dimanche, 01 juin 2025
Ce nouvel an qui n'est jamais arrivé
... pour Nicolae Ceausescu, puisqu'il a été exécuté à la Noël 1989. Mais, ça, les Roumains ordinaires comme les serviteurs de la dictature communiste ne pouvaient pas le savoir à l'avance. Cette comédie politique nous présente donc les destins croisés d'une quinzaine de personnages, aux origines, aux métiers et aux opinions diverses. Dans les jours qui précèdent le 25 décembre 1989, ils vont se croiser, parfois interagir et leur vie va en être (souvent) bouleversée.
Le procédé rappelle celui mis en œuvre par Robert Altman dans Short Cuts (sorti en 1994... Mon Dieu comme le temps passe). Ici, les protagonistes sont :
- un agent de la Securitate et sa mère
- un employé d'une entreprise d’État, sa femme et son fils (qui a écrit au Père Noël)
- une quasi-voisine, actrice de théâtre, recrutée pour une émission de propagande
- le metteur en scène, accessoirement son amant
- le réalisateur de l'émission de propagande, son épouse et son fils rebelle
- le meilleur ami de ce fils rebelle, qui rêve de quitter la Roumanie
L'action se déroule donc juste avant celle du récent Libertate. La manière dont la terrible police politique espionne, contrôle et brutalise la population est très bien mise en scène. On pense aussi à la Stasi et à ce qu'en montrait La Vie des autres.
Le fond est donc dur, mais aussi bourré d'humour, noir de préférence. Ainsi, l'ouvrier commence à perdre les pédales quand il découvre ce qu'a demandé son fils au Père Noël. Les agents de la Securitate ne savent pas comment faire pour effacer des écrans la principale intervenante de l'émission de propagande (déjà enregistrée pour Noël)... qui a fui le pays. L'équipe de télévision vit sous leur pression et déploie des trésors d'imagination. Le réalisateur lui-même se demande jusqu'où il doit aller pour prouver sa fidélité au régime... sans insulter l'avenir, les nouvelles du reste de la Roumanie tendant à montrer que le régime vacille...
C'est donc passionnant : on ne sait pas ce qu'il va arriver à chaque personnage ; on ne sait pas à l'avance qui va croiser qui et l'on est plongé dans la Roumanie des années 1980, où circulent de vieilles Renault, dont les fameuses R12, produites par une entreprise qui, par la suite, a pris le nom de Dacia.
Les 2h15 passent très facilement. Je recommande vivement.
20:59 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 31 mai 2025
The Phoenician Scheme
J'étais à la fois excité et anxieux avant d'aller voir ce film. Il y a deux ans, Wes Anderson m'avait déçu avec Asteroid City, mais les deux précédents (L'Ile aux chiens et The French Dispatch) m'avaient emballé.
Les deux premières scènes sont un régal. On y voit le premier accident d'avion (traité avec cet humour à froid qu'affectionne le réalisateur) et une salle de bains, filmée du dessus, comme une maquette, au ralenti, pendant que se déroule le générique. On y retrouve les effets géométriques caractéristiques du style d'Anderson... à ceci près que la symétrie apparente n'est jamais totale. Dans chaque plan, il y a quelque chose qui cloche, ou un détail comique, sur lequel le réalisateur attire plus ou moins l'attention.
Sur le fond, l'intrigue est relativement simple. Un richissime homme d'affaires, Korda (Benicio del Toro, excellent) aussi ingénieux que peu scrupuleux, s'est lancé dans le projet le plus ambitieux de sa carrière (une combinaison de projets, en fait). Il veut y associer la seule fille de ses dix enfants, Liesl, une apprentie religieuse (maquillée !) qu'il a quelque peu négligée, mais qui lui semble avoir l'étoffe pour prendre sa succession. C'est une certaine Mia Threapleton qui incarne (efficacement) la religieuse. En l'observant, je ne cessais de me demander où je pouvais avoir vu auparavant cette jeune actrice (dans Le Jeu de la reine ?), dont le visage me disait quelque chose... peut-être parce qu'elle ressemble un peu à sa talentueuse môman !
Korda embarque donc sa progéniture (qui a l'espoir de moraliser son empire économique) dans un incroyable périple. Ils vont à la rencontre des principaux associés de l'entrepreneur, avec lesquels il n'a pas été très franc du collier. Au cœur de l'histoire se trouve le devenir de cet empire, contre lequel agit, en sous-main, le gouvernement des États-Unis. En coulisse, un autre complot est à l’œuvre, visant à assassiner Korda.
Comme d'habitude chez Anderson, cette intrigue, pour intéressante qu'elle soit, est secondaire. C'est la construction des plans et la cocasserie de certains dialogues (vraiment bien écrits... privilégier la V.O.) qui méritent le détour. Je signale notamment les retrouvailles entre le père et la fille, pleines de sous-entendus. J'ai aussi beaucoup apprécié les interventions d'un groupe de guérilleros marxistes... qui se découvrent des points communs avec le tycoon.
Parmi les gags récurrents, il y a la remarque faite par chaque nouvel interlocuteur à Liels : « J'ai bien connu ta mère. » Le sous-entendu est clair, la défunte épouse de Korda étant connue pour avoir eu des amants (son époux la trompant lui-même allègrement). Du coup, l'incertitude plane sur la paternité biologique de Liesl. Son géniteur est-il Korda ? Son demi-frère ? Un ancien secrétaire particulier ? Quelqu'un d'autre ? La filiation est donc au cœur de l'histoire, le voyage d'affaires étant une manière pour le père et la fille d'apprendre à se connaître vraiment.
Au passage, on appréciera la galerie de personnages pittoresques qui nous sont proposés, incarnés par une pléiade d'invités... parmi lesquels j'ai eu du mal à reconnaître Benedict Cumberbatch !
Même si ce n'est pas le meilleur film de Wes Anderson, je l'ai trouvé plus accessible et plus intéressant qu'Asteroid City.
17:13 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
La Venue de l'avenir
Le dernier film de Cédric Klapisch commence (et se termine) au musée de l'Orangerie, mais dans des circonstances très différentes. La séquence inaugurale nous présente un shooting, au cours duquel on croise l'un des protagonistes de cette improbable histoire familiale, Seb le photographe, incarné par Abraham Wapler (qui a des airs de François Civil).
Cette séquence fait intervenir des personnages assez antipathiques, pour lesquels le musée semble avoir été privatisé. Leur suffisance transparaît dans la manière dont ils considèrent l’œuvre du peintre impressionniste, qui sert de "fond d'écran" aux évolutions du mannequin. De manière très gentille, Klapisch met en scène la superficialité de ce petit monde, ainsi que la fragilité de la relation qui lie le photographe au mannequin. Le projet du cinéaste est une sorte de retour aux sources, dans tous les sens du terme.
Ce retour s'effectue par l'entremise d'un héritage, celui d'une maison délabrée de la campagne normande, dont une notaire a fini par retrouver tous les ayants droit, au nombre de... quarante. Ils descendent des trois enfants de la personne qui l'habita jadis, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Quatre d'entre eux (dont le jeune photographe) sont désignés pour explorer la demeure, avant qu'elle ne soit vendue (avec le terrain) pour permettre l'agrandissement d'une zone commerciale.
Autant la découverte du passé des occupants de la maison est passionnante, autant l'intrigue contemporaine, très "politiquement correcte", est peu palpitante. Chacun des quatre héritiers est un cliché ambulant : le vieux prof de français qui corrige ses copies dans le train, la cadre commerciale scotchée à son ordinateur portable, le photographe de mode rivé à son smartphone et aux réseaux sociaux... le pire étant atteint avec l'apiculteur altermondialiste, incarné, ô surprise, par Vincent Macaigne (qui fait du Macaigne... une fois de plus).
Cette trame contemporaine alterne avec des plongées dans le Paris de 1895. Là, cela devient intéressant, puisqu'on se demande comment certains objets découverts dans la maison normande (des photographies, un tableau) ont pu arriver là, et dans quelles circonstances.
Au début, l'esthétique du Paris de la Belle époque est un peu agaçante, chaque personnage semblant sortir de chez la costumière, avec des habits impeccables, quelle que soit la catégorie de population. Cela s'arrange par la suite.
Je fais partie des spectateurs qui aiment les reconstitutions historiques. Je suis donc client de cette vision d'un Paris en bord de campagne, sans tags ni déchets divers jonchant les trottoirs (qui d'ailleurs, la plupart du temps, n'existaient pas). La plongée dans l'univers des peintres et des photographes mérite vraiment le détour, même si certains aspects sont un peu schématiques ou convenus. (Par exemple, la mère comme la fille, à vingt ans d'intervalle, ont le cœur qui balance entre un peintre et un photographe).
En 1895, la jeune Normande Adèle est partie à Paris à la recherche de ses parents, qu'elle n'a jamais connus. Sur cette quête familiale, Klapisch et son scénariste Santiago Amigorena greffent un roman d'apprentissage, une histoire d'amour et... une intrigue artistique.
Les deux trames (celle du XXIe siècle et celle du XIXe) s'intercalent assez élégamment... et finissent par se croiser, au cours d'une séquence au départ totalement improbable... mais qui tient la route. Je ne dirai pas dans quelles circonstances, mais les héritiers finissent par se retrouver immergés dans le Paris des années 1870. C'est franchement cocasse.
Je trouve d'ailleurs que, globalement, l'humour sauve le film (qui, sinon, serait très plan-plan, trop gentillet). Klapisch a régulièrement inséré de petites touches qui pointent les ridicules de ses personnages (sans les dénigrer) ou de certaines situations. Cela donne de la saveur à cette histoire rocambolesque, qui, à défaut d'emballer, se suit sans déplaisir.
PS
A celles et ceux que l'ennui gagnerait, durant la projection, je recommande un petit jeu, celui de l'identification de tous les invités prestigieux qui font une apparition dans le film.
Celles et ceux qui sont mieux introduits dans le petit monde du Septième Art hexagnal s'amuseront à reconnaître les "fils et fille de" dont la distribution est parsemée... Cela nous vaut d'ailleurs une scène (ratée) à double sens, celle du grand restaurant parisien, au cours de laquelle l'héroïne Adèle (interprétée par Suzanne Lindon, fille de Sandrine Kiberlain et Vincent Lindon) croise la route de Sarah Bernhardt, que la mère biologique de la comédienne vient d'incarner à l'écran.
Quelle belle et grande famille que celle du cinéma français !
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vendredi, 30 mai 2025
L'Ultime Braquage
Ce film danois, à la distribution internationale, évoque non pas un, ni deux, mais trois braquages, le troisième, « l'ultime », étant la conséquence des deux précédents.
Le film commence donc par l'attaque d'un fourgon blindé, filmée de l'intérieur, en plan-séquence. C'est brillant, de la montée de tension à l'éclatement de la violence, avec, en conclusion, une caméra qui s'arrête lorsqu'un véhicule quitte le cadre, ne restant dans le champ que ce qu'on aperçoit de l'autre côté du pare-brise et dans le rétroviseur extérieur droit. J'ai retrouvé le brio de la mise en scène de Shorta. Frederik Louis Hviid est décidément un réalisateur à suivre.
La deuxième partie du film consiste en la préparation du gros casse. On découvre la vie quotidienne d'un boxeur, jeune père de famille, qui peine à percer, tandis que revient dans la région celui que l'on surnomme "le Marocain" (Reda Kateb), un type pas franchement rassurant. D'autres individus vont se greffer au projet, notamment des jeunes issus de l'immigration. C'est donc une équipe multiculturelle et polyglotte que l'on voit se constituer. (Dans la version originale, on entend parler danois, suédois, anglais et arabe.)
La troisième partie montre le casse qui, évidemment, ne va pas se dérouler comme prévu. Les braqueurs, pour précautionneux qu'ils soient, n'ont pas la virtuosité de ceux qui sont à l’œuvre dans Ocean's eleven, mais ce ne sont pas pieds nickelés pour autant. Juste des gars pas très bien partis dans la vie, qui succombent à l'envie de se faire rapidement un max de pognon.
J'ai bien aimé cet aspect bancal du braquage, qui semble correspondre à la réalité, puisqu'il s'agit d'une histoire vraie, qui date d'une vingtaine d'années. C'est mis en scène avec nervosité... et c'est palpitant jusqu'à la fin, qui réserve une ou deux surprises.
Cela ne va pas plus loin que cela, mais l'on passe un bon moment, si l'on aime ce genre de film.
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dimanche, 25 mai 2025
La Chambre de Mariana
Mariana est une prostituée ukrainienne, à Czernowitz (Cernauti), en Bucovine, une région à l'histoire tourmentée et à la population particulièrement mélangée, ancienne province austro-hongroise, tiraillée ensuite entre la Roumanie et l'URSS. En 1943, elle est repassée sous domination roumano-allemande et l'extermination de son importante population juive est entamée depuis plus d'un an. Voilà pourquoi la mère du jeune Hugo décide de le confier à une personne de confiance... une prostituée ! (Bien plus tard, on finit par découvrir le lien entre les deux femmes.) Le gamin se retrouve dans un hôtel de passe, dissimulé la plupart du temps dans un cagibi. De là, il perçoit les sons du bordel et, par de petits trous, observe tantôt la rue, tantôt la chambre où Mariana reçoit ses clients.
L'idée de mettre (un peu) les spectateurs dans la peau de l'observateur confiné est très bonne, et bien mise en scène, par Emmanuel Finkiel, dont j'avais déjà apprécié Voyages et Je ne suis pas un salaud (en revanche, La Douleur...). Plusieurs types de scènes nous sont proposés : les souvenirs d'Hugo s'entremêlent de fantasmes (notamment celui de la présence de ses proches, disparus) et d'éléments de la réalité, qu'il a du mal à accepter.
Le film repose aussi beaucoup sur les (gracieuses) épaules de Mélanie Thierry, très convaincante en ukrainophone (mais je me demande ce qu'en pensent les locuteurs naturels de cette langue). Je trouve en revanche moins réussies les interactions avec le gamin (surtout dans la première partie).
L'intrigue nous propose un double basculement progressif, dans la relation Mariana-Hugo. Au début, celui-ci est perçu comme un enfant et la prostituée devient une sorte de mère de substitution. Le dernier tiers de l'histoire voit le garçon devenir adolescent (il est passé de 12 à 14 ans) et son regard changer sur sa protectrice, pour laquelle il ressent des sentiments nouveaux. Dans le même temps, l'ancien protégé devient le protecteur (parfois excessif) de la jeune femme. Son activité de prostituée lui a permis de survivre sous l'occupation roumano-allemande, mais le retour des troupes soviétiques (déjà présentes dans la région en 1940-1941, quand le pacte germano-soviétique s'appliquait) la met en position difficile.
J'ai trouvé l'histoire assez belle, forte, même si je n'ai pas trop aimé le dernier quart d'heure. Ce fut aussi un peu long (voire languissant) à mon goût. J'attendais peut-être un peu trop de ce film, qui bénéficie de critiques favorables et d'un bon bouche-à-oreille. J'ai été un peu déçu.
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samedi, 24 mai 2025
Libertate
C'était le mot d'ordre des Roumains qui, en décembre 1989, manifestaient contre la dictature communiste de Nicolae Ceausescu, qui s'est rapidement effondrée. Mais ce ne fut pas sans dégâts : environ 1 000 morts au total, dont une centaine dans la ville de province de Sibiu, située au centre du pays.
Plus de trente ans après les événements, beaucoup d'incertitudes subsistent quant à l'origine des premiers tirs... et des suivants, personne ne revendiquant la responsabilité de la centaine de victimes, sauf quand ce furent des agents du régime communiste lynchés par la foule, ou exécutés par des révolutionnaires autoproclamés.
La première partie, le plus souvent caméra à l'épaule, est donc obscure, brouillonne, même quand on connaît un peu l'histoire de cette époque. On perçoit bien la fébrilité des fonctionnaires du régime, divisés quant à l'utilisation des armes à feu... et qui attendent des ordres clairs pour se couvrir... ordres qui n'arrivent pas... ou qui sont contradictoires. De surcroît, les différentes forces armées du régime ne sont pas synchronisées, ni en phase quant à la gestion des manifestations. Ajoutez à cela quantité de fausses informations qui circulent, soit involontairement (en raison des délires d'une population habituée à croire au pire), soit volontairement, par des personnes qui cherchent soit à sauver leur peau, soit à tirer les marrons du feu... et vous obtenez une situation explosive. J'ai trouvé cette première partie intéressante sur le fond, mais pénible à suivre sur la forme.
Heureusement, la deuxième partie est plus emballante. Les soutiens présumés du régime, capturés par les "révolutionnaires" et l'armée (qui a lâché le régime... après avoir sans doute tiré sur la foule...), sont emprisonnés dans la piscine municipale vidée de son eau (celle que l'on voit au tout début, ainsi qu'à la fin). Ils croient leur dernière heure venue... mais leurs geôliers ne savent pas trop quoi en faire. La situation met plusieurs semaines à se décanter.
Le réalisateur Tudor Giurgiu met en scène un gigantesque panier de crabes, où se côtoient policiers "classiques", miliciens, gendarmes, membres (autant haïs que redoutés) de la Securitate (souvent comparée à la Stasi est-allemande, et qui semble tout aussi proche de la Gestapo de sinistre mémoire)... ainsi que des enquêteurs de la Brigade des affaires économiques ! Mais qui est qui ? Certains n'auraient-ils pas une double casquette ? Dans ce bassin asséché où s'entassent des dizaines d'hommes blessés, affamés et assoiffés, on ne peut pas faire confiance à grand monde... sans parler des troufions qui n'hésitent pas à pointer leur mitrailleuse du haut des plots de départ. Du coup, ce sont ces présumés agents du communisme (qualifiés de "terroristes") qui se mettent à leur tour à crier "Libertate" !
Cette deuxième partie est vraiment passionnante. Petit à petit, on comprend mieux les fonctions de chacun, même si plusieurs mystères persistent. La situation évolue quand il s'avère que les gradés de l'armée qui soutiennent le "nouveau" régime (réussissant par là à évacuer la question de leur action sous Ceausescu...) n'ont pas l'intention de faire exécuter leurs prisonniers... d'autant que, dans le lot, certains sont des manifestants anti-communistes, arrêtés et tabassés par erreur, parfois à l'initiative des habitants d'un quartier, complètement paranoïaques.
J'ai aussi trouvé intéressante la manière de traiter cet arrière-plan, qui fait écho à notre époque. Des personnes ordinaires propagent avec une extraordinaire conviction des informations bidons et la violence des anonymes se déchaîne la plupart du temps sans raison. C'est donc bien plus qu'une œuvre à caractère historique qui nous est proposée. C'est aussi une réflexion sur le temps présent, qui ne prête guère à réjouissance. Il y a une vingtaine d'années, 12h08 à l'est de Bucarest abordait la même période, mais avec plus d'humour.
17:11 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
vendredi, 23 mai 2025
Destination Finale - Bloodlines
Je suis un "vieux" spectateur (en salles) des premiers films de cette lucrative et pittoresque franchise, à la fois horrifique et comique. Elle était un peu tombée dans l'oubli, jusqu'à ce que des producteurs avides de pognon désireux de poursuivre l'aventure artistique ne décident de financer une nouvelle version, sans réel lien avec les films précédents.
La séquence inaugurale, qui se déroule dans les années 1960, est de toute beauté. Au cœur de cet épisode se trouve une tour d'aspect futuriste. (On a l'impression de découvrir, avec près de trente ans d'avance la Perle de l'Orient shanghaïenne.) Très vite, la jeune Iris, invitée en ces lieux par son charmant petit ami, ressent comme un mauvais pressentiment. Les spectateurs qui ne sont pas totalement ignorants du contenu de la franchise comprennent très vite ce que les "petits signes" montrés à l'écran signifient. La suite est particulièrement spectaculaire et (déjà) assez gore. Les cinéphiles percevront les allusions à des films catastrophe (notamment à Titanic), ainsi qu'aux attentats du 11 septembre 2001.
Cette agréable mise en bouche est suivie d'une ellipse, puisqu'on se retrouve à notre époque. L'héroïne de cette partie est la petite-fille de celle de la précédente. Le scénario se fait malicieux et l'on retrouve les ingrédients qui ont fait le succès des premiers films : la mise en scène d'un effet papillon (toujours accompagné d'un effet domino particulièrement sanglant). Comme les scénaristes partent du principe qu'on a déjà vu au moins l'un des cinq films précédents, ils ménagent le suspens concernant la manière dont tel protagoniste va mourir... et c'est kiffant.
Pour moi, ce fut d'autant plus jouissif que la nouvelle héroïne appartient à ce qu'on pourrait appeler une famille de beaufs, des membres de la classe moyenne qui trouvent parfaitement normal d'organiser un barbecue à la suite des obsèques de la grand-mère. On ne s'attriste guère de ce qui leur arrive ensuite...
Les comédiens sont dans leur rôle (certes souvent caricatural) et les effets spéciaux sont au point, rendant les décès horriblement et délicieusement grotesques. On nous ménage des surprises jusqu'au bout... d'autant qu'on découvre qu'il existe deux manières de déjouer la vengeance de la Mort contrariée. L'une de ces deux manières consiste à briser un tabou, l'autre à (tenter de) se montrer plus malin(e) que la Faucheuse. Je laisse à chacun(e) découvrir ce que choisissent les personnages. L'ultime séquence fait intervenir un train et une voie ferrée, référence au premier opus, celui de 2000.
21:03 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 17 mai 2025
Accident domestique
Ce titre pourri ne va sans doute pas aider la carrière de ce film espagnol, une comédie macabre qui traite, entre autres, du couple, de la maternité et de la paternité. En version originale, il s'intitule La Mesita del comedor (La Table de salon), une manière plus appropriée d'évoquer l'intrigue, qui va beaucoup tourner autour de ce meuble à monter soi-même, acheté dans un magasin d'une grande marque suédoise.
C'est au cours de la deuxième scène que ledit meuble fait son apparition. (Je laisse à chacun.e le plaisir de découvrir ce par quoi commence le film.) C'est une scène de vaudeville, du théâtre de boulevard, avec un vendeur très malin, volubile, et un couple de clients en désaccord. J'ai beaucoup aimé, notamment parce que l'épouse a la langue acérée.
C'est l'un des attraits de ces belles vingt premières minutes : découvrir au quotidien ce couple déséquilibré, composé d'un homme (à moitié) déconstruit et d'une femme de tête, qui a choisi la décoration de leur nouvel appartement, le prénom (horrible) de l'enfant qu'ils viennent d'avoir, le moment de la conception de celui-ci... Il ne reste au gars qu'à choisir le meuble du salon, un immense espace de libre arbitre que sa chère et tendre peine à lui laisser.
La suite est moins joyeuse. Il se produit un événement en général tabou dans le cinéma contemporain, qui fait déraper la soirée. Il clôture la première partie du film... la seule pleinement réussie à mes yeux.
Il faut ensuite se fader un tunnel d'environ cinquante minutes, avec des discussions nourries de tensions et de sous-entendus. Le couple reçoit le frère du mari, accompagné de sa nouvelle copine (qui a la moitié de son âge). Surgissent aussi la voisine du dessus et sa fille caractérielle et envahissante, sans oublier le vendeur du début, qui revient faire un petit coucou (passage assez réussi, ma foi). Le comédien mérite que je le cite : il s'agit d'Eduardo Antuña, remarqué jadis dans une autre comédie sardonique, Mes Chers Voisins (avec Carmen Maura).
Le seul intérêt que j'ai trouvé à ce cœur de l'histoire est le malaise suscité par les différents niveaux d'information des personnages présents. Un seul (bientôt deux) sait ce qui s'est passé quelques temps auparavant dans l'appartement. Trois personnages sont au courant d'une histoire impliquant deux des voisins. Deux autres ont un petit secret à avouer... et ainsi de suite. On finit par s'apercevoir que celle qui en sait le moins est la nouvelle maman, celle qui dirige le foyer, sans être consciente que plusieurs informations importantes lui passent sous le nez.
Cela rebondit dans le dernier quart d'heure, de manière presque aussi réjouissante qu'au début. Du coup, j'ai aimé la fin et je suis sorti assez satisfait de ce tout petit film irrévérencieux.
22:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 16 mai 2025
Marco, l'énigme d'une vie
C'est l'histoire d'un garagiste au départ ordinaire. Il a survécu à la guerre civile espagnole, s'est très bien accommodé du régime franquiste, durant lequel il a acquis une petite aisance. Il s'est remarié et a eu une nouvelle fille. Mais il aspire à autre chose. Il se rapproche de jeunes enfants de la bourgeoisie qui manifestent contre le franquisme finissant... et leur fait croire qu'il est un ancien combattant anarchiste... avant de découvrir qu'il est un autre statut qui valorise encore plus celui qui l'incarne : le statut de résistant déporté. Paré de sa fausse modestie, de sa gouaille et d'une gentillesse factice, Enric Marco va tromper son monde pendant plus de vingt ans.
Cette fiction à caractère documentaire montre d'abord le poids qu'avait acquis le personnage, avant qu'une succession de révélations ne démonte le mythe. Dans le rôle-titre, Eduard Fernández est sensationnel d'ambiguïté, incarnant à la perfection la mauvaise fois de l'affabulateur... mais le rendant toutefois un peu trop sympathique à mes yeux.
Ce film traite de choses très sensibles pour moi (le mensonge, la mémoire de la Seconde Guerre mondiale). C'est sans doute pourquoi je dois dire que j'ai à plusieurs reprises éprouvé une colère sourde durant la projection.
Même si le duo de réalisateurs (auquel on doit Une Vie secrète) a veillé à faire surgir la duplicité du personnage principal, je trouve la mise en scène trop empathique. C'est trop indulgent avec le narcissisme de Marco, dont on souligne le besoin de reconnaissance (de visibilité médiatique, dirait-on aujourd'hui). On affirme un peu trop vite qu'il a contribué à faire connaître le drame de la déportation à des Espagnols auxquels c'était alors peu enseigné. C'est oublier les dégâts que ses centaines d'interventions dans les écoles, collèges, lycées ont dû faire rétrospectivement, quand les jeunes ont découvert que la personne qu'on leur avait présentée comme étant une référence n'était en fait qu'un mythomane.
Je pourrais aussi souligner une ou deux faiblesses historiques, comme la confusion entre camp de concentration et camp (centre) d'extermination (ou plutôt le manque de distinction nette entre les deux).
Le fil n'est à voir que si l'on ne connaît pas cette histoire rocambolesque... et pour la performance de l'acteur principal. Le reste ne suscite que dégoût.
23:11 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
mercredi, 14 mai 2025
Tu ne mentiras point
Le comédien Cillian Murphy (naguère oscarisé pour sa performance dans Oppenheimer) a coproduit cette histoire irlandaise, qui remonte aux années 1980 et n'est pas sans rappeler The Magdalene Sisters, de Peter Mullan.
Murphy s'est attribué le premier rôle, celui d'un petit patron charbonnier, très impliqué dans son travail, empathique avec ses employés et les pauvres gens qu'il croise sur sa route. On le voit aussi mari fidèle et père attentionné. On ne s'étonne donc pas quand, au détour d'une livraison, il se prend d'intérêt pour une jeune femme qui semble maltraitée, dans le couvent local.
On comprend assez vite quel est le double propos engagé de ce "film de gôche", qui dénonce d'abord les inégalités sociales et, à un second niveau, le sort particulièrement difficile des femmes d'origine populaire. S'ajoute à cela le parcours personnel du héros, qui a oublié (refoulé ?) une partie de son enfance, que cette histoire de jeune femme maltraitée fait remonter.
C'est filmé en noir et blanc et c'est ma foi assez beau... mais Dieu que c'est (parfois) ennuyeux ! J'ai trouvé la plupart des personnages fades, en particulier ceux des femmes (alors que, dans mon souvenir, The Magdalene Sisters proposait quelques beaux portraits féminins), à l'exception de la mère supérieure du couvent, interprétée par Emily Watson. Celle-ci est particulièrement marquante lors de la scène "au coin du feu", lorsqu'elle reçoit le héros, dans un entretien pétri de sous-entendus. De son côté, Murphy n'est pas étincelant. Il s'est construit un personnage de saint homme, qui finit par phagocyter tout le reste.
Ce n'est pas un mauvais film, mais je le trouve au final plutôt anodin. Sur un sujet approchant, on vibre bien davantage avec La Jeune Femme à l'aiguille.
16:57 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
samedi, 10 mai 2025
Bergers
J'ai enfin pu voir ce film canadien, tourné en France, entre Alpes et Provence et dont l'intrigue s'inspire d'une histoire vraie, celle d'un jeune Québécois, arrivé dans la région un peu par hasard, et qui va se lancer dans la délicate activité d'encadrement de troupeaux.
Il faut d'emblée souligner la pertinence du choix de l'acteur, pour interpréter Mathyas, le personnage principal. Félix-Antoine Duval est tout aussi crédible en jeune citadin romantique qu'en néo-rural, de moins en moins maladroit avec les bêtes. Il convient d'ajouter que, pour une partie des seconds rôles, on a recruté des personnes du cru. Cela donne une incontestable authenticité aux scènes pastorales... ainsi qu'à celle du café.
Cela prend donc un peu le tour d'une comédie romantique, puisque le héros est d'abord maladroit, à la fois ridicule et touchant... et aussi parce qu'il croise la route d'une charmante employée de sous-préfecture, avec laquelle, une fois installé dans une ferme, il entretient une correspondance intime. Mathyas a le projet secret d'écrire un livre sur son expérience. Il n'est donc pas forcément décidé à rester éternellement berger, même si la rude vie champêtre semble davantage correspondre à ses aspirations que l'exubérante et déshumanisante vie citadine.
J'ai aussi apprécié que cette histoire ne soit pas un conte de fées. D'abord seul, puis accompagné, Mathyas va être confronté à une multitude de difficultés, de la gestion au quotidien d'un troupeau à celle des intempéries, en passant par l'attaque des loups.
La réalisatrice, Sophie Deraspe, ne nous livre pas une version aseptisée de la campagne française. Trois exploitations nous sont successivement présentées. La première est relativement moderne, de grande taille (limite capitalistique) et ne supporte pas l'amateurisme. La seconde est vieillotte, familiale, rugueuse, fragile sur le plan financier. La troisième est un peu entre les deux... et gérée par un femme, interprétée avec talent par Guilaine Londez.
On prend un bon bol d'air, on sourit et l'on est ému par le difficile exercice du métier d'éleveur... et l'histoire d'un amour naissant, confronté à l'âpreté de la nature.
23:28 Publié dans Cinéma, Economie, Société | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Thunderbolts
Disney-Marvel nous sort une nouvelle équipe de super-héros, composée principalement de... criminels. C'est un "gentil" (Bucky Barnes, l'ex-Soldat de l'hiver) qui se charge du recrutement. En sous-main, la directrice d'une agence gouvernementale a monté un programme visant à contrôler les êtres dotés de pouvoirs extraordinaires... Tout cela ne vous rappelle rien ? Eh, oui, il s'agit grosso modo de la trame de The Suicide Squad, de chez Warner-DC. Cela explique d'ailleurs que James Gunn, qui était déjà aux manettes de ce film-ci, ait refusé de tourner celui-là. Il a été remplacé par Jake Schreier qui, ces dernières années, s'est plutôt consacré à des séries télévisées, mais que les cinéphiles connaissent pour son (excellent) Robot and Frank (qui a peut-être un peu inspiré le scénariste du récent Un Monde merveilleux).
Tout ça pour dire qu'au niveau de la mise en scène, c'est réglé comme du papier à musique, en particulier dans les scènes de baston, avec ce qu'il faut d'effets numériques.
L'héroïne est Yelena (sœur de Natasha Romanoff), que l'on a vue pour la première fois dans Black Widow. A l'époque, je trouvais Florence Pugh un peu au-dessous de ses partenaires. Elle a bien progressé depuis et, même si je regrette de ne plus voir Scarlett Johansson assommer des méchants en tenue moulante, je dois reconnaître que la petite Anglaise assure dans son nouveau rôle badass.
La première partie du film conduit plusieurs tueurs irréguliers d'un sous-traitant de la CIA dans un mystérieux complexe souterrain, où, dans une grande confusion (pour les personnages comme pour les spectateurs d'ailleurs) va se déclencher une bagarre générale. C'est malgré tout assez réjouissant à regarder.
Ces têtes brûlées hyper-individualistes vont rapidement comprendre que, pour sortir vivants du bunker souterrain, il leur faut coopérer. Cela donne une deuxième partie assez cocasse.
La suite réserve quelques colossales surprises, avec, en particulier, l'éclosion d'un super-méchant, qui semble presque invincible. Comme les aventures de la bande de bras cassés sont destinées à durer, on se dit qu'ils vont bien finir par en venir à bout, mais que cela risque de ne pas être par la force. Intelligence, travail de groupe et empathie sont donc au programme dans la troisième partie, visuellement assez bluffante (les personnages se retrouvent prisonniers de la conscience du super-méchant), mais pas terrible en terme de dialogues. Je trouve aussi que l'un des acteurs n'est guère convaincant. (Pas de chance, c'est celui qui incarne le super-méchant.)
Du coup, j'étais plutôt impatient que cela se termine. Je conseille toutefois aux spectateurs de ne pas quitter la salle trop vite. Le générique de fin est interrompu une première fois, par une scène dans laquelle on retrouve le papounet lourdingue de l'héroïne (toujours très bien interprété par David Harbour). A la toute fin, on a droit à une scène plus longue, qui pourrait servir d'introduction à l'épisode suivant. Il y est question de deux autres groupes de super-héros, l'un étant en conflit avec les Thunderbolts pour une question de droits d'auteur !
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vendredi, 09 mai 2025
Un Monde merveilleux
Le titre de ce long-métrage (sans doute inspiré du Meilleur des mondes d'Aldous Huxley) est évidemment une antiphrase. C'est dans un monde cauchemardesque qu'estime vivre Max (Blanche Gardin, en forme). C'est une ex-enseignante, qui a été remplacée par un robot. On constate d'ailleurs rapidement que, dans la vie quotidienne de cette France (légèrement) futuriste, les êtres mécaniques exercent de nombreuses fonctions : soigneur en EHPAD, policier, chauffeur... sans parler des tâches assignées à ceux qui ont été achetés par des ménages fortunés : faire la cuisine, aider les enfants dans leurs devoirs, sortir les poubelles, promener le chien... Certains des gags du film montrent soit les ratés de ces machines ultra-perfectionnées, soit au contraire leur performance, ramenant les humains à leurs propres manques...
Max est aigrie... et rebelle. Elle vivote entre deux plans foireux, auxquels elle associe sa fille. Celle-ci aimerait bien avoir un compagnon de jeu : pas un chien ou un chat, mais un robot. Je me garderai bien de révéler les circonstances dans lesquelles son vœu va être exaucé.
J'ai apprécié que la mise en scène ne fasse pas de Max une héroïne parfaite. Elle est d'ailleurs parfois assez antipathique, même si (évidemment) son personnage va évoluer au contact d'un robot, T-0...
La première moitié de l'histoire est un peu dans le style Groland, centrée sur Max la rebelle, anticapitaliste et bordélique. Le scénariste lui a écrit quelques répliques bien senties, comme lorsqu'elle se trouve face à une policière, qui lui déclare : "Savez-vous pourquoi je suis ici ?". Max lui répond, crânement : "Parce que vous étiez nulle à l'école ?"
Concernant le monde des robots, j'avais peur que ce soit très kitsch, pas du tout réaliste. En fait, en dépit du manque de moyens, je trouve le résultat probant, notamment grâce aux bruitages. Les robots sont crédibles, dans leurs actions comme dans leur expression.
La seconde partie voit Max séparée de sa fille. Du coup, elle qui cherchait à se débarrasser du robot va le garder... et tenter de le rééduquer (à sa manière). Au contact de la machine, elle s'humanise, tandis que T-0 devient un peu moins à cheval sur les règles, acquérant lui aussi une part d'humanité.
Du coup, cette comédie loufoque, un brin grossière au départ, réussit à susciter de l'émotion, vers la fin... et tout ça en moins d'1h20.
15:06 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
mercredi, 07 mai 2025
Anges & Cie
Chaque être humain est accompagné au quotidien (et même "guidé"), sans le savoir, par un(e) ange-gardien. Sont donc présents en même temps, à l'écran, deux catégories de personnages (les humains et les anges) qui évoluent dans deux dimensions différentes. L'un des ressorts comiques de cette romance teintée de surnaturel est constitué des interventions des anges dans la vie de leur "protégé(e)". Les gardiens ne sont pas toujours bien inspirés... et c'est parfois réjouissant.
Pendant le premier quart d'heure, j'ai espéré me trouver face à une comédie transgressive, notamment en raison de la scène d'ascenseur, un petit moment de folie douce, à l'humour "épicé"...
Hélas, la suite est moins scabreuse, sans être toutefois déplaisante. Les anges-gardiens que nous voyons évoluer n’œuvrent pas tous dans le même sens et leur rivalité est cocasse à observer... tout comme ses conséquences sur la vie des pauvres Terriens qui ne comprennent pas trop ce qui leur arrive. J'ajoute que le fonctionnement de la "maison mère" des anges ressemble quelque peu à celui d'une grosse boîte faisant passer l'idéologie avant l'intérêt réel de ses "clients". Une autre source de gags réside dans la découverte, par certains anges, des petits (et grands) plaisirs de la vie humaine...
Dans les rôles principaux, Elodie Fontan, Romain Lancry, Shirine Boutella et Julien Pestel sont convaincants. On peut ajouter les savoureuses prestations, dans des seconds rôles, de Zabou Breitman et François Berléand, ce dernier incarnant un (vieux) Cupidon baba cool...
L'intrigue est parsemée de rebondissements, parfois très surprenants. Toutefois, à mesure que la conclusion de l'histoire se rapproche, le film se fait plus conventionnel, certaines des ultimes scénettes sacrifiant même à une forme de "politiquement correct".
Cela dure 1h30. J'ai passé un bon moment, sans plus.
P.S.
Le film sort la veille du pont du 8 mai, alors qu'un mouvement de grève est lancé, en France, dans les transports publics... ce à quoi fait écho la situation du début de l'intrigue, puisque deux personnages vont covoiturer faute de train en circulation !
22:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Les Linceuls
Trois ans après Les Crimes du futur, David Cronenberg revient avec un nouveau polar sociétal mâtiné de science-fiction. Les linceuls en question sont des enveloppes bardées de technologie, des sortes de cocons numériques pour défunts friqués, dont les proches peuvent (grâce à une appli) suivre la progressive décomposition, sous terre, dans un cimetière spécialement créé pour ce type de cercueil.
L'inventeur de ce procédé, Karsh (Vincent Cassel, belle gueule cassée au physique irréprochable), y voit un moyen de se faire du blé... et de gérer son deuil, le décès de son épouse l'ayant laissé inconsolable. Ladite épouse, incarnée par Diane Kruger, est bien sûr divinement gaulée.
Mais les choses ne se passent pas comme prévu, le cimetière expérimental étant victime de dégradations... et d'un vol de données. Karsh comprend assez vite qu'au moins deux complots sont à l’œuvre, la mise en scène de Cronenberg suggérant l'existence d'un troisième.
C'est du cinéma bien léché, aux dialogues ciselés, le luxe apaisant masquant de sourdes pulsions, prêtes à éclater. Cronnie aime toujours autant filmer les corps nus... et la modification de ceux-ci. (Âmes sensibles s'abstenir.) J'ajoute qu'entre deux scènes réalistes sont glissées quelques fantasmagories. En général, il n'est pas difficile de distinguer les deux... mais, parfois, on se demande si le réalisateur ne joue pas un peu avec vous.
Les investigations menées par le héros se doublent d'une quête de l'amour, avec, en invitées, la sœur jumelle de sa défunte épouse, une intelligence artificielle aussi serviable qu'intrusive et une charmante aveugle, potentielle cliente à la base, mais qui pourrait tout chambouler.
Je me suis laissé emporter par ce polar sophistiqué, très stylisé, un peu à l'image du récent The Insider. Je regrette cependant qu'une fois de plus, Cronenberg ne se soit pas trop foulé pour conclure son film, peut-être parce qu'il veut laisser à chaque spectateur la possibilité de se construire sa propre interprétation de l'histoire... ou peut-être parce qu'au montage, une ou deux scènes ont sauté, empêchant le plus tordu des complots d'apparaître dans toute sa splendeur.
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dimanche, 04 mai 2025
Drop Game
Intitulé tout simplement Drop dans la version originale, ce petit thriller sociétal s'appuie sur une fonctionnalité des smartphones d'une célèbre marque : le partage de fichiers entre appareils se trouvant dans un certain rayon d'action (de dix à quinze mètres). Ce rayon est celui de la salle principale d'un restaurant très chic, situé au trente-huitième étage d'un gratte-ciel de Dublin Chicago.
L'héroïne, Violet, est une ravissante mère célibataire, habitant une maison de luxe et exerçant à domicile la fonction de thérapeute. Mais, prise entre son métier et son enfant, elle n'a plus de vie sociale... d'autant qu'elle est très méfiante vis-à-vis des hommes : c'est une ancienne femme battue. J'ai trouvé intéressant qu'un film de genre parfois très conventionnel s'appuie sur ce fait de société (le harcèlement et les violences dont sont victimes certaines femmes).
L'habillage visuel est soigné : le restaurant haut de gamme baigne dans une ambiance feutrée (et luxueuse, bien entendu), tandis qu'à l'écran, en différents endroits, les messages voire les images reçus par les téléphones s'affichent, parfois de manière biscornue. C'est bien foutu.
Le scénario ménage bien le suspens pendant un peu plus d'une heure. On comprend assez vite que deux personnes (au moins) ont mis au point le stratagème dont Violet est la victime : une a pénétré à son domicile (où se trouvent sa sœur et son fils), l'autre au restaurant... mais de qui s'agit-il ? Entre le charmant photographe avec lequel elle a rendez-vous, le serveur un peu bizarre, la barmaid un poil intrusive, les clients masculins qui l'abordent, le pianiste aussi alcoolique qu'entreprenant et l'hôtesse d'accueil, à l'air mystérieux, les suspects ne manquent pas.
J'ai été pris à la fois par le mystère (il n'est pas facile de deviner qui est le maître-chanteur infiltré) et par le suspens (va-t-elle s'en sortir ? son fils aussi ? qu'en est-il du photographe ?). Du coup, j'ai été indulgent pour les petites invraisemblances et les clichés dont l'intrigue est émaillée (avec, parfois, une grosse tendance au mélo). De surcroît, la dernière partie de l'histoire prend un tour mouvementé, délicieusement sanglant.
Dans la salle, j'étais le seul "vieux", au milieu d'une flopée d'adolescents et de jeunes adultes, qui ont été (à ma grande surprise) captivés. Je pense que cette histoire leur a "parlé", comme on dit.
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samedi, 03 mai 2025
Des Jours meilleurs
C'est ce qu'espèrent connaître les femmes alcooliques envoyées dans un centre de désintoxication, où elles seront encadrées par des infirmières, une psychiatre addictologue (Myriem Akkhediou, très bien)... et un coach sportif, lui-même ancien alcoolo (Clovis Cornillac, une fois de plus épatant).
Pour incarner ces femmes en souffrance, on a mélangé les visages connus à de quasi-anonymes. Incontestablement, Valérie Bonneton sort du lot, à la fois pathétique et touchante. Michèle Laroque est très bien aussi, dans un rôle qui est toutefois moins de composition. Quant à Sabrina Ouazani, elle est toujours aussi formidable, incarnant un personnage à la fois explosif et plein de failles.
Les auteurs, (Elsa Bennett et Hippolyte Dard) sont plutôt des habitués du petit écran. Ils ont notamment réalisé plusieurs épisodes de séries comme L'Art du crime et Astrid et Raphaëlle. Pour le personnage de Suzanne, ils se sont inspirés d'un cas réel.
Le début présente des femmes à la dérive. La plupart du temps sans maquillage, les comédiennes acceptent d'incarner des personnages fracassés, aux visages déformés par l'alcool, la honte et la souffrance. La mise en scène les montre surtout comme des victimes, même si elle ne masque pas les dégâts que leur addiction a provoqués dans leur entourage. (C'est peut-être pour moi la seule limite de ce film : assez peu montrer les conséquences sur les proches et trop insister sur les difficultés rencontrées par les alcooliques.)
Habilement, le montage alterne les scènes dures avec d'autres, de pure comédie, ou d'autres encore, touchantes sans être tristes. J'ai trouvé originales les quasi-improvisations, face caméra, lors des entretiens avec la psy. J'ai aussi aimé que le scénario ne prenne pas la forme d'un conte de fées. Cette période de réhabilitation est parsemée d'échecs (des rechutes, voire des abandons).
Toutefois, l'élan créé par le projet monté par le coach sportif donne un sacré tonus à l'intrigue, qui culmine dans la seconde partie, se déroulant au Maroc. Là encore, le parcours du combattant des héroïnes va être semé d'embûches. Je trouve qu'il y a une belle intensité dans ces scènes de rallye, avec, en bonus, un petit moment de grâce, en plein désert, avec un groupe d'enfants.
Du coup, en dépit de quelques appréhensions, j'ai été emballé par cette histoire, à la fois terrible, drôle et porteuse d'espoir... et en plus la musique est chouette !
00:25 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
mercredi, 30 avril 2025
Until Dawn : la mort sans fin
Cinq étudiants effectuent un road trip mémoriel, en hommage à la sœur de l'une d'entre eux, disparue plusieurs mois auparavant. Perdus au fin fond d'une région boisée, ils tombent sur un vieil hôtel abandonné, où ils se réfugient, le temps d'un orage. Ils ignorent que cet hôtel est à peu près tout ce qui reste d'un village abandonné, enseveli depuis l'effondrement de galeries minières, vingt ans auparavant.
Ce petit film horrifique, aux effets spéciaux bien conçus, puise dans la tradition des films d'horreur : Massacre à la tronçonneuse, bien sûr, mais aussi toutes les productions faisant intervenir un objet maléfique (ici, un mystérieux sablier), avec, en bonus, le recours à une (fausse) boucle temporelle : tant qu'ils ne parviennent pas à échapper à la mort, durant la nuit d'horreur, les cinq étudiants sont condamnés à la revivre, mais jamais de manière totalement identique... et avec un état de santé qui se dégrade progressivement.
Il n'y a donc rien de bien nouveau là-dedans, si ce n'est l'association inédite de ces ingrédients. Du coup, on n'est pas étonné de retrouver certains clichés : les jeunes qui commencent par faire des "groupes de 1" (la première fois qu'ils découvrent l'hôtel... et son dangereux invité), l'égoïsme qui, au départ, l'emporte sur la nécessaire entraide, qui seule peut permettre d'échapper à la malédiction... J'ajoute que la caractérisation des personnages est rudimentaire. On comprend très vite qui des cinq est l'héroïne de l'histoire : celle qui a perdu sa sœur... et qui, de surcroît, est la mieux gaulée des trois jeunes femmes. Du côté des mecs, on oppose de manière caricaturale le semi-moche à lunettes (amoureux transi de l'héroïne) au bogosse musclé, adepte de la manière forte, un poil connard sur les bords... mais qui, bien entendu, va s'améliorer.
J'ai pris du plaisir à ce machin d'abord parce que c'est correctement écrit, joué et filmé. Les scènes d'intérieur sont vraiment bien maîtrisées... et il faut reconnaître aux scénaristes une certaine inventivité dans la manière de faire mourir les différents personnages. C'est parfois très sanglant, grotesque... voire franchement dégueu. Bien évidemment, les protagonistes font tous au moins une grosse connerie au cours de leurs nuits de cauchemar éveillé.
Qui va survivre à cette répétitive boucherie ? Suspens...
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mardi, 29 avril 2025
Promesse
Ce documentaire familial est composé de trois types d'images : celles (récemment) tournées par le réalisateur, celles tournées par sa sœur jumelle quand elle était malade et celles issues de films familiaux ou de vidéos d'amis. Le montage de cet ensemble hétéroclite, accompagné du commentaire du frérot, est surprenant, à plus d'un titre.
C'est d'abord une histoire poignante, celle d'une adolescente, Laurène, frappée par la leucémie, qui finit par la vaincre... avant qu'une autre maladie ne touche ses poumons. La jeune femme, issue d'une famille aisée, solidaire (et sans doute croyante, même si le film se fait discret là-dessus), a tenté de mener une vie (presque normale), reprenant ses études, sortant faire la fête, essayant de goûter à tous les plaisirs de la vie (sans toutefois qu'un.e petit.e ami.e n'apparaisse officiellement à l'écran).
C'est aussi l'histoire du frère, jadis fusionnel avec sa jumelle, dont il s'était éloigné au début de son adolescence, avant que la maladie ne les rapproche. On sent qu'il s'en est voulu de ne pas avoir détecté la dégradation de l'état de santé de sa sœur, tout comme il culpabilise pour avoir, plus tard, pendant la période de rémission, pris le large pour vivre sa vie de jeune homme, loin des soucis familiaux.
C'est enfin l'histoire d'une tribu, au départ composée des deux parents et de leurs cinq enfants, auxquels se sont ajoutés, plus tard, des conjoints et des petits-enfants. En dépit de la perte immense, le message passé est celui que la vie doit prendre le dessus, à l'image de la manière dont Laurène a voulu vivre sa maladie.
C'est beau, mais, pour moi, entaché par le côté "télé réalité familiale" que prennent certaines séquences. J'ai été gêné par quelques scènes, durant lesquelles des personnes filmées manquaient de naturel, soit parce qu'elles étaient mal à l'aise (ce qui est compréhensible, vu le sujet), soit parce qu'elles m'ont semblé en faire trop ou manquer de sincérité. Ce n'est pas l'impression dominante que m'a laissée le film, mais cela m'a un peu gâché le plaisir.
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samedi, 26 avril 2025
La Revanche des Sith
Cela fait presque vingt ans que ce film est sorti dans les salles françaises, époque à laquelle je l'ai vu pour la première fois. Les cinémas CGR se sont associés à l'anniversaire et ont proposé une ressortie limitée... très limitée même à Rodez, puisqu'une seule séance a été programmée, ce vendredi à 20 heures. (Dans d'autres cinémas CGR, des séances supplémentaires sont prévues, notamment ce week-end.)
Avant la projection, nous avons échappé aux tunnels de publicités et de bandes annonces traditionnels. (Ouf !) A la place, des animations étaient proposées, avec un peu de cosplay et une série de parties de jeu vidéo en ligne, en direct, projetées sur le très grand écran de la salle 1. (Le jeu, Battlefront II, datant lui aussi de vingt ans, permettait d'incarner soit un défenseur de la République, soit un partisan de l'Empire.)
J'allais oublier : juste avant le début du film, nous avons quand même eu droit à la promotion de la partie 2 du dernier Mission : impossible... et ça a l'air de dépoter grave ! (Vivement le 21 mai !)
Ensuite, enfin, dans une salle quasi archi comble (où, curieusement, dominait la tranche d'âge des 15-30 ans), la projection a pu commencer.
Je ne suis pas un grand fan de cette prélogie (l'action des trois épisodes, sortis après la trilogie originelle, se déroulant avant), en particulier du premier épisode, La Menace fantôme. Je les trouve plus faibles que les trois films d'origine... mais je dois dire qu'après avoir vu ce que Disney a fait de la franchise, j'ai un peu réévalué mon jugement, surtout pour ce troisième film, qui voit Anakin Skywalker devenir Dark Vador, dans une fin d'histoire aux accents shakespeariens.
Vingt ans plus tard, je trouve toujours aussi cucul-la-praline l'histoire d'amour entre Padmé et Anakin... mais elle est indispensable pour la suite. Je trouve aussi trop abrupt le basculement de Skywalker, peut-être en raison de l'interprétation maladroite d'Hayden Christensen, dont je ne cesse de penser qu'il était une erreur de casting. Quant au machiavélique chancelier, il est plutôt bien interprété par Ian McDiarmid, mais le comédien avait trop vieilli entre les deux trilogies, alors qu'il était censé incarner la version plus jeune de son personnage.
Outre la partie sur la planète Mustafar (lieu de l'épique duel final), j'ai aimé toutes les scènes où figure Yoda (peut-être mon personnage préféré de la saga), ainsi que la séquence (très enlevée) sur Utapau. Je dois aussi reconnaître que la séquence introductive a toujours autant de gueule.
Bref, ce fut une bonne soirée. A la fin, la salle s'est peu à peu vidée de ses spectateurs (certains exhalant une prégnante odeur de transpiration), laissant le sol jonché de débris de pop corn...
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jeudi, 24 avril 2025
Aimons-nous vivants
Ces dernières années, il est devenu à la mode d'associer de vieilles gloires de la comédie française (parfois avec une jeune vedette). Ainsi, en 2023, on a vu Thierry Lhermitte et Patrick Timsit (aussi présent ici) dans Sexygénaires. L'an dernier, c'est avec Michèle Laroque que Gérard Darmon a fait équipe, dans L'Heureuse Élue.
La différence ici est que Darmon, naguère époux velléitaire et papa cool, joue le vieux grincheux, artiste vieillissant et solitaire. Au cours d'un trajet en train (entre Paris et la Suisse), il rencontre une charmante admiratrice, Victoire (Valérie Lemercier, en pleine forme), qui se révèle aussi collante que déroutante... et même un peu cinglée. La découverte des différentes facettes de ce personnage farfelu fait le délice de la première demi-heure, alors que les scènes entre Antoine (Darmon) et son agent (Timsit) ne sont pas très bonnes.
On a un peu l'impression de se retrouver dans une nouvelle version du Boulet, avec une femme dans le rôle de l'acolyte pesante, voire gênante. C'est plutôt bien mis en scène par Jean-Pierre Améris, dont j'ai apprécié les précédents films (Marie-Line et son juge et Les Folies fermières).
Je ne vais pas trop en dire pour garder un peu de mystère concernant l'intrigue, mais sachez qu'Antoine se rend en Suisse avec un projet bien précis en tête et que la rencontre avec Victoire va l'obliger à le reporter... celle-ci espérant même l'y faire renoncer.
La deuxième partie de l'intrigue voit les deux héros se rapprocher. Antoine accepte de filer un coup de main à Victoire et lui -comme nous- se rend compte que, sous le masque d'une certaine frivolité, se trouve une femme qui souffre. Lemercier est aussi bonne dans ce registre-là que dans la comédie. A son contact, Antoine l'égoïste devient un peu moins con... C'est alors qu'un énorme quiproquo survient, qui relance le film pour une dernière demi-heure assez réussie.
Voilà. Cela ne va pas révolutionner le genre, mais on passe un bon moment.
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mercredi, 23 avril 2025
Comment devenir riche (grâce à sa grand-mère)
Amah (la grand-mère) habite une vieille maison d'un quartier populaire d'une ville thaïlandaise (Bangkok ?). Elle a trois enfants, tous adultes, et vit seule depuis le décès de son époux, recevant de temps à autre la visite de sa progéniture, rarement accompagnée des petits-enfants.
L'autre héros de cette histoire est précisément l'un d'entre eux, M, un jeune homme qui s'incruste chez sa mère divorcée, prétendant vouloir gagner sa vie grâce au commerce en ligne... mais passant surtout son temps à jouer en réseau. Il est présenté comme foncièrement égoïste.
Tout change lorsqu'un cancer est diagnostiqué à la grand-mère (qui, dans un premier temps, n'est pas mise au courant). Comme elle est propriétaire de la maison, tous ses descendants se rapprochent d'elle dans l'espoir d'en hériter... y compris M, stupéfait de voir sa cousine récupérer la demeure du grand-père dont elle était devenue l'aide à domicile.
Sur ce fond limite nauséabond est construite une savoureuse comédie de mœurs, avec une grand-mère au caractère bien trempé, un fils aîné présenté comme étant sous la coupe de son épouse, un cadet menteur et flambeur et une benjamine méritante, occupant un emploi peu valorisé... avec en plus son fainéant de fils à charge. Celui-ci essaie tant bien que mal de s'imposer comme le soutien au quotidien d'Amah, qui voit clair dans son jeu.
C'est drôle et subtil à la fois, parce que le film prend le temps de développer chacun des personnages de la famille, tous ayant des qualités et des défauts. Au passage, il convient de préciser qu'il s'agit d'une famille métissée, la grand-mère, d'origine chinoise, ayant épousé un Thaï.
Pour des Français, il sera sidérant de constater qu'à plus de 70 ans, Amah continue de se lever à cinq heures du matin pour aller vendre son gruau à des travailleurs modestes, sur un trottoir où elle installe son étal. De plus, les soins hospitaliers ne semblent pas, pour la plupart, remboursés par l'équivalent d'une Sécurité sociale.
J'ai aussi été marqué par le fait que les mêmes problèmes familiaux se posent, en Thaïlande et en France. M et ses deux oncles pensent principalement à l'héritage, ce qui pourrit les relations à l'intérieur de la famille. Les enfants négligent leur mère, qui n'aime rien tant qu'un repas en famille, le dimanche, suivi d'une partie de cartes. Même ça, les enfants ont du mal à le lui offrir.
Pat Boonnitipat (dont c'est, je crois, le premier long-métrage) filme très bien les intérieurs : le bric-à-brac qui encombre le labyrinthe qu'est la vieille maison d'Amah, l'exiguïté du modeste appartement loué par sa fille et le luxe du logement haut-de-gamme où habite le fils aîné. On respire lors des scènes d'extérieur, au cimetière (où les pratiques sont très différentes de ce qu'on connaît en Occident) et au temple bouddhiste, utilisé de manière consumériste par la plupart des pèlerins, un peu à l'image de Lourdes chez nous.
Au fur et à mesure que l'histoire se déroule, l'émotion prend le pas sur l'humour... et l'on a parfois les yeux qui piquent. La grand-mère (incarnée par une actrice non-professionnelle, formidable) réserve quelques surprises à sa progéniture, dont une post-mortem.
C'est peut-être le plus beau film de ce début d'année 2025.
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dimanche, 20 avril 2025
La Jeune Femme à l'aiguille
Au Danemark, en 1918, la Première Guerre mondiale est finissante... mais le pays y joue un rôle annexe : il est resté militairement neutre, tout en commerçant (plus ou moins ouvertement) avec des pays des deux camps. Certaines industries en ont profité, comme l'atelier de couture où travaille l'héroïne, Karoline (superbement incarnée par Victoria Carmen Sonne).
Celle-ci est dans une situation délicate : son mari a disparu (peut-être est-il marin) et elle ne peut plus payer son loyer. En désespoir de cause, elle demande de l'aide au directeur de l'usine, un patron du genre paternaliste, pas odieux avec ses employées... et qui n'est pas insensible au charme de cette ouvrière. Une liaison va démarrer, avec des conséquences insoupçonnées...
Je n'en dirai guère plus à propos de l'intrigue, riche en rebondissements, pour laisser le plaisir de la découverte. Je signale juste que l'histoire s'inspire d'un fait divers qui a défrayé la chronique, mais je ne préciserai pas à quel sujet, plusieurs aspects (sordides) de l'intrigue pouvant déboucher sur une action judiciaire.
En attendant d'éclaircir ce mystère, on peut profiter d'un superbe noir et blanc, qui correspond parfaitement à l'ambiance "à la Charles Dickens" du Copenhague de 1918. Les écarts de richesse y sont énormes et les classes populaires urbaines souffrent, les femmes encore plus que les hommes.
La seconde partie de l'histoire est centrée sur un étrange duo féminin, composé de l'héroïne et d'une commerçante plus âgée (interprétée par Trine Dyrholm, dans laquelle les cinéphiles reconnaîtront un des personnages de Festen, de Thomas Vinterberg). Ce duo est en fait un trio, puisqu'une jeune fille accompagne les deux adultes... les hommes jouant un rôle annexe.
La mise en scène est un mélange de styles. La vie quotidienne est peinte de manière réaliste. On ne nous épargne pas la crasse de certains logements... et de certains protagonistes, ni les difficultés d'un accouchement, ni les rares horreurs de la guerre qui parviennent jusqu'au Danemark. Ces aspects sordides sont presque sublimés par le noir et blanc. Le cinéaste semble être un formaliste, mais je pense aussi qu'il a utilisé cette esthétique pour poser la question de la monstruosité. Dans cette capitale européenne en apparence moderne, où la boue côtoie parfois le grand luxe, qu'est-ce qui est réellement horrible : l'apparence (sale) de certains habitants ou le comportement (odieux) d'autres, mieux habillés ?
Même si le film n'est pas sans défaut, je trouve qu'il pose de bonnes questions (certes de manière parfois allusive) et qu'il est d'une grande force visuelle.
P.S.
Attention, quelques divulgâchages sont en approche, notamment pour nuancer mon enthousiasme.
1) Je trouve irréaliste que le directeur de l'usine culbute son employée en plein centre-ville (certes dans une ruelle obscure)... et avec le consentement de celle-ci.
2) J'ai du mal à comprendre comment l'époux de l'héroïne peut revenir avec les blessures qui lui sont attribuées. Elles correspondent plutôt à celles d'un soldat d'un pays belligérant... mais elles permettent de poser d'intéressantes questions sur l'apparence physique... et leur mise en scène est, je pense, une référence à Elephant Man (et peut-être aussi à Au-revoir là-haut).
3) Une autre référence cinéphile est insérée dans la première partie, lorsque nous est montrée l'entrée de l'atelier de couture, à la fin d'une journée de travail. On pense inévitablement à la sortie des usines Lumière, qu'on peut actuellement revoir sous trois aspects dans le formidable documentaire de Thierry Frémaux.
Lumière, l'aventure continue !
Huit ans après Lumière ! L'aventure commence, Thierry Frémaux remet le couvert, en cette année anniversaire (les 130 ans de l'invention du cinématographe). Il utilise la même méthode et les mêmes recettes que dans le précédent film (dont il réemploie une partie du matériau) et nous propose, en 1h45 (environ), plus d'une centaine de petits films d'époque, restaurés, sur une musique de Gabriel Fauré.
On redécouvre ainsi avec plaisir les trois versions de la fameuse sortie d'usine, commentées avec acuité. Frémaux a une fois encore su doser sa parole, intervenant quand c'est utile, ne surchargeant pas le docu de propos verbeux... et c'est toujours pertinent.
La suite est classée par thèmes. On nous rappelle que Louis Lumière a employé et formé une brochette d'opérateurs, qu'il a envoyés aux quatre coins du monde. Ils sont cités dans le générique de fin, mais je trouve qu'ils ne sont pas assez mis en avant, puisque, le plus souvent, leur travail de qualité est mis au compte du seul Louis Lumière : Gabriel Veyre, Alexandre Promio, François-Constant Girel, Félix Mesguich...
Grâce à eux, nous avons, aujourd'hui encore, des images datant de plus de cent ans du continent américain (États-Unis, Canada, Mexique...), des colonies françaises d'Afrique et d'Asie (l'Indochine en particulier)... mais aussi d'Europe, avec une place importante accordée à la France, surtout à Paris et à Lyon. D'autres villes de province sont présentes à l'écran, l'une d'entre elles étant particulièrement difficile à reconnaître :
(réponse en fin de billet)
De ma région je n'ai reconnu qu'un passage sur Carmaux, avec des femmes travaillant dans les mines, mais en surface. (On les voit charger du coke dans des brouettes.)
Les travaux et les jours constituent une thématique importante. Le monde paysan est à l'honneur, même si sa place dans le film est plus faible que celle qu'il occupait dans la société de l'époque.
Un autre passage intéressant concerne les militaires, français, mais aussi étrangers : on voit des Allemands (reconnaissables au casque à pointe) et des Mexicains, entre autres. Frémaux fait remarquer que les unités françaises qui nous sont montrées ne semblent pas très redoutables... mais c'est peut-être lié au fait que, devant la caméra, beaucoup de personnes filmées (quelle que soit la classe sociale) ont envie de "faire l'intéressant".
La famille des frères Lumière fait l'objet de nombreuses prises de vue. On les voit dans leur propriété, mais aussi en vacances, à la mer. Louis a aimé filmer les enfants, soit au naturel, soit en les dirigeant, tel un metteur en scène contemporain.
Cela nous mène à un autre propos de Thierry Frémaux : l'aspect précurseur des frères Lumière et de leurs équipes. Les plans de leurs petits films étaient construits avec soin : le cadre n'est jamais choisi au hasard et, souvent, les images fourmillent de détails, que Frémaux se plaît à souligner.
Le plus souvent, les preneurs d'images se font documentaristes. Mais ils ne s'interdisent pas quelques effets : panoramique, travelling et, de temps en temps, mise en abyme, un opérateur figurant dans le champ.
Quelques petites fictions nous sont aussi proposées, avec des trucages visuels. C'est plaisant, mais ce ne sont pas les films les plus aboutis des frères Lumière. Dans ce domaine, ils ont été vite dépassés par l'un de leurs admirateurs, présent à l'une de leurs premières projections, un certain Georges Méliès.
L'ensemble constitue un formidable panorama de l’œuvre des pionniers du cinéma. C'est passionnant à regarder et à écouter. Sur le plan historique, on pourra toutefois regretter que Frémaux n'évoque pas la sympathie éprouvée par les deux frères vieillissants pour le régime de Vichy. Il rétorquerait sans doute qu'il n'a pas vraiment fait œuvre de biographe, mais rendu hommage aux débuts foisonnants de ce qui n'était pas encore appelé le Septième Art.
P.S.
Pour la ville de province, la réponse est ici.
11:13 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 19 avril 2025
La Réparation
Plus de dix ans après Le Temps des aveux, Régis Wargnier nous propose son nouveau film, toujours sous le sceau de l'Asie orientale (ici Taïwan, la Chine non communiste).
C'est une histoire de filiation, d'amour(s) et de transmission, entre la France et Taïwan. La première partie se déroule en Bretagne, où se trouve un restaurant (doublement) étoilé... et dont le chef cuistot, "Janko" (interprété par Clovis Cornillac), espère décrocher une distinction supplémentaire... et passer le flambeau à sa fille unique, qui a une liaison (secrète) avec son premier commis.
Cette partie nous propose du déjà-vu (au cinéma et à la télévision), mais plutôt bien joué et correctement mis en scène. (Je trouve que Wargnier filme bien la forêt, ainsi que la cuisine en action.) Cornillac (rôdé par la série Chefs) est au poil dans le rôle, à la fois cuisinier passionné, chef de brigade exigeant voire autoritaire... et papounet très protecteur, un brin directif. J'ai aussi bien aimé les scènes de retour en arrière, montrant Janko avec sa fille, alors enfant. Je suis moins convaincu par celle qui la joue à l'âge adulte, Brigitte Bardot Julia de Nunez, et par ses collègues masculins, Antoine Pelletier et Julien de Saint-Jean (qu'on a vu meilleur dans Le Comte de Monte-Cristo).
On attend le (premier) coup de théâtre et ses conséquences. Cela introduit un intéressant suspens, concernant deux personnes. Pour l'une des deux, le doute subsiste quasiment jusqu'à la fin...
Une ellipse nous projette quelques années plus tard, à Taïwan, où le film prend une nouvelle inspiration. On sent Wargnier fasciné à la fois par l'ultra-modernité urbaine et les espaces naturels de l'île. Je trouve que le restaurant de Taipei est encore mieux filmé que son homologue de Bretagne. Le nouveau protagoniste (un jeune chef taïwanais prometteur), est bien interprété, par J.C. Lin.
Dans cette séquence, on retrouve avec plaisir Louis-Do de Lencquesaing, en critique gastronomique pontifiant (pléonasme ?). Mais la sauce ne prend pas. Je pense que les acteurs chevronnés s'en sortent mieux parce qu'ils ont compris ce que Wargnier attendait d'eux, sans avoir besoin d'être cornaqués... ou alors c'est tout simplement parce qu'ils sont meilleurs que les jeunes (Français). Quoi qu'il en soit, pour moi, le plat qui nous est proposé, au final, manque un peu de saveur.
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jeudi, 17 avril 2025
Novocaïne
Le titre est le surnom que porte le personnage principal. Il est lié à sa "particularité" : ne pas ressentir la douleur (physique). L'introduction nous présente donc Nathan (Jack Quaid, fils de, récemment vu dans Companion) au quotidien, avec ses rituels suivis à la lettre et une multitude de petites précautions visant à éviter le moindre accident. Nate est un chic type, il a le profil du "gendre idéal" : poli, propre sur lui, déjà directeur-adjoint d'une agence bancaire, assez empathique. Mais il vit seul, entouré de ses bouquins et d'un équipement informatique haut de gamme, qui lui a permis de se faire un ami gamer... qu'il n'a jamais rencontré (dans la vraie vie).
Depuis quelques mois, il a encore plus de plaisir à se rendre au boulot, depuis qu'a été engagée une nouvelle employée, Sherry, une petite bombe mini-jupée qui semble lui faire de l’œil. Les deux tourtereaux se rapprochent... et se découvrent des points communs, notamment une enfance difficile. Cette rom com (comédie romantique) est légèrement épicée, puisqu'on a brièvement l'occasion de découvrir la "particularité" de Nathan à l’œuvre.
Cela se corse un peu lors du braquage de la banque, ultra-violent, bien filmé. On est à l'approche des fêtes de fin d'année et un trio de Pères Noël débarque sans prévenir, pour distribuer quelques pralines. Cela ne se passe donc pas très bien... et Sherry est prise en otage.
Nathan se lance à la poursuite des méchants... et c'est l'escalade. Il va les rencontrer un à un, successivement dans la cuisine d'un restaurant, une maison regorgeant de pièges et un garage. (Je recommande aussi le passage chez le tatoueur, qui ne déçoit pas.) Cela devient de plus en plus violent, de plus en plus gore... de plus en plus invraisemblable. Mais, qu'on soit horrifié(e) ou qu'on rigole, pris dans le rythme, cela se tient. Maquillage, prothèses, sauce tomate et effets numériques contribuent à nous faire toucher du doigt l'ampleur des sévices que ce brave Nathan va subir (sans avoir mal), pour tenter de sauver sa dulcinée. A propos de celle-ci, un petit coup de théâtre nous est ménagé à mi-parcours.
Le dernier méchant Père Noël (Simon) est le plus difficile à dézinguer. On pensait en avoir fini au bout d'1h30... et voilà que la production nous en remet une couche, pour un petit quart d'heure supplémentaire de boucherie. La manière dont ce Simon (interprété par Ray Nicholson, autre fils de) est définitivement mis hors d'état de nuire est croquignolesque (mais a choqué les demoiselles assises pas très loin de moi).
Cela m'a un peu rappelé l'ambiance des Deadpool, à ceci près que le super-héros mal élevé ressent la douleur (mais se rétablit de ses blessures), alors que Nathan ne ressent rien... mais finit par avoir bigrement besoin d'une aide médicale.
C'était mon "plaisir coupable" du mois d'avril.
00:24 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéùa, cinema, film, films
mardi, 15 avril 2025
Minecraft (le film)
La Warner s'est lancée dans le périlleux exercice de transposition de l'univers du célèbre jeu sur grand écran, dans le cadre d'une comédie d'aventures. Une pelletée d'effets spéciaux a été employée pour animer des scènes de bagarre, de poursuite... ou de créativité architecturale. Pour moi (qui ne suis pas un gamer), c'est réussi et cela constitue un agréable divertissement.
Cela démarre sur les chapeaux de roue, avec la jeunesse de Steve, garçon un peu timide qui, plus tard, parvient à pénétrer dans la fameuse mine, où il a réalisé la découverte qui a changé sa vie. Cette première vision des deux univers parallèles (le paradis de briques et l'enfer porcin) sert d'introduction... et peut-être de mise à jour, pour le public qui ignore tout du jeu.
Ensuite, c'est un deuxième film qui commence, dans une petite ville d'Idaho, dans le nord-ouest des États-Unis. On y fait connaissance avec les autres protagonistes de l'histoire : un garçon sensible et intelligent, qui vient de perdre sa mère, sa grande sœur, une agente immobilière qui n'a pas la langue dans sa poche et une ancienne gloire locale (devenu un gros beauf), Garrett "Garbage" Garrison, qui a les muscles, les tatouages et les cheveux de Jason Momoa. On remarque que, dans cette petite ville d'un comté sans doute rural, beaucoup d'adultes sont en surpoids et que leur intelligence est en général très limitée... On comprend que les jeunes aient envie de s'enfuir !
Leurs aventures leur font rejoindre l'univers où Steve (Jack Black, très bien) est resté enfermé... Cela ne vous rappelle rien ? Mais si, bien sûr, Jumanji ! C'est du même niveau, même si c'est plus sage au niveau des dialogues... et il n'y a pas d'héroïne bad ass (juste une directrice de collège très dragueuse, interprétée Jennifer Coolidge, célèbre naguère pour avoir incarné la mère de Stifler, dans les American Pie).
Les effets spéciaux sont vraiment bien fichus. J'ai particulièrement aimé les animaux, tous de forme cubique bien entendu : les poules, les moutons, les cochons, les loups... Celles et ceux qui goûtent peu l'habillage visuel peuvent s'amuser à repérer les clins d’œil cinéphiles, au Seigneur des anneaux, à Star Wars, Indiana Jones...
Dans cet univers loufoque, l'improbable équipe de bras cassés doit resserrer ses liens et croire en elle pour surmonter l'adversité. On assiste bien entendu à une énième naissance de famille recomposée, le Bien finissant par vaincre le Mal. A la fin de l'histoire, chacun a mûri... et l'on a passé un bon moment... à savourer jusqu'au bout, avec deux scènes ajoutées.
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Voyage avec mon père
A la suite du décès d'une personne proche, deux citoyens (juifs) des États-Unis, apparentés, effectuent un voyage mémoriel en Pologne, dans la région qui fut le berceau familial (du côté de Lodz). Leur périple sera l'occasion de se fâcher et de se rabibocher, dans une Pologne plus ou moins accueillante... Cela ne vous rappelle rien ? Eh, oui, on dirait l'intrigue du récent A Real Pain... à ceci près qu'ici l'histoire est entièrement vraie... et plus touchante que ce qu'on a pu voir dans le film de Jesse Eisenberg.
Le duo de héros est composé d'un père et de sa fille, Edek et Ruth, incarnés par l'excellent Stephen Fry et la surprenante Lena Dunham (venue de la télévision). Tous deux n'ont pas la même manière de gérer le deuil de l'épouse d'Edek (mère de Ruth). Lui n'en parle quasiment pas et essaie de goûter aux plaisirs de la vie, tandis que sa fille a tendance à déprimer.
C'est elle qui a eu l'idée de ce voyage mémoriel, auquel son père, au départ, ne voulait pas participer. Il faut dire que Ruth n'a pas eu de grands-parents... ni de cousins. Le décès de la mère et l'ouverture de la Pologne post communiste (au début des années 1990) aux touristes du monde capitaliste ont contribué à la réalisation du projet.
Là encore, le père (qui a fini par décider d'accompagner Ruth) et la fille ne sont pas d'accord. Elle a établi un programme précis, qu'elle veut suivre à la lettre. Edek préfère musarder, tentant d'éviter de retourner à Lodz en s'adonnant à un tourisme traditionnel, profitant de l'occasion pour pratiquer à nouveau la langue polonaise. Il se rapproche même langoureusement d'interprètes locales, très ouvertes aux échanges interculturels...
Sur le fond, le film ne cherche pas à emprunter un sentier politiquement correct. Le père ment à sa fille à propos de l'emplacement de l'ancien ghetto juif et il n'arrête pas de lui reprocher de "bouffer des graines" (elle est végétarienne) et de s'être séparée de son époux, qu'Edek considère comme un chic type. (Il en conserve même des photographies dans son porte-feuille.)
Mais le malaise le plus grand s'installe lors du passage par Lodz. Edek montre à Ruth l'appartement (miteux) où, jeune homme, il est allé draguer sa future épouse, avant de l'accompagner dans un autre endroit de la ville, où se trouve l'immeuble que possédait sa famille, qui logeait dans l'un des grands appartements. La rencontre avec les nouveaux occupants polonais (catholiques) réserve pas mal de surprises...
On l'attend et elle finit par arriver : la séquence à Auschwitz. Elle est surprenante dans son déroulement, très émouvante, mais pas forcément comme on s'y attend. C'est toujours aussi bien interprété, du côté états-unien comme du côté polonais (avec notamment un chauffeur de taxi empathique et débrouillard).
J'ai beaucoup aimé. Je regrette d'autant plus que le film ait été minimisé, voire dénigré, par une partie des critiques français, que la mémoire de ce génocide semble quelque peu déranger.
16:49 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
lundi, 14 avril 2025
Vermiglio ou la mariée des montagnes
En 1944, la Seconde Guerre mondiale est finissante (en Europe). Ses échos parviennent, étouffés, dans un village du Trentin, dans le nord de l'Italie, aux confins de l'actuelle Autriche.
Deux soldats italiens arrivent au village. L'un est du coin, tandis que l'autre est originaire de Sicile, et peine à se faire comprendre des habitants, son dialecte étant fort éloigné de la langue régionale. On comprend très vite que ces deux militaires ont déserté, la tournure prise par la guerre étant il est vrai déconcertante. L'Italie, fasciste, fut un allié de l'Allemagne, jusqu'au renversement de Mussolini, en 1943. Le nouveau gouvernement s'est rapproché des Alliés, tandis qu'au nord, les Allemands ont lancé une invasion pour remettre le Duce au pouvoir, dans une parodie de régime fasciste, la République de Salo (dénomination qui est riche de sens, en français).
Dans ce village du Trentin, les femmes sont nombreuses... mais sous la coupe des hommes, notamment des vieux. L'instituteur fait office de notable local, cultivé, raisonnable, parlant bien. Il en impose à tout le monde, y compris au sein de sa famille. Son épouse est sur le point d'accoucher de leur dixième (!) enfant, sept des précédents ayant semble-t-il survécu : trois garçons très curieux, un adolescent pas bien futé, une gamine qui excelle à l'école (le grand espoir de la famille) et deux sœurs aînées. La première (Ada) est partagée entre sa foi intense et ses pulsions, tandis que la seconde (qui me semble être la plus âgée), Lucia, va vite avoir le béguin pour le jeune Sicilien. Celui-ci a une belle gueule, des mains douces et, parfois, le zizi tout dur...
La première partie raconte l'intégration des soldats à la vie villageoise (les habitants ayant décidé, à l'initiative de l'instituteur, de ne pas les dénoncer). Les scènes sont quasi naturalistes, ayant pour cadre soit de magnifiques paysages alpins soit des intérieurs ruraux que, par politesse, on qualifiera de rustiques. On ne roule pas sur l'or dans cette campagne oubliée, où la force des bras est le principal atout pour survivre.
Petit à petit, on découvre les différents aspects de la domination qui s'exerce sur les femmes, cantonnées à certains travaux : cuisine, ménage, lessive, gestion des enfants... Quelques-unes aspirent à autre chose, ce qui implique d'échapper au schéma marital qui leur est imposé. Ce pourrait être par la voie des ordres (pour la plus croyante des filles), grâce à des études poussées (pour la petite douée) ou en partant travailler à la ville.
Tout cela est suggéré avec finesse, au cours de scènes en apparence anodines, mais qui disent beaucoup de choses.
C'est mis en scène et dirigé avec talent, par Maura Delpero, dont je n'avais pas entendu parler auparavant.
La seconde partie voit la guerre s'achever. C'est le moment où les humains, les marchandises et les informations se remettent à circuler (plus ou moins) librement. Plusieurs changements majeurs surviennent, toujours très bien amenés par la réalisatrice qui, de surcroît, réussit son dernier quart d'heure, que j'ai trouvé éblouissant.
C'est un film à voir, s'il passe près de chez vous.
21:20 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
dimanche, 13 avril 2025
Piégé
Une petite racaille va se retrouver enfermée dans un somptueux SUV et soumise aux desiderata d'un vieux chirurgien réactionnaire. (Le véhicule, de la marque fictive DOLUS, semble avoir été spécialement conçu pour le film, à partir d'un modèle Land Rover.)
L'introduction nous présente le délinquant, qui a passé les trente ans, mais vit encore comme un adolescent irresponsable, entre trafics minables, vols et consommation de stupéfiants. Toutefois, la mise en scène est chargée de nous faire comprendre qu'au fond, c'est plutôt un type bien, attaché à sa fille (qui vit avec son ex), que les circonstances vont conduire à enfreindre de nouvelles règles.
La suite est un quasi-huis-clos, à l'intérieur du SUV. C'est un mano a mano, d'abord à distance, entre un vieux réac (Anthony Hopkins, certes affaibli, mais tenant encore la route, si j'ose dire) et un jeune rebelle (Bill Skarsgård, étonnant). Caméras intérieures, micros et ordinateur de bord (connecté) permettent aux deux personnages d'échanger... et même de débattre, avant que le rapport de force ne reprenne le dessus.
Le véhicule ultra-perfectionné regorge de recoins et de possibilités, ce qui donne lieu à divers rebondissements, parfois sanglants. De plus, comme l'intrigue s'étend sur plusieurs jours, au sein du même véhicule, vous pensez bien qu'à un moment donné, il va être question de nourriture, de boisson... et de déjections. J'ai beaucoup aimé tous ces aspects du film (sang, nourriture, pisse et... odeur de merde).
Si l'on sait très vite pourquoi le jeune homme braque le véhicule, en revanche, on met un petit moment à comprendre quelles sont les motivations profondes du vieux chirurgien.
De son côté, le cinéaste, à travers le confrontation de deux profils sociologiques et de deux tempéraments différents, semble avoir voulu mettre en scène deux Amérique, l'une plutôt progressiste et "laxiste", l'autre travailleuse, autoritaire et attachée aux "vraies valeurs". C'est donc, pour moi, globalement, un bon "film de droite", dont toutefois la conclusion pourra être appréciée par des spectateurs de différentes sensibilités.
10:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films