que la mesure est parfaitement légale. Il me semble même qu'il aurait pu demander à disposer d'un logement de fonction, à Lyon. Mais, quand on a dit haut et fort qu'on voulait diminuer les gaspillages d'argent public, c'était difficilement exigible.

   Faisons un petit calcul. Admettons qu'en moyenne, sur une année, L. Wauquiez passe deux nuits par semaine à Lyon et y prenne six repas. Cela nous donne une dépense hebdomadaire de 2x60 + 6x15,25 = 211,5 euros. Sur un mois, cela correspond à plus de 800 euros... et cela comble largement la baisse d'indemnité des élus de 10 % votée au début de sa mandature. (Au passage, comme l'ancienne Rhône-Alpes était bien plus peuplée que l'Auvergne, pour les conseillers qui siégeaient autrefois à Clermont, la baisse d'indemnité imposée aux membres de la nouvelle assemblée, celle de la grande région, ne les a pas empêchés de profiter d'une hausse de leurs revenus, puisqu'ils sont désormais conseillers d'une région bien plus peuplée.)

   P.S.

   Ce n'est pas la première fois que L. Wauquiez est rémunéré pour une série de cours dans une école prestigieuse. Sa déclaration d'intérêts, publiée sur le site de la HATVP, précise qu'en 2012-2014 (alors qu'il était député, maire et vice-président de communauté d'agglomération...), il a touché deux fois 1 591 euros pour des interventions à l'IEP (sous-entendu Sciences Po Paris) :

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   Curieusement, sur le même site, sa fiche nominative ne mentionne pas exactement les mêmes sommes pour son activité rémunérée par la FNSP (Fondation Nationale des Sciences Politiques, qui gère l'IEP de Paris) :

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   Il serait tentant d'attribuer cette légère différence à un écart entre les montants bruts et nets. Or, les sommes sont plus élevées sur le second document, qui donne pourtant des montants nets. Quel est ce mystère ?

vendredi, 16 février 2018

Trois héros américains

   Il s'agit bien évidemment d'Anthony Sadler, Alek Skarlatos et Spencer Stone, les trois jeunes hommes qui ont déjoué, en 2015, l'attaque terroriste dans le train Thalys. Dans son dernier film, Clint Eastwood a raconté leur histoire, adaptée d'un livre qu'ils ont coécrit avec un journaliste, Jeffrey E. Stern :

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   Le bouquin se lit très facilement. Il est construit sous forme de courts chapitres, rédigés de deux manières différentes. L'essentiel du texte est une narration qui s'appuie sur les témoignages des trois héros. On part de l'enfance (et même du passé familial) pour rejoindre août 2015 et ses conséquences. A la fin de certains chapitres sont ajoutés des éléments plus strictement liés à l'attentat, avec une graphie différente. Parfois, c'est le journaliste qui ajoute des explications, comme lorsqu'il présente (schématiquement) le fonctionnement de l'espace Schengen à son lectorat américain ou lorsqu'il évoque la situation de la minorité arabo-musulmane en France (et dans les pays voisins, comme la Belgique). Il analyse la situation avec sa grille de lecture états-unienne (sous l'angle de la ghettoïsation) et évoque très peu la religion.

   A la lecture, cela donne une série de retours en arrière... qui ont parfois été intégralement "pompés" par la scénariste d'Eastwood, Dorothy Blyskal (par exemple : la rencontre entre les mères de famille et la directrice d'école, la découverte, par Anthony, des armes avec lesquelles le jeune Spencer joue ou encore la visite de Berlin à vélo, anecdote sur Hitler à la clé).

   Le livre est néanmoins beaucoup plus riche en détails. Il est encore plus clair qu'Eastwood sur l'aspect religieux de la vocation des jeunes hommes. A plusieurs reprises, on tente de nous faire accroire que rien de tout ceci n'est arrivé par hasard, qu'il faut y voir la réalisation d'un projet divin. Il est vrai que le parcours suivi par les trois futurs héros (de leur rencontre à leurs débuts dans la vie active), tout comme les péripéties de la lutte dans le train (avec les armes qui s'enraient au bon moment), ne manquent pas d'étonner.

   Parmi les éléments qui n'ont pas été retenus pour construire le scénario du film, il y a l'histoire familiale du djihadiste et sa vie en Europe. A mon avis, Eastwood a fait le bon choix (cinématographique) en campant un être maléfique sans voix, même si je regrette la mise sous le boisseau de l'islam intégriste. A ce sujet, on remarque que, dans le livre (qui détaille davantage la période de vacances en Europe), on comprend que deux des jeunes hommes sont étonnés (voire choqués) de croiser autant de femmes voilées en Allemagne...

   L'autre matériau qui a été négligé est le vécu particulier d'Anthony Sadler, le Noir de la bande, qui est fan de rap et s'intéresse à tout ce qui touche à sa "communauté", des deux côtés de l'Atlantique. Sa relation avec son père pasteur est aussi très intéressante, surtout à partir du moment où intervient Barack Obama. Celui qui était à l'époque le président des Etats-Unis a téléphoné directement au jeune homme, avant de recevoir les trois à la Maison Blanche. Quand on connaît l'hostilité qu'éprouve Eastwood à l'égard du premier président métis, on comprend qu'il ait "zappé" ces éléments, préférant mettre en valeur la ferveur populaire qui a accueilli les héros de retour au pays.

   Le livre les suit d'ailleurs au-delà. Alek le seul vrai militaire de la bande (à l'origine) est devenu une vedette de la télé-réalité : il a participé à l'émission Danse avec les stars... qu'il a remportée ! Anthony poursuit ses études et Spencer, naguère rejeté par l'armée, est désormais au service de l'US Air Force !

   Et la France dans tout ça ? Elle a une place ambiguë. La réputation des Parisiens à l'étranger est encore plus exécrable que ce qui apparaît dans le film. A plusieurs reprises, des personnes ont tenté de dissuader les jeunes hommes de se rendre dans la Ville Lumière, l'Allemagne et (surtout) l'Espagne apparaissant plus accueillantes. Le passage par les Pays-Bas est l'excellente surprise de leur voyage (peut-être pas pour des raisons avouables...). Concernant la France, de l'autre côté de l'Atlantique, les parents ont encore en mémoire les attentats de 2015. (Il est plusieurs fois fait allusion à Charlie.) Mais la culture française est quand même présente (y compris par une référence à La Guerre des boutons), tout comme la maîtrise technologique (à travers le fonctionnement du train). Un bref mais incontestable hommage est aussi rendu au Français qui, le premier, s'est opposé au terroriste du train.

   Voilà. Le bouquin fourmille d'anecdotes et, à mon avis, il est bien plus intéressant que le film.

samedi, 10 février 2018

Le 15h17 pour Paris

   L'ami Clint a décidé de se pencher sur l'attentat du Thalys d'août 2015, en embauchant certains des protagonistes (dont les trois jeunes Américains) pour qu'ils jouent leur propre rôle. Attention toutefois : l'essentiel du film n'est pas consacré au déroulement de l'attentat, mais au passé des trois héros. Même si la première scène nous montre (de dos) l'islamo-fasciste Ayoub El-Khazzani, la suite est constituée de longs retours en arrière.

   Ce n'est pas qu'une coquetterie de cinéaste. C'est lié au propos politique qui constitue l'ossature du film. Eastwood veut montrer deux choses : la première que ces jeunes hommes sont des types ordinaires, plutôt pas gâtés par le destin ; la seconde que, s'ils se sont comportés en héros, c'est en raison de l'éducation religieuse qu'ils ont reçue, de la formation que deux d'entre eux ont suivie et de leur goût pour les armes et le combat.

   C'est clairement un "film de droite", un poil manichéen, sur la lutte du Bien contre le Mal. Le Bien est incarné par les valeurs américaines (même si Eastwood lance quelques piques sur ce qui se passe dans son pays) et le lien avec la France. Au début, celle-ci n'est pourtant pas montrée à son avantage : les trois jeunes hommes en vacances en Europe hésitent à se rendre à Paris, rebutés par les rumeurs concernant le mauvais accueil qu'on y réserve parfois aux touristes. Mais, comme il y a la Tour Eiffel...

   Le Mal n'est que schématiquement représenté, par un homme costaud, surarmé et impitoyable. Il est de surcroît mutique, ce qui lui confère une aura menaçante supplémentaire. Notons qu'Eastwood n'associe aucun symbole religieux au personnage. Ce film n'est pas islamophobe. Il dénonce le terrorisme. C'est délicat de la part d'Eastwood, mais il est quand même culotté de passer sous silence l'idéologie mortifère qui anime le terroriste.

   Ce ne sont néanmoins pas pour moi des éléments rédhibitoires. Le problème vient plutôt de la direction d'acteurs et de l'interprétation. Les premiers retours en arrière nous montrent Spencer, Anthony et Alek jeunes, scolarisés dans une école religieuse. (Cette période de leur vie avait fait l'objet d'un reportage publié dès août 2015 dans Paris Match.) C'est l'occasion pour Clint de dire ce qu'il pense d'une partie du corps enseignant. Au fil des scènes, on découvre trois garçons plutôt complexés, l'un grassouillet, les deux autres petits et maigres. Cerise sur le gâteau : leur situation familiale n'est pas des plus apaisées. Ils sont élevés principalement par leurs mères (toutes ferventes croyantes apparemment). L'absence de la figure du père peut expliquer le parcours ultérieur de ces gars, en quête de reconnaissance virile. Hélas pour les spectateurs, les gamins ne jouent pas très bien et les dialoguistes leur font tenir des propos d'adultes. (J'ai vu le film en version originale sous-titrée.)

   On retrouve le même problème avec les trois jeunes hommes. Les scènes qui les font interagir sont à moitié jouées. C'est souvent maladroit. Il aurait fallu retourner certaines d'entre elles. (Peut-être serait-il préférable de voir le film en version française, si le doublage est de qualité.) J'ai cependant été touché par le parcours de Spencer (le plus charismatique de la bande), qui accumule les guignes mais essaie de garder un esprit positif.

   Le film ne prend vraiment son élan que dans la dernière partie. La séquence du Thalys est très bien filmée. Il y a de l'action et de l'émotion, même si l'on connaît déjà le déroulement des événements. Seul un détail m'a fait tiquer : les vues aériennes du train le montrent se déplaçant à une vitesse assez réduite, alors qu'il est censé aller très vite !

   Ah, et puis, il y a autre chose : Eastwood ne met en valeur que les passagers américains qui ont combattu le terroriste. On ne voit que brièvement le premier à s'opposer à lui, un Français (pas présenté comme tel) qui se trouvait au niveau des toilettes (et qui par la suite a souhaité garder l'anonymat). On distingue à peine le Britannique qui a contribué à maîtriser l'assassin. Il faut attendre la séquence de l'Elysée pour le découvrir vraiment. Pour cette partie, Eastwood a entremêlé les images d'archives et d'autres, retournées ensuite, avec notamment une doublure de François Hollande (incarné par Patrick Braoudé, selon Allociné). Notons que le film nous propose l'intégralité du discours présidentiel, qui est très beau.

   A vous de voir : c'est clairement un Eastwood mineur et surtout un film paresseux au niveau de la direction d'acteurs.

vendredi, 09 février 2018

La Sopave abandonnée

   Depuis fin 2017, il ne se passe pas une semaine sans que l'entreprise de Viviez (connue désormais sous le sigle SRVPA) ne fasse l'actualité, hélas pas pour le meilleur. Toutefois, il a fallu attendre l'annonce officielle de la fermeture prochaine du site pour que les élus locaux semblent sortir de leur torpeur.

   Il faut dire que, dans le Bassin, entre la disparition des commerces de centre-ville et les menaces qui pèsent sur les services publics, il y a de quoi s'occuper. Pourtant, depuis décembre dernier, un petit vent d'optimisme s'était mis à souffler sur le territoire. A Viviez même, c'est une autre entreprise industrielle, la SNAM (Société Nouvelle d'Affinage des Métaux), qui a annoncé un plan de développement. Dans la presse nationale, on a parlé d'environ 600 emplois putatifs (d'ici 2023), alors que Centre Presse a titré sur plus de 700, présentés dans l'article comme certains.

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   Dans le même temps, pas très loin de là, à Decazeville, le sort de SAM technologies suscitait de grandes inquiétudes... que l'intervention d'un groupe chinois est venue (temporairement ?) dissiper. Il reste à espérer que, dans cinq ans, le groupe Jinjiang ne lève pas le camp, emportant dans ses bagages la technologie de SAM, achetée à bon prix.

   Remontons un peu en arrière... toutefois pas jusqu'à 1986 (création de l'entreprise), ni même 2006 (année de la reprise par le groupe Suez). Arrêtons-nous en septembre 2012. Ce n'est pas si lointain. A l'époque, l'ambiance est au beau fixe. Pensez donc : une nouvelle ligne de production est lancée. Tout le gratin politico-administratif est là le jour de l'inauguration. L'entreprise emploie alors 73 salariés (à comparer aux 35 qui restent aujourd'hui...). Durant les années qui suivent, le site semble continuer sur sa lancée. En 2016, la Sopave a même remporté un appel d'offre "lointain" : la fourniture de sacs jaunes (pour les déchets recyclables) à la communauté Angers-Loire-Métropole.

   Cependant, la dynamique n'est plus la même. Ainsi, en janvier 2017, quand le nouveau directeur du site est interrogé, les effectifs ont fondu à 48 salariés, soit une diminution d'un tiers en environ quatre ans. Le chiffre d'affaires a reculé à cause de la baisse des commandes de sacs plastiques. L'article de La Dépêche auquel renvoie le premier lien de ce billet évoque la perte du marché des deux collectivités les plus proches (aujourd'hui fusionnées), celles de Decazeville-Aubin et de la Vallée du Lot, en 2015.

   La collecte et le traitement des déchets sont l'une des compétences de l'ancienne comme de la nouvelle communauté de communes. Celle-ci est toujours présidée par le maire d'Aubin (André Martinez), dont le deuxième vice-président, qui a en charge le développement économique, est François Marty, maire de Decazeville depuis 2014. Le maire de Viviez (Jean-Louis Denoit, en place depuis 2001), troisième vice-président, n'a en charge que l'urbanisme et l'habitat. L'environnement et le cadre de vie sont du ressort de Jean-Pierre Ladrech, premier vice-président et maire de Firmi (depuis 2008). Auparavant, il avait sous sa coupe le développement économique. Voilà plusieurs personnes qu'il serait intéressant d'interroger sur la non-reconduction des marchés avec la Sopave.

   Quant au groupe Suez, il se contente d'affirmer avoir beaucoup investi dans le site. Le choix d'arrêter la production de sacs plastiques a été déterminant pour la suite des opérations. Il est fort possible qu'à partir de ce moment-là, la fermeture du site ait été programmée sans que les employés n'en aient été informés.

   P.S.

   Je ne voudrais pas avoir l'air de lui jeter particulièrement la pierre (il est arrivé trop récemment aux commandes), mais François Marty s'est régulièrement distingué, dans ses déclarations, par sa volonté de réduire les coûts, aussi bien au niveau de la municipalité de Decazeville (récemment dans Centre Presse) que de la communauté de communes (en janvier 2017, par exemple).

   Je me demande si la Sopave n'a pas été considérée comme quantité négligeable, au regard de l'enjeu représenté par le maintien de la SAM et de la SNAM.

mercredi, 31 janvier 2018

Les nominations pour les César 2018

   Ça y est ! L'Académie des arts et techniques du cinéma (français) a rendu publique la liste des nommés. Je dois dire que, cette année, je suis plutôt satisfait des choix qui ont été faits par les votants... mais je redoute le palmarès final, qui risque d'être très éloigné du mien.

   Dans un monde idéal, voici celles et ceux que j'aimerais voir récompensés.

   César de la meilleure actrice : Emmanuelle Devos, dans Numéro Une (à défaut, Charlotte Gainsbourg, excellente dans La Promesse de l'Aube).

   César du meilleur acteur : Reda Kateb, dont la performance dans Django a été quelque peu sous-estimée en raison du semi-échec rencontré par le film.

   César du meilleur acteur dans un second rôle : Niels Arestrup ou Laurent Lafitte, dans Au revoir, là-haut.

   César du meilleur espoir féminin : sans aucune contestation possible Iris Bry, dans Les Gardiennes.

   César du meilleur scénario original : Julia Ducournau, pour Grave (juste devant Claude Le Pape et Hubert Charuel, pour Petit Paysan)

   César de la meilleure adaptation : évidemment Albert Dupontel et Pierre Lemaitre pour Au revoir là-haut.

   César de la meilleure musique originale : Christophe Julien, pour Au revoir là-haut (devant Jim Williams, pour Grave).

   César du meilleur son : Jean Minondo, Gurwal Coïc-Gallas, Cyril Holtz et Damien Lazzerini pour Au revoir là-haut.

   César de la meilleure photo : Vincent Mathias, pour Au revoir là-haut (ou Caroline Champetier, pour Les Gardiennes).

   César du meilleur montage : Christophe Pinel, pour Au revoir là-haut (ou Julie Léna, Lilian Corbeille et Grégoire Pontecaille pour Petit Paysan).

   César des meilleurs costumes : sans hésiter Mimi Lempicka, pour Au revoir là-haut.

   César des meilleurs décors : Pierre Quefféléan, pour Au revoir là-haut.

   César de la meilleure réalisation : sans conteste Albert Dupontel, pour Au revoir là-haut.

   César du meilleur long-métrage d'animation : Zombillénium (une excellente surprise).

   César du meilleur premier film : mon coeur balance entre Grave et Petit Paysan. (Le contexte socio-économique me pousserait à choisir le second, mais je pense que le premier est encore plus abouti sur le plan cinématographique.)

   César du meilleur film étranger : The Square, mais je ne serai pas scandalisé si Dunkerque ou Le Caire confidentiel décroche la statuette.

   César du meilleur film : évidemment, assurément, indubitablement, inévitablement, irrésistiblement Au revoir là-haut, d'Albert Dupontel.

dimanche, 28 janvier 2018

Montage approximatif

   Hier samedi, France 3 a repris la diffusion de la série policière Cassandre, qui met en scène une commissaire parisienne qui a choisi de changer de vie en partant s'installer dans les Alpes. Le premier épisode (Retour de flamme) était inédit, le second (Neiges éternelles) une rediffusion. Mais je l'avais raté lors de sa première programmation, l'an dernier. En le regardant attentivement, il m'est arrivé de "tiquer".

   Comme pour Profilage il y a un peu plus de deux ans (ainsi que dans un épisode des Experts, il y a quatre ans), j'ai remarqué que le montage était, par instants, peu rigoureux. En clair : on  a mis bout à bout des morceaux de plusieurs prises de la même scène (une pratique hyper-classique), mais dans lesquels certains détails diffèrent. Pour un oeil exercé, ça fait tache.

   Prenons par exemple la séquence de la perquisition menée chez un suspect par l'héroïne et son adjoint, incarné par Dominique Pinon (acteur que j'apprécie beaucoup au demeurant). Lorsque celui-ci pénètre dans la maison, il ne porte pas de gant :

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   Pourtant, quelques secondes plus tard, on le retrouve avec la main droite couverte et un second gant sorti, sans doute destiné à sa main gauche :

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   On va me dire qu'il s'agit d'une ellipse et, qu'entre temps, il est censé avoir procédé à ce geste mécanique indispensable au déroulement correct d'une perquisition. Le problème est que, quelques secondes après, on le retrouve... en train de sortir les gants de la poche de son blouson !

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   La conclusion qui s'impose est qu'au moins deux versions de cette scène ont été tournées, une qui comprend les images 1 et 3, l'autre l'image 2. Une seconde possibilité est que les images n'ont pas été montées dans l'ordre chronologique : la deuxième et la troisième ont été inversées.

   J'aurais toutefois tendance à rester sur l'idée de plusieurs prises. Au niveau du commissaire Cassandre, la chronologie du port des gants est correcte. Par la suite, on voit les deux policiers continuer la perquisition les gainées de bleu. Or, quelques minutes plus tard, alors que l'adjoint fouille le dessus d'une armoire (où il va trouver un fusil), il est mains nues :

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   Ce n'est pas fini, puisque, lorsqu'il se retourne et descend pour examiner la housse qui était cachée au-dessus du meuble, il a de nouveau les mains gantées :

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   Ce genre d'erreur est d'autant plus regrettable que le scénario est assez travaillé et que l'interprétation n'est pas (trop) mauvaise.

samedi, 27 janvier 2018

Cherif face à une fine lame

   Le septième épisode de la cinquième saison de la série policière diffusée sur France 2 confirme l'impression que, malgré le départ de la comédienne Carole Bianic, l'intérêt ne faiblit pas. Les téléspectateurs aveyronnais seront encore plus attentifs que les autres, et ce dès le début de l'épisode :

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  Une agent de surveillance de la voie publique est sur le point de verbaliser (numériquement : regardez sa main gauche, à l'arrière-plan) un véhicule mal garé, lorsqu'elle s'aperçoit que le conducteur se trouve à l'intérieur. Elle se dirige vers lui, mais se rend compte qu'il n'est pas dans son état normal.

   Visiblement, il a été poignardé avec un couteau Laguiole (un vrai, un solide). Par la suite, on apprend que la victime, vêtue d'un costume haut-de-gamme, sortait d'une soirée mondaine. L'assassin y avait-il subtilisé l'arme du crime ? Mystère.

   C'est la seconde fois que le couteau aveyronnais se retrouve à l'écran dans cette série. Rappelez-vous, il y a un peu plus de quatre ans, c'est le capitaine Cherif lui-même que l'on avait vu manipuler ce superbe outil.

   Mais ce n'est pas le seul intérêt de cet épisode, intitulé "Quand Cherif rencontre Huggy". Les (vieux) amateurs de séries policières américaines auront immédiatement remarqué l'allusion à Starsky et Hutch, une des références du héros, qui possède d'ailleurs une réplique miniature de la célèbre Ford. Ah, ben... tiens ! Que voit-on débarquer au détour d'un plan ?

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   Au cours de son enquête, Cherif va donc recevoir l'aide de "Huggy les bons tuyaux" (Huggy Bear dans la version originale). Il le voit débarquer après avoir reçu un coup sur la tête :

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   Il s'agit bien d'Antonio Fargas (petit entretien ici), dont on entend tout d'abord la vraie voix (sous-titrée). Très vite, on passe à la version française... avec une déception pour ceux qui ont encore en mémoire le phrasé d'Huggy : ce n'est pas la voix de doublage d'origine... et pour cause : le comédien Albert Augier, qui présidait à cette tâche, est décédé en 2007.

   L'épisode n'en est pas moins fort plaisant, avec ses multiples clins d'œil et des seconds rôles toujours aussi piquants. (Deux d'entre eux, le médecin-légiste Dejax et le brigadier-chef Baudemont, sont les héros de deux "pastilles" : La Bonne allure et Knock Knock... Et, quand y en a plus, y en a encore, avec un petit bêtisier sympatoche.)

samedi, 20 janvier 2018

"Cherif" perd son étoile

   Albdelhafid Metalsi, qui incarne le héros éponyme de la série diffusée sur France 2, a en quelque sorte rendu la sienne (d'étoile... de shérif !), puisqu'on voit le capitaine de police lyonnais démissionner dans l'épisode 5 de la saison 5.

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   Mais c'est d'une autre étoile que je voulais parler, l'actrice Carole Bianic, qui interprétait jusque-là la partenaire du héros. On vient d'apprendre qu'elle quittait la série. Le prétexte est une grossesse, mais cela aurait pu facilement se gérer en décalant le tournage d'une partie de la saison, ou en recourant à une astuce scénaristique, le temps que la comédienne reprenne son rôle.

   Peut-être les scénaristes étaient-ils à court d'idée pour faire évoluer la relation entre les deux héros (Kader et Adeline), qui ont fini par coucher ensemble et entamer une relation stable. Il semble que Carole Bianic ait voulu prendre du champ, à l'image d'Odile Vuillemin qui, il y a un peu plus d'un an, a quitté (à mon grand regret) la série Profilage (diffusée sur TF1), ce qui lui a d'ailleurs fait perdre une bonne partie de son charme à mes yeux. (Je ne la regarde plus.)

   Concernant Cherif, la suite pourrait ne pas manquer d'intérêt. Depuis le début de la saison 5, les scénaristes ont été assez habiles pour glisser dans les enquêtes du capitaine une nouvelle collègue venue de la brigade des mineurs, Roxane Le Goff.

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   Je trouve que, dans le rôle, Aurore Erguy s'en sort très bien. Grâce aussi aux personnages secondaires qui continuent à pimenter les épisodes, la série pourrait continuer sur sa lancée.

mercredi, 03 janvier 2018

Médiocrité journalistique

   Aujourd'hui, alors que j'étais en voiture, j'écoutais ma radio d'information préférée. Après un flash, un entretien a été diffusé. L'invité représentait la fédération française de golf, me semble-t-il. Sa venue se justifiait par la prochaine tenue en France d'une prestigieuse compétition, la Ryder's Cup.

   Mais voilà-t-y pas que l'invité se permet d'affirmer que le golf est le premier sport individuel de France... et même du monde ! Il a fini par donner des chiffres : 400 000 licenciés (pour la France) et, au total, 800 000 pratiquants. Le problème est que ces données ne font pas du golf le premier sport individuel de notre pays, ce qu'un des journalistes présents aurait dû rappeler aux auditeurs.

   Si l'on se réfère à des statistiques de 2014, le tennis, l'équitation et le judo viennent avant le golf... et encore, on ne compte pas tous ceux qui pratiquent la marche, la natation, le jogging ou le vélo pour le plaisir. Même avec 400 000 licenciés et 800 000 pratiquants, le golf est très loin d'occuper la première place des sports individuels.

   On peut compléter par des statistiques plus récentes, disponibles pour la plupart des sports français. En nombre de licenciés, le tennis est loin devant, avec plus d'un million (contre 400 000 au golf, rappelons-le). L'équitation culmine à presque 700 000 licenciés et le judo à environ 600 000. Cela fait beaucoup de démentis possibles à l'affirmation de l'invité de France Info, qui a pu tranquillement développer sa propagande son discours, les journalistes n'étant visiblement là que pour lui servir les plats.

   De manière générale, je suis agacé par la médiocrité de certains programmes d'information radiophonique. Beaucoup de journalistes ne sont que des animateurs, qui visiblement travaillent peu leurs sujets et ne sont pas dotés d'une grande culture personnelle. Les sujets abordés sont trop souvent survolés.

   PS

   Un peu plus tard dans la journée, une représentante d'ATTAC n'a pas bénéficié du même traitement de faveur. Le journaliste qui l'a interrogée l'a un peu contredite, ce qui l'a obligée à préciser son argumentation... et c'était très bien comme ça. Une bonne radio d'information doit un peu titiller les neurones et non pas se contenter de déverser du liquide vaisselle dans les oreilles de ses auditeurs.

Le Nouveau Magazine Littéraire

   L'ancienne revue consacrée à l'écriture et aux écrivains s'est transformée en magazine sociétal, toujours un brin littéraire. J'ai eu l'occasion de lire le premier numéro de la nouvelle formule, qui ne manque pas d'intérêt :

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   L'article qui a le plus retenu mon attention est celui intitulé "Une famille française". Marc Weitzmann y traite du cas de la famille Merah. Il cite notamment un enregistrement réalisé lorsque la mère de Mohamed est venue rendre visite en prison au frère de celui-ci, Abdelkader.

   Il a été question de ces propos lors du récent procès qui a vu le frère du terroriste se faire condamner à une peine relativement légère. (Il risque de se retrouver dehors dans quelques années...) A ceux qui ignoreraient ces propos, je conseille la lecture de l'article, pour mieux comprendre l'obscurantisme et la haine qui animent certains membres de cette famille.

   Mais, s'il s'arrêtait à cela, l'article n'aurait rien de particulièrement remarquable. Il tente de dresser un profil psychologique des membres de la famille, en se fondant sur ce que les enquêtes ont mis au jour et sur ce que certains ont déclaré (ou écrit, pour le fils aîné, qui s'est éloigné de sa famille d'islamo-fascistes).

   On découvre un père délinquant algérien et polygame, qui cognait allègrement sur ses fils, qui ont ensuite reproduit la violence paternelle. On découvre aussi le fanatisme d'une mère dont on a récemment tenté de nous faire avaler un portrait humaniste. C'est peut-être cette mère qui a encouragé plusieurs de ses enfants à faire du petit dernier (Mohamed) leur souffre-douleur. Le plus acharné fut sans doute Abdelkader, celui qui allait par la suite devenir une sorte de guide spirituel intégriste. Plus intéressant encore, s'appuyant sur une psychanalyste, le journaliste évoque la relation trouble entre les deux frères, relation faite de sado-masochisme... et peut-être d'homosexualité incestueuse refoulée(?).

   En élargissant son propos, l'auteur étonnera peut-être certains lecteurs en affirmant que les familles de djihadistes se ressemblent souvent et que celle de Mohamed et Abdelkader Merah n'est sans doute pas si exceptionnelle que cela. Je ne sais pas s'il faut s'en réjouir...

   Un peu plus loin, c'est Edgar Morin qui est sur la sellette. On a droit à un entretien guère palpitant avec Raphaël Glucksmann. Je conseille plutôt la lecture de la mise au point consacrée à sa relation avec le fourbe Tariq Ramadan.

   La suite du magazine contient quantité de conseils de lecture... et quelques analyses cinématographiques, dont une de l'univers de Star Wars, à l'occasion de la sortie du film Les Derniers Jedi.

mardi, 02 janvier 2018

Tropisme états-unien

   Les séries américaines, en plus d'être souvent (pas toujours) divertissantes, sont un miroir (parfois involontaire) de la société de ce pays ou de la vision du monde qui y prédomine. J'ai pu encore le constater en visionnant les premiers épisodes de Salvation, actuellement diffusée sur M6.

   L'habillage visuel est très réussi, bien qu'un peu tape-à-l'oeil. L'ambiance d'une série d'anticipation est bien campée. Se pose quand même un problème de vraisemblance : presque tous les postes à responsabilité (publics et privés) sont tenus par des trentenaires ou de jeunes quadragénaires... Les personnes âgées de plus de cinquante ans (qui pourtant jouent un rôle déterminant dans notre monde) sont quasiment exclues de cette fiction.

   Mais c'est un autre détail qui a attiré mon attention. Dans le quatrième épisode de la saison 1 (vers la seizième minute), un planisphère apparaît dans un coin de l'écran, quand il est question de la sélection des 160 individus nécessaires à la reconstruction d'une société humaine sur Mars :

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   Zoomons sur la carte :

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   Les pourcentages peuvent correspondre à la part de la population mondiale vivant sur chaque continent, ou à la part de chaque continent dans le groupe des 160 (ce qui revient un peu au même). Le tropisme états-unien apparaît déjà : au lieu de se contenter d'une donnée chiffrée pour tout le continent américain, celui-ci est divisé en deux parties (grosso modo : l'Amérique anglo-saxonne et l'Amérique latine).

   Certains de ces nombres m'ont fait tiquer. Du coup, je suis allé sur le site de l'INED, histoire de vérifier leur validité. Ô surprise ! Certains sont faux. Il s'avère que le poids de la population nord-américaine est considérablement surévalué (estimée à 21 % du total, au lieu de 5 %). C'est aussi le cas de la population européenne (même en y incluant les Russes).  La conséquence est que le poids de la population asiatique est considérablement sous-évalué, puisqu'il est estimé à 29 % du total, contre près de 60 % dans la réalité ! (Sur le trombinoscope qui jouxte la carte, on constate la même surreprésentation de visages "de type européen" et la sous-représentation de faciès "de type asiatique"...) Voici ce à quoi aurait dû ressembler le planisphère :

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    Avis aux amateurs : c'est dans ce quatrième épisode que l'on découvre le sens caché du titre de la série. Sinon, le samedi, à la même heure, je recommande plutôt Agent Carter (sur TMC), une production originale, qui mêle ambiance de Guerre froide, science-fiction et un poil d'univers de super-héros. Si aucune de ces propositions ne vous convient, il reste l'exaltante possibilité de se rendre dans une salle obscure !

   PS

   Un autre détail est l'objet d'un biais de traduction. A deux reprises dans ce quatrième épisode, il est question d'un document exceptionnel, une des versions d'origine d'un texte célèbre, version que l'entrepreneur Darius Tanz acquiert lors d'une vente aux enchères et qu'il destine à être préservée pour les générations futures :

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   Dans la version française, on entend qu'il s'agit de la Déclaration des Droits de l'Homme. Le public hexagonal déduit que c'est celle de 1789... sauf que l'exemplaire qui est montré à l'écran est placé sous l'égide du Congrès des Etats-Unis (souligné en rouge par moi sur la capture d'écran). En réalité, il s'agit du Bill of Rights, les dix premiers amendements à la Constitution des Etats-Unis, adoptés en 1791, et dont la traduction en français donne "Déclaration des droits".

vendredi, 29 décembre 2017

Le loup au diable Vauvert

   ... mais, hélas, cela ne veut pas dire qu'il s'éloigne de nous, puisque Vauvert est une commune du département du Gard (frontalier de l'Aveyron), où la présence du loup serait en train de se développer, selon un passionnant dossier publié dans le dernier numéro de La Gazette de Montpellier :

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   (Notez que les auteurs ont suivi grosso modo les limites de l'ancienne région Languedoc-Roussillon, preuve que, du côté de Montpellier, on n'a toujours pas digéré la fusion-acquisition avec Midi-Pyrénées...)

   Sur la carte, j'ai entouré (approximativement) les zones aveyronnaises concernées. On peut regretter que les auteurs n'aient pas tenu compte d'un récent rapport de l'INRA (dont il a beaucoup été question le mois dernier), qui confirme le renforcement de la présence lupine aussi bien sur l'Aubrac que sur le Larzac... et même à proximité de Millau.

   D'ailleurs, une partie du dossier va dans ce sens. Un entretien avec José Bové évoque la sous-estimation du nombre de loups... à mon avis volontaire, pour limiter les "tirs de prélèvement". Si l'on tenait compte de la situation réelle dans les zones pastorales, on devrait autoriser l'abattage de davantage de bêtes (des loups, hein, parce que du côté de l'attaque des brebis, aucun véritable frein ne semble devoir être posé aux appétits de canis lupus lupus).

   Les amateurs de curiosité découvriront peut-être dans ce dossier une photographie prise l'an dernier sur l'Aubrac (par Manoel Atman), celle d'une louve "pleine" (c'est-à-dire sur le point de mettre bas) :

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   Et dire qu'officiellement, on continue à affirmer qu'il n'y a qu'un seul loup dans le Nord Aveyron !

   Le dossier comporte aussi deux intéressantes cartes historiques, une présentant le nombre de victimes humaines des attaques de loup, par département, entre 1271 et 1918. La seconde carte répertorie les communes où des loups ont été tués en 1796-1797... Impressionnant ! (Pour les voir, il va falloir acheter le magazine !)

   D'autres articles méritent la lecture dans ce numéro de La Gazette de Montpellier. L'un d'entre eux traite du Cévenol, le train reliant le Languedoc à Clermont-Ferrand. Un autre évoque l'histoire d'un antipoison, dont la conception a nécessité des ingrédients de provenance parfois lointaine...

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mardi, 26 décembre 2017

Qui était Fernand Forestier ?

   Ceux qui l'ignoraient ont pu l'apprendre récemment en lisant la presse aveyronnaise, tout d'abord La Dépêche du Midi, avec un article publié il y a une dizaine de jours, article repris presque mot pour mot avant-hier dans Centre Presse :

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   Originaire du Bassin (plus précisément d'Auzits, ce qui explique la diligence de La Dépêche), il est devenu gendarme. On remarque qu'il a officié en Tunisie avant d'être nommé dans le Lot, à Figeac. Ce n'est d'ailleurs pas très loin de là qu'il a été fusillé le 8 juin 1944 : à Gramat, selon la fiche (hélas entachée d'une faute) disponible sur le site "mémoire des hommes" :

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   C'est dans La Dépêche que l'on peut trouver la plus grande précision quant aux auteurs de la fusillade qui a coûté la vie à Fernand Forestier : ce sont des membres de la tristement célèbre division SS "Das Reich", qui, le lendemain, frappait à Tulle, avant de se déchaîner à Oradour-sur-Glane.

   Pour les habitants d'Auzits, ce gendarme résistant n'est pas un inconnu, puisque son nom figure sur le monument aux morts de la commune :

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   Pour la petite histoire, signalons que ledit monument a été conçu par un architecte qui avait pignon sur rue à l'époque : André Boyer. On lui doit aussi les monuments de Bertholène, Buzeins et Recoules-Prévinquières. A Rodez, il est connu pour avoir donné sa physionomie actuelle au Broussy... et pour avoir projeté de transformer la zone du Foirail, entre la place d'Armes et la gare de Paraire.

dimanche, 24 décembre 2017

Médiocrité enseignementale

   Ce n'est qu'aujourd'hui qu'une anecdote croustillante a été portée à ma connaissance, par un article de La Dépêche du Midi. Les faits se sont déroulés mercredi 13 décembre dernier. Les professeures d'une école (publique ?) de Gironde ont emmené leurs chères têtes blondes (brunes, rousses...) au cinéma, sans doute dans un but hautement éducatif.

   Il est toutefois permis d'en douter quand on sait que le film au programme était L'Etoile de Noël, une animation certes très divertissante, mais dont l'intérêt pédagogique ne saute pas aux yeux. Cela ressemble bigrement à une sortie-prétexte, histoire de ne pas avoir à faire cours une demi-journée par semaine. (Entre le transport aller, l'installation dans la salle, la durée du film, le pipi de la fin et le retour au bercail, on a bien 3 heures - 3 heures 30 d'écoulées...) Nous savons bien combien le retour à la semaine de quatre jours et demi, imposé sous le quinquennat Hollande, a suscité d'oppositions égoïstes parmi certains parents, enseignants et élus locaux...

   Rappelons que, même avec le passage de 4 à 4,5 jours de classe, les petits Français font partie des élèves européens (et même de l'OCDE) à avoir le moins de jours d'école dans l'année. Ailleurs (comme c'était la règle en France il y a quelques générations de cela, à une époque où l'école primaire remplissait mieux sa mission qu'aujourd'hui), les cinq jours complets sont de mise, mais avec un emploi du temps quotidien moins chargé. Voilà qui permet aux élèves plus lents (ou moins doués) d'assimiler les notions que les enfants favorisés arrivent à ingurgiter en quatre jours de scolarité chargés.

   Mais, en Gironde comme parfois dans l'Aveyron, l'élite enseignementale fait de la résistance... en emmenant les gamins au cinéma le mercredi... ou le vendredi, comme j'ai déjà pu le constater à Rodez. Entendons-nous bien : le cinéphile que je suis accepte évidemment que ce genre de sortie fasse partie des activités pédagogiques. C'est de plus enrichissant sur le plan culturel. Encore faut-il au préalable avoir vu le film que l'on destine aux bambins... et préparer une (plusieurs ?) séance(s) de travail en lien avec la sortie. Visiblement, ça n'a pas été le cas de ces profs girondines quelque peu pusillanimes.

   Sur la Toile, la droite identitaire s'est déchaînée, contribuant à orienter le débat sur le thème de la laïcité. Mais le véritable problème est le manque de conscience professionnelle de ces enseignantes.

   PS

   Curieusement, dans les écoles privées (catholiques), la projection de ce film n'a soulevé aucun problème, notamment dans le Morbihan (à Carentoir) et dans le Finistère (à Brest).

samedi, 23 décembre 2017

Le Dalaï-lama bientôt en Chine ?

   C'est la question que se pose (entre autres) le correspondant du Monde en Chine, Brice Pedroletti, dans un article paru il y a deux jours. Le guide spirituel des Tibétains aurait manifesté le désir de revenir en Chine... et Pékin ne s'y serait pas montré hostile. Etonnant, non ?

   Le Dalaï-lama souhaiterait se rendre sur une montagne sacrée pour les bouddhistes, qu'ils soient tibétains, chinois ou mongols : le Wutaishan. Or, cette montagne se trouve dans la province du Shanxi, dans l'est de la Chine, en dehors donc de la zone de peuplement tibétain (et donc, a fortiori, à l'extérieur de la région autonome du Tibet). Voilà qui pourrait expliquer l'accueil non défavorable des autorités chinoises.

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   Sur la carte ci-dessus, j'ai placé un losange jaune approximativement à l'emplacement du Wutaishan, dans le Shanxi. Un autre losange se trouve, dans le sud, dans la province du Yunnan, à Kunming, où l'envoyé du Dalaï-lama aurait été autorisé à se rendre. Là encore, c'est en dehors de la région autonome du Tibet et au-delà des limites du Tibet historique revendiqué par certains indépendantistes tibétains.

   Une troisième zone est coloriée en jaune : le nord-ouest de la province du Yunnan, où l'envoyé du Dalaï-lama (selon l'article) aurait aussi été autorisé à se rendre. Ici, on est toujours en dehors de la région autonome, mais à l'intérieur du "Tibet historique", dans un de ces fragments que les autorités chinoises ont disjoints du noyau tibétain pour perturber le combat politique de leurs adversaires. C'est incontestablement une faveur faite à l'envoyé du Dalaï-lama, qui est originaire de cette région. (Pour la petite histoire : on y trouve un district qui a été rebaptisé Shangri-la pour attirer les touristes...)

   Précisons que, vis-à-vis des touristes étrangers, les organismes du "pays du milieu" (comme celui-ci) continuent à présenter la région autonome comme le seul et unique territoire tibétain :

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   Pékin surveille comme le lait sur le feu ces régions tibétaines "de l'extérieur", où se sont déclenchés, en 2008, la plupart des mouvements de contestation de la domination chinoise, comme en témoigne une carte publiée naguère dans Courrier International :

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   2018 sonnera le dixième anniversaire de ces événements. Il est possible que les ouvertures faites au Dalaï-lama soient une manière de désamorcer d'éventuelles velléités de "célébration" des mouvements de protestation. Du côté du guide bouddhiste, le choix du lieu de pèlerinage pourrait être interprété comme une preuve de sa volonté de conciliation.

mercredi, 13 décembre 2017

Donald Trump désavoué

   Les résultats de l'élection sénatoriale partielle organisée dans l'Alabama sont tombés : le candidat républicain, soutenu par le président Trump a, fait exceptionnel dans cet Etat du Sud réputé très conservateur, été devancé par son adversaire démocrate, d'un peu plus de 20 000 voix (d'après The New York Times).

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   Pour être honnête, rappelons que le vaincu, Roy Moore, n'était pas le premier choix de Donald Trump. Lors de la primaire républicaine, il avait soutenu son concurrent, Luther Strange, qui occupait (temporairement) le siège laissé vacant par Jeff Sessions, le sénateur titulaire nommé ministre de la Justice par Trump.

   Quand on compare ces résultats à ceux de la présidentielle de l'an dernier, on constate que l'électorat démocrate est quasiment stable, alors que le vote républicain a (depuis 2016) connu une forte hémorragie, le nombre de voix ayant été divisé par deux !

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   Certains vont me dire que ce n'est pas la même élection et qu'il est possible que la partielle ait moins mobilisé l'électorat. La remarque serait fondée si le vote démocrate avait lui aussi connu un effondrement, ce qui n'est pas le cas. On peut aussi comparer avec une autre élection sénatoriale, qui s'est déroulée l'an dernier en Alabama :

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   Les résultats sont quasi identiques à ceux de la présidentielle. Clairement, un an plus tard, environ la moitié de l'électorat républicain a déserté le vote, choisissant de s'abstenir. Peut-être est-ce dû à la personnalité du candidat républicain, très controversée ? Dans ce cas, pourquoi une part de ce vote n'a-t-elle pas basculé en faveur du rival démocrate ? Peut-être parce qu'il s'agissait d'envoyer un message au président.

   Les plus observateurs d'entre vous ont peut-être remarqué la relative constance du vote dans les comtés. Dans cet Etat farouchement républicain, la majorité des circonscriptions sont en rouge, couleur du parti auquel appartient Donald Trump. Seuls quelques comtés, plus urbains, sont en bleu (en particulier ceux de Birmingham et Montgomery), signe que le vote démocrate y est majoritaire. C'est un phénomène que j'avais déjà constaté à propos du vote Clinton l'an dernier et à propos du vote Obama, en 2008. A l'époque, je n'avais pas trouvé toutes les réponses à mes questions. Je crois y être parvenu aujourd'hui.

   Dans un premier temps, j'ai été frappé par certaines coïncidences. Les comtés où le vote démocrate est traditionnellement prononcé sont des territoires marqués par la présence de prairies :

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   De manière tout aussi surprenante, ces comtés sont aussi ceux où les ressources en lignite sont abondantes :

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   Mais la raison la plus vraisemblable de ce vote démocrate est la répartition ethnique de la population : ce sont les comtés où la part des Afro-Américains est la plus élevée :

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   Et puis soudain, le nom des villes a fait tilt dans mon esprit. Ces comtés démocrates sont ceux où Martin Luther King a mené son combat contre la ségrégation, notamment dans les villes de Montgomery et Selma (comme le rappelle un film sorti il y a deux ans). Notons qu'en 2017 (comme le montre la comparaison avec la première carte), le vote démocrate l'a emporté dans des comtés plus excentrés, mais toujours assez urbanisés (Hunstville, Mobile) et comportant une importante minorité noire. Précisons que le vainqueur de l'élection, Doug Jones, est procureur à Birmingham et qu'il a poursuivi des membres du Ku Klux Klan auteurs de crimes racistes.

   Même si, du point de vue des chiffres, cet étonnant résultat électoral est d'abord dû à la mise en retrait d'une part de l'électorat républicain, il constitue une sorte de butte-témoin des tensions ethniques qui sont encore aujourd'hui à l'oeuvre aux Etats-Unis.

samedi, 02 décembre 2017

Le principe d'Heisenberg

   Que l'on se rassure. Je ne vais pas me lancer ici dans un exposé de physique nucléaire. Cette notion scientifique est en fait le titre d'un album de bandes dessinées, le dernier mettant en scène Guy Lefranc, journaliste-enquêteur créé par Jacques Martin (pas l'ancien animateur, hein, le scénariste auquel on doit, entre autres, les aventures d'Alix).

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   Je ne suis pas un lecteur de cette série. Je m'y suis intéressé parce que cet épisode tourne autour d'un double meurtre horrible commis dans une région réputée sauvage et peu accessible... l'Aubrac ! L'action se déroule dans les années 1950, sous la IVe République donc, mais, surtout, en pleine Guerre froide.

   Comment un journaliste parisien, dont l'employeur suit plutôt les affaires "sérieuses" (Le Globe est sans doute un décalque du quotidien Le Monde), est-il amené à se rendre en plein Rouergue ? La raison est amenée de manière assez cocasse :

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   L'une des connaissances de Guy Lefranc est ce qu'on pourrait appeler un "Aveyronnais de Paris", retourné au pays pour des vacances bien méritées... mais sa conscience professionnelle, elle, n'est pas en congé !

   L'un des mérites de cette bande dessinée est d'apprendre à ceux qui l'ignoreraient quel périple cela représentait à l'époque de relier en voiture la capitale au Nord Aveyron. Cela nous vaut quelques images de carte postale, à Nevers, Moulins, au viaduc de Garabit et, finalement, à Saint-Geniez-d'Olt (aujourd'hui Saint-Geniez-d'Olt-et-d'Aubrac). En chemin, le héros a croisé quelques bêtes à cornes caractéristiques. Une fois arrivé à bon port, il déguste un aligot. Cette péripétie gastronomique donne naissance à une note de bas-de-page, pour expliquer au commun des mortels (non aveyronnais) en quoi consiste ce mets succulent. Je laisse à chacun apprécier la qualité de l'information donnée...

   Très vite, l'intrigue policière reprend le dessus. Espionnage, meurtres, dissimulation et coups foireux sont au programme, le tout représenté dans un style très classique, proche de la "ligne claire" chère à Hergé. J'ai toutefois été un peu gêné par l'abondance de scènes de nuit, certes parfaitement justifiées par le déroulement de l'histoire, mais qui réclament une excellente luminosité pour être appréciées à leur juste valeur.

   Au cours de ses aventures, Guy Lefranc croise une veille connaissance à lui, employée par la presse à sensation, qui se délecte des faits divers les plus sordides. Ce Marco di Angelo est dessinateur à ses heures. On nous propose d'ailleurs l'un de ses croquis :

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   L'intrigue est vraiment fouillée. Elle tient en haleine jusqu'au dénouement, qui survient dans une belle bâtisse que tout le monde reconnaîtra, d'autant plus qu'elle a été au coeur d'une autre bande dessinée, parue il y a quelques années :

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   PS

   Je me suis rappelé un détail croustillant : l'expression graphique du bruit fait par un pistolet fonctionnant avec un silencieux :

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lundi, 27 novembre 2017

France Inter dans l'Aveyron

   Cette semaine est diffusée la série d'émissions du Jeu des 1000 euros enregistrée il y a quelques semaines dans le nord du département. Cela a commencé aujourd'hui à Mur-de-Barrez avec des candidats brillants, l'un entre eux portant le nom Lafortune... de bon augure !

   Auparavant, l'émission Carnets de campagne s'est intéressée au sud du département (Saint-Jean-d'Alcapiès et Saint-Affrique). On peut juste regretter que Philippe Bertrand ait présenté Villefranche-de-Rouergue comme la deuxième plus importante ville du département (après Rodez)... Les Millavois ont dû bondir de leur siège !

dimanche, 26 novembre 2017

Le Pérail sur France Info

   Cet après-midi, j'étais en train de me livrer à l'exaltante activité qui consiste à repasser du linge lorsque j'ai entendu, sur la radio publique d'information, un sujet consacré au fromage aveyronnais.

   J'ai posé le fer, lâché le linge et monté le son. Dans un premier temps, je me suis réjoui qu'une radio nationale évoque ce produit de la gastronomie aveyronnaise. Mais j'ai fini par tiquer devant quelques approximations. Elles concernent principalement l'obtention des labels AOC (au niveau français) et AOP (au niveau européen). Le journaliste les considérait comme acquises (et même depuis 2015 pour l'AOC), ce qui, sauf erreur de ma part, n'est pas (encore) le cas.

   Sur le site de l'INAO, on peut télécharger le dossier du projet d'AOP. Il était soumis à consultation publique jusqu'en mai dernier. Depuis, on n'a pas de nouvelles officielles, même si les promoteurs avaient l'espoir d'aboutir pour le Salon de l'agriculture 2018.

   Une incertitude demeure aussi concernant l'aire géographique (la zone de collecte du lait, qui induit la localisation des élevages de brebis laitières). Sur le site créé par les promoteurs du Pérail figure une zone très étendue :

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   Elle ressemble bigrement à une autre aire géographique, celle de l'AOP Roquefort, qui s'étend elle aussi sur six départements (principalement l'Aveyron, le Tarn et la Lozère, avec une portion du Gard, de l'Hérault et de l'Aude) :

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   A l'origine, cela pouvait paraître cohérent : les animaux élevés sont les mêmes (des brebis Lacaune), la région agricole aussi (les grands causses du sud du Massif Central). Mais, dans le dossier proposé à consultation par l'INAO, la zone est plus restreinte :

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   Les portions héraultaise et tarnaise sont plus petites, et l'Aude a disparu de la carte.

   Je termine par une autre approximation. Dans le reportage de France Info, une confusion (très répandue) est faite entre le Pérail, fromage au lait cru, et Lou Pérac, une marque de Lactalis (qui possède aussi Société), mais une marque d'un fromage (industriel) au lait... pasteurisé. Ce n'est pas du tout pareil !

   Je pense d'ailleurs que, derrière la démarche des éleveurs pour obtenir l'AOP, il y a la volonté de s'émanciper de l'influence de Lactalis-Société, qui domine la production de Roquefort, mais ne valorise pas suffisamment ce délicieux fromage au lait cru, selon certains éleveurs. Du coup, un petit groupe d'irréductibles (au départ) a voulu créer un nouveau produit et obtenir pour celui-ci un label qui permette d'éviter la confusion avec la marque du grand groupe. Ce projet semble sur le point d'aboutir, mais la radio publique est peut-être allée un trop peu vite en chemin.

lundi, 20 novembre 2017

Une vacherie du Salon de l'agriculture

   Une fois n'est pas coutume, hier, le quotidien aveyronnais a poussé un petit coup de gueule contre la manière dont la toute nouvelle notoriété de Haute (la vache Aubrac égérie du Salon de l'agriculture 2018) est gérée :

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   Quand je pense qu'une agence de com' est chargée de l'image de Haute... Si cela se passe comme avec Fine l'an dernier, notre vache aveyronnaise devrait tenir un compte twitter... ou quand l'apparence et le clinquant priment sur le contenu.

   Sur la même page du journal, on peut lire un vrai faux entretien avec la vache Aubrac, qui se reconnaît comme principal défaut une "tendance à ruminer un peu trop souvent" ! Presque tout l'article est du même tonneau, vraiment drôle.

   Le tout est complété par un dessin de Z'lex, qui ironise sur le statut de vedette de Haute :

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   Notons que le dessinateur officie aussi dans La Volonté Paysanne, où il lui est déjà arrivé (notamment en 2014) de caricaturer la plus célèbre bête à cornes aveyronnaise :

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vendredi, 17 novembre 2017

Phagocytose cinématographique

   Hier après-midi, quand la nouvelle est tombée, en Aveyron, elle a fait l'effet d'un coup de tonnerre : le groupe CGR va absorber son concurrent Cap Cinéma et ainsi devenir provisoirement (en nombre d'établissements, pas en nombre d'écrans) le premier exploitant de salles de France.

   Immédiatement une foule de questions se pose. Les multiplexes (tel celui de Rodez, inauguré en 2013) vont-ils changer de nom ? La programmation va-t-elle subir le contrecoup de cette sorte de fusion-acquisition ? On peut nourrir quelques inquiétudes quand on se souvient de la médiocrité de l'offre cinématographique des salles d'Albi, quand CGR gérait le Lapérouse et le Tivoli. (Pour nos amis tarnais, c'est donc une sorte de retour aux sources, puisque les cinémas albigeois, récemment passés des mains de Cinémovida à celles de Cap Cinéma, étaient auparavant sous l'étendard CGR. Ce groupe n'aura toutefois pas eu à financer la modernisation des salles albigeoises, ni la construction et l'aménagement du complexe des Cordeliers...)

   Notons que Philippe Dejust, le PDG de Cap Cinéma, n'a pas vendu l'intégralité des établissements de son groupe. De nombreux médias ont cité le nombre de 22 sur 24, ce qui a suscité quelques inquiétudes, notamment à Beaune, en Côte-d'Or. CGR aurait-il refusé d'acquérir quelques "canards boiteux", qui se retrouveraient désormais isolés, sans l'appui d'un grand groupe ? En réalité, Philippe Dejust a voulu conserver ses "petits bébés", les cinémas de Blois.

   Enfin, l'analyse des emplacements des cinémas des deux groupes (en noir ceux de CGR, en rouge ceux de Cap Cinéma) débouche sur une conclusion aussi surprenante qu'évidente : ils sont très complémentaires :

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   En aucun lieu Cap Cinéma et CGR ne sont véritablement concurrents. C'est dans l'agglomération parisienne que leurs établissements respectifs sont les plus proches. Mais, dans ce cas, la clientèle est tellement abondante qu'il serait malhonnête d'affirmer qu'ils se gênent mutuellement. Finalement, ce rapprochement pourrait s'avérer fructueux. Tout dépend de la manière dont la fusion va être gérée.

mercredi, 15 novembre 2017

Cocori... meuh !

   Les spéculations allaient bon train. Depuis que l'on avait su que la figure emblématique du prochain Salon de l'agriculture serait une vache Aubrac, tout le monde se demandait quel élevage allait être distingué par le choix de l'animal (forcément photogénique).

   La logique voulait que la vache soit choisie dans le bassin d'origine de la race, à savoir la région naturelle se trouvant à cheval sur les départements de l'Aveyron, du Cantal et de la Lozère. Certes, depuis une dizaine d'années, on voit ces ravissantes bêtes à cornes dans un nombre croissant de départements français (et même à l'étranger), mais il ne pouvait être question d'ignorer le berceau de la race.

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   En Aveyron, il était non moins évident que c'était une bête locale qui devait être désignée. Même si les liens sont forts avec les voisins cantaliens et lozériens, il apparaissait logique qu'hommage soit rendu au travail de fond fourni d'abord sur le versant rouergat. Un jour, peut-être, on saura quels trésors de lobbying la mafia communauté des Aveyronnais de Paris a déployés pour soutenir une candidate issue de la Mère Patrie.

   Enfin, aujourd'hui, la décision est tombée : l'heureux élu est un GAEC situé sur la commune de Curières, voisine de Laguiole, frontalière du Cantal... et quasi-frontalière de la Lozère !

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   Comme quoi, le hasard fait bien les choses ! Il le fait d'autant mieux que cette exploitation agricole est gérée par un couple de trentenaires, un beau symbole pour une agriculture en quête de renouvellement.

   Quant à la vache, elle s'appelle Haute, un nom tout à fait adapté à cette zone de montagne.

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dimanche, 12 novembre 2017

Un simple oubli ?

   Ce ne sont que quelques lignes, perdues dans l'un des nombreux articles du Canard enchaîné paru mercredi dernier (en page 2). Que disent-elles ? Que certain-e-s député-e-s récemment élu-e-s ont eu besoin de retoucher leur déclaration d'intérêts et d'activités, accessible sur le site de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (l'une des bonnes réformes de la présidence Hollande).

   Pourquoi donc ? Eh bien, ces élu-e-s de la République ont négligé d'indiquer la profession qu'ils-elles exerçaient avant de devenir député-e-s, ce qui est pourtant une obligation, à laquelle est consacré le premier paragraphe de cette déclaration :

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   J'ai pris l'exemple d'une députée aveyronnaise, Anne Blanc, infirmière de son état, dont la fiche n'a pas été mise à jour à l'heure où j'écris ces lignes. (Nul doute que la rectification ne saurait tarder.) Le plus cocasse est que sur la page Facebook de LREM figure une publication remontant à mai dernier, présentant la candidate aux législatives comme une infirmière :

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   On va me dire que ce ne sont là que des peccadilles en comparaison du comportement de certains rentiers de la République. Certes, mais, à la fin du printemps dernier, un grand mouvement de "dégagisme" a bénéficié à de nombreux candidats LREM. Il ne faudrait pas qu'ils oublient que, désormais, les électeurs ne supportent plus les petits (et grands) accommodements de leurs élus.

   L'autre intérêt de la lecture des déclarations est de pouvoir estimer le revenu total que leur procurent leurs différents mandats. (Là encore, merci Hollande pour la loi sur le non-cumul.) Ainsi en 2016, lorsque Mme Blanc était maire de Naucelle, présidente de la communauté de communes et conseillère départementale, elle touchait environ 5 500 euros bruts par mois (presque 1 900 en tant que maire, un peu moins de 1 600 de la communauté et 2 100 du Conseil départemental). La question qui se pose est : s'y ajoutait-il un revenu au titre d'infirmière ? Si oui, comment trouvait-elle le temps de tout faire ?

vendredi, 03 novembre 2017

Y a comme un loup

   Aujourd'hui, les quotidiens aveyronnais (notamment Centre Presse et Midi Libre) se sont faits l'écho d'un rapport de l'INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) consacré à l'étude de la compatibilité entre l'élevage ovin extensif et la présence du loup sur les grands causses aveyronnais. L'étude porte sur la majorité du territoire du PNR des Grands Causses, au total 45 communes du sud-est du département :

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   Précisons qu'au nord de la zone, seule une partie de la commune nouvelle de Sévérac-d'Aveyron est concernée : les anciennes communes de Sévérac-le-Château, Lapanouse et Lavernhe (Buzeins et Recoules-Prévinquières étant exclues).

   L'étoile verte est placée sur le territoire de la commune de Saint-Jean-et-Saint-Paul, où se trouve une unité expérimentale de l'INRA, depuis 1965. Entre l'Aveyron et l'institut, c'est donc une longue histoire d'amour... quelque peu perturbée ces dernières années par l'augmentation du nombre d'attaques dont sont victimes les ovins (trois rien qu'en avril dernier), à l'image de ce qui se passe à l'échelon national.

   D'après la version intégrale du rapport, à l'intérieur du périmètre d'étude, les attaques d'ovins et de caprins d'élevage (et le nombre de victimes) n'ont cessé de croître, depuis 2014 (date à laquelle la présence du loup en Aveyron est certifiée) :

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   Notons que les auteurs de l'étude ont eu l'honnêteté de distinguer les types d'attaques. Celles qui sont qualifiées de "loup non écarté" sont celles qui sont attribuées au loup (le contraire étant "loup écarté"). C'est important pour les éleveurs concernés, parce que cela donne droit à des indemnisations. (Mais celles-ci ne compensent pas la perte génétique d'un troupeau issu souvent de dizaines d'années de sélection, sans parler de la souffrance animale, un aspect de la question qui ne semble guère émouvoir les défenseurs acharnés du loup.) Quoi qu'il en soit, tous les types d'attaque sont en augmentation, que les responsables soient des loups, des chiens errants ou divagants. La présence de canis lupus n'est donc pas le seul problème qui se pose aux éleveurs de brebis. C'est l'occasion de rappeler que les maires sont tenus de faire appliquer le code rural, dans ce domaine comme dans les autres. C'est un aspect du problème qui, s'il ne doit pas faire oublier les dégâts provoqués le loup, est curieusement passé sous silence.

   J'ai quelque peu modifié l'histogramme du rapport de l'INRA pour permettre la comparaison de deux augmentations, celle du nombre total de victimes (en orange) et celle du nombre de victimes attribuées au loup (en rouge). C'est ce nombre-là qui connaît la plus forte hausse, peut-être parce qu'auparavant, on hésitait davantage à attribuer certaines attaques au loup. Il apparaît aussi que le nombre de victimes par attaque est en augmentation. Ce ne sont pas toutes des bêtes croquées par le prédateur ; dans le lot, on trouve notamment des brebis effrayées par la présence de celui-ci et qui se sont jetées d'un talus ou d'une falaise. (Ne rigolez pas, cela se produit plus fréquemment qu'on ne le pense. Les ovins peuvent rapidement adopter un comportement que nous jugerions irrationnel.)

   Les trois quarts des élevages d'ovins présents dans la zone ont fait l'objet de l'étude. Ce sont les plus importants (comptant chacun plus de 100 animaux reproducteurs), représentant au total plus de 98 % du cheptel ovin de la zone. En fonction de leurs caractéristiques, les élevages ont été classés en plusieurs catégories, chacune ayant été soumise à plusieurs scenarii fictifs... mais envisageables (quatre au total).

   La première conclusion importante est qu'au niveau des grands causses, une troisième zone (aveyronnaise) de présence permanente du loup est peut-être en train de se former. (Les deux premières se trouvent sur l'Aubrac et dans l'extrême-sud du département.) Dans deux communes (à Millau et Cornus), la présence du loup est considérée comme régulière. (Amis Millavois, ne vous emballez pas, le croqueur de moutons ne rôde pas dans la zone urbaine, mais dans la partie rurale de la Cité du gant, vaste de près de 170 km².) De plus, aucune des communes de la zone d'étude ne peut être considérée comme étant à l'abri d'une attaque de loup :

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   D'après la carte (ci-dessus) publiée dans la version intégrale du rapport, on s'aperçoit que seules des portions de quelques communes (en bleu) connaissent un risque faible (mais pas inexistant), la majorité du territoire étant soumise à un risque moyen (en orange), l'est du territoire (en brun) étant la zone la plus sensible... et c'est logique, puisque c'est une région limitrophe de la Lozère, département où le loup est encore plus menaçant... surtout quand des personnes mal intentionnées procèdent à un lâchage sauvage. (D'ailleurs, qu'en est-il de l'enquête à propos de cet acte délictuel ?)

   La suite de l'étude se concentre sur la viabilité (économique, écologique et sociétale) de l'activité d'élevage  selon le type d'exploitation et les mesures prises par les agriculteurs et les autorités. Les deux premiers scenarii sont fondés sur la mise en place d'une protection forte (avec clôtures, filets et chiens), les deux autres sur la minimisation du risque par une tactique de repli... quitte, dans le scenario 4, à sortir de l'AOP Roquefort !

   Les chercheurs ont effectué des simulations, aboutissant à une estimation des coûts directs (achat et entretien du matériel, des chiens, emploi de personnel supplémentaire...) et indirects (modification de l'organisation de l'exploitation, augmentation des achats de fourrage, baisse du prix du lait...), en partant du principe qu'on ne touchait pas au loup.

   Résultats ? En fonction du scénario adopté, de 25 % à 85 % des exploitations seraient désormais non viables (en incluant les aides publiques !), les scenarii de repli étant les moins "performants" sur le plan économique... avec, de surcroît les plus graves conséquences environnementales et sociétales : la fermeture de pans entiers du paysage et une perte en matière d'attractivité touristique. (Dans ces domaines, les conséquences sont aussi globalement négatives avec les scenarii 1 et 2.)

   Cependant, même avec des protections subventionnées, même avec une adaptation de l'élevage, ce sont 25 % à 40 % des exploitations qui ne seraient plus viables. Et encore, l'étude ne mesure pas l'augmentation de la pénibilité professionnelle, ni la perte d'attractivité du métier (déjà incontestable). Cerise sur le gâteau, les chercheurs sont partis du principe que, quel que soit le scénario, les mesures prises permettaient de contenir les attaques de loups...

   On en arrive donc à un constat proche de celui que faisait par exemple José Bové dès 2012 (et encore en 2015) : la progression du nombre de loups est incompatible avec le maintien d'un élevage extensif viable dans la région. Il convient donc, non pas d'exterminer, mais de limiter la présence de ce prédateur (dans une zone où il avait complètement disparu depuis 70 à 100 ans, rappelons-le)... sans oublier de lutter contre les dégâts provoqués par les chiens errants ou divagants.

samedi, 28 octobre 2017

Fermeture d'une autre librairie à Rodez

   L'année 2017 aura décidément été fatale au commerce de livres en tout genre à Rodez. Après la fermeture de la petite libraire Mot à Mot en mars dernier, c'est au tour de Cubik (ex-Culture BD) d'annoncer la baisse (définitive) du rideau pour le 1er décembre prochain. En quelques mois, c'est un pan de l'histoire économique récente de Rodez qui aura disparu.

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   Remontons un peu dans le temps. Sur le Piton, depuis des années, c'est la Maison du Livre (numéro 1 sur le plan) qui tient le haut du pavé. Fondée au sortir de la Seconde guerre mondiale, cette librairie (religieuse au départ) a un peu bougé dans la ville, puisque avant de s'installer Passage des Maçons (à la fin des années 1950), elle a été localisée boulevard Denys-Puech puis rue Louis Blanc (où se trouvent aujourd'hui les locaux de La Dépêche du Midi).

   En 2008, elle a profité de la récente fermeture du cinéma Le Family (le premier ouvert dans la ville, en 1922, dans les locaux de l'ancien couvent Notre-Dame !) pour récupérer le bâtiment et en faire une annexe dédiée à la papeterie et aux bandes dessinées (numéro 1 bis sur le plan). Il me semble que l'opération a été facilitée par la proximité capitalistique qui a autrefois existé entre les Cinémas de Rodez et la Maison du Livre. (Je crois aussi que le fait de récupérer l'espace du cinéma a permis de rapatrier le stock en centre-ville, alors qu'auparavant, un local était loué du côté du boulevard du 122e RI, à l'intersection de la rue Saint-Michel, tout à gauche du plan ci-dessus.) Voici l'aspect extérieur actuel, comparé à une vue ancienne (datant sans doute du début des années 1920, puisque Le Cheikh, avec Rudolph Valentino, est à l'affiche) :

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   La Maison du Livre se porte donc bien. Elle serait l'une des principales librairies indépendantes de la région Midi-Languedoc (la deuxième de l'ancienne Midi-Pyrénées)... et, en 2013, elle a racheté un établissement toulousain, Privat (preuve que la ville de Rodez n'est pas la seule où les librairies connaissent des difficultés).

   Si l'on remonte dans le temps, on constate que la situation était quelque peu différente à Rodez, il y a une vingtaine d'années. Place de la Cité (dans les locaux d'une actuelle agence de voyages, numéro 2 sur le plan) se trouvait la librairie-papeterie Majuscule, qui a fermé au tout début du XXIe siècle, l'activité papeterie étant relocalisée sous un autre nom, sur le tour de ville, boulevard Ramadier (numéro 2 bis).

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    Avec la fermeture de Mot à Mot, ouverte rue Saint-Cyrice (numéro 3) au milieu des années 1990, ce sont donc deux concurrents de la Maison du Livre qui ont disparu. Un troisième va bientôt fermer ses portes. En 2001, un jeune homme entreprenant (Rodolphe Cosson) ouvrait la première librairie de bandes dessinées de l'Aveyron, place du Bourg (numéro 4 sur le plan), dans ce qui fut la maison natale du peintre Maurice Bompard (anecdote rappelée par une plaque située au-dessus du magasin).

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   Je suis un client irrégulier, partageant mes achats avec l'annexe de la Maison du Livre (où je me suis par exemple procuré le dernier album des aventures d'Astérix). L'ouverture de celle-ci, en 2008, a dû porter un coup au chiffre d'affaires de l'ex-Culture BD. (Apparemment, en 2014, le bénéficie ne s'est monté qu'à 4 500 euros....)

   Mais je pense que c'est l'essor d'un autre concurrent qui lui a fait le plus de mal (à lui et aux autres) : l'Espace culturel Leclerc. Quand celui-ci a ouvert (lui aussi au tout début du XXIe siècle, me semble-t-il), il était beaucoup plus proche du centre-ville de Rodez, puisqu'il se trouvait entre le carrefour Saint-Eloi et le rond-point Saint-Félix (numéro 5 sur le plan), où il a été remplacé depuis par un "drive" du même groupe. L'emplacement semblait excellent : à proximité immédiate d'une zone à forte circulation, doté d'un parking gratuit (mais vite saturé), bientôt complété par une station d'essence. Là où les patrons de Leclerc ont eu du nez, c'est quand ils ont décidé de déplacer l'Espace culturel sur la zone du Comtal (à Sébazac-Concourès), à proximité de l'hypermarché inauguré en 2006. Ils ont compris qu'une part non négligeable de la clientèle veut se garer le plus près possible des commerces, quitte à faire de la route. Surtout, ne pas marcher !

   Quand j'habitais au Faubourg, il m'arrivait de me rendre à l'Espace culturel. Quand il a déménagé, j'ai décidé de réserver mes achats aux librairies du centre-ville. Mais j'aurais peut-être dû me rendre plus souvent chez Cubik. Incontestablement, c'est l'établissement le plus "pointu" en matière de BD sur le Grand Rodez. J'espère que les associés ont trouvé une solution de repli, sur le plan professionnel.

vendredi, 20 octobre 2017

Astérix et la Transitalique

   Voici donc le 37e album de l'une des plus célèbres séries de BD francophones. Aux manettes, Jean-Yves Ferri et Didier Conrad tentent de prolonger la magie des aventures gauloises, qui, cette fois-ci, mènent les héros dans la péninsule italienne :

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   Dès le début, on est (re)mis dans l'ambiance, avec une série de vignettes qui a dû bénéficier de beaucoup d'attention :

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   Tout y est (ou presque : on ne voit pas les héros). Il y a le ton faussement grandiloquent, qu'un événement cocasse va rompre. Il y a (à travers le texte et la borne) la première référence à un proverbe que l'on va retrouver dans l'album. Il y a bien évidemment le calembour sur le nom du dépanneur et l'introduction du thème principal de l'histoire : l'univers de l'automobile, qui va se prêter à beaucoup d'anachronismes...

   Les amateurs de figures autoritaires vont rapidement retrouver Jules César, ici en comploteur, dans la bouche duquel les auteurs placent un jeu de mots savoureux...

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    Comme ceux de l'époque Goscinny, cet album se veut un miroir tendu à notre époque, accro aux rallyes automobiles et globalement aux compétitions sportives, quitte à fermer les yeux sur la triche et le dopage. C'est aussi une variante sur les cultures régionales, les Romains ayant imposé la leur aux autres peuples de la péninsule. Difficile de ne pas y voir une pique lancée au parisianisme qui regarde avec condescendance la Province (mot d'origine latine, tiens).

   En gros, la course de chars revêt peu d'intérêt. C'est le portrait des divers concurrents (certains connus des lecteurs fidèles) qui retient l'attention, avec un véritable kaléidoscope de peuples. Je retiens les auriges africaines, qui s'amourachent... d'Idéfix, à la stupeur d'Obélix !

   Au cours de la compétition, nos héros vont découvrir une cité lacustre en construction, du côté de Venise, puis une ville en plein essor culturel, à Florence, et une région placée sous la menace d'une montagne qui fume, à proximité de Naples.

  Voilà, le cahier des charges est rempli. C'est correctement dessiné et sympatoche sur le fond. Il manque juste le grain de folie qui faisait tout le sel des albums écrits par René Goscinny.

samedi, 14 octobre 2017

Mauvaise santé aveyronnaise

   Ce titre pourrait sembler étrange à ceux qui suivent les questions médicales et leurs implications territoriales. En effet, l'Aveyron est plutôt connu comme un département où l'on vit bien et longtemps. C'est d'ailleurs l'un des départements français où l'incidence des cancers est la plus faible, pour les hommes comme pour les femmes :

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   C'est aussi l'un des départements où l'espérance de vie est plus élevée que la moyenne nationale : 80,2 ans pour les hommes (79 en France) et 85,5 pour les femmes (85,1 en France), en 2015. A titre d'anecdote, je précise que la statistique féminine place l'Aveyron en 20e position, alors que la statistique masculine le fait grimper à la... 12e !

   Tout cela pourrait être remis en question, si l'on en croit un intéressant article publié par les "Décodeurs" du Monde. Il est illustré notamment par une carte présentant la qualité de l'offre de santé accessible aux populations, par canton.

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   Presque tout l'Aveyron se trouve en "zone rose" (mais pas rouge), celle attribuée aux cantons où l'offre de soins de proximité est médiocre voire faible. C'est le cas de la majorité de l'espace rural, à l'exception notable d'une partie des Alpes et des Pyrénées. Les agglomérations les plus peuplées semblent concentrer l'offre abondante et de qualité...

    Mais affinons l'analyse. A y regarder de plus près, on remarque d'assez grandes disparités au sein même de l'Aveyron :

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   Certaines zones sont en bleu (clair), signe que l'offre de soins doit y être correcte. Il s'agit des cantons urbains de Rodez, Millau, Decazeville (et sans doute Saint-Affrique), mais aussi des (anciens) cantons ruraux de Saint-Chély-d'Aubrac, Laguiole et Salles-Curan.

   La situation est plus inquiétante pour Estaing et Cornus (en rose foncé)... et guère plus rassurante pour les autres cantons aveyronnais. On notera que la présence d'un hôpital à Villefranche-de-Rouergue ne semble pas avoir un impact aussi positif que dans les autres villes hospitalières rouergates.

   Problème supplémentaire pour l'Aveyron : la région Midi-Languedoc ne fait pas partie des mieux équipées pour traiter certaines pathologies, comme les cancers :

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   A l'échelle nationale, certaines zones semblent plus souffrir encore que l'Aveyron, notamment dans l'Ouest. La carte démontre néanmoins que, pour disposer d'une bonne offre de soins de proximité, il vaut mieux habiter un canton situé dans une grande aire urbaine. Voilà de quoi nourrir la réflexion et l'action des politiques de tout bord.

dimanche, 08 octobre 2017

L'affaire Fualdès, le sang et la rumeur

   Jusqu'au 31 décembre 2017, le musée Fenaille de Rodez propose une passionnante exposition consacrée à un fait divers qui a défrayé la chronique il y a 200 ans, en Aveyron bien sûr, mais aussi au plan national et même international.

   Dès le vestibule, on est accueilli par la reproduction d'une gravure datant sans doute de la fin du XVIIIe ou du début du XIXe siècle. On y découvre une vue d'un Rodez exigu (peuplé à l'époque de seulement 6 500 habitants), entouré d'espace rural, en particulier sur les pentes aujourd'hui presque intégralement bâties.

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   De là, on pénètre dans la première salle, consacrée au crime en lui-même. On nous présente Antoine-Bernardin Fualdès, ancien révolutionnaire ardent devenu bonapartiste et procureur impérial au criminel. C'est dire qu'il a dû se faire des ennemis dans le passé, d'autant plus qu'il est franc-maçon (de tendance antimonarchique), une étiquette délicate à porter en 1817, au début de la Restauration, juste après la Terreur blanche.

   Le mystère plane toujours sur ce qui s'est passé le soir de ce 19 mars 1817. Vers 20 heures, Fualdès a quitté son domicile ( 1 aujourd'hui situé au début de la rue de Bonald, où l'on peut encore voir la porte d'origine, qui a été légèrement reculée par rapport à la rue, sans doute pour ménager un abri). Il faisait sombre à Rodez, mais le cafetier voisin (2) a reconnu l'ancien procureur parti se promener, une serviette de documents sous le bras, semble-t-il. Au bout de la place de la cité, il a tourné à droite, rue Terral (3). A partir de là, les versions divergent.

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   L'enquête (bâclée) et la rumeur publique ont très tôt désigné la maison Bancal (4) comme étant le lieu du crime. N'a-t-on pas retrouvé à proximité de celle-ci, rue des Hebdomadiers (aujourd'hui rue Séguy) un mouchoir qui ne peut qu'avoir servi de bâillon ? N'a-t-on pas retrouvé la canne de Fualdès à peine plus loin, rue Terral ? Dans la salle du musée sont proposés plusieurs plans d'époque, ainsi qu'une carte postale du tout début du XXe siècle, permettant de localiser les principaux endroits liés (de manière réelle ou supposée) au crime. Notons que la mairie de Rodez avait fait imprimer l'un de ces plans, dont la vente devait servir à soulager les nécessiteux de la commune.

   Le corps de Fualdès ayant été retrouvé en contrebas de la ville, sur les berges de l'Aveyron, à Layoule, aux confins de Rodez et du Monastère, les imaginations se sont déchaînées sur la manière dont le corps y avait été transporté. Contrairement à ce qu'un esprit contemporain pourrait croire, ce n'est pas le chemin le plus court qui a été emprunté. Celui-ci traversait une partie de la cité (la partie Nord), où, le soir, le moindre bruit est susceptible d'éveiller l'attention.

  Les assassins (car ils étaient sans doute plusieurs) ont sans doute transporté Fualdès (vivant ou mort) en longeant les remparts de la cité. Ils seraient sortis par la porte Saint-Martial qui, à l'époque, faisait le lien entre l'évêché et la cathédrale. Une fois à l 'extérieur, il y avait peu de chances qu'ils soient dérangés, la zone étant quasi inhabitée... et peu fréquentée le soir.

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(gravure présentant une vue de la place d'Armes à la fin du XVIIIe siècle)

   La deuxième partie de la première salle propose divers objets en lien avec l'affaire : une reconstitution des vêtements que portait Fualdès ce soir-là, la mise en scène du crime, telle que la version officielle l'a transmise, une vielle comme celle dont devaient jouer les musiciens présents en cette période de foire... et une maquette de la désormais fameuse maison Bancal, réalisée en 1820 par David Niépce. Ce nom ne vous est peut-être pas inconnu : il s'agit du cousin de Nicéphore, l'inventeur de la photographie. Officier des dragons, il s'ennuyait un peu dans le chef-lieu aveyronnais. Et puis cette maison suscitait une telle curiosité... à tel point que les gens y venaient en nombre, prêts à payer pour la visiter. Curiosité supplémentaire : la maquette a été conçue de manière à ce qu'une partie soit amovible, dévoilant l'espace intérieur, minutieusement reconstitué.

   L'engouement pour ce fait divers fait l'objet de la deuxième salle, consacrée aux productions de l'époque, particulièrement des années 1817-1818. Aujourd'hui, on dirait que l'affaire "a fait le buzz"... sauf qu'alors n'existent ni internet, ni la télévision, ni la radio, ni le téléphone... C'est donc par les illustrations et les écrits que les informations (les fausses comme les vraies) ont été véhiculées. C'est l'âge d'or de la lithographie, de nombreuses étant exposées dans le musée. Des peintres se sont même déplacés pour faire le portrait des principaux protagonistes, pour la plupart des gens du peuple, dont la renommée va désormais égaler (temporairement) celle des puissants. L'histoire de ce meurtre a donné lieu à des productions théâtrales... et même à la création d'un "cabinet de cire", où a été reconstitué la scène du crime, telle que la rumeur l'a propagée.

   Au niveau des écrits,il y a profusion d'édition de feuilles volantes. Pour les plus fortunés, on publie les actes des procès. L'essentiel est publié par la presse, locale comme nationale, puisque des journalistes parisiens ont fait le déplacement. L'un d'entre eux, Hyacinthe Thabaud, a visiblement été traumatisé par Rodez, une ville sombre, peuplée de chauve-souris et de porcs en liberté...

   L'une des publications les plus célèbres est les Mémoires de Clarisse Manzon, la fille d'un juge ruthénois, une mythomane qui va précipiter la chute de certains des accusés. Ce livre a été réédité à de nombreuses reprises et même traduit (en anglais, danois...). On a ainsi entendu parler de l'affaire Fualdès dans toute l'Europe, jusqu'aux  États-Unis !

   La troisième salle fait le point sur les suites judiciaires, ainsi que sur les zones d'ombre. Plusieurs hypothèses sont évoquées quant aux véritables causes de la mort de Fualdès. Rappelons tout d'abord qu'il y eut trois procès, le premier (celui de Rodez), ayant été cassé pour un vice de forme. Les deux suivants ont eu lieu à Albi, le troisième étant en quelque sorte la queue de comète du deuxième. Voilà pourquoi les trois condamnés à mort ont été exécutés en terre albigeoise, le 3 juin 1818. D'autres accusés ont été condamnés à la prison à perpétuité, d'autres à des peines plus légères. Quelques-uns ont été acquittés.

   Dans cette salle, il est question des mensonges et omissions dans lesquels l'affaire a été engluée. Aucun meurtre n'a été commis dans la maison Bancal, dont les enfants ont pu imaginer un récit fantasmagorique, sans cesse renouvelé, sans susciter le scepticisme des enquêteurs. C'est à l'image de la majorité des témoins (plus de 300 lors des deux premiers procès), comme ce meunier qui, sur son lit de mort, a fini par reconnaître qu'il avait tout inventé pour pouvoir voir du pays ! Le summum est peut-être atteint avec ces lettres anonymes de menace, reçues par Clarisse Manzon... qui se les était envoyées elle-même !

   Et encore, l'exposition ne dit pas tout. La lecture de l'excellent catalogue (issu notamment d'un gros travail de fond de Jacques Miquel) nous en apprend d'autres. Je pense à ces témoins à décharge qu'on a tenté de faire revenir sur leurs déclarations, où ceux dont on a totalement négligé les paroles. Parmi eux, il y a ce réfugié espagnol, ancien juge, qui logeait juste au-dessus des Bancal (et donc du lieu présumé du crime)... et qui n'a rien entendu d'inhabituel ce soir-là, tout comme le voisin des Bancal, qui était un ami de Fualdès ! On a aussi "perdu" ces pierres tachées de sang, découvertes à Layoule, ce qui tendait à prouver que c'est là que le meurtre avait été perpétré, et non dans la maison Bancal.

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   Et puis, il y a ces "liaisons coupables", ces attaches familiales qui unissent les notables royalistes de Rodez et de ses alentours à de prestigieuses familles françaises (comme celle de Decazes). Une hypothèse tient la corde (sans être la seule envisageable), celle d'une vengeance des Chevaliers de la Foi, cette conjuration qui a tenté de remettre Louis XVIII sur le trône, en 1814, et qui a échoué notamment à cause du procureur impérial Fualdès. La bande de royalistes a commis bien des méfaits, qui n'ont jamais été sanctionnés par une condamnation en justice. Quant au procureur et à l'officier de gendarmerie chargés de l'affaire en 1817, il ont été ensuite rapidement décorés de la légion d'honneur... Ils avaient sans doute bien mérité de la Patrie !

   PS

   Sur le site du musée Fenaille, on peut accéder à un très bon web-documentaire.

   PS II

   On peut aussi, sur la Toile (ré)écouter des émissions radiophoniques (de RTL et France Inter) qui ont été consacrées à l'affaire.

   PS III

   Enfin, ne partez pas du musée sans réclamer la reproduction du plan d'époque de la cité de Rodez. (C'est gratuit.) Il est annoté de manière à faciliter la déambulation dans les rues de la ville, tout en suivant l'affaire Fualdès.