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vendredi, 06 décembre 2013

Les orphelins de l'inspecteur Murdoch

   Je ne connaissais pas cette série policière canadienne (Les Enquêtes de Murdoch), dont l'action se déroule à la fin du XIXe siècle. On me l'a recommandée et, cette semaine, j'en ai visionné plusieurs épisodes, dont le dixième de la première saison, "Les nouveaux esclaves".

   L'intrigue tourne autour du meurtre d'un riche philanthrope, qui dirige une usine de fabrique de colle d'origine animale (à partir de chevaux). Très vite, l'inspecteur Murdoch en vient à s'intéresser à deux personnes. L'une d'entre elle est un gamin des rues, Charlie :

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   L'autre est la fille adoptive de la victime, Eva :

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   Ils ont en commun d'avoir été envoyés de force du Royaume-Uni au Canada. On a appelé certains d'entre eux "les enfants Barnardo". C'est un sujet qui suscite encore la polémique de nos jours, comme en témoigne un article du quotidien québécois La Presse de 2009. Si vous voulez en savoir plus sur la question, je vous conseille un programme (téléchargeable) du site "Bibliothèque et Archives Canada".

   L'épisode se conclut de manière surprenante. A l'histoire de l'exploitation des enfants immigrés se superpose un fait divers sordide. Le tout bénéficie d'une reconstitution historique minutieuse.

samedi, 16 novembre 2013

L'école au péril des égoïsmes

   Pour un gouvernement (de gauche comme de droite), il est toujours risqué d'enclencher une réforme sociétale en période de crise économique. Il peut voir s'agglutiner contre lui les opposants traditionnels, les déçus d'hier et les aigris de toujours. J'ai le sentiment que c'est ce qui se passe avec la réforme des rythmes scolaires, dont j'ai déjà causé en février dernier.

   Il faut commencer par aborder le temps de travail des professeurs des écoles. Dans ce domaine, on tombe vite dans la caricature, soit qu'on les estime excessivement privilégiés (peu d'heures de cours, de longues vacances...), de surcroît jamais contents, soit qu'on les plaigne pour le stress, la charge de travail à domicile... et le fait de devoir supporter des progénitures au comportement de moins en moins exemplaire.

   Qu'en est-il de leur temps de travail (hors domicile) ? L'analyse des textes officiels publiés sous la Ve République permet de se faire une idée de son évolution :

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      On constate que c'est l'année 1969 qui constitue la rupture. Sinon, en apparence, depuis près de 45 ans, le volume global n'a pas changé. Dans le détail, les différentes réformes ont abouti à diminuer les heures de cours dispensées aux élèves (30, puis 27, 26 et enfin 24 par semaine). Le temps dégagé a été réaffecté à d'autres tâches : le travail en équipe, la formation pédagogique, le suivi des élèves handicapés, le lien avec les parents et l'organisation des conseils d'école. C'est une reconnaissance du travail qui était (normalement) déjà effectué auparavant par les enseignants. On pourrait en conclure que leur charge de travail a diminué. Pour être honnête, il faudrait ajouter que le fait que ces "activités complémentaires" soient officiellement reconnues a sans doute contribué à inciter les enseignants à s'y investir davantage. Ne restent plus hors du décompte de leur service que la préparation des cours et la correction des cahiers des élèves.

   J'ai volontairement laissé de côté la partie "aide personnalisée" du complément horaire. Introduite en 2008, elle devait permettre aux professeurs de davantage se consacrer aux élèves en difficulté. C'est le talon d'Achille de notre système éducatif : il forme des élites efficaces mais laisse trop de gens sur le côté de la route. Le problème est que le trio Sarkozy-Fillon-Darcos a couplé cette nouveauté avec le passage généralisé à la semaine de quatre jours. Or, il se trouve que cette aide personnalisée (comme une partie du reste des activités complémentaires) a très souvent été dispensée les mêmes jours que ceux de classe, alourdissant encore l'emploi du temps de nos chères têtes blondes. (Ce ne fut pas le cas partout. Je connais au moins un cas, hors Aveyron, où les professeurs organisaient le soutien en français et mathématiques durant les vacances.)

   Curieusement, la fronde contre la réforme Darcos n'a pas suscité le même rejet que celle de Vincent Peillon. Elle a définitivement libéré le week-end des enseignants et des parents (qui n'ont plus eu à se lever le samedi matin... tu parles !). Elle a par contre laissé de côté les élèves les plus faibles, ceux qui ont besoin de plus de temps pour apprendre, qui ne peuvent pas assimiler énormément de choses en une journée. Mais ce ne sont pas des enfants d'enseignants, ni d'hommes politiques, ni de délégués de parents d'élèves. Ces enfants sont plutôt issus de catégories modestes, qu'on entend peu... et qui votent de moins en moins.

   Il y a beaucoup d'hypocrisie dans l'opposition à la réforme Peillon. Il y a d'abord ceux qui estiment que l'école telle qu'elle est fonctionne très bien... pour leurs enfants. Si les gamins des pauvres sont plus souvent en échec scolaire (et ce dès le primaire), c'est leur problème ! Il y a ensuite ceux qui n'ont pas envie de changer leurs habitudes, n'hésitant pas à proférer de gros mensonges à propos du mercredi matin. Beaucoup d'enfants se levaient, ce jour-là comme les autres, pour être emmenés en garderie ou chez un membre de la famille (ou une connaissance), qui acceptait de s'en occuper pendant que les parents travaillaient.

   Et parmi ceux qui dénoncent la supposée fatigue plus grande des gamins aujourd'hui, combien veillent à ce que leurs enfants soient couchés tôt le soir, loin de la télévision, de l'ordinateur ou de la console de jeux ?

   Du côté des politiques, l'honnêteté n'est pas forcément plus grande. La droite et l'extrême-droite, c'est de bonne guerre, sautent sur l'occasion pour gêner le gouvernement. (Ceux qui croient que le FN ou la nouvelle génération de l'UMP ont l'intention de faire de la politique autrement se font de grosses illusions...) Enfin, quelle que soit la couleur politique de la municipalité (s'il y en a une), c'est la capacité à s'organiser qui fera la différence, plus que les moyens. Certaines communes font preuve d'imagination. Celles (pas forcément riches ou très peuplées) qui avaient déjà réfléchi à l'animation locale ont des ressources pour se lancer dans la semaine de 4,5 jours.

   Une dernière chose : contrairement à ce qu'affirment certains opposants à la réforme Peillon, la masse des enseignants du primaire semble plutôt y adhérer. Le récent appel à la grève n'a été suivi que par environ un quart d'entre eux (encore moins dans l'Aveyron).

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(Centre Presse, 15 novembre 2013)

   Certes, on peut estimer qu'une (faible ?) partie de ceux qui rejettent la réforme ont choisi de faire cours ce jour-là. Il est aussi possible que d'autres motivations aient poussé certains grévistes à participer au mouvement : la "gauche de la gauche" est surreprésentée dans le monde enseignant ; c'était là l'occasion d'exprimer le rejet d'une politique jugée trop sociale-libérale.

   Pourtant, le gouvernement avait pris soin de caresser les professeurs des écoles dans le sens du poil. Le 31 août dernier est paru au Journal Officiel un décret instaurant une "indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves". Elle est censée permettre la mise en place de la réforme... sauf qu'elle ne rémunère aucune nouvelle activité, celles mentionnées dans le décret étant déjà assurées auparavant par les professeurs des écoles.

   Paris constitue une exception, avec un corps enseignant visiblement très remonté contre Vincent Peillon. Et pourtant... En février dernier, dans un article qui n'a pas eu le retentissement qu'il méritait, Le Monde rappelait l'existence dans la capitale des P.V.P. (professeurs Ville de Paris). Dans les faits, ces personnes sont payées par la mairie pour faire une partie du travail qui incombe aux professeurs des écoles. Voilà de quoi rendre le métier plus confortable qu'en province... et ce sont ceux-là qui se plaignent le plus !

samedi, 19 octobre 2013

Panpan cucul sur la propagande

   Ces derniers temps, on a beaucoup parlé de la récente condamnation d'un père qui a administré une fessée "cul nu" à son fils récalcitrant. Au passage, les médias se sont parfois gardés de souligner que cet incident s'inscrit dans une histoire familiale difficile (la séparation d'un couple)... et que c'est la mère (et pas l'enfant, bien entendu) qui a porté plainte. Je ne suis pas loin de penser qu'au-delà du rejet du châtiment corporel, la mère cherche à s'appuyer sur une décision de justice dans une procédure de divorce.

   N'allez pas croire que je sois un fervent partisan de ce genre de correction. Il existe bien des manières de faire comprendre à un-e enfant qu'il(elle) a dépassé les bornes. La violence physique ne doit être qu'un ultime recours. Mais vouloir l'interdire quelle que soit la situation me paraît aussi stupide que la croyance que c'est à coups de ceinturon qu'on dresse efficacement sa progéniture. Dans le cas qui nous occupe, d'après ce que j'ai pu lire ici et là, il semble que le père se soit un peu emballé ; il aurait pu agir autrement. (Ceci dit, il est facile pour moi de lui faire la leçon, confortablement assis devant l'écran de mon ordinateur...)

   Si les médias ont fréquemment évoqué l'affaire, certains n'en sont pas restés aux faits. Ils ont visiblement voulu peser sur l'opinion, qui reste attachée au "droit de correction". Le supplément "Culture et idées" du Monde de ce samedi 19 octobre (version papier) fait sa "une" sur le sujet :

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   L'illustration n'est pas datée. Ce n'est évidemment pas une photographie "spontanée", comme en témoigne le regard de l'enfant tourné vers l'objectif. Elle a d'ailleurs déjà servi, puisqu'on la retrouve dans un article du quotidien gratuit 20minutes du 27 avril 2011. C'est une scène simulée. En pages intérieures, l'article du Monde est accompagné d'une gravure française de 1900 :

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   Sur le site internet du quotidien, on peut trouver un billet du blog "Big Browser" consacré à l'affaire, illustré par une image italienne de la seconde moitié du XIXe siècle :

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   Curieux de nature, je suis allé jeter un oeil à la version numérique de l'article que j'ai évoqué plus haut. O surprise, elle n'est pas introduite par la même photographie :

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   Cette différence n'est pas anodine. D'habitude, elle est due à des questions de droits. Ici, il y a volonté de guider subrepticement l'interprétation des faits. La légende de la photographie est là pour montrer au public cultivé que seuls des esprits barbares peuvent fesser leurs enfants. Pensez donc ! La photo a été prise "vers 1935", c'est-à-dire sous le régime nazi. Quelle subtilité !...

   Ce n'est pas la première fois que je surprends le quotidien en flagrant délit de manipulation. L'an dernier, j'avais remarqué ce genre d'attaque discrète au détour de la campagne de Marine Le Pen (mais elle ne fut pas la seule visée). Quelques temps plus tard, les illustrations d'un article consacré au vote préférentiel étaient marquées par la même subjectivité.

   P.S.

   L'émission Made in Groland de ce samedi a abordé (brièvement) le sujet avec tact et délicatesse :

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vendredi, 20 septembre 2013

Délinquance juvénile

   Ma bonne dame, tout va de mal en pis ! La France est en pleine décadence ! Et ces jeunes qui ne respectent plus rien ! Ah, c'était pas comme ça de mon temps, hein !

   Il conviendrait peut-être de nuancer cette expression du "bon sens populaire" (qui s'apparente parfois au café du commerce, dont la profondeur d'analyse est en général inversement proportionnelle au taux d'alcoolémie de la personne qui s'exprime). C'est du moins ce que j'ai pensé en lisant le numéro du Villefranchois de cette semaine.

   Voici ce que l'on peut y trouver, au bas de l'avant-dernière page du cahier cantonal :

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(Le Narrateur, 20 septembre 1913)

   On notera que la jeune fille s'est rebellée parce qu'elle ne voulait pas qu'on l'envoie travailler chez un éleveur. Après tout, elle n'avait que 11 ans... A ce sujet, certains seront peut-être surpris qu'elle ne soit pas à l'école, vu que, depuis la loi Ferry de 1882, la scolarité est obligatoire de 6 à 13 ans pour les enfants des deux sexes.

   Ce serait oublier que c'est l'obtention du certificat d'études qui est l'enjeu de la scolarisation. Du coup, la loi prévoit une dérogation pour les enfants de onze-douze ans : ils (en réalité, leurs parents) peuvent interrompre leur scolarité à partir de cet âge s'ils ont déjà décroché le précieux diplôme.

   On pourrait donc en conclure que la petite Fernande Fontalba était une élève assez brillante, puisqu'elle a dû réussir l'examen dès onze ans. En tout cas, elle était sacrément débrouillarde !

mardi, 10 septembre 2013

L'Aveyron, "déversoir" de la Seine-Saint-Denis ?

   Derrière ce titre un brin provocateur se cache un réel problème, à la fois politique, humanitaire et pénal, celui de la prise en charge des mineurs isolés étrangers (ou présumés tels). Les trois quotidiens aveyronnais ont publié ce mardi un article consacré aux propos du président du Conseil général, Jean-Claude Luche, qui accuse l'Etat de se décharger sur les départements (surtout ruraux) de sa mission de prise en charge de ces enfants et adolescents. Cependant, les trois journaux ne présentent pas l'affaire tout à fait de la même manière.

   La Dépêche du Midi montre un Jean-Claude Luche combatif et titre sur la "Rentrée de tous les fronts" :

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   Le paragraphe consacré à la polémique (en particulier le rejet de la circulaire Taubira du 31 mai dernier) reprend certains des propos tenus par le président du Conseil général, notamment ceux qui font allusion à un trafic de mineurs isolés.

   Midi Libre, à l'opposé, présente un Jean-Claude Luche assez "pépère", qui vit une "rentrée tranquille" :

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   L'article évoque le coût du placement de ces mineurs dans l'Aveyron.

   Mais le plus incisif est sans doute Centre Presse, dont l'article n'a gardé de la conférence de presse du président du Conseil général que les propos concernant l'affaire des mineurs isolés. La version papier n'est pas illustrée, mais la version numérique de l'article comporte une photographie du château de Floyrac, qui accueille les jeunes en mal d'insertion. Comme La Dépêche du Midi, Centre Presse reprend les propos sur l'existence d'un trafic des mineurs. Comme Midi Libre, Centre Presse évoque le coût du placement de ces jeunes... mais il cite davantage J-C Luche, qui parle du comportement des sept récemment accueillis, qui seraient violents et insultants, ce qu'aucun autre média local n'a évoqué. Alors, censure ? Bien-pensance ?

   A ceux qui croiraient que les affirmations qui précèdent sont pure spéculation, il convient de rappeler qu'il existe des filières qui organisent l'arrivée de mineurs en France (pas uniquement métropolitaine). L'une d'entre elles a d'ailleurs été démantelée dans l'Ariège, en juin dernier.

   Ce département fait partie de ceux qui accueillent le plus de mineurs isolés étrangers, derrière toutefois Paris, le Nord, le Pas-de-Calais et la Seine-Saint-Denis (d'après un rapport de la sénatrice Isabelle Debré). Ce dernier a décidé, en 2011, de ne plus prendre en charge ces enfants et adolescents. Il faut donc trouver de nouveaux départements où envoyer ces jeunes. Jean-Claude Luche semble calquer son attitude sur celle de Jean Arthuis, président du Conseil général de la Mayenne (sans toutefois aller aussi loin).

   A suivre...

samedi, 07 septembre 2013

Un accident de la route qui déchaîne les passions

   Cela fait un peu plus de deux ans qu'une petite commune de l'ouest de l'Aveyron (située à côté de Villefranche-de-Rouergue) se déchire autour d'un fait divers tragique : la mort d'un adolescent de 15 ans, revenant en scooter d'un entraînement de football, renversé à une intersection par une voiture conduite par le maire de son village.

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(Saint-Rémy est en rouge, Rodez en noir.)

   Le tribunal correctionnel de Rodez vient de rendre son jugement dans cette affaire. D'après La Dépêche du Midi, le maire a été reconnu coupable de trois infractions : homicide involontaire, circulation en sens interdit (violation délibérée d'une obligation de sécurité) et refus de priorité. La sanction (assez proche des réquisitions du Parquet) apparaît à certains comme trop légère : un an de prison avec sursis, annulation du permis de conduire (avec interdiction de le repasser pendant un an) et deux amendes de 200 euros. S'y ajoutent des dommages-intérêts qui, si j'ai bien calculé, doivent se monter au total à 8 000 euros. Le maire a décidé de faire appel.

   Les circonstances du drame sont liées à la route départementale 922, qui traverse la commune de Saint-Rémy, mais ne fait que longer le bourg principal, auquel elle est reliée par des voies plus ou moins importantes, certaines à sens unique. Il semblerait que le maire (venant du village), pour prendre la direction de Villeneuve, ait voulu tourner à gauche, ce qu'interdit un panneau. Il aurait de surcroît négligé de laisser la priorité au "cédez le passage", provoquant l'accident avec le scooter qui arrivait  :

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   A-t-il été sévèrement condamné ? Voyons le code de la route. Le refus de priorité comme la circulation en sens interdit sont des contraventions de quatrième classe, punies par des amendes pouvant atteindre 750 euros. Le prévenu risquait donc au maximum 1 500 euros d'amende. Il a été condamné à en payer 400 (deux fois 200), sans doute parce que c'était la première fois qu'il comparaissait pour des faits semblables. Le prévenu risquait aussi le retrait de points du permis de conduire (deux fois quatre). Ici, la sanction est plus sévère, parce qu'il y a eu homicide involontaire.

   Dans ce cas, c'est l'article L232 du code pénal qu'il faut consulter. D'office, la personne contrevenante peut perdre la moitié des points du permis. Si l'on ajoute ceux retirés pour les autres infractions, on dépasse les douze points. De surcroît, dans le cas d'un homicide involontaire, l'une des peines complémentaires est "l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter une nouvelle délivrance pendant cinq ans au plus". On peut estimer que, dans le cas du maire de Saint-Rémy, la loi a été appliquée normalement, sans favoritisme pour l'homme politique.

   Par contre, dans les cas où l'homicide involontaire a été commis par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité, le code pénal prévoit des sanctions plus lourdes au titre de la peine principale : 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende (7 ans et 100 000 euros en cas de circonstances aggravantes). Comme le prévenu a été condamné à de la prison avec sursis, on peut estimer que les magistrats ont jugé qu'il avait commis au moins une faute importante ayant provoqué l'accident, mais qu'il n'y avait pas de circonstances aggravantes (pas d'alcool au volant, d'excès de vitesse ni de délit de fuite). Une question demeure : si le prévenu avait été un individu lambda, aurait-il été sanctionné plus sévèrement ?

   En tout cas, le tribunal n'a pas accepté l'idée d'une erreur de la part du conducteur du scooter. Il ne roulait pas trop vite, n'était pas sous l'empire d'une drogue ou de l'alcool et il n'a pas été prouvé que ses feux ne fonctionnaient pas (le drame s'est déroulé vers 20 heures, au mois de janvier). Restait la possibilité que l'adolescent ait glissé sans qu'il y ait un lien avec la présence de la voiture, avant de percuter celle-ci. Le tribunal, qui a fait examiner les deux véhicules, n'est pas arrivé à cette conclusion.

   Au-delà de ces considérations, la sanction aurait pu être encore plus sévère pour l'élu local. En effet, l'un des alinéas du code pénal prévoit, dans le cas d'un homicide involontaire commis à l'aide d'un véhicule terrestre, l'interdiction d'exercer une fonction publique. Les magistrats ont peut-être pensé que les prochaines élections municipales (celles de 2014) trancheraient sans qu'ils aient besoin d'intervenir.

   L'affaire a fait du bruit, parce que les personnes en cause sont issues du même village, parce que la victime est un adolescent... et parce que le condamné est un homme en vue de la gauche ouest-aveyronnaise. Dans l'excellent ouvrage de Roger Lajoie-Mazenc, Fantassins de la démocratie, il a droit à une notice longue d'une colonne :

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   Son grand-père a lui aussi été maire de Saint-Rémy. Le petit-fils est entré très tôt en politique, devenant l'assistant de Robert Fabre (ancien ministre et maire radical de gauche de Villefranche-de-Rouergue) puis du député Jean Rigal. Il a aussi travaillé pour le PS, aux côtés de Michel Rocard et Jean Glavany.

   Cette carrière prestigieuse ne lui a cependant pas permis de jouer les premiers rôles au plan local. En 2004, s'il figure en septième position sur la liste de gauche menée dans l'Aveyron par Alain Fauconnier (la tête de liste régionale étant évidemment Martin Malvy), il ne doit qu'à la démission de celui-ci (pour cause de cumul des mandats) d'avoir pu siéger au Conseil régional de Midi-Pyrénées, entre 2008 et 2010 (petite erreur de Lajoie-Mazenc, qui prolonge jusqu'en 2012). Notons qu'aux régionales de 2010, il ne figure plus sur la liste PS-PRG. Il a connu le même déclin au niveau des élections législatives. En 2002, il tente de succéder à Jean Rigal (dont il fut l'assistant), dans la deuxième circonscription (celle de Villefranche-de-Rouergue). Il se qualifie pour le second tour, devant le radical Eric Cantournet mais derrière l'UMP Serge Roques, qui devient ensuite député. En 2007, il est largement devancé au premier tour par la socialiste Marie-Lou Marcel, finalement élue de justesse contre le sortant S. Roques. (Rappelons qu'elle fut facilement réélue en 2012.)

   Même dans sa commune de Saint-Rémy, il a peiné à décrocher le mandat principal. De 1995 à 2008, c'est le radical de gauche Guy Labro qui a occupé le poste de maire, son futur successeur étant d'abord premier adjoint puis simple conseiller municipal. En 2008, s'il est devenu maire, c'est grâce au choix de la majorité des conseillers municipaux, les électeurs ne l'ayant placé qu'en onzième place... la dernière éligible.

mardi, 27 août 2013

Un slip coloré qui sent bon

   Vous avez peut-être déjà entendu parler de cette entreprise hexagonale, Le Slip Français, qui fait fabriquer principalement (mais pas uniquement) des sous-vêtements dans notre pays. En 2012, elle avait lancé une campagne originale, détournant les affiches de certains candidats à la présidence de la République :

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   Rappelez-vous, à l'époque, c'était devenu une mode, la principale cible étant le futur ex-président Nicolas Sarkozy, avec le slogan "La France forte".

   Peu de temps après, un internaute facétieux avait eu l'idée d'associer le produit phare à un célèbre monument aveyronnais :

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   Cet été, l'entreprise a eu les honneurs d'un reportage de la BBC, tourné dans un département où l'on croise fréquemment des ressortissants d'outre-Manche, la Dordogne :

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   Ecoutez bien le tout début de la présentation, par le journaliste de plateau. Il dit : "To France, now. A country which has more companies in the Fortune 500 than any other European state."




   On pourrait traduire ces propos ainsi : "France, à présent. Un pays qui a plus d'entreprises dans le Top 500 de Fortune qu'aucun autre pays européen." Même si l'on tient compte de l'insistance mise ensuite sur les impôts et les charges qui brideraient l'activité dans notre pays, cela reste indirectement un bel hommage.

   Le regain d'intérêt dont a bénéficié l'entreprise est dû au lancement d'un produit novateur, "le slip qui sent bon" (formule habile, comprise par tous les esprits, qui évite d'avoir à parler du "slip qui ne pue pas la pisse ni la merde"). Il est fabriqué dans le Nord, à Saint-André-lez-Lille. Ce sous-vêtement est d'autant plus révolutionnaire que les micro-capsules qui le dotent d'effluves agréables ne fonctionnent que lorsque le slip est porté ! Décidément, on n'arrête pas le progrès !

   Cette performance a fait l'objet d'articles dans la presse, au début du mois de juillet (bien avant la mise circulation de l'objet). Tout récemment, c'est la chaîne LCI qui a braqué les projecteurs sur l'entreprise innovante.

   Une forme d'engouement semble naître autour des sous-vêtements made in France. Les téléspectateurs et internautes les plus attentifs auront même remarqué un petit clin d'oeil à l'objet fétiche dans la vidéo de présentation de la nouvelle saison du Petit Journal :

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dimanche, 18 août 2013

La guerre des couteaux

   C'est le titre d'un documentaire de 2011 qu'Arte a eu la bonne idée de reprogrammer vendredi 16 août. Sur fond d'accordéon, l'enquête s'est concentrée sur le Puy-de-Dôme, l'Aveyron ne venant qu'en complément ou en contrepoint.

   La première moitié du film nous fait découvrir plusieurs acteurs de l'économie coutelière du bassin de Thiers. On commence avec un artisan "à l'ancienne", Charles Couttier, qui préfère travailler seul :

2 Charles Couttier.jpg

   L'un des enjeux du film est la transmission du savoir-faire. Les actuels couteliers sont en général âgés. Celui-ci aimerait donc trouver un bon apprenti, auquel il pourrait enseigner ce qu'il sait, à défaut d'en faire son successeur.

   A mi-chemin entre l'artisanat et l'industrie, on trouve Cyril Ganivet, qui n'est pas issu du monde du couteau :

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   Son parcours n'en est pas moins intéressant. On regrette toutefois que le documentaire n'ait pas davantage creusé du côté de son chef coutelier. Il travaille souvent avec un forgeron expert en acier damassé, Alain Demousset :

4 Alain Demousset.jpg

   Les passages le montrant en action sont particulièrement intéressants. On voit le travailleur manuel à l'oeuvre, dans toute son habileté.

   Arrive enfin à l'écran une vieille connaissance des Aveyronnais, Christian Lemasson, auteur d'une Histoire du couteau de Laguiole (et excellent conférencier, soit dit en passant) :

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   On le voit ici décrire quelques exemplaires très anciens du "coupe-tout" et expliquer l'origine de termes comme "mouche" ou "abeille". Même si les traces de l'activité coutelière sont très anciennes du côté de Thiers, lui comme Cyril Ganivet reconnaissent l'origine aveyronnaise de l'objet. Au passage, signalons que la "mouche" n'était, à l'origine, pas ouvragée, une tradition que respecte le dernier couteau sorti par la Forge de Laguiole, avec un manche en corne d'Aubrac.

   Inévitablement, la conversation dérive sur la contrefaçon, preuves à l'appui :

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   Dans ce passage, l'entrepreneur thiernois exprime son refus de commercialiser des articles bas de gamme venus de l'étranger. Pourtant, on sait que sur le bassin de Thiers tout le monde n'a pas ces scrupules...

   De ce point de vue, le gérant de la Forge Thierry Moysset est plus honnête.

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   On l'entend bien reconnaître qu'à Thiers aussi bien qu'à Laguiole, il existe des brebis galeuses qui vendent sous une appellation frauduleuse des produits fabriqués à l'étranger dans des conditions douteuses. L'autre intérêt de son intervention est d'écouter sa position quant à la future IGP, dont il était déjà question en 2011. Poussé par Christian Lemasson, il finit par admettre qu'il faudrait que les producteurs laguiolais et thiernois puissent en bénéficier :




   J'ai pris soin de mettre l'accent sur ce passage parce qu'il me semble que les tiraillements observés en juillet dernier, au moment de l'examen du projet de loi sur la consommation, sont liés au fait que, peut-être, certains producteurs aveyronnais sont devenus gourmands et voudraient exclure les fabricants thiernois de l'IGP.

   On peut toutefois regretter que la seule voix aveyronnaise soit celle de Thierry Moysset. Les auteurs n'ont pas pris la peine d'interroger les artisans qui travaillent eux aussi à Laguiole. Du coup, on sent bien le parti pris du film, tout à la gloire de l'Auvergne.

   La suite nous replonge dans le Puy-de-Dôme. On nous présente des images d'archives, parfois surprenantes :

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   La scène immortalisée par le photographe se passe dans un moulin. Les ouvriers sont des émouleurs... et l'animal présent sur les jambes de l'un d'entre eux n'est pas là par hasard !

   Vers la fin, on retrouve quelques figures de la coutellerie thiernoise lors d'une réunion de leur association, fondée pour défendre leur artisanat. Bilan : le couteau de Thiers est mieux protégé que le Laguiole.

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   La dernière partie du documentaire voit s'achever le fil rouge lancé au début : la réalisation d'un couteau spécial pour un bon client allemand... ben, oui, on est sur Arte ! C'est le moment pour les téléspectateurs de découvrir ce qu'est un bon couteau, pour l'un des ouvriers spécialisés montrés à l'écran :

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jeudi, 01 août 2013

Des conducteurs de train indélicats

   Actuellement, (presque) tout le monde est en train (!) de tomber sur le dos du conducteur du TGV espagnol qui a déraillé à l'entrée de la ville de Saint-Jacques-de-Compostelle. Il est vrai que ce zigoto était au téléphone, alors que le train était lancé à plus de 150 km/h, à environ 4 kilomètres de son arrêt, juste avant une courbe connue pour être dangereuse...

   Normalement, vu la vitesse à laquelle l'AVE (équivalent du TGV outre-Pyrénées) roulait, le chauffeur aurait dû se soucier de la décélération progressive. Mais il était au téléphone... avec un contrôleur (ce qui est interdit, sauf en cas d'urgence). Le motif de l'appel est le positionnement du train pour favoriser la sortie d'une famille dans une gare ultérieure, Pontedeume (qui précède de peu le terminus, Ferrol) :

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   J'en déduis que le train venait de Madrid, sur une ligne qui n'est que partiellement à grande vitesse :

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   A la négligence du conducteur s'ajoutent (selon Libération) deux facteurs techniques : l'écartement des voies (différent entre les voies traditionnelles espagnoles et les nouvelles voies à grande vitesse, de gabarit européen) et le contrôle automatique de la vitesse, qui ne pouvait pas fonctionner ici. Pour l'instant, personne n'ose évoquer une éventuelle défaillance du matériel, soit au niveau du train, soit au niveau des rails.

   Mais les catastrophes ferroviaires ne surviennent pas qu'en Espagne. Les conducteurs indélicats existent aussi en Argentine, où l'on a décidé de filmer la cabine de tête des trains. Grâce à France TV, on découvre quelques spécimens gratinés. En voici un qui pique un petit somme au volant :

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   Mais le deuxième fait encore plus fort. On le voit successivement pianoter sur son téléphone portable...

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    ... puis entamer la lecture d'un bouquin, le tout alors que le train roule, comme le confirme la vue située en bas à droite des images, qui correspond à ce que filme une caméra externe :

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   Le troisième de la bande s'est cru plus fûté que les autres ; il a décidé de carrément obstruer l'objectif de la caméra interne (il est sur le point de poser une veste dessus) :

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   Et dans l'Aveyron ? Il est vrai que les trains y circulent assez lentement et que l'on ne risque pas d'y voir un TGV avant longtemps. Cela n'empêche pas certains conducteurs d'en faire à leur aise, sur la ligne Rodez-Toulouse. Il y a plusieurs types de fautifs.

   Dans la catégorie "ex-jeune branleur qui n'a pas fini de mûrir", il y a celui qui arrive à la bourre, à tel point que c'est le contrôleur (ou la contrôleuse... au fait, on dit "chef de bord" maintenant) qui lui a ouvert la porte et préparé la cabine. Du coup, le train démarre en retard, ce qui contraindra celui qui arrive en face à patienter davantage à l'une des gares intermédiaires. (N'oublions pas que, sur cette ligne, nous circulons sur une voie unique.) Au pire, il roulera un peu plus vite entre les arrêts, quitte à faire un peu tanguer le convoi.

   Dans la catégorie "mon estomac d'abord", il y a celui qui ne démarre pas le train sans avoir emporté de quoi se sustenter non pas en fin de trajet, non pas à l'occasion d'un arrêt prolongé, mais pendant que le train roule. Ainsi, un jour, j'ai vu entrer dans la cabine du conducteur un drôle de personnage, muni d'un plat de pâtes, qu'il est allé jeter, vide, à Baraqueville. Trop dure, la life !

   Dans la catégorie "je suis un drogué et je vous emmerde", il y a celui qui, pendant que le train roule, ouvre la fenêtre de sa cabine pour s'en griller une, peinard, permettant ainsi aux passagers assis derrière de profiter un peu de ces émanations cancérigènes.

   Dans la catégorie "victime de la mode", il y a celui qui ne peut pas passer un quart d'heure sans consulter son téléphone portable, voire passer un coup de fil. Quand on est assis dans la voiture de tête, juste derrière la cabine du chauffeur, on entend parfois s'élever des voix, lorsqu'un contrôleur tape la discute avec le roulant. Mais il m'est arrivé d'entendre une seule voix, alors qu'aucun contrôleur n'était présent.

   Ces écarts ne sont l'oeuvre que d'une minorité... et je conçois qu'il puisse arriver à chacun de fauter (personne n'est parfait). Mais, étant donné que ces conducteurs ont la vie de leurs passagers entre les mains, il serait bon qu'ils fassent preuve d'un peu plus de professionnalisme.

jeudi, 04 juillet 2013

Le Joli Mai

   Ce documentaire de Chris Marker (et Pierre Lhomme) a droit à une seconde vie, 50 ans après sa sortie. D'après le dossier de presse disponible sur le site du distributeur Potemkine, au moment de sa restauration, le film a été remonté selon les souhaits du réalisateur. Cela donne une oeuvre étonnante, de près de 2h20, consacrée aux Parisiens croisés en mai 1962.

   Cela commence fort, avec un vendeur-repasseur de costumes grande gueule, qui ne pense qu'au pognon et se plaint de sa femme :

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   A l'image de presque toutes les autres personnes montrées à l'écran, il se montre très réservé dès qu'il est question de l'actualité immédiate, en particulier de la guerre d'Algérie. Le plus étonnant est que, lorsqu'il évoque la possibilité de faire sauter ses contraventions, il mentionne les noms de deux politiques situées aux extrêmes, le communiste Maurice Thorez et l'ex-poujadiste Jean-Marie Le Pen (eh oui, déjà !).

   Ensuite, on rencontre un cafetier, qui a pas mal bourlingué, mais c'est la séquence tournée place de la Bourse qui m'a le plus marqué. Marker commence par interroger deux adolescents en costume, avant d'être interrompu par un courtier moustachu qui semble jaloux qu'on ne donne pas la parole aux adultes. Suit un début de conversation entre des vieux routiers de la finance, qui font le lien entre la récente nomination de Georges Pompidou au poste de Premier ministre et la banque Rothschild.

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   Et voilà qu'on nous présente des inventeurs. L'innovation est déjà au coeur de l'époque. Il est notamment question d'automobile, avec un intervenant fier d'avoir créé une sorte de stabilisateur... démonstration à la clé, sur un circuit, caméra à bord ! On notera le souci du détail du caméraman, qui, alors que s'exprime l'inventeur, détourne l'objectif de son visage pour suivre les pérégrinations d'une araignée sur son costume !

   Petit à petit, on se rend compte que le travail de montage (images et son) a dû être considérable. On en a encore la preuve avec la séquence des amoureux, tout timides et tout gentils, sur les mains desquels la caméra s'attarde. Mais, au final, ils semblent enfermés dans leur bulle, un peu égoïstes peut-être.

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   Ah, oui, j'oubliais : entre les entretiens, on peut entendre des textes dits par Yves Montand, dont une chanson nous est proposée à l'entracte. La musique d'accompagnement du film est de Maurice Legrand.

   Le couple d'amoureux nous est rpésenté en alternance avec une séquence de mariage, où les adultes mûrs se défoulent un max, pendant que les jeunes époux semblent un peu engoncés (surtout la mariée). On voit notamment une honorable mère de famille s'enfiler du champagne au goulot et ensuite montrer à quel point elle kiffe la life !

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   Plus conceptuelle est la conversation avec deux ingénieurs, qui voient loin en terme d'organisation du travail. Cependant, ceux-ci ne se rendent pas compte que, si l'on peut réaliser les mêmes tâches plus rapidement, ce n'est pas forcément du temps de loisir que vont gagner les salariés, mais aussi du chômage... Cette séquence est émaillée de clins d'oeil, avec des gros plans de chats, animaux que Chris Marker aimait tout particulièrement.

   D'autres bestioles apparaissent à l'écran, comme les colombes prisées par la bourgeoisie. Mais c'est à une chouette que le caméraman s'intéresse tout particulièrement. Dans une scène étonnante, on voit l'un de ces rapaces se laisser tendrement caresser, comme le ferait un chat... saisissant !

   L'une des séquences d'intérieur fait intervenir des jeunes femmes de la "bonne société". A l'image d'autres intervenantes, elles tiennent des propos qui ont de quoi faire bondir les moins ardentes des féministes. Si l'on ajoute à cela la répartition sexuelle des rôles qui est visible à différentes occasion, on réalise à quel point la France était à l'époque un pays patriarcal.

    A l'occasion, on est aussi étonné par certains personnages, comme cette costumière agoraphobe, qui vit repliée sur elle, dans son appartement, en compagnie de son chat qu'elle habille comme une poupée :

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   A l'autre bout de la société, les pauvres vivent parfois dans des conditions insalubres. Je crois avoir entendu, dans le commentaire du début, qu'environ 20 % des logements n'avaient pas d'électricité et 12 % d'eau courante... De véritables bidonvilles existent, plutôt en banlieue il est vrai. Pour y remédier, on construit de grands ensembles.

   Un autre portrait marquant est celui du garagiste peintre. On sent chez lui l'influence du surréalisme, du cubisme et d'un artiste comme Fernand Léger, même s'il affirme ne s'inspirer de personne. Je trouve qu'il parle assez bien de ses toiles. Mais la vision en noir et blanc ne leur rend pas honneur.

   Et puisque les passants rencontrés dans la rue ne veulent pas trop parler politique, Chris Marker a suscité des entretiens qui donnent la parole à des personnes que l'on n'entend jamais en France à l'époque.

   L'un d'entre eux est présenté comme étant un Dahoméen (on dirait aujourd'hui un Béninois), avec ses initiales. Il est beau gosse et s'exprime très bien en français :

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   Ayant connu l'Afrique Occidentale Française et différentes régions de métropole, il compare le comportement des Français qu'il a rencontrés, les pires étant pour lui les coloniaux. Il raconte sa surprise devant les "Français moyens" qui peuplent la métropole... et sa rage devant la version de l'histoire qui est enseignée. Il ne semble toutefois pas habité par la rancoeur.

   Tout aussi passionnante est la séquence avec un jeune Franco-algérien. (N'oublions pas que les Accords d'Evian ont été signés en mars 1962.) Là encore on nous propose un "bon client" : un type intelligent, calme, qui présente bien :

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   Cet entretien est passionnant à deux niveaux. Il montre le conflit qui peut naître, au sein d'une usine, quand un ouvrier "français de souche" jalouse le "basané" qui a plus de qualification que lui... mais qui finit par partir. Ensuite, le jeune homme raconte une histoire bien pire, qui l'a placé sous la poigne d'agents de la DST. A cette occasion, on a un aperçu des baraquements précaires dans lesquels loge la population immigrée.

   Notons que les seules images qui n'ont pas été tournées en mai 1962 évoquent les événements de Charonne et la seconde manifestation qui a suivi.

   Histoire d'alléger un peu l'ambiance, Marker nous offre aussi de "belles images" de la capitale, quelques-unes prises de nuit. Cela ne l'empêche pas de conclure par une séquence moins joyeuse, consacrée aux prisons :

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   Voilà. Au départ, vu la longueur du film, j'étais un peu réticent à aller le voir. Mais c'est finalement un documentaire de grande qualité, tant au niveau des images que sur le fond. C'est foisonnant, parfois drôle, parfois terrible.

   P.S.

   La ressortie de ce film donne à l'aspect climatique une profondeur inattendue. En effet, mai 1962 fut un mois pourri, avec une température moyenne de 12,5 °C et un faible ensoleillement.

mardi, 11 juin 2013

Une prison de rêve

   Hier lundi, la ministre de la Justice Christiane Taubira est venue inaugurer la nouvelle cité universitaire maison d'arrêt du Grand Rodez, à Druelle. Au passage, elle est revenue sur les polémiques qui entourent la mise en service du bâtiment.

   Ainsi, la Garde des Sceaux a justifié l'installation des brumisateurs, qui permettraient d'éviter l'échauffement des esprits, en particulier en période caniculaire. On voit par là que la ministre ne sait visiblement pas que le climat qui règne dans cette partie de l'Aveyron n'est pas tout à fait le même que celui de sa Guyane natale. Ajoutons que le site de la prison, le Puech de Grèzes (qui touche la zone artisanale de Bel-Air), se trouve à presque 600 mètres d'altitude (plus de 1 900 pieds, selon Google Earth) à peine moins que le sommet de Rodez...

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   Sa visite des lieux a été amplement médiatisée. Un diaporama lui est consacré, sur le site de Centre Presse. Il est pourtant une photographie que seuls les lecteurs (acheteurs) de la version papier du quotidien auront vue, celle-ci :

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   D'autres images des cellules sont proposées, certaines permettant de découvrir le coin douche-WC. Mais seule celle ci-dessus permet de voir la télévision à écran plat et le petit réfrigérateur dont chaque pièce est équipée. Curieux, non ?

   Avec tout cela, j'ai failli oublier : le coût de la chose. Au début, il était question de 12,5 millions d'euros. Les médias aveyronnais ont parlé de 20 millions au total, soit une augmentation de 7,5 millions d'euros, qui représentent un surcoût de plus de 50 %. Dire que les contribuables n'ont même pas eu droit de visiter l'établissement !

mardi, 07 mai 2013

Entrée du personnel

   Ce court documentaire (d'environ 1 heure) est consacré aux employés de plusieurs abattoirs de l'Ouest de la France métropolitaine. Il résulte de l'entrecroisement d'images tournées devant et dans les usines et de témoignages recueillis ailleurs, enregistrés et réinterprétés par des acteurs. Visiblement, ce procédé s'est imposé pour éviter que certains salariés ne soient victimes de représailles.

   Globalement, quel que soit le poste occupé, quel que soit le sexe de l'employé, le travail est présenté comme répétitif, souvent pénible physiquement, usant à la longue.

   Le montage nous fait d'abord remonter la chaîne, de l'emballage avant expédition à l'entrée des animaux avant leur exécution. On ne nous montre toutefois pas frontalement la mise à mort. Le film s'arrête juste avant ou montre le moment qui suit immédiatement.

   Ceci dit, ce que l'on voit à l'écran n'est pas horrible. A la différence des établissements cités dans un scandale (en 2012), ces abattoirs semblent bien entretenus, fonctionnels, aux normes. De temps à autre, on a toutefois l'impression que la présence de la caméra incite certains employés à systématiquement nettoyer leurs outils (entre deux usages) et à faire preuve d'un zèle excessif dans le nettoyage des équipement.

   J'ai trouvé très réussie la superposition des images et des témoignages réinterprétés. On regrette presque que le film s'interrompe aussi vite.

vendredi, 03 mai 2013

La Saga des Conti

   J'ai un peu hésité à aller voir ce documentaire, consacré à la lutte des salariés de l'usine de pneumatiques Continental de Clairoix (à côté de Compiègne) pour deux raisons : je craignais le film militant lourdingue et j'avais l'impression que cela risquait d'être un peu funèbre.

   ... eh bien j'avais tort car, même si c'est incontestablement une oeuvre engagée, elle n'est ni pesante ni plombée par le pessimisme. C'est vivant parce que c'est filmé de l'intérieur, avec empathie. C'est de plus souvent drôle, les personnages principaux ne se prenant pas (trop) au sérieux. Si un large éventail des grévistes nous est proposé, le choix de suivre plus particulièrement quelques meneurs s'avère payant.

   Pendant l'essentiel du film, on est dans les pas d'un sympathique délégué CGT, Xavier Mathieu, à la fois brut de décoffrage et rusé, avec une "gueule" grande comme ça :

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   Il est très souvent accompagné d'un autre cégétiste emblématique du mouvement, Didier Bernard, le rocker au grand coeur, tatoué et "piercé" (à l'époque) :

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   On voit moins les syndicalistes de la CFDT et de la CGC (les cadres). C'est le représentant de la CFTC qui est principalement chargé d'incarner la voix modérée à l'écran... et il est un peu caricatural. On sent donc où vont les sympathies du réalisateur.

   Ces syndicalistes sont épaulés par un retraité, qui se joint à leur mouvement, Roland Szpirko :

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   Son intégration ne s'est visiblement pas faite sans heurt, même si c'est à peine abordé par le film. On reconnaît au bonhomme une compétence indéniable dans l'organisation d'un mouvement social, mais son appartenance à Lutte Ouvrière fait tiquer certains salariés de l'usine.

   Une fois la fine équipe présentée, on la voit en action. Bon, alors, ça fait quoi des salariés revendicatifs ? Ben, ça manifeste. On suit donc cette troupe très solidaire (la grande majorité des 1 200 personnes menacées par la fermeture a participé aux actions), d'abord à Compiègne, puis à Reims, à Paris, à Sarreguemines (où l'usine, moins moderne que celle de l'Oise à l'époque, n'était pas menacée parce que moins coûteuse...)... et même en Allemagne !

   On remarque (proximité de Compiègne oblige) que les manifestants ont eu tendance à se rassembler autour de statues de Jeanne d'Arc (copieusement garnies d'autocollants à l'occasion... shocking !) :

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   Ici, c'était à Compiègne, près de la statue équestre. Plus loin dans le film, il me semble que l'on voit l'autre statue (locale) de la Pucelle :

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   Je pense aussi que la grande manifestation parisienne est passée par la place saint Augustin, où se trouve une statue identique à celle de Reims :

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   Pour la petite histoire, signalons que le bourg de Clairoix, en périphérie de Compiègne, où se trouvait l'usine Continental, fut sans doute le lieu de détention de Jeanne d'Arc après qu'elle a été faite prisonnière par les troupes de l'infâme Jean de Luxembourg. (Le château a disparu à la fin du Moyen Age.)

   Ironie de l'affaire : quand j'ai recherché sur la Toile des traces vidéo de ces manifestations, j'ai notamment visionné un enregistrement de la manifestation parisienne. Voici ce qui est apparu à l'écran :

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C'est ce qui s'appelle de la publicité ciblée !

   La partie la plus émouvante est celle qui décrit l'organisation et le déroulement de la manifestation à Hanovre, avec les employés allemands. Ou comment les syndicalistes redécouvrent l'internationalisme... que les financiers mettent en pratique depuis des décennies (à leur profit). Ce fut aussi l'occasion de pratiquer une langue étrangère et d'apprendre un slogan fédérateur :

"Zu-sammen, zu-sammen, ja ! ja !"

   La partie la plus tendue fut celle des négociations, qui ont mis beaucoup de temps à démarrer, tant on a essayé d'enfumer les salariés... jusqu'au bout. Dans cette histoire, les pouvoirs publics français ont été d'une inefficacité (voulue ?) lamentable.

   La fin est apaisée. Une partie des objectifs ont été atteints. Mais, sur le fond, au-delà du succès du mouvement, il faut établir un constat d'échec : l'usine a fermé et de nombreux employés n'ont pas retrouvé de situation stable.

   P.S.

   Je recommande vivement ce documentaire aux salariés de l'usine Bosch d'Onet-le-Château.

vendredi, 12 avril 2013

4 ou 4,5 jours de classe ?

   D'après un article paru dans Midi Libre jeudi 11 avril, la majorité des maires aveyronnais ont choisi de n'appliquer la réforme Peillon qu'à la rentrée 2014. Sur les 228 communes possédant au moins une école, seules 29 vont (re)passer à la semaine de 4,5 jours en 2013 :

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   Sans surprise, certains territoires, dont les élus penchent à gauche, ont décidé d'appliquer la réforme avec zèle :

- 4 des 8 communes du Grand Rodez (accompagnées de Salles-la-Source, qui vit dans son orbite)

- la majorité des communes du canton de Naucelle

- une bonne partie du Saint-Affricain (presque toute la communauté de communes)

- la majorité du bassin decazevillois (à l'exception notable d'Aubin)

   Quelques communes (comme Najac) se retrouvent isolées dans leur démarche.

   Un autre espace homogène se détache, dans le nord. Il s'agit du Carladez qui, s'il a récemment élu un conseiller général classé à gauche, n'en reste pas moins une terre encore marquée par un certain conservatisme politique. Il est possible que les choix en matière d'investissement culturel aient déterminé la position des élus locaux : depuis une bonne décennie, le Carladez se fait remarquer par un indéniable dynamisme, qui tente d'associer ruralité, tourisme et culture au sens large. Ce territoire est donc déjà bien outillé pour s'adapter aux changements induits par le passage à la semaine de 4,5 jours. Il dispose sans doute du volant d'activités et des animateurs susceptibles d'être orientés vers le jeune public qu'il faudra "occuper" intelligemment pendant le petit créneau quotidien libéré par la reventilation des heures de cours.

   Je me suis aussi demandé si l'on pouvait établir un lien entre ces communes pionnières et celles qui sont sorties du paysage scolaire, les 76 (sur 304) ne possédant plus d'école (marquées par des pointillés bleus) :

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   Une partie de ces communes forment des blocs assez homogènes, où les enfants (scolarisés ailleurs) ne connaîtront la réforme qu'en 2014 (aucune commune coloriée en rouge ne se trouvant à proximité). On remarque qu'elles sont situées dans des bastions de la majorité départementale (à proximité de Laguiole, Entraygues-sur-Truyère et Saint-Geniez-d'Olt). Les autres communes "a-scolaires" se trouvent dans l'orbite d'un pôle qui va passer aux 4,5 jours dès septembre 2013 (autour de Decazeville, Naucelle et Saint-Affrique principalement).

   Il reste un cas particulier, que j'en encadré en vert : le pôle du sud-est du département, centré sur la communauté de communes de Millau-Grands-Causses. C'est le seul territoire, où la gauche est très présente, dont les élus ont choisi de différer l'application de la réforme. L'unique commune s'engageant dès 2013 est Verrières (connue notamment pour son viaduc, qui précède celui de Millau-Creissels)... qui ne fait pas partie de la communauté de communes. Signalons qu'elle est rattachée au canton de Saint-Beauzély, et non à l'un des deux incluant une partie de Millau.

samedi, 06 avril 2013

Zidane à Rodez

   Pour les médias et pas mal de fans de football, c'est l'événement du week-end : l'ancien champion du monde est venu animer une soirée-spectacle à l'amphithéâtre de Rodez. (Il va de surcroît donner le coup d'envoi de la rencontre opposant les Ruthénois aux Biterrois.) Cette manifestation de soutien au club de football local, en situation délicate, se situe dans le prolongement de l'annonce de l'entrée de Zinedine Zidane dans l'actionnariat du RAF (Rodez Aveyron Football). Il aurait apporté 10 000 euros à l'occasion de l'augmentation de capital décidée pour sauver le club, aux finances chancelantes.

   Autant son intervention a pu susciter l'enthousiasme, autant elle a pu aussi déchaîner les commentaires hargneux... à raison ? Les râleurs de base soulignent que la somme investie est une miette pour celui qui gagnerait environ 5 millions d'euros par an. Certes, mais rien ne l'obligeait à faire ce geste. Même si sa belle-famille a ses attaches juste à côté de Rodez, même s'il arrive à l'ancien champion du monde de venir passer un peu de bon temps, tranquille, dans l'Aveyron, pourquoi serait-il allé mettre 10 000 euros dans un club qui se cassait la figure ?

   Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il réalise ce genre d'investissement. En effet, il y a trois ans, en compagnie de Bixente Lizarazu, il a apporté la même somme au club d'Evian-Thonon, dont le principal sponsor est l'entreprise Danone, dirigée par Franck Ribout, présenté comme un ami de Zizou... mais qui est surtout l'un de ses principaux employeurs : depuis 2004, Zidane est l'ambassadeur mondial de la marque. Il participe activement au mécénat (pas forcément désintéressé) de Danone : il parraine (depuis une dizaine d'années) la Danone Nations Cup et a intégré le conseil d'administration de danone.communities. Il a même soutenu un projet d'investissement du groupe en Algérie. Que l'amitié qui lie les deux hommes soit grande ou pas, on imagine mal l'ancien footballeur refuser de faire un "petit geste" en faveur de la nouvelle "danseuse" de son patron.

   Il ne semble pas possible d'établir un tel lien à propos de l'investissement dans le RAF. Dans le Grand Rodez, c'est plutôt Lactalis (le rival de Danone) et les groupes coopératifs qui dominent le secteur laitier. Alors, il est tout simplement possible que, sollicité pendant sa formation à Limoges par l'un des membres du staff du RAF, il ait été convaincu... et tenté par un "beau geste" finalement peu coûteux.

   P.S.

   Faut-il voir un lien de cause à effet ? Alors qu'en début de saison le RAF se traînait dans les profondeurs du classement de CFA (groupe C), depuis l'annonce du sauvetage financier, les résultats sont devenus nettement meilleurs (jusqu'à ce soir...). Alors, pourquoi se plaindre ?

lundi, 11 février 2013

Hypocrisie départementale, communale... et scolaire

   La politique politicienne est de retour, si tant est qu'elle ait jamais disparu du premier plan. Quand vous greffez là-dessus un poil de corporatisme, cela donne une situation abracadabrantesque.

   La question des rythmes scolaires, dans le primaire, fait l'actualité depuis un petit moment. Le ministre de l'Education nationale, Vincent Peillon, propose une réforme qui rétablit la semaine de quatre jours et demi... à la fureur des syndicats d'enseignants, de certains délégués des parents d'élèves et d'élus locaux plutôt classés dans l'opposition. Les déclarations des uns et des autres, telles que la presse les a publiées, sont assez péremptoires, pas très développées. L'entretien que Jean-Louis Grimal, conseiller général du canton de Salles-Curan (et maire de Curan), a accordé au Ruthénois fait exception.

   L'entrevue démarre pourtant mal, l'élu choisissant d'éluder le problème-clé, celui de l'intérêt des élèves :

"Je tiens tout d'abord à faire abstraction du bien-être de l'enfant. Ce n'est pas de mon domaine de compétence. Des chronobiologistes et des psychologues y ont travaillé."

   A première vue, on pourrait saluer cet assaut de modestie de la part de l'élu local, qui évite de se prononcer sur un sujet qu'il ne maîtrise pas. En creusant un peu, on se rend compte que cette pudeur est peut-être plus intéressée qu'il n'y paraît. Cela fait une demi-douzaine d'années (au moins) que circulent des études condamnant la semaine de quatre jours. Depuis deux ans, le propos s'est fait plus pressant : cette organisation du temps scolaire, qui satisfait les parents et enseignants soucieux en priorité de leur week-end, ne convient pas du tout aux élèves en difficulté, qui souffrent d'un programme trop dense... Mais le système peut très bien fonctionner avec quatre jours d'école... pour les élèves qui ne sont pas en difficulté. Et les autres ? Il suffit de lire la presse pour constater qu'ils échouent au collège et qu'on les retrouve, plus tard, dans la charrette des 100 000 qui quittent le système scolaire sans rien. Si les études avaient conclu à l'avantage de la semaine de quatre jours, nul doute que Jean-Louis Grimal, bien que non spécialiste, aurait pensé à s'appuyer dessus.

   La suite de son propos se veut budgétaire. Il a raison de regretter que l'Etat ait tendance à se décharger de certaines dépenses fondamentales sur les collectivités locales. (Cela ne date pas des socialistes... mais on n'entend les élus de droite que depuis 2011-2012...) La dotation compensatoire prévue par le gouvernement (de 50 à 90 euros par élève) ne devrait pas couvrir le surcroît de frais engagés par les communes, si l'on se fie à ce qu'affirme l'élu aveyronnais : il estime le surcoût à 250-300 euros par élève. Sauf que... l'association des maires de France l'évalue entre 50 et 150 euros par élève ! Voilà qui change pas mal de choses. Nombre de communes rurales (les plus pauvres, pas celles qui accueillent les périurbains en quête d'impôts locaux "allégés") devraient toucher 90 euros par élève (voire plus si le fonds de départ est augmenté, comme l'a sous-entendu Vincent Peillon).

   Résumons : les communes rurales (qui avaient fortement adhéré à la semaine de quatre jours), si elles se débrouillent bien, devraient pouvoir compenser presque intégralement le surcoût financier de la réforme. Le surplus qui resterait à leur charge serait à comparer aux économies que le passage à la semaine de quatre jours avait permis de réaliser jadis. Il resterait le problème du recrutement des intervenants extra-scolaires, qu'il faudra convaincre de venir en zone rurale. Je pense que les titulaires d'un BAFA au chômage (ou en sous-emploi) doivent être assez nombreux. Peut-être les communes devront-elles songer à fonctionner collectivement, pour faciliter les recrutements.

   L'autre clé du problème est le temps de travail des enseignants du primaire. La réforme Peillon va légèrement diminuer le temps de présence devant les élèves, en reconnaissant davantage le travail en dehors de la classe. Si, par rapport à 2008, les professeurs des écoles gardent une obligation de 24 heures de cours par semaine, les 108 heures annuelles supplémentaires (équivalant à 3 heures hebdomadaires) seront ventilées différemment, réduisant le nombre d'heures de soutien. On peut espérer que les 24 heures de cours vont être recentrées sur les apprentissages fondamentaux. Trop d'enfants sortent de l'école primaire sans maîtriser les bases, à commencer par la lecture et l'écriture. Je vous laisse imaginer ce que cela donne 10-15 ans plus tard, quand les adolescents et les jeunes adultes écrivent des CV et des lettres de motivation. Ne parlons pas de leur compréhension d'un mode d'emploi ou de leur capacité à remplir un bon de commande, ou à lire à contrat...

   Ajoutons que, de 1991 à 2008, les élèves bénéficiaient de 26 heures de cours par semaine... et même de 27 heures, de 1969 à 1991, dont 10 heures de français et 5 heures de calcul ! Faites le compte : pour un nombre de semaines équivalent, 2 ou 3 heures de moins correspondent à un peu plus de 70 ou 100 heures par an... à multiplier par cinq (le nombre d'années de scolarité dans le primaire), soit 350 à 550 heures de moins.

   Au-delà des débats sur les méthodes d'apprentissage, l'aspect quantitatif (les enfants d'aujourd'hui passent moins d'heures en classe) et distributif (un plus faible nombre d'heures est consacré aux fondamentaux, au bénéfice de ce que l'on appelait jadis les "disciplines d'éveil") de la scolarité permet de comprendre bien des choses.

   A cela s'ajoute l'engagement plus ou moins grand des enseignants. Certes, les jeunes d'aujourd'hui doivent être plus difficiles à discipliner que ceux d'il y a 30 ou 40 ans. Mais combien d'entre nous avons pu constater que tel ou tel prof était particulièrement laxiste quant à la maîtrise de l'écrit ? Récemment, une collègue de travail m'a parlé d'un professeur des écoles, beaucoup moins choqué qu'elle par la kyrielle de fautes de français commises par son fils. Le prof lui aurait déclaré que tant qu'il arrivait à comprendre ce qu'il avait voulu dire, tout allait bien ! De même, il y a quelques années, je m'étais inquiété du cas de ma nièce, qui n'écrivait pas assez bien à mon goût (ainsi qu'à celui de sa mère). Figurez-vous que son enseignante ne prenait pas la peine de corriger toutes les fautes de son cahier ! Un changement de professeur (l'année suivante) a eu d'heureuses conséquences pour la jeune fille.

   Mais revenons aux élus locaux hostiles à la semaine de quatre jours et demi. Ils sont issus en général de la classe moyenne, celle qui peut de permettre de financer des activités extra-scolaires pour ses enfants (ou petits-enfants)... et celle dont les rejetons sont moins touchés par l'échec scolaire. Pour ces enfants-là, l'étalement des cours sur 4 ou 5 jours a peu de conséquences. Mais pourquoi se soucier des autres, après tout ?

   Dans la suite de l'entretien, Jean-Louis Grimal réaffirme ses réticences vis-à-vis de la réforme des collectivités locales et d'une loi interdisant tout cumul des mandats pour les élus nationaux. Plus nuancé que Jean-Claude Luche, le président du Conseil général, il reconnaît certains mérites aux projets, mais, sur le fond, il me semble d'assez mauvaise foi quand il s'exprime sur le binôme homme-femme que chaque super-canton devrait désigner. Et je ne suis pas du tout d'accord avec ce qu'il dit sur l'enracinement des députés et sénateurs. Rien ne les empêche d'exercer, à titre bénévole (comme des milliers d'autres, qui n'ont pas la chance de percevoir une indemnité parlementaire), la fonction de conseiller municipal, un poste idéal pour garder à l'esprit les enjeux locaux. Et puis, entre deux séances à l'Assemblée ou au Sénat, ils peuvent revenir faire un tour dans leur circonscription, même si aucune élection n'est en vue... n'est-ce pas ?

lundi, 04 février 2013

Yves Censi et le "mariage pour tous"

   Ce week-end, les débats ont été agités à l'Assemblée nationale, pour le début de l'examen du projet de loi sur "l'ouverture du mariage aux couples de personnes du même sexe". L'article 1 a fait l'objet d'échanges parfois houleux, qui ont débouché, samedi, vers 12h30, sur un premier vote d'une grande portée symbolique :

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   Regardez bien le nombre de suffrages : 346 exprimés sur 348 votants... et 575 députés ! (Deux sièges sont actuellement vacants.) Au vu du résultat, on se rend compte qu'en dépit de l'aspect "clivant" du scrutin, certains groupes n'ont pas fait le plein ce samedi. Sur les 343 députés de gauche et 225 de droite, 249 ont voté l'article 1 et 97 s'y sont opposés. Cela voudrait dire qu'en gros, les trois-quarts des députés de gauche étaient présents, contre moins de la moitié de ceux de droite. Comme c'est étrange !

   ... en fait, non : certains des députés manquants semblent avoir préféré arpenter les rues des villes de leurs circonscriptions, comme le Parisiano-aveyronnais Yves Censi, que l'on a vu samedi, en début d'après-midi, au centre de Rodez, dans la manifestation des opposants au projet de loi.

   Comme l'a fait remarquer le quotidien Centre Presse, la place d'un député de l'opposition n'était-elle pas au Palais Bourbon ?

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   Ou alors, peut-être que le député (contrairement à nombre des papys qui ont battu le pavé ruthénois samedi) ne voyait pas d'inconvénient à ce que le premier article, celui qui valide le mariage entre personnes du même sexe, soit voté. (Ou bien il a voulu éviter de courir le risque que, plus tard, on lui reproche un vote contre, quand ce mariage sera entré dans les moeurs.) On peut supposer qu'il sera ostensiblement présent lorsqu'il s'agira de se prononcer sur l'adoption d'enfants ainsi que la gestation pour autrui, deux sujets qui font moins consensus dans l'opinion.

   N'oublions pas non plus qu'Yves Censi songe à la mairie de Rodez... et pas qu'en se rasant. (Sinon, il y penserait rarement !) Il n'a pas raté l'occasion de montrer sa bobine dans le chef-lieu aveyronnais... ce qui a sans doute permis à nombre de passants de le voir en chair et en os pour la première fois depuis des années ! Mais je suis mauvaise langue...

vendredi, 04 janvier 2013

L'affaire DSK "inoubliable"

   Les téléspectateurs de TF1 ont peut-être ressenti un effet de "déjà vu" mercredi soir, lorsqu'ils ont regardé le troisième épisode de la première saison d'une nouvelle série américaine, Unforgettable ("Inoubliable", en français).

   En effet, la (charmante) enquêtrice épaule la police dans une affaire délicate. Dans la chambre d'un hôtel assez classieux, on a retrouvé un homme mort, en peignoir :

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   Voici ce à quoi ressemble l'arme du crime :

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   Bande de cochons... Je sais à quoi vous avez pensé ! C'est une oeuvre d'art, voyons !

   Dans un premier temps, la police pense que c'est une femme de chambre qui a fait le coup :

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   Sur cette image de la vidéosurveillance, on la voit sortir en courant de la chambre de la victime, bouleversée, la blouse défaite. Quand on finit par entendre son témoignage, le doute n'est plus possible :


   Ainsi, après New York, Unité Spéciale, une nouvelle équipe de scénaristes série s'est donc inspirée de l'affaire du Sofitel pour écrire l'intrigue de l'épisode d'une série policière.

   Plusieurs différences sont toutefois à relever. Tout d'abord, la "rencontre" entre les deux principaux protagonistes se termine de manière plus dramatique pour l'homme que pour la femme de chambre (qui a sans doute échappé au viol). De plus, la tentative d'escroquerie évoquée dans la suite de l'épisode (vision complotiste de l'affaire) ne porte que sur 200 000 dollars (à peine plus de 150 000 euros au cours d'aujourd'hui). L'homme était toutefois prêt à payer... comme celui dont on pense qu'il a fini par lâcher au moins 6 millions de dollars pour mettre fin aux poursuites civiles. Si, dans les deux affaires, la jeune femme est aidée par un autre homme, il s'agit ici d'un Blanc. Notons enfin que la femme de ménage est originaire de République Dominicaine et non de Guinée, comme Nafissatou Diallo. (Aux Etats-Unis, les Hispaniques sont dans une situation proche des immigrés africains en France.)

   Revenons un peu sur cette nouvelle série, pour terminer. Elle est distrayante, sans plus. Les fans de FBI : portés disparus y retrouvent avec joie Poppy Montgomery, dont on peut souligner l'évolution. Dans FBI, elle incarnait une jolie et gentille blondasse, qui servait un peu trop de faire-valoir aux acteurs masculins, notamment à Anthony LaPaglia. Ici, elle tient le rôle principal... et elle est rousse :

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   Ce changement d'apparence me semble symptomatique des idées préconçues des scénaristes américains : la blondeur est associée, chez une femme, à un caractère plutôt effacé et la rousseur à un fort tempérament. On retrouve cette dichotomie dans une autre série (géniale, celle-là), Fringe, à travers les deux Olivia Dunham, incarnées par la même actrice (australienne, comme Poppy Montgomery, tiens donc !), Anna Torv :

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   L'Olivia de "notre" monde est la blonde, la complexée, la torturée. La rouquine est l'Olivia du monde parallèle, plus rentre-dedans... y compris avec les mecs.

   Il semble que les scénaristes d'Unforgettable se soient inspirés de ce personnage pour construire celui de Carrie Wells : atteinte d'hypermnésie, elle possède en quelque sorte un super-pouvoir, qui la rend très utile dans une enquête policière. Elle est aussi tiraillée par un drame de son enfance, qu'elle tente d'élucider. Reste qu'ici, les ambitions sont plus modestes : il n'est pas question de sauver le monde, juste d'élucider des meurtres.

lundi, 24 décembre 2012

La Poste à Onet-le-Château

   La commune d'Onet-le-Château qui, jusqu'à présent, était dotée de deux bureaux de Poste de plein exercice, n'en aura plus qu'un à partir de 2013. En échange de ce sacrifice, l'entreprise (encore) publique (paraît-il) ouvre deux relais chez des commerçants locaux, l'un aux Costes Rouges (quartier populaire qui perd son bureau), l'autre place des Rosiers (dans le "vieux" coeur urbain, où la population est assez mélangée). Voici la situation actuelle :

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   Je me suis appuyé sur Google Maps pour construire cette carte. Les bulles contenant une lettre désignent l'emplacement d'une structure de La Poste. Le C est situé aux Costes Rouges, une colline un peu éloignée du reste de la ville, mais assez bien reliée. Le B désigne un centre de traitement du courrier. Le A est situé place des Rosiers. En rouge, j'ai souligné grosso modo l'emplacement de La Baleine, le théâtre municipal à proximité duquel le nouveau bureau va ouvrir. On espère qu'il sera vaste et que l'amplitude horaire sera grande, pour compenser la perte des deux autres.

   Que penser de cette décision ? D'abord qu'elle va surtout compliquer la vie des habitants des Costes Rouges, ceux du quartier des Quatre-Saisons étant plus proches. Mais il y a des arrêts de bus à proximité... et c'est une zone en plein essor. On constate toutefois que le service public se rapproche plutôt des quartiers bourgeois... Merci la gauche !

   Onet-le-Château est tout de même la quatrième commune du département, en population (elle compte environ 11 000 habitants). C'est aussi l'une des plus vastes : 40 km², près de quatre fois la superficie de celle de Rodez. L'ouverture de deux relais-commerçants est à moitié satisfaisante. Incontestablement, l'amplitude horaire va être plus grande. C'est un plus pour le retrait des colis et des courriers recommandés (surtout quand le facteur a pris la détestable habitude de ne même pas vérifier que la personne est chez elle avant de déposer le petit billet dans sa boîte aux lettres... mais c'est une autre histoire). Se pose néanmoins un problème de confidentialité. On n'a pas forcément envie de réaliser des opérations financières, mêmes modestes, devant un (e) commerçant (e) qui connaît tout le monde dans le quartier. Dans les campagnes, on est déjà confronté à ce phénomène. Quelles que soient les qualités humaines du tenancier, un bureau de tabac n'offre pas la même discrétion qu'un guichet. Sur ce coup-là, il me semble que la mairie d'Onet s'est fait forcer la main par La Poste. Que n'aurait-on pas dit si cela avait été une majorité UMP qui avait procédé ainsi ?

   Ajoutons que les plus anciens se souviennent de l'existence d'un guichet automatique de La Poste, à l'intérieur du centre commercial, juste à l'entrée de l'hypermarché Géant (c'est le petit carré bleu placé sur le plan issu de Google Maps - voir plus haut). Lors d'une première phase de travaux, ce guichet avait été supprimé, remplacé par des bureaux commerciaux (dont l'objectif est de refourguer un maximum de cartes aux clients). Par contre, une autre banque (en vert ci-dessous) avait obtenu de s'installer sur le parking même de l'hypermarché...

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   Passons à présent à la manière dont la presse locale a rendu compte de cette information. Il en a été question à deux reprises : le 7 décembre, quand l'annonce a été faite, et autour du 20 décembre, après la tenue de la dernière séance du Conseil municipal d'Onet, qui a entériné la décision.

   Sur le site de Midi Libre, on peut lire le compte-rendu de la correspondante de Centre Presse, dont la majorité est consacrée à la question des bureaux de Poste. Elle évoque les réserves (voire oppositions) suscitées par le projet, jusque dans la majorité municipale. (Un conseiller a dû se souvenir qu'il avait voté NON, en 2005, au référendum sur le traité constitutionnel européen, dont l'application menaçait l'existence des services publics "à la française". C'est exactement ce qu'il se passe aujourd'hui...)

   Certains seront peut-être étonnés de constater que c'est dans Le Nouvel Hebdo, réputé franchement de droite dès qu'il  est question d'évoquer la gestion de la municipalité Geniez, que l'on peut sentir le plus grand désir de maintenir le service public de proximité :

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   Je m'autorise à penser que l'installation du nouveau bureau à côté de La Baleine a dû faire enrager l'auteur des lignes, qui ne manque jamais une occasion de fustiger cet investissement municipal, qui est pourtant (à mon avis) bien plus utile à la collectivité que le futur musée Soulages ne le sera (directement ou indirectement) aux Ruthénois.

   La surprise est venue de la presse classée à gauche. Dans Le Ruthénois de cette semaine, on peut lire un article qui est le quasi-frère jumeau de celui publié le 7 décembre dernier dans La Dépêche du Midi :

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   Notons que, si les photographies illustrant les deux papiers ont visiblement été prises à quelques secondes d'intervalle, dans les deux cas, les élus tirent une tronche de dix kilomètres... étonnant, alors que l'on est censé annoncer une excellente nouvelle !

   J'ai souligné le titre en rouge, parce qu'il a l'honnêteté de présenter le texte qui suit comme émanant de La Poste, ce qui n'était pas le cas dans le quotidien. Du coup, on s'étonne moins de l'aspect élogieux de certaines formules : "capacité à accompagner le développement et l'attractivité des territoires" (si la commune d'Onet continue de voir sa population augmenter, l'activité de La Poste a plutôt tendance à y diminuer...) ; "le relais Poste commerçant devrait garantir aux habitants une meilleure qualité de service"... Pourquoi ne pas le généraliser à toute la France alors ?

   Bilan ? La gauche est au pouvoir (nationalement et localement) et cela n'empêche nullement une entreprise de service public, La Poste, de poursuivre une politique d'inspiration néo-libérale.

dimanche, 09 décembre 2012

La folie du gaz de schiste

   C'est le titre d'un petit dossier publié dans le numéro de Courrier international de cette semaine :

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   Je profite de l'occasion pour dire tout le bien que je pense de ce journal. Il a le grand mérite de rendre accessibles au public francophone des articles souvent passionnants issus de la presse étrangère. Il a aussi l'intelligence d'être vraiment bi-média : seule une partie des articles de la version papier est accessible sur le site internet, où l'on peut découvrir des contenus enrichis.

   Cela commence par une "accroche" qui replace la question dans un contexte international, même si les Français en entendent désormais régulièrement parler, comme on va le voir plus loin.

   Le premier véritable article, "Alerte rouge pour Gazprom", est extrait d'un magazine économique russe. Le géant du gaz naturel voit sa puissance remise en cause par l'essor des gaz non conventionnels (plus coûteux à exploiter en Russie). Il est bien entendu question de la dépendance réciproque qui lie l'entreprise à l'Europe, alors que la construction du gigantesque réseau de gazoducs South Stream vient d'être lancée.

   La perspective semble aussi se brouiller avec l'Asie, notamment la Chine ("Vu de Chine") qui, jusqu'à présent, trouve trop chers les hydrocarbures russes... et qui possèderait d'immenses réserves de gaz de schiste:

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   Une difficulté basique se présente aux autorités de Pékin : les plus grandes réserves sont situées dans des zones arides. Quand on connaît l'importance de l'eau dans le processus d'extraction, on se dit que ce n'est pas demain que la Chine cessera d'importer du gaz...

   En complément, sur le site internet de l'hebdomadaire, on peut lire un papier qui traite des revirements des autorités bulgares, qui tantôt semblent vouloir favoriser les investissements étrangers (occidentaux) dans l'exploration des gaz de schiste, tantôt semblent se découvrir une conscience écologique très prononcée... peut-être sous l'influence de Gazprom.

   "Vu de Varsovie", c'est l'indépendance énergétique qui semble l'emporter sur tout autre considération. Rappelons que l'ancienne démocratie populaire, bien que devenue indépendante de l'ancien "grand frère" russe, lui achète encore 70 % du gaz qu'elle consomme. De leur côté, la République tchèque et la Roumanie se montrent plus prudentes vis-à-vis du gaz de schiste, sans que l'on sache vraiment si l'on doit cette attitude au désir de préserver l'environnement ou à l'influence de Gazprom... c'est-à-dire du gouvernement russe.

   Aux Etats-Unis, c'est l'optimisme qui semble l'emporter : "Le grand retour de l'industrie aux Etats-Unis". La baisse du prix de l'énergie provoquée par l'exploitation massive du gaz de schiste semble favoriser la relocalisation d'entreprises. Nombre d'experts pensent que Washington est en passe de recouvrer son indépendance énergétique. Voilà qui pourrait bouleverser la géopolitique du Moyen-Orient : Oncle Sam ne se sentirait plus obligé d'y jouer le rôle de gendarme... ce qui contraindrait la Chine à s'y investir davantage.

   Qu'en pensent les autres pays en développement ? Au Mexique, on s'inquiète des conséquences environnementales. Au Maghreb, d'après la petite revue de presse publiée par l'hebdomadaire, le débat fait rage. L'Algérie s'inquiète de l'épuisement de ses ressources conventionnelles et, en Tunisie, s'il est indéniable que le pays aurait besoin de développer le potentiel national, la corruption semble à l'oeuvre...

   L'Indonésie vit une situation paradoxale. L'exploitation incontrôlée du charbon a fait la fortune d'une mince "élite"... et permis au pays de récupérer des devises, grâce aux exportations. Mais les principaux clients sont la Chine et l'Inde, dont les achats pourraient chuter s'ils développent l'extraction de gaz de schiste. Dans un cas comme dans l'autre, il ne semble pas y avoir de "bonne" solution environnementale.

   Cela nous ramène au débat français, alimenté aussi bien par des "experts" que par des vétérans de la politique qui ne se résolvent pas à ne plus jouer de rôle. L'été dernier, Le Monde comme La France agricole se sont fait l'écho des arguments échangés. Récemment, on a beaucoup parlé des déclarations de Michel Rocard au "quotidien de référence". La semaine passée, Midi Libre s'est penché sur la question. Comme le journal a donné la parole à des scientifiques partisans de l'exploitation, il s'est attiré l'ire de certains lecteurs.

   En complément des articles, le quotidien de Montpellier a publié une carte commentée des permis d'exploration :

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   L'Aveyron a été progressivement "libéré" de la menace. (Les curieux peuvent d'ailleurs se rendre sur le site du ministère du développement durable pour observer l'évolution de la carte des titres miniers d'hydrocarbures.) L'an dernier, trois permis, dont celui de Nant (qui englobait le Larzac) ont été annulés, sans doute grâce à la mobilisation locale (et à la proximité d'élections nationales). Il en restait 61... et l'ouest de l'Aveyron était concerné par celui de Cahors. Il fait partie des sept qui ont été rejetés en septembre dernier :

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   A suivre...

jeudi, 18 octobre 2012

La pétroleuse, le couteau... et le bal des faux-culs

   Ces derniers temps, il a souvent été question du rachat des chaînes de la TNT du groupe Bolloré par Canal +. Reformatée, l'inintéressante "Direct 8" est devenue D8 (et "Direct Star" D17), renforcée par l'arrivée de quelques poids lourds (supposés) du petit écran. 

   Certains d'entre eux (des femmes) mènent la danse dans une émission d'infotainment baptisée "Le Grand 8". Au début du mois d'octobre, Audrey Pulvar a consacré sa chronique aux couteaux de qualité.

   Je ne suis pas parvenu à retrouver l'extrait de cette émission, naguère pourtant accessible sur la Toile. Au mieux, j'aboutis à ceci :

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   O surprise, d'après les personnes qui ont visionné la chose, la compagne de celui qui a en charge le rétablissement de la production industrielle nationale a fait l'éloge des couteaux allemands et... japonais. (Voilà qui la rapproche un peu du chef aveyronnais Michel Bras, qui prise lui aussi les produits nippons...) Rien n'a été dit de la production française, notamment celle de Thiers. (Je pense qu'il n'a hélas pas dû être non plus question de l'artisanat aveyronnais.)

   D8 étant une chaîne relativement confidentielle, l'information a mis du temps à se répandre. La grenade a fini par exploser, déclenchant l'ire des Auvergnats. On peut les comprendre. On peut aussi déplorer la grossièreté de certaines réactions. (Cherchez sur la Toile, vous serez édifiés. Certains gros aigris saisissent le moindre prétexte pour déverser anonymement leur bile...) Je dois avouer que, bien que ne partageant pas forcément les opinions de Mme Pulvar, j'ai apprécié sa réaction, qui, à l'inverse de la séquence de sa gaffe, est facilement accessible sur le net.

   Mais revenons aux couteaux de Thiers. Il en a été récemment question dans un article du Monde, sous la forme d'un billet du blog d'un journaliste basé en province. Si Jean-Baptiste Chastand titre son papier "A Thiers, fleuron fané de la coutellerie française, le grand désarroi des ouvriers",  l'article est consacré à l'ensemble du secteur industriel. Cependant, vers la fin du billet, on peut lire ceci :

"Les Thiernois ont choisi pour maire un chef d'entreprise, héritier d'une lignée familiale de fabricants de couteaux. Même si, comme tous ses concurrents, Thierry Déglon a délocalisé une partie de sa production en Chine, il affirme un optimisme qui détonne."

   Or, personne n'a relevé cet élément. S'agirait-il d'une erreur ? Eh bien, non ! J'ai retrouvé un article datant du 28 mai 2005 (accessible ici), dans lequel les choses étaient déjà clairement dites :

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   On peut en obtenir confirmation dans un entretien accordé par le maire de Thiers, en 2010, à un magazine auvergnat :

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   La démarche de certains couteliers locaux pourrait néanmoins inspirer leurs homologues aveyronnais. Il y a quelques années, ils ont créé un label ("Esprit de Thiers"), qui repose sur une charte de qualité. Je n'ai pas réussi à accéder au texte de la charte. C'est le savoir-faire qui est semble-t-il mis en valeur. La fabrication en France est-elle imposée ? Je ne le sais pas.

jeudi, 27 septembre 2012

Caricatures de Mahomet, le retour

   Comme en 2006, l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a rebondi sur une provocation droitière pour exprimer son anticléricalisme viscéral. En 2006, il avait pris la suite d'un quotidien conservateur, le Jyllands Posten (plus agressif envers l'islam qu'envers les autres religions). En 2012, les caricaturistes jouent avec la vague d'indignation suscitée par le (très mauvais) film islamophobe L'Innocence des musulmans. Le numéro de mercredi 19 septembre a été rapidement épuisé. J'ai pu me le procurer grâce au retirage effectué en fin de semaine :

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   A la lecture du journal, je dois dire que j'ai eu du mal à comprendre pourquoi l'affaire avait pris de telles proportions. (Je me fais la même réflexion à propos du film, un navet déjà un peu ancien, qui a sciemment été remis en avant.) La couverture est bien gentille... et ne fait qu'énoncer une vérité : il est aujourd'hui mal vu de s'en prendre aux religions minoritaires. L'association au film Intouchables est pleinement justifiée : le dessinateur a voulu critiquer une forme de "politiquement correct". Ce n'est pas une insulte au film que de dire qu'au-delà de la qualité de ses interprètes, le succès qu'il a rencontré est lié au sentiment de culpabilité éprouvé par nombre de personnes vis-à-vis des handicapés... et ce fut aussi l'occasion de tresser des couronnes à un acteur (fort sympathique au demeurant) issu d'une "minorité visible".

   La page 2 est dédiée aux caricatures anti-intégristes (et pas antimusulmanes). La déception vient du fait qu'elles ne sont pas très drôles.

   La quatrième de couverture est elle remplie de dessins dénigrant Mahomet et l'islam. On sent clairement l'intention de rabaisser, de faire mal. Mais rien n'oblige un musulman pieux à acheter ou lire cet hebdomadaire. Ces caricatures sont de surcroît d'un niveau médiocre. Une seule a vraiment éveillé ma curiosité :

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   Là, il y a du fond !

   L'intérêt est de voir comment d'autres organes de presse ont réagi. En 2011, quand le siège du journal avait été incendié (et le site internet piraté, déjà), c'est la solidarité professionnelle qui l'avait emporté sur les divergences d'opinion. Aujourd'hui, le rappel (nécessaire) de la défense de la liberté d'expression a été quelque peu étouffé par un discours plus critique à l'égard de la démarche de Charlie Hebdo.

   Le quotidien Le Monde illustre assez bien cette attitude. Le 19 septembre, le ton est donné par celui qui est devenu, à mon avis, le meilleur caricaturiste du journal, Xavier Gorce :

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   Ses "indégivrables" pingouins occupent la page 2 de la version papier du journal. La lecture de ses strips est très souvent un pur délice.

   Celui que j'ai reproduit ci-dessus est un éditorial à lui seul. Comment des musulmans qui se disent choqués par ceux qui dénigrent leur religion (l'accusant de propager le fanatisme et la violence) peuvent-ils espérer être crédibles s'ils commettent précisément des actes qui confirment le cliché qu'ils dénoncent ?

   Mais, dès le lendemain, Xavier Gorce montre qu'il n'adhère pas pour autant à la démarche de Charlie Hebdo :

Gorce 20 09 2012.jpg

   Est-ce vraiment faire oeuvre de satiriste, aujourd'hui en France, que de dénoncer sans cesse les aspects rétrogrades de la religion musulmane ?

   Le jour d'après, en "une", c'est au tour de Plantu de régler ses comptes :

Plantu 21 09 2012.jpg

   Charb y est représenté en beauf' et le dessinateur associé au Monde (souvent égratigné par ses collègues "de gauche" dans le passé) ne se prive pas d'aller dans le sens de Xavier Gorce. En clair pour lui, c'est de la provocation à deux balles. Le "coup de pied de l'âne" est donné par la souris, alter ego de Plantu. Elle sodomise sans complexe un drôle de chien... qui n'est autre que Maurice (de Maurice et Patapon), animal fétiche de Charb. Et pan dans les fesses !

   Dans le même numéro du Monde, Sergueï s'en prend plutôt aux intégristes chrétiens qui ont conçu le film antimusulman :

Serguei 21 09 2012.jpg

   Sur la Toile, on peut trouver des propos approchants sur le site de Bakchich, qui estime qu'en France il y a quand même deux poids, deux mesures :

Bakchich.jpg

   J'en reviens toujours à Xavier Gorce, qui a bien perçu le risque qu'il y avait à laisser Marine Le Pen se présenter en défenseure de la laïcité à la française :

Gorce 23 09 2012.jpg

   Mais laissons la parole à Charb, qui n'a pas tort de rappeler, dans un entretien accordé au Monde, que ses dessins sont moins dangereux pour la santé que l'activisme des militants intégristes. On a de plus oublié aujourd'hui que, si le catholicisme tolère (de gré ou de force) la critique acerbe, c'est le résultat de décennies de luttes, d'oppositions parfois très violentes. Nous ne sommes peut-être qu'au début d'une ère de questionnements abrupts à propos de la place de l'islam et des musulmans en France...

lundi, 03 septembre 2012

Prédictions à la con

   Parfois, le hasard de la navigation internautique réserve d'agréables surprises. Ainsi, récemment, j'effectuais quelques recherches sur Barack Obama lorsque je suis tombé sur le site de France Soir, plus précisément des articles de décembre 2011 présentant les prédictions de supposés voyants pour l'année 2012 :

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   Commençons avec Meredith Duquesne :

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   Vivre entre New York et Paris ne donne visiblement pas plus de hauteur de vue, puisque la dame voyait Nicolas Sarkozy (difficilement) réélu... après avoir devancé de justesse Marine Le Pen au premier tour. Or, si tout le monde a bien évidemment en tête la défaite du président sortant au second tour, certains ont peut-être oublié qu'il a précédé Marine Le Pen de plus de trois millions de voix au premier tour :

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   Passons à Claude Alexis, qui officie pour un journal de référence, à savoir Télé Magazine :

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   Lui aussi "voyait" Nicolas Sarkozy réélu mais là n'est pas la perle de ses prédictions. J'ai souligné la chose tellement c'est énorme. Je cite : "Pour Jean-Luc Delarue, c'est la fin de la descente aux enfers. Bonjour le renouveau ! Il revient avec de nouvelles productions sur plusieurs chaînes. Côte vie privée, je lui vois un second enfant à venir."

   Je n'ai qu'un mot à dire : bravo !

   Isabelle Viant se place dans la continuité des deux hommes : elle aussi "voyait" Nicolas Sarkozy reconduit à l'Elysée... accompagné de "cadors" de l'UMP !

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   Quant à Monsieur Olivier, s'il sentait que François Hollande allait être élu, il s'est fourré le pendule dans l'oeil, puisqu'il a "vu" Marine Le Pen au second tour... et une (autre) femme devenir Premier ministre !

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   Je ne vous parle même pas des considérations sur la monnaie. Notons que ce charlatan est assez habile, noyant certaines de ses prédictions dans un flou artistique, ou s'appuyant sur l'actualité de 2011 pour tenter d'extrapoler.

   Pour conclure, je me contenterai de citer un illustre contempteur des astrologues et autres escrocs de l'avenir sur commande, François Rabelais, qui, dans sa Pantagrueline Prognostication (1535), écrivait ceci :

"Cette année les aveugles ne verront que bien peu, les sourds ouïront assez mal, les muets ne parleront guère, les riches se porteront un peu mieux que les pauvres, et les saints [valides] mieux que les malades. [...] Vieillesse sera incurable cette année à cause des années passées. [...] Ceux qui auront flux de ventre iront souvent à la selle percée [...] ; le mal des yeux sera fort contraire à la vue [...]. Et attendu la comète de l'an passé et la rétrogradation de Saturne, mourra à l'Hospital un grand maraud tout catharré et croustelevé, à la mort duquel sera sédition horrible entre les chats et les rats, entre les chiens et les lièvres, entre les faucons et les canards, entre les moines et les oeufs."

samedi, 01 septembre 2012

Le gaz de schiste toujours d'actualité

   C'est l'un des feuilletons de l'été, moins médiatique certes que la guerre civile en Syrie, les Jeux olympiques de Londres ou l'augmentation du prix de l'essence à la pompe, mais le débat n'est pas clos, contrairement à ce que certains beaux esprits ont cru, en France notamment.

   La (bonne) presse fait son travail sur le sujet. Il me semble même qu'au sein de la rédaction du Monde, des dissensions existent sur cette question, peut-être entre les économistes et les journalistes en charge de la rubrique "Planète".

   C'est à la fin du mois de juillet que les articles ont commencé à paraître en nombre. Le 25 a été mis en ligne un éditorial intitulé N'enterrons pas le débat sur les gaz de schiste. On se dit que son auteur a observé avec attention la mini-révolution en cours dans l'énergie aux Etats-Unis, qui a vu ce pays devenir le premier producteur mondial de gaz en quelques années. L'édito renvoie à un reportage (de Jean-Michel Bezat) placé au début de la version papier du quotidien, Bienvenue à Fort Worth, Texas, la capitale du gaz de schiste (accès payant), dont voici un aperçu :

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   Le lendemain, Stéphane Foucart signe un papier traitant d'un rapport bidonné (favorable au gaz de schiste) publié aux Etats-Unis, et dont l'auteur est accessoirement actionnaire d'une société de forage...

   Peu de temps auparavant, Audrey Garric, une autre journaliste de sensibilité écologiste, avait publié, sur son blog officiel, un billet sur la voracité des compagnies gazières, désireuses de forer jusque dans les cimetières...

   Le sujet rebondit au mois d'août. C'est Alain Faujas qui a dégainé le premier, avec un article intitulé Le charbon américain victime du gaz de schiste : l'exploitation de nombreux forages de gaz non conventionnel a fait chuter le prix de l'énergie et les sociétés charbonnières en sont réduites à trouver de nouveaux clients à l'exportation... notamment en Europe, où la volonté de certains dirigeants de sortir du nucléaire donne un nouvel essor à l'énergie produite à partir de houille... Bonjour la pollution !

   Fort logiquement, la rubrique "Idées" voit surgir le débat. On a pu y lire une tribune de Noël Mamère, Non, le gaz de schiste n'est pas la "nouvelle frontière". On sent le député écologiste lecteur attentif du Monde, où la parution d'articles aux perspectives différentes a dû l'inquiéter.

   Deux semaines plus tard, le sujet s'enrichit de nouveaux "papiers". On doit à Julien Bouissou, talentueux correspondant du journal à New Delhi, un article très instructif sur les conséquences de l'essor de la fracturation hydraulique sur les paysans indiens : Le haricot de guar indien dopé par le gaz de schiste. (L'article est plus balancé que ce qu'indique le titre.)

   Dans la version papier, au bas de la même page, une correspondance américaine signale l'émergence d'un nouveau problème, qui pourrait, bien plus que l'opposition des militants écologistes, limiter le développement de l'exploitation de gaz de schiste : Aux Etats-Unis, l'eau manque pour permettre la fracturation hydraulique. Il est piquant de voir deux puissants lobbys (l'agribusiness et le secteur pétrolier) entrer en conflit à ce sujet... (Et vive le réchauffement climatique !)

   Cela nous mène à la dernière chronique du médiateur (Pascal Galinier), Ecolos de vacances (joli titre !), grâce à laquelle on peut se rendre compte qu'une partie du lectorat du quotidien voudrait que celui-ci ne transmette qu'une vision militante du sujet. Ces lecteurs semblent ne pas avoir conscience que la rédaction est composée de personnes de sensibilités différentes... et c'est très bien comme ça !

   Le "quotidien de référence" n'est pas le seul à avoir suivi la question du gaz de schiste cet été. Ainsi, le numéro du 27 juillet de La France agricole contient un article de trois pages (Gaz : une révolution dans les tuyaux) annoncé en "une" :

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   Le papier se veut neutre, abordant à la fois les avantages que retirent les pays exploitant les gaz non conventionnels et les conséquences environnementales. Le contexte français (cherté du gaz, son importation) est précisé. Incidemment, on peut lire que le gaz naturel représente 50 à 80 % du coût des engrais azotés.

   On retrouve cette préoccupation dans une vidéo mise en ligne sur le site de l'hebdomadaire agricole. L'intervenant, Joël Morlet, est le président de l'Unifa, l'Union des industries de la fertilisation. Il est aussi directeur général de Yara France, une filiale d'un grand groupe norvégien (principal fournisseur d'engrais chimiques)... ainsi que PDG (et administrateur) de la SOCOFER, une entreprise fabricant des engrais, basée dans l'Indre.

   Et dans nos régions ? A la mi-août, les opposants ont organisé une marche entre Lozère et Aveyron, pour ranimer la vigilance du public. Ils sont inquiets à cause de ce qu'ils estiment être l'ambiguïté du gouvernement. Si le président de la République, François Hollande, a réaffirmé son opposition à la fracturation hydraulique, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a précisé que l'exploitation des gaz de schiste n'était toutefois pas définitivement écartée.

   Nos dirigeants ont en tête la crise économique, qui se prolonge, et le déficit de notre balance commerciale, principalement dû à l'importation d'hydrocarbures : au premier semestre 2012, ce déficit approche les 35 milliards d'euros...

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   ... alors que la facture énergétique de notre pays dépasse légèrement les 34 milliards d'euros :

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(J'ai ajouté au graphique la ligne violette, pour mieux mettre en évidence que, lors des deux premiers trimestres de l'année 2012, la facture énergétique avait légèrement dépassé les 15 milliards d'euros, ce qui nous donne un total d'environ 34 milliards pour le semestre.)

   Je pense que nos dirigeants ont aussi reçu des informations provenant de milieux scientifiques moins épidermiquement hostiles au gaz de schiste que les militants écologistes. On peut en avoir un écho dans le numéro 301 de la revue Science... et pseudo-sciences, publié en juillet 2012 :

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   On y trouve une présentation claire de ce que sont les gaz non conventionnels... et l'on découvre, au passage, que l'expression "gaz de schiste" est incorrecte. Six pages sont consacrées aux impacts environnementaux. On rentre dans le détail, puisque, par exemple, on y distingue la fracturation de la stimulation hydraulique, avec leurs éventuelles implications sismiques. Une autre partie du dossier compare la situation en France et aux Etats-Unis. Quelques réserves sont émises à propos du film Gasland.

   La revue se demande enfin s'il est possible d'exploiter "proprement" le gaz de schiste, ou avec quels coûts, environnementaux, sociétaux. (On arrive à la conclusion que, dans les régions marquées le relief calcaire, il est souhaitable, dans l'état actuel des choses, de ne pas procéder à l'extraction de gaz de schiste.) L'ensemble des articles n'a pas pour but de défendre les industriels, mais de replacer le sujet d'abord dans son contexte scientifique.

mercredi, 29 août 2012

Spermatofolie

   C'est le titre d'un roman de Guillaume Cochin, publié en 2007 :

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   Le narrateur est un homme, dont on suit la première moitié de l'existence. C'est un rouquin timide, qui se distingue par un T.O.C. : l'enfant porte de manière compulsive la main à son "robinet", au désespoir de sa maman un peu coincée. S'en suivent des séances chez le médecin.

   Arrive l'adolescence : le héros devient le roi de la branlette... et le dernier de la classe. Mais, enfant unique tardivement né, il est chouchouté par ses parents. Il est entretenu jusqu'à l'âge adulte, habitant dans un petit appartement loué par ses géniteurs. Il vit à l'écart du monde, obsédé par sa seule queue.

   Sa vie va prendre une autre direction quand il apprend qu'il peut donner son sperme. Ses masturbations vont enfin avoir du sens ! Monsieur adopte donc des horaires de bureau, passant quotidiennement (matin ET après-midi) verser son obole -en liquide- au laboratoire, où travaille une charmante infirmière. La description du processus qui le conduit à devenir donneur anonyme vaut son pesant de papier hygiénique !

   Le drame, pour lui, est qu'on finit par ne plus avoir besoin de ses services. Il perd ensuite son père, puis sa mère. Il vivote sur l'héritage, hiberne chez lui en gros crasseux. Et puis un jour... il va pouvoir à nouveau se rendre utile. Je ne vous raconte pas dans quelles circonstances, mais sachez qu'il découvre qu'il a 367 enfants ! Rouquins comme lui ! La fin du bouquin le voit commencer une nouvelle vie.

   En lisant cela, vous vous dites peut-être que vous connaissez peu ou prou cette histoire. Elle ressemble à celle du (médiocre) film Starbuck, dont j'ai causé le 13 juillet dernier.

   Et voici ce sur quoi je suis tombé dans Le Monde du 22 juillet :

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   Il est vrai que les ressemblances entre les deux histoires sont troublantes. Le Journal de Montréal les a listées. Restent les différences :

- le film n'évoque pas la jeunesse du héros et passe (hélas) rapidement sur sa manie de la branlette

- le film fait de son personnage principal quelqu'un de sociable, inséré dans un réseau de relations et travaillant dans l'entreprise familiale, même s'il n'est pas un salarié modèle

- la cause de la découverte de la pluripaternité n'est pas la même

- le personnage principal du film tient, dans un premier temps, à préserver son anonymat

- le film développe la volonté du héros d'améliorer le sort de ses "enfants"

- les ennuis financiers du héros du film ne sont pas ceux du narrateur du roman

   Après, c'est à chacun de se faire son opinion. L'éditeur et l'écrivain auraient-ils mis en route la machine judiciaire si le film n'avait pas rencontré le succès ? J'en doute. Quant aux auteurs de celui-ci, sont-ils de bonne foi quand ils affirment ne jamais avoir lu ni même entendu parler du livre avant aujourd'hui ? Affaire à suivre...

vendredi, 24 août 2012

Bienvenue chez les riches !

   C'est le titre du dossier du Canard enchaîné (le n°124) publié cet été :

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   En quelque 120 pages (contre 80 à 100 d'habitude), les journalistes de l'hebdomadaire satirique proposent un panorama synthétique de la "France des riches". Les articles sont courts (une à deux pages, illustrées d'un à trois dessins) et foumillent d'anecdotes.

   Cela commence par la définition de la richesse, entreprise hasardeuse. Pour les plus fortunés, on peut se reporter au classement des milliardaires du magazine Forbes. Deux Français font partie des vingt premiers : Bernard Arnault (4e) et Liliane Bettencourt (15e) :

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   Pour avoir plus d'informations sur les riches Français, on peut se tourner vers le magazine Challenges, qui publie un classement des 500 plus grandes fortunes professionnelles :

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   En comparant les deux palmarès, on relève des incohérences, tant au niveau de l'ordre qu'au niveau des montants : les deux classements ne se fondent pas exactement sur les mêmes critères.

   On peut aussi s'intéresser aux assujettis à l'ISF. Il y a quelques années de cela, Le Figaro a publié un tableau statistique des villes peuplées de plus de 20 000 habitants comprenant plus de 50 assujettis. Voici ce que l'on peut lire à propos de l'Aveyron (page 5) :

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   Rien que dans ces deux communes (les seules du département à dépasser les 20 000 habitants), on note la présence de près de 400 assujettis à l'ISF. Combien d'autres résident dans une commune moins peuplée ?

   Le document est aussi intéressant parce qu'il mentionne la somme moyenne versée au fisc : 4-5000 euros par an... on ne peut vraiment pas parler d'un impôt confiscatoire.

   Ces données sont à comparer avec les revenus de l'ensemble des Français. D'après l'INSEE, en 2009, les ménages français ont en moyenne un revenu de 34 540 euros, soit un peu moins de 2 900 euros par mois. Pour plus de justesse, la colonne suivante donne le revenu médian, celui qui partage la population en deux groupes égaux (en clair : la moitié gagne moins, l'autre moitié gagne plus). Et là, on constate que ce revenu n'est que de 28 740 euros, soit environ 2 400 euros par mois... merde, je suis au-dessous !

   Cet écart s'explique par les grandes inégalités : beaucoup de ménages gagnent entre 1 500 et 2 500 euros par mois, mais une minorité gagne infiniment plus, ce qui fait remonter la moyenne. Le Canard précise d'ailleurs que 90 % des Français (pas des ménages, semble-t-il) gagnent moins de 37 000 euros par an. 1 % des Français gagnent plus de 7 350 euros par mois. (Que l'on me présente leurs filles !) Quant à ceux qui culminent au-delà d'un million par an, ils ne seraient que 3 000 foyers, soit 0,0008 % du total. Dire que certains ont osé déclarer que la taxe à 75 % (qui ne ponctionnera pas 75 % des revenus : ce sera une tranche supplémentaire... avec des aménagements) s'attaquait à la classe moyenne...

   Le journal satirique revient aussi sur ces très riches qui avaient appelé à une fiscalité plus lourde (dans un appel publié par Le Nouvel Observateur). Combien sont aujourd'hui révulsés par les projets fiscaux du gouvernement Ayrault ? Sur le même sujet, la tribune signée par Warren Buffett dans The New York Times avait quand même plus de gueule. Il y écrit notamment ceci :

"People invest to make money, and potential taxes have never scared them off. And to those who argue that higher rates hurt job creation, I would note that a net of nearly 40 million jobs were added between 1980 and 2000. You know what’s happened since then: lower tax rates and far lower job creation."

   Traduction : "Les gens investissent pour gagner de l'argent, et les impôts éventuels ne les ont jamais dissuadés. A ceux qui soutiennent que les taux [d'imposition] élevés nuisent à la création d'emplois, je dirais qu'un volant d'environ 40 millions d'emplois ont été créés entre 1980 et 2000 [en clair : sous Reagan, Bush père et Clinton]. Vous savez ce qui s'est passé depuis : des taux d'imposition plus bas et beaucoup moins de création d'emplois."

   L'argumentation mériterait d'être affinée, discutée, mais, venant d'un super-riche, elle ne manque pas de sel. Voici encore ce qu'écrit Buffett, un peu plus bas :

"But for those making more than $1 million — there were 236,883 such households in 2009 — I would raise rates immediately on taxable income in excess of $1 million, including, of course, dividends and capital gains."

   Traduction : "Mais pour ceux qui gagnent plus d'un million de dollars (236 883 ménages en 2009) j'augmenterais immédiatement le taux d'imposition du revenu excédant un million de dollars, en incluant, bien sûr, les dividendes et (autres) revenus du capital."

   Alors, Warren Buffett hollandien ?

   Le journal satirique ne se prive cependant pas d'égratigner l'actuel président sur ses déclarations de patrimoine. Il semble avoir été plus honnête en 2012 qu'en 2007, sans doute pour éviter, à l'époque, de payer l'ISF... Le paradoxe est que c'est à la réforme initiée par Nicolas Sarkozy que François Hollande doit sans doute de n'y être pas assujetti aujourd'hui !

   La suite du dossier est composée de portraits des familles/individus les plus riches, de Bernard Arnault à Elisabeth Badinter, en passant par Serge Dassault et Pierre Bergé, par exemple. On y apprend incidemment une foule de choses, comme par exemple l'origine du succès de la famille Bolloré, dans le papier très fin (utilisé pour les cigarettes roulées et l'impression des bibles), auquel elle a en partie donné son nom : O.C.B. pour Odet Cascadec Bolloré.

   On peut dire que c'est Arnaud Lagardère qui reçoit le traitement le plus "acide". Ceux qui s'intéressent à l'information économique liront avec profit les pages consacrées aux familles de la grande distribution. Les "nouveaux entrepreneurs" ne sont pas oubliés, avec notamment Xavier Niel et Matthieu Pigasse, auquel un strip de Lefred-Thouron est consacré :

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   La troisième partie du dossier traite des manières de s'enrichir, de la banque à l'édition en passant par le show-business. Au passage, certains découvriront peut-être le train de vie (et les exigences professionnelles) de quelques vedettes, en particulier Dany Boon. Ceci dit, ils ne font a priori rien d'illégal, contrairement à d'autres, dictateurs africains (avec l'affaire des "biens mal acquis") ou hommes d'affaires qui sentent le soufre (vous avez dit Bernard Tapie ?). Il est aussi question de certains footballeurs, de riches agriculteurs (céréaliers) et de la famille régnante qatarie.

   La quatrième partie est plus bling bling : elle aborde les "moeurs des riches". Le dossier se termine par les soucis des fortunés, parfois proportionnels à leur richesse.

   C'est bien écrit, truffé d'informations, émaillé de traits d'humour et richement illustré... et cela ne coûte que six euros !

dimanche, 12 août 2012

Le retour du foulard de Myriam Soumaré

   C'était ce soir, en plein journal de 20 heures, sur TF1. Un long moment fut consacré aux Jeux Olympiques, notamment aux athlètes français. Plusieurs d'entre eux furent interrogés par Anne-Claire Coudray (la future nouvelle Claire Chazal que la rédaction teste pendant l'été), dont Tony Estanguet et Myriam Soumaré :

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   La voici en plein écran :

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   Elle court pourtant tête nue (et c'est tant mieux), ce que l'on a pu vérifier dans la minute qui a suivi :

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   On avait déjà vu ce grand écart à l'oeuvre en 2010, à l'occasion des championnats d'Europe d'athlétisme. N'attendons toutefois pas de TF1 que le sujet soit creusé...

   D'autre part, on se demande ce qui a pu justifier la mise en valeur de cette athlète, qui (contrairement à quinze autres sportives de notre pays) n'a remporté aucune médaille , puisque, si elle a réussi à se qualifier pour la finale du 200 mètres, elle n'a terminé qu'à la septième place de celle-ci. En relais, ce fut encore moins glorieux, l'équipe de France (dont Myriam Soumaré fait partie) ayant été disqualifiée au premier tour. (Certains se sont d'ailleurs étonnés de la joie manifestée par les relayeuses après leur élimination, somme toute piteuse...)

samedi, 04 août 2012

José Bové et le loup

   "Pour moi les choses sont claires, hein : c'est que si le loup risque d'attaquer un troupeau, la meilleure façon de faire, c'est de prendre le fusil et de tirer."

   Les propos tenus courant juillet par le député européen aveyronnais, sur les ondes de la radio Totem, ont fait des vagues, un peu avec retard. Ce n'est que dans Le Monde du vendredi 3 août qu'un article s'empare de l'affaire. Le journaliste Hervé Kempf s'est d'ailleurs un peu emmêlé les pinceaux, qualifiant Totem de "radio lozérienne". Si l'ex-12 FM émet bien en Lozère (comme dans une dizaine d'autres départements), son siège est situé à proximité de Rodez, à Luc-La Primaube très exactement.

   C'est une association de protection des animaux sauvages qui vient de relancer l'affaire. D'après Midi Libre, une plainte a été déposée contre José Bové au tribunal de Mende.

   Rappelons que, selon les études officielles, les chiens divagants (parfois qualifiés à tort d'errants), s'ils attaquent moins fréquemment les troupeaux domestiques que les loups (dans les zones où ceux-ci sont présents), sont responsables de davantage de pertes. Et encore, on néglige la surdéclaration d'attaques de loups.

   L'affaire n'en est pas moins délicate. Je ne vois pas comment on pourrait interdire à des éleveurs de tenter de se débarrasser d'un loup, à partir du moment où une série d'attaques clairement identifiées se produit dans une région marquée par l'élevage. Le tout est de rester dans la mesure.

   A suivre...

mercredi, 11 juillet 2012

L'affaire DSK traitée par "New York Unité Spéciale"

   L'épisode (annoncé l'an dernier) a enfin été diffusé en France, sur TF1, mardi soir. Il a pour titre Terre brûlée. Attention toutefois : les auteurs ont pris beaucoup de précautions pour qu'on ne les accuse pas d'exploiter l'affaire DSK. Cela commence par un carton placé en tout début de film :

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   L'accusé n'est plus français, mais italien. (Mais c'est un rival sérieux du principal dirigeant de son pays, auquel il attribue la responsabilité de ses malheurs. Le président du Conseil Berlusconi  a ici remplacé le président de la République Sarkozy, jusque dans le mythe du complot.) La victime présumée n'est plus guinéenne, mais soudanaise. Pour bien enfoncer le clou, lorsque la (charmante) substitut du procureur, Alex Cabot, débarque au commissariat, elle demande s'il s'agit d'une "nouvelle affaire DSK"...






    ... comme pour bien souligner que, dans cet épisode, il s'agit d'autre chose. Du coup, même si l'histoire a été visiblement plaquée sur le fait divers qui a défrayé la chronique, une série de détails est chargée de marquer la différence : le diplomate a oublié son ordinateur à l'hôtel (DSK y a perdu l'un de ses téléphones portables), la femme de chambre a recraché le sperme dans le lavabo (Nafissatou Diallo l'avait fait sur la moquette) etc. Notons que l'actrice qui incarne la plaignante est très petite, contrairement à la personne qui a inspiré le rôle.

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   Nous n'échappons pas à certains moments incontournables, comme la sortie médiatisée du commissariat, sous les flashs des photographes :

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   L'épisode nous fait bien suivre la procédure judiciaire et la progressive décrédibilisation de la victime présumée, principal argument de la défense. L'avocat, très habile, a été engagé par l'épouse de l'accusé, qui s'affiche à ses côtés (et devant les caméras), aimante et solidaire :

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   La coupe de cheveux de l'épouse a incontestablement été "travaillée" de manière à ressembler à celle d'Anne Sinclair.

   Je vous laisse découvrir la conclusion de l'histoire, assez originale... et ma fois très habile sur le fond.

mardi, 19 juin 2012

Plus de femmes

   La nouvelle Assemblée nationale est donc plus féminine, puisque la part des élues est passée de 18,5 à 26,9 %, comme l'a rappelé une partie de la presse, par exemple La Voix du Nord :

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   (Espérons surtout que le pourcentage de député-e-s honnêtes et travailleurs augmente.)

   Il convient toutefois de tempérer les exercices d'autosatisfaction : la comparaison avec les autres pays européens, voire avec le reste du monde, nuance la "performance", concernant le poids des femmes en politique.

   L'illustration publiée par La Voix du Nord place la France entre la Suisse et le Royaume-Uni, plutôt à la traîne en Europe, mais au-dessus de la moyenne mondiale. Selon les chiffres de la Fondation Robert Schuman, à l'issue des élections législatives, la France se situe désormais légèrement au-dessus de la moyenne de l'Union européenne (marquée d'une ligne rouge, ci-dessous), entre l'Autriche et le Portugal : 

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   Si vous avez été attentifs, vous avez sans doute remarqué de légères discordances entre les deux sources, qui ne remettent toutefois pas en cause le classement global : le pourcentage suédois varie entre 44,7 et 44,99 ; celui des Pays-Bas entre 40,7 et 39,33 ; celui de la Belgique entre 38 et 39,33... jusqu'à la Hongrie, où la part des députées varie entre 8,8 % et 9,07 %.

   L'article du quotidien de Lille s'appuie sur les statistiques que l'on peut trouver sur le site de l'Union interparlementaire. On peut donc élargir la comparaison au reste du monde. Avant les dernières législatives, la France se situait à la 70e place. Elle se trouve désormais entre... l'Afghanistan et la Tunisie !

   En Afghanistan, la Constitution (chapitre V, article 83) impose qu'au moins deux sièges par province (celles-ci au nombre de 34) soient réservés aux femmes. Comme le nombre de députés est plafonné à 250, on arrive à un peu plus du quart du total.

   En Tunisie, où la situation des femmes était déjà plus enviable sous le régime de Ben Ali, la toute jeune Assemblée constituante compte une proportion semblable de femmes (au final 58 sur 217, d'après le rapport d'une ONG états-unienne), parce que la loi électorale a imposé la parité (à la mode française, "chabada-bada", un homme et une femme en alternance). Cependant, comme les élections se sont déroulées suivant un scrutin de liste et que les candidatures ont été très nombreuses, très souvent, la plupart n'ont pu faire élire que la personne placée en tête... un homme dans l'écrasante majorité des cas. Le paradoxe est que c'est un parti islamiste, Ennahda (qui se veut moderne... on verra à l'usage), qui compte le plus de députées, parce que c'est celui qui, le plus souvent, a réussi à faire élire au moins deux personnes d'une même liste.

   Ceci dit, il ne faut pas, à mon avis, faire une fixation sur le pourcentage de députées. Même si, dans les démocraties les plus avancées (en Europe du Nord, par exemple), on approche de la parité, il arrive que l'on trouve un pourcentage flatteur dans une dictature. Mais comme, en France, nous entretenons une pléthore d'élus (très) âgés, cumulards de surcroît, l'augmentation de la part des femmes a le gros avantage (pour l'instant) de rajeunir l'Assemblée, d'y introduire de nouvelles têtes et de la diversité.