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dimanche, 20 octobre 2013

Blue Jasmine

   Le nouveau film de Woody Allen marie l'anglo-américain et le français, dans une comédie douce-amère qui tourne autour des rapports entre les hommes et les femmes. L'héroïne, bien qu'incarnée (à la perfection) par la superbe Cate Blanchett, est antipathique. Si je ne répugnais pas à être grossier, je dirais que le film aurait pu s'intituler Grandeur et misères d'une pétasse.

   Jasmine est une snob de la côte Est, fascinée par l'Europe... surtout la France (Paris, Saint-Tropez, Cannes...). Coup de bol pour elle, elle s'appelle French. Elle porte même un prénom français, à l'origine : Jeanette. C'est aussi une inconditionnelle de la mode d'outre-Atlantique (Hermès, Louis Vuitton...). De temps à autre, les dialogues sont émaillés de mots français (dans la version originale sous-titrée). On découvre ce personnage dans toute sa splendeur grâce aux retours en arrière, qui, judicieusement placés, éclairent un passage de l'histoire qui se déroule sous nos yeux, celle d'une dame de la haute société en pleine déchéance.

   Cate Blanchett est épatante à tous les niveaux. Elle livre une excellente interprétation aussi bien de la mondaine sûre d'elle et de son bonheur, que de l'ex-madame au purgatoire chez sa sœur méprisée (Sally Hawkins, très bien) et de la femme perdue, entre ses mensonges et ses rêves de grandeur.

   L'intrigue est agrémentée d'un humour acide, fondé sur le fossé socio-culturel (caricatural) entre les classes supérieures de la côte Est, richissimes, arrogantes et la conscience tranquille malgré leur malhonnêteté et les gagne-petit de la côte Ouest, à la fois hostiles et fascinés par les premières.

   Le film se veut aussi moral. Le mensonge ne mène pas au bonheur. Certains personnages vont en faire l'expérience cruelle. On découvre aussi petit à petit la complexité de la personnalité de Jasmine, que le réalisateur place dans beaucoup de situations inconfortables. (Il reste toutefois assez indulgent avec elle, les défauts des autres prenant parfois le pas sur les siens.)

   Ce n'est pas un grand Woody Allen, mais l'on passe un bon moment, dans une ambiance jazzy (avec pour fil conducteur le morceau  Blue Moon), en compagnie d'une actrice qui n'a jusqu'à présent pas été reconnue à sa juste valeur.

14:27 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 19 octobre 2013

9 mois ferme

   Cela fait quatre ans que l'on attendait la nouvelle réalisation d'Albert Dupontel. Entre temps, il a (bien) fait l'acteur, dans Le Bruit des glaçons et Le Grand Soir. Il réitère certains choix de casting : on retrouve des têtes connues dans les rôles secondaires et, comme dans Le Vilain, Dupontel partage l'affiche avec une actrice de renom, ici Sandrine Kiberlain.

   On aurait pu craindre que le "choc des cultures" entre ces deux pointures ne soit pas très productif. Ce serait oublier que La Kiberlain a de la ressource. (Si vous ne l'avez pas vu, courez télécharger, louer ou acheter Romaine par moins 30 !) De surcroît, dans un premier temps, on lui fait incarner une magistrate coincée, totalement dédiée à son travail... et intransigeante dans le boulot. Une cuite monumentale, lors du réveillon 2012-2013, va changer sa vie.

   Il faut aller voir ce film pour les performances d'acteurs. Celle de Dupontel ne sort pas particulièrement du lot. On a l'impression de retrouver l'un des personnages de ses sketchs qui aurait mûri (mais quand même mal tourné). Ce n'est pas déplaisant. Kiberlain est vraiment excellente, aussi bien en juge inflexible qu'en célibataire bourrée et en future maman désemparée.

   Que dire aussi des seconds rôles ! C'est avec plaisir que l'on retrouve Nicolas Marié (qui en fait toutefois un peu trop) et Bouli Lanners, hilarant dans la séquence de visionnage des bandes de vidéo-surveillance ! Ces deux compères étaient déjà présents dans Le Vilain. Il faut ajouter Philippe Uchan (un vieux complice de Dupontel), qui s'en prend plein la tête, au propre comme au figuré !

   Je laisse à chacun découvrir les apparitions des multiples invités. Je signale juste celles de Terry Gilliam (en admirateur... mais de qui ?) et de Jean Dujardin, excellent dans le rôle du traducteur en langage des signes (un procédé pas nouveau nouveau, mais toujours efficace !).

   J'ajoute l'apparition d'une non-professionnelle, Michèle Bernard-Requin, ex-magistrate (qui incarne la supérieure hiérarchique de l'héroïne) que le grand public a découverte naguère dans le documentaire de Raymond Depardon 10e Chambre, instants d'audience.

   Je conseille aussi d'être attentif aux scènes qui font intervenir la télévision, en particulier à ce qui défile en bas de l'écran !

   C'est donc une comédie (brève : moins d'1h30) tonique, aux dialogues bien écrits, parfois inventive sur le plan visuel. Enfin un film français qui sort du lot !

17:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 18 octobre 2013

Diana

   Je ne suis pas "client" de ce genre de film, a priori. De plus, la bande-annonce doublée en français est mauvaise. Mais il y a Naomi Watts... et une histoire que je ne connaissais pas, celle de l'amour né entre l'ex-femme du prince Charles et un chirurgien pakistanais.

   L'histoire fonctionne sur la base d'un grand retour en arrière. A la fin, on reverra la première séquence, assez énigmatique. Sans trop en dire, je peux révéler qu'elle accentue le côté mélodramatique du film. Ce n'est pas ce qu'il a de meilleur.

   Le meilleur (en version originale sous-titrée) ? La comédie romantique qui occupe le coeur de l'intrigue. J'ai ri sincèrement à la naissance de cette passion entre la vedette et l'inconnu, entre la protestante et le musulman. Toutefois, le couple d'acteurs ne resplendit pas du même éclat. J'ai trouvé Naveen Andrews assez fade, alors que Naomi Watts est épatante (et bien plus jolie que celle qu'elle incarne). Elle est particulièrement charmante quand elle invente des stratagèmes pour retrouver son homme :

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(Ici, elle s'est déguisée en Laure Adler jeune.)

   Cependant, le film est un peu trop en empathie avec l'héroïne, même s'il ne cache pas qu'elle a usé de sa notoriété à des fins autres qu'humanitaires. La relation ambiguë qu'elle a nouée avec la presse poubelle n'est qu'esquissée. De plus, l'action de celle-ci n'est dénoncée que parce qu'elle pourrit la vie de Diana. Rien n'est dit de son côté abrutissant. Le paradoxe est que ces médias qui la harcèlent contribuent à faire d'elle une icône. Pas de cohortes de fans sans photos et articles racoleurs...

   On semble aussi avoir soigneusement évité de trop évoquer la famille royale d'Angleterre. La reine n'est même pas mentionnée et l'on entraperçoit à peine les fils de l'héroïne.

   Les voyages de celle-ci sont toutefois prétextes à de jolies tranches de vie, que ce soit dans un champ infesté de mines antipersonnel ou au Pakistan, chez les parents de son chéri d'amour, dans une séquence vraiment très enlevée.

   Cela se regarde comme certains bons films sentimentaux avec Julia Roberts. Sans plus.

20:33 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 13 octobre 2013

Shérif Jackson

   Le héros éponyme est un homme de loi peu conventionnel : il chante et il danse, y compris pendant qu'il exerce ses fonctions. Sa coupe de cheveux détonne dans le monde du Far West. Il est incarné par un Ed Harris (un vieux routier des seconds rôles) très inspiré :

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   Il débarque dans ce coin paumé de l'Amérique à la recherche de deux frères (interprétés par les réalisateurs), l'un étant le petit ami de la fille du gouverneur. Il va falloir qu'il cherche beaucoup, puisque, dès la deuxième séquence, les spectateurs ont pu constater qu'il leur arrivait quelques bricoles !

   Au cours de l'enquête, le shérif va se muer en Gil Grissom et utiliser les méthodes les plus modernes de l'époque pour identifier les responsables des crimes qui sont commis. La séquence qui aboutit à l'analyse de la composition de quatre balles est particulièrement réussie. J'ai aussi beaucoup apprécié la manière dont est mis en scène le recouvrement des balles. La scène la plus réjouissante est sans conteste l'exploration du cadavre d'un commerçant. Le shérif est filmé de dos, mais je peux vous dire qu'il y a eu un gros travail sur le son !

   Le deuxième personnage principal est le prophète Josiah, un homme à qui l'on serait tenté de donner le bon Dieu sans confession... et l'on aurait tort. C'est une véritable pourriture, un chef de bande qui s'est construit une petite secte fanatisée par la lecture de la Bible, secte dans laquelle il puise sans vergogne pour satisfaire ses besoins sexuels...

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   Il faut relever l'interprétation très convaincante de Jason Isaacs, dont le nom ne vous dit peut-être rien, mais qui s'est rendu célèbre naguère dans le rôle de Lucius Malefoy (dans la saga Harry Potter) :

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   Il s'est aussi fait remarquer en lieutenant Briggs, dans l'excellent Green Zone :

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   On pourrait ajouter à ce tableau masculin le personnage de l'épicier libidineux (promis à un sort particulier) et celui du banquier véreux. Bref, l'histoire déconstruit le mythe des pionniers du Far West. Ce n'est pas nouveau nouveau, mais cela ne fait pas de mal... d'autant plus qu'est ajoutée une satire du fondamentalisme protestant. Mais tous ces bonshommes vont se faire damner le pion par la véritable héroïne de ce film :

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   January Jones (déjà vue dans Good Morning England, Sans Identité et X-Men : le commencement) ne paie pas de mine, de prime abord. Elle est l'épouse aimante d'un fermier sans doute originaire du Mexique. Seul petit détail : elle tire beaucoup mieux que lui au révolver, élément qui a son importance dans la suite de l'histoire.

   Très vite, on comprend qu'elle cache un lourd passé... et que les mecs du coin ont terriblement envie de lui mettre le grappin dessus. Sachez qu'ils seront punis par où ils ont péché. J'ai en mémoire cette scène merveilleuse, qui montre Sarah en train de se baigner nue dans un étang isolé. On ne la voit que de dos. Deux acolytes du prophète pensent que c'est l'occasion à saisir. Les spectateurs qui possèdent plus de dix neurones se disent que tout cela est bien louche... et ils ont raison !

   Moins glorieuse pour l'héroïne (mais très maîtrisée du point de vue de la réalisation) est la troisième rencontre entre le prophète et Sarah. Le religieux se montre d'une incroyable hypocrisie, accentuée par la mise en scène : il est souvent filmé en contre-plongée ou de biais. Soyez notamment attentif au réveil de l'héroïne...

   Je ne peux pas terminer ce billet sans évoquer la scène du dîner, chez le prophète. Le shérif fait partie des invités, presque tous obséquieux avec l'homme fort de la contrée, qui a fait installer à grand frais une magnifique table en bois dans son salon. Notre bon vieux Jackson va se montrer d'une urbanité désopilante au cours du repas...

   Ce western atypique est l'excellente surprise de cet automne. Il est bien filmé, bourré d'humour... et les "méchants" en prennent pour leur grade !

12:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 11 octobre 2013

Jimmy P.

   C'est un film d'Arnaud Desplechiant, avec Mathieu Amalric... tout pour me faire fuir, donc. Mais l'histoire, inspirée de faits réels, a piqué ma curiosité et les extraits vus ont achevé de me convaincre de tenter l'expérience.

   Pourtant, la première scène qui fait intervenir Mathieu Amalric m'a fait craindre le pire. L'un des médecins de l'hôpital américain le contacte par téléphone. Le psychanalyste se trouve dans un bar, visiblement sans domicile fixe ni travail. L'acteur exprime maladroitement un enthousiasme exacerbé. Heureusement, cela s'améliore par la suite, notamment lors du premier entretien entre les deux héros, qui voit le psy utiliser ses connaissances anthropologiques pour nouer le contact avec son patient.

   Le film est principalement composé de scènes de dialogues. Les plus nombreuses sont celles qui font intervenir l'Indien Blackfoot (Benicio Del Toro, excellent) et le psy européen juif (Amalric, qui a trouvé le ton juste). D'autres confrontent chacun des deux héros aux femmes, le premier à sa soeur ou à son ex, le second à sa maîtresse. On comprend que, malgré leurs différences, ils éprouvent des difficultés semblables à gérer leurs relations avec la gent féminine. Cet aspect du film a suscité des réactions, parce que les portraits de femmes (les trois citées, plus quelques autres) ne sont pas très positifs. Le plus beau personnage est sans conteste celui de la grande soeur de Jimmy, femme de tête, forte et faible à la fois. Elle est incarnée par Michelle Trush.

   Un autre élément rapproche les deux hommes : l'appartenance à deux peuples qui ont subi un massacre de masse. Il est amusant de constater qu'ils communiquent dans un anglais abâtardi. L'Indien acculturé s'exprime difficilement, avec une syntaxe approximative. Le psy a un langage plus fluide, mais un accent prononcé, censé évoquer une origine centre-européenne.

   J'ai du mal à l'expliquer, mais je ne peux que le constater : le montage réussit à faire toucher du doigt ce que peut être une thérapie s'appuyant sur certains acquis de la psychanalyse. Mais le grand talent du film est de montrer que les deux hommes en tirent profit. L'Indien se débarrasse de ses cauchemars et envisage de redonner un sens à son existence. Le psy obtient la reconnaissance de ses compétences (avec un poste en fac en bout de piste) et peut espérer refaire sa vie en Amérique, loin de cette Europe guerrière, raciste et à moitié détruite.

   C'est donc un beau film, bien joué, mais de facture classique. Il nécessite un certain effort de la part des spectateurs. Mais il le mérite.

23:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 10 octobre 2013

The Place to be

- Allo, Riri ? Devine ce que je viens de récupérer !

- Euh... comment veux-tu que je sache ?

- Allez, essaie !

- Euh... la bague de ta grand-mère ? Tu m'as bien dit que tu l'avais perdue ?

- Non... enfin si, mais ce n'est pas ça ! Pense plutôt à l'actualité !

- ... Ne me dis pas que tu as réussi à mettre la main sur le programme d'Yves Censi pour les municipales ?

- Mais qu'il est con !!!! Pense à tes centres d'intérêt !

- Mmmm... aurais-tu un abonnement ciné pour le nouveau multiplexe ?

- Presque ! J'ai deux places pour l'inauguration de mardi ! Je pense y aller avec un mec sympa, drôle... et surtout pas trop râleur !

- Tu as ça dans tes relations ?

- Il paraît... mais je suis pas sûre pour le "pas trop râleur"... Bon, ça commence à 18 heures, sur l'esplanade. Tu pourras m'y rejoindre ?

- Attends, je réfléchis... Ils font quand même chier... encore un horaire pour fonctionnaires, femmes au  foyer, retraités et chômeurs ! Et puis je suis fatigué, moi !

- L'apéritif est offert par la municipalité... et, dans le cinéma, une collation gastronomique sera servie après le concert.

- OK, j'y serai.

   Vint le mardi. Autour de l'esplanade, du Foirail à la salle des fêtes, des policiers municipaux orientaient piétons et automobilistes. Il y avait un monde fou. On parle de plus de 600 invitations lancées ce qui, avec les accompagnateurs, fait plus de 1 000 pékins.

   Au départ, je n'avais même pas vu le buffet planté devant l'entrée du cinéma, tant la foule était compacte. Une fois ce détail stratégique assimilé, j'ai enfilé mon costume de chevalier servant et j'ai tenté une approche, en quête de victuailles. Il a fallu un peu jouer des coudes, d'autant plus que plusieurs groupes semblaient maîtriser la tactique d'occupation du territoire : toujours proches du buffet, mais jamais vus en train de se servir, ils buvaient et mangeaient à volonté. Pendant un instant, j'ai été presque admiratif. Vite, j'ai réalisé qu'il ne fallait pas trop rêvasser, sinon je risquais d'être percuté par l'une des innombrables sommités politico-économico-administratives qui hantaient cette foule. Eux sont habitués à ce que l'on s'écarte sur leur chemin. L'un d'entre eux me parut plus habile encore. Il s'agit de Passepartout Manuel Cantos, qui évoluait dans la foule avec une facilité déconcertante, passant sans problème entre les jambes des invités.

   Arrivé au buffet, je respirai un peu. La nourriture était composée d'amuse-gueule bon marché. Je reconnais là la gestion Teyssèdre, qui veut bien prendre la peine de régaler l'assemblée... mais à moindre coût. Du côté des liquides, on trouvait les traditionnels jus de fruit, de l'eau et, heureusement, du vin blanc et de la crème de cassis.

   C'est au moment où j'ai dû me saisir des deux gobelets remplis d'un liquide rougeâtre que je me suis rendu compte qu'il allait être difficile d'emporter du solide avec. Comment faire ? Je songeai à poser les gobelets pour me remplir les poches de cochonneries aux acides gras insaturés. J'envisageai aussi de récupérer une assiette en plastique pour la garnir d'un florilège desdites cochonneries. La crainte du scandale me retint. Finalement, je choisis de commencer à boire mon kir, puis de transvaser un peu du second dans le premier verre. Ensuite, je pus tenir les deux gobelets avec les doigts d'une seule main, sans les faire tremper dans le précieux liquide. De l'autre, j'emportai de quoi grignoter.

   Revenu auprès de Dulcinée, je constatai qu'elle avait été abordée par l'une de ses connaissances, un individu louche de sexe masculin.

- Tiens, Henri ! Quel plaisir de voir ta gueule d'abruti ! Comment vas-tu ?

- Ca va, ça va. Tu es venu seul ?

- Non, avec ma copine. D'ailleurs, je l'ai perdue. Je crois qu'elle est partie chercher du vin blanc.

- Il paraît qu'il est très correct. Désolé, je n'en ai pris que pour nous deux. Sinon, tu penses bien que j'aurais pris plaisir à cracher dans un troisième gobelet !

- Bon, ben, je vais voir si je la trouve. A plus !

- C'est ça, casse-toi, pov' con ! Bonne soirée !

   Peu après, des applaudissements ont retenti. Le ruban était coupé. La masse des invités pouvait commencer à entrer dans le multiplexe. Très vite, un groupe s'est mis en tête de faire le siège des entrées de la salle 1, négligeant d'effectuer la visite des locaux. L'explication n'allait pas tarder à venir : le nombre de places étant limité, seuls les "pipoles" et les premiers entrés auraient droit au concert, les autres devant se contenter de la retransmission dans la salle 2.

   Et pourtant, la visite valait le coup. Nous avons déambulé entre les salles, testant les fauteuils, regardant et écoutant les bandes-annonces. Conclusion : on est bien assis, les sièges sont disposés en gradins, les écrans sont grands et le son est bon. Cerise sur le gâteau : les toilettes, très jolies, fonctionnelles. Elles donnent envie d'aller dans le multiplexe rien pour y uriner ! Ah, j'oubliais : le sèche-mains automatique, merveille de technologie... avec un petit écran sur lequel s'affiche la durée de courant d'air asséchant !

   Après les discours, après le concert, après la première séance (offerte aux invités), la collation a été servie. On a retrouvé les mêmes pique-assiette. Mais, là, le menu était plus haut de gamme. Ce fut la ruée. J'ai plus tard entendu dire qu'on avait prévu la présence de 300 convives. On avait visiblement sous-estimé la gloutonnerie de certains invités. Seule note positive : le champagne, abondamment servi, était délicieux.

   Bon, c'était pas tout ça, mais les gens normaux travaillaient le lendemain. Nous sommes donc partis avant le feu d'artifice, dont je ne sais même pas s'il a eu lieu. En quittant le cinéma, j'ai croisé un visage qui me disait quelque chose. Je me suis souvenu l'avoir vu dans un mini-multiplexe aveyronnais, pas très éloigné de Rodez. Une mienne connaissance m'a appris qu'il avait candidaté pour la direction du nouveau cinéma ruthénois, mais qu'il avait été finalement engagé au poste de directeur-adjoint. Voilà au moins une personne qui est persuadée que ce multiplexe est destiné à un grand avenir !

mercredi, 09 octobre 2013

Le Majordome

   A la base, il y a l'histoire (vraie) d'Eugene Allen, un Noir né dans une plantation qui a fini par devenir majordome à la Maison Blanche. Il a servi sous une brochette de présidents : Harry Truman (ce qui n'apparaît pas dans le film), Dwight Eisenhower, John Kennedy, Lyndon Johnson, Richard Nixon, Gerald Ford, Jimmy Carter et Ronald Reagan.

   Le film entremêle l'histoire familiale de cet homme ordinaire au destin exceptionnel (incarné avec talent par Forest Whitaker) et la lutte pour les droits civiques, à laquelle l'un de ses fils va activement participer. Au second niveau, le film pose la question de l'efficacité de l'action politique. Qu'est-ce qui a le plus fait progresser la cause des Noirs ? La révolte des activistes, parfois violemment injuste, ou les accommodements de la majorité silencieuse, qui ont rendu la cohabitation avec les Blancs acceptable ? Les scènes de dispute entre le père majordome et le fils étudiant sont des moments clés.

   On suit avec plaisir les pérégrinations familiales parce que des individus ordinaires sont incarnés par des acteurs de renom... ou des célébrités de la Communauté. Jetez un œil au casting !

   Attention toutefois. Pour les besoins de la dramatisation, la vie du héros a été quelque peu scénarisée. Un billet publié sur un blog du site américain Slate propose d'intéressantes mises au point.

   Même si le film dure plus de deux heures, on passe assez rapidement sur les différents présidents. Je suis tout de même satisfait que l'on rende justice à l'administration (républicaine) Eisenhower, qui a réellement enclenché la lutte contre la ségrégation. Robin Williams est un bon interprète de ce président humaniste. Sans surprise, hélas, il n'est donné qu'une version hagiographique de son successeur, John Fitzgerald Kennedy. Quelques anecdotes (réelles, comme celle de la cravate) donnent du relief à cet épisode convenu. On ne sera donc pas étonné que le portrait de Lyndon Johnson (Liev Schreiber, truculent) soit essentiellement à charge, comme souvent dans le cinéma américain, qui ne pardonne pas l'enlisement au Vietnam. C'est oublier un peu vite que l'essentiel de la "déségrégation" est dû à l'action de ce président sudiste, un peu brut de décoffrage, mais soucieux du bien commun... et des deniers publics !

   On passe très vite sur le bilan de Richard Nixon, d'abord présenté comme un vice-président (d'Eisenhower) arriviste et sans scrupule, puis comme un alcoolique magouilleur. Ce n'est pas dénué de fondement, mais je pense qu'il méritait mieux. On ne fait qu'entr'apercevoir Gérald Ford et Jimmy Carter, bien que ce dernier (et son épouse) aient laissé un très bon souvenir au vrai majordome. Mais ils sont tellement moins "glamour" que les Kennedy...

   La carrière du serviteur zélé s'achève sous Reagan, montré comme un mec sympa mais aux convictions parfois très arrêtées. On laisse à l'un de ses opposants le soin d'évoquer les ravages sociaux de sa politique. Il faut souligner la qualité de l'interprétation d'Alan Rickman et Jane Fonda, qui ressuscitent Ronald et Nancy avec brio. La fin du film montre le vieux couple noir soutenir Barack Obama. C'est un peu trop "politiquement correct"...

   On peut aussi lire ce film comme une histoire de la lutte des Noirs pour les droits civiques. Là encore, deux figures majeures sont à peine esquissées : Martin Luther King et Malcolm X. On nous propose une vue plus fouillée des militants de base et de leurs actions coup de poing. Cela nous vaut certains des meilleurs moments du film.

   A plusieurs reprises, celui-ci dénonce la violence dont les Blancs racistes sont les auteurs. Cela commence dans la plantation (un épisode fictif)... On  se croirait plutôt au temps de l'esclavage que dans l'Entre-deux-guerres. Anachronisme ? Cela se poursuit par ces petits Blancs de base qui ne supportent pas que des manifestants pacifiques remettent en question la ségrégation. Le summum est atteint lors de l'intervention de membres du Ku Klux Klan.

   Tout cela forme un ensemble plutôt bien fichu, un peu convenu... et parfois gâché par une musique trop insistante. Mais, pour moi, la qualité de l'interprétation emporte l'adhésion et cette petite leçon d'histoire mérite le détour.

   P.S.

   Après discussion avec d'autres cinéphiles, qui n'ont pas tous eu le même ressenti à propos de ce film, une conclusion s'impose : il faut le voir en version originale sous-titrée, la VF étant assez mauvaise.

samedi, 28 septembre 2013

Jobs

   Ce biopic, bien que durant plus de deux heures, n'évoque pas toute l'existence de Steve Jobs. Il démarre au début des années 1970, quand le jeune homme se décide à lâcher ses études. Il s'arrête lorsque l'homme, dans la force de l'âge, reprend le contrôle de l'entreprise qu'il a fondée.

   Ce n'est ni un film apologétique, ni un pamphlet. Les aspects déplaisants de la personnalité du héros ne sont pas cachés : il s'est souvent comporté comme un mufle avec les femmes, malmenait ses employés... et n'avait pas la reconnaissance du ventre. Dès le début, il n'a pas hésité à arnaquer son pote Steve Wozniak, le vrai génie de l'informatique. Jobs est plus un concepteur, un chef d'équipe et un communicant.

   L'un des intérêts du film est la première partie californienne, dans les années 1970. L'amour y est assez libre, on consomme des substances hallucinogènes... et on écoute de la bonne musique. (C'est l'occasion de signaler la qualité de la bande son, très entraînante.) Jobs est un jeune homme plutôt introverti, qui ne se lave pas régulièrement et se déplace pieds nus. L'histoire rend hommage aux geeks qui vont bricoler les premiers ordinateurs personnels.

   Le fond est ambigu. On nous présente Jobs comme un franc-tireur, mais il est finalement bien dans le système. L'appât du gain le motive. Il n'est pas fidèle en affaires si ce n'est pas dans son intérêt... et il finit par maîtriser les mécanismes du capitalisme boursier, dont il fut dans un premier temps la victime.

   La réalisation n'est pas mauvaise. On peut relever quelques idées de mise en scène (la caméra qui suit Jobs, avec sa démarche caractéristique, le coup des reflets informatiques dans les yeux...), mais c'est globalement assez conventionnel. Sur un tel sujet, j'aurais aimé qu'on nous donne une vision plus cinématographique de l'expansion de la micro-informatique.

   Notons que les acteurs sont bons, au premier rang desquels Ashton Kutcher (dont la carrière ne témoigne pourtant pas d'une grande clairvoyance dans le choix de ses rôles). Il a tenté d'imiter la démarche du Jobs adulte et les angles de son visage ne sont pas sans rappeler ceux du personnage qu'il interprète. Il campe une sorte de gourou naissant, tendu vers l'accomplissement professionnel, seul but qu'il assigne à sa vie.

   Le problème vient en partie des dialogues. C'est un film verbeux, qui verse un peu trop dans le psychologisme. Du coup, certains moments clés de la carrière de Jobs sont à peine évoqués. Les ellipses sont nombreuses. On a ainsi du mal à comprendre pourquoi l'Apple III et le Macintosh n'ont pas rencontré le succès escompté. La rivalité avec Microsoft est à peine abordée. (Cela aurait sans doute obligé les scénaristes à évoquer l'accord secret finalement conclu avec le groupe de Bill Gates.)

   On a aussi du mal à saisir comment celui qui, jeune homme, rejetait violemment la paternité (quitte à larguer sans ménagement la copine enceinte), se retrouve des années plus tard père de famille installé (avec notamment la première fille, qu'il avait refusé de reconnaître). De même, le film peine aussi à montrer comment celui qui a perdu le contrôle d'Apple puis la gestion d'une équipe a pu se constituer une belle fortune. Le fonctionnement de l'économie boursière n'est bien décrit, alors que les luttes au sein du conseil d'administration occupent une place démesurée. Enfin, l'aventure de l'entreprise NeXT n'est qu'effleurée, alors qu'elle a permis à Jobs de rebondir, même si ce ne fut pas sans mal. (Le début du reportage auquel mène le lien précédent a directement inspiré la scène de jardinage, située dans la dernière partie du film.)

   Bref, ce n'est pas un mauvais film, mais c'est un peu décevant.

01:10 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 21 septembre 2013

Imogene

   Il est des terres reculées où l'on peut encore voir cette comédie américaine, sortie en France il y a un mois et demi. Durant le premier tiers du film, l'héroïne (ni très belle ni très intelligente... juste déboussolée) voit s'écrouler le monde douillet dans lequel elle croyait pouvoir évoluer jusqu'à la fin de sa vie : son mec (elle va mettre du temps à réaliser que c'est un connard) la plaque sans le moindre tact, à la suite de quoi elle perd son boulot et réalise qu'à 30 ans passés, elle n'a pas fait grand chose de sa vie. Elle finit aussi par comprendre que ses bonnes copines (d'insupportables pétasses... excellemment interprétées !) commencent à l'éviter.

   Dans la vraie vie comme dans le film, ce genre de situation débouche parfois sur une tentative de suicide... qui finit par arriver... mais plutôt par accident ! A partir de là, la comédie sociétale gentillette prend quelques aspects plus "corsés" fort réjouissants.

   Imogene (Kristen Wiig, très bien) a une forte propension à vomir, ce qui nous vaut quelques moments savoureux, du réveil à l'hôpital à la soirée de beuverie, en passant par une sortie précipitée de la voiture. La séquence "clinique" est d'ailleurs, à mon avis, l'une des meilleures du film. Elle succède à un drôle de rêve (signalons la qualité de la mise en scène, parfois très inventive) et voit débouler le personnage de la mère (Annette Bening, hélas liftée... mais délicieusement frappadingue !), une joueuse invétérée, cougar sur les bords. Pleine de délicatesse, elle signale à sa fille (que des infirmiers peinent à maîtriser), que l'on voit sa petite culotte...

   Vient ensuite le séjour dans la maison familiale, située sur la côte du New Jersey, donc très loin de New York pour une indécrottable citadine. On découvre le petit frère Ralph, sorte de Tanguy grassouillet, passionné par les crabes. On est d'abord tenté de le prendre pour un gentil crétin, mais il va nous surprendre par la suite. Deux autres hommes complètent le tableau. Imogene fait la connaissance de Lee (le nouvel occupant de sa chambre d'ado) dans des circonstances... scabreuses. Un petit conflit va naître aussi à propos de l'utilisation de la salle de bains... Signalons que le type est beau gosse, qu'il chante, danse... et a étudié l'histoire de France à Yale ! Le troisième homme dans la place se fait appeler George Bouche... et dit appartenir à la CIA, comme le confirme indubitablement son mug ! Matt Dillon est génial dans ce rôle improbable, moitié barbouze moitié naze.

   La suite ? Un retour à New York en forme de périple initiatique. Imogene et son frère (épaulés par le charmant occupant de la chambre) partent à la recherche du père qu'ils croyaient mort et (re)découvrent la vie. Imogene finit par réaliser que sa meilleure amie, la plantureuse Dara (June Diane Raphael... mmm) est une peste. (Notons toutefois que, quand elle contrarie son petit copain, celui-ci va ostensiblement se masturber sous la douche !) Il reste à trouver le père, remettre la main sur l'ex-petit copain... et relancer sa carrière.

   Le dénouement est provoqué par une surprenante intrusion dans la maison familiale... qui se conclut de manière acrobatique !

   Bref, ce film ne va pas révolutionner le cinéma mais (en V.O. sous-titrée de préférence) il fait passer un très bon moment !

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lundi, 26 août 2013

Insaisissables

   Gros casting pour ce film à grand spectacle, avec relativement peu de violence. Cela devient rare dans les productions "boum-boum" qui nous viennent de l'autre côté de l'Atlantique (même si le plat est assaisonné d'une pincée de French touch).

   On commence par découvrir les futurs membres du quatuor en action, séparément. J'ai été un peu déçu par la prestation de Jesse Eisenberg (que j'avais trouvé excellent dans The Social Network). Mon préféré est sans conteste Woody Harrelson (déjà très bon dans 7 Psychopathes), en "mentaliste" à grande gueule.

   Une fois l'équipe réunie commence la série de happenings. Le premier fait intervenir une banque française et notre José Garcia. C'est brillamment mis en scène. Les clés de l'illusion nous sont données quelques temps plus tard par le décrypteur d'illusions, incarné par Morgan Freeman (impeccable).

   A partir de ce moment-là, on comprend qu'il y a manipulation dans la manipulation et qu'il faut regarder sur le côté, ou de côté, pour tenter de trouver le fin mot de l'histoire. La magie n'est qu'un prétexte pour un bon vieux polar. Un duo de choc mène l'enquête : un Américain bourru (Mark Ruffalo) et une Française tenace et imaginative (Mélanie Laurent, à qui hélas le scénario n'accorde pas une assez grande place). Le problème est que les éléments clés pour dénouer les fils de l'intrigue sont noyés dans le spectaculaire. Il faut donc un peu phosphorer pour tenter de découvrir qui est le mystérieux "cinquième cavalier" (celui qui a engagé les autres magiciens), et quelles sont ses motivations.

   C'est à la deuxième question que l'on trouve plus facilement la réponse. A plusieurs reprises, il est fait référence à une personne disparue, sur laquelle seuls quelques détails nous sont donnés, de manière éparse. L'un des indices les plus importants nous vient de l'un des magiciens, qui lui-même ne se rend pas compte de ce qu'il a découvert. L'identité du manipulateur en chef est donc extrêmement difficile à trouver.

   Au niveau des images, c'est chouette à regarder, même si j'ai trouvé cela souvent un peu clinquant. Les effets spéciaux sont réussis, tout comme les scènes d'action. Par contre, les dialogues (en version française) ne m'ont pas emballé. Les seuls qui font mouche sont les piques que s'envoient différents personnages. C'est bien chambré mais, à part cela, les autres lignes de texte m'ont semblé maladroites, mal écrites... ou surjouées ? On pourrait aussi relever quelques situations à la limite de l'invraisemblance, mais bon, dans le feu de l'action, ça passe.

   C'est donc un divertissement plaisant, un peu tape-à-l'oeil, mais que l'on peut regarder à plusieurs niveaux.

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samedi, 24 août 2013

Michael Kohlhaas

   Arnaud des Pallières a transposé en France un roman allemand tiré d'une histoire vraie. La transposition géographique tient la route, en raison du choix des lieux de tournage en extérieur : le Vercors et surtout les Cévennes. Certaines scènes lozériennes ne sont pas sans évoquer le Nord Aveyron, avec ces paysages de prairies empierrées balayées par le vent. Cela m'a aussi un peu rappelé l'atmosphère d'une récente adaptation des Hauts de Hurlevent.

   Mais c'est plutôt Les Chants de Mandrin qu'évoque la deuxième partie du film. On suit une bande de rebelles, nombre d'entre eux étant d'origine modeste. On notera l'importance prise par les chevaux. Ce sont des moyens de déplacement fort commodes, mais aussi des outils de travail et des objets de spéculation.

   Le héros, Michael Kohlhaas (Mads Mikkelsen... faut-il dire qu'il est excellent ?), est un éleveur et marchand de chevaux. On sent son amour des bêtes et sa "force tranquille". Dans un monde très inégalitaire et marqué par la violence, il s'est construit un petit paradis. La première partie du film est chargée de nous faire toucher du doigt ce bonheur qu'il va perdre. Le réalisateur alterne le style documentaire, attentif aux détails (vêtements, meubles, outils...) et l'évocation sensuelle. La compagne du héros est évidemment ravissante et très amoureuse de Kohlhaas qui, à plus de 45 balais, se révèle encore fort bien bâti. Ajoutez à cela une coiffure faussement négligée, une barbe légère qui ne change pas, et vous avez une incarnation du mâle mûr qui fera rêver ces dames. A noter aussi la composition de Mélusine Mayance (qui joue la fille). Il faudra suivre cette jeune actrice, déjà remarquée dans Elle s'appelait Sarah et Les Gamins (où elle interprète l'insupportable Mimi Zozo).

   La suite est moins fleur bleue, avec la découverte du comportement de certains membres de la noblesse. Des chevaux et des membres de l'entourage de Kohlhaas vont en souffrir. Le réalisateur réussit à susciter l'horreur et le dégoût en ne laissant à l'écran qu'une partie de l'action, épargnant aux spectateurs les visions les plus violentes, préférant montrer les résultats.

   Le héros décide alors de se lancer dans l'aventure, entre quête du droit et désir de vengeance. Les dialogues sont peu nombreux, mais l'on comprend très bien ce qu'il se passe. Je mettrais un bémol au niveau de l'expression de Mikkelsen : il faut parfois un peu tendre l'oreille pour comprendre ce qu'il dit en français, langue qu'il a dû apprendre pour le tournage.

   L'arrière-plan religieux n'est pas sans importance. Au XVIe siècle, l'Europe est marquée par la naissance du protestantisme. Dans le Saint Empire romain germanique (et jusqu'en Alsace et Lorraine), des révoltes paysannes vont éclater, mêlant revendications sociales et aspirations spirituelles. En France, catholiques et huguenots se sont violemment opposés. Dans le film, on voit le héros lire une Bible traduite en langue vulgaire (ce qui était à l'origine interdit) puis rencontrer un théologien que l'on devine protestant (brillamment incarné par Denis Lavant). Leurs échanges donnent une autre profondeur à l'intrigue.

   La dernière partie du film est assez surprenante, mais finalement logique. Je vous laisse découvrir comment se termine le périple justicier du marchand de chevaux. L'ensemble est fort, suscite beaucoup d'émotions, pour peu qu'on se plonge dans l'ambiance du film.

lundi, 19 août 2013

Elysium

   Au départ, c'est le nom du réalisateur, Neill Blomkamp, qui m'a décidé à aller voir ce film. J'avais adoré District 9 et le scénario du nouveau long métrage m'avait l'air prometteur. Dans les premières séquences, c'est toutefois la qualité de l'image qui m'a impressionné. J'ai encore en tête la scène qui permet aux spectateurs de découvrir la roue solaire. On passe d'une image numérique à des vues tournées sans doute en studio. On ne voit pas la transition entre les deux. La vision aérienne d'un Los Angeles futuriste et ravagé mérite aussi le détour. De manière générale, la réalisation et les décors sont top.

   Le première partie du film est la plus profonde, scénaristiquement parlant. Deux mondes s'opposent : celui des pauvres, souvent malades, habitant une Terre violente et polluée, et celui des riches, réfugiés dans la grande roue, dans l'espace, habitant ce qui ressemble à des gated communities, avec accès privatif à une médecine de pointe.

   Cependant, comme le réalisateur est sud-africain, on peut aussi voir dans cette ségrégation un écho du régime d'Apartheid. La grande majorité des privilégiés sont blancs, alors que la masse qui survit sur Terre est un mélange de Latinos, de Noirs et de Blancs (comme le héros Max, interprété par Matt Damon, à la coupe de cheveux impeccable). On voit très peu d'Asiatiques.

   La description d'un régime policier au service des intérêts d'une minorité de riches est fort bien vue. Elle a des résonances pour le public sud-africain, mais aussi pour les Américains et les habitants de quantité d'autres pays où l'on tente de bâillonner la contestation sociale à coups de matraques. Le propos politique est complété par une évidente dénonciation du refoulement des migrants clandestins, à travers ces Terriens malades que les dirigeants de la station orbitale refusent d'accueillir et de soigner.

   La deuxième phase débute quand Max se fait greffer un exosquelette, dans des conditions que je vous laisse découvrir. C'est le moment que le réalisateur a choisi pour introduire quelques bastons. C'est bien fichu, mention spéciale pour les effets spéciaux : les dégâts subis par les corps sont spectaculaires... et peu ragoûtants ! Max se retrouve confronté à celui qui va être son principal adversaire : un mercenaire beauf et impitoyable, incarné avec talent par Sharlto Copley, une vieille connaissance de District 9.

   L'histoire se complique par la suite. Max veut atteindre la roue pour sauver sa vie. Il pourrait aussi sauver celle de la fille de son ancien grand amour, avec laquelle il ne désespère pas de renouer. Il est de plus chargé d'un boulot pour le compte d'un trafiquant qui peut lui être très utile. S'ajoute à cela un complot interne à l'élite de la station orbitale. On ne s'ennuie donc pas un instant.

   C'est d'ailleurs une limite du film : il ouvre beaucoup de perspectives et ne parvient pas à tout traiter équitablement en 1h50. Du coup, certains aspects de l'histoire apparaissent négligés. Du côté des déceptions, il y a Jodie Foster, une méchante arriviste qui a du mal à se déplacer en chaussures à talons hauts. Un peu mièvres aussi m'ont paru les scènes de jeunesse... sans parler de l'avant-dernière séquence, qui joue inutilement avec nos nerfs.

   Cela reste un très bon divertissement (à voir dans une grande salle), un peu inabouti toutefois.

23:12 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

lundi, 22 juillet 2013

Metro Manila

   Ce polar social navigue quelque part entre La Cité de Dieu et Le Convoyeur (de Nicolas Boukhrief). Il démarre toutefois de manière assez conventionnelle. La première séquence (courte) se conclut par un acte de violence brute, qu'on n'arrive pas à relier à la suite de l'histoire (dans un premier temps). Puis, on découvre combien la vie est difficile pour les petits paysans philippins, condamnés à l'exode rural. Enfin, la capitale Manille nous est présentée comme une jungle impitoyable pour les faibles. C'est bien filmé (quoique trop esthétisant par moment), bien joué, mais un peu démonstratif.

   Le film a commencé à m'emballer quand j'ai vu qu'il jouait avec nos nerfs, faisant se succéder phases d'espoir et de désespoir des deux héros, le couple de paysans, incarnés par des acteurs un peu trop beaux (la femme est particulièrement canon). Installés dans un bidonville, ils ont l'air de toucher le fond : ils manquent de nourriture et l'une des enfants est malade. Puis ils finissent par trouver un travail, chacun de leur côté. Dans les deux cas, ce n'est pas sans danger. Le summum est atteint une nuit, quand, chacun semble s'avilir dans son nouveau boulot, source pourtant d'indépendance financière.

   Ainsi, on suit Oscar et la bande des convoyeurs de fonds, ainsi que son compagnonnage avec celui qui l'a introduit dans la boîte. De son côté, Mai fait l'expérience du monde de la nuit. Peut-on sortir de la pauvreté tout en restant honnête ? C'est l'une des questions centrales du film.

   La dernière partie voit l'histoire basculer trois fois. Les aventures de certains convoyeurs rejoignent l'histoire d'un jeune homme qui est lié à la première séquence. C'est toujours aussi bien filmé et joué... et la pirouette scénaristique de la fin est la bienvenue. Cela reste néanmoins un film très noir.

23:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 21 juillet 2013

Aya de Yopougon

   Ce film d'animation de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie est l'adaptation des deux premiers tomes de leur bande dessinée. L'intrigue se déroule en Côte d'Ivoire, principalement à Abidjan (et Yamoussoukrou), à l'époque de Félix Houphouët-Boigny, au tournant des années 1970-1980. Quelques scènes d'époque sont d'ailleurs montrées à l'écran, lorsque les héros regardent la télévision :

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   L'ambiance est colorée, les dialogues très bien écrits. Certaines demoiselles savent comment remettre à leur place les mecs trop entreprenants ! Attention cependant : il faut parfois tendre l'oreille. Une fois que l'on est habitué à la prononciation, tout va bien. La musique est gaie, entraînante. Elle fait d'ailleurs partie de l'histoire, puisque l'endroit à la mode, où tous ceux qui ont un peu d'argent à dépenser se rendent pour se détendre, est un "maquis", sorte de boîte de nuit en plein air. On n'y fait pas que danser...

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   L'accent est mis sur les femmes, notamment les trois jeunes adultes :

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   A gauche, on peut voir Adjoua, la plus timide... mais à qui il arrive des aventures. Au centre se trouve Aya, à la beauté aussi entière que le caractère. Sérieuse et bonne élève, elle voudrait échapper au schéma traditionnel qui la condamnerait à tout abandonner pour suivre un époux. La troisième, Bintou, ne pense qu'à courir les mecs, croyant que c'est la bonne méthode pour "choper" le mari idéal.

   Les autres femmes sont au second plan. Ce sont les mères, les maîtresses, les soeurs, les cousines. En général, elles sont dotées d'un caractère bien trempé !

   Par contre, du côté des mecs, il n'y en a pas un pour rattraper l'autre. Le plus gentil est un simple d'esprit, amoureux d'Aya, que celle-ci va aider à se prendre en main... sans céder à ses avances. L'héroïne croise d'autres mecs, plus délurés qu'Hervé, mais moins sympathiques. A gauche sur la seconde image, on peut voir le fils à papa, une vraie tête à claques, constamment ridiculisé dans le film. Tout à droite se trouve Mamadou, un beau gosse pas fiable pour deux sous.

   On pourrait aussi parler des pères, autoritaires, alcooliques, infidèles... Bref, la gent masculine en prend pour son grade !

   C'est donc une comédie, mais qui dit des choses sérieuses. Il y est question d'inégalités sociales, de corruption, mais surtout des relations hommes/femmes, véritable coeur de l'histoire.

22:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 16 juillet 2013

Hijacking

   Ce film danois polyglotte évoque la piraterie en mer, avec l'exemple d'un cargo dont s'empare une troupe de Somaliens. Il alterne deux types de scènes, celles qui décrivent la vie sur le bateau et celles qui montrent le siège de l'entreprise danoise et l'action de son PDG (incarné à la perfection par Soren Malling).

   Le début est faussement anodin. Sur le navire, on découvre les personnages du cuistot, du mécano et du capitaine. Ils naviguent vers Bombay. La mission est en voie d'achèvement. Ils communiquent à distance avec les proches restés au Danemark. Là-bas, on nous plonge dans une négociation délicate avec des Japonais. Le PDG danois est habile à la manœuvre. Comme ses costumes, il est impeccable, rigoureux et semble invulnérable. Sûr de lui et conscient de ses responsabilités, il décide de mener la négociation quand il apprend la prise d'otages.

   Le réalisateur nous a épargné l'assaut... mais ce qui se passe hors-champ est souvent inquiétant. Que signifient ces coups de feu ? Que sont devenus les autres membres de l'équipage ? Si chaque moitié des personnages ignore ce que vit l'autre, le spectateur n'est pas omniscient pour autant. On remarque aussi qu'au fur et à mesure que l'on avance dans l'intrigue, les allers-retours entre les deux scènes se font moins nombreux, ce qui nous laisse parfois dans l'expectative. (Bien joué, le montage !)

   La réalisation montre le renversement. Les Occidentaux sont devenus les proies des Africains... et le patron négociateur joue une partie plus difficile qu'avec les industriels japonais. Chacun, de son côté, veut faire plier l'autre. Il faut donc se méfier un peu de ce que l'on voit à l'écran, surtout du côté somalien. La prise d'otages elle-même est une mise en scène. Pour que les pirates parviennent à leurs fins, il faut qu'ils arrivent à manipuler leurs interlocuteurs danois. En Europe, la direction elle essaie de s'en tirer à moindre frais... et oriente les négociations en conséquence, avec l'aide d'un spécialiste de la gestion de crise. S'ajoutent à cela les relations avec les familles des hommes capturés, d'autant plus délicates qu'il faut choisir ce qu'on leur dit ainsi que la manière de le dire. Toutes ces scènes se déroulent en vase clos, dans des bureaux du siège de l'entreprise, et pourtant, c'est palpitant. Putain de scénario !

   Sur le bateau, on constate qu'à la pénibilité physique s'ajoute le risque d'affaiblissement moral. De leur côté, les pirates semblent imprévisibles. Comme tous sauf un (le traducteur-négociateur, un personnage assez mystérieux) ne parlent que leur langue et que leurs propos ne sont pas sous-titrés, nous sommes placés au même niveau de compréhension que les otages.

   Jusqu'au bout, l'histoire ménage des surprises. A plusieurs reprises, la tension se relâche pour tout à coup augmenter à nouveau. Souvent, c'est voulu... mais pas toujours.

   C'est incontestablement le film coup-de-poing de ce début d'été.

22:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

Moi, moche et méchant (le DVD)

   Séance de rattrapage, ce soir. Emballé par le deuxième volet des aventures de Gru et de sa petite famille, j'ai voulu voir ce que donnait le premier film. Comme le suivant, je l'ai visionné en version française.

   Le début présente les deux univers qui vont se télescoper : l'orphelinat (avec les trois gamines) et les méchants (dont le héros). Cela démarre par une séquence qui tourne en dérision les touristes américains (avec un gag inattendu, celui de la pyramide) :

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   On découvre ensuite les deux vilains qui vont s'affronter. Le héros, Grut, aime bien commettre de mauvaises actions au quotidien. Il resquille scandaleusement dans un commerce, fait pleurer les petits garçons et a un tempérament manipulateur :

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   On comprend néanmoins assez vite qu'il n'est pas le méchant absolu... et qu'il a lui-même beaucoup souffert, notamment à cause de sa mère, qui continue d'ailleurs à lui pourrir la vie. (Celle-ci, absente du deuxième volet, devrait faire sa réapparition dans le prochain film : ce personnage de vieille bique atrabilaire possède un réel potentiel comique.)

   Sur son chemin, il va trouver un nouveau super-délinquant, Victor/Vector, un jeune con qui croit tout savoir... et qui réussit, dans un premier temps, à lui niquer sa race :

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   Mais le vrai méchant de l'histoire est celui qui finance ces deux derniers, celui qui tire les ficelles : le banquier :

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   C'est en cela que Moi, moche et méchant est un film de son époque (2010). Avant 2008, on n'aurait sans doute jamais osé autant dénigrer cette profession dans un film grand public.

   Cet univers cruel va entrer en contact avec des orphelines, pas très bien traitées dans l'institution qui les héberge. Elles vont être adoptées par Gru, qui veut les utiliser contre Victor.

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   Évidemment, l'arrivée des trois donzelles, aux caractères très différents, ne va pas sans perturber la vie bien rangée de Gru. C'est la source de nombreux gags. Notons que les Minions vont vite s'attacher aux nouvelles... et réciproquement. La séquence qui voit Gru basculer est celle de la fête foraine. Au moment où il songe à se débarrasser de l'encombrante marmaille, il va définitivement s'attacher à elle.

   La suite ? Une série d'aventures débridées, à la recherche d'un fusil qui fait rapetisser puis à la conquête de la Lune. Mais c'est autour d'un spectacle de danse que l'intrigue va se dénouer.

   Sur le DVD, parmi les bonus, on trouve trois petits films très drôles, dont les héros sont les Minions (que l'on voit moins dans le premier film que dans le deuxième, sorti cet été).

   Changement de look montre l'armée de petits bonshommes jaunes aider les gamines à préparer la visite des services sociaux, qui cherchent à savoir si un père célibataire est bien apte à s'occuper de trois jeunes filles :

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   Le Jour de l'orientation aborde la formation de Minions ouvriers spécialisés. Cela se moque gentiment des vieux films d'entreprise :

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   Enfin, Banane, est une variation délirante sur la gourmandise des Minions, où l'on sent l'influence (entre autres) de Tex Avery et des Monthy Python :

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   Je pense que ces Minions sont en train de suivre la même voie que le Scrat de L'Age de glace, qui est passé du statut de pittoresque personnage secondaire au début à celui d'élément essentiel à l'intrigue dans les films suivants.

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samedi, 13 juillet 2013

Moi, moche et méchant 2

   Je n'ai pas (encore) vu le numéro 1, mais j'ai été attiré par les petits personnages jaunes, le bouche-à-oreille (très positif) faisant le reste.

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   Cela démarre tambour-battant par trois séquences très différentes. La première se déroule au pôle Nord. Elle introduit le (vrai) méchant, qui avance masqué. Notons qu'elle contient un petit clin d’œil scatologique, sorte de marque de fabrique de cette animation qui, tout en suivant un schéma très conventionnel, se permet de temps à autre de franchir la ligne rouge.

   La deuxième séquence se déroule chez le héros. Il est question de fêter l'anniversaire de la plus jeune des trois filles qu'il a adoptées. Au départ, tout a l'air "normal"... mais n'oublions pas que le personnel de service est composé de bonshommes jaunes, puérils et farceurs. Observez bien les jeux auxquels les enfants s'adonnent, pendant que les parents, en toute confiance, tournent le dos.

   C'est aussi le moment où les questions existentielles émergent. L'une des filles voudrait avoir une maman et l'une des adultes présentes à la fête s'est mise en tête de caser Gru, le papa au grand nez. Tout cela passe au second plan quand il s'avère que la fée a du retard. Le père va trouver une solution des plus originales... et assez acrobatique. Sans trop dévoiler le gag, je peux quand même dire qu'à un moment, j'ai pensé à Marine Le Pen...

   La troisième séquence met le héros en contact avec Lucy Wild, un agent très très spécial, qui se déplace dans une voiture modulable. C'est extrêmement drôle, avec des références à James Bond... sauf qu'ici c'est la dame qui utilise les gadgets. Dans la version française, Lucy a la voix d'Audrey Lamy... un excellent choix, tant elle colle bien au personnage.

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   Ainsi démarrée, l'histoire est sur de bons rails. D'autres séquences marquantes vont venir, comme un tableau de la machinerie installée au sous-sol de la maison de Gru. Les "Minions" (les petits bonshommes jaunes à un ou deux yeux) vont saluer dignement le départ du professeur qui travaillait pour Gru... avec des fusils à pet ! (Et encore, je ne vous raconte pas le gag qui ponctue ce moment d'anthologie : sachez qu'il est question d'une détonation supplémentaire...)

   Après cela, on est embringué dans une histoire d'espionnage, où les références à James Bond sont mâtinées d'un peu de Gremlins et de Critters. Même si les gags ne sont pas aussi explosifs qu'au début, cela reste très divertissant.

   Le rythme remonte dans les séquences terminales, avec notamment la guérison des "Minions", spectaculaire et drôle. Tout se termine en chansons, avec d'abord une séquence romantique, bercée par une (excellentissime) parodie de boys band par les Minions... avant qu'une nouvelle teuf ne démarre, au son des Village People !

   Bref, c'est drôle et bien foutu... et plutôt pour les grands enfants que pour les petits.

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vendredi, 12 juillet 2013

Ma meilleure amie, sa soeur et moi

   Sur le thème "Un garçon, deux filles... combien de possibilités ?", Lynn Shelton s'exerce à la comédie romantique, avec pour cadre le Nord-Ouest des Etats-Unis : la ville de Seattle et une île des environs.

   La première séquence nous met en contact avec un groupe de trentenaires, blancs, appartenant à la classe moyenne et réunis autour de quelques bonnes boissons, notamment du vin rouge. On est en plein cliché... sauf que cette petite réunion commémore la première année de la disparition de l'un des membres du groupe, Tom, peut-être le plus brillant de la bande.

   Très vite, l'ironie prend le dessus, avec le discours à rebours du frère du défunt, un peu bourré. Voici Jack, le héros, intelligent, beau parleur, mais coiffé comme un dessous de bras, au chômage, de surcroît légèrement bedonnant. Il s'éclipse, à la fois honteux et très content d'avoir plombé l'ambiance. Sa meilleure amie va essayer d'arranger les choses. Voilà Iris, femme indépendante, compréhensive et bourrée de charme. Accessoirement, c'est l'ex-petite copine du défunt. Emily Blunt (remarquée dans Looper et, il y a quelques années, dans un épisode de la série Hercule Poirot) rayonne dans ce rôle de femme hypersensible, d'une (grande) beauté faussement ordinaire.

   La scène qui voit la meilleure amie tenter de ramener Jack à de meilleures pensées est un délice d'humour et de complicité. A la différence de la précédente, très écrite (deux discours antagonistes se répondaient), celle-ci est en partie improvisée. On le sent particulièrement bien quand Mark Duplass (Jack) ne peut s'empêcher de lâcher un petit rot qui semble avoir surpris sa partenaire Emily Blunt. Mais cela passe très bien dans le dialogue... puisque je vous le dis !

   Comme Jack déprime, Iris, dont la famille est pétée de thunes, lui propose d'aller méditer dans la propriété paternelle, située sur une île. Au passage, elle lui suggère de s'y rendre en vélo. Jack, qui continue à s'empiffrer de confiseries industrielles, ne semble pas avoir compris le message subliminal de la dame : profite de l'occasion pour faire disparaître tes bourrelets disgracieux ! (On ne va d'ailleurs pas tarder à les voir à l'écran.)

   Sur place, le héros tombe sur la frangine lesbienne de sa meilleure amie, en pleine quête existentielle après la fin d'une grande histoire d'amour. Je vous présente donc le dernier membre du trio : Hannah, incarnée avec subtilité par Rosemarie DeWitt (vue récemment dans Promised Land). C'est le soir, les deux se connaissent sans s'être jamais rencontrés... Ils se découvrent donc autour d'une bonne bouteille de tequila. Arrive ce qui devait arriver : ils baisent. Je recommande la scène de coucherie, au cours de laquelle le héros n'est vraiment pas à son avantage.

   Le problème est que la frangine et meilleure amie débarque à l'improviste le lendemain. Elle est ravie de retrouver sa soeur, perdue de vue depuis un petit moment, mais un peu désappointée tout de même. La suite nous réserve de beaux moments de marivaudage, quelques jolies scènes de dialogue au lit (entre les deux soeurs)... et un changement de ton, au bout d'1h10 environ. L'histoire devient plus sérieuse, tourne au mélo. Là, franchement, j'ai moins accroché. Mais cela reste une très bonne comédie... avec une Emily Blunt à croquer, rien que pour nous, les mecs !

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jeudi, 11 juillet 2013

Le Roi et l'oiseau

   J'avais gardé de ce dessin animé "de qualité française" (signé Paul Grimault et Jacques Prévert) un souvenir lointain, agréable. Sa ressortie en salles, après restauration, m'a donné l'occasion de le voir sur grand écran. L'histoire nous est présentée par l'un des personnages principaux, une sorte de grand toucan endimanché, gouailleur et courageux :

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   Son ennemi est le monarque qui vit dans le château visible à l'arrière-plan. A travers ce personnage, les auteurs ridiculisent la monarchie absolue et les régimes totalitaires du XXe siècle. Sur le fond, ils montrent l'obéissance obséquieuse et craintive des sous-fifres, l'omniprésence de la police ainsi que le culte de la personnalité qui entoure le souverain (aussi odieux que maladroit au tir). Sur la forme, on rit du trône tout-terrain, de l'aspect physique du tyran ainsi que de sa démarche.

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   Cette histoire est aussi un conte. Le château est donc un élément important de la mise en scène, avec ses ascenseurs qui n'en finissent pas, ses pièces secrètes, ses trappes et ses oubliettes où attendent, affamés, des lions mélomanes.

   Un grand soin a été porté à l'animation des personnages, en particulier des animaux. J'ai beaucoup aimé le chiot du tyran, très souple dans ses mouvements... et beaucoup plus affectueux que son maître. Les oisillons sont aussi très réussis. Par contre, au niveau des félins, on note quelques maladresses. Il faut dire qu'en trente ans, la technique a fait de sacrés progrès. D'autres moments, parfois brefs, m'ont marqué, comme celui qui voit un morceau de muraille s'animer, révélant un policier camouflé !

   Une histoire d'amour (un peu nunuche) est au coeur de l'intrigue : un ramoneur et une bergère vont devoir surmonter bien des difficultés pour vaincre la jalousie et le désir de domination du roi.

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   Cette intrigue se drape dans le merveilleux : les deux amoureux sont issus de tableaux voisins, dont ils s'échappent, tout comme le roi, qui évince son modèle et prend le contrôle du royaume ! Les auteurs donnent aussi un aperçu du peuple miséreux qui vit sous la férule du tyran.

   Toutefois, c'est davantage la dénonciation d'une forme de modernisme qui perce dans l'histoire. La technologie a asservi les ouvriers, qui travaillent à produire des représentations du tyran (scène hilarante avec les tableaux, lorsque deux prisonniers décident de "se lâcher"). L'invention la plus extraordinaire, le robot géant, est un outil de domination... et de destruction.

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   Le salut vient de l'imagination, de l'inventivité, de l'art. Il est beaucoup question de peinture dans ce film, celle-ci étant cependant montrée comme trop soumise aux desiderata des puissants. La sculpture est abordée à travers un joli personnage de cavalier, dans une séquence qui baigne dans le merveilleux. La musique est davantage présente, en guise d'accompagnement mais aussi comme élément scénaristique. Elle sauve la vie des héros dans des circonstances que je vous laisse découvrir.

   J'ai finalement beaucoup aimé cette réédition, d'une qualité visuelle plus grande que ce à quoi je m'attendais.

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lundi, 08 juillet 2013

Les Stagiaires

   Le duo Vince Vaughn / Owen Wilson est de retour, dans une comédie a priori taillée sur mesure pour l'équipe de choc de Serial noceurs (avec Vaughn en producteur et scénariste). La première séquence démarre moyennement, mais elle contient un gag politiquement très incorrect : il est question de la fille d'un client, à propos de laquelle celui-ci ne tarit pas d'éloges. On finit par découvrir que c'est un petit boudin obèse... et noir. Ce n'est pas très gentil, mais j'ai bien ri quand même !

   Le problème est que la suite est nettement moins drôle. Que ce soit le licenciement du duo de vendeurs, la séparation de Billy (Vaughn) avec sa femme (une scène particulièrement mauvaise), la candidature des deux chômeurs (séquence de web-cam très médiocre) ou encore leurs débuts au "Googleplex", tout sonne faux. Les dialogues sont mal écrits, les acteurs maladroits, malgré l'abattage dont certains font preuve.

   Et puis... il y a cette épreuve de quidditch (eh oui, les "guiques" sont des enfants d'Harry Potter), qui voit un retournement survenir. De manière très américaine, les losers du débuts commencent à muer en winners. Plus prosaïquement, l'un des héros demande à son ami, son quasi-frère, de lui passer de la glace sur les parties génitales...

   La deuxième séquence marquante est la soirée dans une boîte "chaude" à la mode, où l'équipe de bras cassés va retremper son moral. On s'y alcoolise, on s'y décoince, on s'y fait des confidences... et l'on s'y bagarre. Tout cela est bien rythmé. On y trouve néanmoins la confirmation que c'est un film de mecs. Les femmes entrevues dans cet antre sont toutes des bombasses pas farouches pour deux sous, de surcroît plus légèrement vêtues que les intellos canons du Googleplex. Il se trouve toujours au moins un joli minois pour kiffer grave l'un des héros. C'est lors de cette soirée que l'un d'entre eux fait l'expérience de l'éjaculation précoce plurielle...

   Mais, que voulez-vous, il faut bien attirer le public dans la salle... D'ailleurs , y avait que des djeunses à ma séance... à part moi, bien sûr, présent pour encourager les deux quadras sur le retour. Notons que certains des seconds rôles "googliens" sont très réussis : la manager Dana (sur laquelle Nick/Owen a flashé) et le directeur du recrutement Chetty.

   La seconde moitié du film fait l'éloge du travail d'équipe. Les individus qui la composent ne sont pas les plus brillants de ceux qui concourent pour être embauchés par le nouveau Big Brother américain, mais, ensemble, ils arrivent à être plus efficaces que les autres. N'oublions cependant pas qu'au bout du bout, il est question de commerce, c'est-à-dire de pognon : la nouvelle économie comme l'ancienne cherche les meilleurs moyens de ramasser la thune.

   J'ai aussi bien aimé la séquence du dîner, qui se veut atypique (avec un petit côté Quatre Mariages et un enterrement).

   Vous ne serez pas étonnés d'apprendre que la fin est attendue, consensuelle. C'est donc un divertissement (juste) acceptable, à condition d'être (très) indulgent pour le début.

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samedi, 06 juillet 2013

Le Congrès

   C'est le nouveau film d'Ari Folman, cinéaste israélien révélé au grand public par Valse avec Bachir. Le long-métrage dont il va être question mêle les scènes avec des acteurs réels à d'autres, animées (le procédé de rotoscopie a été utilisé, comme par exemple dans A Scanner darkly et Aloïs Nebel).

   La première partie fait intervenir les acteurs réels, principalement Robin Wright et Harvey Keitel. Il faut passer outre les deux premières scènes du film, mal jouées, mal dirigées. La première voit Keitel faire la leçon à une actrice sur le retour (Robin Wright, censée interpréter son propre rôle). Curieusement, dans sa filmographie, il n'est pas fait mention de la série qui l'a rendue célèbre, Santa Barbara... La deuxième scène tourne autour du fils handicapé. Elle est aussi maladroite, un peu exagérée.

   Ce n'est qu'ensuite que le film démarre vraiment. La conversation entre la mère et ses deux enfants est bien rythmée et l'enchaînement d'événements qui va mener l'héroïne à accepter un drôle de contrat se suit sans déplaisir. La scène-clé est bien évidemment celle qui voit l'actrice jouer son dernier rôle, pour le scanneur qui va l'enregistrer pour l'éternité...

   La seconde partie du film est presque entièrement sous la forme animée. On fait un bond de 20 ans. Tout semble aller mieux pour l'ex-actrice, dont l'avatar numérique est devenu célèbre, alors qu'elle coule des jours plus paisibles avec son fils, dont la santé est néanmoins toujours chancelante. Elle se rend à un congrès futuriste, où rien ne va se passer comme prévu. Je vous en laisse découvrir les péripéties, entre frustration artistique, argent-roi, tentation dictatoriale et révolution.

   Après une nouvelle ellipse, on retrouve l'héroïne sortant d'une cryogénisation de 20 ans. Elle cherche à comprendre et surtout à retrouver son fils. L'intrigue bascule parce que le monde a changé. On tombe en pleine science-fiction : l'humanité est divisée en deux groupes. La majorité préfère vivre dans l'illusion créée par la consommation d'une drogue, pendant que l'autre partie de la population, plus lucide, vit à l'écart mais n'est pas forcément plus heureuse. Cela reste toutefois l'histoire d'une mère, même si le tableau de l'humanité que l'on nous dresse (pendant le moment où l'animation s'efface) est assez apocalyptique.

   On a souvent présenté ce film comme une réflexion sur le cinéma mais, dans sa seconde partie, il traite plutôt de la société en général, de son goût pour les drogues et le virtuel, tendances dans lesquelles il voit une menace pour notre monde.

   Malgré quelques longueurs et maladresses, cela reste un film très original, tant sur la forme que sur le fond.

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vendredi, 05 juillet 2013

Man of Steel

   Ce reboot de la saga Superman commence par une séquence se déroulant sur la planète Krypton. De l'avis de beaucoup de spectateurs comme du mien, c'est le meilleur moment du film. L'ambiance y est plutôt heroic fantasy. Cela fait aussi un peu penser au Prometheus de Ridley Scott (dans ce qu'il avait de bon). On pourrait donc regretter que ce premier film n'ait pas été un prequel. Il y a avait de la matière et les acteurs sont assez bons, en particulier Russel Crowe que, par la magie d'une technologie très évoluée, on revoit à plusieurs reprises, plus tard dans l'histoire. Ses apparitions sont l'une des rares sources d'humour de ce pensum de 2h25.

   Cela se gâte à partir du moment où l'action se déroule sur Terre. Fort heureusement, le scénario n'est pas strictement linéaire. Ainsi, on voit d'abord Clark Kent en jeune adulte, avant de le redécouvrir enfant, à plusieurs occasions. Le montage, habile, fait se succéder des scènes qui se répondent ou se complètent. Pour faire monter la sauce, on a fait appel à une pléiade d'acteurs confirmés. A ce jeu-là, le petit Superman gagne le gros lot, avec deux papas qui déchirent : Russel Crowe sur Krypton et Kevin Costner sur Terre. Avec une telle ascendance, le garçon ne pouvait que bien tourner !

   Pour les seconds rôles, on a puisé dans les séries télévisées : Les Experts (Laurence Fishburne, qui a fait ses preuves ailleurs), New York - Unité spéciale pour les victimes (Christopher Meloni, encore dans un rôle "viril"), Criminal Minds : Suspect Behavior (Michael Kelly) et A la Maison Blanche (Richard Schiff, vu aussi ailleurs).

   Dans ce monde de mecs très musclés et très burnés, les femmes sont assez effacées. Du côté des "gentils", seule Amy Adams (vue récemment dans The Master) a un rôle un peu tonique... mais pas trop. Du côté des méchants, les amateurs de femme en cuir apprécieront le jeu d'Antje Traue, qui a un petit air de Noomi Rapace. A plusieurs reprises, on la voit ridiculiser des militaires un peu trop fiers de leurs pénis de substitution.

   Parce que figurez-vous que ce n'est pas un film va-t-en-guerre. Papa Kent (Kevin, donc) a tenté d'inculquer la non-violence et la responsabilité à son fils adoptif. Les militaristes sont tournés en dérision dès le début de l'histoire terrestre, lorsque Loïs Lane apostrophe des officiers (il est question de longueur...), dans le grand nord canadien. Le scénario penche visiblement pour l'humanisme contre les partisans des solutions radicales.

   Cependant, à l'écran, lorsque l'action se déroule en pleine ville, on ne voit pas souvent le héros se préoccuper des dégâts collatéraux. De surcroît, les militaires n'ont pas hésité une seconde à utiliser des armes de guerre au coeur de New York Metropolis (dont certains plans font écho au 11 septembre 2001). Cela fait partie des quelques incohérences du film. Si l'on est pris dans le feu de l'action, cela passe. Si l'on est moins captivé, on peut trouver que, vu le pognon mis dans les effets spéciaux (et la longueur des crédits au générique de fin), on aurait pu fignoler un peu plus le scénar.

   Reste la chorégraphie des bastons. La première séquence s'apparente à du jeu vidéo, avec des méchants encarapaçonnés et bondissants. Et va-z-y que je te flanque un gros pain qui te fait traverser cinq immeubles d'un coup ! La seconde séquence voit le méchant faire mu-muse avec la cape de Superman... qui finit par le tuer, non mais. Faut pas jouer avec les affaires des autres !

   Malgré d'indéniables qualités, ces scènes d'action n'arrivent pas au niveau de ce que l'on peut voir dans Avengers. Le film n'en est pas moins un divertissement tout à fait regardable.

   P.S.

   Les spectateurs attentifs auront remarqué qu'au cours d'une scène de combat, un véhicule au nom d'une certaine entreprise a été projeté. Ce clin d'oeil semble annoncer l'arrivée d'un nouveau méchant...

00:31 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 04 juillet 2013

Le Joli Mai

   Ce documentaire de Chris Marker (et Pierre Lhomme) a droit à une seconde vie, 50 ans après sa sortie. D'après le dossier de presse disponible sur le site du distributeur Potemkine, au moment de sa restauration, le film a été remonté selon les souhaits du réalisateur. Cela donne une oeuvre étonnante, de près de 2h20, consacrée aux Parisiens croisés en mai 1962.

   Cela commence fort, avec un vendeur-repasseur de costumes grande gueule, qui ne pense qu'au pognon et se plaint de sa femme :

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   A l'image de presque toutes les autres personnes montrées à l'écran, il se montre très réservé dès qu'il est question de l'actualité immédiate, en particulier de la guerre d'Algérie. Le plus étonnant est que, lorsqu'il évoque la possibilité de faire sauter ses contraventions, il mentionne les noms de deux politiques situées aux extrêmes, le communiste Maurice Thorez et l'ex-poujadiste Jean-Marie Le Pen (eh oui, déjà !).

   Ensuite, on rencontre un cafetier, qui a pas mal bourlingué, mais c'est la séquence tournée place de la Bourse qui m'a le plus marqué. Marker commence par interroger deux adolescents en costume, avant d'être interrompu par un courtier moustachu qui semble jaloux qu'on ne donne pas la parole aux adultes. Suit un début de conversation entre des vieux routiers de la finance, qui font le lien entre la récente nomination de Georges Pompidou au poste de Premier ministre et la banque Rothschild.

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   Et voilà qu'on nous présente des inventeurs. L'innovation est déjà au coeur de l'époque. Il est notamment question d'automobile, avec un intervenant fier d'avoir créé une sorte de stabilisateur... démonstration à la clé, sur un circuit, caméra à bord ! On notera le souci du détail du caméraman, qui, alors que s'exprime l'inventeur, détourne l'objectif de son visage pour suivre les pérégrinations d'une araignée sur son costume !

   Petit à petit, on se rend compte que le travail de montage (images et son) a dû être considérable. On en a encore la preuve avec la séquence des amoureux, tout timides et tout gentils, sur les mains desquels la caméra s'attarde. Mais, au final, ils semblent enfermés dans leur bulle, un peu égoïstes peut-être.

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   Ah, oui, j'oubliais : entre les entretiens, on peut entendre des textes dits par Yves Montand, dont une chanson nous est proposée à l'entracte. La musique d'accompagnement du film est de Maurice Legrand.

   Le couple d'amoureux nous est rpésenté en alternance avec une séquence de mariage, où les adultes mûrs se défoulent un max, pendant que les jeunes époux semblent un peu engoncés (surtout la mariée). On voit notamment une honorable mère de famille s'enfiler du champagne au goulot et ensuite montrer à quel point elle kiffe la life !

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   Plus conceptuelle est la conversation avec deux ingénieurs, qui voient loin en terme d'organisation du travail. Cependant, ceux-ci ne se rendent pas compte que, si l'on peut réaliser les mêmes tâches plus rapidement, ce n'est pas forcément du temps de loisir que vont gagner les salariés, mais aussi du chômage... Cette séquence est émaillée de clins d'oeil, avec des gros plans de chats, animaux que Chris Marker aimait tout particulièrement.

   D'autres bestioles apparaissent à l'écran, comme les colombes prisées par la bourgeoisie. Mais c'est à une chouette que le caméraman s'intéresse tout particulièrement. Dans une scène étonnante, on voit l'un de ces rapaces se laisser tendrement caresser, comme le ferait un chat... saisissant !

   L'une des séquences d'intérieur fait intervenir des jeunes femmes de la "bonne société". A l'image d'autres intervenantes, elles tiennent des propos qui ont de quoi faire bondir les moins ardentes des féministes. Si l'on ajoute à cela la répartition sexuelle des rôles qui est visible à différentes occasion, on réalise à quel point la France était à l'époque un pays patriarcal.

    A l'occasion, on est aussi étonné par certains personnages, comme cette costumière agoraphobe, qui vit repliée sur elle, dans son appartement, en compagnie de son chat qu'elle habille comme une poupée :

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   A l'autre bout de la société, les pauvres vivent parfois dans des conditions insalubres. Je crois avoir entendu, dans le commentaire du début, qu'environ 20 % des logements n'avaient pas d'électricité et 12 % d'eau courante... De véritables bidonvilles existent, plutôt en banlieue il est vrai. Pour y remédier, on construit de grands ensembles.

   Un autre portrait marquant est celui du garagiste peintre. On sent chez lui l'influence du surréalisme, du cubisme et d'un artiste comme Fernand Léger, même s'il affirme ne s'inspirer de personne. Je trouve qu'il parle assez bien de ses toiles. Mais la vision en noir et blanc ne leur rend pas honneur.

   Et puisque les passants rencontrés dans la rue ne veulent pas trop parler politique, Chris Marker a suscité des entretiens qui donnent la parole à des personnes que l'on n'entend jamais en France à l'époque.

   L'un d'entre eux est présenté comme étant un Dahoméen (on dirait aujourd'hui un Béninois), avec ses initiales. Il est beau gosse et s'exprime très bien en français :

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   Ayant connu l'Afrique Occidentale Française et différentes régions de métropole, il compare le comportement des Français qu'il a rencontrés, les pires étant pour lui les coloniaux. Il raconte sa surprise devant les "Français moyens" qui peuplent la métropole... et sa rage devant la version de l'histoire qui est enseignée. Il ne semble toutefois pas habité par la rancoeur.

   Tout aussi passionnante est la séquence avec un jeune Franco-algérien. (N'oublions pas que les Accords d'Evian ont été signés en mars 1962.) Là encore on nous propose un "bon client" : un type intelligent, calme, qui présente bien :

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   Cet entretien est passionnant à deux niveaux. Il montre le conflit qui peut naître, au sein d'une usine, quand un ouvrier "français de souche" jalouse le "basané" qui a plus de qualification que lui... mais qui finit par partir. Ensuite, le jeune homme raconte une histoire bien pire, qui l'a placé sous la poigne d'agents de la DST. A cette occasion, on a un aperçu des baraquements précaires dans lesquels loge la population immigrée.

   Notons que les seules images qui n'ont pas été tournées en mai 1962 évoquent les événements de Charonne et la seconde manifestation qui a suivi.

   Histoire d'alléger un peu l'ambiance, Marker nous offre aussi de "belles images" de la capitale, quelques-unes prises de nuit. Cela ne l'empêche pas de conclure par une séquence moins joyeuse, consacrée aux prisons :

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   Voilà. Au départ, vu la longueur du film, j'étais un peu réticent à aller le voir. Mais c'est finalement un documentaire de grande qualité, tant au niveau des images que sur le fond. C'est foisonnant, parfois drôle, parfois terrible.

   P.S.

   La ressortie de ce film donne à l'aspect climatique une profondeur inattendue. En effet, mai 1962 fut un mois pourri, avec une température moyenne de 12,5 °C et un faible ensoleillement.

mardi, 02 juillet 2013

L'Attentat

   Cette adaptation du roman de Yasmina Khadra mêle petite et grande histoire, celle d'un couple que l'on croyait fusionnel et celle du conflit israélo-palestinien. L'intrigue tourne autour de deux Arabes israéliens (communauté déjà mise à l'écran dans le récent Héritage), le chirurgien bien intégré à la société de Tel Aviv et sa ravissante épouse, un modèle de femme moderne. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si celle-ci ne disparaissait pas le jour d'un attentat-suicide aux conséquences duquel le chirurgien est confronté.

   Le tableau du début est bien léché, quasi idyllique. Seul un coup de fil à peine entamé introduit un peu de dysharmonie. L'arrière-plan de cet appel nous est expliqué en fin de film... et donne une profondeur supplémentaire à son intrigue.

   La suite nous montre le mari à la recherche de la vérité, alors que l'enquête de police piétine. Lui l'Arabe intégré se retrouve confronté à l'intolérance de certains Israéliens... et il découvre petit à petit le fanatisme de certains Palestiniens. La violence de leurs revendications et les difficultés de leur vie quotidienne (notamment à Naplouse) contrastent avec le mode de vie luxueux et la modération dont le chirurgien Amine fait preuve. Signalons la performance de l'interprète Ali Suliman (déjà vu dans Le Royaume, Zaytoun et surtout Paradise Now) ainsi que celle de sa partenaire, l'Israélienne Reymonde Ansellem, que les habitués des films du Proche-Orient ont remarquée dans Lebanon et surtout 7 minutes au paradis.

   Ce personnage nous est principalement présenté par des retours en arrière, très bien conçus et insérés dans l'intrigue. On découvre petit à petit une histoire que l'on ignorait, celle de l'indignation d'une femme libre (qui n'est pas sans rappeler, par certains aspects, l'héroïne d'Inch'Allah).

   Au final, on prend une sacrée claque dans la figure. De surcroît, le film a l'intelligence de ne pas tenter de répondre à toutes les questions. Il me semble toutefois plutôt pessimiste sur le conflit proche-oriental.

samedi, 22 juin 2013

People Mountain People Sea

   Ce film chinois (primé à Venise en 2011... pas facile d'obtenir un bon créneau de sortie quand 80 % des écrans sont occupés par une minorité de bouses) s'inspire d'un fait divers survenu en 2008. Un jeune coursier motocycliste se fait assassiner dans une carrière. La police enquête, mais semble peu efficace. Du coup, le frère aîné, besogneux et taciturne, va tout lâcher pour tenter de retrouver le coupable... et de lui faire la peau.

   L'action se déroule dans le Sud de la Chine, principalement dans la province de Guizhou et à Chongqing :

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   Le héros va suivre plusieurs pistes, qui vont le conduire en divers endroits. Il va d'abord enquêter en ville. Le rural découvre donc la Chine "moderne", celle où règne le chacun pour soi, où l'aisance côtoie la grande pauvreté, où le mensonge et la corruption sont monnaie courante. Au début, il se fait avoir, mais il va vite apprendre...

   Il se rend aussi dans plusieurs régions rurales. Il a du mal à se procurer des informations et semble toujours rater de peu celui qu'il recherche. A l'occasion, il reprend contact avec des personnes qu'il a connues autrefois. Il se fait de plus en plus prédateur pour parvenir à ses fins.

   La dernière partie se déroule dans une mine de charbon illégale (mais très bien organisée). Le frère aîné s'y fait engager et l'on découvre des conditions de vie et de travail qui rappellent la France XIXe siècle. Les mineurs sont complètement "encadrés" par les patrons, dont la hantise est le coup de grisou... et la propension qu'ont les employés à vouloir fumer, y compris au fond de la mine ! La mise en scène m'est apparue particulièrement efficace dans cette partie du film, avec notamment les scènes de douche et celles de dortoir.

   A l'image du héros, le film est en général mutique, taiseux. Quelques dialogues ont été insérés pour nous tenir au courant de la progression de l'intrigue et des liens qui existent entre certains personnages. C'est donc assez difficile à suivre et très dur sur le fond : la Chine est devenue un pays impitoyable pour ceux qui n'ont pas de combine pour profiter du système. L'individualisme a souvent remplacé les solidarités collectives. Pour survivre, le héros devient un loup parmi les loups. Il a toutefois un geste d'humanité (qu'on ne comprend qu'après coup) lorsqu'il touche au but.

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jeudi, 20 juin 2013

Shokuzai

   A l'origine, c'est une mini-série télévisée en cinq épisodes (signée Kiyoshi Kurosawa), qui a été transformée en deux longs métrages pour le cinéma. Le titre signifie "pénitence". Les personnages principaux ont tous au moins une faute grave à expier. Le scénario emprunte la voie du polar pour dénouer les fils d'une intrigue à base sentimentale, mais qui débouche sur une série de drames. C'est aussi un portrait de femmes dans le Japon d'aujourd'hui, les hommes n'en sortant (en général) pas grandis.

   Le premier film est sous-titré "Celles qui voulaient se souvenir". La première séquence se déroule il y a quinze ans. Dans une petite ville de province, quatre gamines se lient d'amitié avec une petite nouvelle, fille d'un riche entrepreneur local et d'une dame très belle et très classe. L'une des filles va se faire assassiner de manière sordide... mais les quatre copines, traumatisées, sont incapables d'aider la police. Furieuse, la mère leur a extorqué une promesse.

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   Cette séquence démarre de manière anodine. On est rassuré par ce Japon calme et ordonné, ces enfants bien élevés. La tension monte soudainement. On est pris à la gorge.

   15 ans plus tard, Sae est devenue une ravissante jeune femme. (Notons que les quatre actrices sont excellentes... et fort jolies, ce qui ne gâche rien.) Elle a refoulé sa féminité et sa sexualité. Elle se contente de son petit boulot dans un centre de soins et se dépêche de rentrer chez elle le soir. 

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   Cet épisode la voit rencontrer un mec qui va se révéler aussi tordu qu'elle, pour d'autres raisons. Sachez seulement que des poupées traditionnelles françaises sont au coeur de l'intrigue. L'image de luxe est d'ailleurs associée à notre pays, puisque le principal personnage masculin roule dans une Peugeot haut de gamme. Incidemment, on nous montre que la vie d'une épouse qui a dû abandonner son travail n'est pas des plus réjouissantes. Cet épisode explore une piste quant à l'identité du tueur. On y croise aussi la mère de la victime (comme dans les parties suivantes, d'ailleurs), toujours habillée de sombre... et très classe. (On devine qu'elle doit porter quelques productions made in France.)

   De son côté, Maki est devenue institutrice dans sa ville. C'est une femme énergique, investie dans son travail... et, elle aussi, célibataire (malgré sa jolie paire de seins).

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   On sent toutefois que quelque chose pourrait se nouer avec ce prof de sport sympathique, tolérant, aimé des élèves. Elle par contre est redoutée pour son niveau d'exigence scolaire et son autoritarisme. Cette séquence est particulièrement riche. Elle explore la psychologie d'un personnage féminin qui a choisi de lutter, ses motivations, ses craintes. Elle nous montre aussi la mentalité d'une ville de province, avec une vue intérieure de la vie d'une école, les parents d'élèves étant montrés comme un groupe pas forcément commode, auquel les enseignants doivent manifester du respect. Face à celle qui ne dévie pas de sa route, les autres personnages apparaissent bien versatiles.

   Le second film est sous-titré "Celles qui voulaient oublier". C'est paradoxalement dans cette partie que la quête de la mère va le plus progresser. La première séquence traite du cas d'Akiko, fille-ours qui rejette le monde et les codes qu'il impose aux femmes.

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   Le retour de son frère va déclencher sa mutation. On la voit en possible jeune femme de son époque, le temps d'une sortie avec la belle-fille du frangin, dont elle va s'attribuer la protection. On sent la suite venir à des kilomètres, puisque c'est en prison que l'héroïne de cette séquence raconte son histoire à la mère. On nous propose une nouvelle piste dans la recherche du tueur, tout en développant un peu les mêmes thèmes que dans le cas de Maki.

   La solution de l'énigme commence à apparaître dans la séquence consacrée à Yuko. Celle-ci est devenue fleuriste

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   Le magasin qu'elle vient d'ouvrir porte un nom français, Le Ciel, écrit en caractères latins. On entr'aperçoit d'autres inscriptions dans notre langue (comme "Studio"). Et là je me rends compte qu'il va falloir que je vous cause du "franponais" un de ces quatre... Mais revenons à notre histoire. Contrairement aux trois autres, Yuko ne semble pas traumatisée par ce qu'elle a vécu. Elle se contrefiche de la promesse faite quinze ans auparavant. Elle essaie de vivre sa vie... et ce n'est pas forcément facile. Elle aussi est célibataire, mais semble avoir été liée à un policier. On réalise qu'elle aussi a été touchée par le drame. Elle est en quête de protection, d'autant plus que son patron la harcèle. Le réalisateur a choisi de ne pas rendre ce personnage sympathique. Elle peut se révéler particulièrement cynique.. mais elle va nous mener au tueur.

   Une séquence supplémentaire règle les comptes et nous propose plusieurs révélations. On découvre bien entendu la personnalité du tueur et, par ricochet, le passé de la mère de la victime. Le polar s'accélère un peu, alors que le rythme de ce second film est particulièrement lent. Il aurait fallu pratiquer des coupes dans ces 2h30 ! La fin est à mon avis marquée par trop de grandiloquence.

   Ces deux films n'en sont pas moins remarquables par leur richesse scénaristique et l'ampleur psychologique de l'histoire. S'y ajoute un indéniable savoir-faire en matière de réalisation. J'ai en mémoire un repas entre Sae et son prétendant. La scène est filmée de l'extérieur du restaurant. A l'écran s'entremêlent la vue de l'intérieur et le reflet de ce qui se passe derrière la caméra, à l'extérieur. La position et les déplacements des actrices sont aussi soigneusement choisis. Dans la quatrième histoire, on voit se retourner, de manières opposées, la mère et la jeune femme qu'elle est venue interroger, à l'hôpital, dans un superbe mouvement synchrone qui n'apparaît pourtant pas artificiel. Plus loin, c'est l'arrivée de la mère dans l'école privée qui nous vaut un plan magnifique. Elle, cachée derrière un bâtiment, se trouve en bas à gauche du cadre, alors que l'homme qu'elle recherche (et qui se sent épié) apparaît en haut à droite. A la toute fin, je recommande aussi la scène qui se déroule dans un bâtiment désaffecté. C'est vraiment brillant.

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vendredi, 14 juin 2013

Le Pouvoir

   Patrick Rotman a consacré un documentaire aux débuts de la présidence Hollande, de mai à décembre 2012. Il a pu suivre de l'intérieur, caméra à l'épaule ou fixe en position privilégiée, la mise en place et les premiers pas du nouvel exécutif français.

   Fort logiquement, cela commence par la passation de pouvoir entre Nicolas Sarkozy et son vainqueur/successeur. On peut y voir à l'œuvre le contraste qui sert de fil rouge au film : le décorum de la République d'un côté, la "normalitude" du président de l'autre, parfaitement incarnée par le costume mal ajusté qu'il porte :

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   La cravate est de travers, la chemise dépasse de l'une des manches et la veste du costume est mal boutonnée, semble-t-il. On retrouve ces caractéristiques dans la séquence consacrée à la création de la photographie officielle, en compagnie de Raymond Depardon :

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   Il a fallu tout un travail pour faire rentrer convenablement les manches de la chemise sous celles de la veste du costume... sans oublier de recentrer la cravate ! Pour la petite histoire, signalons à ceux qui ne l'auraient pas remarqué que les drapeaux (français et européen) figurent bien sur la photographie, à l'arrière-plan, à gauche.

   La suite du film nous montre le président évoluant dans les bureaux luxueux (mais vieillots) de l'Élysée, entre collaborateurs, ministres, écrans divers et téléphones. On discute beaucoup... et on ne dit pas grand chose. C'est le grand défaut du film : il ne nous montre pas les hommes en action, mais en discussion, voire en représentation. Du coup, cela reste à la surface. Le vrai travail de fond n'est pas mis au premier plan. Il me semble que Rotman est resté prisonnier de l'aspect communication du pouvoir.

   J'ai éprouvé la même déception pour le travail des "petites mains" de l'Élysée, des huissiers aux cuisiniers en passant par la Garde républicaine. Quelques moments leur sont consacrés, mais c'est bien peu et très superficiel, alors qu'il y aurait tant eu à dire sur la machinerie au quotidien.

   Les curieux de la vie politique trouveront de l'intérêt à certaines séquences, qui voient évoluer des personnages de premier plan dans un autre contexte que celui d'un entretien télévisé. On peut aussi s'amuser à relever l'artificialité de certains comportements. Quelques ministres ont vite compris que le président était suivi par une caméra...

   De manière plus croquignolesque, j'ai tenté de débusquer la moindre apparition à l'écran de certaines personnes, comme Jérôme Cahuzac, que l'on voit à plusieurs reprises, plutôt dans la seconde partie.

   Au final, ce n'est pas déplaisant, mais c'est plutôt mou du genou. Les contempteurs de la dépense publique y trouveront matière à contestation, tant l'exercice du pouvoir est entouré de fastes républicains, parfois bien inutiles.

samedi, 11 mai 2013

Les Gamins

   Au départ, je m'étais dit : voilà le genre de comédie formatée, destinée à passer en première partie de soirée sur TF1, que je vais éviter d'aller voir. Malgré Chabat. Finalement, le bouche-à-oreille (favorable) et les extraits vus sur la Toile m'ont incité à tenter le coup.

   Cela fait presque un mois que le film est sorti et la salle était pourtant presque comble. La première partie est le début d'une comédie sentimentale, l'intrigue essayant de sortir (un peu) des sentiers battus. Cela marche : j'ai bien aimé les tourtereaux qui se vannent, leurs petits jeux d'amoureux et la scène de demande en mariage.

   La deuxième partie voit intervenir le père de la (future) mariée, incarné par un Alain Chabat au sommet de sa forme.

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   Il est très bon en vieux mari dépressif et bougon. Il est encore meilleur en quinqua qui fait sa crise et veut de nouveau kiffer la life. Je recommande les deux premières virées avec son futur gendre (Boublil, en général bon, bien que parfois trop "politiquement correct"). La première sortie voit d'abord les deux hommes s'énerver l'un contre l'autre, avant qu'ils ne deviennent les meilleurs amis du monde. A cette occasion, ils font la connaissance d'un dealer très spécial de sa race, un dénommé Abdelkader (Thomas Soliveres, un nom à retenir) qui a dû en surprendre plus d'un !

   J'ai toutefois un gros bémol à apporter à cet enthousiasme : la vision clinquante de la fête, qui passe visiblement par la fréquentation de la "haute" et les dépenses inconsidérées. C'est l'un des aspects démagos du film. C'est de surcroît un brin misogyne : Sandrine Kiberlain incarne une horrible bobo castratrice et sa fille, pour sérieuse qu'elle soit, passe l'essentiel de son temps à sourire ou pleurer.

   La suite nous met en contact avec le monde du show-biz, où naviguent nombre de parasites et de dégénérés. Là encore le film est ambigu, hésitant entre le portrait satirique et l'empathie. On retiendra l'insupportable chanteuse-enfant Mimi Zozo, interprétée avec conviction par Mélusine Mayance.

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   La fin voit tout ce beau monde renter dans le rang, avec quand même une séquence au domicile des parents qui se termine d'une manière digne de Mary à tout prix !

   Je pourrais m'arrêter là et m'en tenir à la "critique" cinématographique. Les scénaristes ont pourtant tenu à insérer de la politique dans l'histoire. A trois reprises, un personnage incarnant un dirigeant iranien est l'objet de moqueries assez faciles. La première fois, on le voit tenter de parler en français à ses interlocuteurs. On veut visiblement nous montrer qu'il est assez imbu de lui-même. La scène tombe à plat ; la salle rit peu, contrairement à ce qui se passe dans la deuxième séquence, qui met en scène Thomas (Max Boublil) traduisant à sa manière le discours de l'Iranien (qui s'exprime cette fois en farsi). Je reconnais que c'est assez tordant, bien qu'un peu trop appuyé (et limite invraisemblable).

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   Alors, pourquoi tant d'insistance ? Ce personnage est-il une caricature d'un dirigeant iranien réel ? Il ne me semble pas que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad se soit jamais vanté de pouvoir parler français. Ce pourrait être le négociateur du dossier nucléaire Saïd Jalili, réputé polyglotte. Précisons que, dans le film, la future épouse du héros travaille au gouvernement, sans doute au ministère des Affaires étrangères. Mais cette volonté de stigmatiser le dirigeant iranien cache peut-être autre chose.

   Il se trouve que l'équipe au pouvoir (en Iran) depuis 2005 s'est souvent "distinguée" par sa grande hostilité à l'Etat d'Israël. Or, les producteurs du film (Alain Goldman et Simon Istolainen) sont juifs (jusque là, rien à dire), le premier étant un ancien militant du Bétar et un fervent défenseur d'Israël. Quant au scénario, il a été coécrit par le réalisateur, Anthony Marciano et Max Boublil. Le premier est l'un des cofondateurs de MyMajorCompany, aux côtés de Simon Istolainen et de Michael Goldman (l'un des fils de Jean-Jacques). Il est possible qu'il ait été victime d'une agression antisémite, il y a une dizaine d'années de cela. Le second est fils d'un médecin juif d'origine tunisienne.

   Mine de rien, cette petite comédie a donc un arrière-plan communautaire. Le reste du casting renforce cette impression. On y croise bien sûr Alain Chabat (né en Algérie), mais aussi Arié Elmaleh (frère de Gad) et Patrick Bruel, dans une séquence-hommage de mauvais goût. Cela ne m'a pas empêché de profiter du film, exemple convaincant de bonne comédie à la française. Mais j'ai quand même éprouvé un petit malaise, dû à l'impression que l'humour servait à faire passer un message politique, presque à l'insu des spectateurs.

jeudi, 09 mai 2013

Sous surveillance

   Le nouveau film de Robert Redford (dont le titre original est The Company you keep) peut se lire à plusieurs niveaux. C'est d'abord un polar, avec un fugitif et une énigme concernant un crime commis plus de 40 ans auparavant. Une seconde énigme apparaît en cours d'histoire, autour du personnage d'un enfant. Les spectateurs découvrent la plupart des secrets en suivant l'enquête du jeune journaliste (hommage de Redford au "quatrième pouvoir", qu'il n'hésite pourtant pas à critiquer). C'est aussi un film politique, sur l'engagement gauchiste d'une partie de la jeunesse étudiante américaine des années 1960. C'est enfin un film sur l'amour, celui avec un grand A, inatteignable (?) et fugace (?), mais aussi celui qui dure.

   Le scénario est bien ficelé et le casting alléchant. Robert (un peu âgé pour le rôle, même s'il s'entretient) a fait venir de vieux potes, comme Nick Nolte (qu'on a dû sortir de l'hospice sur un brancard, tant il semble voir du mal à se déplacer... et à parler, dans la V.O.) Susan Sarandon et Julie Christie. Ils sont accompagnés d'autres valeurs sûres comme Brendan Gleeson, Stanley Tucci, Chris Cooper et Terrence Howard, tous excellents seconds rôles. On a ajouté quelques djeunses, notamment Brit Marling, Anna Kendrick et l'énervant Shia LaBeouf (qui arbore durant tout le film la même barbe de trois jours et semble toujours mastiquer le même chewing gum)... sans doute pour élargir le public.

   Toutefois, cela manque un peu de pêche. Redford n'est pas toujours crédible en fugitif. Heureusement que les autres assurent, autour de lui. Ce n'est donc pas LE grand film sur l'activisme politique. Il pose néanmoins de bonnes questions, sur l'engagement (superbe scène avec S. Sarandon en prison) et sur l'amour. Cela se suit sans déplaisir. C'est un peu meilleur que le décevant Lions et agneaux, sans plus.

23:12 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 07 mai 2013

Entrée du personnel

   Ce court documentaire (d'environ 1 heure) est consacré aux employés de plusieurs abattoirs de l'Ouest de la France métropolitaine. Il résulte de l'entrecroisement d'images tournées devant et dans les usines et de témoignages recueillis ailleurs, enregistrés et réinterprétés par des acteurs. Visiblement, ce procédé s'est imposé pour éviter que certains salariés ne soient victimes de représailles.

   Globalement, quel que soit le poste occupé, quel que soit le sexe de l'employé, le travail est présenté comme répétitif, souvent pénible physiquement, usant à la longue.

   Le montage nous fait d'abord remonter la chaîne, de l'emballage avant expédition à l'entrée des animaux avant leur exécution. On ne nous montre toutefois pas frontalement la mise à mort. Le film s'arrête juste avant ou montre le moment qui suit immédiatement.

   Ceci dit, ce que l'on voit à l'écran n'est pas horrible. A la différence des établissements cités dans un scandale (en 2012), ces abattoirs semblent bien entretenus, fonctionnels, aux normes. De temps à autre, on a toutefois l'impression que la présence de la caméra incite certains employés à systématiquement nettoyer leurs outils (entre deux usages) et à faire preuve d'un zèle excessif dans le nettoyage des équipement.

   J'ai trouvé très réussie la superposition des images et des témoignages réinterprétés. On regrette presque que le film s'interrompe aussi vite.