Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 28 novembre 2021

On est fait pour s'entendre

   De et avec Pascal Elbé, cette comédie romantique s'appuie sur un fait de société : les problèmes d'audition d'une part non négligeable de la population adulte (non retraitée). Antoine, prof d'histoire-géo dans un lycée de l'agglomération parisienne, finit par découvrir qu'il entend de moins en moins ce que ses interlocuteurs (élèves compris) lui disent et qu'il ne perçoit quasiment plus les bruits périphériques, de l'alarme du lycée à la sonnerie de son réveil-matin, en passant par les hurlements de la fille de la voisine du dessous. C'est à la fois un avantage et un inconvénient : il n'est plus perturbé par les conversations insipides et l'incivisme sonore d'une partie de ses contemporains, mais son handicap caché est source de quiproquos, souvent savoureux.

   La rencontre avec Claire (Sandrine Kiberlain, épatante comme d'hab'), l'occupante (temporaire) de l'appartement du dessous, est volcanique et délicieuse. Bon, dès le début, on sent que ces deux-là vont finir par s'apprivoiser, surtout si une gamine mutique en quête de père se met de la partie.

   Au-delà de la romance prévisible, l'intrigue évoque le deuil, la maladie, la solitude et l'incommunicabilité. Tout cela est traité avec douceur, délicatesse... et humour. Je recommande tout particulièrement la scène du restaurant, qui commence comme un gros ratage, avant de se déployer avec ravissement. À signaler aussi le duo de sœurs (incarnées par S. Kiberlain et V. Donzelli), qui fonctionne à merveille... ainsi que le faux couple formé par le héros et sa sœur éruptive (très bien interprétée par Emmanuelle Devos). Je ne peux pas conclure sur la distribution sans citer la participation de Marthe Villalonga et François Berléand, qui donnent une saveur supplémentaire à l'histoire.

   J'ai passé un très bon moment. Je suis sorti de la séance de fort bonne humeur.

On est fait pour s'entendre

   De et avec Pascal Elbé, cette comédie romantique s'appuie sur un fait de société : les problèmes d'audition d'une part non négligeable de la population adulte (non retraitée). Antoine, prof d'histoire-géo dans un lycée de l'agglomération parisienne, finit par découvrir qu'il entend de moins en moins ce que ses interlocuteurs (élèves compris) lui disent et qu'il ne perçoit quasiment plus les bruits périphériques, de l'alarme du lycée à la sonnerie de son réveil-matin, en passant par les hurlements de la fille de la voisine du dessous. C'est à la fois un avantage et un inconvénient : il n'est plus perturbé par les conversations insipides et l'incivisme sonore d'une partie de ses contemporains, mais son handicap caché est source de quiproquos, souvent savoureux.

   La rencontre avec Claire (Sandrine Kiberlain, épatante comme d'hab'), l'occupante (temporaire) de l'appartement du dessous, est volcanique et délicieuse. Bon, dès le début, on sent que ces deux-là vont finir par s'apprivoiser, surtout si une gamine mutique en quête de père se met de la partie.

   Au-delà de la romance prévisible, l'intrigue évoque le deuil, la maladie, la solitude et l'incommunicabilité. Tout cela est traité avec douceur, délicatesse... et humour. Je recommande tout particulièrement la scène du restaurant, qui commence comme un gros ratage, avant de se déployer avec ravissement. À signaler aussi le duo de sœurs (incarnées par S. Kiberlain et V. Donzelli), qui fonctionne à merveille... ainsi que le faux couple formé par le héros et sa sœur éruptive (très bien interprétée par Emmanuelle Devos). Je ne peux pas conclure sur la distribution sans citer la participation de Marthe Villalonga et François Berléand, qui donnent une saveur supplémentaire à l'histoire.

   J'ai passé un très bon moment. Je suis sorti de la séance de fort bonne humeur.

Oranges sanguines

   Jean-Christophe Meurisse et sa petite troupe nous proposent une "comédie justicière", sardonique et moralisante. La forme mélange deux modèles. Il s'agit d'abord d'un entrecroisement de trois histoires. La première a pour cadre un concours de danse rock, auquel participe un couple de retraités. La seconde tourne autour de politiques ambitieux et sans scrupule. La troisième est centrée sur une adolescente vierge, sur le point de faire "le grand saut".

   Ces trois histoires, de prime abord séparées, sont liées. L'un des politiques ambitieux est le fils des danseurs. Comme il est aussi avocat de profession, il va entrer en contact avec l'adolescente, dans des circonstances que, selon la formule consacrée, je me garderai de révéler. D'autres liens sont insérés dans l'intrigue, si bien que son déroulé prend parfois la forme d'un "marabout de ficelle".

   Cependant, bien plus que la construction intellectuelle, c'est l'humour grinçant, vachard, qui attire l'attention. Les auteurs utilisent le film pour dénoncer certains travers du monde contemporain et pour exercer une sorte de vengeance immanente à l'égard de leurs têtes de Turc.

   Ainsi, le public rit beaucoup en suivant la préparation du concours de danse. L'organisation de ce micro-événement local prend des proportions insoupçonnées à cause des préjugés des uns des autres, au cours d'une réunion où le "politiquement correct" est de mise. La caméra tourne autour du groupe de personnages, chacun débitant un texte écrit ciselé tout en donnant l'impression d'improviser. Ce début est un brin tarantinesque, sans la violence "sauce tomate" dont on sent qu'elle pourrait gicler. (Pour cela, il faut attendre la deuxième partie.)

   Du concours de danse on passe aux employés de banque (odieux avec les retraités), au ministre menteur (inspiré visiblement de Jérôme Cahuzac), à l'avocat arrogant et à l'adolescente inquiète, dans une séquence tordante où la gynécologue est incarnée par Blanche Gardin. J'adore !

   Un personnage atypique, extérieur aux groupes de départ, va faire déraper l'intrigue. Un indice : ce monsieur d'apparence anodine nourrit affectueusement un cochon domestique, très poilu et très docile, dans son salon...

   À partir de là, l'outrance l'emporte, de manière calculée... et un peu putassière. Ainsi, le portrait du ministre devient encore plus chargé (au niveau de sa vie privée), histoire de nous faire avaler ce qu'il va subir. Il faut ensuite se taper un viol et la punition de celui-ci, avant de déboucher sur un suicide. Derrière ces scènes outrancières, il y a la supposée volonté de dénoncer le mensonge et le manque d'humanité en politique, les souffrances imposées aux femmes et la persécution des petites gens (à travers le couple de retraités).

   Toutes ces causes sont louables et la mise en scène des punitions (tous les "méchants" finissent par déguster, y compris le chauffeur de taxi) est souvent savoureuse. Mais cela manque de subtilité, de nuance. Ainsi, ce serait tellement simple si les politiques étaient tels que le film les dénonce. Quant aux retraités dont la maison risque d'être saisie, ils ne sont pas pauvres. Ils ont eu les moyens d'acheter leur résidence, mais se sont endettés sans doute parce qu'ils dépensent sans compter (70 000 euros tout de même). On est loin des "vrais pauvres" de leur âge, qui, eux, ne sont pas propriétaires de leur logement. De ce point de vue, le film véhicule un parfum de "gilets jaunes". (Ce n'est pas un compliment.) Même la séquence "féministe" (ou supposée telle) repose sur des bases douteuses : la jeune femme est enlevée puis violée la nuit même où elle fait pour la première fois l'amour (acte durant lequel elle fait preuve d'un remarquable sens de l'initiative). Le rapprochement entre les deux événements pourrait n'être que le résultat d'une facilité scénaristique. Mais il pue quand même un peu de la gueule.

   Voilà. Je suis sorti de là assez content, réjoui par la vision de séquences tordantes, mais réservé quant au fond.

Oranges sanguines

   Jean-Christophe Meurisse et sa petite troupe nous proposent une "comédie justicière", sardonique et moralisante. La forme mélange deux modèles. Il s'agit d'abord d'un entrecroisement de trois histoires. La première a pour cadre un concours de danse rock, auquel participe un couple de retraités. La seconde tourne autour de politiques ambitieux et sans scrupule. La troisième est centrée sur une adolescente vierge, sur le point de faire "le grand saut".

   Ces trois histoires, de prime abord séparées, sont liées. L'un des politiques ambitieux est le fils des danseurs. Comme il est aussi avocat de profession, il va entrer en contact avec l'adolescente, dans des circonstances que, selon la formule consacrée, je me garderai de révéler. D'autres liens sont insérés dans l'intrigue, si bien que son déroulé prend parfois la forme d'un "marabout de ficelle".

   Cependant, bien plus que la construction intellectuelle, c'est l'humour grinçant, vachard, qui attire l'attention. Les auteurs utilisent le film pour dénoncer certains travers du monde contemporain et pour exercer une sorte de vengeance immanente à l'égard de leurs têtes de Turc.

   Ainsi, le public rit beaucoup en suivant la préparation du concours de danse. L'organisation de ce micro-événement local prend des proportions insoupçonnées à cause des préjugés des uns des autres, au cours d'une réunion où le "politiquement correct" est de mise. La caméra tourne autour du groupe de personnages, chacun débitant un texte écrit ciselé tout en donnant l'impression d'improviser. Ce début est un brin tarantinesque, sans la violence "sauce tomate" dont on sent qu'elle pourrait gicler. (Pour cela, il faut attendre la deuxième partie.)

   Du concours de danse on passe aux employés de banque (odieux avec les retraités), au ministre menteur (inspiré visiblement de Jérôme Cahuzac), à l'avocat arrogant et à l'adolescente inquiète, dans une séquence tordante où la gynécologue est incarnée par Blanche Gardin. J'adore !

   Un personnage atypique, extérieur aux groupes de départ, va faire déraper l'intrigue. Un indice : ce monsieur d'apparence anodine nourrit affectueusement un cochon domestique, très poilu et très docile, dans son salon...

   À partir de là, l'outrance l'emporte, de manière calculée... et un peu putassière. Ainsi, le portrait du ministre devient encore plus chargé (au niveau de sa vie privée), histoire de nous faire avaler ce qu'il va subir. Il faut ensuite se taper un viol et la punition de celui-ci, avant de déboucher sur un suicide. Derrière ces scènes outrancières, il y a la supposée volonté de dénoncer le mensonge et le manque d'humanité en politique, les souffrances imposées aux femmes et la persécution des petites gens (à travers le couple de retraités).

   Toutes ces causes sont louables et la mise en scène des punitions (tous les "méchants" finissent par déguster, y compris le chauffeur de taxi) est souvent savoureuse. Mais cela manque de subtilité, de nuance. Ainsi, ce serait tellement simple si les politiques étaient tels que le film les dénonce. Quant aux retraités dont la maison risque d'être saisie, ils ne sont pas pauvres. Ils ont eu les moyens d'acheter leur résidence, mais se sont endettés sans doute parce qu'ils dépensent sans compter (70 000 euros tout de même). On est loin des "vrais pauvres" de leur âge, qui, eux, ne sont pas propriétaires de leur logement. De ce point de vue, le film véhicule un parfum de "gilets jaunes". (Ce n'est pas un compliment.) Même la séquence "féministe" (ou supposée telle) repose sur des bases douteuses : la jeune femme est enlevée puis violée la nuit même où elle fait pour la première fois l'amour (acte durant lequel elle fait preuve d'un remarquable sens de l'initiative). Le rapprochement entre les deux événements pourrait n'être que le résultat d'une facilité scénaristique. Mais il pue quand même un peu de la gueule.

   Voilà. Je suis sorti de là assez content, réjoui par la vision de séquences tordantes, mais réservé quant au fond.

vendredi, 26 novembre 2021

L'Événement

   Je n'ai pas lu le roman d'Annie Ernaux, mais le sujet du film m'a incité à tenter l'expérience. Derrière la caméra se trouve Audrey Diwan, scénariste de Cédric Jimenez (et, accessoirement, sa compagne).

   Anne est étudiante, sans doute en propédeutique Lettres. (Aux jeunes qui liraient ce billet, je signale qu'il y a bien longtemps, pour les étudiants se destinant à la fac, il existait une année de transition entre la terminale et le début de la licence à proprement parler.) Elle est belle, intelligente et indépendante. Elle a envie de tout vivre : ses études, son amour de la littérature, les sorties rock'n'roll... et les garçons. Hélas pour elle, nous sommes en 1963, au début de la Ve République, sous le premier mandat de Charles de Gaulle. Contraception comme avortement sont illégaux. Quant à l'enseignement des "choses de la vie", il s'effectue plutôt par l'intermédiaire des revues de charme...

   La première partie est saisissante. La caméra suit l'héroïne (incarnée par Anamaria Vartolomei, déjà remarquée dans L'Échange des princesses et La Bonne Épouse), de dos, de face, de côté, du dessus. Je rassure les cinéphiles qui auraient le mal de mer, on n'est pas chez les Dardenne grande époque. Ces mouvements de caméra sont parfaitement justifiés. Ils instillent du mystère autour de la personnalité de cette jeune femme, assez mutique. Ils nous font aussi comprendre quel poids pèse sur ses épaules : celui du patriarcat, de la pesanteur sociale, du conservatisme religieux et de la chosification des jeunes femmes, surtout si elles sont jolies.

   Autour d'Anamaria gravite une brochette de comédiens de talent. Sandrine Bonnaire interprète une mère traditionnelle, besogneuse et aimant sa fille, qu'elle a de plus en plus de mal à comprendre. Pio Marmai prête son physique avantageux à un prof de fac qui a repéré l'étincelle de talent chez Anne. (Bien que je doute que le film rencontre un grand succès public, il pourrait néanmoins contribuer à l'augmentation du nombre d'inscriptions de lycéennes en fac de Lettres. Une cruelle déception les y attend...)

   J'ai trouvé que la deuxième partie patinait un peu. Enceinte, l'héroïne ne sait trop comment s'en sortir. Petit à petit, elle se coupe de toutes les personnes qui pourraient l'aider.

   Fort heureusement, l'intérêt rebondit dans la troisième partie, qui prend quasiment la forme d'un thriller. Anne se rend chez une "faiseuse d'anges", qui a la voix rocailleuse d'Anna Mouglalis. La séquence est extraordinaire d'intensité, avec une étonnante économie de moyens. À partir de ce moment-là, la tension ne retombe plus, portée par une actrice formidable... jusqu'à une conclusion que je ne révèlerai pas.

   Je recommande vivement ce film coup-de-poing, bourré de talents.

L'Événement

   Je n'ai pas lu le roman d'Annie Ernaux, mais le sujet du film m'a incité à tenter l'expérience. Derrière la caméra se trouve Audrey Diwan, scénariste de Cédric Jimenez (et, accessoirement, sa compagne).

   Anne est étudiante, sans doute en propédeutique Lettres. (Aux jeunes qui liraient ce billet, je signale qu'il y a bien longtemps, pour les étudiants se destinant à la fac, il existait une année de transition entre la terminale et le début de la licence à proprement parler.) Elle est belle, intelligente et indépendante. Elle a envie de tout vivre : ses études, son amour de la littérature, les sorties rock'n'roll... et les garçons. Hélas pour elle, nous sommes en 1963, au début de la Ve République, sous le premier mandat de Charles de Gaulle. Contraception comme avortement sont illégaux. Quant à l'enseignement des "choses de la vie", il s'effectue plutôt par l'intermédiaire des revues de charme...

   La première partie est saisissante. La caméra suit l'héroïne (incarnée par Anamaria Vartolomei, déjà remarquée dans L'Échange des princesses et La Bonne Épouse), de dos, de face, de côté, du dessus. Je rassure les cinéphiles qui auraient le mal de mer, on n'est pas chez les Dardenne grande époque. Ces mouvements de caméra sont parfaitement justifiés. Ils instillent du mystère autour de la personnalité de cette jeune femme, assez mutique. Ils nous font aussi comprendre quel poids pèse sur ses épaules : celui du patriarcat, de la pesanteur sociale, du conservatisme religieux et de la chosification des jeunes femmes, surtout si elles sont jolies.

   Autour d'Anamaria gravite une brochette de comédiens de talent. Sandrine Bonnaire interprète une mère traditionnelle, besogneuse et aimant sa fille, qu'elle a de plus en plus de mal à comprendre. Pio Marmai prête son physique avantageux à un prof de fac qui a repéré l'étincelle de talent chez Anne. (Bien que je doute que le film rencontre un grand succès public, il pourrait néanmoins contribuer à l'augmentation du nombre d'inscriptions de lycéennes en fac de Lettres. Une cruelle déception les y attend...)

   J'ai trouvé que la deuxième partie patinait un peu. Enceinte, l'héroïne ne sait trop comment s'en sortir. Petit à petit, elle se coupe de toutes les personnes qui pourraient l'aider.

   Fort heureusement, l'intérêt rebondit dans la troisième partie, qui prend quasiment la forme d'un thriller. Anne se rend chez une "faiseuse d'anges", qui a la voix rocailleuse d'Anna Mouglalis. La séquence est extraordinaire d'intensité, avec une étonnante économie de moyens. À partir de ce moment-là, la tension ne retombe plus, portée par une actrice formidable... jusqu'à une conclusion que je ne révèlerai pas.

   Je recommande vivement ce film coup-de-poing, bourré de talents.

lundi, 15 novembre 2021

Eiffel

   C'est l'un des films (avec Mourir peut attendre, Bac Nord et Venom 2) qui ont très bien marché ce mois dernier, au cinéma de Rodez. Il sera d'ailleurs toujours à l'affiche la semaine prochaine (tout comme deux des trois autres gros succès locaux). J'y suis allé pour le sujet (la construction de la célèbre tour) et parce j'avais bien aimé les précédents longs-métrages de Martin Bourboulon, les deux Papa ou maman.

   Côté positif, il y a l'interprétation de Romain Duris, crédible quand il allonge les arguments techniques de l'ingénieur et quand il fait montre de son audace entrepreneuriale. J'ai aussi apprécié les détails concernant le projet de la tour puis les étapes de sa construction. Je trouve l'ambiance bien restituée : on a oublié aujourd'hui à quel point ce projet fou a suscité l'hostilité, à l'époque. C'est (en partie) parce qu'il a été "pistonné" par certains dirigeants républicains qu'Eiffel a pu surmonter toutes les difficultés qu'il a rencontrées.

   Mais que vient faire l'improbable histoire d'amour là-dedans ? Certes, dans sa jeunesse, le véritable Gustave Eiffel a (un peu) fréquenté la jeune Adrienne Bourgès, qu'il a songé à épouser. Mais c'était surtout pour "se poser" dans la société. Faire de leur micro-histoire une romance au long cours, avec resurgissement de la lave des sentiments vingt ans plus tard, est ridicule... moins toutefois que de faire de la dame l'inspiratrice de la Tour.

   Du coup, même si c'est bien joué, même si certains plans du Paris fin XIXe siècle sont superbes, cela a gâché mon plaisir.

   P.S.

   Sur le sujet, je recommande plusieurs lectures.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Ce roman graphique, publié en 2015, a été réédité à l'occasion de la sortie du film. C'est une bonne biographie grand public de Gustave Eiffel, même si le dessin ne m'a pas enthousiasmé.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Publié dans la collection "Découvertes Gallimard", ce petit livre abondamment illustré se dévore avec grand plaisir. Il est truffé d'anecdotes.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Je termine par une fiction, en bandes dessinées. Les auteurs situent l'action dans le Paris des années 1880, alors que la IIIe République est fragile et que les mouvements anarchistes font régner la violence. Dans ce polar historique, on croise nombre de personnages connus... mais l'on suit surtout un (quasi-)anonyme, Antoine Vigier, un p'tit gars de la campagne cantalienne qui "monte" à Paris, à l'image de tant de bougnats de l'époque. C'est totalement fictif mais bien fichu.

Eiffel

   C'est l'un des films (avec Mourir peut attendre, Bac Nord et Venom 2) qui ont très bien marché ce mois dernier, au cinéma de Rodez. Il sera d'ailleurs toujours à l'affiche la semaine prochaine (tout comme deux des trois autres gros succès locaux). J'y suis allé pour le sujet (la construction de la célèbre tour) et parce j'avais bien aimé les précédents longs-métrages de Martin Bourboulon, les deux Papa ou maman.

   Côté positif, il y a l'interprétation de Romain Duris, crédible quand il allonge les arguments techniques de l'ingénieur et quand il fait montre de son audace entrepreneuriale. J'ai aussi apprécié les détails concernant le projet de la tour puis les étapes de sa construction. Je trouve l'ambiance bien restituée : on a oublié aujourd'hui à quel point ce projet fou a suscité l'hostilité, à l'époque. C'est (en partie) parce qu'il a été "pistonné" par certains dirigeants républicains qu'Eiffel a pu surmonter toutes les difficultés qu'il a rencontrées.

   Mais que vient faire l'improbable histoire d'amour là-dedans ? Certes, dans sa jeunesse, le véritable Gustave Eiffel a (un peu) fréquenté la jeune Adrienne Bourgès, qu'il a songé à épouser. Mais c'était surtout pour "se poser" dans la société. Faire de leur micro-histoire une romance au long cours, avec resurgissement de la lave des sentiments vingt ans plus tard, est ridicule... moins toutefois que de faire de la dame l'inspiratrice de la Tour.

   Du coup, même si c'est bien joué, même si certains plans du Paris fin XIXe siècle sont superbes, cela a gâché mon plaisir.

   P.S.

   Sur le sujet, je recommande plusieurs lectures.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Ce roman graphique, publié en 2015, a été réédité à l'occasion de la sortie du film. C'est une bonne biographie grand public de Gustave Eiffel, même si le dessin ne m'a pas enthousiasmé.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Publié dans la collection "Découvertes Gallimard", ce petit livre abondamment illustré se dévore avec grand plaisir. Il est truffé d'anecdotes.

cinéma,cinema,film,films,histoire

   Je termine par une fiction, en bandes dessinées. Les auteurs situent l'action dans le Paris des années 1880, alors que la IIIe République est fragile et que les mouvements anarchistes font régner la violence. Dans ce polar historique, on croise nombre de personnages connus... mais l'on suit surtout un (quasi-)anonyme, Antoine Vigier, un p'tit gars de la campagne cantalienne qui "monte" à Paris, à l'image de tant de bougnats de l'époque. C'est totalement fictif mais bien fichu.

samedi, 13 novembre 2021

Mon Légionnaire

   La réalisatrice Rachel Lang a fait partie de l'armée française.. Elle en connaît donc les codes et les mentalités. Cela lui a été utile pour mettre en scène cette fiction, qui tourne autour du 2e REP de la Légion, basé à Calvi, en Haute-Corse.

   Il ne faut donc pas s'attendre à un brûlot antimilitariste... pas plus qu'à une œuvre épique, à la gloire du combat. Le propos de la réalisatrice est autre. Elle plonge dans le quotidien à la fois des soldats en opération et des épouses restées au camp. C'est ce groupe-ci qui semble le plus hétérogène : entre la petite amie qui a tout plaqué pour rejoindre son jules, l'avocate qui effectue des allers-retours entre la Corse et Paris et les "tradis" (cathos bourgeoises qui perpétuent la lignée), l'écart est grand. 

   Dans le rôle de l'avocate, issue d'un milieu de gauche, qui soutient l'engagement de son époux, Camille Cottin est épatante. Elle incarne à la fois la femme indépendante (qui gère sa carrière de main de maître) et l'amoureuse, qui se languit de l'absence de Maxime.

   Un peu à ma surprise, celui-ci est très bien interprété par Louis Garrel. Physiquement, il a acquis l'épaisseur (musculaire) du rôle. Il est aussi vrai que, sans sa tignasse (et quand il est rasé de près), les traits anguleux de son visage ressortent mieux. Sa mâchoire proéminente "fait" bien soldat.

   Autour de lui gravitent d'authentiques acteurs ainsi que, me semble-t-il d'anciens (?) militaires. Cela donne un parfum de vérité aux scènes d'entraînement, de vie de camp (dans le Sahara, présume-t-on) et d'escarmouches. C'est l'occasion pour les profanes de découvrir les procédures militaires... ainsi que le perfectionnement des véhicules blindés, notamment en moyens de communication.

   Attention, je le répète, quand bien même l'on voit à deux ou trois reprises les légionnaires évoluer en milieu hostile, il s'agit d'abord d'un film d'ambiance. La tension est omniprésente, en raison d'une étrangeté : plus que le départ en OP, les militaires redoutent le retour en Corse, en famille (pour ceux qui en ont une). Ils ne peuvent (et ne veulent) pas tout dire à leur conjointe (et surtout aux enfants). On sent même qu'il y a comme un regret d'avoir quitté la zone de combat et l'ambiance très particulière qui y règne entre les hommes (et les quelques femmes qui portent l'uniforme).

   J'ai été touché par cette histoire, même si le film comporte quelques longueurs.

Mon Légionnaire

   La réalisatrice Rachel Lang a fait partie de l'armée française.. Elle en connaît donc les codes et les mentalités. Cela lui a été utile pour mettre en scène cette fiction, qui tourne autour du 2e REP de la Légion, basé à Calvi, en Haute-Corse.

   Il ne faut donc pas s'attendre à un brûlot antimilitariste... pas plus qu'à une œuvre épique, à la gloire du combat. Le propos de la réalisatrice est autre. Elle plonge dans le quotidien à la fois des soldats en opération et des épouses restées au camp. C'est ce groupe-ci qui semble le plus hétérogène : entre la petite amie qui a tout plaqué pour rejoindre son jules, l'avocate qui effectue des allers-retours entre la Corse et Paris et les "tradis" (cathos bourgeoises qui perpétuent la lignée), l'écart est grand. 

   Dans le rôle de l'avocate, issue d'un milieu de gauche, qui soutient l'engagement de son époux, Camille Cottin est épatante. Elle incarne à la fois la femme indépendante (qui gère sa carrière de main de maître) et l'amoureuse, qui se languit de l'absence de Maxime.

   Un peu à ma surprise, celui-ci est très bien interprété par Louis Garrel. Physiquement, il a acquis l'épaisseur (musculaire) du rôle. Il est aussi vrai que, sans sa tignasse (et quand il est rasé de près), les traits anguleux de son visage ressortent mieux. Sa mâchoire proéminente "fait" bien soldat.

   Autour de lui gravitent d'authentiques acteurs ainsi que, me semble-t-il d'anciens (?) militaires. Cela donne un parfum de vérité aux scènes d'entraînement, de vie de camp (dans le Sahara, présume-t-on) et d'escarmouches. C'est l'occasion pour les profanes de découvrir les procédures militaires... ainsi que le perfectionnement des véhicules blindés, notamment en moyens de communication.

   Attention, je le répète, quand bien même l'on voit à deux ou trois reprises les légionnaires évoluer en milieu hostile, il s'agit d'abord d'un film d'ambiance. La tension est omniprésente, en raison d'une étrangeté : plus que le départ en OP, les militaires redoutent le retour en Corse, en famille (pour ceux qui en ont une). Ils ne peuvent (et ne veulent) pas tout dire à leur conjointe (et surtout aux enfants). On sent même qu'il y a comme un regret d'avoir quitté la zone de combat et l'ambiance très particulière qui y règne entre les hommes (et les quelques femmes qui portent l'uniforme).

   J'ai été touché par cette histoire, même si le film comporte quelques longueurs.

vendredi, 12 novembre 2021

Les Eternels

   Quand, enfant, je lisais des comics américains, j'étais surtout intéressé par les X-Men, un peu aussi par Spiderman et Iron Man. Les Éternels font partie des séries auxquelles je n'ai pas accroché, à l'époque. Voir le film m'a rappelé pourquoi : j'avais été un peu agacé de constater le "recyclage" dont nombre de personnages importants sont révélateurs : Ikaris est un mélange de Cyclope et de Superman (dont il se moque... Tiens, prends ça dans les dents, DC !), Makkari possède les mêmes aptitudes que Vif-Argent, Phaestos, en plus d'être le décalque d'un dieu grec (comme d'autres personnages), exerce ses talents avec une dextérité qui n'est pas sans rappeler celle de Docteur Strange... 

   J'ai tenté le coup parce que j'avais envie de voir ce que donnait la réalisatrice Chloé Zhao (dont j'ai adoré le Nomadland) dans ce genre de production.

   Visiblement, on a mis le paquet sur les effets spéciaux. Sur un très grand écran, c'est impressionnant... mais, quand on y réfléchit un peu, pour les acteurs, c'est le degré zéro de l'acte de jouer. (Mais cela doit rapporter gros...) Trop de fonds verts tuent le fond vert... On aurait d'ailleurs été bien inspiré de mettre un peu plus d'argent sur les aspects techniques des scènes "classiques", parce que, parfois, j'ai eu l'impression que ce n'était pas très bien éclairé. Il aurait aussi fallu revoir un peu le montage : à deux ou trois reprises, on nous balance un retour en arrière en pleine poire, sans raccord. C'est vraiment maladroit.

   Bon, je fais la fine bouche mais, quand un film a bénéficié d'un financement de deux cents millions de dollars, on est en droit d'attendre un produit d'une qualité technique irréprochable.

    Ceci dit, en un peu plus de 2h30, on a de quoi trouver son bonheur. Contrairement à d'autres spectateurs, je n'ai pas été irrité par la volonté de construire une équipe de super-héros aussi internationale, polyglotte que multiculturelle. Si l'on ajoute à cela la féminisation de certains personnages et la valorisation des minorités sexuelles, on obtient peut-être le film commercial le plus woke de l'histoire du cinéma. Mais, comme ces retouches "politiquement correctes" n'ont pas été faites à la truelle, cela passe sans problème... surtout grâce à l'humour. En fait, c'est ça qui sauve le film. À l'image de ce que l'on a pu voir dans les divers Avengers, les héros se chambrent entre eux. Le supplément apporté par ce film est que certains traits d'humour cassent l'aspect grandiloquent de ces quasi-divinités. Cela donne une grande respiration à l'intrigue, qui s'appuie aussi sur des scènes intimes moins bâclées que dans d'autres superproductions.

   P.S.

   La salle où je me trouvais n'était pas remplie que d'habitués des films Marvel : la moitié de l'assistance est sortie dès le début du générique. (Mais peut-être en avaient-ils tout simplement marre...) Ils ont donc raté deux scènes supplémentaires. La première annonce sans doute la suite des aventures. La seconde nous apprend ce qu'un des personnages de l'histoire n'a pas eu le temps de révéler à la femme qu'il aime. On entend aussi une grosse voix, signe qu'une vieille connaissance pourrait bientôt faire son retour dans les salles obscures.

00:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Les Eternels

   Quand, enfant, je lisais des comics américains, j'étais surtout intéressé par les X-Men, un peu aussi par Spiderman et Iron Man. Les Éternels font partie des séries auxquelles je n'ai pas accroché, à l'époque. Voir le film m'a rappelé pourquoi : j'avais été un peu agacé de constater le "recyclage" dont nombre de personnages importants sont révélateurs : Ikaris est un mélange de Cyclope et de Superman (dont il se moque... Tiens, prends ça dans les dents, DC !), Makkari possède les mêmes aptitudes que Vif-Argent, Phaestos, en plus d'être le décalque d'un dieu grec (comme d'autres personnages), exerce ses talents avec une dextérité qui n'est pas sans rappeler celle de Docteur Strange... 

   J'ai tenté le coup parce que j'avais envie de voir ce que donnait la réalisatrice Chloé Zhao (dont j'ai adoré le Nomadland) dans ce genre de production.

   Visiblement, on a mis le paquet sur les effets spéciaux. Sur un très grand écran, c'est impressionnant... mais, quand on y réfléchit un peu, pour les acteurs, c'est le degré zéro de l'acte de jouer. (Mais cela doit rapporter gros...) Trop de fonds verts tuent le fond vert... On aurait d'ailleurs été bien inspiré de mettre un peu plus d'argent sur les aspects techniques des scènes "classiques", parce que, parfois, j'ai eu l'impression que ce n'était pas très bien éclairé. Il aurait aussi fallu revoir un peu le montage : à deux ou trois reprises, on nous balance un retour en arrière en pleine poire, sans raccord. C'est vraiment maladroit.

   Bon, je fais la fine bouche mais, quand un film a bénéficié d'un financement de deux cents millions de dollars, on est en droit d'attendre un produit d'une qualité technique irréprochable.

    Ceci dit, en un peu plus de 2h30, on a de quoi trouver son bonheur. Contrairement à d'autres spectateurs, je n'ai pas été irrité par la volonté de construire une équipe de super-héros aussi internationale, polyglotte que multiculturelle. Si l'on ajoute à cela la féminisation de certains personnages et la valorisation des minorités sexuelles, on obtient peut-être le film commercial le plus woke de l'histoire du cinéma. Mais, comme ces retouches "politiquement correctes" n'ont pas été faites à la truelle, cela passe sans problème... surtout grâce à l'humour. En fait, c'est ça qui sauve le film. À l'image de ce que l'on a pu voir dans les divers Avengers, les héros se chambrent entre eux. Le supplément apporté par ce film est que certains traits d'humour cassent l'aspect grandiloquent de ces quasi-divinités. Cela donne une grande respiration à l'intrigue, qui s'appuie aussi sur des scènes intimes moins bâclées que dans d'autres superproductions.

   P.S.

   La salle où je me trouvais n'était pas remplie que d'habitués des films Marvel : la moitié de l'assistance est sortie dès le début du générique. (Mais peut-être en avaient-ils tout simplement marre...) Ils ont donc raté deux scènes supplémentaires. La première annonce sans doute la suite des aventures. La seconde nous apprend ce qu'un des personnages de l'histoire n'a pas eu le temps de révéler à la femme qu'il aime. On entend aussi une grosse voix, signe qu'une vieille connaissance pourrait bientôt faire son retour dans les salles obscures.

00:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 11 novembre 2021

30 degrés en février

   Cette mini-série suédo-thaïlandaise s'appuie sur un fait de société : la présence à l'année d'une petite communauté suédoise en Thaïlande, à laquelle venaient se joindre (avant le covid) des centaines de milliers de touristes de même origine, chaque année.

   C'est une nouvelle pépite mise en ligne par la chaîne Arte. Les deux saisons (vingt épisodes au total) sont accessibles jusqu'en septembre 2022. Quatre histoires principales s'entremêlent (plus ou moins), avec un séjour en Thaïlande comme point commun.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   L'un des couples est constitué d'un pilote d'avion à la retraite (devenu handicapé) et de son épouse timide et dévouée. Le mec (Bengt) est puant au possible, plein de mépris pour une femme qu'il a déjà trompée et quittée (du temps où il était bel homme... et valide), mais dont il a désormais bigrement besoin. Leur venue en Thaïlande pourrait être l'occasion pour le couple de se rabibocher. Majlis (l'épouse) va connaître une lente mais spectaculaire évolution. Les deux acteurs sont formidables... et connus des amateurs de séries nordiques. Kjell Bergvist s'est récemment illustré dans Commandant Bäckström. Quant à Lotta Tejle, elle a incarné la voisine taciturne et pique-assiette du policier héros de Meurtres à Sandhamn.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Un autre couple est en fait un duo père-fils, formé de Chan et Pong. Le premier est un Thaïlandais expatrié en Suède, de retour au pays pour relancer une affaire locale... et tenter de renouer avec son ancienne compagne. Le fils est en pleine dérive. Le jeune acteur qui l'incarne est crédible aussi bien en drogué quasi délinquant qu'en moine bouddhiste ou barman amoureux.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Ce duo va entrer (à nouveau) en contact avec une famille incomplète, composée d'une mère et de ses deux filles. (Le père les a quittées quelques années auparavant.) Kajsa (la mère) est une brillante architecte qui tente de refaire sa vie en Thaïlande, où elle est déjà allée en vacances. Sa fille aînée (Joy) est en pleine crise d'adolescence, tandis que la cadette (Wilda) réclame beaucoup d'attention de la part des deux autres.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   L'équipe de départ ne serait pas complète sans Glenn, un célibataire d'une quarantaine d'années, à l'abri du besoin sur le plan financier mais désespérément seul... et obèse. Il se rend en Thaïlande en pensant y rencontrer la femme de sa vie. Le pauvre garçon va aller de déconvenue en déconvenue... jusqu'à ce qu'il rencontre Oh, une masseuse au grand coeur... mais qui cache un gros secret.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Parti pour ne voir qu'un épisode ou deux, je me suis laissé prendre par ces personnages fouillés (aussi bien du côté suédois que du côté thaïlandais), remarquablement interprétés. J'ai même poussé le vice jusqu'à enchaîner avec la saison 2. L'histoire reprend après une catastrophe climatique, qui a un peu redistribué les cartes. Presque tous les personnages de la première saison sont présents, auxquels s'ajoutent quelques nouveaux.

   Majlis acquiert de plus en plus d'autonomie et fait même preuve d'une audace surprenante pour une femme de son âge, compte tenu surtout de l'éducation qu'elle a reçue. Le (beau) personnage de Joy (l'adolescente) reste majeur, mais les scénaristes ont choisi de davantage développer celui de sa petite sœur... et je n'ai pas été convaincu. Soit elle m'agace, soit je m'irrite des grosses ficelles utilisées : c'est un personnage qui, régulièrement, soit commet des gaffes, soit subit une contrariété. J'ai (de loin) préféré le personnage (nouveau) de Teng, une orpheline thaï dont Majlis va s'enticher.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   De son côté, Glenn, un peu moins obèse, est toujours aussi sympathique... et maladroit. On le voit retourner en Suède... mais avec la Thaïlande au coeur.

   C'est bien filmé, accompagné d'une musique agréable. Je note que les scénaristes n'ont accablé aucun de leurs personnages : tous ont leurs bons et leurs mauvais côtés, si bien qu'ils finissent (presque) tous par m'agacer à un moment ou à un autre, y compris quand l'intrigue leur permet de se "racheter". C'est un peu la limite de cette série, un peu trop inclusive à mon goût et qui semble soutenir l'idée qu'il n'existe pas de méchante personne, juste des gens ordinaires qui, parfois ont dérivé.

30 degrés en février

   Cette mini-série suédo-thaïlandaise s'appuie sur un fait de société : la présence à l'année d'une petite communauté suédoise en Thaïlande, à laquelle venaient se joindre (avant le covid) des centaines de milliers de touristes de même origine, chaque année.

   C'est une nouvelle pépite mise en ligne par la chaîne Arte. Les deux saisons (vingt épisodes au total) sont accessibles jusqu'en septembre 2022. Quatre histoires principales s'entremêlent (plus ou moins), avec un séjour en Thaïlande comme point commun.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   L'un des couples est constitué d'un pilote d'avion à la retraite (devenu handicapé) et de son épouse timide et dévouée. Le mec (Bengt) est puant au possible, plein de mépris pour une femme qu'il a déjà trompée et quittée (du temps où il était bel homme... et valide), mais dont il a désormais bigrement besoin. Leur venue en Thaïlande pourrait être l'occasion pour le couple de se rabibocher. Majlis (l'épouse) va connaître une lente mais spectaculaire évolution. Les deux acteurs sont formidables... et connus des amateurs de séries nordiques. Kjell Bergvist s'est récemment illustré dans Commandant Bäckström. Quant à Lotta Tejle, elle a incarné la voisine taciturne et pique-assiette du policier héros de Meurtres à Sandhamn.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Un autre couple est en fait un duo père-fils, formé de Chan et Pong. Le premier est un Thaïlandais expatrié en Suède, de retour au pays pour relancer une affaire locale... et tenter de renouer avec son ancienne compagne. Le fils est en pleine dérive. Le jeune acteur qui l'incarne est crédible aussi bien en drogué quasi délinquant qu'en moine bouddhiste ou barman amoureux.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Ce duo va entrer (à nouveau) en contact avec une famille incomplète, composée d'une mère et de ses deux filles. (Le père les a quittées quelques années auparavant.) Kajsa (la mère) est une brillante architecte qui tente de refaire sa vie en Thaïlande, où elle est déjà allée en vacances. Sa fille aînée (Joy) est en pleine crise d'adolescence, tandis que la cadette (Wilda) réclame beaucoup d'attention de la part des deux autres.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   L'équipe de départ ne serait pas complète sans Glenn, un célibataire d'une quarantaine d'années, à l'abri du besoin sur le plan financier mais désespérément seul... et obèse. Il se rend en Thaïlande en pensant y rencontrer la femme de sa vie. Le pauvre garçon va aller de déconvenue en déconvenue... jusqu'à ce qu'il rencontre Oh, une masseuse au grand coeur... mais qui cache un gros secret.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   Parti pour ne voir qu'un épisode ou deux, je me suis laissé prendre par ces personnages fouillés (aussi bien du côté suédois que du côté thaïlandais), remarquablement interprétés. J'ai même poussé le vice jusqu'à enchaîner avec la saison 2. L'histoire reprend après une catastrophe climatique, qui a un peu redistribué les cartes. Presque tous les personnages de la première saison sont présents, auxquels s'ajoutent quelques nouveaux.

   Majlis acquiert de plus en plus d'autonomie et fait même preuve d'une audace surprenante pour une femme de son âge, compte tenu surtout de l'éducation qu'elle a reçue. Le (beau) personnage de Joy (l'adolescente) reste majeur, mais les scénaristes ont choisi de davantage développer celui de sa petite sœur... et je n'ai pas été convaincu. Soit elle m'agace, soit je m'irrite des grosses ficelles utilisées : c'est un personnage qui, régulièrement, soit commet des gaffes, soit subit une contrariété. J'ai (de loin) préféré le personnage (nouveau) de Teng, une orpheline thaï dont Majlis va s'enticher.

cinéma,cinema,film,films,société,télévision

   De son côté, Glenn, un peu moins obèse, est toujours aussi sympathique... et maladroit. On le voit retourner en Suède... mais avec la Thaïlande au coeur.

   C'est bien filmé, accompagné d'une musique agréable. Je note que les scénaristes n'ont accablé aucun de leurs personnages : tous ont leurs bons et leurs mauvais côtés, si bien qu'ils finissent (presque) tous par m'agacer à un moment ou à un autre, y compris quand l'intrigue leur permet de se "racheter". C'est un peu la limite de cette série, un peu trop inclusive à mon goût et qui semble soutenir l'idée qu'il n'existe pas de méchante personne, juste des gens ordinaires qui, parfois ont dérivé.

dimanche, 07 novembre 2021

Manhunt : sur la piste du tueur

   Pour une raison qui m'est inconnue, ce dimanche soir, France 3 a remplacé l'excellente McDonald & Dodds par une autre série britannique, d'anthologie celle-là. Les trois épisodes de la première saison de Manhunt traitent d'une seule affaire criminelle.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Cette affaire n'est pas fictive, mais bien réelle. Le scénario est inspiré du récit qu'en a fait le principal enquêteur de l'époque : Colin Sutton, au centre sur l'image ci-dessus. Mais la traque du criminel fut une œuvre collective, qui impliqua des dizaines de policiers.

    C'est à leur travail ingrat que cette mini-série rend hommage. Ici, vous ne verrez pas de poursuite en voiture, pas d'analyse ADN effectuée dans la journée ou de gadget électronique facilitant de travail des enquêteurs. Nous sommes au début des années 2000. Si les principaux personnages sont rivés à leurs téléphones portables, aucun de ceux-ci n'est "intelligent".

   La série ne fait pas dans le clinquant. Le chef de groupe (remarquablement interprété par Martin Clunes) est du genre bonnet de nuit, mais il se donne à fond dans son travail... ce qui lui pose quelques problèmes dans sa vie privée (classique). On notera aussi le souci de réalisme, jusque dans la mise en scène des petites tensions entre services de police et même au sein d'un service.

   Plusieurs pistes sont proposées aux téléspectateurs, avant qu'une sorte du lot. Mais avoir la certitude de la culpabilité d'un individu est une chose, pouvoir la prouver en est une autre. L'obstination des enquêteurs est-elle venue à bout de la ruse du criminel ? Je laisse à chacun le soin de le découvrir.

Manhunt : sur la piste du tueur

   Pour une raison qui m'est inconnue, ce dimanche soir, France 3 a remplacé l'excellente McDonald & Dodds par une autre série britannique, d'anthologie celle-là. Les trois épisodes de la première saison de Manhunt traitent d'une seule affaire criminelle.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Cette affaire n'est pas fictive, mais bien réelle. Le scénario est inspiré du récit qu'en a fait le principal enquêteur de l'époque : Colin Sutton, au centre sur l'image ci-dessus. Mais la traque du criminel fut une œuvre collective, qui impliqua des dizaines de policiers.

    C'est à leur travail ingrat que cette mini-série rend hommage. Ici, vous ne verrez pas de poursuite en voiture, pas d'analyse ADN effectuée dans la journée ou de gadget électronique facilitant de travail des enquêteurs. Nous sommes au début des années 2000. Si les principaux personnages sont rivés à leurs téléphones portables, aucun de ceux-ci n'est "intelligent".

   La série ne fait pas dans le clinquant. Le chef de groupe (remarquablement interprété par Martin Clunes) est du genre bonnet de nuit, mais il se donne à fond dans son travail... ce qui lui pose quelques problèmes dans sa vie privée (classique). On notera aussi le souci de réalisme, jusque dans la mise en scène des petites tensions entre services de police et même au sein d'un service.

   Plusieurs pistes sont proposées aux téléspectateurs, avant qu'une sorte du lot. Mais avoir la certitude de la culpabilité d'un individu est une chose, pouvoir la prouver en est une autre. L'obstination des enquêteurs est-elle venue à bout de la ruse du criminel ? Je laisse à chacun le soin de le découvrir.

samedi, 06 novembre 2021

Meurtres à Marie-Galante

   Ce samedi soir, France 3 propose un nouvel épisode inédit de sa collection Meurtres à... Il a été tourné en Guadeloupe (comme la série Meurtres au paradis), plus précisément à Marie-Galante, l'île située entre le "continent" (l'île principale, en forme de papillon) et la Dominique.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   L'histoire débute avec la découverte d'un cadavre au lieu dit "La Mare au punch", célèbre en raison d'un conflit qui a éclaté juste après l'abolition de l'esclavage, au milieu du XIXe siècle.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Ce début est trompeur, puisque la majorité de l'intrigue a pour cadre la moitié nord de l'île. C'est l'occasion de découvrir des paysages magnifiques et quelques lieux emblématiques, comme la Gueule Grand Gouffre, l'Anse la Cuve, l'Anse du Coq ou la Plage du Massacre (dite aussi Plage du Vieux Fort).

   À ce propos, il me semble que le scénario repose sur une approximation géographique. Ces petites baies (anses) sont montrées comme étant des zones de débarquement de migrants clandestins originaires de la Dominique. Or, celle-ci est située au sud de Marie-Galante. Il serait donc logique que les migrants débarquent sur la côte sud de l'île. D'ailleurs, en 2019, quand la police aux frontières a démantelé un réseau, c'est dans le Sud, à Grand-Bourg et Capesterre, que les interpellations ont eu lieu.

   Ces détails ne feront sans doute tiquer que les téléspectateurs locaux. Les autres se laisseront emporter (ou pas) par la beauté des paysages, une intrigue assez bien construite et une interprétation moins mauvaise que dans d'autres épisodes de la collection. À signaler la présence au générique de Pascal Légitimus, Firmine Richard et Éric Viellard.

Meurtres à Marie-Galante

   Ce samedi soir, France 3 propose un nouvel épisode inédit de sa collection Meurtres à... Il a été tourné en Guadeloupe (comme la série Meurtres au paradis), plus précisément à Marie-Galante, l'île située entre le "continent" (l'île principale, en forme de papillon) et la Dominique.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   L'histoire débute avec la découverte d'un cadavre au lieu dit "La Mare au punch", célèbre en raison d'un conflit qui a éclaté juste après l'abolition de l'esclavage, au milieu du XIXe siècle.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Ce début est trompeur, puisque la majorité de l'intrigue a pour cadre la moitié nord de l'île. C'est l'occasion de découvrir des paysages magnifiques et quelques lieux emblématiques, comme la Gueule Grand Gouffre, l'Anse la Cuve, l'Anse du Coq ou la Plage du Massacre (dite aussi Plage du Vieux Fort).

   À ce propos, il me semble que le scénario repose sur une approximation géographique. Ces petites baies (anses) sont montrées comme étant des zones de débarquement de migrants clandestins originaires de la Dominique. Or, celle-ci est située au sud de Marie-Galante. Il serait donc logique que les migrants débarquent sur la côte sud de l'île. D'ailleurs, en 2019, quand la police aux frontières a démantelé un réseau, c'est dans le Sud, à Grand-Bourg et Capesterre, que les interpellations ont eu lieu.

   Ces détails ne feront sans doute tiquer que les téléspectateurs locaux. Les autres se laisseront emporter (ou pas) par la beauté des paysages, une intrigue assez bien construite et une interprétation moins mauvaise que dans d'autres épisodes de la collection. À signaler la présence au générique de Pascal Légitimus, Firmine Richard et Éric Viellard.

lundi, 01 novembre 2021

Eugénie Grandet

   Séance de rattrapage ce week-end prolongé, avec l'autre adaptation de Balzac encore sur nos écrans, celle-ci moins clinquante et moins populiste qu'Illusions perdues.

   Ce fut aussi l'occasion pour moi de me replonger dans un roman que j'avais découvert à l'adolescence. (François Mitterrand était président de la République... c'est vous dire si ça date !) Le film de Marc Dugain (dont j'avais bien aimé L'Échange des princesses) n'est pas une adaptation fidèle, plutôt une adaptation-transposition, avec une connotation féministe prononcée.

   C'est l'un des débats nés autour de ce film : ne dénature-t-il pas l'œuvre de Balzac, pour lui faire dire ce qu'il n'a pas écrit il y a près de 200 ans ? Ainsi, l'écrivain tourangeau n'était pas féministe, mais il s'est intéressé à la condition féminine. Je trouve que, dans ce domaine, les choix de Dugain sont pertinents, mettant en scène la lente émancipation de l'héroïne. (Dans le roman, elle finit par contracter un mariage blanc.)

   Un autre débat porte sur l'aspect esthétique. C'est réalisé de manière austère, certaines scènes semblant éclairées uniquement à la chandelle. Le but est de montrer la frugalité du quotidien de la famille Grandet, alors que le père a secrètement placé des millions, auxquels il ne veut pas toucher (et dont sa famille ignore tout). Incidemment, ces scènes sont d'une grande beauté formelle. J'aime cette austérité au service de l'ambiance.

   Je suis plus partagé sur l'aspect romantique de l'histoire. (L'ironie de Balzac a hélas été en partie gommée.) Dans l’œuvre d'origine, Eugénie est une jeune femme naïve, pas très jolie, qui s'entiche d'un cousin falot, totalement superficiel. Dans le film, il est impossible d'être insensible à la beauté simple de Joséphine Japy, le personnage de Charles ayant été modifié pour le rendre plus séduisant, moins superficiel.

cinéma,cinema,film,films,histoire,livres,livre,roman,romans

   En revanche, le portrait du père Grandet (Olivier Gourmet, une fois de plus formidable) a été chargé, lui faisant notamment suggérer la "traite des nègres" comme activité commerciale à son neveu, alors que, pour Balzac, c'est le jeune homme parti en Asie qui a de lui-même choisi ce moyen plus immoral lucratif de gagner sa vie.

   J'ajoute que la scène (décisive) se déroulant une nuit, dans la chambre occupée par le cousin, est impensable dans la mentalité de l'époque. Dans le roman, cette nuit particulière est occupée par la rédaction puis la lecture de lettres, qui en apprennent beaucoup à l'héroïne.

   Quoi qu'il en soit, les acteurs sont excellents. C'est du beau travail, avec cette fin inédite dont on sent qu'elle a été conçue pour faire écho à notre époque.

   P.S.

   Je ne résiste pas au plaisir de citer un passage du roman d'Honoré de Balzac, écrivain lucide sur son époque... et sur la nôtre : « Il est dans le caractère français de s'enthousiasmer, de se colérer, de se passionner pour le météore du moment, pour les bâtons flottants de l'actualité. Les êtres collectifs, les peuples, seraient-ils donc sans mémoire ? »

Eugénie Grandet

   Séance de rattrapage ce week-end prolongé, avec l'autre adaptation de Balzac encore sur nos écrans, celle-ci moins clinquante et moins populiste qu'Illusions perdues.

   Ce fut aussi l'occasion pour moi de me replonger dans un roman que j'avais découvert à l'adolescence. (François Mitterrand était président de la République... c'est vous dire si ça date !) Le film de Marc Dugain (dont j'avais bien aimé L'Échange des princesses) n'est pas une adaptation fidèle, plutôt une adaptation-transposition, avec une connotation féministe prononcée.

   C'est l'un des débats nés autour de ce film : ne dénature-t-il pas l'œuvre de Balzac, pour lui faire dire ce qu'il n'a pas écrit il y a près de 200 ans ? Ainsi, l'écrivain tourangeau n'était pas féministe, mais il s'est intéressé à la condition féminine. Je trouve que, dans ce domaine, les choix de Dugain sont pertinents, mettant en scène la lente émancipation de l'héroïne. (Dans le roman, elle finit par contracter un mariage blanc.)

   Un autre débat porte sur l'aspect esthétique. C'est réalisé de manière austère, certaines scènes semblant éclairées uniquement à la chandelle. Le but est de montrer la frugalité du quotidien de la famille Grandet, alors que le père a secrètement placé des millions, auxquels il ne veut pas toucher (et dont sa famille ignore tout). Incidemment, ces scènes sont d'une grande beauté formelle. J'aime cette austérité au service de l'ambiance.

   Je suis plus partagé sur l'aspect romantique de l'histoire. (L'ironie de Balzac a hélas été en partie gommée.) Dans l’œuvre d'origine, Eugénie est une jeune femme naïve, pas très jolie, qui s'entiche d'un cousin falot, totalement superficiel. Dans le film, il est impossible d'être insensible à la beauté simple de Joséphine Japy, le personnage de Charles ayant été modifié pour le rendre plus séduisant, moins superficiel.

cinéma,cinema,film,films,histoire,livres,livre,roman,romans

   En revanche, le portrait du père Grandet (Olivier Gourmet, une fois de plus formidable) a été chargé, lui faisant notamment suggérer la "traite des nègres" comme activité commerciale à son neveu, alors que, pour Balzac, c'est le jeune homme parti en Asie qui a de lui-même choisi ce moyen plus immoral lucratif de gagner sa vie.

   J'ajoute que la scène (décisive) se déroulant une nuit, dans la chambre occupée par le cousin, est impensable dans la mentalité de l'époque. Dans le roman, cette nuit particulière est occupée par la rédaction puis la lecture de lettres, qui en apprennent beaucoup à l'héroïne.

   Quoi qu'il en soit, les acteurs sont excellents. C'est du beau travail, avec cette fin inédite dont on sent qu'elle a été conçue pour faire écho à notre époque.

   P.S.

   Je ne résiste pas au plaisir de citer un passage du roman d'Honoré de Balzac, écrivain lucide sur son époque... et sur la nôtre : « Il est dans le caractère français de s'enthousiasmer, de se colérer, de se passionner pour le météore du moment, pour les bâtons flottants de l'actualité. Les êtres collectifs, les peuples, seraient-ils donc sans mémoire ? »

dimanche, 31 octobre 2021

The French Dispatch

   Le directeur du supplément hebdomadaire (rédigé en France) d'un quotidien du Kansas décède à la veille de la parution du dernier numéro du magazine, qui va se transformer en hommage. Quatre principaux "papiers" sont mis en exergue. Chacun évoque un pan de la société française de la Ve République, mais aussi les petites et grandes faiblesses de la nature humaine, universelle.

   Trois ans après l'excellent L'Île aux chiens, Wes Anderson est de retour, avec une partie de ses acteurs habituels et quelques nouvelles têtes. La richesse de la distribution est impressionnante, en particulier pour les spectateurs français, qui peuvent s'amuser à rechercher, au détour d'une scène, outre les vedettes anglo-saxonnes, quelques visages connus chez nous.

   La première histoire nous fait suivre les déambulations citadines d'un drôle de cycliste américain (Owen Wilson). Si certains quartiers de la ville d'Angoulême ont servi de modèle, à la vision de la séquence, il semble évident qu'il s'agit plutôt de Paris, mais un Paris en partie disparu ou fantasmé, un Paris de Province. On est au début de la Ve République, en pleine Guerre d'Algérie, avec des 2 CV dans la rue et des Français qui fument, non pas des Gauloises, mais des... Gaullistes ! C'est réalisé avec brio... et ironie. Une bonne entrée en matière.

   La deuxième histoire est pour moi la plus brillante, la plus virtuose au niveau de la mise en scène (toujours aussi géométrique) et la plus emballante au niveau de la caractérisation des personnages. Deux sortent du lot, formant un duo façon "la belle et la bête" : l'assassin-poète (Benicio del Toro, délicieusement animal) et sa muse (Léa Seydoux, vraiment bien... en tout cas meilleure que dans Mourir peut attendre). Comme je n'avais quasiment rien lu ni vu avant de me rendre à la séance, j'ai pu goûter toute la saveur de la première scène avec le peintre et son modèle. Anderson joue avec le regard du spectateur, qui, à partir de la représentation classique d'un peintre bougon et d'une superbe modèle, nous fait imaginer quelque chose qui n'est pas la réalité. Le rapport dominant/dominé est ici assez subtil, surtout quand on découvre quel est le véritable métier de la "muse" ! C'est au détour de cette séquence que l'on croise Adrien Brody, épatant en marchand d'art peu scrupuleux.

   La troisième histoire, pour intéressante qu'elle soit, constitue une petite descente en qualité. On nous conte les débuts du mouvement étudiant de Mai 68, sur le mode d'une chronique mêlant réalisme poétique et folie douce à la Anderson. C'est l'occasion de retrouver la fabuleuse Frances McDomand (qu'on a pu apprécier cet été dans Nomadland). Trois éléments font la saveur de cette séquence : la relation inattendue entre la journaliste et le jeune étudiant (Timothée Chalamet, potable), les questionnements de celle-ci concernant sa déontologie et la peinture ironique de la révolte estudiantine.

   La quatrième histoire est plus macabre. C'est celle qui compte le plus de morts et elle met en scène des pulsions malsaines, auxquelles s'oppose l'amour de la cuisine bien faite. En théorie, l'article qui sert de support à cette intrigue doit mettre en valeur un chef japonais. Mais c'est l'enlèvement du fils du commissaire (celui-ci incarné par Mathieu Amalric, qu'on a connu plus mauvais) qui sert de fil rouge à l'histoire. Elle nous est racontée par un journaliste noir homosexuel, invité d'un talk-show américain... présenté par l'excellent Liev Schreiber. Ce n'est pas la meilleure histoire du lot, mais elle est assez originale, d'autant qu'elle est en partie réalisée sous forme de film d'animation.

   Voilà. Le ton et la mise en scène ont (comme d'habitude) de quoi dérouter les spectateurs. J'ai beaucoup aimé (en version originale sous-titrée)... et j'ai assez envie d'y retourner, pour me (re)plonger dans les détails des plans méticuleusement construits.

11:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

The French Dispatch

   Le directeur du supplément hebdomadaire (rédigé en France) d'un quotidien du Kansas décède à la veille de la parution du dernier numéro du magazine, qui va se transformer en hommage. Quatre principaux "papiers" sont mis en exergue. Chacun évoque un pan de la société française de la Ve République, mais aussi les petites et grandes faiblesses de la nature humaine, universelle.

   Trois ans après l'excellent L'Île aux chiens, Wes Anderson est de retour, avec une partie de ses acteurs habituels et quelques nouvelles têtes. La richesse de la distribution est impressionnante, en particulier pour les spectateurs français, qui peuvent s'amuser à rechercher, au détour d'une scène, outre les vedettes anglo-saxonnes, quelques visages connus chez nous.

   La première histoire nous fait suivre les déambulations citadines d'un drôle de cycliste américain (Owen Wilson). Si certains quartiers de la ville d'Angoulême ont servi de modèle, à la vision de la séquence, il semble évident qu'il s'agit plutôt de Paris, mais un Paris en partie disparu ou fantasmé, un Paris de Province. On est au début de la Ve République, en pleine Guerre d'Algérie, avec des 2 CV dans la rue et des Français qui fument, non pas des Gauloises, mais des... Gaullistes ! C'est réalisé avec brio... et ironie. Une bonne entrée en matière.

   La deuxième histoire est pour moi la plus brillante, la plus virtuose au niveau de la mise en scène (toujours aussi géométrique) et la plus emballante au niveau de la caractérisation des personnages. Deux sortent du lot, formant un duo façon "la belle et la bête" : l'assassin-poète (Benicio del Toro, délicieusement animal) et sa muse (Léa Seydoux, vraiment bien... en tout cas meilleure que dans Mourir peut attendre). Comme je n'avais quasiment rien lu ni vu avant de me rendre à la séance, j'ai pu goûter toute la saveur de la première scène avec le peintre et son modèle. Anderson joue avec le regard du spectateur, qui, à partir de la représentation classique d'un peintre bougon et d'une superbe modèle, nous fait imaginer quelque chose qui n'est pas la réalité. Le rapport dominant/dominé est ici assez subtil, surtout quand on découvre quel est le véritable métier de la "muse" ! C'est au détour de cette séquence que l'on croise Adrien Brody, épatant en marchand d'art peu scrupuleux.

   La troisième histoire, pour intéressante qu'elle soit, constitue une petite descente en qualité. On nous conte les débuts du mouvement étudiant de Mai 68, sur le mode d'une chronique mêlant réalisme poétique et folie douce à la Anderson. C'est l'occasion de retrouver la fabuleuse Frances McDomand (qu'on a pu apprécier cet été dans Nomadland). Trois éléments font la saveur de cette séquence : la relation inattendue entre la journaliste et le jeune étudiant (Timothée Chalamet, potable), les questionnements de celle-ci concernant sa déontologie et la peinture ironique de la révolte estudiantine.

   La quatrième histoire est plus macabre. C'est celle qui compte le plus de morts et elle met en scène des pulsions malsaines, auxquelles s'oppose l'amour de la cuisine bien faite. En théorie, l'article qui sert de support à cette intrigue doit mettre en valeur un chef japonais. Mais c'est l'enlèvement du fils du commissaire (celui-ci incarné par Mathieu Amalric, qu'on a connu plus mauvais) qui sert de fil rouge à l'histoire. Elle nous est racontée par un journaliste noir homosexuel, invité d'un talk-show américain... présenté par l'excellent Liev Schreiber. Ce n'est pas la meilleure histoire du lot, mais elle est assez originale, d'autant qu'elle est en partie réalisée sous forme de film d'animation.

   Voilà. Le ton et la mise en scène ont (comme d'habitude) de quoi dérouter les spectateurs. J'ai beaucoup aimé (en version originale sous-titrée)... et j'ai assez envie d'y retourner, pour me (re)plonger dans les détails des plans méticuleusement construits.

11:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 29 octobre 2021

Barbaque

   Pour bien comprendre sur quel registre s'est placé Fabrice Éboué dans son dernier film, il faut se dire que l'ambiance se situe quelque part entre Delicatessen (de Caro et Jeunet) et Les Tontons flingueurs. Seulement, ici, ce sont les végans que le héros envisage d'éparpiller, « façon puzzle ».

cinéma,cinema,film,films,société

   Fabrice Éboué n'a laissé à personne d'autre que lui le soin d'incarner ce boucher artisanal, amoureux de son métier, mais manquant de charisme. Les spectateurs attentifs remarqueront qu'il s'est fait une tête à la Jean-Pierre Darroussin.

cinéma,cinema,film,films,société

   Sa compagne (qui tient la caisse de la boucherie) est interprétée par une Marina Foïs vraiment flippante, encore plus que dans Irréprochable. Épouse frustrée, elle s'est découvert une passion pour les tueurs en série, dont elle suit les exploits à la télévision, ne ratant aucun épisode d'une émission présentée par l'inénarrable Christophe Hondelatte.

   Le plus drôle (!) est que notre couple de bouchers devient tueur presque par hasard. Mais c'est qu'ils vont y prendre goût... d'autant que la nouvelle viande (succulente) qu'ils se mettent à proposer à leur clientèle (sous l'appellation "porc d'Iran" !) obtient un succès considérable. Voilà qui renfloue les caisses de la boucherie... tout en débarrassant ces nouveaux Bonnie & Clyde de gêneurs horripilants.

   Cela nous mène au portrait qui est fait des militants végans. Il est plus nuancé que ce qui pourrait sembler au premier abord. Même le personnage du gendre, véritable tête-à-claques (belle composition de Victor Meutelet), a sa chance. Du côté des bouchers, on oppose le "bon artisan" à l'horrible industriel qui, non seulement s'enrichit en vendant de la merde, mais est en plus un gros con raciste. À ce sujet, Éboué s'autorise quelques saillies au niveau des dialogues, saillies qui seraient sans doute moins bien passées si le réalisateur avait été blanc. De manière générale, j'ai trouvé les dialogues bien écrits. L'humour ne vise pas le plus haut raffinement, mais il est efficace.

   Sans surprise, l'étude de caractères la plus poussée est celle des personnages principaux. D'un côté ce sont les héros auxquels (si l'on n'est pas végan) on est tenté de s'identifier. D'un autre côté, cela va tellement loin que l'on est obligé de prendre du recul vis-à-vis d'eux. On comprend que leur fuite en avant est aussi une manière de redonner vie à leur couple.

   La violence physique (avec un aspect gore) est présente presque dès le début... mais disparaît assez vite. On nous fait mariner pendant plusieurs quarts d'heure avant de nous gratifier de nouvelles giclées de sang à visée charcutière. (Les amateurs de musique classique apprécieront le contraste entre l'arrière-plan sonore et ce qui est montré à l'écran.) Ce devient même tarantinesque, en particulier dans l'avant-dernière séquence (à la boucherie), qui contient une scène d'anthologie se déroulant dans la chambre froide... à déguster sans modération !

Barbaque

   Pour bien comprendre sur quel registre s'est placé Fabrice Éboué dans son dernier film, il faut se dire que l'ambiance se situe quelque part entre Delicatessen (de Caro et Jeunet) et Les Tontons flingueurs. Seulement, ici, ce sont les végans que le héros envisage d'éparpiller, « façon puzzle ».

cinéma,cinema,film,films,société

   Fabrice Éboué n'a laissé à personne d'autre que lui le soin d'incarner ce boucher artisanal, amoureux de son métier, mais manquant de charisme. Les spectateurs attentifs remarqueront qu'il s'est fait une tête à la Jean-Pierre Darroussin.

cinéma,cinema,film,films,société

   Sa compagne (qui tient la caisse de la boucherie) est interprétée par une Marina Foïs vraiment flippante, encore plus que dans Irréprochable. Épouse frustrée, elle s'est découvert une passion pour les tueurs en série, dont elle suit les exploits à la télévision, ne ratant aucun épisode d'une émission présentée par l'inénarrable Christophe Hondelatte.

   Le plus drôle (!) est que notre couple de bouchers devient tueur presque par hasard. Mais c'est qu'ils vont y prendre goût... d'autant que la nouvelle viande (succulente) qu'ils se mettent à proposer à leur clientèle (sous l'appellation "porc d'Iran" !) obtient un succès considérable. Voilà qui renfloue les caisses de la boucherie... tout en débarrassant ces nouveaux Bonnie & Clyde de gêneurs horripilants.

   Cela nous mène au portrait qui est fait des militants végans. Il est plus nuancé que ce qui pourrait sembler au premier abord. Même le personnage du gendre, véritable tête-à-claques (belle composition de Victor Meutelet), a sa chance. Du côté des bouchers, on oppose le "bon artisan" à l'horrible industriel qui, non seulement s'enrichit en vendant de la merde, mais est en plus un gros con raciste. À ce sujet, Éboué s'autorise quelques saillies au niveau des dialogues, saillies qui seraient sans doute moins bien passées si le réalisateur avait été blanc. De manière générale, j'ai trouvé les dialogues bien écrits. L'humour ne vise pas le plus haut raffinement, mais il est efficace.

   Sans surprise, l'étude de caractères la plus poussée est celle des personnages principaux. D'un côté ce sont les héros auxquels (si l'on n'est pas végan) on est tenté de s'identifier. D'un autre côté, cela va tellement loin que l'on est obligé de prendre du recul vis-à-vis d'eux. On comprend que leur fuite en avant est aussi une manière de redonner vie à leur couple.

   La violence physique (avec un aspect gore) est présente presque dès le début... mais disparaît assez vite. On nous fait mariner pendant plusieurs quarts d'heure avant de nous gratifier de nouvelles giclées de sang à visée charcutière. (Les amateurs de musique classique apprécieront le contraste entre l'arrière-plan sonore et ce qui est montré à l'écran.) Ce devient même tarantinesque, en particulier dans l'avant-dernière séquence (à la boucherie), qui contient une scène d'anthologie se déroulant dans la chambre froide... à déguster sans modération !

mercredi, 27 octobre 2021

McDonald & Dodds

   France 3 continue à nous gâter le dimanche soir. Après nous avoir proposé la quatorzième saison des Enquêtes de Murdoch, la chaîne publique a décidé de nous faire découvrir une nouvelle série britannique.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Deux policiers aux tempéraments très différents sont amenés à travailler ensemble, à Bath, dans le sud-ouest de l'Angleterre.

   À gauche ci-dessus se trouve le lieutenant Dodds (Jason Watkins, un visage familier aux téléspectateurs d'outre-Manche). C'est un vétéran de la police locale, placardisé depuis une dizaine d'années. On le méprise parfois, le sous-estime souvent. Il est pourtant méticuleux et compétent.

   À droite se trouve la capitaine Lauren McDonald (Tala Gouveia, inconnue au bataillon). D'origine modeste, elle s'est élevée à la force du poignet, se faisant remarquer par ses qualités dans la police de Londres. Son arrivée à Bath n'est au départ qu'une étape (censée être brève), dans une carrière qu'elle espère mener au plus haut niveau.

   Entre l'éruptive capitaine et le mollasson lieutenant, l'alchimie met du temps à fonctionner. Dans le premier épisode (diffusé dimanche 24 octobre), on assiste à leur rencontre et aux débuts chaotiques de leur collaboration. Les deux officiers de police finissent par comprendre qu'ils ont intérêt à s'entendre : ce sont deux outsiders (la femme noire qui ne s'en laisse pas compter et le vieil homme blanc intello coincé), animés par une identique volonté de traquer les criminels, même si elle s'exprime de façon différente.

   Dans cet épisode fondateur, ils ont fort à faire : l'assassin est particulièrement retors. Ils vont avoir besoin de toute leur ingéniosité et d'un peu de chance pour en venir à bout, un peu à la manière de Colombo (qui semble avoir inspiré le personnage de Dodds).

   La musique est légère, les dialogues (à savourer in English, of course) piquants. Je me suis régalé.

McDonald & Dodds

   France 3 continue à nous gâter le dimanche soir. Après nous avoir proposé la quatorzième saison des Enquêtes de Murdoch, la chaîne publique a décidé de nous faire découvrir une nouvelle série britannique.

cinéma,cinema,film,films,télévision

   Deux policiers aux tempéraments très différents sont amenés à travailler ensemble, à Bath, dans le sud-ouest de l'Angleterre.

   À gauche ci-dessus se trouve le lieutenant Dodds (Jason Watkins, un visage familier aux téléspectateurs d'outre-Manche). C'est un vétéran de la police locale, placardisé depuis une dizaine d'années. On le méprise parfois, le sous-estime souvent. Il est pourtant méticuleux et compétent.

   À droite se trouve la capitaine Lauren McDonald (Tala Gouveia, inconnue au bataillon). D'origine modeste, elle s'est élevée à la force du poignet, se faisant remarquer par ses qualités dans la police de Londres. Son arrivée à Bath n'est au départ qu'une étape (censée être brève), dans une carrière qu'elle espère mener au plus haut niveau.

   Entre l'éruptive capitaine et le mollasson lieutenant, l'alchimie met du temps à fonctionner. Dans le premier épisode (diffusé dimanche 24 octobre), on assiste à leur rencontre et aux débuts chaotiques de leur collaboration. Les deux officiers de police finissent par comprendre qu'ils ont intérêt à s'entendre : ce sont deux outsiders (la femme noire qui ne s'en laisse pas compter et le vieil homme blanc intello coincé), animés par une identique volonté de traquer les criminels, même si elle s'exprime de façon différente.

   Dans cet épisode fondateur, ils ont fort à faire : l'assassin est particulièrement retors. Ils vont avoir besoin de toute leur ingéniosité et d'un peu de chance pour en venir à bout, un peu à la manière de Colombo (qui semble avoir inspiré le personnage de Dodds).

   La musique est légère, les dialogues (à savourer in English, of course) piquants. Je me suis régalé.

mardi, 26 octobre 2021

Enfer blanc

   France 2 a commencé la diffusion de cette mini-série scandinave (comptant huit épisodes au total). Sur le site de France Télévisions, on n'a le plus souvent accès qu'à la version doublée en français. Sur ma Livebox, je peux regarder tous les épisodes en version originale sous-titrée, une version polyglotte puisqu'on y entend parler anglais, danois, suédois, russe et groenlandais.

   Le premier épisode plante le décor. On suit une ministre suédoise, qui a rendez-vous au Groenland pour des négociations devant déboucher sur la signature d'un nouveau traité entre les nations arctiques. Sa venue doit débuter par la visite du navire d'une compagnie pétrolière, dont les dirigeants tentent d'influencer la ministre, de sensibilité écologiste. Mais elle décide de "sécher" la rencontre à la dernière minute, y envoyant l'un de ses conseillers (qui est le compagnon d'une policière que connaît la ministre). La visite se déroule malgré tout, interrompue par une attaque armée. Tous les occupants du bateau disparaissent. En Suède, la policière, bien qu'enceinte, décide de se rendre sur place pour retrouver son compagnon. Au Groenland, la police locale semble dépassée. De plus, son chef (un type sérieux, un natif) est en pleine crise de couple. Sa supérieure (danoise), à cheval sur le règlement, vient prendre la direction des opérations.

   Le deuxième épisode est plus politique. On nous plonge dans les négociations internationales. Pour conclure un nouveau traité, l'unanimité est requise. Or, il semble que le représentant russe fasse de l'obstruction, plus ou moins ouvertement. Quant à l'équipage du navire pétrolier, il demeure introuvable, le bateau ayant été récupéré vide. La policière suédoise continue à enquêter de son côté, sans s'embarrasser des règles (policières comme diplomatiques). Les enquêteurs finissent par apprendre que l'un des membres de l'équipage a été payé pour laisser sa place. Le chef de la police locale le connaît : c'est un compagnon de beuverie de son épouse.

   Le mystère semble s'éclaircir un peu dans le troisième épisode. La clé de l'énigme est un gigantesque gisement d'hydrocarbures, qui aurait été découvert au large des côtes groenlandaises, dans une zone jusqu'à présent inexploitée. Mais qui est au courant et qui a planifié l'enlèvement de l'équipage ? Les spectateurs voient enfin ce qu'est devenu celui-ci. D'autres otages l'ont rejoint. Pour certains personnages, cela devient de plus en plus risqué.

   C'est prenant. L'intrigue est en prise avec les questionnements contemporains : le changement climatique, les coups bas diplomatiques, les relations post-coloniales et la place des femmes dans la société. C'est mis en scène avec une certaine subtilité. C'est surtout bien joué et superbement filmé : les plans extérieurs sont à couper le souffle. La musique est entraînante, sans être trop présente.

   Je recommande vivement et je suis impatient de voir la suite. (Les épisodes restent en ligne jusqu'en décembre prochain.)

Enfer blanc

   France 2 a commencé la diffusion de cette mini-série scandinave (comptant huit épisodes au total). Sur le site de France Télévisions, on n'a le plus souvent accès qu'à la version doublée en français. Sur ma Livebox, je peux regarder tous les épisodes en version originale sous-titrée, une version polyglotte puisqu'on y entend parler anglais, danois, suédois, russe et groenlandais.

   Le premier épisode plante le décor. On suit une ministre suédoise, qui a rendez-vous au Groenland pour des négociations devant déboucher sur la signature d'un nouveau traité entre les nations arctiques. Sa venue doit débuter par la visite du navire d'une compagnie pétrolière, dont les dirigeants tentent d'influencer la ministre, de sensibilité écologiste. Mais elle décide de "sécher" la rencontre à la dernière minute, y envoyant l'un de ses conseillers (qui est le compagnon d'une policière que connaît la ministre). La visite se déroule malgré tout, interrompue par une attaque armée. Tous les occupants du bateau disparaissent. En Suède, la policière, bien qu'enceinte, décide de se rendre sur place pour retrouver son compagnon. Au Groenland, la police locale semble dépassée. De plus, son chef (un type sérieux, un natif) est en pleine crise de couple. Sa supérieure (danoise), à cheval sur le règlement, vient prendre la direction des opérations.

   Le deuxième épisode est plus politique. On nous plonge dans les négociations internationales. Pour conclure un nouveau traité, l'unanimité est requise. Or, il semble que le représentant russe fasse de l'obstruction, plus ou moins ouvertement. Quant à l'équipage du navire pétrolier, il demeure introuvable, le bateau ayant été récupéré vide. La policière suédoise continue à enquêter de son côté, sans s'embarrasser des règles (policières comme diplomatiques). Les enquêteurs finissent par apprendre que l'un des membres de l'équipage a été payé pour laisser sa place. Le chef de la police locale le connaît : c'est un compagnon de beuverie de son épouse.

   Le mystère semble s'éclaircir un peu dans le troisième épisode. La clé de l'énigme est un gigantesque gisement d'hydrocarbures, qui aurait été découvert au large des côtes groenlandaises, dans une zone jusqu'à présent inexploitée. Mais qui est au courant et qui a planifié l'enlèvement de l'équipage ? Les spectateurs voient enfin ce qu'est devenu celui-ci. D'autres otages l'ont rejoint. Pour certains personnages, cela devient de plus en plus risqué.

   C'est prenant. L'intrigue est en prise avec les questionnements contemporains : le changement climatique, les coups bas diplomatiques, les relations post-coloniales et la place des femmes dans la société. C'est mis en scène avec une certaine subtilité. C'est surtout bien joué et superbement filmé : les plans extérieurs sont à couper le souffle. La musique est entraînante, sans être trop présente.

   Je recommande vivement et je suis impatient de voir la suite. (Les épisodes restent en ligne jusqu'en décembre prochain.)

lundi, 25 octobre 2021

La bite d'Apollon

   Il n'est pas facile d'être un vieux pêcheur célibataire dans la bande de Gaza. Il faut jongler entre la dictature du Hamas, le regard inquisiteur des voisins (souvent bigots) et les interdictions israéliennes. Tel est le défi qui se présente à Issa, farouchement attaché à son indépendance, mais qui se verrait bien finir ses jours en compagnie d'une charmante veuve, couturière de son état. Salim Daw et Hiam Abbas incarnent avec un plaisir évident ces deux figures au caractère bien trempé.

   La première partie de Gaza mon amour pose ces principes, tout en présentant quelques personnages secondaires : la fille occidentalisée de Siham, des miliciens plus intéressés par les films de guerre que par leur travail et un jeune commerçant (ami d'Issa) qui ne songe qu'à émigrer.

   Un soir, le pêcheur remonte une drôle de cargaison dans ses filets : une statue d'un dieu antique, priapique de surcroît. (L'histoire s'inspire de celle dite de l'Apollon de Gaza.) Dans un premier temps, Issa décide de garder la statue pour lui. Peut-être parce qu'elle est belle. Peut-être aussi en songeant à la récompense qu'il pourrait toucher. Mais c'est le début de ses ennuis avec la police gazaouie, qui a des espions partout. La deuxième partie met en scène les relations tumultueuses du héros avec les forces de l'ordre du Hamas, des culs-bénits avides de faire respecter leur version de l'islamiquement correct... mais qui songent eux aussi au profit que pourrait leur rapporter cette statue. Ces événements perturbent les travaux d'approche d'Issa, qui songe à demander la couturière en mariage. Dans le même temps, sa sœur se désespère qu'il ne choisisse pas un meilleur parti. Le vaudeville n'est pas loin.

   La troisième partie est celle des dénouements : celui de la tentative d'émigration, celui de l'histoire d'amour et celui du périple de la statue (dont il manque un morceau crucial, détaché dans des circonstances que je m'interdis de révéler ici).

   Les réalisateurs, les frères Arab et Tarzan Nasser (auteurs de Dégradé), ont visiblement l'esprit facétieux. Mine de rien, ce petit film est une satire bien troussée du régime dictatorial en place à Gaza, l'obsession phallique des autorités ne se limitant pas à la statue antique : l'admiration éprouvée par les hommes à l'arrivée d'une nouvelle grosse roquette en dit plus qu'une étude psychanalytique...

   P.S.

   Cette coproduction franco-germano-jordano-qatarie essaie de jouer sur tous les tableaux. D'un côté, c'est d'abord un film de festival, destiné au public international... d'où le fait que le Hamas soit égratigné. De l'autre côté, on y perçoit une dénonciation (surtout symbolique) de l'action de l'armée israélienne. Enfin je note que, d'après les sous-titres, l'étendue de la zone de pêche est beaucoup plus restreinte qu'en réalité. Le film l'estime à une bande située à moins de cinq kilomètres des côtes, alors que le gouvernement israélien l'a portée à 15 milles nautiques (environ 28 kilomètres) quand le Hamas a respecté les trêves conclues. Ces dernières années, cette bande a oscillé entre 9 et 12 milles (17-22 kilomètres), soit bien plus que dans le film.

La bite d'Apollon

   Il n'est pas facile d'être un vieux pêcheur célibataire dans la bande de Gaza. Il faut jongler entre la dictature du Hamas, le regard inquisiteur des voisins (souvent bigots) et les interdictions israéliennes. Tel est le défi qui se présente à Issa, farouchement attaché à son indépendance, mais qui se verrait bien finir ses jours en compagnie d'une charmante veuve, couturière de son état. Salim Daw et Hiam Abbas incarnent avec un plaisir évident ces deux figures au caractère bien trempé.

   La première partie de Gaza mon amour pose ces principes, tout en présentant quelques personnages secondaires : la fille occidentalisée de Siham, des miliciens plus intéressés par les films de guerre que par leur travail et un jeune commerçant (ami d'Issa) qui ne songe qu'à émigrer.

   Un soir, le pêcheur remonte une drôle de cargaison dans ses filets : une statue d'un dieu antique, priapique de surcroît. (L'histoire s'inspire de celle dite de l'Apollon de Gaza.) Dans un premier temps, Issa décide de garder la statue pour lui. Peut-être parce qu'elle est belle. Peut-être aussi en songeant à la récompense qu'il pourrait toucher. Mais c'est le début de ses ennuis avec la police gazaouie, qui a des espions partout. La deuxième partie met en scène les relations tumultueuses du héros avec les forces de l'ordre du Hamas, des culs-bénits avides de faire respecter leur version de l'islamiquement correct... mais qui songent eux aussi au profit que pourrait leur rapporter cette statue. Ces événements perturbent les travaux d'approche d'Issa, qui songe à demander la couturière en mariage. Dans le même temps, sa sœur se désespère qu'il ne choisisse pas un meilleur parti. Le vaudeville n'est pas loin.

   La troisième partie est celle des dénouements : celui de la tentative d'émigration, celui de l'histoire d'amour et celui du périple de la statue (dont il manque un morceau crucial, détaché dans des circonstances que je m'interdis de révéler ici).

   Les réalisateurs, les frères Arab et Tarzan Nasser (auteurs de Dégradé), ont visiblement l'esprit facétieux. Mine de rien, ce petit film est une satire bien troussée du régime dictatorial en place à Gaza, l'obsession phallique des autorités ne se limitant pas à la statue antique : l'admiration éprouvée par les hommes à l'arrivée d'une nouvelle grosse roquette en dit plus qu'une étude psychanalytique...

   P.S.

   Cette coproduction franco-germano-jordano-qatarie essaie de jouer sur tous les tableaux. D'un côté, c'est d'abord un film de festival, destiné au public international... d'où le fait que le Hamas soit égratigné. De l'autre côté, on y perçoit une dénonciation (surtout symbolique) de l'action de l'armée israélienne. Enfin je note que, d'après les sous-titres, l'étendue de la zone de pêche est beaucoup plus restreinte qu'en réalité. Le film l'estime à une bande située à moins de cinq kilomètres des côtes, alors que le gouvernement israélien l'a portée à 15 milles nautiques (environ 28 kilomètres) quand le Hamas a respecté les trêves conclues. Ces dernières années, cette bande a oscillé entre 9 et 12 milles (17-22 kilomètres), soit bien plus que dans le film.