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dimanche, 30 mars 2014

Patéma et le monde inversé

   Cette animation japonaise présente un monde post-apocalyptique... en fait deux mondes, qui se touchent et où les effets de la gravité sont inverses. La plupart des habitants de l'un ignorent l'existence de l'autre. Deux adolescents (un de chaque monde), une fille et un garçon, vont partir à la découverte de l'autre.

   On appréciera la peinture d'un Etat totalitaire, sous la férule d'un dictateur mégalomaniaque, dont l'emblème rappellera bien des choses aux spectateurs d'Europe (et d'ailleurs) :

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   Le film repose sur un scénario très élaboré, évidemment inspiré d'oeuvres de science-fiction. On peut aussi y dénicher des références à des classiques du manga, comme Ghost in the Shell et Jin-Roh - La brigade des loups (regardez bien les uniformes des policiers).  De surcroît, il nous ménage deux coups de théâtre dans la dernière partie de l'histoire. Je pense que c'est un peu complexe pour des tout petits.

   On a toutefois pensé au public jeune : les héros sont entrés dans l'adolescence et l'expression des sentiments est assez stéréotypée, à l'image de ce que l'on trouve dans les séries qui nous viennent du pays du soleil levant. Les habitués de ce genre de productions ne seront pas étonnés par les visages des personnages, dévorés par de grands yeux expressifs.

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   Cette réserve émise, il faut par contre reconnaître que l'animation est d'une grande qualité. Les couleurs sont magnifiques et quelle richesse au niveau des décors ! Sur grand écran, c'est un plaisir des yeux. Je suis un peu plus mitigé sur le recours au flou dans certaines scènes. J'en comprends la raison, mais je trouve que l'on en abuse.

   Dernière bonne surprise : la réalisation. Ce n'est pas dans ce domaine qu'a priori on s'attend à être épaté, mais c'est pourtant le cas. On a tiré profit de l'inversion des gravités pour proposer des scènes d'une grande inventivité... et même d'une grande beauté :

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    Au niveau du cadrage, c'est excellent. Les visages comme les corps sont habilement disposés à différents endroits... et c'est parfois très drôle ! Je pense bien entendu à la rencontre entre les deux personnages principaux, mais aussi à la séquence qui voit deux garçons pénétrer au coeur de la tour principale de l'un des mondes. Pour échapper aux caméras de vidéosurveillance, ils se muent en acrobates du plafond !

   Comme dans toute bonne production nippone, l'histoire principale est enrichie de péripéties qui font intervenir une truculente galerie de personnages secondaires.

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   L'émotion n'est pas absente de l'histoire, puisque les deux personnages principaux ont subi la perte d'un proche. Leur audace (celle de transgresser les interdits de leur monde) est aussi liée à une quête personnelle. Sur le fond, l'histoire est un plaidoyer en faveur de l'acceptation des différences.

   C'est incontestablement l'un des films à voir en ce moment.

11:23 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 29 mars 2014

Wrong Cops

   C'est le nouveau nanard film d'auteur de Quentin Dupieux, remarqué naguère pour l'étonnant Rubber. On pourrait traduire le titre par "Mauvais Flics". On nous les présente dans la première partie du film... et c'est une belle brochette de nazes.

   Duke fume en mâchant un chewing-gum, écoute très fort de la musique très nulle... et revend de la drogue ! Mark Burnham a visiblement beaucoup aimé incarner cet enfoiré de première, dont la règle de conduite semble être : tout pour ma pomme.

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   Ses collègues ne valent guère mieux. Signalons Renato, un gras du bide que la possession d'un flingue aide à surmonter ses complexes. Il est fasciné par les seins et passe ses journées à tenter d'en voir un maximum, sur son ordi et dans les rues.

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   En général, il patrouille avec une jolie blonde, qui ferait passer Paris Hilton pour un modèle de classe et de distinction :

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   C'est une vraie peste, qui sait comment traiter les hommes pour qu'ils lui obéissent. L'un de ses collègues va en faire la triste expérience...

   Tout cela pourrait donner un de ces films indépendants audacieux que l'on a plaisir à découvrir chaque année. Mais le scénario est vraiment léger-léger. Si certaines scènes sont marrantes, l'ensemble manque de rythme, un défaut que l'on a tenté de masquer en nous plombant les tympans avec une bande-son composée à la presse hydraulique.

   Pour nous, les Frenchies, ce film est aussi l'occasion de voir Eric Judor (sans Ramzy) faire une honnête prestation de flic passionné par la "tèqueneau". L'une des bonnes séquences le voit finir par répondre aux avances appuyées d'une voisine, dont le blaireau de mari regarde du hockey à la télévision...

23:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 27 mars 2014

Her

   "Elle"... et pas "She" en anglais, parce qu'elle n'est pas un sujet, mais un objet... du moins au départ. Spike Jonze (dont je n'ai pas vu un film depuis le décevant Max et les maximonstres) assaisonne donc la comédie romantique aux "nouvelles" technologies.

   C'est d'abord visuellement inventif. Évidemment, ordinateurs comme téléphones portables jouent un rôle important dans l'intrigue. Ils sont bien utilisés. Plus impressionnantes (et drôles) sont les scènes de jeu en 3D, avec ce petit extraterrestre dont le langage n'est pas sans rappeler celui des personnages de South Park...

   L'aspect comédie est bien traité. Il y a d'abord le choc que constitue la relation naissante entre le héros et le logiciel autoévolutif. Il y a ensuite la gêne vis-à-vis de l'extérieur et les situations embarrassantes. Il y a enfin (pour le héros) la découverte qu'il n'est pas aussi unique qu'il le croyait... et, au fur et à mesure que l'intrigue progresse, il l'est de moins en moins !

   Le gros problème est le choix des acteurs. Non pas qu'ils soient mauvais. Mais le film repose sur le principe que l'homme ne connaît le logiciel que par sa voix et le nom qu'il s'est donné (Samantha). Or, tous les spectateurs réalisent très vite que la voix de celle-ci ne leur est pas inconnue, puisque c'est celle de Scarlett Johansson. Cela ne vous dit rien ? Mais si, regardez donc :

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   Un doute ? Essayez encore :

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   Allez, une dernière, pour le plaisir :

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   Tout cela pour dire que, si le héros masculin est censé s'inventer de toutes pièces l'apparence physique correspondant à la voix de Samantha, ce n'est pas le cas des spectateurs. Le summum est atteint lorsque le logiciel tente un plan à trois avec le mec : figurez-vous que la demoiselle choisie comme substitut de Samantha est une jeune blonde très mince...

   Et que dire de Théodore, que l'on tente de nous faire passer pour le pauvre gars solitaire pas super gâté par la nature. (Rassurez-vous : il n'est ni chauve, ni obèse ni édenté...) On a beau lui avoir collé une moustache pourrie à la Burt Reynolds, toutes les dames voient Joaquin Phoenix. (Au passage, qu'est-ce que c'est que ces pantalons ignobles dont on a affublé plusieurs personnages ? C'est remonté jusqu'aux aisselles et ça leur comprime le périnée !)

   Comme en plus Théodore est gentil, sensible, délicat, qu'il ne cache pas ses faiblesses et qu'il écrit des lettres magnifiques, comment voulez-vous que la gent féminine ne craque pas ? C'est un peu téléphoné.

   S'ajoutent à cela plusieurs défauts majeurs. Il y a d'abord l'invraisemblance du logement du héros. Ce mec gagne sa vie en écrivant des lettres pour ses clients et l'on est prié de croire qu'il peut s'offrir un super appart', dans une tour ultramoderne de l'hypercentre d'une mégapole !

   Le deuxième reproche porte sur la conception du film. C'est rempli de dialogues. Au début, cela passe sans problème, d'autant plus que c'est signifiant : on découvre petit à petit les différentes facettes des personnages (avec de très beaux retours en arrière muets). Mais cela dure plus de deux heures... et je vous jure qu'on les sent passer ! Au bout d'un moment, on tourne en rond. On comprend que le réalisateur veut montrer que cette relation improbable ressemble de plus en plus à une relation classique. Mais que c'est laborieux... et triste, au fond. Même la voix éraillée de Scarlett a fini par me taper sur les nerfs, c'est dire !

22:09 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 23 mars 2014

L'Expérience Blocher

   Ce documentaire est consacré à Christoph Blocher, milliardaire et homme politique suisse populiste, à la tête du premier parti de son pays, la mal nommée U.D.C. ("union démocratique du centre"). Le réalisateur est tout sauf un admirateur. Il s'agit de Jean-Stéphane Bron, auteur naguère de l'excellent Cleveland contre Wall Street, consacré à la crise des subprimes et à ses conséquences.

   Au lieu de traiter le sujet à distance, en s'appuyant sur une enquête approfondie, le réalisateur choisit de suivre de près l'homme politique, de partager son quotidien. Il pense que cela lui permettra de mieux le comprendre, voire de démasquer l'imposteur.

   ... et c'est un échec. Blocher a très bien géré la présence à ses côtés de ce francophone de gauche, plutôt taiseux. Il arrive à créer une certaine proximité entre eux. C'est indirectement un intérêt du film. L'ajout de la voix-off et d'images d'archives sont, de la part de J-S Bron, un aveu d'impuissance.

   C'est de plus assez monotone, et long (on sent bien l'heure quarante). Je conseille aussi aux éventuels spectateurs de se renseigner un peu avant sur le fonctionnement des institutions suisses, assez original en Europe.

   C'est globalement une déception. J'attendais mieux de ce réalisateur, compte tenu du sujet, vraiment porteur.

20:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 22 mars 2014

Linnea dans le jardin de Monet

   Ce moyen-métrage d'animation suédois est une curiosité. C'est un hommage à la peinture et à la botanique, à travers la vie et l'oeuvre de Claude Monet. En 30 minutes, on nous raconte l'histoire d'une petite fille à l'esprit curieux, qui va partir en France en compagnie d'un ami, un voisin âgé lui aussi passionné par l'impressionnisme.

   On aurait aimé que des Français se lancent dans cet hommage très pédagogique. C'est drôle et coloré. C'est d'abord Paris qui est mise en valeur : c'est la première destination du duo, qui doit se rendre au musée Marmottan.

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   Place ensuite au véritable but du voyage : la maison et le (foisonnant) jardin de Monet, à Giverny. Le film fait des allers-retours entre le jardin réel, les représentations que le peintre a faites et la vision du dessin animé. Quelques explications complètent la démonstration (comme au musée, d'ailleurs). C'est joli à regarder et, pour les enfants comme pour les adultes profanes, cela constitue une agréable initiation à l'oeuvre de l'un des grands maîtres de la peinture française.

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   Dans la salle où j'ai vu le film, des adultes accompagnaient des enfants au départ intrigués par la nature du film. A la fin, ils ont été déçus que cela s'arrête aussi vite. L'un des bambins ne voulait plus sortir de la salle : il exigeait de voir la suite !

vendredi, 21 mars 2014

Monuments Men

   J'ai choisi de ne pas tenir compte de l'éreintement du film par la critique. Le sujet (inspiré de faits réels) m'intéressait et j'étais impatient de retrouver une brochette d'acteurs que j'apprécie. Il me fallait cependant me contenter de la version doublée, seule disponible dans le multiplexe ruthénois.

   J'ai entendu tout et son contraire à propos du scénario. Tantôt on reproche à George Clooney et son acolyte Grant Heslov (qui a précédemment travaillé avec lui sur l'excellent Good Night, and Good Luck et Les Marches du pouvoir) d'avoir manqué d'imagination, tantôt on s'indigne des libertés prises avec l'Histoire. C'est pourtant une pratique commune à Hollywood et Clooney ne s'écarte pas de la norme. Quand on ne connaît pas le détail de l'affaire, cette traque des œuvres volées par les nazis se révèle très prenante... et le public en profite pour se cultiver, de nombreuses reproductions étant visibles à l'écran.

   Au niveau de la réalisation, c'est quand même un peu décevant. Alors que plusieurs de ses précédents films témoignaient d'un réel savoir-faire, ici c'est très académique, vraiment pas inventif. Et quand Clooney se risque à quelques mouvements de caméra, ce n'est pas toujours bienvenu. Je pense notamment à une scène parisienne, qui voit Matt Damon venir chez Cate Blanchett, qui lui fait des avances à mots couverts. Inébranlable, l'Américain éconduit gentiment son hôtesse, rappelant son statut d'homme marié. C'est le moment choisi par le réalisateur pour montrer la main du héros venir tendrement se poser sur celle de Cate... et l'on ne peut pas ne pas remarquer l'alliance qui brille au doigt du jeune homme.

   Que reste-t-il donc ? Le jeu des acteurs. Là, par contre, le film tient ses promesses. Je ne suis pas très objectif en la matière, mais je vais quand même dire que Cate Blanchett est exquise en Claire Simone. Le paradoxe de son rôle est que ce n'est pas lorsqu'elle s'habille en femme fatale (le soir où elle invite Matt Damon) qu'elle dégage le plus de sensualité, mais lorsqu'elle nous est montrée vêtue comme une secrétaire (certes distinguée) des années 1940. Et ce regard... Elle a réussi à suggérer toute l'intensité du personnage.

   Du côté des hommes, c'est lorsque les duos sont formés que l'aspect comique du film prend son essor. Cela nous vaut plusieurs séquences enlevées, l'une des plus belles montrant les personnages interprétés par Bill Murray et Bob Balaban rencontrer un jeune soldat allemand isolé, avec lequel ils finissent pas fumer des clopes ! J'ai aussi bien aimé la séquence qui voit Jean Goodman et John Dujardin se débarrasser d'un tireur embusqué. C'est plus convenu, mais cela fonctionne, tout comme la scène du pré. Toutefois, le rôle créé pour l'acteur français m'est apparu assez caricatural. A signaler aussi : la séquence de la mine (dans les deux sens du terme).

   A vous de voir. Ce n'est pas le navet décrit par certains, mais ce n'est pas un chef-d'œuvre, juste un polar historique divertissant.

jeudi, 13 mars 2014

Le Piano magique

   Il y a quelques années, pour le bicentenaire de la naissance de Frédéric Chopin, des courts-métrages ont été produits un peu partout en Europe (notamment en Pologne). Deux d'entre eux sont réunis ici à un troisième, consacré à Ludwig van Bite_au_vent Beethoven.

   C'est par ce dernier que débute le film. Intitulé "Les Démons de Ludwig", il s'inspire de la mini-série Recto-Verso, créée par l'auteur, Gabriel Jacquel.

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   Il met en scène un pianiste fameux, ombrageux, aussi à l'aise dans les mélodies douces que dans les envolées lyriques. Il subit l'influence d'un bon et d'un mauvais génies, dont le petit film montre la lutte, avec les conséquences sur la personnalité et le jeu de Ludwig. Par la thématique comme par la virtuosité de l'animation (qui marie parfaitement image et musique), ce n'est pas sans rappeler un autre chef-d'oeuvre, The Cat Concerto, une aventure de... Tom & Jerry !

   Après ce départ en fanfare, j'ai été un peu déçu par le deuxième court-métrage, intitulé "Pl.ink". La musique de Chopin sert d'habillage sonore à un monde auquel elle apporte aussi de la couleur :

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   L'intrigue est tout aussi surréaliste que dans le précédent film, mais dans un style différent, que j'ai moins apprécié.

   Ce n'est qu'ensuite qu'est programmé le troisième et dernier court-métrage (le plus long), qui a donné son nom à l'ensemble. Il est réalisé par Martin Clapp, qui a auparavant travaillé à l'animation de Pierre et le loup. Le style (image par image) rappelle celui des films lettons. C'est de plus visuellement très joli à regarder.

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   L'héroïne est une petite fille (mignonne et têtue), fascinée par les inventions de son père, et qui se désole de son départ, loin, pour des raisons professionnelles. Elle finit par découvrir un piano magique, qui va la transporter partout où son père est susceptible de se trouver. La voilà partie, accompagnée d'un garçon gentil mais maladroit. Chaque séquence est accompagnée (musicalement) par une oeuvre de Chopin, dont le titre est habilement inséré à l'écran : sur la carrosserie d'un autobus, la paroi externe d'un piano, un pont parisien, le mur d'un immeuble...

   Au total, en trois quarts d'heure, les enfants découvrent trois petites histoires bien troussées, visuellement très inventives... et ils sont mis au contact de quelques oeuvres du répertoire classique.

mercredi, 12 mars 2014

300 - La Naissance d'un empire

   Cette fausse suite (dont l'action se déroule avant, pendant et après celle du premier 300) ne déroge pas à l'ambiguïté du précédent film. L'attention avec laquelle les corps masculins (musclés, épilés... voire huilés) sont filmés, dans une ambiance des plus guerrières, ultra-patriotique (de manière assez anachronique, d'ailleurs) révèle l'hésitation entre l'iconisme gay et le crypto-fascisme. Voilà de quoi nourrir les questionnements internes des adolescents boutonneux qui se sont rués dans les salles obscures.

   Les adultes amateurs de grosse baston sanguinolente seront ravis. On s'entretue allègrement, les préposés aux effets spéciaux ayant été très généreux avec la sauce tomate (la réelle et la numérique). Les combats sont autrement plus convaincants que ceux du récent Pompéi. Certes, c'est stylisé, très appuyé, avec ralentis et musique emphatique... mais, franchement, "ça le fait".

   Dans ce domaine, la meilleure séquence est peut-être l'une des premières, qui remonte dix ans en arrière, au temps de la bataille de Marathon (en 490 avant JC). Je ne pense pas que les Athéniens se soient battus de cette manière-là, mais la façon dont ils repoussent l'armée perse en train de débarquer est impressionnante, à l'écran. Par contre, pour des raisons scénaristiques, on a inventé le meurtre de Darius par Thémistocle... que l'on retrouve dix ans plus tard sans le moindre changement physique ! Pour la vraisemblance, on repassera.

   D'ailleurs, en 480 (année de la bataille de Salamine, qui suit de peu celle des Thermopyles), le stratège athénien a plus de 40 ans, âge vénérable à l'époque... ce qui ne se voit pas du tout à l'écran. Mais il fallait faire naître une rivalité à la fois politique et amoureuse entre ce personnage et celui de la (très) vilaine Artémise, interprétée avec fougue par une Eva Green plus bandante que jamais.

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   Je ne sais pas qui s'est chargé des costumes de la dame, mais, si vous voulez voir un corps sublime mis en valeur par une série de tenues plus improbables les unes que les autres, alors précipitez-vous ! (Évidemment, elle n'est pas vêtue comme une Perse de l'époque ; elle a plutôt une apparence "gothique" !)

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   Bon, là encore, ne vous attendez pas à une magistrale leçon d'histoire. Si la véritable Artémise, d'origine grecque, a bien conseillé Xerxès, elle n'était pas une fille des rues violée par la soldatesque, mais la veuve du roi d'Halicarnasse et, contrairement à ce qui est montré dans le film, elle ne voulait pas engager le combat à Salamine... auquel elle a d'ailleurs survécu.

   Mais il fallait l'opposer à tout prix à Thémistocle, qu'elle finit par rencontrer, dans une séquence complètement improbable... mais finalement très gonflée. La discussion dérive rapidement en joute sexuelle, chacun jouant à qui domine l'autre... Moi j'ai aimé ! Et même le spectateur le plus abruti finit par comprendre que le personnage interprété par Eva Green est d'une relative complexité.

   Elle n'a pas non plus la langue dans sa poche puisque, vers la fin du film, quand elle affronte Thémistocle les armes à la main, elle balance à la face de ce dernier : "Tu te bats mieux que tu ne baises !", ce qui met en rage le vaillant Athénien. Il faut dire qu'au cours de la soirée "romantique", théâtre de leurs ébats précédents, le stratège avait fini par reconnaître ben que... euh.. non, il n'était pas marié, n'avait pas de compagne... et pis qu'il avait eu autre chose à penser, non mais !

   Un deuxième personnage féminin fait montre d'un caractère affirmé : Gorgo (Lena Headey), épouse puis veuve du roi de Sparte Léonidas. C'est qu'elle en a sous la robe, la reine !

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   Au tout début, on la voit tancer le pauvre Thémistocle, qui vient quémander l'aide de Sparte et assiste à l'entraînement des guerriers locaux : "Tu viens te polir le phallus devant de vrais soldats ?" déclare-t-elle, l'air pénétré.

   Tout ça pour dire que, de temps à autre, scénariste comme réalisateur osent des trucs. Il y a bien sûr les grosses bastons... et de superbes scènes navales. (Le tout étant assez sombre, je pense qu'il vaut mieux éviter la 3D.) Il y a aussi ces répliques inattendues, qui font mouche. Mais il est indéniable que, face à ces deux femmes de tête, jouées par des actrices de talent, les personnages masculins semblent un peu falots.

   Sur le fond, les Grecs sont toujours représentés comme l'incarnation du bien (torses nus et jupettes au vent), même si de la nuance est introduite par rapport au précédent volet. En face, les Perses sont en noir (à l'exception de Xerxès) et présentés comme une masse barbare, qui utilise une main-d'œuvre esclave.

   Si l'on fait abstraction de ces aprioris et des invraisemblances historiques, ce film constitue un spectacle tout à fait honorable.

23:06 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

lundi, 10 mars 2014

Pompéi

   Il était une fois deux producteurs américains. Appelons-les John-Raymond et Bill-Ernest. Quand ils étaient petits, ils ont vu plein de péplums à la télé. Ils ont trouvé ça cool. Plus tard, ils ont découvert les ordinateurs. Ils ont trouvé ça super-cool. Devenus grands, un jour, ils ont regardé sans le faire exprès un excellent documentaire-fiction de la BBC. Ils ont été étonnés de trouver ça méga-cool. C'est alors qu'a germé dans leurs cerveaux l'idée de produire un film qui mélangerait le tout. Grâce à l'une de mes connaissances qui bosse à la NSA, j'ai réussi à pirater leurs conversations téléphoniques.

- Dis-moi, Bill-Ernest, où on en est du recrutement des gladiateurs ?

- J'ai l'effectif presque au complet. Mais c'est pas simple : le tournage de 300 - La Naissance d'un empire a asséché le vivier des figurants à gros muscles. J'ai dû organiser un casting dans le club de gym de ma belle-sœur.

- Putain, il fait chier Zack Snyder ! Il pourrait pas nous en lâcher quelques-uns ? Essaie de l'appeler.

...

- Allô, Zack ? C'est Bill-Ernest. Comment tu vas ?

- En pleine bourre, mec. J'ai à gérer une grosse équipe de figurants.

- Euh... justement, je t'appelais pour ça. Tu ne pourrais pas en libérer quelques-uns pendant une semaine ou deux ?

- Ah, non, là, c'est hyper-tendu. Déjà que j'ai eu du mal à recruter. Figure-toi qu'en plus j'ai déjà dû interrompre deux fois le tournage.

- Ah bon ? Mais pourquoi ça ?

- Mes Spartiates ont voulu se rendre en France et manifester en faveur du mariage homo. Pas moyen de négocier ! Et toi ? Toujours sur le projet Pompéi ?

- Ouais. Tu sais, John-Raymond est hyper-exigeant. Il veut encore renforcer le pôle figurants.

- Désolé de ne pouvoir t'aider. Bon courage pour la suite.

...

   Finalement, l'équipe est au complet. Arrive la période de préparation physique. Dans une grande salle de sport, du matin au soir, plusieurs dizaines de grands gaillards suent sang et eau pour compenser la petite taille de leur pénis acquérir la musculature du rôle qu'ils vont tenir dans le film. Peu avant la fin de la session, John-Raymond débarque sur les lieux, pour faire le bilan.

- Bill-Ernest, c'est quoi ces paquets de chips ? On avait dit un régime hyper-protéiné ! Pas étonnant qu'ils aient autant de bide ! Tu me mets les grassouillets de côté, hein, on leur fera jouer les Romains. Avec la cuirasse, les spectateurs n'y verront que du feu. Bon le minet, là, c'est qui ? Kit Harington ? Ah oui, celui qui fait mouiller les pisseuses dans Game of Thrones ! Bon choix, ça. Mate un peu les abdos !

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   A quoi tient une carrière cinématographique... Le problème est que le bellâtre n'est pas parvenu à garder longtemps cette plastique chocolatesque. La rumeur dit qu'il en a eu marre de bouffer des pommes et de la vache-qui-rit à longueur de journée, qu'il avait chopé la chiasse et qu'en plus il gênait ses camarades de tournage à force de lâcher des caisses foireuses. Du coup, le réalisateur n'a réussi à tourner qu'une seule scène où son physique d'Apollon est à son apogée. Pour le reste du film, on lui a recouvert l'abdomen.

   Heureusement, il a une belle gueule. C'est pour ça que, selon les scénaristes, il est tout à fait vraisemblable que cet esclave, qui devait puer la sueur et avoir une haleine de chacal, ait pu séduire au premier contact une fille de patricien pompéiien, fraîche comme la rose qui vient d'éclore.

   Face au gentil, il fallait un méchant très coriace... et plus âgé. Quand il a appris ça, l'agent de Kiefer Sutherland a immédiatement pensé à son protégé. Il a assuré aux producteurs qu'il pourrait acquérir la musculature exigée "en 24 heures chrono" ! Quand il l'a vu débarquer sur le tournage, John-Raymond a vite déchanté.

- Eh merde, on s'est encore fait rouler ! Je suis sûr que ça fait des années qu'il ne bouffe que des pizzas, ce mec !

- C'est pas grave, John. On n'a qu'à le filmer toujours habillé, en militaire ou en civil. La toge, ça masque bien !

- OK, ok. Dis aussi aux scénaristes de lui rajouter du texte. Puisqu'il m'a coûté un bras, on va l'utiliser au maximum.

   Voilà pourquoi le très méchant sénateur survit à l'effondrement d'une tribune, à une tentative d'assassinat, à un accident de char, à un mini-séisme et à plusieurs coups d'épée du gentil. C'est qu'il faut rentabiliser la vedette !... et ne pas la vexer. Du coup, ni le sénateur Corvus ni son adjoint (et âme damnée) ne prennent le moindre coup de vieux en 17 ans, durée qui sépare l'introduction du film de la suite des événements.

   A-t-on fait preuve de davantage de rigueur au niveau des effets spéciaux ? Certes, c'est spectaculaire. Mais n'y cherchez pas une représentation de la réalité historique. On a introduit dans l'intrigue un gigantesque tsunami qui n'a sans doute pas existé. (C'est une extrapolation d'une lettre de Pline le Jeune.) De plus, au cours de l'éruption volcanique, on a l'impression que la ville est victime d'un bombardement de météorites !

   Les combats de gladiateurs sont souvent intéressants, mais surjoués. L'exemple le plus caractéristique est celui qui oppose Atticus, le champion noir, à Bellator, le second de Corvus.

   Le film se conclut toutefois sur une note poétique, un baiser, figé pour l'éternité. J'ai trouvé cela follement romantique et, malgré ses invraisemblances et ses imperfections, le film garde un certain charme à mes yeux.

   A voir si l'on dispose d'un abonnement avantageux ou d'un tarif réduit.

19:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 09 mars 2014

The Grand Budapest Hotel

   Wes Anderson n'est pas un cinéaste extraverti... et il a la réputation de ne pas faire de film tapageur. C'est propre et soigné, parfois incongru. Récemment, on a pu le voir à l'oeuvre dans l'animation (Fantastic Mr Fox) et la fiction nostalgique décalée (Moonrise Kingdom).

   Ici, l'histoire prend la forme d'un retour en arrière dans le retour en arrière. De nos jours, un écrivain vieillissant propose de raconter une histoire vraie. Cela remonte à une quarantaine d'années quand, de passage dans un ancien hôtel de luxe, désormais décrépi, il a fait la connaissance de son étrange propriétaire. Celui-ci a fini par lui raconter sa vie, en remontant à ses débuts comme groom à l'hôtel, au temps de sa splendeur, dans les années 1930.

   A partir de là, cela devient magistral. A l'écran, les couleurs sont éblouissantes. La mise en scène, qui épouse souvent des figures géométriques (dans le cadrage comme dans les déplacements), est bluffante. Et que dire des acteurs ! Il faut souligner la performance de Ralph Fiennes en "Monsieur Gustave", sorte de chef du personnel de l'hôtel au propriétaire inconnu. (Cela nous change de Lord Voldemort !)

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   C'est à savourer en version originale sous-titrée, pour profiter de l'accent anglais, onctueux et parfois obséquieux, du personnage principal, le tout mâtiné de mots et expressions français. (Par contre, on oubliera vite les prestations de Léa Seydoux et surtout de Mathieu Amalric, pas très crédible en sous-fifre à la volonté chancelante.)

   Fiennes est épaulé par une batterie de seconds rôles, parmi lesquels on retrouve des acteurs fétiches de Wes Anderson : Edward Norton (délicieux en officier habsbourgeois scrupuleux et humaniste)...

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   ... Tilda Swinton, une nouvelle fois métamorphosée (rappelez-vous dans Snowpiercer) et fantastique, en rombière amoureuse et farfelue...

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   ... Jeff Goldblum, en notaire tâtillon...

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   ... Adrien Brody, en aristocrate "fin de race"... et gros connard... un vrai personnage de BD...

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   ... tout comme Willem Dafoe, en tueur grotesque et impitoyable (excellente composition) :

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   Il faudrait en citer d'autres, à commencer par Harvey Keitel, génial en taulard chef de meute. Signalons aussi Saoirse Ronan, piquante en boulangère-pâtissière et Tony Revolori, qui incarne le jeune protégé du héros.

   Ces pointures trouvent à s'exprimer dans une série de scènes plus inventives les unes que les autres. J'ai particulièrement apprécié la séquence de la réunion de famille, consécutive au décès d'une cliente très chère au cœur de Monsieur Gustave (qui a coutume de "besogner" les dames âgées fortunées...). Je recommande aussi l'évasion de la prison, qui accumule les gags divers.

   Les scénaristes n'ont pas négligé le contexte. L'essentiel de l'action se passe dans les années 1930, en Europe centrale. Les héros sont donc confrontés à la montée du nazisme. Il y a du Chaplin dans la peinture sarcastique du mouvement totalitaire.

   Bref, vous l'avez compris, j'ai été emballé. C'est pour moi l'un des meilleurs films du premier trimestre 2014.

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vendredi, 07 mars 2014

Diplomatie

   Dans son dernier film, le cinéaste allemand Volker Schlöndorff adapte une pièce de théâtre traitant des 24 et 25 août 1944, moment durant lequel le sort de la capitale française n'aurait tenu qu'à un fil : la volonté du général von Choltitz d'appliquer les ordres d'Hitler et la persuasion dont le consul de Suède Raoul Nordling a fait usage pour l'en dissuader.

   Le fondement historique de l'intrigue est vivement contesté par les historiens, par exemple François Delpla (biographe d'Hitler) et Fabrice Virgili (qui a édité les mémoires de Nordling). Hitler n'a pas donné l'ordre de raser la capitale, qui n'aurait de surcroît pas été engloutie par les eaux en cas d'effondrement des ponts). Enfin, l'entretien, tel qu'il est montré à l'écran, n'a pas eu lieu cette nuit-là (Nordling avait eu une attaque juste avant)... pas plus que n'a existé le passage secret par lequel le consul s'introduit dans le bureau du général (une bonne trouvaille scénaristique, ceci dit). Par contre, les deux personnages se sont bien rencontrés, à plusieurs reprises (comme il est dit dans le film), pour discuter du sort des prisonniers (et de l'alimentation des Parisiens).

   Cela n'a pas été évoqué par les critiques, mais il semble pourtant évident que le réalisateur a pris pour modèle une autre adaptation d'une pièce de théâtre : Le Souper, d'Edouard Molinaro. Il s'agit là aussi d'une ambiance "fin de règne" (celui de Napoléon Ier dans ce cas). Paris n'est pas sur le point d'être libérée, mais occupée (par les Britanniques, les Russes... et les Prussiens). Deux grandes figures se jaugent et s'affrontent ce soir-là : Joseph Fouché (Claude Brasseur) et Talleyrand (Claude Rich). Il faudrait que je revoie ce film mais, dans mon souvenir, c'était brillant.

   On retrouve un peu le même type d'opposition ici, servie par de très bons acteurs. Niels Arestrup (meilleur encore à mon avis que dans Quai d'Orsay) incarne parfaitement l'officier allemand discipliné, sans (presque) aucun état d'âme. On nous rappelle bien qu'il a dirigé la destruction de Sébastopol (en U.R.S.S.) et qu'il a contribué à l'extermination des juifs locaux. C'est la brute (comme l'était Brasseur-Fouché dans Le Souper), non dénuée de subtilité. On constate que N. Arestrup parle remarquablement allemand. (Le vrai Choltitz ne parlait pas français ; les entretiens avec Nordling se sont donc déroulés en présence d'un interprète.)

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   Face à lui se trouve le diplomate (comme l'était Riche-Talleyrand dans Le Souper). André Dussolier est très bon dans le rôle. J'ai toutefois eu un peu peur au début : on nous le présente affublé d'un chapeau qui fait immanquablement penser (quand on est français et un minimum cultivé) à Jean Moulin. Heureusement, cela s'arrange par la suite.

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   La confrontation des deux personnages est un régal. Elle alterne avec des scènes tournées en dehors du salon où le général reçoit le diplomate. On découvre d'autres pans de l'hôtel, ainsi que les rues de Paris... et ses souterrains. Des images d'époque ont été ajoutées. L'ensemble tient la route, sans être brillant.

   Notons que le scénario est suffisamment élaboré pour ménager une évolution des personnages... ou plutôt un dévoilement progressif de leur véritable nature. On finit par comprendre que le général a -en partie- les mains liées (il a sans doute aussi pensé à ce qui allait advenir de lui, après la défaite allemande)... et que le consul de Suède, derrière sa neutralité angélique, masque une pincée de machiavélisme.

   C'est bien fichu, mais n'en attendez rien de plus.

jeudi, 06 mars 2014

Non Stop

   Le réalisateur Jaume Collet-Serra retrouve Liam Neeson (après Sans Identité) pour ce film d'action populaire. Cela commence cependant assez mal. Les scènes introductives enfilent les clichés. Le marshal Bill Marks est évidemment alcoolique, pas très bien dans ses baskets ce jour-là avant d'embarquer... et il semble avoir une vie familiale chaotique. Cerise sur le gâteau : il fume comme un pompier, ayant même mis au point une stratégie pour se livrer à son vice dans les toilettes des avions. La suite ? L'embarquement des passagers, avec de l'émotion hyper soulignée quand une petite fille est à l'écran.

   Cela démarre vraiment avec les premiers messages échangés avec un "biper" (ou pager) très évolué. Ce n'est plus nouveau à présent (pensez à L'Exercice de l'Etat ou encore à la série Sherlock), mais l'affichage des textos à l'écran rend bien et accentue le côté dramatique de l'intrigue. Un travail intelligent a aussi été effectué sur les sons.

   Plusieurs scènes se détachent du lot. Il y a notamment une bagarre dans les toilettes de l'avion, au début, excellemment filmée. Collet-Serra réussit à rendre spectaculaire cet affrontement en milieu confiné. Il parvient aussi à innover dans l'accident d'avion. Sans en dire plus, je peux vous assurer que l'avant-dernière séquence du film dépote !

   C'est de plus bien interprété. Neeson est épaulé par une Julianne Moore toujours aussi classe. Les seconds rôles sont efficaces, nombre d'entre eux venant de séries télévisées, me semble-t-il. (Ainsi, les fans de New York, police judiciaire, reconnaîtront l'assistant du procureur incarné par Linus Roache, ici dans le rôle du capitaine de l'avion.) En cherchant bien, on peut aussi retrouver deux des interprètes de 12 Years a Slave.

   L'intérêt porte aussi sur l'intrigue. On se demande qui est le maître-chanteur. Comme dans un film policier traditionnel, on est certain d'avoir vu le(s) coupable(s) dans la première partie du film. On nous propose de fausses pistes : un Arabe et des Noirs (qui chez nous seraient des "jeunes de banlieue"), sur lesquels les scénaristes s'appuient pour ruiner certains préjugés. Quand le mystère se dévoile, on réalise à quel point les auteurs se sont trituré les méninges.

 

ATTENTION ! CE QUI SUIT RÉVÈLE DES ÉLÉMENTS CLÉS DE L'INTRIGUE.

 

   Au bout d'un moment, les spectateurs attentifs ont compris qu'une seule personne ne peut pas être derrière la machination. Il en faut au moins deux. Cela relance les spéculations. Qui a un mobile ? Qui a les compétences ? Qui a eu l'opportunité de commettre les crimes ? On arrive assez facilement à trouver l'un des deux en s'appuyant sur la réponse à la deuxième question. Pour le complice, c'est un peu tiré par les cheveux. On peut même parler de faille scénaristique.

   C'est parce qu'il a été transporté de force par le héros que l'un des deux maîtres-chanteurs a eu l'opportunité de déplacer un téléphone portable et de tuer l'un des passagers. L'explication qui nous en est donnée, à la fin, repose sur une part de hasard et d'opportunité qui ne cadre pas avec l'organisation minutieuse du complot.

   Mais, surtout, il est matériellement impossible que la bombe ait pu être cachée dans le sac hermétique rempli de drogue. C'est l'autre marshal (celui qui trafique) qui a fait monter cette valise. C'est parce que les comploteurs l'ont fait chanter (une fois dans l'avion) qu'il a joué leur jeu. Mais comment la bombe a-t-elle pu monter à bord ? Mystère. On est prié de croire en l'habileté machiavélique de l'informaticien.

   Enfin, comment se fait-il que le héros n'ait pas découvert les textos litigieux dès le départ, quand il consulte le téléphone de son collègue, alors que, plus tard, ayant de nouveau l'appareil en mains, il les retrouve sans problème ? Là encore, mystère.

   Ces réserves émises, on peut malgré tout profiter de ce film sans "se prendre la tête".

22:25 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mercredi, 05 mars 2014

La Fabuleuse Histoire de monsieur Riquet

   Il n'y a guère que dans le Sud-Ouest que l'oeuvre de Pierre-Paul Riquet suscite encore (un peu) l'admiration. Un documentaire lui a été récemment consacré, pour l'instant visible essentiellement dans les salles obscures du Tarn et de Haute-Garonne.

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   La conception du film est assez originale. Les entretiens avec des historiens ou érudits locaux alternent avec de courts monologues d'acteurs, qui lisent ou récitent un texte écrit par l'une des personnes dont il est question. Bernard Le Coq est remarquable en Riquet, tout comme François-Henri Soulié en Colbert.

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   Evidemment, de temps à autre, sont insérées des images de son grand ouvrage, le canal du midi. Sont ajoutés  des tableaux classiques, illustrant un aspect de l'histoire ou l'introduction d'un personnage.

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   Le film ne commence pas par une biographie de l'entrepreneur, mais par une présentation du projet. Il faut savoir qu'on lui en a contesté la paternité. Il apparaît surtout que Riquet a été suffisamment intelligent pour savoir tenir compte des réflexions d'autrui pour améliorer ses projets. On nous fait quand même entendre le point de vue de l'un de ses rivaux malheureux, Thomas de Scorbiac, par l'entremise de l'un des descendants de celui-ci. Mais on sent que le réalisateur porte un regard ironique sur la chose...

   Le portrait qui est tracé de Riquet est essentiellement louangeur. Il était intelligent, bon vivant, généreux. Il avait même la fibre sociale. On en oublierait presque qu'il avait fait fortune en collectant l'impôt sur le sel, la gabelle. On ne saura pas non plus ce que pensait son épouse, Catherine de Milhau (une Biterroise), de son mode de vie assez "libre".

   Le film choisit de mettre l'accent sur plusieurs points. Tout d'abord, il évoque la possibilité d'un autre tracé pour le futur canal, par un affluent du Tarn, l'Agout. La question de la religion de Riquet est aussi posée. Comme on n'a pas retrouvé son registre de baptême, on ignore sa date de naissance (en 1609 ou 1604). Etait-il protestant ? C'est possible, compte tenu de sa région d'origine.

   La suite de l'histoire évoque ses échanges avec les grands de son époque et la pugnacité dont il a dû faire preuve pour mener à bien son projet... qui n'a en réalité été achevé qu'après sa mort, survenue en 1680, à Toulouse, où se trouve encore sa dépouille. Deux des séquences les plus marquantes sont celles qui sont consacrées au premier pont-canal de France, celui de Répudre, et au percement du tunnel du Malpas, qui faillit mettre un terme à l'aventure.

   C'est plaisant sans être génial. Les quatre-vingt-cinq minutes passent assez rapidement, même si, à la longue, les entretiens avec les historiens et autres personnes de référence lassent un peu. On avait pourtant pris la précaution de varier les angles de prise de vue et de limiter la durée de ces scènes.

   P.S.

   Ironie de l'histoire, la statue élevée en l'honneur de Riquet, à Toulouse, tourne le dos à "son" canal, pour regarder le centre-ville. On la voit à la fin du film, dans un triste état : elle est toute grisâtre et plusieurs morceaux de doigts manquent à la main droite. En cherchant sur GoogleMap, on peut accéder à une StreetView de mai 2008 assez proche :

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   A l'époque, le logiciel utilisé pour flouter les visages des quidams (ainsi que les plaques d'immatriculation des véhicules) n'était pas tout à fait au point... puisque la sculpture a été confondue avec un humain bien réel ! En voici une vue plus récente, après restauration :

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lundi, 03 mars 2014

Viva la libertà

   En Italie, à l'approche d'élections législatives cruciales, le chef du principal parti d'opposition (de gauche), contesté, mal dans sa peau, décide de prendre du large. Son entourage proche va le remplacer par son frère jumeau, dont presque personne ne connaît l'existence.

   Le film ambitionne de retrouver le ton de la "comédie à l'italienne". Il est néanmoins clairement ancré dans notre époque, puisque le personnage principal semble inspiré de Walter Veltroni (un ancien maire de Rome, passionné de cinéma). Le tour de force du scénario est de réussir à ne jamais faire prononcer le nom de Berlusconi, l'Adversaire. La réussite politique de ce dernier est plutôt présentée comme la conséquence de la médiocrité de ses opposants.

   Sur le papier, ça a l'air génial. Mais quand le film a démarré, j'ai craint le pire. Le début est une peinture conventionnelle et finalement assez empathique de la "gauche caviar" transalpine, tout aussi détestable que sa cousine française. Certes, la colère des militants de gauche est soulignée, mais les "éléphants" ne sont guère égratignés. Et l'histoire prend un tour assez prévisible. Le dirigeant du parti de gauche est un homme à femmes qui, lorsqu'il prend du champ, quitte l'Italie pour aller se réfugier à Paris, chez l'une de ses ex... incarnée par Valeria Bruni-Tedeschi ! Nooooooooooooon !

   Heureusement, l'apparatchik qui sert de larbin au grand homme va tomber sur son frère jumeau, qui accepte de jouer le jeu. Là, ça devient intéressant. Le frérot est un prof de philo amoureux de musique classique (La Force du destin sert de fil rouge sonore à l'intrigue). Il est de plus assez fantasque... et sort tout juste de l'hôpital psychiatrique ! C'est dire s'il va quelque peu dynamiter la routine bureaucratique de la machine social-démocrate... Il sait aussi se faire apprécier de l'entourage de son frère. (Dans les deux rôles, Toni Servillo est très bon.)

   De son côté, celui-ci se la joue Bohème, s'incrustant chez son ex, la suivant sur son travail (elle est scripte), s'occupant un peu de sa fille... et draguant une jeune intermittente du spectacle.

   Je vous laisse découvrir comment tout cela se termine. Il faut bien interpréter la dernière scène, qui comporte un mystère...

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dimanche, 02 mars 2014

Les Grandes Ondes (à l'ouest)

   Voilà un titre bien étrange pour cette comédie franco-helvético-portugaise. Figurez-vous que l'histoire qui nous est racontée est réelle (bien que sans doute un peu romancée). En avril 1974, la SSR (société suisse de radiodiffusion) a envoyé une équipe de bras cassés en reportage au Portugal, avec pour consigne de rapporter des sons illustrant la généreuse politique de coopération économique entre la dictature lusitanienne (pauvre) et la riche (mais conservatrice) démocratie alpine.

   Le trio est constitué de deux vétérans du journalisme et d'une jeune ambitieuse. Michel Vuillermoz (vu récemment en entrepreneur de pompes funèbres dans Adieu Berthe) prête ses traits à l'ancienne gloire de la radio suisse. On le prend d'abord pour un has been, avant d'être attendri par ses failles, puis de le redécouvrir en journaliste à l'ancienne. Il est accompagné d'un technicien qui a beaucoup roulé sa bosse... et qui est ouvert aux nouvelles expériences ! Valérie Donzelli complète avec fougue le trio. Elle incarne une jeune animatrice, qui cherche à décrocher une émission quotidienne. Elle est de surcroît féministe... et très libérée sur le plan sexuel ! Un jeune Portugais bilingue va les épauler dans leur périple (en combi Volkswagen...).

   Au début, on rigole du choc des cultures, entre la vieille et la nouvelle école. On pouffe devant la maîtrise approximative du portugais du journaliste chevronné. On ricane en découvrant la réalité de la coopération économique. Le comique de situation est maîtrisé. Par contre, la direction d'acteurs pêche par moments. Il aurait fallu rejouer certaines scènes, qui manquent de naturel, ou de rythme.

   Tout cela nous mène à la Révolution des oeillets, qui a vu l'armée portugaise et les militants démocrates renverser la dictature en place depuis les années 1920. Pour les Lusitaniens, ce fut à la fois la Libération et Mai 68. Le propos se veut engagé, pas toujours sérieux. Ce n'est pas la partie la plus réussie du film.

   Cela reste une petite comédie sympathique, un peu libertaire sur les bords.

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jeudi, 27 février 2014

Un Eté à Osage County

   Au fin fond de l'Oklahoma, une matriarche frappée par le cancer profite de la disparition de son mari pour réunir les membres de la famille. Le repas de groupe, consécutif à des obsèques, constitue le coeur de ce film, au sein duquel se cache un secret de famille qui met du temps à se dévoiler.

   Mais cela commence de manière moins conventionnelle. On entend d'abord la voix du patriarche (incarné par Sam Shepard). On se demande ce qu'il peut bien vouloir dire en citant un écrivain... et puis, à la limite, on s'en fout, tant il est captivant. Ce n'est qu'à la fin de son monologue que l'on découvre à qui il s'adresse. Surgit ensuite son épouse, complètement à la masse (Meryl Streep, é-blou-i-ssante, comme on ne l'a jamais vue). Générique.

   L'histoire se poursuit avec l'arrivée progressive des membres de la famille. Mention spéciale à la soeur, Mattie Fae (Margo Martingale débordante d'énergie) :

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   Son mari est interprété par Chris Cooper, tout aussi excellent. Mais ce sont les personnages des filles qui vont attirer notre attention. L'aînée semble la plus forte. Elle est mariée à un gentil mou (végétarien de surcroît) et sa fille est une adolescente en pleine crise. Je vous présente Julia Roberts, pas très convaincante au début (en particulier quand elle s'adresse à sa progéniture, dans la voiture, juste avant d'arriver), mais de plus en plus marquante au fur et à mesure que l'intrigue progresse :

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   Comme elle est souvent filmée en gros plan, j'ai pu constater que sa lèvre supérieure hautement suspecte n'avait pas disparu. Ceci dit, dans la seconde partie du film, elle nous fait un sacré numéro, avec, à la fin du repas de famille, une prise de bec entre elle et sa mère, véritable moment d'anthologie. Plus prosaïquement, ceux qui ne connaissent l'actrice qu'à travers ses rôles fleur bleue seront surpris de l'entendre employer un langage très peu châtié... Je recommande tout particulièrement la petite causerie entre les trois soeurs, où il est question des surnoms donnés au sexe féminin. (Tout ceci est évidemment à savourer en version originale sous-titrée, fort heureusement disponible à Rodez.)

   La cadette est une gentille pétasse, incarnée avec conviction par Juliette Lewis. Elle rapplique en voiture de sport, escortée d'un gros blaireau qui m'a tout l'air d'un escroc... mais qui est prêt à l'épouser.

   La benjamine est la plus renfermée. Elle a les traits de Julianne Nicholson, une rouquine très douce que les amateurs de série policière ont découverte naguère dans New York, section criminelle (dans le rôle de Megan Wheeler) :

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   L'histoire est assez noire, triste sur le fond (la plupart des personnages ont en quelque sorte raté leur vie), émaillée d'éclairs d'humour sarcastique. Le film mérite le détour pour la performance des acteurs... et surtout des actrices. (Côté masculin, signalons aussi Benedict Cumberbatch -oui, Sherlock- dans un rôle à contre-emploi.)

   P.S.

   Une partie de la critique (notamment Le Monde) a été très dure envers ce film. Le fait qu'au cours du repas, l'époux et la fille de Barbara (tous deux végétariens invétérés) soient tournés en dérision n'est peut-être pas étranger à la répugnance éprouvée par certains commentateurs. Cela rappelle un peu l'éreintement dont Les Trois Frères, le retour, a été récemment victime. Le fait qu'un intermittent du spectacle y soit présenté comme un artiste raté avait peut-être incité certains critiques à tremper leur plume dans le vitriol...

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samedi, 22 février 2014

La Grande Aventure Lego

   Petit garçon, j'étais plutôt Playmobil que LEGO. Mais bon, tout cela est loin... et je ne me sentais pas d'humeur à tenter l'expérience du film d'animation. Au vu des tout premiers extraits, je me demandais comment cela pouvait tenir la route. Il a fallu que je voie la bande-annonce (qui contient une brochette de gags) pour me décider.

   Très vite, on remarque que l'histoire suit des codes hollywoodiens : le héros (Emmet) est un gars ordinaire (ici un ouvrier du bâtiment) qui va se révéler extraordinaire. Il va s'enticher d'une bombasse (Cool-tag) qu'il va falloir conquérir. Il y a des méchants et des gentils bien identifiés... et la masse, qui a besoin d'un meneur.

   C'est aussi bourré de clins d'œil aux grands succès du cinéma : Le Seigneur des anneaux, Il était une fois dans l'Ouest, Star Wars (l'une des meilleures séquences), Batman, Matrix... C'est souvent parodique, à travers notamment les personnages de Batman (une grande gueule pas aussi balèze qu'elle le prétend) et Vitruvius le mage. (Je recommande tout particulièrement la scène du "code secret" pour entrer dans un univers mystérieux.)

   Visuellement, c'est foisonnant. C'est le résultat d'un gros travail, effectué image par image. Cela donne des architectures LEGO en construction, plus ou moins abracadabrantesques (je pense aussi aux différents modes de locomotion, construits au fur et à mesure qu'ils sont conçus). Les Transformers peuvent aller se rhabiller !

   On rit souvent... et sans vulgarité. Quand ils jurent, les personnages lâchent un gros "Crotte de bique !" ou "Mer... credi !", à la rigueur. Les parents comme les enfants apprécieront, à différents degrés. J'ai aussi adoré la séquence qui se déroule dans le cerveau du héros... ainsi que l'un des fils rouges de l'histoire : le "canapé à impériale", pour regarder la télé entre potes !

   Les spectateurs les plus âgés seront capables de décrypter un message contenu dans l'intrigue : la dénonciation d'un tyran économique, qui s'appuie sur une télévision abrutissante. Pour le tout venant, le film défend des valeurs philanthropiques (tout le monde peut s'amender) et familiales (le père et le fils peuvent jouer ensemble)... parce qu'il y a une petite surprise, introduite dans le dernier tiers de l'histoire. Elle constitue une nette rupture de ton, dans le rythme comme au niveau visuel. A ce moment-là, l'émotion prend le pas sur l'humour, avant que l'intrigue ne reprenne son cours.

   Par contre, je ne suis pas emballé par la musique, assez clinquante, à commencer par le "tube" du film : Tout est super génial, adaptation du Everything is awesome original. Au début, on en perçoit la portée parodique, mais, par la suite, il semble que les réalisateurs y croient un peu trop...

   P.S.

   En 2013, LEGO est devenu le deuxième fabricant mondial de jouets.

   Le succès des fameuses briques dépend d'un mode production dont les secrets sont jalousement gardés.

   La rivalité avec Playmobil semble avoir plutôt tourné à l'avantage des Danois que des Allemands.

15:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 21 février 2014

Les Trois Frères, le retour

   Au départ, je n'avais pas du tout l'intention d'aller voir ce film. Je suis fan du premier (ainsi que du Téléphone sonne toujours deux fois)... et j'avais peur de me retrouver devant un navet pondu pour palper facilement la thune des nostalgiques et autres gogos des salles obscures. Et puis... le bouche-à-oreille n'étant pas mauvais, un soir, après le boulot, un peu énervé par ma journée, j'ai tenté le coup.

   Le scénario nous prend par la main. On commence par nous re-présenter les trois lascars en situation. Pascal (Légitimus) est -en apparence- le winner de la bande, riche, distingué... et l'objet de la libido débordante d'une mystérieuse "Moss". Bernard (Campan) végète en tant qu'intermittent du spectacle, son seul titre de gloire consistant en une publicité canine... tandis que Didier (Bourdon) s'est encore investi dans une relation par pur intérêt pécuniaire... et mène une double-vie. L'ensemble est plaisant.

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   Cela devient franchement drôle quand, suite à leur rencontre chez le notaire, les lascars décident (pour une raison que je vous laisse découvrir) de vider leurs comptes en banque respectifs. Cela nous vaut trois scènes croquignolesques. Chacun a rendez-vous avec son conseiller financier. On y découvre un contexte familier, fait de bureaux impersonnels et d'affiches aux slogans trompeurs. C'est à ce moment qu'il faut être attentif, car, lorsque la caméra pivote légèrement, elle place une partie de chaque affiche derrière le corps de l'interlocuteur de chacun des héros, ne dévoilant qu'un texte tronqué, lourd de sous-entendus : "ici on vous nique", "on vous la met profond"...

   Évidemment, les retrouvailles des frères débouchent sur une série de catastrophes... et c'est un trio de losers qui se retrouve entassé dans une caravane de tournage... avec une petite surprise à la clé : la fille cachée de l'un d'entre eux, qui débarque à l'improviste ! Dans le rôle de la Beurette tchatcheuse, Sofia Lesaffre est au poil.

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   Ceci dit, de temps à autre, cela manque de souffle. Les dialogues, bien écrits, sauvent certaines situations. J'ai bien aimé entendre les héros se chambrer à tour de bras. Le reste de la salle riait aussi de bon cœur.

   D'autres séquences m'ont marqué. Il y a le moment où le trio est obligé de changer de caravane... pour se retrouver dans celle de l'héroïne de Joséphine, ange gardien. Pas subtil, mais efficace !

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   L'action part en vrille lorsque les héros prennent des substances hallucinogènes sans s'en rendre compte. Là encore, c'est un décalque de l'une des séquences du précédent film. D'autres clins d’œil émaillent l'intrigue, comme à l'hôpital, où l'une des infirmières s'appelle "Marie Thérèse"... J'ai aussi en mémoire le passage à la télévision. (Aujourd'hui, la télé-réalité a remplacé Le Millionnaire.) Plus tard, on revoit Bernard Campan et Didier Bourdon en couple, sauf que là c'est pour faciliter le mariage du fiston, déjà présent dans le précédent épisode... et qui a beaucoup grandi. Évidemment, rien ne se passe comme prévu, lors du dîner chez la future belle-famille, avec un Daniel Russo réjouissant de beauferie.

   Bref, ce n'est pas la comédie du siècle, mais, avec un peu d'indulgence, elle fait passer une bonne soirée.

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mercredi, 19 février 2014

Ida

   Pologne, années 1960. Ida, jeune novice, est sur le point de prononcer ses voeux dans un couvent perdu au fin fond de la campagne. La mère supérieure la contraint à prendre contact avec sa dernière parente encore en vie, la soeur de sa mère, une magistrate communiste dont le mode de vie n'est pas à proprement parler un modèle de vertu catholique.

   Et puis, surtout... ces femmes sont juives. Un mystère plane donc sur ce qui est advenu aux parents d'Ida. On comprend vite qu'il s'est passé des choses tristes une vingtaine d'années auparavant... mais quoi exactement ? Voilà pour la partie enquête.

   Au quotidien, c'est la cohabitation entre les deux femmes qui constitue le coeur de l'action. Ida la pure ne quitte pas son vêtement de novice, même quand elle prend le risque inouï, un soir, d'aller écouter les joueurs de jazz... et de discuter avec le si séduisant saxophoniste. Wanda vit seule... et parfois accompagnée, jamais de la même personne. Elle fume comme un pompier, picole sec, écoute du classique à fond la caisse et tente d'oublier son mal de vivre dans le moindre bar ouvert le soir. Au boulot, c'est une procureure impitoyable. (Son personnage est inspiré d'une Polonaise qui a réellement existé : Helena Wolinska-Brus.)

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   Le style est épuré. C'est un peu comme si Robert Bresson avait rencontré Claude Lanzmann. Le noir et blanc est superbe, avec des cadrages soignés. En général, l'organisation est géométrique : la caméra est disposée de manière à ce que les objets signifiants et les acteurs forment des compositions. Cela se voit à peine, parce que c'est très bien joué et que la réalisation est fluide. J'ai été particulièrement sensible au jeu de l'actrice principale, Agata Trzebuchowska :

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   Cela réclame tout de même de l'attention. Cette heure vingt est tendue, sur le fil de rasoir. Il y a évidemment l'incertitude quant à la manière dont les parents (et le reste de la famille) ont été tués vingt ans auparavant. Il y a aussi le questionnement de la jeune femme, qui commence à douter. Le film se conclut d'une manière somme toute cohérente, qui fait écho à ce qu'a dit l'un des personnages au début de l'histoire.

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dimanche, 16 février 2014

Philomena

   "Encore un film inspiré d'une histoire vraie !" vont déplorer certains. En réalité, le scénario est construit à partir de deux histoires, celle de l'Irlandaise Philomena Lee, fille-mère dans les années 1950, et celle du journaliste Martin Sixmith, qui va l'aider à retrouver son fils. Le tout est mis en scène par Stephen Frears, que l'on a plaisir à retrouver en pleine forme.

   Le grand intérêt du film est la confrontation de deux tempéraments qu'au départ on pense diamétralement opposés. Judi Dench (oscarisable) incarne à la perfection la vieille dame très digne, ancienne infirmière, catholique pratiquante (malgré tout ce qu'elle a vécu), amatrice de romans à l'eau de rose... et à cheval sur les principes.

Philomena 1.jpg

   Steeve Cogan interprète un journaliste anglais libre-penseur, issu de la gauche caviar (Tony Blair est au pouvoir, à l'époque) et habitué à un certain train de vie. Malheureusement pour lui, il est en pleine disgrâce. Écrire l'histoire de cette vieille dame n'est au départ qu'un moyen de continuer à exister, professionnellement parlant.

   La tension entre les deux personnages principaux naît du fossé socio-culturel qui les sépare mais surtout de leur attitude face à la religion. Philomena ne veut en aucun cas nuire au couvent où elle a pourtant tant souffert... et où un vent de modération (voire de modernité) semble avoir soufflé. Elle soupçonne par contre le journaliste de vouloir écrire un brûlot anticatholique et de ne la voir que comme un instrument.

   Petit à petit, les points de vue se rapprochent et la relation prend de l'épaisseur. Chacune des scènes de dialogues (à écouter en version originale sous-titrée) est un petit bijou d'humour ou d'émotion.

   A ce relationnel s'ajoutent les péripéties de l'enquête. Elle va mener nos héros aux États-Unis, où ils vont aller de découverte en découverte sur la vie d'Anthony (rebaptisé Michael par ses parents adoptifs). La catholique timide et conservatrice se révèle plus audacieuse et ouverte d'esprit que le journaliste ne l'avait pensé... et lui-même réalise qu'il a un lien avec cette histoire !

   A noter aussi la beauté et la force des retours en arrière, qui nous projettent dans l'Irlande des années 1950. Sophie Kennedy Clark, qui incarne Philomena jeune, est excellente.

   Dans la dernière partie du film, un ultime coup de théâtre ramène tout le monde en Irlande, pour une fin que je me garderai bien de révéler.

14:06 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 15 février 2014

Jack et la mécanique du coeur

   Cette animation est née de l'imagination de Mathias Malzieu, l'âme du groupe Dionysos. On est d'ailleurs cueilli dès le début par... une chanson. C'est un clip vidéo, qui mêle scènes du film et vues du groupe de musiciens. C'est assez surprenant... et limite narcissique.

   L'histoire démarre ensuite... et il faut reconnaître que c'est un plaisir des yeux. L'animation est magnifique. On sent les influences de Tim Burton (celui d'Edward aux mains d'argent et des Noces funèbres), de Jean-Pierre Jeunet (celui de La Cité des enfants perdus et de L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet) et même du Hugo Cabret de Scorsese. Parfois, on nous offre une variation, par exemple celle qui ressemble à des pliages de papier. Il faut souligner la qualité du travail de la graphiste, Nicoletta Ceccoli.

   Par contre, l'histoire est plutôt triste, à réserver à des enfants assez grands. On retrouve un peu l'ambiance des romans de Charles Dickens, voire de Victor Hugo. Mais le macabre n'est ni joyeux ni porteur d'espoir, il est mélancolique. On m'a dit qu'à travers le film, Malzieu chercherait peut-être à faire le deuil de son histoire avec Olivia Ruiz (qui prête sa voix à l'héroïne Miss Acacia). Bof...

   Signalons la qualité des voix assurant les seconds rôles : Rossy de Palma, Dani, Jean Rochefort et Grand Corps Malade. Du côté de la bande son, je n'ai pas grand chose à dire. C'est meilleur que dans un Disney, mais je ne suis pas particulièrement emballé par les chansons. Disons que c'est supportable. Le film est à voir pour la beauté des images et l'inventivité de certaines scènes.

13:03 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 08 février 2014

Minuscule

   Sous-titré "La vallée des fourmis perdues", ce film d'animation est l'adaptation d'une mini-série que je ne connaissais pas. Les décors y sont bien réels (sauf exception), puisque les prises de vue ont été tournées dans deux parcs naturels nationaux : les Ecrins et le Mercantour. Ont été surimposées les évolutions des personnages de synthèse, les insectes (et quelques autres).

   D'abord, contrairement à ce qu'indique le titre, ce ne sont pas les fourmis les héroïnes, mais la jeune coccinelle, qui va devenir grande, découvrir le monde, apprendre à se défendre... et se faire des amis. Si le scénario est limpide, il ménage suffisamment de rebondissements pour garder en éveil les adultes, pendant que les enfants suivent ça avec délectation.

   C'est l'une des réussites de ce film : les deux niveaux de lecture. Les bambins s'intéressent à l'histoire basique, émaillée de gags et d'émotion. Les adultes tendent l'oreille pour capter les allusions, principalement sonores : les personnages ne parlent pas, mais les bruits qu'ils font sont porteurs de sens... et parfois d'odeur !



   Tout part d'un pique-nique champêtre, qu'un couple d'humains abandonne subitement en raison des contractions que subit la femme, enceinte. Les restes de leur repas vont faire le délice d'une foultitude d'animaux, notamment la coccinelle et les fourmis. Le monde en apparence paisible de cette vallée va se révéler être digne des jungles urbaines contemporaines.

   Les personnages principaux sont bien campés. Il y a la jeune coccinelle (sans doute mâle), plutôt impulsive voire imprudente. Il y a les fourmis noires, de prime abord organisées militairement, mais un peu branquignoles au fond... alors que les fourmis rouges symbolisent le mal. La réalisation les présente comme un groupe fasciste. N'oublions pas non plus les mouches moqueuses, une vraie bande de délinquants. Plus étonnante est l'araignée des bas-fonds, qui va adopter un comportement quasi maternel à l'égard d'un intrus.

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   Les scènes d'action renvoient à de "vrais" films. Acrobatique est l'épisode aquatique, qui voit une canette de boisson (pas tout à fait vide) poursuivre une boîte à sucre... et la coccinelle échapper à un gros poisson. Epique est l'attaque de la fourmilière noire par les Rouges (avec un petit côté Kingdom of Heaven). Libératrice est la seconde séquence où le héros affronte les mouches... intervention d'une 2CV à la clé !

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   L'humour est renforcé par l'un des choix graphiques : attribuer d'assez gros yeux aux personnages. Il n'en sont que plus expressifs. Le tout est soulignée par une musique qui rappelle celle des films hollywoodiens. Très bon choix !

   Bref, aux petits comme aux grands, Minuscule procure un plaisir majuscule !

   P.S.

   Le site internet dédié est sympa.

11:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 07 février 2014

Jacky au royaume des filles

   Cette comédie repose sur le principe du renversement de situation. Dans ce royaume, les femmes dominent, portent des tenues militaires ou de motard, alors que les hommes sont sous leur domination et contraints de porter un tchador.

   L'effet comique des premières scènes montrant ces hommes sous cloche est incontestable, d'autant plus que le côté infantilisant de cette domination est mis en valeur par le comportement des garçons. J'ai bien ri à les voir gambader dans les rues du quartier.

   On est aussi rapidement cueilli par une scène "choc"... tournée à la force du poignet ! C'est drôle, mais inabouti : à la fin, on devrait voir une ou plusieurs taches, ce qui n'est pas le cas ! Ce manque de réalisme est l'image du reste du film qui, s'il joue sur la gaudriole, n'ose pas aller au bout de sa démarche.

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   On peut y percevoir une kyrielle d'influences, de Cendrillon à Made in Groland, en passant par Les Misérables et Soleil vert. On n'a pas franchement tranché entre la satire et la fable moralisante. C'est un peu trop "gentil" à mon goût... et l'interprète principal (Vincent Lacoste) est trop fade. C'est particulièrement visible quand il se retrouve face à de grosses pointures, comme Charlotte Gainsbourg (excellente, bien que pas toujours bien servie par les dialogues) et surtout le couple formé par Noémie Lvovsky et Didier Bourdon, une révélation dans ce rôle de matrone, auquel le tchador sied particulièrement. (A signaler aussi quelques caméos plaisants, l'un avec Emmanuelle Devos, l'autre avec Valéria Golino.)

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   On a toutefois veillé à ce qu'aucune allusion ne soit faite à la religion musulmane. C'est à ce genre de détail qu'on réalise qu'il s'agit d'une satire de gôche. Néanmoins, je dois reconnaître que les scènes qui font évoluer les hommes en groupe sont particulièrement réussies. Il y a celle, quasi onirique, qui montre la réunion des prétendants, intégralement vêtus de blanc... et fiers de leur laisse, qu'ils espèrent voir choisie par l'héritière du trône.

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   Il y a aussi la manifestation devant le palais, bien tournée, où l'on retrouve l'un des personnages les plus équivoques de l'histoire : un parent du héros, qui monnayait auparavant ses charmes à ses nombreuses "cousines"... et qui fait partie de la Résistance. On sent que Michel Hazanavicius a pris plaisir à incarner ce rebelle au slip bien rembourré.

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   D'autres scènes, qui s'apparentent à des sketchs, sont bien vues, comme celles tournées dans l'épicerie. La première voit la fille de la propriétaire mater les jambes du héros quand il soulève son tchador pour extraire des billets de ses grandes chaussettes ! La seconde est plus sexuelle...

   Cela aurait pu devenir la comédie satirique de ce début d'année, mais l'ensemble est mal fagoté. On a visiblement eu du mal à relier le tout et à faire durer l'histoire. Je n'ai pas non plus apprécié la novlangue utilisée dans ce royaume. De plus, si la musique (jouée à la guitare) est bonne, elle manque cruellement à certaines scènes, qui tombent à plat.

   Si vous avez du temps à perdre et un peu d'indulgence, vous pouvez tenter l'aventure, pour la dizaine de bons moments que ce film contient.

23:14 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 02 février 2014

Réexister

   Le cinéma decazevillois La Strada a eu l'exclusivité de la diffusion de ce film tourné en 3D, mi-documentaire mi-fiction. Il raconte la (re)découverte du Nord de l'Aveyron par le petit-fils d'un Decazevillois, devenu entrepreneur dans le BTP du côté de Lyon. On nous le montre tirant le diable par la queue et, la quarantaine venue, se posant des questions sur sa vie. Il décide de se lancer sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.

   Habitant Lyon, il est logique qu'il emprunte la via podiensis, partant du Puy-en-Velay et passant par l'Aubrac et Conques. On n'assiste pas à la première partie de son cheminement, qui le mène jusqu'aux portes de l'Aveyron. On le suit de l'arrivée au village d'Aubrac jusqu'à Conques. Le parcours est prolongé jusqu'à Figeac puis Cahors.

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   Dès le départ, les images sont saisissantes. La 3D se révèle un excellent choix pour filmer des scènes urbaines, à Lyon. On voit différents éléments architecturaux se détacher... et la scène qui se déroule en voiture, avec passage dans un tunnel, est bluffante.

   Le passage sur l'Aubrac est évidemment magnifique. Les paysages sont splendides et l'on remarque l'attachement du réalisateur, Jérôme Gardes, à filmer les animaux, que ce soient les vaches, les grenouilles ou les insectes.

   L'intérêt retombe un peu lorsque sont insérées des scènes de dialogues, plus ou moins réussies. Cela manque un peu de naturel, aussi bien à Conques que lorsque le héros rejoint des membres de sa famille du côté de Decazeville.

   C'est toutefois le moment où le film prend une autre dimension. A la contemplation paysagère et à la méditation philosophique succède un tableau du "pays noir", qui rend hommage au passé ouvrier et surtout mineur de la région. Des mini-fictions évoquent l'épopée du charbon et les principales luttes des prolétaires locaux. Ont été reconstituées la fusillade d'Aubin (1869) et la défenestration de Watrin, dans le cadre de la grève de 1886.

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   Le titre se comprend au regard des deux thématiques développées dans le film. Dans un monde de moins en moins compréhensible, l'attachement au terroir et la fidélité aux luttes sociales donnent du sens à l'existence. Un propos généreux, servi par de belles images (et une musique bien choisie), mais qui aurait mérité de s'appuyer sur une interprétation plus convaincante.

   P.S.

   Trois séances sont encore programmées : lundi 3 février, à 15h et 20h30 ; mardi 4 février, à 18h30.

vendredi, 31 janvier 2014

Le Vent se lève

   Pour le public cinéphile français, ce titre évoque un film de Ken Loach consacré à la guerre d'indépendance irlandaise. C'était une traduction approximative du titre d'origine. Ici, le Japonais Miyazaki fait explicitement référence à la fin d'un poème de Paul Valéry.

   De manière générale, l'ambiance culturelle de l'histoire est assez cosmopolite, puisque le héros japonais (qui va mettre au point le chasseur Zéro de sinistre mémoire en Asie du Sud-Est et en Océanie) admire un inventeur italien, alors que les industriels japonais de l'Entre-deux-guerres cherchent à imiter les succès allemands. Cela nous vaut plusieurs séquences en Allemagne, avant et après la prise de pouvoir par Hitler. Sans que ce soit trop explicite, on sent tout de même que le héros est inquiet de la montée de l'intolérance et de la violence.

   C'est le paradoxe de cette histoire : un jeune ingénieur talentueux et pacifiste va contribuer à faire de l'armée japonaise (ici la marine) l'une des plus efficaces machines de guerre de l'époque.

   A cette trame se superposent deux fils conducteurs : la passion pour la technologie et l'amour naissant entre le héros et la fragile Naoko. A l'image d'autres auteurs de mangas japonais, Miyazaki tient en très haute estime les concepteurs et les inventeurs. Dans ce film, le héros est présenté comme un artiste dans son genre. Le dessin est au service de ce projet. On retrouve la "patte" Miyazaki dans la fluidité des mouvements et le souci du détail. La virtuosité est plus rare. Elle est perceptible dans la mise en scène du travail de l'ingénieur, en particulier lorsqu'on nous le montre en train de dessiner. Je n'avais jamais vu auparavant une animation capable de rendre aussi bien compte des mouvements du bras et de la main.

   Par contre, l'histoire d'amour m'a beaucoup moins accroché. Elle est trop mélancolique à mon goût. On sent un peu trop souvent le poids de la fatalité. Cela n'empêche pas certaines scènes d'être enjouées, mais cette apologie des petits riens du quotidien amoureux manque de relief. (J'en profite pour préciser que ce n'est absolument pas un film pour les petits. Dans la salle où je l'ai vu, des parents inconscients - ou égoïstes - avaient emmené des marmots de 5-6 ans... qui ont vite décroché. Ceux âgés d'une dizaine d'années sont restés attentifs.)

   Pour moi, ce n'est pas le meilleur Miyazaki. Il lui manque le souffle de Nausicaä, de Princesse Mononoké, du Voyage de Chihiro, qui sont d'authentiques chefs-d’œuvre. Mais cela se laisse regarder sans déplaisir.

   P.S.

   Je pense que Miyazaki est conscient d'avoir réalisé un film qui n'est pas à la hauteur de ses plus grandes réussites. Il le dit même indirectement dans Le Vent se lève, par l'intermédiaire de Gianni Caproni (l'ingénieur italien). Le mentor du héros affirme à celui-ci qu'il faut pleinement tirer profit de sa période la plus créative, censée durer dix ans. Je pense qu'à travers l'ingénieur, Miyazaki parle de lui en tant qu'auteur de films d'animation. (Ce serait la période 1992-2001, qui a vu la création de Porco Rosso, Princesse Mononoké et Le Voyage de Chihiro... On pourrait prolonger jusqu'à 2004 et la sortie du Château ambulant.)

19:10 Publié dans Cinéma, Histoire, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 24 janvier 2014

12 Years a Slave

   Ces douze années d'esclavage sont celles subies par Solomon Northup, un Noir américain de l'État de New York... et surtout, au départ, un homme libre, dans les années 1830. C'est l'occasion pour Steve McQueen de nous proposer un (court) portrait inattendu d'une Amérique non esclavagiste, vers le milieu du XIXe siècle. C'est indirectement un éloge de la ville multiculturaliste. Les scènes urbaines sont d'ailleurs très réussies, notamment l'un des retours en arrière qui nous montre le croisement de deux destins noirs (celui d'un homme libre bien inséré socialement et celui d'un esclave sous la coupe de son maître).

   Mais il faut reconnaître que l'ensemble est assez académique, avec une musique de Hans Zimmer que l'on a l'impression d'avoir déjà entendue cent fois. On retrouve heureusement la "patte" du réalisateur de Hunger dans les scènes intimistes, en particulier celles qui font intervenir deux personnages. Le cadrage est excellent, les jeux d'ombre et de lumière maîtrisés et les dialogues bien écrits. Les mouvements de caméra sont mesurés et, m'a-t-il semblé, bien dosés.

   Le paradoxe est que l'acteur qui se détache n'est pas celui qui incarne le personnage principal. Chiwetel Ejiofor est presque éclipsé par Michael Fassbender, excellent en esclavagiste alcoolique, veule et libidineux. Ajoutons que les seconds rôles sont très bons... et je m'en voudrais de ne pas signaler aux dames que Brad Pitt (qui coproduit le film) fait une apparition marquante, en charpentier canadien anti-esclavagiste. Comme, à Rodez, le film est projeté en version originale sous-titrée, cela permet aux oreilles habituées à sa voix de doublage de découvrir les véritables intonations de l'acteur.

   L'intrigue n'est pas strictement linéaire. Divers retours en arrière sont introduits, à plusieurs moments. Je dois reconnaître que c'est habilement fait. Sur le fond, le scénario ne verse pas dans le manichéisme. Si le racisme et la violence des esclavagistes sont fermement dénoncés, on a fait l'effort de nuancer le portrait des Blancs, introduisant des personnages sudistes plus ou moins sympathiques (avec une bonne prestation de Benedict Cumberbatch) et proposant des figures positives parmi les Yankees. Avis toutefois aux âmes sensibles : à plusieurs reprises, des Afro-américains sont victimes des délices de la corde ou du fouet. L'une des séquences les plus marquantes voit le héros s'opposer à un employé de l'un de ses maîtres... et devoir attendre sa délivrance pendant un bon petit moment.

   En dépit de quelques longueurs, cela reste un bon film, qui évoque un aspect méconnu d'une histoire déjà maintes fois représentée sur grand écran.

dimanche, 19 janvier 2014

Belle et Sébastien

   C'est le prototype du film intergénérationnel : les plus vieux ont assisté à la première diffusion de la série originale ; les gens comme moi ont vu le dessin animé japonais et les plus jeunes vont être attirés par le gros chien et le héros, un gamin de leur âge.

   Si les paysages sont magnifiques et l'histoire prenante, on aurait toutefois dû travailler davantage les dialogues. Certains sont réussis, comme ceux qui montrent les personnages en train de se charrier. Mais que Tchéky Karyo a du mal à sortir son texte ! Par moment, j'ai eu mal pour lui. Après, il y a le gamin. On aime ou on n'aime pas. Margaux Chatelier est plus vraisemblable, dans le rôle d'Angelina.

   Si l'intrigue est assez bien construite, certains éléments manquent de vraisemblance, ou sont "téléphonés". Par exemple, je ne sais pas dans quelle rivière la chienne se baigne, mais sachez qu'après un seul passage, le poil tout crado devient d'une blancheur éclatante ! (Je conseille aux riverains de courir y faire leur lessive.) Plus tard dans le film, l'un des personnages vient en avertir d'autres du danger qui les menace. On se demande comment il a pu s'éclipser de son groupe... et à quoi il carbure, pour avoir réussi à rejoindre aussi facilement les passeurs, partis longtemps avant lui. Pour couronner le tout, juste après l'avalanche (joliment filmée), voilà le grand-père et le gamin qui débarquent au même endroit ! On sent aussi venir gros comme une maison l'accident avec le pont de glace...

   Quant au contexte historique (la Seconde guerre mondiale), il n'est qu'un décor. N'y cherchez pas une présentation fine des rapports humains à l'époque. De manière symbolique, les nazis sont aux humains ce que sont les loups aux moutons. Aucun Français ne collabore et, comme nous nous sommes aujourd'hui réconciliés avec l'Allemagne, l'un des personnages est chargé d'incarner une vision humaniste de nos voisins d'outre-Rhin. (Il le fait d'ailleurs assez bien.)

   Bref, si vous avez un peu de temps à perdre et que vous êtes sensibles aux beaux paysages ainsi qu'aux animaux de haute montagne, ce film peut vous satisfaire.

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lundi, 13 janvier 2014

Le Loup de Wall Street

   On peut voir ce film de deux manières. On peut partir du principe qu'il s'agit d'une farce et l'on s'embarque dans une comédie immorale de trois heures. On apprécie la performance des acteurs, au premier rang desquels Leonardo DiCaprio, excellent aussi bien en novice de la Bourse qu'en escroc sans vergogne et en idole déchue, quand son empire s'effondre. Matthew McConaughey et Jean Dujardin nous offrent aussi de beaux numéros. La caméra est tenue de main de maître (notamment dans les scènes de groupe, en intérieur, vraiment remarquables) et les dialogues, riches en grossièretés, se savourent sans retenue.

   Ou alors on se dit que, quand même, Scorsese aurait pu introduire davantage de réflexion et de second degré et que son film est décidément trop en empathie avec les pourritures qu'il prétend dénoncer. Le propos est d'abord extraordinairement misogyne : les femmes sont soit des putes soit des salopes, la moins maltraitée étant la plus âgée, la tante de la seconde épouse du héros, incarnée par Joanna Lumley :

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   Les rares scènes où elle dialogue avec DiCaprio sont très réussies et quand on regarde attentivement le grand écran, on se dit que ce visage ne nous est pas inconnu :

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   Il s'agit de Purdey, la cinquième partenaire féminine de John Steed dans la série Chapeau melon et bottes de cuir. Si Joanna Lumley avait incarné une version plus moderne que Linda Thorson, elle n'avait pas fait oublier Diana Rigg, l'irremplaçable Emma Peel.

   Rien de tout cela chez Scorsese, qui considère les actrices comme de la chair à canon. On assiste ainsi à une scène qui suscite le malaise. Dans l'histoire, l'une des employées accepte 10 000 dollars pour se faire tondre en public, à charge pour elle ensuite de se faire poser des implants mammaires. Il se trouve que l'actrice se fait effectivement raser le crâne. Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour figurer dans un film du Maîîître !

   D'autre part, si je comprends qu'il faille faire figurer à l'écran certaines des nombreuses prostituées dont les personnages principaux ont profité, pourquoi les filmer aussi péjorativement ? Presque aucune n'a droit à la moindre ligne de texte, sauf pour souligner qu'elles sont soumises aux désirs de ces messieurs. Là encore, les actrices sont chosifiées, retenues uniquement sur des critères physiques, ce qui n'est pas le cas des acteurs masculins...

   C'est donc un film putassier, diablement bien fait, mais qui, au fond, témoigne surtout de la fascination éprouvée par Scorsese pour les voyous, quels qu'ils soient, du moment qu'ils sont pleins aux as et qu'ils s'éclatent à donf.

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samedi, 11 janvier 2014

Mandela, un long chemin vers la liberté

   Si le décès de Nelson Mandela est survenu à propos, il faut savoir que la sortie du film s'est plutôt faite dans le contexte du vingtième anniversaire de son élection à la présidence de la République, en 1994. Eh, oui ! Quatorze ans avant Barack Obama, un pays dominé par des Blancs chrétiens avait élu un Noir à sa tête.

   La comparaison avec les Etats-Unis est d'ailleurs implicite à plusieurs moments de l'histoire. C'est particulièrement évident lors de la mise en place de l'apartheid, qui évoquera aux spectateurs les moins incultes la ségrégation états-unienne. De la même manière, la vie du jeune Mandela, avocat charmeur au départ pas très impliqué dans la politique, n'est pas sans rappeler celle de la bourgeoisie noire de la même époque, de l'autre côté de l'Atlantique.

   Sans surprise, ce biopic commence par évoquer (rapidement) l'enfance et l'adolescence du héros, dans des scènes "ethniques" très inspirées.  Cependant, on ne nous dit pas clairement qu'il appartenait à l'aristocratie africaine : alors qu'il est issu d'une lignée royale xhosa, on nous présente la famille d'origine comme un clan rural très modeste.

   L'hagiographie est (un peu) contrebalancée par le côté "homme à femmes" du jeune Mandela, d'abord soucieux de profiter de la vie... et pas toujours très correct avec les dames, y compris sa première épouse.

   Il manque cependant dans le portrait intellectuel du héros les références à Gandhi. On a beau nous le montrer d'abord comme un avocat non-violent, on "oublie" de préciser qu'à l'université, il s'est beaucoup intéressé à la démarche de cet autre avocat, hindou, qui, quelques dizaines d'années auparavant, s'était illustré en Afrique du Sud. Néanmoins, la présence à ses côtés d'un militant d'origine indienne fait référence aux discriminations dont souffrent, bien avant la mise en place de l'apartheid, tous les non-Blancs de l'Union sud-africaine. Dans le film (en version originale), on entend les racistes désigner les Noirs et les Indiens par les doux noms de boy et coolie.

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   Idris Elba incarne très bien ce Mandela jeune qui, dans un premier temps, pense que le monde lui ouvre les bras, avant de s'engager sans mégoter dans la lutte, d'abord pacifique, puis armée. Il est cependant moins convaincant en vieillard : il est beaucoup trop imposant physiquement, alors que "Madiba" était sorti de prison très amaigri. 

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   De ce point de vue, il ne fait pas mieux que Dennis Haysbert dans Goodbye Bafana, même s'il a réussi à copier la démarche du vieil homme. Dans un autre contexte, le Morgan Freeman d'Invictus était meilleur.

   La véritable révélation de ce film est Naomie Harris, qui incarne Winnie Mandela, un personnage complexe, qu'elle réussit à rendre vraisemblable quel que soit son âge. On avait déjà remarqué l'actrice dans Pirates des Caraïbes et dans Skyfall. Ici, elle étincelle. La version originale m'a même permis de constater qu'elle parlait anglais non pas comme la Britannique qu'elle est, mais comme une Africaine (ou une Antillaise). On suit son évolution, de la jeune femme amoureuse à la révolutionnaire sans scrupule, en passant par la militante engagée et la mère opprimée par une dictature raciste. Elle apporte de l'épaisseur à une histoire un peu trop linéaire.

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   La seconde moitié du film montre quand même que, si Mandela a atteint le statut d'icône, ce ne fut pas une partie de plaisir. A partir du moment où il se trouve en prison, sa lutte prend une autre forme, tandis que ceux qui sont dehors deviennent de plus en plus violents. Les dissensions entre les Noirs, visibles dans la dernière partie, ne sont cependant pas suffisamment expliquées.

   J'ajoute une invraisemblance : la faible évolution physique du personnage de l'un des gardiens, qui va suivre Mandela dans ses lieux de détention. Alors que le chef africain se voûte et grisonne, lui reste quasiment le même pendant environ trente ans !

   Cela reste un film très agréable à regarder : les quelque deux heures et quart sont passées sans que je m'en rende compte.

vendredi, 10 janvier 2014

Week-end of a champion

   Plus de quarante ans après, ce documentaire de Roman Polanski est ressorti en salles, augmenté d'un "post-filmum" contemporain, qui le voit dialoguer avec l'ancien champion du monde de formule 1, Jackie Stewart, qui est au coeur de l'histoire.

   La première partie est l'occasion de découvrir les préparatifs du grand prix de Monaco ainsi que les craintes éprouvées par les organisateurs et certains pilotes quant aux conditions météorologiques. Caméra à l'épaule, le réalisateur suit le sportif dans ses déplacements quotidiens, faisant toucher du doigt sa grande popularité. Mais la séquence la plus marquante est la reconnaissance du parcours, en petite voiture de golf (!), avec Stewart, Polanski et un cadreur (ou Frank Simon, le coréalisateur). La caméra est toujours judicieusement placée dans cet environnement exigu, si bien qu'avec les commentaires du pilote, on comprend mieux les subtilités et les difficultés du circuit urbain.

   Viennent ensuite les séances d'essai. Une caméra embarquée dans la monoplace de Stewart nous fait découvrir la course sous un jour particulier. C'est impressionnant. D'autres prises de vue, à partir des trottoirs ou des balcons monégasques, enrichissent la séquence. S'y ajoutent les précieux commentaires du pilote qui, quand il pense ne pas être écouté par ses concurrents, révèle toute sa science de la course. On découvre aussi le rôle des compagnes des pilotes (pour ceux qui en ont une régulière...). La pluie contrarie la deuxième séance... et suscite des inquiétudes, notamment chez Stewart, plus dominateur sur terrain sec.

   La troisième partie est consacrée aux courses proprement dites. En guise d'amuse-gueule, les formule 3000 ouvrent le bal, avant que vrais pros ne se déchaînent. Alors que ce film est une antiquité et que, depuis, les retransmissions télévisées ont fait de gros progrès, je trouve que Polanski réussit à rendre vivant et passionnant un sujet somme toute très futile. Le suspens règne quant au déroulement du grand prix... ainsi qu'au niveau de la météo.

   La nouvelle fin du film montre deux vieillards confortablement assis, dans la même chambre d'hôtel où ils se trouvaient des années auparavant. Stewart y révèle son passé d'enfant en échec scolaire. Longtemps, il a dû cacher sa dyslexie, y compris à sa compagne. Ceux qui ne le savaient pas découvriront aussi l'incroyable enchaînement de hasards qui a permis l'ascension du champion. Plus tristement est évoqué le sort des trop nombreux pilotes victimes d'accidents mortels dans les années 1960-1970.

   Ce documentaire est une curiosité, qui m'a agréablement surpris.

19:38 Publié dans Cinéma, Sport | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film