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vendredi, 04 février 2022

Lynx

   La sortie de ce documentaire animalier fait inévitablement penser à celle de La Panthère des neiges (à voir absolument). Dans les deux cas, un passionné de la nature tente de débusquer un félin et rencontre en cours de route une flopée d'animaux sauvages, dans des paysages somptueux.

   Là s'arrêtent les similitudes. Contrairement à Sylvain Tesson, Laurent Geslin n'existe que par la voix. Il n'apparaît pas physiquement dans le film, s'effaçant derrière son sujet. De plus, l'objet de sa quête n'est pas un animal mystérieux, dont il explore l'un des derniers refuges sur Terre, mais un animal autrefois disparu du Jura (suisse), et qui a été réintroduit. C'est d'ailleurs le sens de l'une des premières scènes.

   J'aime les félins, dans la vie et sur les écrans (grands comme petits). Ce documentaire-ci leur rend hommage. Quand le réalisateur est parvenu à les repérer, il nous en propose des images à la fois belles et saisissantes.

   Au début, c'est un mâle adulte qu'il a débusqué. Au moment des amours, il se lance à la recherche d'une femelle, qu'il finit par rencontrer. (Étranges chants nuptiaux que ceux des lynx !...) Visiblement, on se trouve mutuellement très à son goût, on copule... et un trio de chatons débarque, deux mâles et une femelle. Le cinéaste s'amuse à remarquer que cette dernière semble plus dégourdie que ses frangins, qui ne pensent qu'à s'amuser. On la voit commencer très jeune à explorer son environnement. (Quand on connaît la suite, on se demande toutefois si ce n'est pas une réécriture a posteriori.)

   Je vais essayer de ne pas trop divulgâcher mais, sachez qu'au bout du compte, une partie de la "famille" aura disparu. Entre temps, on aura croisé "le borgne" (un mâle rival du père), mais aussi des renards, des chats, des hermines, des marmottes, des corbeaux, des geais, des hiboux, des chamois, des chouettes... et des humains (des promeneuses), lors d'une scène stupéfiante, que le réalisateur n'avait pas anticipée. Je n'en dis pas plus ! Hélas, à d'autres occasions, quand un lynx croise le chemin d'un humain, cela se passe moins bien...

   On saura gré au réalisateur de ne pas avoir caché que la nature est cruelle (même sans les humains)... et parfois solidaire : les proies potentielles s'avertissent les unes les autres de la présence d'un prédateur.

   Dans la salle, on a été captivé de 7 à 77 ans.

22:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Lynx

   La sortie de ce documentaire animalier fait inévitablement penser à celle de La Panthère des neiges (à voir absolument). Dans les deux cas, un passionné de la nature tente de débusquer un félin et rencontre en cours de route une flopée d'animaux sauvages, dans des paysages somptueux.

   Là s'arrêtent les similitudes. Contrairement à Sylvain Tesson, Laurent Geslin n'existe que par la voix. Il n'apparaît pas physiquement dans le film, s'effaçant derrière son sujet. De plus, l'objet de sa quête n'est pas un animal mystérieux, dont il explore l'un des derniers refuges sur Terre, mais un animal autrefois disparu du Jura (suisse), et qui a été réintroduit. C'est d'ailleurs le sens de l'une des premières scènes.

   J'aime les félins, dans la vie et sur les écrans (grands comme petits). Ce documentaire-ci leur rend hommage. Quand le réalisateur est parvenu à les repérer, il nous en propose des images à la fois belles et saisissantes.

   Au début, c'est un mâle adulte qu'il a débusqué. Au moment des amours, il se lance à la recherche d'une femelle, qu'il finit par rencontrer. (Étranges chants nuptiaux que ceux des lynx !...) Visiblement, on se trouve mutuellement très à son goût, on copule... et un trio de chatons débarque, deux mâles et une femelle. Le cinéaste s'amuse à remarquer que cette dernière semble plus dégourdie que ses frangins, qui ne pensent qu'à s'amuser. On la voit commencer très jeune à explorer son environnement. (Quand on connaît la suite, on se demande toutefois si ce n'est pas une réécriture a posteriori.)

   Je vais essayer de ne pas trop divulgâcher mais, sachez qu'au bout du compte, une partie de la "famille" aura disparu. Entre temps, on aura croisé "le borgne" (un mâle rival du père), mais aussi des renards, des chats, des hermines, des marmottes, des corbeaux, des geais, des hiboux, des chamois, des chouettes... et des humains (des promeneuses), lors d'une scène stupéfiante, que le réalisateur n'avait pas anticipée. Je n'en dis pas plus ! Hélas, à d'autres occasions, quand un lynx croise le chemin d'un humain, cela se passe moins bien...

   On saura gré au réalisateur de ne pas avoir caché que la nature est cruelle (même sans les humains)... et parfois solidaire : les proies potentielles s'avertissent les unes les autres de la présence d'un prédateur.

   Dans la salle, on a été captivé de 7 à 77 ans.

22:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Adieu Monsieur Haffmann

   Je ne connais pas la pièce de théâtre dont ce film est (très librement) inspiré. J'ai été attiré par la distribution, le bouche-à-oreille (très bon) et le sujet. Au cœur de l'intrigue se trouve la spoliation des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les territoires qu'ils contrôlent, les nazis ont interdit aux juifs de posséder des entreprises, les contraignant à les vendre (souvent à prix cassé) voire à les abandonner, au profit soit des nazis eux-mêmes, soit de collaborateurs peu scrupuleux.

   Pour tenter de contourner ces mesures discriminatoires, certains artisans ou commerçants ont transmis (plus ou moins fictivement) leur boîte à un employé ou un ami non-juif. C'est ce qu'il se passe ici, au tout début de l'histoire, quand le bijoutier Joseph Haffmann (Daniel Auteuil, très bien) décide de faire partir sa famille en zone non-occupée et de passer la main (officiellement) à François Mercier.

   Toute la première partie dresse le tableau des relations complexes entre les deux familles, si dissemblables. Le couple de bijoutiers est riche, celui formé par son employé et son épouse, sans être dans la misère, tire le diable par la queue. Haffmann est heureux en ménage et père de trois enfants. Mercier pense qu'il est stérile et son couple n'est pas serein. Enfin, le bijoutier jouit d'une bonne santé, tandis que l'employé a un pied-bot. Cela lui a permis d'éviter d'être mobilisé en 1939, mais, à une époque où l'on est très pointilleux sur le patriotisme et les signes de virilité, l'employé "chanceux" souffre d'un gros complexe d'infériorité.

   L'arrivée des nazis et ses conséquences permettent à François Mercier (ainsi qu'à son épouse) de vivre une sorte de revanche sociale. Certes, en théorie, il n'est que le gardien de la boutique (passée à son nom, tout de même), mais il se sent pousser des ailes... et puis l'occupant n'est pas toujours antipathique... et il permet de très bien gagner sa vie.

   C'est sur ce couple modeste, auquel la vie semble sourire enfin, que le film est centré. Sara Giraudeau et Gilles Lellouche sont remarquables, le second encore plus que la première. J'ai toutefois eu de grandes appréhensions quand j'ai découvert le "marché" que François proposait à son ancien patron. Je n'en dirai pas plus, mais j'ai eu peur que l'on tombe dans le très glauque. La suite m'a rassuré.

   À porter aussi au crédit du film la mise en scène du travail manuel des bijoutiers. On comprend mieux ce que signifie l'expression "être orfèvre en la matière". (Les deux acteurs principaux ont été doublés dans les scènes de taille des bijoux.)

   C'est un beau film sensible, subtil, humaniste, féministe même à travers l'évolution du personnage de Blanche, d'abord épouse soumise, puis de plus en plus indépendante (dans la mesure du possible, à l'époque).

Adieu Monsieur Haffmann

   Je ne connais pas la pièce de théâtre dont ce film est (très librement) inspiré. J'ai été attiré par la distribution, le bouche-à-oreille (très bon) et le sujet. Au cœur de l'intrigue se trouve la spoliation des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les territoires qu'ils contrôlent, les nazis ont interdit aux juifs de posséder des entreprises, les contraignant à les vendre (souvent à prix cassé) voire à les abandonner, au profit soit des nazis eux-mêmes, soit de collaborateurs peu scrupuleux.

   Pour tenter de contourner ces mesures discriminatoires, certains artisans ou commerçants ont transmis (plus ou moins fictivement) leur boîte à un employé ou un ami non-juif. C'est ce qu'il se passe ici, au tout début de l'histoire, quand le bijoutier Joseph Haffmann (Daniel Auteuil, très bien) décide de faire partir sa famille en zone non-occupée et de passer la main (officiellement) à François Mercier.

   Toute la première partie dresse le tableau des relations complexes entre les deux familles, si dissemblables. Le couple de bijoutiers est riche, celui formé par son employé et son épouse, sans être dans la misère, tire le diable par la queue. Haffmann est heureux en ménage et père de trois enfants. Mercier pense qu'il est stérile et son couple n'est pas serein. Enfin, le bijoutier jouit d'une bonne santé, tandis que l'employé a un pied-bot. Cela lui a permis d'éviter d'être mobilisé en 1939, mais, à une époque où l'on est très pointilleux sur le patriotisme et les signes de virilité, l'employé "chanceux" souffre d'un gros complexe d'infériorité.

   L'arrivée des nazis et ses conséquences permettent à François Mercier (ainsi qu'à son épouse) de vivre une sorte de revanche sociale. Certes, en théorie, il n'est que le gardien de la boutique (passée à son nom, tout de même), mais il se sent pousser des ailes... et puis l'occupant n'est pas toujours antipathique... et il permet de très bien gagner sa vie.

   C'est sur ce couple modeste, auquel la vie semble sourire enfin, que le film est centré. Sara Giraudeau et Gilles Lellouche sont remarquables, le second encore plus que la première. J'ai toutefois eu de grandes appréhensions quand j'ai découvert le "marché" que François proposait à son ancien patron. Je n'en dirai pas plus, mais j'ai eu peur que l'on tombe dans le très glauque. La suite m'a rassuré.

   À porter aussi au crédit du film la mise en scène du travail manuel des bijoutiers. On comprend mieux ce que signifie l'expression "être orfèvre en la matière". (Les deux acteurs principaux ont été doublés dans les scènes de taille des bijoux.)

   C'est un beau film sensible, subtil, humaniste, féministe même à travers l'évolution du personnage de Blanche, d'abord épouse soumise, puis de plus en plus indépendante (dans la mesure du possible, à l'époque).

samedi, 29 janvier 2022

Marché noir

   Intitulé Koshtârgâh ("L'Abattoir") à l'origine, The Slaughterhouse à l'international, ce polar iranien croise deux intrigues en apparence distinctes, mais qui vont finir par se rejoindre.

   L'histoire débute par la découverte de trois cadavres dans l'une des chambres froides d'un abattoir de Téhéran. Le propriétaire semble furieux et demande au gardien de "régler le problème". Celui-ci, qui se sent responsable (sans qu'on sache très bien pourquoi au début), demande à Amir, son fils aîné, de l'épauler. Celui-ci, tout juste revenu de France (d'où il a été expulsé), voudrait désormais éviter les embrouilles, mais il se voit mal laisser son père dans la panade.

   Ce début est bien mystérieux, les principaux personnages ayant tous quelque chose à cacher. Si l'interprétation est globalement bonne, j'ai toutefois été un peu agacé par celui qui incarne le père : il en fait trop. Il faut dire que la caractérisation est à la louche : l'homme âgé, veuf, obèse, est autoritaire avec les siens mais servile vis-à-vis du patron de l'abattoir (qui lui a fourni un logement).

   En parallèle, on découvre petit à petit l'importance prise par le trafic de devises (des euros et des dollars). Elles sont très recherchées dans le pays, en particulier par tous ceux qui veulent faire du commerce international, surtout s'il est illégal. C'est aussi un objet de spéculation : vendre puis refourguer des dollars permet, si l'on est malin et qu'on réussit à se procurer une grande quantité d'espèces, de faire de jolies culbutes. Pour anticiper les fluctuations du billet vert, certains Iraniens suivent avec attention les remous de la politique internationale, même s'ils n'en comprennent pas tous les ressorts. Je signale aussi une séquence nocturne, impressionnante, construite autour d'un marché de devises (illégal) à ciel ouvert, dans un quartier peu fréquenté de la capitale iranienne. On y voit de vieux messieurs côtoyer le frisson de la spéculation, quitte à frôler l'arrêt cardiaque. On se croirait à la corbeille d'une bourse occidentale, il y a quarante-cinquante ans !

   Amir finit par trouver du travail auprès du propriétaire de l'abattoir, qui est mêlé au trafic de devises... ainsi qu'au commerce de bétail. La mort (accidentelle ?) des trois hommes du début pourrait ne plus être qu'un souvenir, mais voilà qu'un petit bout de femme en tchador vient semer la pagaille. Il s'agit d'Asra, la fille de la plus âgée des trois victimes (et cousine des deux autres). C'est une Iranienne arabophone, à l'image d'une communauté qui vit dans l'ouest du pays et profite de la proximité de la frontière irakienne pour se livrer à de menus trafics. Par son intermédiaire, on finit par comprendre quel est le lien avec la folie du dollar.

cinéma,cinema,film,films

   J'ai été pris par ce polar social, une nouvelle réussite iranienne après Un Héros et surtout La Loi de Téhéran. Si l'occasion se présente, courez voir ce film !

Marché noir

   Intitulé Koshtârgâh ("L'Abattoir") à l'origine, The Slaughterhouse à l'international, ce polar iranien croise deux intrigues en apparence distinctes, mais qui vont finir par se rejoindre.

   L'histoire débute par la découverte de trois cadavres dans l'une des chambres froides d'un abattoir de Téhéran. Le propriétaire semble furieux et demande au gardien de "régler le problème". Celui-ci, qui se sent responsable (sans qu'on sache très bien pourquoi au début), demande à Amir, son fils aîné, de l'épauler. Celui-ci, tout juste revenu de France (d'où il a été expulsé), voudrait désormais éviter les embrouilles, mais il se voit mal laisser son père dans la panade.

   Ce début est bien mystérieux, les principaux personnages ayant tous quelque chose à cacher. Si l'interprétation est globalement bonne, j'ai toutefois été un peu agacé par celui qui incarne le père : il en fait trop. Il faut dire que la caractérisation est à la louche : l'homme âgé, veuf, obèse, est autoritaire avec les siens mais servile vis-à-vis du patron de l'abattoir (qui lui a fourni un logement).

   En parallèle, on découvre petit à petit l'importance prise par le trafic de devises (des euros et des dollars). Elles sont très recherchées dans le pays, en particulier par tous ceux qui veulent faire du commerce international, surtout s'il est illégal. C'est aussi un objet de spéculation : vendre puis refourguer des dollars permet, si l'on est malin et qu'on réussit à se procurer une grande quantité d'espèces, de faire de jolies culbutes. Pour anticiper les fluctuations du billet vert, certains Iraniens suivent avec attention les remous de la politique internationale, même s'ils n'en comprennent pas tous les ressorts. Je signale aussi une séquence nocturne, impressionnante, construite autour d'un marché de devises (illégal) à ciel ouvert, dans un quartier peu fréquenté de la capitale iranienne. On y voit de vieux messieurs côtoyer le frisson de la spéculation, quitte à frôler l'arrêt cardiaque. On se croirait à la corbeille d'une bourse occidentale, il y a quarante-cinquante ans !

   Amir finit par trouver du travail auprès du propriétaire de l'abattoir, qui est mêlé au trafic de devises... ainsi qu'au commerce de bétail. La mort (accidentelle ?) des trois hommes du début pourrait ne plus être qu'un souvenir, mais voilà qu'un petit bout de femme en tchador vient semer la pagaille. Il s'agit d'Asra, la fille de la plus âgée des trois victimes (et cousine des deux autres). C'est une Iranienne arabophone, à l'image d'une communauté qui vit dans l'ouest du pays et profite de la proximité de la frontière irakienne pour se livrer à de menus trafics. Par son intermédiaire, on finit par comprendre quel est le lien avec la folie du dollar.

cinéma,cinema,film,films

   J'ai été pris par ce polar social, une nouvelle réussite iranienne après Un Héros et surtout La Loi de Téhéran. Si l'occasion se présente, courez voir ce film !

The Card Counter

   Ce "compteur de cartes" est William Tell, un type hyper-méticuleux, adepte du contrôle total, un peu autiste sur les bords. Mais on est loin de Rain Man : ici, le héros est un ancien militaire, qui vient de faire près de dix ans de prison.

   La mise en scène de Paul Schrader est suffisamment habile pour nous faire comprendre qu'en prison comme à l'hôtel, le héros suit une discipline quasi monacale et vit dans une forme d'enfermement. S'ajoute à cela la prestation d'Oscar Isaac, marmoréen, digne d'un Joaquin Phoenix. A côté de lui, quel que soit leur talent, tous les autres interprètes paraissent mineurs (même Willem Dafoe, que j'ai trouvé plus marquant dans Nightmare Alley et le dernier Spider-Man).

   Il en est quand même un qui sort du lot... parce qu'il m'est particulièrement antipathique : Cirk (prononcer "Queurque, avec un K"), incarné par Tye Sheridan, qui a naguère réussi à me dégoûter du personnage de Cyclope dans les X-Men. J'ai du mal à démêler ce qui m'irrite le plus, entre la vacuité de "Cirk" et la fadeur de son interprétation. De surcroît, j'ai senti venir à des kilomètres le petit coup de théâtre le concernant, dans la troisième partie de l'histoire.

   Fort heureusement, le film a d'autres atouts dans sa manche. Schrader est parvenu à m'intéresser aux tournois de Poker et au Black Jack (ce qui n'est pas une mince affaire). Je suis surtout resté accroché à son personnage principal, fascinant par sa retenue et ses obsessions. Et puis il y a le fond de l'histoire, lié à la politique étrangère des États-Unis et à la condamnation de Tell. Ses cauchemars nous apprennent l'essentiel.

   Cerise sur le gâteau : c'est vraiment bien réalisé, dans des styles différents. L'ambiance des casinos est joliment rendue. J'ai trouvé toutefois l'austère contexte des chambres d'hôtel bien plus passionnant. Ce goût pour la sobriété ne m'a pas empêché d'apprécier la scène qui se déroule dans le "jardin de lumières", un intermède romantique inattendu, magnifique à voir sur grand écran.

   Bref, je conseille vivement (même si j'ai trouvé la dernière scène très "cliché"). C'est l'un des films à ne pas rater en ce moment.

15:29 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

The Card Counter

   Ce "compteur de cartes" est William Tell, un type hyper-méticuleux, adepte du contrôle total, un peu autiste sur les bords. Mais on est loin de Rain Man : ici, le héros est un ancien militaire, qui vient de faire près de dix ans de prison.

   La mise en scène de Paul Schrader est suffisamment habile pour nous faire comprendre qu'en prison comme à l'hôtel, le héros suit une discipline quasi monacale et vit dans une forme d'enfermement. S'ajoute à cela la prestation d'Oscar Isaac, marmoréen, digne d'un Joaquin Phoenix. A côté de lui, quel que soit leur talent, tous les autres interprètes paraissent mineurs (même Willem Dafoe, que j'ai trouvé plus marquant dans Nightmare Alley et le dernier Spider-Man).

   Il en est quand même un qui sort du lot... parce qu'il m'est particulièrement antipathique : Cirk (prononcer "Queurque, avec un K"), incarné par Tye Sheridan, qui a naguère réussi à me dégoûter du personnage de Cyclope dans les X-Men. J'ai du mal à démêler ce qui m'irrite le plus, entre la vacuité de "Cirk" et la fadeur de son interprétation. De surcroît, j'ai senti venir à des kilomètres le petit coup de théâtre le concernant, dans la troisième partie de l'histoire.

   Fort heureusement, le film a d'autres atouts dans sa manche. Schrader est parvenu à m'intéresser aux tournois de Poker et au Black Jack (ce qui n'est pas une mince affaire). Je suis surtout resté accroché à son personnage principal, fascinant par sa retenue et ses obsessions. Et puis il y a le fond de l'histoire, lié à la politique étrangère des États-Unis et à la condamnation de Tell. Ses cauchemars nous apprennent l'essentiel.

   Cerise sur le gâteau : c'est vraiment bien réalisé, dans des styles différents. L'ambiance des casinos est joliment rendue. J'ai trouvé toutefois l'austère contexte des chambres d'hôtel bien plus passionnant. Ce goût pour la sobriété ne m'a pas empêché d'apprécier la scène qui se déroule dans le "jardin de lumières", un intermède romantique inattendu, magnifique à voir sur grand écran.

   Bref, je conseille vivement (même si j'ai trouvé la dernière scène très "cliché"). C'est l'un des films à ne pas rater en ce moment.

15:29 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Ouistreham

   Emmanuel Carrère adapte (à sa manière) le livre-reportage de Florence Aubenas, la journaliste devenant une écrivaine, incarnée (sobrement) par Juliette Binoche. Il fut un temps où un film avec cette comédienne en tête d'affiche aurait bénéficié d'une sortie sur un nombre impressionnant d'écrans. Tel n'est pas le cas ici, en dépit de l'adaptation d'un livre à succès.

   Et pourtant, Juliette Binoche y fait montre de son talent, tout comme la brochette d'actrices non professionnelles recrutées pour l'occasion, au premier range desquelles il faut signaler Hélène Lambert, qui interprète Christèle, mère célibataire de trois enfants et abonnée aux micro-jobs à horaires flexibles.

cinéma,cinema,film,films,société

   En immersion, Marianne l'écrivaine bobo découvre la précarité et la vie de femmes dont elle est à la fois si lointaine et si proche. Le sujet n'est plus nouveau-nouveau, mais cela fait malgré tout du bien quand, de temps en temps, on nous rappelle quelle est la situation de la "France d'en-bas", celle qui permet au système de fonctionner, tout en vivant avec des salaires minables.

   On suit d'abord les héroïnes dans une entreprise de nettoyage, qui intervient aussi bien dans des commerces que des campings (ah, les odieuses propriétaires !). Une partie de ce petit monde va se retrouver au nettoyage des ferrys, un travail réputé particulièrement pénible, notamment en raison du rythme imposé (des centaines de cabines à nettoyer en 1h30, avec, en bonus, les parties communes). Comme chez les mineurs ou les fondeurs, la dureté du travail, couplée à la fréquentation quotidienne des mêmes têtes, crée des proximités, voire des solidarités. Ces éclairs de lumière sont beaux à voir, d'autant que l'intrigue évite l'écueil du conte de fées : la vie ne fait pas de cadeau à ces femmes et certains des personnages principaux  vont se brouiller, pour une raison que je laisse à chacun le soin de découvrir.

   C'est une belle œuvre humaniste, sur notre époque et les rapports humains.

Ouistreham

   Emmanuel Carrère adapte (à sa manière) le livre-reportage de Florence Aubenas, la journaliste devenant une écrivaine, incarnée (sobrement) par Juliette Binoche. Il fut un temps où un film avec cette comédienne en tête d'affiche aurait bénéficié d'une sortie sur un nombre impressionnant d'écrans. Tel n'est pas le cas ici, en dépit de l'adaptation d'un livre à succès.

   Et pourtant, Juliette Binoche y fait montre de son talent, tout comme la brochette d'actrices non professionnelles recrutées pour l'occasion, au premier range desquelles il faut signaler Hélène Lambert, qui interprète Christèle, mère célibataire de trois enfants et abonnée aux micro-jobs à horaires flexibles.

cinéma,cinema,film,films,société

   En immersion, Marianne l'écrivaine bobo découvre la précarité et la vie de femmes dont elle est à la fois si lointaine et si proche. Le sujet n'est plus nouveau-nouveau, mais cela fait malgré tout du bien quand, de temps en temps, on nous rappelle quelle est la situation de la "France d'en-bas", celle qui permet au système de fonctionner, tout en vivant avec des salaires minables.

   On suit d'abord les héroïnes dans une entreprise de nettoyage, qui intervient aussi bien dans des commerces que des campings (ah, les odieuses propriétaires !). Une partie de ce petit monde va se retrouver au nettoyage des ferrys, un travail réputé particulièrement pénible, notamment en raison du rythme imposé (des centaines de cabines à nettoyer en 1h30, avec, en bonus, les parties communes). Comme chez les mineurs ou les fondeurs, la dureté du travail, couplée à la fréquentation quotidienne des mêmes têtes, crée des proximités, voire des solidarités. Ces éclairs de lumière sont beaux à voir, d'autant que l'intrigue évite l'écueil du conte de fées : la vie ne fait pas de cadeau à ces femmes et certains des personnages principaux  vont se brouiller, pour une raison que je laisse à chacun le soin de découvrir.

   C'est une belle œuvre humaniste, sur notre époque et les rapports humains.

vendredi, 28 janvier 2022

La Leçon d'allemand

   Le réalisateur Christian Schwochow, auquel on doit notamment De l'autre côté du mur, s'est lancé dans l'adaptation du roman éponyme de Siegfried Lenz, dont l'action fait dialoguer deux époques.

   Dans les années 1950, un jeune homme est emprisonné, à Hambourg. Il a l'air un peu perdu et il rechigne à rédiger ce qui ressemble à une autocritique. Nous ne sommes pas en RDA (communiste), mais en RFA (capitaliste), on appelle donc cela une rédaction sur "les joies du devoir". Cela pousse le jeune homme à se replonger dans ses souvenirs...

   L'essentiel de l'histoire se déroule dans la deuxième partie de la Seconde Guerre mondiale. Les personnages vivent en Allemagne du Nord, pas très loin de la frontière danoise si l'on en juge par les patronymes : Jepsen, Nansen... (Il s'agit sans doute du Schleswig-Holstein, une région récupérée par la Prusse au XIXe siècle à l'issue de la "Guerre des Duchés".)

   Jens Jepsen est le chef de la police du village, une charge qui ne lui vaut guère de travail, mais lui procure du prestige et un bel uniforme. L'homme est un père de famille autoritaire, qui tient par-dessus tout à "faire son devoir"... voire à l'imposer aux autres. Il règne en petit tyran sur une famille où la mère est totalement soumise. Leurs trois enfants ont des destins et des personnalités contrastés. L'aîné, sans doute sur la pression du père, s'est engagé dans l'armée et a été envoyé sur le Front de l'Est. La cadette est un peu rebelle. On la sent attirée par la ville et surtout par une vie moins ennuyeuse que celle de son village peuplé de sinistres adultes.

   Le réalisateur focalise son attention sur le second fils, Siggi, qu'on ne voit jamais se rendre à l'école. Il explore les alentours, les prés, les plages, une maison abandonnée (dont il n'est pas difficile de comprendre ce qu'il est advenu des occupants...) et Max, un peintre du même âge que son père, avec lequel il a jadis fait les 400 coups. Mais les temps ont changé et Jens semble désormais prendre un malin plaisir à persécuter son ancien pote, qui a la suprême audace de continuer à produire une peinture qualifiée de "dégénérée" par les autorités nazies.

   Cette plongée dans le passé ressuscite la vie d'un village ordinaire, où l'on accepte le régime hitlérien sans forcément adhérer à son idéologie. D'ailleurs, on s'accommodera facilement de la nouvelle république, d'autant que, d'après ce qu'on nous montre à l'écran, nombre de cadres de l'ancien régime ont pu s'y recycler...

   Mais là n'est pas le plus important. Le film met en scène une lutte entre le principe d'autorité (incarné par le père policier) et la liberté artistique, qui passe par la peinture, mais aussi le chant, la musique, la danse. Le garçon est tenaillé par un conflit d'allégeance : doit-il obéir aveuglément à son père, qui s'occupe de lui et semble vouloir lui indiquer le droit chemin, ou bien, de temps en temps, donner un coup de main au peintre maudit, accompagné de sa délicieuse épouse ?

   J'ai eu du mal à entrer dans cette histoire mais, une fois que j'ai compris les présupposés scénaristiques, j'ai été pris. L'un des intérêts consiste à deviner comment l'enfant sans histoire d'un notable rural a pu se retrouver des années plus tard en prison.

   En revanche, ce n'est pas très bien réalisé. J'ai trouvé la mise en scène pataude, la photographie médiocre (un comble pour un film illustré de tableaux expressionnistes). Les plus belles images (en noir et blanc) sont celles qui accompagnent le générique de fin ! Mais l'intrigue et le jeu des acteurs méritent le détour.

La Leçon d'allemand

   Le réalisateur Christian Schwochow, auquel on doit notamment De l'autre côté du mur, s'est lancé dans l'adaptation du roman éponyme de Siegfried Lenz, dont l'action fait dialoguer deux époques.

   Dans les années 1950, un jeune homme est emprisonné, à Hambourg. Il a l'air un peu perdu et il rechigne à rédiger ce qui ressemble à une autocritique. Nous ne sommes pas en RDA (communiste), mais en RFA (capitaliste), on appelle donc cela une rédaction sur "les joies du devoir". Cela pousse le jeune homme à se replonger dans ses souvenirs...

   L'essentiel de l'histoire se déroule dans la deuxième partie de la Seconde Guerre mondiale. Les personnages vivent en Allemagne du Nord, pas très loin de la frontière danoise si l'on en juge par les patronymes : Jepsen, Nansen... (Il s'agit sans doute du Schleswig-Holstein, une région récupérée par la Prusse au XIXe siècle à l'issue de la "Guerre des Duchés".)

   Jens Jepsen est le chef de la police du village, une charge qui ne lui vaut guère de travail, mais lui procure du prestige et un bel uniforme. L'homme est un père de famille autoritaire, qui tient par-dessus tout à "faire son devoir"... voire à l'imposer aux autres. Il règne en petit tyran sur une famille où la mère est totalement soumise. Leurs trois enfants ont des destins et des personnalités contrastés. L'aîné, sans doute sur la pression du père, s'est engagé dans l'armée et a été envoyé sur le Front de l'Est. La cadette est un peu rebelle. On la sent attirée par la ville et surtout par une vie moins ennuyeuse que celle de son village peuplé de sinistres adultes.

   Le réalisateur focalise son attention sur le second fils, Siggi, qu'on ne voit jamais se rendre à l'école. Il explore les alentours, les prés, les plages, une maison abandonnée (dont il n'est pas difficile de comprendre ce qu'il est advenu des occupants...) et Max, un peintre du même âge que son père, avec lequel il a jadis fait les 400 coups. Mais les temps ont changé et Jens semble désormais prendre un malin plaisir à persécuter son ancien pote, qui a la suprême audace de continuer à produire une peinture qualifiée de "dégénérée" par les autorités nazies.

   Cette plongée dans le passé ressuscite la vie d'un village ordinaire, où l'on accepte le régime hitlérien sans forcément adhérer à son idéologie. D'ailleurs, on s'accommodera facilement de la nouvelle république, d'autant que, d'après ce qu'on nous montre à l'écran, nombre de cadres de l'ancien régime ont pu s'y recycler...

   Mais là n'est pas le plus important. Le film met en scène une lutte entre le principe d'autorité (incarné par le père policier) et la liberté artistique, qui passe par la peinture, mais aussi le chant, la musique, la danse. Le garçon est tenaillé par un conflit d'allégeance : doit-il obéir aveuglément à son père, qui s'occupe de lui et semble vouloir lui indiquer le droit chemin, ou bien, de temps en temps, donner un coup de main au peintre maudit, accompagné de sa délicieuse épouse ?

   J'ai eu du mal à entrer dans cette histoire mais, une fois que j'ai compris les présupposés scénaristiques, j'ai été pris. L'un des intérêts consiste à deviner comment l'enfant sans histoire d'un notable rural a pu se retrouver des années plus tard en prison.

   En revanche, ce n'est pas très bien réalisé. J'ai trouvé la mise en scène pataude, la photographie médiocre (un comble pour un film illustré de tableaux expressionnistes). Les plus belles images (en noir et blanc) sont celles qui accompagnent le générique de fin ! Mais l'intrigue et le jeu des acteurs méritent le détour.

mercredi, 26 janvier 2022

Les Leçons persanes

   Cette "fantaisie historique" a un parfum d'ex-URSS. Le film est considéré comme biélorusse, son réalisateur (Vadim Perelman) est d'origine ukrainienne, son producteur (Timur Bekmambetov) kazakh et la partie technique a bénéficié du savoir-faire russe. Pourtant, l'action se déroule en Europe de l'Ouest, quelque part entre le nord-est de la France et la Belgique, dans ce qui est censé être un camp de transit, pendant la Seconde Guerre mondiale.

   Le cœur de l'intrigue concerne la relation ambiguë qui va naître entre un détenu juif et l'un des cadres (SS) du camp, qu'il réussit à convaincre qu'il est (à demi) persan. Au crédit de cette histoire il faut porter l'interprétation de Nahuel Perez Biscayart (remarqué dans Au revoir là-haut), impressionnant dans le rôle du détenu malingre, tenaillé par l'inquiétude et déployant des trésors d'imagination pour tenter de survivre. Face à lui, Lars Eidinger tient la route, même si son jeu est moins subtil. Au niveau de l'interprétation, c'est à peu près tout, parce qu'on ne peut pas dire que les seconds rôles soient de grandes réussites. Du côté des détenus, on nous présente des personnages à peine esquissés, auxquels on a du mal à croire. Mais que dire des SS, gradés comme sous-fifres, qui gèrent le camp ? Au départ, l'idée de nous présenter les persécuteurs comme des personnes faisant leur boulot, sans la moindre considération pour le bien-être des détenus (juifs ou non), m'a semblé bonne. Mais la mise en scène de cette vie quotidienne est plate, souvent maladroite... voire pas crédible du tout.

   L'un des problèmes vient de la volonté des auteurs de dire beaucoup de choses, en "mixant" différents apports. Ainsi, le camp qui sert de cadre à l'intrigue est un mélange de différents types de lieux d'incarcération : transit, internement (en France), concentration et extermination. L'insertion d'un plan aérien montrant des cadavres nus et la proximité d'un bâtiment doté d'une cheminée en train de fonctionner ont visiblement pour fonction d'évoquer l'extermination... sauf que celle-ci ne s'est pas déroulée en Europe de l'Ouest, mais bien plus à l'est. Même chose pour la fusillade du début. Elle est une référence à l'action des Einsatzgruppen... qui ont sévi en Europe de l'Est, pas en Belgique ni en France. Mais cette scène est indispensable à l'intrigue, puisqu'elle introduit le sauvetage du héros et son énorme mensonge. (Elle est de surcroît très mal jouée.) Les spectateurs un poil cultivés remarqueront aussi quelques incohérences, par exemple la confusion entre les SS et la Wehrmacht (l'armée allemande).

   Le pire concerne l'argument principal : la duperie mise au point par Gilles. Même si, à l'époque, rares étaient les personnes (en Europe) à connaître ne serait-ce que quelques bribes de farsi, il n'est pas vraisemblable qu'un officier SS envisageant de s'installer en Iran après la guerre n'ait pas commencé à s'intéresser un peu à la langue qui y est majoritaire. Je n'ai pas marché dans la combine, de surcroît totalement fictive, puisqu'elle n'est en rien inspirée de la véritable histoire d'un détenu. (Claude Lanzmann doit se retourner dans sa tombe...) Du procédé je retiens toutefois un effet marquant : la manière dont Gilles invente les faux mots persans va finalement le rendre très utile, après que les registres du camp auront été brûlés. Je n'en dis pas plus, mais cela fait partie des aspects réussis du film, qui n'est pas une daube intégrale, juste une production maladroite, qui considère la Shoah comme un produit de consommation cinématographique, au même titre que la boxe, le bricolage ou la gravure sur string.

Les Leçons persanes

   Cette "fantaisie historique" a un parfum d'ex-URSS. Le film est considéré comme biélorusse, son réalisateur (Vadim Perelman) est d'origine ukrainienne, son producteur (Timur Bekmambetov) kazakh et la partie technique a bénéficié du savoir-faire russe. Pourtant, l'action se déroule en Europe de l'Ouest, quelque part entre le nord-est de la France et la Belgique, dans ce qui est censé être un camp de transit, pendant la Seconde Guerre mondiale.

   Le cœur de l'intrigue concerne la relation ambiguë qui va naître entre un détenu juif et l'un des cadres (SS) du camp, qu'il réussit à convaincre qu'il est (à demi) persan. Au crédit de cette histoire il faut porter l'interprétation de Nahuel Perez Biscayart (remarqué dans Au revoir là-haut), impressionnant dans le rôle du détenu malingre, tenaillé par l'inquiétude et déployant des trésors d'imagination pour tenter de survivre. Face à lui, Lars Eidinger tient la route, même si son jeu est moins subtil. Au niveau de l'interprétation, c'est à peu près tout, parce qu'on ne peut pas dire que les seconds rôles soient de grandes réussites. Du côté des détenus, on nous présente des personnages à peine esquissés, auxquels on a du mal à croire. Mais que dire des SS, gradés comme sous-fifres, qui gèrent le camp ? Au départ, l'idée de nous présenter les persécuteurs comme des personnes faisant leur boulot, sans la moindre considération pour le bien-être des détenus (juifs ou non), m'a semblé bonne. Mais la mise en scène de cette vie quotidienne est plate, souvent maladroite... voire pas crédible du tout.

   L'un des problèmes vient de la volonté des auteurs de dire beaucoup de choses, en "mixant" différents apports. Ainsi, le camp qui sert de cadre à l'intrigue est un mélange de différents types de lieux d'incarcération : transit, internement (en France), concentration et extermination. L'insertion d'un plan aérien montrant des cadavres nus et la proximité d'un bâtiment doté d'une cheminée en train de fonctionner ont visiblement pour fonction d'évoquer l'extermination... sauf que celle-ci ne s'est pas déroulée en Europe de l'Ouest, mais bien plus à l'est. Même chose pour la fusillade du début. Elle est une référence à l'action des Einsatzgruppen... qui ont sévi en Europe de l'Est, pas en Belgique ni en France. Mais cette scène est indispensable à l'intrigue, puisqu'elle introduit le sauvetage du héros et son énorme mensonge. (Elle est de surcroît très mal jouée.) Les spectateurs un poil cultivés remarqueront aussi quelques incohérences, par exemple la confusion entre les SS et la Wehrmacht (l'armée allemande).

   Le pire concerne l'argument principal : la duperie mise au point par Gilles. Même si, à l'époque, rares étaient les personnes (en Europe) à connaître ne serait-ce que quelques bribes de farsi, il n'est pas vraisemblable qu'un officier SS envisageant de s'installer en Iran après la guerre n'ait pas commencé à s'intéresser un peu à la langue qui y est majoritaire. Je n'ai pas marché dans la combine, de surcroît totalement fictive, puisqu'elle n'est en rien inspirée de la véritable histoire d'un détenu. (Claude Lanzmann doit se retourner dans sa tombe...) Du procédé je retiens toutefois un effet marquant : la manière dont Gilles invente les faux mots persans va finalement le rendre très utile, après que les registres du camp auront été brûlés. Je n'en dis pas plus, mais cela fait partie des aspects réussis du film, qui n'est pas une daube intégrale, juste une production maladroite, qui considère la Shoah comme un produit de consommation cinématographique, au même titre que la boxe, le bricolage ou la gravure sur string.

dimanche, 23 janvier 2022

Le retour de Morse

   Un an après le final tragique de la saison 7, France 3 nous propose le premier épisode de l'ultime saison de cette passionnante série policière, intitulé Choisir son camp.

   L'intrigue débute à l'université d'Oxford, quand un colis piégé explose dans le bureau d'un enseignant (exerçant des fonctions de direction). On se demande si le prof était bien la cible (à cause des financements privés qu'il a acceptés) ou bien ses secrétaires, l'une d'entre elles étant décédée. Dans le même temps, des tensions émergent autour de l'équipe de football locale. C'est une équipe anglaise, dans laquelle évoluent des joueurs nord-irlandais. La vedette reçoit des menaces de mort... mais l'on se demande si c'est lié au conflit touchant l'Ulster (l'action se déroule en 1971), à la vie privée du joueur, à son passé en Irlande du Nord... ou bien au fait qu'il soit métis.

   Les deux affaires se révèlent plus complexes que prévu... et liées l'une à l'autre. La police a bien du mal à démêler l'écheveau, son meilleur enquêteur (Morse) sombrant dans l'alcool. Dans un premier temps, celui-ci doit chaperonner le joueur vedette... alors qu'il ne connaît rien au football. La résolution de l'affaire va prendre du temps, laissant planer une menace au-dessus de la tête de plusieurs personnages.

   Comme d'habitude, c'est bien écrit, bien joué, bien filmé. Je n'aime pas l'arc narratif qui montre Morse se saouler de plus en plus, mais, bon, faut voir ce que la suite va donner.

   P.S.

   Au cours de l'épisode, le footballeur vedette est amené à participer à l'émission "This is your life", un programme télévisé qui a duré près de cinquante ans outre-Manche... bien plus que son décalque français, "Avis de recherche", présenté jadis par Patrick Sabatier.

Le retour de Morse

   Un an après le final tragique de la saison 7, France 3 nous propose le premier épisode de l'ultime saison de cette passionnante série policière, intitulé Choisir son camp.

   L'intrigue débute à l'université d'Oxford, quand un colis piégé explose dans le bureau d'un enseignant (exerçant des fonctions de direction). On se demande si le prof était bien la cible (à cause des financements privés qu'il a acceptés) ou bien ses secrétaires, l'une d'entre elles étant décédée. Dans le même temps, des tensions émergent autour de l'équipe de football locale. C'est une équipe anglaise, dans laquelle évoluent des joueurs nord-irlandais. La vedette reçoit des menaces de mort... mais l'on se demande si c'est lié au conflit touchant l'Ulster (l'action se déroule en 1971), à la vie privée du joueur, à son passé en Irlande du Nord... ou bien au fait qu'il soit métis.

   Les deux affaires se révèlent plus complexes que prévu... et liées l'une à l'autre. La police a bien du mal à démêler l'écheveau, son meilleur enquêteur (Morse) sombrant dans l'alcool. Dans un premier temps, celui-ci doit chaperonner le joueur vedette... alors qu'il ne connaît rien au football. La résolution de l'affaire va prendre du temps, laissant planer une menace au-dessus de la tête de plusieurs personnages.

   Comme d'habitude, c'est bien écrit, bien joué, bien filmé. Je n'aime pas l'arc narratif qui montre Morse se saouler de plus en plus, mais, bon, faut voir ce que la suite va donner.

   P.S.

   Au cours de l'épisode, le footballeur vedette est amené à participer à l'émission "This is your life", un programme télévisé qui a duré près de cinquante ans outre-Manche... bien plus que son décalque français, "Avis de recherche", présenté jadis par Patrick Sabatier.

jeudi, 20 janvier 2022

Nightmare Alley

   Cette "allée cauchemardesque" est à la fois une attraction de fête foraine et la métaphore de ce qui peut arriver à certains personnages, comme ces imbéciles alcooliques qui acceptent de déchiqueter le cou d'une poule en public... jusqu'à ce qu'on les retrouve, à demi morts, au fond d'une ruelle.

   Ce film m'a surpris tout d'abord parce qu'il ne s'ouvre pas sur la relation trouble qui va lier le héros, le "charlatan" du roman d'origine, et le docteur Ritter, une femme au charme glacial, forcément fatale (ahhhhhh, Caaaate !). La première heure nous raconte comment Stanton (Bradley Cooper, très bon), un vagabond au passé obscur, doté de certains talents (dont celui de dessiner), va devenir le roi de la fausse télépathie, un bonimenteur couronné de succès. Son intégration à la troupe et sa progressive acquisition des codes et des trucs des artistes-voyous est bigrement bien mise en scène et interprétée. Au détour des personnages, on croise Rooney Mara, Toni Collette (la reine du savonnage...), Ron Perlman et le toujours inquiétant Willem Dafoe.

   L'intrigue prend une nouvelle direction quand le duo de "magiciens" commence à se produire devant la bonne société urbaine. L'appât du gain pousse le héros à tenter des arnaques plus risquées... mais plus lucratives. La manière dont il "harponne" un juge et son épouse est un des grands moments du film... tout comme la conclusion de cette intrigue annexe, qui a pris la salle par surprise !

   La deuxième partie voit le "télépathe" entrer en contact avec une psychologue en qui il croit reconnaître une sœur de destin : tous deux sont d'habiles manipulateurs, anciennes victimes avides de revanche... mais qui manipule l'autre, vraiment ? Je laisse à chacun le loisir de découvrir qui l'emporte, au jeu du chat et de la souris.

   En dépit de toutes ces qualités, j'ai trouvé certaines péripéties un peu téléphonées : on sent venir le retournement de la troisième partie... tout comme la conclusion finale, à laquelle le réalisateur a préparé ses spectateurs en laissant de petits cailloux, à intervalle régulier. Je n'ai pas trop aimé l'aspect moralisateur de l'histoire, où il est question d'une multitude de "pécheurs", certains se repentant, d'autres étant punis. Mais, globalement, cela reste un bel ouvrage.

23:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Nightmare Alley

   Cette "allée cauchemardesque" est à la fois une attraction de fête foraine et la métaphore de ce qui peut arriver à certains personnages, comme ces imbéciles alcooliques qui acceptent de déchiqueter le cou d'une poule en public... jusqu'à ce qu'on les retrouve, à demi morts, au fond d'une ruelle.

   Ce film m'a surpris tout d'abord parce qu'il ne s'ouvre pas sur la relation trouble qui va lier le héros, le "charlatan" du roman d'origine, et le docteur Ritter, une femme au charme glacial, forcément fatale (ahhhhhh, Caaaate !). La première heure nous raconte comment Stanton (Bradley Cooper, très bon), un vagabond au passé obscur, doté de certains talents (dont celui de dessiner), va devenir le roi de la fausse télépathie, un bonimenteur couronné de succès. Son intégration à la troupe et sa progressive acquisition des codes et des trucs des artistes-voyous est bigrement bien mise en scène et interprétée. Au détour des personnages, on croise Rooney Mara, Toni Collette (la reine du savonnage...), Ron Perlman et le toujours inquiétant Willem Dafoe.

   L'intrigue prend une nouvelle direction quand le duo de "magiciens" commence à se produire devant la bonne société urbaine. L'appât du gain pousse le héros à tenter des arnaques plus risquées... mais plus lucratives. La manière dont il "harponne" un juge et son épouse est un des grands moments du film... tout comme la conclusion de cette intrigue annexe, qui a pris la salle par surprise !

   La deuxième partie voit le "télépathe" entrer en contact avec une psychologue en qui il croit reconnaître une sœur de destin : tous deux sont d'habiles manipulateurs, anciennes victimes avides de revanche... mais qui manipule l'autre, vraiment ? Je laisse à chacun le loisir de découvrir qui l'emporte, au jeu du chat et de la souris.

   En dépit de toutes ces qualités, j'ai trouvé certaines péripéties un peu téléphonées : on sent venir le retournement de la troisième partie... tout comme la conclusion finale, à laquelle le réalisateur a préparé ses spectateurs en laissant de petits cailloux, à intervalle régulier. Je n'ai pas trop aimé l'aspect moralisateur de l'histoire, où il est question d'une multitude de "pécheurs", certains se repentant, d'autres étant punis. Mais, globalement, cela reste un bel ouvrage.

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samedi, 15 janvier 2022

Le Test

   Annie (Alexandra Lamy, irradiante) est une "super-maman". Elle semble avoir tout réussi dans la vie, notamment son mariage et ses enfants. Cependant, un jour, de passage aux toilettes, elle remarque la présence, dans la poubelle, d'un test de grossesse... positif. Comme ce n'est pas le sien, elle démarre une enquête pour découvrir le fin mot de l'histoire. Sa fille, à peine adolescente, serait-elle enceinte ? Ou bien s'agit-il de la copine de César, son fils "bogosse" éperdument amoureux ?... à moins que son autre fils, Max, ne cache bien son jeu ? Pire : son mari entretiendrait-il une liaison ?

   La première partie développe ces questionnements, de manière burlesque, sans trop de subtilité, mais avec efficacité. On s'amuse de la progressive découverte, par la mère, de la réalité de la vie affective de trois de ses enfants... On n'en est pas moins consterné de constater que les rejetons de la classe moyenne ne semblent pas savoir ce qu'est un préservatif, ni la pilule. (Mais, sans cela, il n'y aurait pas de film...)

   Au bout d'environ de 35-40 minutes, l'intrigue prend une autre direction. La vie affective des enfants passe au second plan. La mère occupe l'espace. Elle se trouve à un moment clé de sa vie, entre deux âges. L'histoire est plus teintée d'émotion... avant que ne ressurgisse l'histoire du test, censée être résolue plus tôt... mais les spectateurs les plus attentifs n'y auront pas cru... et l'on se dirige vers la solution qui, dès le début, semblait la plus vraisemblable.

   Au niveau de l'interprétation, je distingue Alexandra Lamy et Joaquim Fossi (aperçu récemment dans Les Choses humaines), qui incarne avec malice l'un des fils. Un autre fils a les traits de Matteo Perez, aperçu lui dans L'heure de la sortie et C'est quoi cette mamie ?! Il a aussi un rôle dans le téléfilm Meurtres au Mont Saint-Michel, diffusé ce samedi sur France 3... un des plus mauvais de la série : le scénario est intéressant, mais ce n'est pas bien filmé et surtout pas bien joué.

16:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Le Test

   Annie (Alexandra Lamy, irradiante) est une "super-maman". Elle semble avoir tout réussi dans la vie, notamment son mariage et ses enfants. Cependant, un jour, de passage aux toilettes, elle remarque la présence, dans la poubelle, d'un test de grossesse... positif. Comme ce n'est pas le sien, elle démarre une enquête pour découvrir le fin mot de l'histoire. Sa fille, à peine adolescente, serait-elle enceinte ? Ou bien s'agit-il de la copine de César, son fils "bogosse" éperdument amoureux ?... à moins que son autre fils, Max, ne cache bien son jeu ? Pire : son mari entretiendrait-il une liaison ?

   La première partie développe ces questionnements, de manière burlesque, sans trop de subtilité, mais avec efficacité. On s'amuse de la progressive découverte, par la mère, de la réalité de la vie affective de trois de ses enfants... On n'en est pas moins consterné de constater que les rejetons de la classe moyenne ne semblent pas savoir ce qu'est un préservatif, ni la pilule. (Mais, sans cela, il n'y aurait pas de film...)

   Au bout d'environ de 35-40 minutes, l'intrigue prend une autre direction. La vie affective des enfants passe au second plan. La mère occupe l'espace. Elle se trouve à un moment clé de sa vie, entre deux âges. L'histoire est plus teintée d'émotion... avant que ne ressurgisse l'histoire du test, censée être résolue plus tôt... mais les spectateurs les plus attentifs n'y auront pas cru... et l'on se dirige vers la solution qui, dès le début, semblait la plus vraisemblable.

   Au niveau de l'interprétation, je distingue Alexandra Lamy et Joaquim Fossi (aperçu récemment dans Les Choses humaines), qui incarne avec malice l'un des fils. Un autre fils a les traits de Matteo Perez, aperçu lui dans L'heure de la sortie et C'est quoi cette mamie ?! Il a aussi un rôle dans le téléfilm Meurtres au Mont Saint-Michel, diffusé ce samedi sur France 3... un des plus mauvais de la série : le scénario est intéressant, mais ce n'est pas bien filmé et surtout pas bien joué.

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samedi, 08 janvier 2022

The King's Man : Première Mission

   Au vu du titre, on comprend qu'il ne s'agit pas du troisième volet d'une série assez brillamment commencée en 2015 (le deuxième volet, sous-titré Le Cercle d'or, sorti en 2017, étant décevant), mais d'une préquelle.

   Pas de Colin Firth à l'écran donc... et pour cause : l'action débute en 1902, en pleine Guerre des Boers. En dépit de sa conclusion mélodramatique appuyée, j'ai bien aimé cette introduction, ne serait-ce que parce qu'elle rappellera/apprendra aux spectateurs que nos amis Britanniques avaient créé des camps de concentration (peut-être les premiers du genre).

   La suite est moins rigoureuse sur le plan historique... et c'est un sacré euphémisme ! L'intrigue est un gloubi-boulga de théories complotistes sur la Première Guerre mondiale et l'émergence des régimes totalitaires. Les héros croisent d'authentiques personnages historiques, mais dont les motivations voire le comportement n'ont pas grand chose à voir avec les personnes qui les ont inspirés.

   À partir de là, soit le film perd ses spectateurs (qui ne peuvent adhérer à ce qu'ils voient à l'écran tant le fond est farfelu, jusque dans les péripéties, souvent invraisemblables), soit il les accroche grâce à son énergie, en particulier celle dégagée par quelques séquences assez enlevées. La première d'entre elle voit les héros affronter le moine Raspoutine (stupéfiante interprétation de Rhys Ifans). L'éminence grise de l'impératrice russe est transformée en super-vilain quasi indestructible, dans une séquence survitaminée.

   Je recommande aussi toute la partie se déroulant sur le front germano-britannique (pendant la Première Guerre mondiale). C'est à la fois spectaculaire et prenant, avec une conclusion inattendue, qui a fait réagir dans la salle.

   Enfin, il ne faut pas rater le morceau de bravoure, l'assaut du repaire du très-méchant-dont-on-ne-voit-pas-le-visage. Même si, sur le fond, c'est souvent limite débile, j'ai pris du plaisir à voir ce bon film d'action.

   P.S.

   Attention : le générique de fin est interrompu par une scène (totalement invraisemblable...) qui annonce la suite des aventures des espions britanniques.

 

ATTENTION :

GROS

DIVULGÂCHAGE !

 

   Ne lisez surtout pas la suite si vous n'avez pas encore vu le film.

 

   J'ai été étonné qu'un fort sentiment anti-écossais imprègne l'intrigue. Ainsi, le décès de l'un des personnages principaux est lié à deux soldats écossais de l'armée britannique... le pire étant atteint quand on découvre l'identité réelle du chef des méchants !

   Il aurait été plus logique de faire de lui un Irlandais (catholique), tant l'hostilité entre les deux peuples était grande. Ainsi, en France, on ignore souvent qu'en 1916, alors que le Royaume-Uni connaissait de grandes difficultés sur tous les fronts, les républicains irlandais ont organisé une insurrection contre la domination de Londres.

18:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

The King's Man : Première Mission

   Au vu du titre, on comprend qu'il ne s'agit pas du troisième volet d'une série assez brillamment commencée en 2015 (le deuxième volet, sous-titré Le Cercle d'or, sorti en 2017, étant décevant), mais d'une préquelle.

   Pas de Colin Firth à l'écran donc... et pour cause : l'action débute en 1902, en pleine Guerre des Boers. En dépit de sa conclusion mélodramatique appuyée, j'ai bien aimé cette introduction, ne serait-ce que parce qu'elle rappellera/apprendra aux spectateurs que nos amis Britanniques avaient créé des camps de concentration (peut-être les premiers du genre).

   La suite est moins rigoureuse sur le plan historique... et c'est un sacré euphémisme ! L'intrigue est un gloubi-boulga de théories complotistes sur la Première Guerre mondiale et l'émergence des régimes totalitaires. Les héros croisent d'authentiques personnages historiques, mais dont les motivations voire le comportement n'ont pas grand chose à voir avec les personnes qui les ont inspirés.

   À partir de là, soit le film perd ses spectateurs (qui ne peuvent adhérer à ce qu'ils voient à l'écran tant le fond est farfelu, jusque dans les péripéties, souvent invraisemblables), soit il les accroche grâce à son énergie, en particulier celle dégagée par quelques séquences assez enlevées. La première d'entre elle voit les héros affronter le moine Raspoutine (stupéfiante interprétation de Rhys Ifans). L'éminence grise de l'impératrice russe est transformée en super-vilain quasi indestructible, dans une séquence survitaminée.

   Je recommande aussi toute la partie se déroulant sur le front germano-britannique (pendant la Première Guerre mondiale). C'est à la fois spectaculaire et prenant, avec une conclusion inattendue, qui a fait réagir dans la salle.

   Enfin, il ne faut pas rater le morceau de bravoure, l'assaut du repaire du très-méchant-dont-on-ne-voit-pas-le-visage. Même si, sur le fond, c'est souvent limite débile, j'ai pris du plaisir à voir ce bon film d'action.

   P.S.

   Attention : le générique de fin est interrompu par une scène (totalement invraisemblable...) qui annonce la suite des aventures des espions britanniques.

 

ATTENTION :

GROS

DIVULGÂCHAGE !

 

   Ne lisez surtout pas la suite si vous n'avez pas encore vu le film.

 

   J'ai été étonné qu'un fort sentiment anti-écossais imprègne l'intrigue. Ainsi, le décès de l'un des personnages principaux est lié à deux soldats écossais de l'armée britannique... le pire étant atteint quand on découvre l'identité réelle du chef des méchants !

   Il aurait été plus logique de faire de lui un Irlandais (catholique), tant l'hostilité entre les deux peuples était grande. Ainsi, en France, on ignore souvent qu'en 1916, alors que le Royaume-Uni connaissait de grandes difficultés sur tous les fronts, les républicains irlandais ont organisé une insurrection contre la domination de Londres.

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355

   La signification du titre n'est donnée qu'à la fin de l'histoire : c'était le nom de code d'une espionne, dont l'identité est longtemps restée secrète. En quelque sorte, c'est une figure tutélaire pour la brochette de déglingueuses qui évolue sous nos yeux.

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   Au centre, un peu en avant par rapport aux autres, se trouve l'Américaine Mace, agent de la CIA, inévitablement interprétée par Jessica Chastain (qui coproduit le film). Lui tient la dragée haute l'Allemande Marie (Diane Kruger... mmmm). Les autres sont un peu un cran en-dessous : la Britannique Khadijah, meilleure amie de Mace (MI6 et CIA main dans la main ?), la Colombienne Graciela (Penelope Cruz, dans un rôle stéréotypé au possible)... et une Chinoise (il  y a vingt ans, ç'aurait été une Russe), la méticuleuse Lin (qui a les traits de Bingbing Fan). La distribution est de qualité... et remarquablement internationale, tout comme les dialogues.  (Dans la version originale, on entend parler anglais, espagnol, allemand, français, arabe, russe et chinois !)

   Avant de former une équipe soudée, les dames vont un peu se foutre sur la gueule, en particulier Mace et Marie, la seconde ayant subtilisé un sac que convoitait la première. S'en suit une affriolante poursuite dans les rues et le métro de Paris, Jessica Chastain en robe fleurie se lançant dans le 400 mètres haies pour tenter de rattraper une intrépide Diane Kruger à moto. J'adore! La rivalité entre les deux fortes têtes culmine dans une baston "poissonnière" du plus bel effet.

   Le problème est qu'après cette tonitruante première partie (succédant à une introduction explosive en Colombie), l'histoire patine un peu. Les espionnes commencent à s'apprivoiser et à déjouer les combines d'à peu près tous les mecs qui se dressent sur leur chemin, au Maroc comme à Shanghai. On est sur le point de tomber dans le film de copines quand, soudain, la violence masculine reprend le dessus, dans une séquence particulièrement intense.

   L'intrigue est cousue de fil blanc mais, franchement, c'est très correctement filmé et les actrices se donnent à fond. Le dénouement survient lors de l'attaque (spectaculaire) d'une suite, dans un hôtel de luxe. Même si je pense que cela sera assez vite oublié, c'est incontestablement divertissant.

00:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

355

   La signification du titre n'est donnée qu'à la fin de l'histoire : c'était le nom de code d'une espionne, dont l'identité est longtemps restée secrète. En quelque sorte, c'est une figure tutélaire pour la brochette de déglingueuses qui évolue sous nos yeux.

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   Au centre, un peu en avant par rapport aux autres, se trouve l'Américaine Mace, agent de la CIA, inévitablement interprétée par Jessica Chastain (qui coproduit le film). Lui tient la dragée haute l'Allemande Marie (Diane Kruger... mmmm). Les autres sont un peu un cran en-dessous : la Britannique Khadijah, meilleure amie de Mace (MI6 et CIA main dans la main ?), la Colombienne Graciela (Penelope Cruz, dans un rôle stéréotypé au possible)... et une Chinoise (il  y a vingt ans, ç'aurait été une Russe), la méticuleuse Lin (qui a les traits de Bingbing Fan). La distribution est de qualité... et remarquablement internationale, tout comme les dialogues.  (Dans la version originale, on entend parler anglais, espagnol, allemand, français, arabe, russe et chinois !)

   Avant de former une équipe soudée, les dames vont un peu se foutre sur la gueule, en particulier Mace et Marie, la seconde ayant subtilisé un sac que convoitait la première. S'en suit une affriolante poursuite dans les rues et le métro de Paris, Jessica Chastain en robe fleurie se lançant dans le 400 mètres haies pour tenter de rattraper une intrépide Diane Kruger à moto. J'adore! La rivalité entre les deux fortes têtes culmine dans une baston "poissonnière" du plus bel effet.

   Le problème est qu'après cette tonitruante première partie (succédant à une introduction explosive en Colombie), l'histoire patine un peu. Les espionnes commencent à s'apprivoiser et à déjouer les combines d'à peu près tous les mecs qui se dressent sur leur chemin, au Maroc comme à Shanghai. On est sur le point de tomber dans le film de copines quand, soudain, la violence masculine reprend le dessus, dans une séquence particulièrement intense.

   L'intrigue est cousue de fil blanc mais, franchement, c'est très correctement filmé et les actrices se donnent à fond. Le dénouement survient lors de l'attaque (spectaculaire) d'une suite, dans un hôtel de luxe. Même si je pense que cela sera assez vite oublié, c'est incontestablement divertissant.

00:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 07 janvier 2022

Ma Trique IV

   Échaudé par l'avalanche de critiques négatives que la sortie du film a suscitée, j'ai tardé à tenter ma chance, comme un grand, dans une salle... et puis voilà encore un long-métrage qui n'usurpe pas sa dénomination : 2h30 de délire sociétalo-romantico-numérique, réalisé par Larry Lena Wachowski, sans son frangin sa frangine (dont je suis sans nouvelle depuis Cloud Atlas).

   La première demi-heure m'a emballé. On y croise Trinity vêtue de cuir noir, mais aussi une version "bis", plus jeune et asiatique, d'elle. J'aime bien ce petit côté badass... et puis Carrie-Ann Moss a de la classe, même quand elle incarne une MILF ! Il va cependant falloir longtemps s'en contenter, puisqu'après cet amuse-gueule bien foutu, le personnage est placé au deuxième voire au troisième plan... avant de resurgir pleinement dans la dernière demi-heure.

   En attendant, on retrouve Thomas Anderson, le créateur génial du jeu addictif (et profitable) "Matrix", englué dans une vie matériellement aisée mais spirituellement et sentimentalement vide... Cependant, est-ce sa véritable vie ? Le scénario laisse aux spectateurs la liberté de choisir leur version.

   Soit le début décrit la réalité et la suite fantasmagorique n'est que la vision de celles et ceux qui subissent un quotidien tristounet et tentent de vivre une existence exaltante, dans l'univers alternatif.

   Soit le monde qui apparaît réel n'est qu'une illusion, les humains étant plongés par la Matrice et ses concepteurs dans une léthargie contemplative... d'où une suite de péripéties mises en scène avec un incontestable brio. De plus les décors sont vraiment superbes.

   Alors, oui, on pourra reprocher à la réalisatrice de puiser dans le vieux livre de recettes, histoire de jouer sur la nostalgie des fans des premiers films. Les retours en arrière et les effets de miroir (une scène du nouveau film au regard d'une scène d'un ancien) sont loin d'être tous justifiés.

   Larry/Lana a aussi mis dans ce film tout ce qui le/la préoccupe sur le plan personnel : le statut des minorités sexuelles et ethniques, l'identité de genre, la quête (et la conservation) du grand amour... ainsi que ses relations avec Hollywood. J'ai savouré la mise en abyme que constitue la création d'une nouvelle mouture du jeu "Matrix", une allusion évidente à la sortie d'un nouveau film, ardemment souhaitée par la production, qui espère se faire des nouilles encore... Alors, combien de "bullet time" faut-il insérer dans l'intrigue ? Jusqu'à quel point peut-on insister sur les bastons ? N'oublions pas le côté geek et, surtout, le duo de héros iconiques, Trinity et Néo.

   Leur relation est la clé de l'intrigue, pas uniquement parce qu'elle motive l'élu à un point tel qu'il est prêt à revenir "dans le jeu". On finit par apprendre pourquoi la Matrice a survécu. La guerre montrée dans le précédent film s'est conclue sur une "paix des braves". À chacun son monde, mais l'un des deux est nourri par la tension amoureuse inassouvie subsistant entre Trinity et Néo... la première étant supposée morte. (Sur le fond, c'est loin d'être con : faute d'une vie amoureuse épanouie, nombre de personnes se plongent dans les univers virtuels sans retenue.) Et c'est ce même amour, s'il parvient à renaître, qui pourrait tout faire basculer.

   Vous en concluez que j'ai globalement apprécié. C'est moins sentencieux (pseudo-philosophique) que jadis, c'est superbe à voir sur grand écran, avec du bon son, de l'humour... et j'ai aimé retrouver l'un des plus beaux couples qui ait été créé au cinéma.

20:37 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Ma Trique IV

   Échaudé par l'avalanche de critiques négatives que la sortie du film a suscitée, j'ai tardé à tenter ma chance, comme un grand, dans une salle... et puis voilà encore un long-métrage qui n'usurpe pas sa dénomination : 2h30 de délire sociétalo-romantico-numérique, réalisé par Larry Lena Wachowski, sans son frangin sa frangine (dont je suis sans nouvelle depuis Cloud Atlas).

   La première demi-heure m'a emballé. On y croise Trinity vêtue de cuir noir, mais aussi une version "bis", plus jeune et asiatique, d'elle. J'aime bien ce petit côté badass... et puis Carrie-Ann Moss a de la classe, même quand elle incarne une MILF ! Il va cependant falloir longtemps s'en contenter, puisqu'après cet amuse-gueule bien foutu, le personnage est placé au deuxième voire au troisième plan... avant de resurgir pleinement dans la dernière demi-heure.

   En attendant, on retrouve Thomas Anderson, le créateur génial du jeu addictif (et profitable) "Matrix", englué dans une vie matériellement aisée mais spirituellement et sentimentalement vide... Cependant, est-ce sa véritable vie ? Le scénario laisse aux spectateurs la liberté de choisir leur version.

   Soit le début décrit la réalité et la suite fantasmagorique n'est que la vision de celles et ceux qui subissent un quotidien tristounet et tentent de vivre une existence exaltante, dans l'univers alternatif.

   Soit le monde qui apparaît réel n'est qu'une illusion, les humains étant plongés par la Matrice et ses concepteurs dans une léthargie contemplative... d'où une suite de péripéties mises en scène avec un incontestable brio. De plus les décors sont vraiment superbes.

   Alors, oui, on pourra reprocher à la réalisatrice de puiser dans le vieux livre de recettes, histoire de jouer sur la nostalgie des fans des premiers films. Les retours en arrière et les effets de miroir (une scène du nouveau film au regard d'une scène d'un ancien) sont loin d'être tous justifiés.

   Larry/Lana a aussi mis dans ce film tout ce qui le/la préoccupe sur le plan personnel : le statut des minorités sexuelles et ethniques, l'identité de genre, la quête (et la conservation) du grand amour... ainsi que ses relations avec Hollywood. J'ai savouré la mise en abyme que constitue la création d'une nouvelle mouture du jeu "Matrix", une allusion évidente à la sortie d'un nouveau film, ardemment souhaitée par la production, qui espère se faire des nouilles encore... Alors, combien de "bullet time" faut-il insérer dans l'intrigue ? Jusqu'à quel point peut-on insister sur les bastons ? N'oublions pas le côté geek et, surtout, le duo de héros iconiques, Trinity et Néo.

   Leur relation est la clé de l'intrigue, pas uniquement parce qu'elle motive l'élu à un point tel qu'il est prêt à revenir "dans le jeu". On finit par apprendre pourquoi la Matrice a survécu. La guerre montrée dans le précédent film s'est conclue sur une "paix des braves". À chacun son monde, mais l'un des deux est nourri par la tension amoureuse inassouvie subsistant entre Trinity et Néo... la première étant supposée morte. (Sur le fond, c'est loin d'être con : faute d'une vie amoureuse épanouie, nombre de personnes se plongent dans les univers virtuels sans retenue.) Et c'est ce même amour, s'il parvient à renaître, qui pourrait tout faire basculer.

   Vous en concluez que j'ai globalement apprécié. C'est moins sentencieux (pseudo-philosophique) que jadis, c'est superbe à voir sur grand écran, avec du bon son, de l'humour... et j'ai aimé retrouver l'un des plus beaux couples qui ait été créé au cinéma.

20:37 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 31 décembre 2021

Un Héros

   Le cinéaste Asghar Farhadi a mis fin à ses tribulations européennes (on se souvient notamment d'Everybody knows) pour retourner à son « fonds de commerce » irano-iranien, à vocation universelle. (Naguère, cela a donné le brillant Une Séparation.)

   Il était une fois Rahim, un peintre-calligraphe au chômage, emprisonné pour dettes. Un jour, après s'être retrouvé avec un sac rempli de pièces d'or entre les mains, il décide de rendre celui-ci à sa propriétaire. Son acte civique lui vaut la reconnaissance de tous...

   ... ou pas. Parce que l'intrigue, en apparence simpliste, cache une multitude de faux-semblants. Certains d'entre eux concernent le « héros ». Ce n'est pas lui qui a trouvé le sac, ni qui l'a remis à sa propriétaire (une bien mystérieuse personne, soit dit en passant).  Au départ, loin de vouloir faire preuve de civisme, il avait plutôt songé à régler ses problèmes grâce à ce cadeau tombé d'un autobus du ciel.

   À partir de là, deux grilles de lecture s'offrent à nous. Soit on croit à la sincérité du héros et l'on se dit qu'il se prend une bien belle série de coups du sort sur la tronche. La morale de l'histoire est que la vertu n'est pas récompensée en ce bas monde, alors que c'est le mode de comportement qui est érigé en modèle. L'autre possibilité est de regarder cela en considérant que le héros est un peu filou sur les bords. Dans ce cas, la morale est qu'au pays des ayatollahs donneurs de leçons, pour s'en sortir, mieux vaut ruser avec les règles... Choisissez votre camp !

   Entre temps, on a droit à une satire du monde contemporain, iranien certes, mais avec un aspect universel. Ainsi l'auteur dénonce les dirigeants de la prison et du système pénitentiaire, qui mettent en avant le détenu civique, pour mieux se faire mousser. Il se moque aussi des médias, qui braquent les projecteurs sur un inconnu sans avoir vérifié son histoire. Il dénonce surtout (même s'ils ne sont guère visibles à l'écran) les réseaux sociaux, qui prospèrent sur la rumeur, le dénigrement, la calomnie.

   Cela donne une histoire qui oscille entre le vaudeville et le drame. C'est bien joué, prenant à suivre, tant le mystère demeure quand aux pensées secrètes du héros. Ce n'est pas virtuose au niveau de la mise en scène, mais c'est bien écrit et bien joué.

23:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Un Héros

   Le cinéaste Asghar Farhadi a mis fin à ses tribulations européennes (on se souvient notamment d'Everybody knows) pour retourner à son « fonds de commerce » irano-iranien, à vocation universelle. (Naguère, cela a donné le brillant Une Séparation.)

   Il était une fois Rahim, un peintre-calligraphe au chômage, emprisonné pour dettes. Un jour, après s'être retrouvé avec un sac rempli de pièces d'or entre les mains, il décide de rendre celui-ci à sa propriétaire. Son acte civique lui vaut la reconnaissance de tous...

   ... ou pas. Parce que l'intrigue, en apparence simpliste, cache une multitude de faux-semblants. Certains d'entre eux concernent le « héros ». Ce n'est pas lui qui a trouvé le sac, ni qui l'a remis à sa propriétaire (une bien mystérieuse personne, soit dit en passant).  Au départ, loin de vouloir faire preuve de civisme, il avait plutôt songé à régler ses problèmes grâce à ce cadeau tombé d'un autobus du ciel.

   À partir de là, deux grilles de lecture s'offrent à nous. Soit on croit à la sincérité du héros et l'on se dit qu'il se prend une bien belle série de coups du sort sur la tronche. La morale de l'histoire est que la vertu n'est pas récompensée en ce bas monde, alors que c'est le mode de comportement qui est érigé en modèle. L'autre possibilité est de regarder cela en considérant que le héros est un peu filou sur les bords. Dans ce cas, la morale est qu'au pays des ayatollahs donneurs de leçons, pour s'en sortir, mieux vaut ruser avec les règles... Choisissez votre camp !

   Entre temps, on a droit à une satire du monde contemporain, iranien certes, mais avec un aspect universel. Ainsi l'auteur dénonce les dirigeants de la prison et du système pénitentiaire, qui mettent en avant le détenu civique, pour mieux se faire mousser. Il se moque aussi des médias, qui braquent les projecteurs sur un inconnu sans avoir vérifié son histoire. Il dénonce surtout (même s'ils ne sont guère visibles à l'écran) les réseaux sociaux, qui prospèrent sur la rumeur, le dénigrement, la calomnie.

   Cela donne une histoire qui oscille entre le vaudeville et le drame. C'est bien joué, prenant à suivre, tant le mystère demeure quand aux pensées secrètes du héros. Ce n'est pas virtuose au niveau de la mise en scène, mais c'est bien écrit et bien joué.

23:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Copyright Van Gogh

   Ce surprenant documentaire chinois a été tourné dans le sud du "pays du milieu", mais aussi en France et aux Pays-Bas. Curieusement, à l'écran, jamais personne ne porte de masque... et pour cause : les images datent de 2015-2016. C'est à la fois si loin et si proche...

cinéma,cinema,film,films,peinture,arts,culture

   La majeure partie de « l'action » se déroule dans le village de Dafen, un gros bourg situé à la périphérie de Shenzhen, la mégapole industrielle qui fait face à Hongkong. Certains des « ouvriers-peintres » qui nous sont présentés (en particulier Zhao Xiaoyong) sont originaires d'une région rurale du Hunan, une province située un peu plus au nord.

   La première partie du documentaire nous montre ces familles de peintres au travail. On pense que plusieurs milliers de personnes ont pour activité principale la production de copies (à différentes échelles) des chefs-d’œuvre occidentaux, notamment ceux de Vincent Van Gogh, qui jouit d'une faveur particulière. Le film s'attarde sur seulement quelques ateliers. C'est du travail à la chaîne, intense, par des artisans dont certains semblent particulièrement doués. Ceux qui se sont spécialisés dans l’œuvre de Van Gogh sont quasiment devenus des experts du peintre. Pourtant, ils ne le connaissent (ainsi que ses tableaux) que par des livres et des vidéos. Apparemment, au sein des ateliers, chacun accomplit une tâche particulière. Les copies sont le plus souvent des œuvres collectives, même si les plus doués (comme Zhao Xiaoyong) sont capables d'en réaliser une à eux seuls.

   La deuxième partie suit un petit groupe de peintres chinois en Europe. Passionnés par leur travail et désireux de voir en vrai les tableaux qu'ils copient depuis des années, ils ont économisé pour financer un voyage qui est tout autant un enrichissement personnel qu'un investissement professionnel. Le principal client de Zhao, un Néerlandais résidant à Amsterdam, est prêt à les loger.

   Quand la petite troupe débarque en Europe, elle va de surprise en surprise. Contrairement à leurs homologues chinoises, les « grandes » villes du vieux continent (notamment Amsterdam et Paris) ne sont pas constellées de gratte-ciel. Dans des villes plus modestes (comme Arles), une politique patrimoniale intelligente a préservé les bâtiments. On sent qu'une tentation taraude Zhao : rester sur place, là où van Gogh a vécu, et y vivre de son art : quand il se met à peindre des copies, à Arles, elles rencontrent un succès immédiat.

   Cet enthousiasme contrebalance certaines déceptions : loin d'être exposées dans des galeries d'art, les copies de Zhao sont vendues dans une boutique de souvenirs installée à proximité du musée Van Gogh. De plus, il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que son généreux client réalise une belle "culbute" avec ses œuvres : les plus grandes, achetées 40-50 euros au copieur chinois, sont revendues 500... À un moment, on sent qu'une négociation s'ébauche devant la caméra. On n'en voit pas la conclusion, mais, au vu de la suite, on comprend que le client néerlandais n'a sans doute pas accepté de payer plus...

   Du coup, quand le groupe est de retour en Chine, Zhao se demande s'il ne devrait pas se lancer dans la création de ses propres peintures, tout en conservant le marché rémunérateur des copies. Ainsi, sans que ce soit peut-être l'intention des auteurs, le film démontre que l'activité picturale chinoise suit le même chemin que l'industrie : au départ sous-traitante des Occidentaux, dont elle copie les créations à moindre coût, elle devient par la suite capable de produire ses propres œuvres qui, peut-être, vont pouvoir concurrencer celles des anciens donneurs d'ordre.

   Le documentaire mérite aussi le détour pour la plongée qu'il offre dans la Chine contemporaine. Outre le gros village de Dafen (une petite ville, en réalité), on voit la mégapole moderne de Shenzhen, qui abrite un incroyable parc d'attractions (appelé « Window of the World ») contenant les répliques de nombreux monuments du monde. On découvre aussi une autre Chine, plus rurale, plus âgée, plus traditionnelle... et plus pauvre... mais avec une belle scène de cimetière à la clé.

   Ne ratez pas ce film formidable !

Copyright Van Gogh

   Ce surprenant documentaire chinois a été tourné dans le sud du "pays du milieu", mais aussi en France et aux Pays-Bas. Curieusement, à l'écran, jamais personne ne porte de masque... et pour cause : les images datent de 2015-2016. C'est à la fois si loin et si proche...

cinéma,cinema,film,films,peinture,arts,culture

   La majeure partie de « l'action » se déroule dans le village de Dafen, un gros bourg situé à la périphérie de Shenzhen, la mégapole industrielle qui fait face à Hongkong. Certains des « ouvriers-peintres » qui nous sont présentés (en particulier Zhao Xiaoyong) sont originaires d'une région rurale du Hunan, une province située un peu plus au nord.

   La première partie du documentaire nous montre ces familles de peintres au travail. On pense que plusieurs milliers de personnes ont pour activité principale la production de copies (à différentes échelles) des chefs-d’œuvre occidentaux, notamment ceux de Vincent Van Gogh, qui jouit d'une faveur particulière. Le film s'attarde sur seulement quelques ateliers. C'est du travail à la chaîne, intense, par des artisans dont certains semblent particulièrement doués. Ceux qui se sont spécialisés dans l’œuvre de Van Gogh sont quasiment devenus des experts du peintre. Pourtant, ils ne le connaissent (ainsi que ses tableaux) que par des livres et des vidéos. Apparemment, au sein des ateliers, chacun accomplit une tâche particulière. Les copies sont le plus souvent des œuvres collectives, même si les plus doués (comme Zhao Xiaoyong) sont capables d'en réaliser une à eux seuls.

   La deuxième partie suit un petit groupe de peintres chinois en Europe. Passionnés par leur travail et désireux de voir en vrai les tableaux qu'ils copient depuis des années, ils ont économisé pour financer un voyage qui est tout autant un enrichissement personnel qu'un investissement professionnel. Le principal client de Zhao, un Néerlandais résidant à Amsterdam, est prêt à les loger.

   Quand la petite troupe débarque en Europe, elle va de surprise en surprise. Contrairement à leurs homologues chinoises, les « grandes » villes du vieux continent (notamment Amsterdam et Paris) ne sont pas constellées de gratte-ciel. Dans des villes plus modestes (comme Arles), une politique patrimoniale intelligente a préservé les bâtiments. On sent qu'une tentation taraude Zhao : rester sur place, là où van Gogh a vécu, et y vivre de son art : quand il se met à peindre des copies, à Arles, elles rencontrent un succès immédiat.

   Cet enthousiasme contrebalance certaines déceptions : loin d'être exposées dans des galeries d'art, les copies de Zhao sont vendues dans une boutique de souvenirs installée à proximité du musée Van Gogh. De plus, il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que son généreux client réalise une belle "culbute" avec ses œuvres : les plus grandes, achetées 40-50 euros au copieur chinois, sont revendues 500... À un moment, on sent qu'une négociation s'ébauche devant la caméra. On n'en voit pas la conclusion, mais, au vu de la suite, on comprend que le client néerlandais n'a sans doute pas accepté de payer plus...

   Du coup, quand le groupe est de retour en Chine, Zhao se demande s'il ne devrait pas se lancer dans la création de ses propres peintures, tout en conservant le marché rémunérateur des copies. Ainsi, sans que ce soit peut-être l'intention des auteurs, le film démontre que l'activité picturale chinoise suit le même chemin que l'industrie : au départ sous-traitante des Occidentaux, dont elle copie les créations à moindre coût, elle devient par la suite capable de produire ses propres œuvres qui, peut-être, vont pouvoir concurrencer celles des anciens donneurs d'ordre.

   Le documentaire mérite aussi le détour pour la plongée qu'il offre dans la Chine contemporaine. Outre le gros village de Dafen (une petite ville, en réalité), on voit la mégapole moderne de Shenzhen, qui abrite un incroyable parc d'attractions (appelé « Window of the World ») contenant les répliques de nombreux monuments du monde. On découvre aussi une autre Chine, plus rurale, plus âgée, plus traditionnelle... et plus pauvre... mais avec une belle scène de cimetière à la clé.

   Ne ratez pas ce film formidable !