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mercredi, 18 juillet 2018

The Strange Ones

   Un petit engouement cinéphilique a accompagné la sortie de ce film étrange, un mini road-movie mâtiné de puzzle scénaristique, autour d'un duo composé d'un jeune homme et d'un préadolescent qui prétend s'appeler Jeremiah.

   Autant le dire tout de suite : pour un spectateur attentif, habitué aux scénarios elliptiques, il n'y a quasiment pas de suspens. On comprend très vite que les deux protagonistes ne sont pas frères et l'on sait sans l'ombre d'un doute qui a fait quoi là où s'est produit le drame, même si la scène intégrale ne nous est montrée qu'à la fin.

   Entre les deux, on a droit à beaucoup de mystères et de sous-entendus, par l'intermédiaire de retours en arrière et de scènes oniriques. S'ajoute à cela la découverte d'une Amérique rurale forestière, assez intéressante. Ce sont finalement les étapes de la fuite du duo qui retiennent le plus l'attention, jusqu'à ce que le doute s'installe...

 

ATTENTION !

LA SUITE

DÉVOILE

DES ÉLÉMENTS

CLÉS DE

L'INTRIGUE !

 

   Le premier élément sous-jacent qui finit par émerger est le sentiment homosexuel. Jeremiah/Sam est attiré par le jeune homme. Ce n'est ni une figure paternelle de substitution ni une sorte de grand frère. On comprend pourquoi le garçon fait capoter le début d'idylle entre Nick (Alex Pettyfer, vu il y a deux ans dans Elvis & Nixon) et la tenancière du motel, qui était prête à les laisser rester gratuitement. On comprend aussi pourquoi les avances faites par une amie au préadolescent provoquent de la gêne en lui.

   Le deuxième élément est lié à la réalité de ce que l'on voit. Comme Jeremiah/Sam fait de moins en moins la distinction entre ses rêves et la réalité, on en vient à douter du déroulement de certaines scènes... et même de la présence de Nick, peut-être fantasmée. Ce sont les dialogues qui m'ont amené à cette conclusion : à la fin, le directeur du centre de réinsertion des jeunes tient à Sam le même discours (mot pour mot) que celui que lui a tenu Nick dans le diner, dans la première partie de l'histoire. De plus, la présence d'un ou deux plans quasiment identiques se déroulant dans le camp de jeunes, mais à deux moments différents, m'incite à penser que certaines scènes du camp sont fantasmées, d'autres bien réelles, les ayant inspirées... mais nous étant montrées après.

   Ce court film (1h20) m'a donc plus intéressé sur le plan de sa structure que par son contenu, sans réelle surprise.

11:09 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 17 juillet 2018

Sicilian Ghost Story

   Cette histoire de fantôme(s) sicilien(s) se déroule à une époque où n'existaient pas les téléphones portables. Au vu des modèles de voiture, on se situe à la fin du XXe siècle. A la fin du film, on apprend que l'intrigue un brin fantastique est inspirée de faits réels. Je laisse à chacun découvrir pourquoi.

   C'est d'abord une histoire d'amour balbutiante, intense et parfois un peu puérile, entre deux adolescents issus de milieux différents. Ils sont magnifiquement interprétés par deux inconnus, Gaetano Fernandez et surtout la jeune Julia Jedlikowska, une révélation à surveiller.

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   Comme on est en Sicile, il faut faire attention au regard des autres, dans cette petite ville où il se passe de drôles de choses. La campagne n'est pas loin, avec cette forêt où circule un chien agressif, ce lac de retenue où viennent s'abreuver des bêtes et cette cave creusée dans le rocher où niche une chouette, dont le petit cri est le signe qu'il se passe quelque chose d'inhabituel.

   L'héroïne Luna est en pleine rébellion. Elle ne supporte plus sa mère ni l'école, ni la plupart des habitants du coin. Elle confie ses espoirs à un journal intime dessiné, que sa mère cherche à lire. Tombée amoureuse du sensible Giuseppe, elle lui a écrit une mystérieuse et longue lettre, qui va jouer un rôle dans cette histoire. En plus de tout cela, Luna rêve... et ses rêves interfèrent avec la réalité.

   C'est le moment de dire quelques mots de la réalisation, que je trouve éblouissante. Quasiment chaque scène est construite de manière à ce qu'on ne puisse deviner, à son début, comment elle va tourner. Les plans sont très élaborés et la photographie superbe. Les réalisateurs (Fabio Grassadonia et Antonio Piazza) ont voulu donner une coloration fantastique (voire merveilleuse) à des scènes en apparences anodines.

   Là dessus se greffe l'activité de la Mafia. Ce quotidien sordide rattrape les amoureux, qui n'ont d'autre ressource que de se réfugier dans l'imaginaire, le fantasme... voire le surnaturel.

    C'est une très agréable découverte. Le film est en fin de parcours mais, si vous avez l'occasion de le voir, franchement, n'hésitez pas.

lundi, 16 juillet 2018

Histoire du football

   Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, le football occupe une place importante dans les sociétés contemporaines, en France comme ailleurs. Son histoire est d'ailleurs fort intéressante. J'ai récemment lu deux ouvrages qui en éclairent certains aspects.

   A tout seigneur tout honneur. La Coupe du monde 2018 s'étant déroulée en Russie, commençons par le livre de Régis Genté et Nicolas Jallot :

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   Très bien écrit, l'ouvrage part de l'introduction du football en Russie (par des Anglais) à la gestion poutinienne de ce qui est d'abord perçu comme un outil de propagande. Cela ne date pas du XXIe siècle. Très vite populaire (mais aussi apprécié par des intellectuels comme le compositeur Dmitri Chostakovitch), ce nouveau sport a bénéficié de l'action des frères Starostine, avant la Seconde guerre mondiale. Des supporteurs russes se souviennent encore aujourd'hui de ces précurseurs, dont trois ont été par la suite envoyés au Goulag, sans doute sur ordre de Lavrenti Beria, le chef du NKVD (ancêtre du KGB, dont est issu l'actuel FSB).

   Cela-ci a tenté de promouvoir sa "caste" (celle des policiers politiques) à travers des clubs appelés "Dynamo" (ou "Dinamo"). Il y a d'abord eu celui de Tbilissi (Beria étant géorgien), puis ceux de Moscou et de Kiev. Mais à Moscou, le club fondé par les frères Starostine était le Spartak, le grand rival, soutenu successivement par les coopératives agricoles et les Komsomol (l'union des jeunesses communistes). L'histoire des rivalités internes à la Russie épouse en partie celle des rivalités politiques, la fierté locale venant se greffer dessus. D'autres clubs sont apparus à Moscou, le CSKA (l'équipe de l'armée), le Torpedo (l'équipe du secteur automobile) et le Lokomotiv (soutenu, comme son nom l'indique, par les chemins de fer).

   Le livre fourmille d'anecdotes, notamment sur la période de la Seconde guerre mondiale. Si certains joueurs vedettes ont été envoyés en front, d'autres ont été préservés pour jouer des matchs de propagande (notamment à Leningrad -aujourd'hui Saint-Pétersbourg, ville qui a subi un siège de 900 jours ainsi qu'une épouvantable famine). Pour l'anecdote, je signale que l'un des sites de la coupe du monde (celui de Saint-Pétersbourg) a été aménagé à l'emplacement du stade utilisé par l'une des équipes de la ville avant-guerre, là précisément où, en 1942, se serait déroulé le match famélique de propagande, retransmis à la radio jusque sur les lignes de combat.

   Il est aussi question du "match de la mort", une légende encore vivace aujourd'hui en Russie, sur une rencontre entre des soldats allemands et des joueurs ukrainiens, qui auraient été menacés de mort et, pour certains, fusillés après la rencontre. Les auteurs décryptent parfaitement bien la construction du mythe.

   Après la Seconde guerre mondiale, l'URSS rejoint les instances internationales sportives (la FIFA en 1946, le CIO en 1951). On l'a oublié, mais les succès sont arrivés assez vite. La sélection soviétique a remporté l'épreuve aux JO de 1956 (à Melbourne). Elle est devenue championne d'Europe en 1960, lors de la première édition de l'Euro... en France. Quatre ans plus tard, l'équipe est allée jusqu'en finale, battue seulement par l'Espagne, pays organisateur. En Coupe du monde, le bilan est moins flatteur, avec un quart de finale en 1958 et une demi-finale en 1966, en Angleterre (performance que l'actuelle équipe de Russie n'est donc pas parvenue à égaler cette année). Cette édition a été marquée par l'unique victoire des "Trois Lions"... et le rôle de l'arbitre de la finale, qui était soviétique. (C'est très bien expliqué dans le bouquin.)

   Cette époque (la fin des années 1950 et les années 1960) est marquée par une figure devenu mythique, le gardien de but Lev Yachine, seul de sa catégorie à avoir décroché le Ballon d'or, en 1963. C'est donc à juste titre que ce joueur a été retenu comme emblème de la toute récente coupe du monde, sur une affiche au style rétro, rappelant immanquablement l'époque soviétique, dont l'actuel président Vladimir Poutine est tant nostalgique :

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   Au niveau des clubs, c'est dans les années 1970-1980 que les résultats les plus spectaculaires ont été obtenus. Cela coïncide avec l'arrivée à maturité d'une génération dorée, notamment venue d'Ukraine (du Dynamo de Kiev), où ont été mises en pratiques des méthodes scientifiques d'entraînement. Cela s'est répercuté sur l'équipe soviétique, qu'on a commencé à revoir pointer le bout de son nez en 1982 mais surtout en 1986, au Mexique. Avec le Danemark, c'est l'équipe qui a marqué les esprits dans la première partie de la compétition.

   La fin de l'ouvrage est centrée sur la période poutinienne et le rôle des oligarques dans la vie des clubs. Il est question aussi bien du Zénith Saint-Pétersbourg que des clubs du Daghestan et de Tchétchénie. C'est tout aussi passionnant que ce qui précède.

   On continue avec un livre aux ambitions plus modestes. Il s'agit de la réédition d'un ouvrage publié en 1954 (sous la plume de Jules Rimet), augmenté de plusieurs textes divers :

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   Le fondateur du Red Star, qui présida la FIFA de 1921 à 1954, y raconte les premières Coupes du monde, celles auxquelles il a assisté. Cela commence par celle de 1930, en Uruguay. Les dirigeants de la FIFA et les équipes européennes invitées à y participer ont fait le trajet en paquebot. Rimet emporte avec lui le trophée qui ne porte pas encore son nom et qui a été sculpté par un certain Abel Lafleur, né à... Rodez !

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   Ce n'est pas la seule référence à l'Aveyron que contient ce récit de voyage. Sur le paquebot se trouvent deux chanteurs d'opéra, le Russe Fédor Chaliapine et une certaine Marthe Nespoulous. Les Rouergats qui lisent ce billet auront immédiatement dressé l'oeil l'oreille : c'est un nom assez répandu dans notre département.

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   Par contre, s'il est assez facile de dénicher, sur la Toile, des enregistrements (audio) de la soprano, les informations biographiques manquent cruellement. En Aveyron, on a plutôt retenu la carrière de son aînée, la cantatrice Emma Calvé, dont une place porte le nom à Rodez.

   Mais revenons à nos moutons (en short). Après l'Uruguay, ce fut au tour de l'Italie d'accueillir (et de remporter) la Coupe du monde, en 1934. Avec le recul, Jules Rimet, s'il se félicite de la qualité de l'organisation, semble éprouver quelques regrets, puisqu'il s'est montré accommodant avec le régime fasciste. (Dans un entretien publié en fin d'ouvrage, le petit-fils reconnaît que son grand-père a tendu le bras -comme les autres personnes présentes- lors de la cérémonie d'inauguration.)

   Pour populaire qu'il soit, le spectacle des équipes nationales se défiant dans un stade n'est pas forcément rentable, au début. C'est avec réticence que la France accepte d'organiser la Coupe du monde de 1938. A l'époque, l'écho des troubles politiques se fait encore plus grand. Ainsi, l'équipe d'Autriche est contrainte de se retirer de la compétition après l'Anschluss. Fort prudemment, les autorités décident de ne pas prévoir de compétition pour 1942. Pour l'organiser, il était question du Brésil et de l'Allemagne nazie...

   En 1950, c'est donc au Brésil que s'est déroulée la quatrième édition. Ce chapitre est écrit de manière à faire comprendre aux lecteurs que les Brésiliens n'envisageaient pas d'autre résultat que la victoire de leur équipe nationale... et que le résultat final fut une tragédie (que l'humiliation en demi-finale face à l'Allemagne, en 2014, est venue raviver).

   L'un des textes qui succèdent à ce récit fait le point sur les convictions de Jules Rimet, que l'on a parfois jadis rapproché de Pierre de Coubertin. C'était un contresens. Celui-ci était un aristocrate, qui voyait dans l'amateurisme l'incarnation d'un certain élitisme. Fervent adepte de la professionnalisation du sport en général et du football en particulier, Jules Rimet défendait une vision populaire (et méritocratique) de la pratique du sport. Il n'a cependant pas perçu combien l'introduction massive de l'argent allait le dénaturer.

   Mais son livre est bigrement intéressant, de surcroît bien écrit.

   P.S.

   La fameuse "coupe Jules Rimet" n'existe plus. Donnée au Brésil en 1970, à l'issue de la troisième victoire de ce pays dans la compétition, elle a été volée (et sans doute fondue). Les vainqueurs reçoivent désormais une copie du nouveau trophée (que l'on doit à un Italien).

   Cela n'a pas empêché un journaliste du Monde de commettre une boulette, dans l'euphorie de la victoire française hier en finale. Plusieurs photographies ont montré le joueur Kylian Mbappé embrassant le trophée. Dans la version papier du quotidien, il est fait référence à Jules Rimet :

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   L'erreur a été corrigée dans la version numérique de l'article (qui s'appuie sur une autre photographie) :

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dimanche, 15 juillet 2018

Paranoïa

   On a beaucoup parlé du dernier film de Steven Soderbergh en raison du recours aux iPhones (trois au total) pour le tournage (un drone ayant été utilisé pour les vues aériennes de l'hôpital). Mais c'est surtout par son scénario habile et la qualité de l'interprétation que ce long-métrage se distingue.

   Plusieurs thématiques sont entremêlées : la solitude urbaine contemporaine, le harcèlement (sous différentes formes), l'escroquerie à l'assurance, l'intolérance et la manipulation.

   La première partie de l'histoire nous invite à nous interroger sur deux points. L'héroïne (interprétée par Claire Foy, impeccable) est-elle réellement harcelée ou bien perd-elle la tête ? Y a-t-il un complot à l'oeuvre, dont elle serait l'une des victimes ? Le tout se corse quand il semble qu'un tueur en série traîne dans les parages...

   Au niveau visuel, le recours au téléphone est propice à l'introduction d'angles de prises de vue étranges, avec déformation de l'arrière-plan. Cela cadre parfaitement avec l'histoire. Mais, quand il s'agit de filmer une scène de face, en plein cadre, on voit les limites de l'appareil. Sur un grand écran, on perçoit le manque de finesse des contrastes et la faiblesse de profondeur du champ.

   La seconde partie se déroule souvent dans la "pièce bleue", avec des confrontations psychologiques entre deux personnages. On comprend que le rapport de force peut s'inverser et qu'à manipulateur existe manipulateur et demi. On retrouve un peu le style d'Effets secondaires, l'un des précédents films de Soderbergh. Celui-ci nous réserve des surprises jusqu'à la fin, dans ce qui constitue pour moi un très bon thriller.

10:44 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 14 juillet 2018

Una Questione privata

   Le dernier film des frères Taviani a pour cadre la fin de la période fasciste, pendant la Seconde guerre mondiale. Il prétend mêler réflexion historique et questionnement amoureux, le principal personnage féminin hésitant entre deux hommes, provoquant chez l'un d'entre eux un cruel dilemme : se réjouir de l'arrestation de son rival ou se porter à son secours.

   La facilité aurait consisté à opposer deux prétendants aux orientations politiques opposées : un fasciste et un antifasciste. Tel n'est pas le cas ici, puisque les deux hommes, amis d'enfance, se sont engagés dans les partisans (résistants antifascistes, qui luttent contre la République de Salo, Etat fantoche porté par les nazis, qui ont envahi la péninsule).

   Deux périodes se croisent dans le film : l'année 1943, avant la (première) chute de Mussolini, où semble régner l'insouciance, dans un milieu bourgeois ; l'année 1944, celle de la lutte. Et là, les clichés abondent. Les scènes du souvenir, montrant le trio amoureux, sont vues et revues. Mais le pire est atteint dans les scènes d'affrontement de 1944, mal jouées. En fait, les acteurs sont mal dirigés. On le voit aussi quand le héros repasse clandestinement par son village natal et croise ses parents, qui transportent du bois. Cette scène, censée être émouvante, sombre dans le ridicule.

   Du coup, on se désintéresse un peu de l'intrigue amoureuse. La jeune femme n'apparaît pas très sympathique. Seul le personnage de Milton (le prétendant intellectuel, évincé par son ami plus sportif) est un peu étoffé. On a su montrer son évolution, mais la prestation de l'acteur ne m'a guère convaincu.

   Le film gagne en intensité et en complexité quand le camp fasciste est filmé de l'intérieur. Mais cela fait bien peu pour ce qui reste une ébauche, un brouillon de film qu'il aurait fallu retravailler.

13:18 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 13 juillet 2018

La Maison de soie

   Comme je m'intéresse à tout ce qui touche à Sherlock Holmes, j'ai dressé l'oreille quand on m'a dit qu'un romancier britannique avait obtenu l'accord des héritiers de Conan Doyle pour écrire de nouvelles aventures du célèbre détective. Ce romancier est Anthony Horowitz, qui s'est illustré dans la littérature de jeunesse et l'écriture de scénarios pour la télévision. Il a notamment œuvré sur plusieurs épisodes de la série "Hercule Poirot" (actuellement rediffusée sur TMC). Le fin connaisseur de l’œuvre d'Agatha Christie avait des atouts pour relancer la narration des enquêtes de Sherlock. Voyons ce qu'il en a fait.

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   L'histoire nous est racontée du point de vue du docteur Watson. C'est un cas particulièrement délicat, qui aurait été dissimulé au public pendant des dizaines d'années, tant le sujet est sensible, à différents niveaux.

   L'intrigue entremêle deux affaires, liées par une personne qu'un lecteur attentif soupçonnera assez vite. La plus terrible des deux affaires a trait aux enfants des rues que Sherlock utilise parfois pour collecter des informations. Ceux qui ont beaucoup lu/vu de polars comprendront assez vite de quoi il retourne et quels sont les personnages impliqués.

   L'autre affaire, qui surgit en premier d'ailleurs, est liée au séjour effectué par l'un des protagonistes (le marchand d'art) aux États-Unis. L'intrigue est très bien nouée. Il va falloir du temps pour démêler tous les nœuds, d'autant plus que la seconde affaire va percuter la première. La principale conséquence est que la vie de Sherlock est menacée, par un complot qu'il est assez facile (pour les lecteurs) de mettre au jour.

   C'est passionnant. J'ai retrouvé l'esprit de Conan Doyle. Les relations entre les deux personnages principaux sont bien campées et le décor du Royaume-Uni de la fin du XIXe siècle est bien planté. J'ai commencé à lire le roman avant une séance de cinéma. J'ai repris ma lecture après le repas du soir et je n'ai pas lâché le livre avant la nuit. Même s'il y a des facilités et si l'une des affaires est un peu trop transparente à mon goût, j'ai pris beaucoup de plaisir à cette lecture.

Hedy Lamarr : from extase to wifi

   C'est un documentaire dont j'attendais impatiemment l'arrivée à Rodez. Il est consacré à une actrice hollywoodienne qui fut célèbre en son temps et qui incarna la brune "glamour" voire la tentatrice dans des productions destinées au grand public. Par contre, on ignore en général qu'elle s'intéressait à la technologie et qu'on lui doit sans doute une invention révolutionnaire.

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   Le documentaire commence par revenir sur la jeunesse de celle qui s'appelait Hedwig Kiesler. Cette Autrichienne est née dans un milieu privilégié (son père était banquier) et, contrairement à la majorité des jeunes femmes de son époque, a bénéficié d'une assez grande liberté. La relation avec le père était forte. Celui-ci était féru d'inventions. il semble avoir communiqué sa passion à sa fille, qui s'amusait à démonter des jouets pour en comprendre le fonctionnement.

   A l'écran, on alterne les témoignages de proches, les images d'archives et les documents divers (dont une entrevue oubliée de l'actrice, devenue âgée). C'est l'occasion de (re)découvrir l'Autriche de l'Entre-deux-guerres, avant que les nazis ne mettent la main dessus. Au départ, la jeune femme, issue d'une famille juive convertie au catholicisme, ne voit pas le danger. Elle continue à fréquenter les élites... mais va vite comprendre qu'il vaut mieux prendre le large.

   Sa carrière cinématographique commence en Autriche, sous le parfum du scandale. Extase est le titre d'un film où, encore mineure, elle apparaît nue et simule un orgasme. Scandale dans le pays et dans sa famille... et même ailleurs puisque, lorsque la jeune femme faits ses débuts aux Etats-Unis, on lui impose de jouer vêtue...

   On comprend assez vite que le joli minois cache un caractère d'acier. (Elle se qualifiait d'enfant terrible, en français dans le texte.) Bien que d'une grande beauté, l'actrice a dû provoquer la chance pour s'imposer... et se faire payer correctement par la production (la MGM, tenue Louis Mayer). La suite nous raconte donc le succès de l'actrice, ainsi que ses déboires sentimentaux.

   La Seconde guerre mondiale conduit la vedette autrichienne pas encore naturalisée américaine à soutenir le moral des troupes yankees... et à réfléchir à une technique de guidage des torpilles ! C'est pour moi la principale révélation de ce documentaire. Même si l'actrice s'est appuyée sur le travail d'un musicien ingénieux, il est incontestable qu'elle a eu l'intuition du système de "saut de fréquence", qui, aujourd'hui encore, sert de base aux télécommunications modernes. A l'époque, le projet de l'actrice est traité par le dédain. Elle a pourtant déposé un brevet, qui ne lui a finalement rien rapporté...

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   La troisième partie est moins gaie. Elle montre le déclin de l'artiste, les difficultés de sa vie personnelle... et les dégâts de la chirurgie esthétique, dont elle fut l'une des premières utilisatrices. Au début, c'était discret, mais, à la fin, c'était horrible. J'ai pensé à Elizabeth Taylor, de la génération suivante, mais qui a connu une évolution assez proche.

   Le film est un bel hommage à une femme ravissante et intelligente, qui a voulu vivre libre dans un monde de machos. Ce n'est pas un hasard s'il sort en 2018, produit par l'actrice Susan Sarandon.

jeudi, 12 juillet 2018

L'Afrique en finale

   L'équipe de France de football est une incarnation de la diversité (comme celle de 2016, d'ailleurs). Mais ce sont surtout les origines africaines des joueurs qui ressortent, quand on analyse la situation dans le détail.

   Tout d'abord, précisons que, sur les 23 joueurs sélectionnés par Didier Deschamps, seuls deux ne sont pas nés en France : Samuel Umtiti (au Cameroun) et Steve Mandanda (en République Démocratique du Congo). Mais, sur les 23, 16 ont au moins une ascendance africaine, soit 70 % de l'effectif.

   Celle-ci semble toutefois davantage répandue chez les remplaçants que chez les titulaires. Ainsi, sur les onze joueurs qui ont démarré la demi-finale contre la Belgique, seulement cinq (45 %) ont une ascendance africaine : outre Samuel Umtiti, on trouve Kylian Mbappé (de père camerounais et de mère algérienne), Blaise Matuidi (de parents angolais), N'Golo Kanté (de parents maliens) et Paul Pogba (de parents guinéens). Le total monte à 7 sur 13 (54 %) si l'on inclut les deux remplaçants entrés en cours de jeu : Steven N'Zonzi (dont le père vient de RDC) et Corentin Tolisso (de père togolais).

   Quand on ajoute les autres remplaçants, on arrive à la synthèse suivante :

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   En orange figurent les pays où est né l'un des joueurs français (Cameroun et RDC). En jaune sont coloriés les pays où sont nés uniquement les parents des joueurs sélectionnés.

   Le Mali est présent à travers Ousmane Dembélé (pour le père, la mère étant mauritanienne) et Djibril Sidibé. Le Sénégal est présent à travers Benjamin Mendy. On retrouve la République Démocratique du Congo avec Presnel Kimpembe (pour le père, la mère étant d'origine haïtienne). Enfin, l'Afrique du Nord est présente à travers Nabil Fekir (de parents algériens) et l'inénarrable Adil Rami (de parents marocains).

   Et ce n'est pas fini ! Si on ne se limite pas à l'Afrique, on verra que le troisième gardien de l'équipe, Alphonse Areola, est d'origine... philippine ! L'Europe est bien entendu présente, à travers l'Espagne pour Hugo Lloris, l'Italie pour Olivier Giroud et le Portugal pour Antoine Griezmann. Le cas de Lucas Hernandez est atypique : né en France mais ayant surtout vécu en Espagne, il a semble-t-il longtemps hésité avant d'opter pour les Bleus...

   C'est révélateur des vagues migratoires qui ont touché la France métropolitaine. A l'Europe du Sud et l'Afrique du Nord a succédé l'Afrique sub-saharienne. De surcroît, à l'exception de l'Angola (ex-possession portugaise) et de la RDC (ex-possession belge), tous les enfants d'immigrés sont issus d'anciennes colonies françaises.

   Leur bi(tri)culturalité et leur binationalité auraient pu faire pencher la balance en faveur du pays d'origine des parents. Mais ce serait oublier que ces joueurs ont été formés en France. Même s'il existe des pressions en provenance des pays d'origine pour les récupérer, on peut aussi penser que les jeunes hommes (quand ils n'ont pas laissé parler leur coeur) ont effectué un choix stratégique, celui de l'équipe nationale qui leur semblait avoir le meilleur avenir : le souvenir des Coupes du monde (1998, mais aussi 2006 et 2014) et des Championnats d'Europe (2000 et 2016) a sans doute pesé dans le choix.

   Concernant les départements d'origine des 21 sélectionnés nés en France, on constate, davantage qu'en 2016, une grande inégalité.

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   Cette carte ne mettant en valeur que les départements métropolitains, elle exclut de fait un des joueurs, Thomas Lemar, né en Guadeloupe. Il s'agit donc d'un bilan de 20 des 23 sélectionnés.

   La grande région parisienne, s'étendant de la Normandie à l'Aube, a vu naître 10 des 20 joueurs métropolitains. Loin derrière arrivent la région lyonnaise (3 voire 4 sélectionnés), le Sud-Est (3 joueurs) et le Nord (2 joueurs), le Toulousain Blaise Matuiti constituant une anomalie géographique. On retrouve la vieille France urbaine industrielle (le Nord-est excepté). De prime abord, c'est assez étonnant. L'Ouest et le Sud-Ouest ne fournissent quasiment aucun sélectionné, alors que ce sont des terres de football (surtout l'Ouest). Mais, comme l'écrasante majorité des sélectionnés est issue de l'immigration, ce sont les départements où se trouvent les villes d'accueil qui ressortent.

   Quant à moi, dimanche, vers 17 heures, je serai au cinéma. Quelque chose me dit qu'il ne devrait pas y avoir foule.

mercredi, 11 juillet 2018

Skyscraper

   Les spectateurs chinois aiment les blockbusters américains et les producteurs yankees ont très envie de pénétrer le marché du pays du milieu. On a donc décidé de produire une resucée de La Tour infernale, avec une distribution mixte, l'intrigue se déroulant à Hong Kong, dont presque toute la population est anglophone. (Les spectateurs les plus observateurs remarqueront que, lorsqu'une policière locale effectue une recherche internet, elle utilise Baidu, l'équivalent chinois de Google.)

   La séquence introductive nous permet de comprendre dans quelles circonstances le héros Will Sawyer (Dwayne Johnson, au poil) a perdu l'une de ses jambes, un détail que personne ne peut ignorer vu l'impressionnante campagne promotionnelle dont a bénéficié ce film.

   Une ellipse nous propulse ensuite dans ce qui pourrait être un futur proche, avec un tycoon (peut-être inspiré de Jack Ma ou de Robin Li) qui, à l'image des élites des cités italiennes médiévales, a envie de se faire construire la plus grande bite architecturale du monde. C'est évidemment bourré de technologie et impressionnant sur le plan visuel. (Aux cinéphiles, cela rappellera Mission : impossible - Protocole fantôme.)

   Il convient d'être attentif aux scènes en apparence banales du début de l'intrigue hongkongaise : le héros y montre à son épouse comment débloquer son téléphone et, un peu plus tard, le milliardaire l'invite dans le "saint des saints" de sa tour, la pièce la plus extraordinaire... où se déroule, environ trois quarts d'heure plus tard, l'une des séquences les plus bluffantes de ce film.

   Il faut lui reconnaître ces qualités : c'est un très bon film d'action, reposant sur des effets spéciaux particulièrement réussis... à tel point que, dans le générique de fin, la catégorie "digital artists" regroupe la majorité des effectifs.

   Même si l'apologie lourdingue de la cellule familiale plombe un peu l'histoire (avec, de surcroît, une gamine qui passe beaucoup de temps à crier ou pleurer...), j'ai aimé suivre le héros dans ses aventures rocambolesques. La séquence de la grue de chantier est impressionnante... bien qu'en partie invraisemblable. Mais, pris dans le rythme, on se laisse porter. Plus forte encore (pour moi) est la séquence qui mène le héros aux éoliennes verticales, en longeant la paroi extérieure de la tour, à plusieurs centaines de mètres d'altitude. D. Johnson y fait montre de ses qualités athlétiques.

   C'est bien foutu, pas hyper subtil, mais, en à peine plus d'1h30, dans une grande salle (avec du bon son), on passe un agréable moment.

14:27 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 10 juillet 2018

A la dérive

   Attention, dès le début, on nous prévient : c'est inspiré d'une histoire vraie. A la base, je suis assez client des intrigues adaptées des aventures extraordinaires vécues par des gens a priori ordinaires. Ici, le contenu est fractionné en deux temporalités, qui alternent. Le présent est ce qui se passe après l'accident grave, survenu pendant la tempête. Ce n'est que dans le dernier quart du film qu'on voit le déroulement (spectaculaire) de cet accident, quand s'achève la seconde temporalité, qui part de la rencontre des deux héros.

   Richard est un jeune loup de mer, musclé, barbu-mais-pas-trop, le sourire éclatant. Et il est tatoué, le gars. Et célibataire. Ça tombe bien, Tami la routarde des mers au physique de mannequin est en quête d'une histoire avec un mec disponible. On le voit à ses tétons qui pointent. Ils pointent sous ses robes, ses hauts, ses maillots de bain... c'est fou ce qu'elle a pu ranger comme fringues dans son petit sac à dos.

   Mais ce n'est pas là qu'on a vu poindre les tétons pour la première fois. La scène d'ouverture montre la jeune femme en pleine galère, juste après le quasi-naufrage. Elle est en cabine, à moitié noyée. Ah, mince, la porte est coincée. Vite, elle se débarrasse de sa vareuse... et c'est là qu'on voit poindre les tétons.

   Vous avez compris que le début ne m'a pas mis dans de bonnes dispositions. D'un côté, on a me semble-t-il hyper souligné la situation de la quasi-naufragée, de l'autre les retours en arrière nous proposent le début d'une histoire d'amour façon collection Harlequin. Et ces dialogues ! Richard finit quand même par lui dire : "J'ai traversé la moitié du globe pour te rencontrer." Trop romantique, le gars !

   Cela devient intéressant quand le premier fil narratif (celui du présent) nous montre le couple dans la merde, au quotidien. Comme Richard est atrocement blessé, c'est Tami qui doit presque tout faire. C'est un bel hommage à une femme débrouillarde. L'actrice Shailene Woodley (qui incarna l'héroïne de Divergente) s'en sort bien.

   Le film devient franchement poignant quand intervient un twist. Je ne peux pas trop en dire, mais sachez que l'accident ne s'est pas tout à fait déroulé comme on nous le laisse penser au début. On finit par comprendre et cela gagne en épaisseur. Du coup, même si, à la fin, on retrouve l'effet carte postale et les tétons qui pointent, je suis sorti de là plutôt satisfait.

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L'Aveyron dans "Le Canard"

   La semaine dernière, la presse locale (notamment La Dépêche du Midi) s'est fait l'écho de l'ouverture d'une nouvelle salle dans le château d'Estaing. L'ex-président de la République Valéry Giscard d'Estaing et son épouse Anne-Aymone sont venus inaugurer la chose, dans une ambiance cordiale.

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   L'atmoqphère était tellement bonne que personne n'a osé contredire l'ancien président quand il affirmé que sa famille descendait des comtes d'Estaing. Rappelons que le nom "d'Estaing" est accolé à celui de Giscard depuis 1922, suite à une décision administrative. La famille Giscard prétend descendre des d'Estaing par une branche "naturelle" (on disait "bâtarde" à l'époque) qu'elle est sans doute la seule à reconnaître. (On s'est aussi appuyé sur une homonymie à propos de Lucie-Madeleine d'Estaing.)

   Par contre, l'épouse de l'ancien chef de l'Etat (mise à l'honneur ce jour-là) est bel et bien d'ascendance noble (et même royale). Là encore, la presse s'est faite complaisante, relayant les propos giscardiens sur le rôle supposé tenu par la Première Dame à l'époque où son conjoint infidèle occupait l'Elysée...

   On ignorait par contre que, selon Le Canard enchaîné, cette inauguration a servi de prétexte à VGE pour "sécher" la cérémonie de panthéonisation de Simone Veil, organisée deux jours plus tard :

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   C'est d'autant plus cocasse qu'interrogé à Estaing, VGE n'a été qu'éloges pour son ancienne ministre.

   Ceci dit, je comprend qu'à 92 ans, l'ancien président ait préféré se faire cirer les mocassins dans la fraîcheur estagnole à devoir se tenir au garde-à-vous dans la moiteur parisienne, en l'honneur d'une roturière rescapée des camps qui s'était un temps rebellée contre lui.

lundi, 09 juillet 2018

Champions

   Cette comédie espagnole se déroule dans le milieu du basket-ball... entre autres. Le héros Marco (Javier Guttierez, excellent, tout comme dans La Isla minima) est un gros connard (au début). Il est l'entraîneur-adjoint d'une équipe de première division et ambitionne de devenir le numéro 1. C'est un perfectionniste, avide de reconnaissance, qui n'a pas eu la carrière de joueur qu'il espérait, en raison (croit-il) de sa petite taille. Il est cassant, arrogant voire méprisant et vient de rompre avec sa superbe épouse... pour retourner habiter chez sa mère. Voilà la situation de départ, un brin caricaturale.

   Marco finit par péter les plombs et risque de tout perdre, définitivement, à cause de sa propension à "contourner" les règles, quelles qu'elles soient. A l'initiative d'une juge, il "hérite" d'un travail d'intérêt général qu'on pense être dans ses cordes : entraîner pendant trois mois une équipe de handicapés mentaux et les faire participer au championnat spécialisé. La tâche ne s'annonce pas aisée. Pour l'ambiance, on n'est pas très loin de Rasta Rockett et The Full Monty.

   Pour l'entraîneur pointu, la découverte de sa nouvelle équipe est un choc culturel, pas uniquement en raison du niveau de ses joueurs. Là, on nous balance une brouette de clichés : ils sont moches, certains sales, ne comprennent pas ce qu'on leur dit et agissent souvent de manière totalement irrationnelle. On rit des situations cocasses, mais les handicapés vont rapidement acquérir de la dignité aux yeux des spectateurs. C'est l'une des forces de ce film que de parvenir à faire rire du handicap tout en montrant les personnages dans leur richesse individuelle... et leurs difficultés quotidiennes. De surcroît, dans le groupe, le plus handicapé est l'entraîneur, qui n'arrive pas à exprimer ses sentiments ni à vaincre ses craintes profondes. Vous l'avez compris : à travers le parcours abracadabrantesque de cette équipe, c'est une leçon de morale qui nous est donnée.

   On reçoit aussi une leçon de sport. Notons tout d'abord que les scènes de basket sont bien filmées... et que les handicapés vont finir par assez bien évoluer sur le terrain. Mais, surtout, on nous fait comprendre qu'au delà du match, c'est le plaisir de jouer ensemble, de former une équipe, qui compte. Même si certaines péripéties sont un peu téléphonées, j'ai apprécié cette comédie sans complexe, qui traite du vivre ensemble.

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dimanche, 08 juillet 2018

Mutafukaz

   Sous ce titre mystérieux se cache l'adaptation d'une série de bandes dessinées de Guillaume Renard. Cela a déjà donné naissance à un court-métrage (Opération Blackhead), dont la substance est reprise dans l'une des premières séquences du film.

   Pour le long-métrage, le réalisateur s'est appuyé sur une équipe japonaise (le coréalisateur a notamment travaillé sur Amer Béton), ce qui donne une coloration manga à sa bd de style "culture de rue". Le mélange est détonnant, puisque des personnages semblant sortis d'une production japonaise évoluent dans un Los Angeles de fiction, uniquement constitué de ghettos, dans un futur proche.

   Le scénario est assez travaillé. L'histoire démarre sur une poursuite et une exécution, l'enjeu étant la récupération/sauvegarde d'un bébé. On va évidemment retrouver celui-ci des années plus tard. Il n'en a pas conscience au début, mais le jeune Lino est doté de super-pouvoirs, qui ne demandent qu'à s'exprimer. En attendant ce jour glorieux, il trime d'emploi précaire en emploi précaire, habite un appartement miteux et a pour meilleurs amis deux relous, l'un avec une tête en forme de crâne enflammé, l'autre habitant une caravane pourrie, adepte des plans foireux. Bref, c'est la lose.

   Seul éclair de bonheur dans la vie de Lino, la présence dans le quartier d'une beauté fatale, une jeune femme mince, aux jambes longues, à la poitrine opulente, portant exclusivement des mini-jupes "ras-la-touffe". Et voilà le romantisme qui débarque dans cette histoire de crasse et de violence !

   Pour la violence, on est servi. Ce n'est pas pour les marmots. Le film est plutôt destiné aux ados et aux adultes. Entre les gangs qui s'entretuent au moindre regard de travers, la police qui tire sans sommation et un mystérieux groupe crapuleux qui semble en vouloir au jeune homme, les sources d'ennuis pullulent dans le quartier.

   On nous embarque dans une aventure folle, pleine de péripéties tragi-comiques. Si le dessin des personnages principaux est assez sommaire, il faut quand même signaler que les décors sont soignés. Les mouvements sont eux aussi réussis (même si parfois on a l'impression de se retrouver dans Ken le survivant), avec une grande variété de cadrages. Le réalisateur a visiblement mis du coeur à l'ouvrage.

   Bien sûr, c'est très différent des Indestructibles 2 (destiné à un public familial), mais c'est une animation originale, souvent drôle, mettant en scène une violence déjantée qui n'est pas sans rappeler certains films de Quentin Tarantino.

samedi, 07 juillet 2018

Volontaire

   Passée derrière la caméra, l'actrice Hélène Fillières (qui s'est réservé un petit rôle dans ce film) a placé son intrigue à l'école des commandos de la Marine française, en Bretagne. L'héroïne, Laure Baer (Diane Rouxel, vue il y a deux ans dans l'excellent Moka) n'a a priori rien d'une "fana mili". C'est la fille d'un couple d'intellectuels bobos (une actrice, superbement incarnée par Josiane Balasko, et sans doute un écrivain), en couple avec un charmant garçon. Elle a décroché un double master anglais-russe... et voilà qu'elle décide de s'engager dans l'armée.

   On se dit que la frêle jeune femme, bien que charmante, risque d'en chier. En fait pas trop, au début, puisqu'elle a été recrutée sur ses compétences. Elle est donc chargée d'un travail administratif, sans avoir eu à passer la sélection physique. Elle se retrouve sous les ordres directs du directeur-adjoint de l'école, le mystérieux et inquiétant commandant Rivière (Lambert Wilson, marmoréen). Très vite, on sent qu'il y a comme un truc entre cet officier de carrière, pour qui l'armée est toute sa vie, et la civile à cent lieues de ses préoccupations, qui semble fascinée par cet univers nouveau pour elle.

   C'est le coeur du problème... et ce n'est pas bien traité. On sent que l'héroïne est à la recherche d'un idéal masculin. Les hommes de son entourage sont des citadins conventionnels, le petit copain limite métrosexuel. La jeune Laure se sent attirée par des hommes plus physiques, plus intenses, mais pas bourrins. Le commandant semble incarner pour elle un modèle de virilité respectueuse. Mais la réalisatrice peine à faire passer l'évolution intérieure du personnage... tout comme son évolution physique d'ailleurs : alors que, dans la seconde partie, elle suit un entraînement très rigoureux, son corps ne subit aucun changement notable.

   Le personnage du commandant conserve longtemps son caractère énigmatique. Il faut s'appuyer sur son vieux pote des bérets verts pour en savoir plus. De ce point de vue-là, Lambert Wilson fait le job. On se demande s'il considère "la miss" (surnom de l'héroïne) comme la fille qu'il aurait aimé avoir ou une version féminine, "moderne" et plus jeune de lui... ou bien une chance inespérée de connaître enfin le bonheur (lui qui, durant sa vie, a fait passer le devoir avant tout). Seule la fin nous permet de conclure.

   Le film souffre de deux autres défauts. En dépit de ses efforts, l'actrice n'a pas le physique du rôle, compte tenu de ce qui se passe dans la seconde partie. Là, on est proche du conte de fées. J'ai aussi des doutes quant à la quasi-absence de réaction misogyne ou homophobe, y compris dans les chambrées. Cela fait un peu carte postale, même si les rares moments de groupe sont bien filmés. J'ai aussi apprécié la mise en scène des cérémonies militaires, avec leur symbolique et leurs rituels. Mais le film manque de chair.

14:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 06 juillet 2018

Les Indestructibles 2

   Il a fallu près de quinze ans à Pixar et Brad Bird pour produire la suite des Indestructibles, une animation qui, à l'époque, m'avait paru un peu en-dessous par rapport aux films du même genre. Pour ce second volet, pas de doute, on a mis le paquet.

   Le film mélange les genres espionnage et super-héros, avec une pincée de comédie familiale, le tout dans un cadre à la fois futuriste et vintage, si l'on s'en tient aux voitures et aux téléphones. La musique est jazzy, très entraînante. Elle a été composée par Michael Giacchino, que l'on pourrait considérer comme un pendant états-unien d'Alexandre Desplats. Il a le talent de créer des musiques diverses et entraînantes pour des productions destinées au grand public (récemment pour Jurassic World 2, La Planète des singes : suprématie et Rogue One).

   On ne s'ennuie pas dans cette histoire d'environ deux heures. Le scénario fourmille de péripéties, mais surtout, l'intrigue est complètement dynamitée par le personnage du bébé, qui voit ses pouvoirs extraordinaires progressivement se révéler, à l'étonnement de son père, de son frère, de sa sœur...et d'une galerie de personnages plus ou moins bien intentionnés qui vont se frotter au bambin.

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   Celui-ci fait son apprentissage avec un raton-laveur goinfre et agressif, dans une séquence vraiment tordante. Le meilleur est à venir quand le bébé est confié aux soins d'une tatie, l'inénarrable Edna Mode, qui a les traits de l'actrice Linda Hunt (vue dans Prêt-à-porter de Robert Altman et dans la série NCIS Los Angeles) et la voix d'Amanda Lear (dans la version française) :

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   Le début nous montre la famille en pleine action, avant que Monsieur Indestructible ne soit contraint de retourner à la vie de père au foyer. Le voilà qui se consacre à la tâche ardue (et ingrate) du soin des enfants, entre un bébé hors du commun mais instable, un garçon pas doué en maths et une aînée en pleine crise d'adolescence. On sent que le vécu de Brad Bird a dû contribuer à la création des nombreuses situations cocasses dans lesquelles le père se trouve empêtré. C'est souvent hilarant.

   A côté de cela, Madame Indestructible, alias Elastigirl, est engagée par un étrange milliardaire et sa géniale sœur pour lutter contre le crime. On se dit qu'il doit y avoir anguille sous roche... et on n'est pas détrompé par la suite. Cela donne du rythme à l'intrigue, une brochette de nouveaux super-héros venant pimenter le tout, avec, par dessus le marché, les enfants qui viennent au secours des parents.

   J'ai passé un excellent moment. Dans la salle, petits et grands ont ri de bon cœur.

19:59 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 05 juillet 2018

Demi-soeurs

   Trois demi-soeurs qui ne se connaissaient pas sont réunies par un notaire à l'occasion de la mort de leur père, un sacré coureur de jupons, qui leur laisse... un appartement. N'importe quel spectateur français de base fait immédiatement le lien avec Les Trois Frères, d'autant que la caractérisation des personnages principaux n'est pas sans rappeler le glorieux ancêtre.

   Ainsi, l'une des trois soeurs, Lauren (incarnée par Alice David, vue notamment dans Babysitting), est une sorte d'intermittente du spectacle, qui peine à percer dans le milieu de la mode, tout comme Bernard Latour/Campan peinait à percer dans le monde audiovisuel.

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   La culture et la mode relieraient plutôt Lauren à Pascal Latour/Légitimus, mais je pense que celui-ci a davantage inspiré la présence de Salma (Sabrina Ouazani, resplendissante), autre exemple de personne issue des "minorités visibles" et qui a fait son petit trou dans la société française.

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   Le dernier membre du trio se trouve dans une sorte d'entre-deux. Lui comme elle semble appartenir à la bourgeoisie, mais connaît finalement une situation plus précaire que ce qu'il paraissait au départ. A Didier Latour/Bourdon correspond Olivia (Charlotte Gabris, pas mal dans un rôle difficile). A propos de celle-ci, on appréciera qu'on ait évité de nous resservir certains clichés sur les juifs.

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   Evidemment, les trois jeunes femmes (toutes ravissantes, bien entendu), que rien ne semblait rapprocher vont apprendre à se connaître et faire cause commune pour garder leur héritage, face à la famille légitime du défunt, qui ne supporte pas cette survivance successorale des fautes du passé.

   C'est aussi intéressant pour la description du milieu dans lequel évolue chaque héroïne. On n'est certes pas au niveau d'une étude universitaire, mais on a droit à quelques scènes bien troussées sur la petite main du monde puant de la mode, la prof musulmane d'un établissement de banlieue et la petite fille juive modèle qui risque de passer à côté du bonheur.

   Les trois actrices se sont données à fond et les dialogues sont plutôt bien écrits, avec plusieurs répliques particulièrement mordantes. (L'une d'entre elles fait allusion à Jean-Vincent Placé, dans un contexte que je laisse à chacun-e le plaisir de découvrir.)

   Par contre la fin est convenue, trrrrrèèèèèès "politiquement correcte". Cela montre les limites de cette comédie, pas déshonorante du tout, mais qui n'atteint pas des sommets.

mercredi, 04 juillet 2018

Au Poste !

   Quentin Dupieux est un cinéaste atypique et plutôt inventif. (Il n'a pas énormément de mérite à cela, tant la concurrence est faible en France dans ce domaine.) Il y a quelques années, le public cinéphile l'a découvert grâce à Rubber, sans doute son meilleur film jusqu'à aujourd'hui (ce qui m'autorise à renommer le réalisateur "Quentin Dupneu"...). Les suivants m'ont déçu, surtout Wrong Cops. Réalité était un peu mieux foutu, mais se perdait trop dans les jeux intellectuels.

   Le cadre est évidemment un hommage à Garde à vue, le chef-d’œuvre de Claude Miller. Un commissaire gouailleur et roublard fait face à un témoin emprunté, affamé... et moustachu. Signalons tout de suite l'excellence du casting, avec, en tête d'affiche, un Benoît Poelvoorde en pleine forme et un Grégoire Ludig très bon. Deux caractères s'opposent... ou pas. Les deux hommes semblent pouvoir s'accorder.

   Il est question d'un corps ensanglanté qu'on a retrouvé au pied de l'immeuble où habite Fugain, le témoin qui a appelé les secours... et oublié son fer-à-repasser à côté du cadavre. De surcroît, cette nuit-là, Fugain est sorti à sept reprises de l'appartement qu'il partage avec sa compagne somnambule. C'est du moins ce qu'affirme une voisine (interprétée par un homme que l'on voit ailleurs dans le film... cherchez bien !).

   La suite est donc en partie constituée de retours en arrière, qui nous donnent la version du témoin. Que s'est-il donc passé les sept fois où, en pleine nuit, il a quitté son domicile, avant d'y revenir ? Le commissaire Buron prend sa déposition à la machine à écrire, relevant le moindre détail, pinaillant sur une formule... sans oublier de planifier ses loisirs dans le même temps.

   Il va se passer de drôles de choses dans ce commissariat... et aussi en dehors, les retours en arrière ne se déroulant pas tout à fait comme on l'attend. Le non-sens prend parfois le dessus, jusqu'au retournement, que je me garderai bien de révéler.

   Malheureusement, le film, parti sur de bonnes bases, ne trouve pas vraiment sa conclusion. Il s'achève de manière abrupte, décevante pour moi. Et puis, comme il dure à peine plus d'une heure, j'ai pris la peine de rester pendant le générique de fin. Dupneu Dupieux y remercie tous ceux qui ont permis la concrétisation de ce film... notamment Placid et Muzo (ceux de la période Arnal, je pense : le réalisateur y a peut-être puisé sa manière de détourner les codes).

   Arrive enfin ce que tout cinéphile qui se respecte attend : la scène post-générique, susceptible d'apporter un éclairage supplémentaire à l'histoire. Je ne vais pas en dévoiler le contenu, mais sachez que le réalisateur tire la langue (de manière symbolique) à ses spectateurs.

   Espèce d'enfoiré !

23:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Moriarty en manga

   C'est à deux auteurs japonais inconnus au bataillon (Ryosuke Takeuchi pour le scénario, Hikaru Miyoshi pour les dessins) que l'on doit cette adaptation de l’œuvre d'Arthur Conan Doyle, avec un point de vue retourné, puisque le héros de l'histoire est le super-méchant, le "Napoléon du crime", l'infâme Moriarty.

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   Oui, mais lequel ? Parce que dans la première partie de ce volume (le deuxième devant sortir en septembre prochain), on découvre la jeunesse de plusieurs garçons, certains se ressemblant physiquement :

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   Ici, on en voit trois mais, au total, ce sont quatre individus qui sont appelés, à un moment ou à un autre, James Moriarty. Le pire est qu'aucun d'entre eux n'a pour premier prénom James ! Cela donne du fil à retordre au lecteur, qui peut suivre plusieurs pistes. A la fin du premier tome, je pense pouvoir affirmer que l'on a compris lequel des quatre va devenir le plus redoutable adversaire de Sherlock Holmes.

   Avant cela, on nous plonge dans l'Angleterre victorienne, avec ses inégalités sociales vertigineuses. Le scénariste va faire de Moriarty un rebelle, sorte de Robin des Bois du crime, mâtiné de marxisme ! Il décide de s'en prendre à la noblesse anglaise, jugée indigne de vivre. La propre famille de Moriarty va servir de laboratoire à ces thèses criminelles, avant que l'action ne s'élargisse à d'autres lignées. Dans le même temps, Moriarty tente de se rapprocher du peuple, parfois de manière maladroite.

   C'est une donc une assez bonne mise en bouche, un peu caricaturale parfois. L'esthétique rappellera aux vieux spectateurs des émissions enfantines des séries comme Lady Oscar ou Cobra (le mouvement et la couleur en moins). On attend avec impatience la rencontre avec le génial détective, qui devrait se produire dans l'un des tomes suivants.

   D'ici là, les amateurs de "sherlockeries" se contenteront de regarder, sur M6, les derniers épisodes de la saison 5 d'Elementary, que la chaîne s'est décidée à diffuser pendant la coupe du monde de ballopied. On peut aussi se laisser tenter par Sherlock Gnomes, un bon pastiche.

lundi, 02 juillet 2018

How to talk to girls at parties

   Le titre pourrait faire croire que l'on va voir une version britannique (et vintage) d'American Pie. Il n'en est rien, même si, de temps à autre, un petit côté cracra transgressif surgit à l'écran... ce qui n'est pas pour me déplaire.

   L'action débute en 1977, en pleine émergence du mouvement punk. Cela ne suscite aucune nostalgie en moi, vu que, dans ma prime jeunesse, j'assimilais les punks à de gros sales qui passaient leur temps à gueuler et boire des bières... Beurk ! Au moins, ici, si l'on cherche à nous faire comprendre le besoin de révolte d'une jeunesse corsetée par la bien-pensance britannique, la dérision n'est pas loin et quelqu'un qui n'a pas vécu l'époque comprend à quel point c'était parfois bordélique.

   Mais ce n'est pas un film punk. Il y a bien quelques séquences (plutôt musicales) qui se déroulent de manière punk, ou qui sont filmées de manière punk. Un autre style vient se mêler au premier : le psychédélique, qui permet notamment d'introduire le versant science-fiction de l'intrigue. Ceci dit, c'est parfois tellement barré que l'on se demande ce que les auteurs ont consommé avant de produire ce truc ! (Du réalisateur, John Cameron Mitchell, on a déjà pu voir le sulfureux Shortbus...)

   Il est aussi question des premières amours, avec la formation d'un couple attachant. Au niveau du casting, c'est incontestablement Elle Fanning qui se détache. C'est presque scandaleux d'être aussi belle et bonne comédienne ! Elle retrouve l'une de ses comparses des Proies, Nicole Kidman, qui kiffe sa life en femme mûre anticonformiste... et avide de produire des chanteurs à succès.

   En passant, on peut noter que presque tous les personnages féminins sont incarnés par des actrices au physique très avantageux. (Ah, ces tenues moulantes en plastique !...) On a été visiblement moins regardant sur le physique de leurs homologues masculins...

   Je pense que vous avez compris que c'est du genre frappadingue. Cela part un peu dans tous les sens. C'est souvent drôle, de temps en temps émouvant et, à quelques occasions, sensuel, sans être vulgaire. Bref, c'est un ovni cinématographique dont je conseille la découverte.

dimanche, 01 juillet 2018

Have a nice day

   Ce film d'animation chinois est plutôt destiné aux adultes. L'intrigue se déroule dans une petite ville de province, plus ou moins contrôlée par des mafieux. Dans le lot, il y a quelques pieds nickelés, sans parler des francs-tireurs, individus sans véritables attaches, prêts à tout pour grappiller une parcelle de bonheur pognon.

   C'est ce qui donne son côté noir à l'histoire. L'argent semble obséder nombre de personnages... en tout cas beaucoup plus que le respect de la loi ou l'accomplissement professonnel. On se croirait presque dans une petite ville américaine, ni pauvre ni riche, mais où les rêves des habitants se sont fracassés sur une réalité sordide. (L'un de ces rêves est mis en scène de manière comique, lorsque deux personnages voient l'avenir que pourrait leur offrir l'acquisition frauduleuse d'une grosse somme d'argent.)

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   Sur le plan formel, ce n'est pas une oeuvre virtuose. Elle ressemble d'ailleurs à beaucoup de productions de base américaines. En tout cas, elle est assez expressive et, dans la deuxième partie, devient un peu gore : la violence est le moyen privilégié par la majorité des protagonistes pour résoudre leurs problèmes.

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   Tous sont liés les uns aux autres, sans qu'ils en aient forcément conscience. Du jeune homme adepte des jeux vidéo (et voleur d'un sac d'argent) à la restauratrice copine d'un drôle de vieux type (qui, sous l'apparence d'un plouc, cache un fan de technologies), en passant par les petites mains du caïd local (qu'on appelle "Oncle Liu") et un tueur à gages boucher dans le "civil", tous connaissent quelqu'un qui connaît l'un des intervenants de l'histoire.

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   C'est donc dur mais parfois assez cocasse, comme lorsque le tueur est interrompu en pleine action par un coup de fil lui vantant des placements immobiliers. On est aussi surpris par les développements que prennent des événements en apparence complètement anecdotiques, comme cette rivalité sur la route, qui va finir en carnage (quasi) général.

   Cela ne dure qu'1h15 et c'est un point de vue original sur la Chine contemporaine... point de vue que Pékin n'a pas apprécié, puisque le gouvernement chinois a tenté d'empêcher la diffusion du film à l'étranger.

19:47 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 30 juin 2018

Sicario - La Guerre des cartels

   Il y a presque trois ans, j'avais bien aimé le premier volet des aventures des tueurs au pays des trafiquants de drogue. Pour le deuxième film, on a changé le réalisateur et presque toute l'équipe technique... mais pas le scénariste, Taylor Sheridan, qui a récemment réalisé Wind River.

   Et on a bien fait. De surcroît, ce film n'est pas un décalque du précédent. L'intrigue est construite différemment, de manière moins linéaire, avec des péripéties inattendues et des pistes qui resteront inexplorées. (Seuls les amateurs de la série Blacklist devineront qu'on leur prépare une fin légèrement différente de ce qui est montré à l'écran concernant l'un des personnages principaux...) On commence avec une prenante séquence liant immigration et terrorisme, assez révélatrice des craintes ressenties par une certaine Amérique blanche. Mais, vu de France, on peut aussi trouver des points de comparaison.

   Le fil narratif qui commençait à s'esquisser est assez rapidement brisé, après une séquence africaine qui n'est pas sans rappeler Zero Dark Thirty. Interviennent de plus en plus ce que l'on appellerait chez nous des "barbouzes", des paramilitaires engagés en douce par Oncle Sam.

   Un enlèvement va tout faire basculer. On retrouve quelques personnages du précédent opus mais, surtout, on comprend qu'on ne peut se fier à personne... ou presque. Reste à savoir qui va trahir qui, et comment. Cela devient un jeu du chat et de la souris, dans lequel un traqueur peut se retrouver traqué à son tour... et réciproquement.

   C'est très bien interprété, notamment par Benicio del Toro et Josh Brolin (aussi à l'affiche de Deadpool 2 et de Avengers - Infinity War). La gamine n'est pas mal, avec du tempérament... C'est surtout un petit canon en puissance. Ah, les directeurs de casting...

   Quelque part entre le Traffic de Soderbergh et le Léon de Besson, ce film d'action remplit très bien son office, grâce notamment à une photographie superbe, des décors impeccables et une musique d'accompagnement parfaitement placée. (On la doit à Hildur Gudnadottir, qui avait travaillé sur Hijacking.)

22:27 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 28 juin 2018

Retour à Bollène

   J'ai failli passer à côté de ce petit film sorti le mois dernier. C'est une fiction à caractère autobiographique, le réalisateur Saïd Hamich (producteur entre autre de Much Loved) ayant passé une partie de sa jeunesse à Bollène, une petite ville du département du Vaucluse (en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur) :

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   L'intrigue repose sur des contrastes. La ville elle-même est partagée entre l'image "vieille France" et proprette qu'elle veut donner (à travers ses dirigeants de la Ligue du Sud) et la présence d'une forte communauté d'origine maghrébine, précarisée.

   La famille du héros Nassim est aussi le siège de divisions. La père a eu au moins deux épouses différentes (en même temps). On y parle deux langues (voire trois avec l'anglais) : l'arabe dialectal (dominant chez les parents) et le français (courant chez les enfants). Les premiers rêvent de repartir "au pays" (c'est-à-dire au Maroc), les seconds de s'en sortir, en France.

   Le héros lui-même est une contradiction vivante : c'est un fils de la cité qui a réussi à l'école, puis à Paris et enfin aux Emirats arabes unis. D'un côté, il est très bien inséré dans le monde global, parle couramment anglais (langue qu'il préfère utiliser à Dubaï plutôt que l'arabe, avec le chauffeur de taxi), mais ressent le besoin de se ressourcer à Bollène. Pourtant, tout l'oppose à sa famille. Il a réussi, alors que les autres galèrent. Il n'est pas religieux, boit de l'alcool et goûte les concerts de musique classique (ainsi qu'Alain Bashung), alors que ceux qui sont restés en France sont tentés par le repli islamo-conservateur. De surcroît, il a épousé une non-musulmane, une Américaine, qui trouve ce coin de France très "provincial"... voire un peu puant, quand elle entend les propos du maire.

   Celui-ci connaît très bien le héros, qu'il a eu comme élève alors qu'il était enseignant dans le lycée public, un enseignant connu pour ses opinions de gauche... Le voilà devenu chantre de la droite identitaire. (Dans la réalité, la commune est gérée par le couple Bompard, issu du FN.) Les retrouvailles entre les deux hommes ne manquent pas de saveur, même si ce n'est pas super bien joué. Je trouve qu'Anas El Baz est plus expressif quand il ne parle pas ou quand il débite juste des monosyllabes. Il a du charisme, mais n'est pas très à l'aise avec les longues répliques.

   Signalons que c'est bien filmé, avec de jolies scènes de nuit... et une belle musique d'accompagnement, que l'on doit à Pauline Rambeau de Baralon. Je conseille vivement cet essai pseudo-autobiographique, qui pose de bonnes questions sur l'identité, en évitant les idées préconçues.

mercredi, 27 juin 2018

Sans un bruit

   Je ne vais plus trop voir les films d'épouvante, sauf s'ils semblent se distinguer par un soupçon d'originalité (une denrée rare dans les productions de ce genre, qui, en général, se contentent de recycler du matériau ancien, avec un poil de technologie). Il y a deux ans, je m'étais laissé tenter par The Witch. Ici, outre l'argument principal (ne pas faire de bruit pour échapper aux monstres), c'est l'affiche qui m'a attiré, avec la charmante Emily Blunt (vue récemment dans Edge of tomorrow, Sicario et La Fille du train) et la jeune pousse Millicent Simmonds, remarquée dans Le Musée des merveilles.

   Autant le dire tout de suite, cette histoire, pour originale qu'elle soit, est nourrie de clichés. Certaines péripéties se voient venir à des kilomètres, comme le gamin avec son avion à piles, le coup du clou dans l'escalier ou encore l'usage qui va être fait d'un fusil. S'ajoute à cela une certaine tendance à abuser du "juste à temps".

   Et pourtant... j'ai trouvé cela prenant. C'est d'abord dû à la qualité de l'interprétation, celle d'Emily Blunt en tête. Millicent est aussi très bien, dans un rôle moins lisse que dans le film qui l'a révélée. C'est une pré-adolescente un brin rebelle, mal dans sa peau, mais qui va jouer un rôle clé dans l'intrigue.

   Cela se passe dans un futur proche. De redoutables extraterrestres (des sortes d'hommes arachnoïdes) ont débarqué aux Etats-Unis sur Terre... et ils ont bigrement faim. Ils sont rapides, cruels, carapaçonnés... mais aveugles. Ils se guident en se fiant à leur ouïe ultra-développée. C'est leur point fort... et cela pourrait devenir leur point faible.

   On suit une famille de rescapés (un couple avec trois gosses). Les parents sont très ingénieux. Ils ont développé une série de stratagèmes pour ne pas éveiller l'attention des envahisseurs omnivores. C'est là que naît la tension, parce qu'évidemment, il est impossible à une famille normalement constituée de vivre au quotidien sans produire le moindre bruit. Cette famille-là bénéficie quand même d'un atout : elle a appris à vivre avec l'infirmité dont souffre la fille aînée, ce qui lui a été d'une grande utilité lors du débarquement des visiteurs affamés.

   Au niveau du son, on a veillé à alterner les scènes quasi-silencieuses avec celles où l'on entend de la musique d'accompagnement et celles où l'on perçoit des bruits (plus ou moins naturels). Cela contribue à rendre le film facile à suivre.

   La conclusion est toutefois abrupte. Je suis un peu resté sur ma faim, d'abord parce que j'aurais aimé en savoir davantage sur les circonstances de l'arrivée des extraterrestres. Cela reste néanmoins un spectacle tout à fait correct.

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mardi, 26 juin 2018

Une année polaire

   Cette fiction à caractère documentaire est signée Samuel Collardey, auquel on doit notamment Comme un lion et L'Apprenti. Comme dans ce dernier film, le héros (ici Anders, jeune instit) joue son propre rôle, dans une histoire qui, si elle s'inspire fortement de la réalité, a été inventée par l'auteur.

   Le professeur des écoles danois, fils de paysans (peu désireux de prendre la suite de ses parents), décide de tenter sa chance au Groenland, où trois postes sont libres. On lui suggère de choisir celui de Nuuk (sur la côte ouest), le chef-lieu où se concentre un tiers des quelque 55 000 habitants du gigantesque territoire (et où l'on trouve toutes les commodités). Mais il lui préfère le village de Tiniteqilaaq, situé sur la côte est, la plus sauvage :

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   La rencontre est un petit choc culturel. Le jeune homme va en baver, entre des enfants récalcitrants, des parents absents (pour des raisons culturelles que l'instit va mettre du temps à comprendre), une population au mieux indifférente (qui le voit comme un colon)... et des conditions matérielles pas idéales. Il est un peu dans la situation d'enseignants français métropolitains, qui demandent une mutation outre-mer sans y être toujours bien préparés. Pour le public francophone, il est important de signaler que deux sous-titrages différents sont utilisés, le blanc pour la traduction du danois, le jaune pour celle du dialecte inuit.

   L'intrigue nous fait donc suivre le professeur des écoles, un bon gars, (trop) gentil, souvent maladroit, qui tente de s'acclimater à la vie du village. Le sentier n'est pas pavé de roses mais, parfois, le jeune homme reçoit un coup de main. C'est son implication personnelle et son empathie qui vont lui permettre de gagner progressivement sa place.

   Entre temps, on aura eu droit à de magnifiques vues du territoire, du ciel (ah, les aurores boréales...), de la neige, de la glace et de l'eau. (Je pense que c'est encore plus beau que dans Le Voyage au Groenland, sorti il y a un an et demi.) L'aspect documentaire est renforcé par la description d'activités traditionnelles : la chasse, la pêche, le dépeçage... et la conduite d'un traineau. L'une des plus belles séquences voit un groupe de personnages partir à la chasse, se faire prendre dans une tempête de neige, construire un igloo de fortune... et croiser une maman ours avec ses petits. J'ai aussi été particulièrement attendri par les chiens.

   Bref, c'est un très bon film, particulièrement rafraîchissant en ce début d'été.

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lundi, 25 juin 2018

Bienvenue en Sicile !

   Une fois n'est pas coutume, je trouve le titre français meilleur que l'original (At War for Love ou In Guerra per amore), que l'on pourrait traduire par "A la guerre par amour". Celui-ci fait allusion à l'histoire d'amour contrariée qui sert de squelette à l'intrigue, alors que le titre français évoque, sur le ton de la comédie, le débarquement des Américains en Sicile, en 1943.

   C'est donc d'abord une comédie à l'italienne, avec ses caricatures, son exubérance, sa joie de vivre (et cette langue si musicale). Arturo le charmeur sans le sou rêve d'épouser la belle Flora, que son oncle envisage de marier au fils de l'une de ses relations. On est dans le petit monde des Italo-américains new-yorkais, limite (voire franchement) mafieux. Or, à la même époque, les Alliés préparent l'opération Husky. Du côté américain, on compte s'appuyer sur les liens qui existent entre certains immigrés et le pays d'origine de leurs parents. D'ailleurs, le propre père de Flora vit encore là-bas. Sa bénédiction serait bien utile à Arturo pour empêcher le mariage arrangé par l'oncle. Mais le (possible) futur beau-père de Flora possède lui aussi des relations dans son pays natal. Il va tenter de contrecarrer le projet du rival de son fils.

   L'aspect comédie est renforcé par la truculence des villageois qui vont voir débarquer les Yankees. Il y a cet étrange duo, composé d'un aveugle et d'un boiteux, qui seront mêlés à la plupart des péripéties siciliennes. Il y a ce père de famille, dont le fils porte l'uniforme italien (fasciste) et qui garde religieusement une statue du Duce dans un placard. Une intense rivalité l'oppose à sa voisine qui, au moindre bombardement, sort mettre à l'abri une statue de la Vierge. Il est aussi souvent question d'ânes, des vrais, des symboliques... et ceux d'une chanson pour enfant, à laquelle un garçon est particulièrement attaché. C'est l'un des fils rouges de l'intrigue, avec une photographie d'amoureux (maladroitement) prise devant un pont new-yorkais. Cet ancêtre du selfie devient le running gag de l'histoire.

   Et puis il y a ces trognes de mafieux. Ah, pour sûr, ils sont gratinés ! Le chef local est une pourriture débonnaire et ventripotente. Ses sbires portent d'horribles moustaches et froncent les sourcils. Vous avez compris que l'on rit souvent à cette comédie... avant que le ton ne change, dans le dernier tiers de l'histoire. Celle-ci s'appuie sur des faits réels. Le gouvernement américain, soucieux de se ménager des soutiens sur place, a conclu un pacte avec le chef mafieux Lucky Luciano. Résultat : le débarquement allié s'est très bien passé (avec peu de pertes). En contrepartie, les conquérants du jour vont confier les clés du pouvoir à des truands, certains se parant des couleurs d'un nouveau parti tout propre, la Démocratie chrétienne.

   C'est l'une des forces de ce film (hélas passé quasi inaperçu) que de parvenir à mêler une bluette sentimentale (inspirée de la commedia dell'arte) et une réflexion politique sur un sujet qui a, aujourd'hui encore, un impact sur la société italienne.

samedi, 23 juin 2018

Manifesto

   C'est du cinéma expérimental. Le réalisateur a voulu mettre en scène une douzaine de textes littéraires engagés, des manifestes artistico-politiques. Pour cela, il a créé autant d'historiettes, dont l'héroïne est toujours incarnée par la même actrice, Cate Blanchett. Celle-ci s'est mise dans la peau d'une clocharde, d'une chercheuse, d'une employée de déchetterie, d'une mère ultra-conservatrice, d'une tradeuse, d'une punk, d'une présentatrice de télévision, d'une reporter, d'une chorégraphe, d'une marionnettiste, d'une oratrice funèbre, d'une organisatrice de soirées "prout prout" et d'une professeure des écoles.

   Chaque séquence se veut l'illustration du propos sur le fond, mais parfois aussi sur la forme. Ainsi, le discours marxiste dénonçant l'art bourgeois est plaqué sur une scène montrant une clocharde traversant un site industriel à l'abandon, d'autres femmes (âgées et riches) s'amusant à tirer des feux d'artifice à quelques pas de là. Mais la forme reste classique.

   La suite a de quoi déprimer. Les extraits des mouvements dadaïste, surréaliste et futuriste dépeignent un monde en pleine décrépitude, dont il faudrait quasiment faire table rase... et il m'a semblé que le film était parfois (volontairement ?) en contradiction avec ce qu'il défendait. Ainsi, à plusieurs reprises, il est dit qu'il ne faut plus faire référence aux oeuvres du passé... et voilà-t-y pas que, dans la séquence de la chercheuse, l'héroïne se retrouve dans une pièce dont le décor est composé de trompe-l'oeil géométriques, avec, au centre, un grand monolithe noir. (Il s'agit bien entendu d'une allusion à 2001, L'Odyssée de l'espace, de Stanley Kubrick.) Ceci dit, il est quand même troublant que certains textes écrits il y a 80-100 ans fassent autant écho à notre époque.

   Vers la fin, il est question de Jean-Luc Godard et du Dogme (Lars von Trier). L'artiste est censé-e s'effacer derrière son oeuvre et ne pas la signer. Peu de temps après, on pourra constater que le générique de fin commence par les noms de Cate Blanchett et Julian Rosefeldt...

   En changeant de séquence, on passe parfois d'un extrême à l'autre, entre ceux qui finissent par affirmer que l'art n'existe plus et ceux qui pensent (pour différentes raisons) que tout peut être art. On en arrive fort logiquement à l'art conceptuel, mis en scène... et démonté au cours d'un faux journal télévisé, plein de malice, dans lequel l'éblouissante Cate incarne à la fois la présentatrice permanentée et la journaliste en extérieur, sous la pluie. Le but de la séquence est de dénoncer le toc, le prétentieux...

   Si on ne goûte guère les débats intellectuels autour de l'art et de sa place dans la société, on peut se contenter de jouir de la performance de l'actrice... surtout quand on sait que l'ensemble a été tourné en moins de deux semaines. Rien que pour cela, c'est un film à voir.

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mercredi, 20 juin 2018

Avengers - Infinity War

   Je me suis finalement décidé à voir la grosse machine hollywoodienne, censée être le couronnement de dix ans de remise à jour de l'univers de super-héros marvelliens. J'ai raté plusieurs épisodes en cours de route (concernant Captain America, Spider-Man, Black Panther... et le précédent Avengers), mais j'ai pu suivre sans problème l'intrigue.

   C'est d'abord un bon film d'aventures, qui suit un schéma rôdé jadis par les productions Lucasfilm : la mise en parallèle de plusieurs fils narratifs, liés les uns aux autres, qui finissent par se rejoindre. L'un de ces fils est constitué par les pérégrinations de Thor (dont le personnage a acquis une épaisseur qui n'est pas que physique), en compagnie d'une partie des Gardiens de la galaxie (mes petits chouchous). L'autre partie de l'équipe va très vite se frotter au méga-hyper-giga-super vilain Thanos... avant de tomber sur Iron Man et Spider-Man, qui font cause commune avec Docteur Strange. De son côté, Hulk va retrouver Captain America et Black Panther (entre autres).

   Tout ce beau monde doit donc se coltiner Thanos et ses affidés. Je reconnais que ce personnage contribue à l'intérêt de l'intrigue. Ce n'est pas un vulgaire tyran génocidaire. Il a une conception "réaliste" (je dirais plutôt cynique) de la vie des peuples. En massacrer une partie permet de sauver l'autre. Il ne cherche même pas l'enrichissement ou l'accumulation de conquêtes féminines. Sur le fond, c'est effrayant, mais c'est mis en scène avec (une relative) subtilité.

   Le problème est que l'ensemble a beau être assaisonné d'humour, le gros du film est constitué de bastons plus ou moins numériques, parfois très proches du jeu vidéo. (Ce n'est pas un compliment.) De plus, certains acteurs ne m'ont pas paru très convaincants... au premier rang desquels je place Chris Pratt (le moins bon des Gardiens) et Mark Ruffalo (qui fait pitié). Et puis le vieux cinéphile que je suis en a un peu marre de ces dialogues creux dont l'objet est de faire comprendre aux spectateurs que le sort du monde dépend d'une boule de feu, d'une toile d'araignée ou d'un énorme pain dans la gueule...

   Ceci dit, comme c'est bien foutu, cela se regarde sans déplaisir... mais figurez-vous qu'il y a une suite ! Déjà, au cours du film, on comprend (notamment grâce à Strange) que ce que l'on voit n'est qu'une version de l'histoire. Il va donc falloir patienter un peu pour assister à la suite ou, si vous préférez, à la fin alternative, une trèèèèès longue fin, puisqu'elle promet de durer plus deux heures.

23:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ciéma, cinema, film, films

mardi, 19 juin 2018

La Révolution silencieuse

   Cette "salle de classe silencieuse" (titre originel, en allemand) est celle de lycéens de RDA (l'Allemagne communiste), sur le point de passer leur Abitur (baccalauréat), en 1956. Un jour, par solidarité avec les Hongrois révoltés contre la domination soviétique, ils décident de se taire pendant deux minutes, en cours d'histoire. Ce battement d'ailes de papillons va déclencher une tempête politique.

   Ce n'est pas la première fois que le cinéma allemand se lance dans l'analyse de la période de Guerre froide. Les cinéphiles se souviennent de l'excellent La Vie des autres, en 2007. Plus récemment, on a eu droit à De l'autre côté du mur (dont l'actrice principale est présente ici) et D'une vie à l'autre. L'originalité du film est de se situer avant la construction du Mur de Berlin, quand seuls des contrôles policiers séparaient les deux parties de la ville.

   L'univers adolescent est bien restitué, montrant des garçons qui cherchent à voir des femmes nues et des couples qui se forment, avec la maladresse des premières amours et des malentendus. L'habileté du scénario consiste à intégrer l'aspect sentimental à l'intrigue politique. On est visiblement dans un lycée au recrutement populaire (et provincial), avec un public mélangé, puisque les enfants d'un vétérinaire et le fils d'un membre éminent du conseil municipal côtoient des rejetons d'ouvriers. Compte tenu de la relative uniformisation vestimentaire qui régnait à l'époque, il n'est pas facile de les distinguer à leur apparence.

   Les auteurs ont aussi voulu éviter le film uniquement à charge. D'un côté, ils montrent quand même que ce pays dirigé par d'anciens opposants au nazisme est devenu une prison pour une grande partie de sa population (la Stasi se comportant quasiment comme la Gestapo). D'un autre côté, les défenseurs du régime communiste (et contempteurs de la démocratie bourgeoise, assimilée au fascisme...) ont voix au chapitre. Concernant l'éducation, le propos n'est pas sans faire écho à notre époque, où se pose la question de la réussite scolaire des enfants des catégories populaires.

   Mais il s'agit surtout de l'histoire d'une rébellion pacifique, celle de lycéens en quête d'absolu, mais auxquels on va tenter d'imposer des préoccupations plus terre-à-terre. Le harcèlement moral qu'ils subissent est particulièrement bien mis en scène. (Le réalisateur, Lars Kraume, est aussi l'auteur de Fritz Bauer, un héros allemand, dans lequel joue celui qui incarne le père de l'un des lycéens) Cela fait remonter les vieilles histoires du passé, celui de l'Entre-deux-guerres (avec les allusions au Front Rouge, auquel a appartenu le père de l'un des élèves), celui de la Seconde guerre mondiale... et celui, plus récent, de la révolte ouvrière de Berlin-Est.

   C'est dire la richesse des thématiques abordées par ce film qui, de surcroît, s'inspire d'une histoire vraie. (Restez pendant le générique de fin.) Alors, même si c'est parfois un peu mélo, j'ai beaucoup aimé, tant les acteurs sont convaincants et l'arrière-plan historique soigné.

Se protéger de Facebook

   Si l'on n'est pas adepte de l'attitude radicale qui consiste à quitter définitivement le célèbre réseau social, il existe d'autres moyens de se prémunir de la présence envahissante de la firme transnationale. L'un d'entre eux est proposé par la fondation Mozilla, qui édite le célèbre navigateur Firefox.

   Depuis peu, elle propose une nouvelle extension, appelée "Facebook Container", qui met des bâtons dans les roues du système de pistage du réseau social, devenu expert dans l'exploitation des données personnelles que les internautes lui fournissent... gratuitement.

   Une fois installée, l'extension est visible dans la barre d'adresse, lorsque l'on se connecte au réseau social :

société,médias,

09:45 Publié dans Blog, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, médias

lundi, 18 juin 2018

La chapelle des brebis

   C'est d'un édifice peu connu des Ruthénois qu'il va être question : la chapelle Notre-Dame de Pitié, qui dépendait autrefois de la Chartreuse, dont les bâtiments ont été récupérés par l'Etat lors de la Révolution pour devenir ensuite, sous l'Empire, le siège du haras de Rodez, hélas fermé depuis l'an dernier.

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   Les touristes ont plus de chance de connaître l'édifice que les Ruthénois, puisqu'il fait partie du circuit patrimonial proposé aux visiteurs du chef-lieu aveyronnais (avec le numéro 29). Pour les locaux, le lieu est ouvert au moins le 13 de chaque mois. Pendant des années, c'est un employé municipal féru d'archéologie, Roger Trémouilles, qui a veillé sur l'édifice.

   Ce samedi 16 juin 2018, exceptionnellement, la chapelle a été ouverte au public, dans le cadre d'une manifestation agricole : la (mini-)transhumance des brebis du lycée agricole La Roque, situé sur la commune voisine d'Onet-le-Château.

   La première partie du trajet a mené les ovins du gué de Salelles (numéro 1 ci-dessous) à la place du Bourg (numéro 2), en passant par Layoule, le carrefour Saint-Cyrice, la rue Béteille et la place d'Armes.

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   Le parcours du petit troupeau (une cinquantaine de bêtes) ne fut pas de tout repos. Le long des berges de l'Aveyron, la tendance des brebis à se précipiter brusquement dans une direction inattendue était facilement gérable. C'est devenu un peu plus délicat dans la montée de la rue Béteille, où les passants et les riverains ont eu droit à un étonnant spectacle. (Un des animaux se serait blessé lors d'une bousculade à l'entrée d'une boulangerie-sandwicherie. Un peu de sang a coulé, mais ce serait sans gravité.)

   Arrivées place du Bourg, les brebis ont été parquées dans un enclos amovible, où elles ont rapidement été entourées d'une foule considérable... et mitraillées par les téléphones portables. Durant presque deux heures, elles ont pu se reposer et se désaltérer, pendant qu'une animation était proposée à proximité, avec des oies et des chiens de berger.

   C'est en fin d'après-midi que les brebis se sont remises en marche, direction l'avenue Victor-Hugo puis le chemin de la Boriette, où les attendaient de vertes prairies, jouxtant la chapelle Notre-Dame de Pitié (numéro 3 ci-dessous).

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   A l'intérieur de celle-ci, on peut voir un fort joli plafond étoilé (de style marial, je crois) :

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   Plusieurs statues sont également visibles, certaines plus anciennes que d'autres. Ainsi, l'une d'entre elles représente Jeanne d'Arc. C'est un modèle de série qui doit dater du début des années 1920, peu de temps après la canonisation de la Pucelle (et la création d'une seconde fête nationale, celle du patriotisme).

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   Une autre sculpture est beaucoup plus ancienne, puisqu'elle date du XVIe siècle. Il s'agit d'une Vierge à l'enfant, classée monument historique. Mais je ne me souviens pas si elle se trouvait dans la chapelle lorsque je l'ai visitée.