dimanche, 22 septembre 2024
Beetlejuice²
Un peu plus de trente ans après, Tim Burton remet le couvert, avec une partie de la distribution d'origine : Michael Keaton, bien sûr, dans le rôle éponyme (un peu plus présent à l'écran que dans le premier film), Winona Ryder (sur laquelle le temps semble avoir peu de prise) et Catherine O'Hara, dans le rôle de la belle-doche snob... mais sans son mari, dont le décès accidentel constitue la première péripétie de l'histoire... péripétie sans doute insérée en raison des ennuis judiciaires de l'acteur Jeffrey Jones. Ceci dit, la séquence de l'accident d'avion (et de ses conséquences), en stop-motion, est assez cocasse. Sans en dire trop, je peux annoncer qu'on revoit le personnage du père à plusieurs reprises, dans la suite du film, sans qu'il soit possible d'identifier le comédien qui l'incarne...
Les autres absents de marque sont Geena Davis et Alec Baldwin, ce dernier empêtré dans les suites judiciaires du drame survenu pendant le tournage de Rust.
Ces grands anciens sont efficacement remplacés par quelques pointures : Willem Dafoe, et Monica Bellucci, auxquels il faut ajouter deux jeunes prometteurs : Jenna Ortega (vue récemment dans l'oubliable Scream VI) et Arthur Conti.
Très vite, on comprend que Tim Burton s'appuie sur le matériau d'origine (la même ambiance macabre, les allers-retours entre le monde réel et l'au-delà, en passant par la maquette du grenier), mais avec des effets spéciaux plus élaborés, parfois vertigineux. J'ai aimé cet usage de la technologie au service de l'intrigue. On en a un excellent exemple dans l'une des premières séquences, qui commence avec Danny DeVito recevant un jeune con parisien chez les morts... et se poursuit avec l'apparition, que dis-je, la résurrection du personnage incarné par Monica Bellucci. Im-pres-sion-nant.
J'en profite pour conseiller la version originale sous-titrée, au cours de laquelle on entend parler un peu français (quand il est question du tagueur parisien) et surtout italien, lors d'une scène relatant un épisode du passé lointain, qui vit Beetlejuice passer de vie à trépas.
J'ai aimé retrouver un Tim Burton en pleine forme, portant un regard mi-tendre mi-acide sur son époque. Il exprime toujours son mépris pour la course à l'argent facile et le snobisme culturel, y ajoutant la quête de renommée médiatique, la dépendance au smartphone... et un certain culte de la rationalité.
A travers le personnage d'Astrid, la fille rebelle de Lydia, il met en scène un classique conflit d'adolescence, mais aussi la confrontation entre un esprit scientifique (et engagé) et une mentalité plus poétique, qui veut croire encore au merveilleux. Winona/Lydia est de nouveau un double de Burton. Elle a un peu vendu son âme à la télévision (comme lui à Hollywood) pour bien gagner sa vie, y perdant en authenticité. Par un effet de mise en abyme, ce film, comme l'intrigue qu'il déroule, sont des tentatives de retour aux sources. Cerise sur le gâteau, le cinéaste lance quelques piques à une partie de la jeune génération. Pas sûr que le public apprécie...
Je pense en revanche que le traitement infligé au nouveau compagnon de Lydia, l'insupportable Rory (dont le moindre des ridicules n'est pas d'avoir noué ses cheveux en un petit chignon, à l'arrière du crâne), ne suscitera aucune réprobation.
J'ai toutefois un peu de regret quant au relatif effacement du personnage de Lydia. Il est vrai qu'elle est écrasée entre deux femmes fortes : sa belle-mère (que Burton choisit de rendre plus sympathique que dans le premier film) et sa propre fille. Celle-ci connaît une forte évolution, comprenant progressivement un peu mieux sa mère... et découvrant l'amour, à travers Jérémy, un garçon fort sympathique, puisqu'il collectionne les vieux vinyles et porte une chemise à carreaux (qu'il a dû voler dans ma penderie, le coquin !). Ce personnage nous réserve quelques surprises, que je laisse à chacun(e) le plaisir de découvrir.
Je pourrais encore en parler pendant plusieurs paragraphes, mais je ne voudrais pas trop déflorer l'intrigue, qui regorge de détails ironiques et de rebondissements, parfois complètement dingos. J'ai ri, j'ai été ébloui, ému... et j'ai aimé qu'à la fin, le réalisateur nous laisse la possibilité de plusieurs conclusions.
P.S.
La musique est toujours aussi sympa, avec un peu plus de "modernité" que dans le précédent opus.
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samedi, 21 septembre 2024
Les Barbares
Qui sont les barbares ? Les migrants moyen-orientaux, dont certains meublent assez régulièrement la chronique des faits divers, en Europe ? Ou bien ces Français en apparence bien comme il faut, mais dont le fond sent un peu (beaucoup ?) le moisi ? Julie Delpy s'est lancée dans une entreprise casse-gueule, avec ses qualités et ses défauts, tant et si bien que j'ai été amené à rédiger (comme, naguère, avec Belle et Sébastien, Elvis et L’Étoile de Noël) non pas une, mais deux critiques de ce film.
ON COMMENCE AVEC LA CRITIQUE FAVORABLE
Dans son dernier film, Julie Delpy met toute sa malice et son ironie au service d'un propos universaliste.
Ainsi, chacun des cinq actes qui constituent Les Barbares est introduit par la vue d'une peinture classique, représentant des hommes en train de commettre des crimes. Mais ces assassins ressemblent bien peu aux réfugiés qui vont être l'objet de la suspicion des Paimpontais.
La famille qui débarque en Bretagne ne correspond pas aux stéréotypes racistes concernant les migrants. Elle est issue de ce qui fut la classe moyenne syrienne (avant la guerre civile) : le père est architecte, son épouse décoratrice d'intérieur (ou graphiste, je sais plus), la sœur médecin, le grand-père se distinguant par son goût prononcé pour la poésie. Quand j'aurai ajouté que la fille ainée du couple est joueuse d'échecs, vous aurez compris que le scénario ne mise pas forcément sur le misérabilisme pour apitoyer les spectateurs.
Ces bourgeois cultivés sont victimes (entre autre) de déclassement social. Le contraste est fort avec les habitants du village, pas d'un niveau social et culturel aussi élevé... mais qui se croient plus "civilisés". Le fossé est élargi par le fait qu'au lieu d'Ukrainiens victimes de la guerre déclenchée par la Russie de Vladimir Poutine, ils accueillent une famille musulmane du Proche-Orient.
Celle-ci est très bien incarnée. Ziad Bakri excelle à faire ressentir à la fois la fierté et la fragilité du père, tandis que Rita Hayek interprète à la perfection une jeune femme à la fois brillante et brisée.
De manière générale, Julie Delpy réussit ses scènes de couple, qu'elles soient entre les Français, entre les Syriens... voire entre Français(e) et Syrien(ne). Elle introduit de la légère dans la gravité.
On rit donc souvent, soit des incompréhensions mutuelles, soit de la beauferie de certains hommes (la palme revenant à Laurent Lafitte, crédible en plombier raciste), soit de la maladresse de quelques femmes. Notons que la réalisatrice ne s'est pas attribué le plus beau rôle. Elle est certes motrice dans l'action, mais souvent un peu ridicule, en vieille fille dévouée corps et âme à ses causes progressistes. J'ai aussi beaucoup apprécié les interventions d'Albert Delpy (le papa de Julie), plutôt bien dirigé par fifille dans cette œuvre-ci.
Le scénario milite pour le "vivre ensemble", tout en pointant les petits (et grands) défauts de chacun. On passe un bon moment, tout en réfléchissant.
ET VOICI LA CRITIQUE DÉFAVORABLE
La comédienne franco-américaine Julie Delpy nous livre une œuvre militante, qu'on pourrait qualifier de propagande.
Elle nous brosse un portrait caricatural d'une France profonde (qui serait) patriarcale et gangrenée par le racisme. Aucun des personnages qui émettent des réserves quant à l'accueil de réfugiés syriens n'est présenté de manière positive.
Ainsi, on peut percevoir comme un mépris de classe dans la manière dont la résidente d'une banlieue chic (et bobo) de Los Angeles dépeint des Français (très) moyens. Du maire macroniste aux identitaires bretons, en passant par le plombier, le charcutier et l'épicier, il semble n'y avoir pas grand chose à sauver. J'ajoute que certains portraits de femmes sont embarrassants. Delpy utilise le charisme d’Émilie Gavois-Kahn pour présenter une charcutière infidèle et pas subtile, tandis qu'India Hair est chargée d'incarner l'épouse soumise et un peu stupide du plombier. (Elle ne s'exprime de manière un peu élaborée qu'à partir du moment où elle s'émancipe de l'emprise de son mari.) A l'inverse, les personnages interprétés par J. Delpy et Sandrine Kiberlain, au-delà de la pointe de ridicule qui les caractérise, sont les plus sympathiques. Un peu trop souvent, on s'aperçoit que Julie a laissé tomber la dentelle et qu'elle filme avec des moufles.
Concernant la famille syrienne, on nage en plein politiquement correct. Aucune femme de cette famille musulmane (dont certains membres estiment que Bachar El-Assad est pire que Daesh) ne porte le voile (une hypothèse envisagée par la réalisatrice, mais à laquelle elle a fini par renoncer). Et, quand on apprend que l'un des membres de la famille, qui n'a pas pu fuir la Syrie, a mal tourné, ce n'est pas parce qu'il aurait rejoint l’État islamique, mais parce qu'il s'est engagé dans l'armée du dictateur syrien ! On semble avoir voulu éviter à tout pris que la moindre tache ne souille le portrait de famille.
Le summum est atteint lors de la séquence à la plage, pour laquelle Julie chausse ses gros sabots. On sent venir la principale péripétie (et sa conclusion) à des kilomètres.
Le film semble exercer une sorte de chantage sur ses spectateurs. Si l'on est du côté du Bien, on doit forcément adhérer aux propos de la cinéaste. Sinon, c'est qu'on fait partie de la troupe d'individus pathétiques qui nous a été présentée.
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vendredi, 20 septembre 2024
Tigresse
Quelque part en Europe de l'Est, Vera, la vétérinaire d'un parc animalier, est requise pour prendre en charge une tigresse, dans la luxueuse demeure d'un trafiquant, dont la dernière lubie a été d'acquérir (sans doute illégalement) l'un de ces splendides félins, pour l'enfermer dans son jardin, dans une cage ridiculement petite. Sans surprise, la tigresse dépérit. En parallèle, la véto découvre que son compagnon la trompe.
L'assimilation faite entre l'héroïne et son nouveau pensionnaire à quatre pattes est un peu voyante... et maladroite. Vera sort ses griffes, envoie balader son compagnon... et laisse la tigresse s'enfuir.
La suite mélange la chasse au félin (qu'il faut récupérer, de préférence vivant, avant qu'il ne commette l'irréparable) et la vie personnelle de Vera. Il est question de son couple, de maternité... et, un peu, de la manière dont une femme vétérinaire est considérée. Dit comme ça, cela pourrait sembler passionnant... pas trop, en fait. Toute la partie vie privée est plate, pas très bien jouée à mon avis. En revanche, les péripéties autour de la tigresse sont plutôt intéressantes. Celle-ci est un véritable animal, campé en recourant (me semble-t-il) à plusieurs félines, l'une d'entre elles (selon Le Canard enchaîné du 7 août dernier) ayant été utilisée jadis pour le tournage de L'Odyssée de Pi.
Le film ne dure qu'1h20. C'est une curiosité, pour cinéphiles en quête d'exotisme.
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mardi, 17 septembre 2024
L'Aveyron fictif de France 2
France 2 est sur le point d'achever la diffusion d'une mini-série (en six épisodes) intitulée L'Éclipse. Elle a été majoritairement tournée en Aveyron, sur l'Aubrac et dans la commune de Bozouls (célèbre pour son canyon, que la plupart des locaux et quelques esprits égrillards persistent à nommer « le trou »).
Le premier problème est que les auteurs du scénario ont choisi de localiser la cité du Causse Comtal (marquée par les roches calcaires) sur l'Aubrac (à soubassement partiellement volcanique). Vu de Paris (voire de Montpellier), cela peut sembler identique, mais, localement, on fait bigrement la différence entre les deux territoires (l'Aubrac étant grossièrement paré de vert ci-dessous).
De surcroît, à part quelques vues aériennes "décoratives", le réalisateur ne fait rien de ce cadre splendide, autour duquel il aurait pourtant été possible de bâtir une histoire sur fond de légende...
Un troisième élément m'a fait tiquer (toujours dès le premier épisode, censé planter le cadre avec un minimum de rigueur...). On voit deux des jeunes protagonistes prendre un bus, supposé relier l'Aubrac à Rodez :
Il s'agit d'un bus ruthénois, plus précisément de la communauté d'agglomération de Rodez... donc un véhicule qui ne circule que dans les huit communes membres. Bozouls n'en fait pas partie, mais elle est bien située sur une ligne qui relie l'Aubrac à Rodez, la ligne 201, dont les bus (financés par le Conseil régional) sont... rouges :
Tel n'est pas le véhicule qu'on voit circuler dans la série, peut-être en raison du manque de disponibilité, peut-être parce que la production a signé un partenariat uniquement avec les collectivités les plus locales : le générique de fin remercie (entre autres) la commune de Bozouls, la communauté de Rodez et le département de l'Aveyron (le conseil départemental ayant sans doute participé au financement... mais pour quelle somme, mystère).
J'en profite pour signaler que ce générique de fin comporte une erreur (ou maladresse). Tel qu'il est présenté, il sous-entend que la commune de Marchastel est située dans l'Aveyron, alors qu'elle est en Lozère (une commune portant le même nom se trouvant dans le Cantal).
On pourrait m'opposer la "licence poétique", qui permet aux créateurs de s'émanciper du contexte réel, pour mieux porter leur œuvre. Si encore celle-ci était emballante... Les jeunes personnages de la série n'ont pas grand chose à voir avec les habitants du cru. Le plus mal caractérisé est le fils de l'une des gendarmes, un fumeur de joint qui écoute du rock, coiffé et habillé plutôt comme un citadin. J'ai de plus été sidéré par le laxisme des parents représentés dans la série, sans parler des interférences entre leur vie privée et l'enquête en cours. Dans la vraie vie, celle-ci leur aurait été rapidement retirée, pour être confiée à une Section de recherches (par exemple celle de Montpellier).
Je pourrais m'acharner davantage, relever d'autres incohérences (comme l'absence de réseau, moins répandue qu'on ne le croit, ou encore le fait que, pour écouter de la musique, les jeunes soient limités à un auto-radio... on connaît les enceintes connectées, sur l'Aubrac !)... Je pourrais aussi mettre en valeur les qualités de la série (qui n'est pas totalement nulle), notamment les vues paysagères et certaines scènes d'intérieur pas trop mal réussies.
D'un point de vue scénaristique, le dernier épisode n'est pas le plus mauvais : il permet de revoir (sous un autre angle) certaines scènes du début. C'est assez saisissant, mais pas suffisant pour faire de l'ensemble de la série une œuvre de référence.
21:07 Publié dans Aveyron, mon amour, Télévision | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : télévision, télé, actu, actualité, actualités, actualite, actualites, médias
dimanche, 15 septembre 2024
Kill
Ça n'est pas pour me vanter mais, aujourd'hui, j'ai vu un film en hindi. Il s'y mêlait un peu d'anglais, soit parce que la langue de l'ancien colonisateur s'est immiscée dans celle des colonisés (à l'image du français dans l'arabe maghrébin), soit parce que la présence de portions de dialogues en anglais rend le film plus facilement vendable hors des régions hindiphones.
Depuis quelques années, j'ai remarqué que la présence de la cinématographie indienne dans l'Hexagone ne se limitait plus aux comédies musicales sirupeuses et aux œuvres art et essai exigeantes. Désormais, à intervalle régulier, on voit débarquer sur les écrans français (souvent dans les cinémas CGR, en Province) des films de guerre, des polars, des histoires inspirées de la mythologie hindoue... et des films d'action.
Tel est le cas de celui-ci. Laksh Lawlani incarne Amrit, une sorte d'avatar de Bruce Willis, Denzel Washington, Liam Neeson et Jason Statham réunis. Le début nous le présente comme un officier des commandos de l'armée. On le suppose redoutable, mais on ne l'a pas encore vu en action. On constate juste que c'est un beau gosse...
... et ça tombe bien, puisqu'il kiffe à donf' l'une des filles d'un richissime entrepreneur de New Delhi. Hélas, le papounet ne laisse pas le choix à la belle Tulika, qu'il fiance contre son gré au rejeton d'une autre famille pétée de thunes. Cette histoire d'amour contrarié nous rappelle que, même si, ici, il va surtout être question de baston, la tradition bollywoodienne n'est pas enterrée.
La première séquence d'action nous montre deux amis officiers tentant d'empêcher une meute de bandits des grands chemins de prendre le contrôle d'un train et d'en dépouiller les voyageurs. La mise en scène illustre le contraste entre les militaires, qui tentent juste de neutraliser les délinquants (au départ sans les tuer) et ceux-ci, prêts au meurtre dès qu'on s'oppose à eux.
Pour moi, le film atteint un pic d'intensité quand le héros se décide à tuer sans ménagement. Cela devient extrêmement sanglant et cruel. On ne se frappe pas uniquement à coups de poings, de tête ou de pieds. On utilise tous les objets à sa disposition : bagages des voyageurs, porte de communication, linge du wagon-lit, extincteur (référence à Bullet Train ?), briquet... et, surtout, armes blanches. Au départ, ce sont les voleurs qui en font usage : couteaux, poignards, serpettes, hachoirs accompagnent allègrement barres de fer et démonte-pneu (je suis sûr d'en avoir vu un).
Petit à petit, on comprend que les quarante voleurs (sans Ali Baba) forment un clan soudé par les anciens, trois frères, les patriarches, les autres hommes, plus jeunes, étant tous cousins. (On ne dira jamais assez combien une démographie galopante est une menace pour la tranquillité publique...) Des dissensions apparaissent entre certains membres du clan.
Tout cela nous mène à la dernière partie, où l'on retrouve les protagonistes qui ne se sont pas encore fait tuer. La plupart sont blessés, parfois grièvement... mais cela ne les empêche nullement de reprendre le combat. Le héros détient sans conteste la palme des rescapés : il s'est pris plusieurs centaines de coups, a été atteint au moins vingt fois par une arme blanche... mais, comme il a des burnes en titane, des biceps d'acier et des abdos en béton, il continue à dézinguer ses adversaires... de plus en plus difficilement, ceci dit.
C'est évidemment totalement invraisemblable, même si le réal a affirmé s'être inspiré d'une véritable attaque de train, survenue en 1995. (J'ai aussi trouvé trace d'un événement semblable, l'an dernier, au Népal). C'est de plus un peu putassier sur le fond, mais cela dit deux-trois choses de l'Inde contemporaine (le film n'étant à l'origine pas destiné au public occidental). Quand on aime voir des truands se prendre une branlée, cela fait passer le temps de manière pas désagréable du tout.
22:22 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
L'I.A. du mal
Le synopsis de ce petit film d'épouvante est une nouvelle version d'un intrus dans la maison. On nous a déjà servi ce genre de recette, avec soit un invité qui s'incruste au point de devenir menaçant, soit une nounou qui outrepasse ses fonctions, soit un robot domestique qui échappe au contrôle de ses créateurs.
Cette fois-ci, il est question d'Aia, une intelligence artificielle de nouvelle génération, une sorte de super assistant personnel, un produit annoncé comme révolutionnaire.
L'introduction nous la montre à l’œuvre dans une famille dont les trois membres sont absorbés par les écrans : le père par son smartphone, la mère par l'ordi portable et la fille par une tablette. Le pire est que, lorsque la mère semble s'inquiéter de ce que fait celle-ci, c'est pour lui demander de mettre son casque... parce que le bruit qui émane de la tablette gêne les parents ! On est donc plutôt content qu'il arrive quelques bricoles à cette famille d'esclaves numériques.
Mais tout cela n'est qu'une mise en bouche. Après une ellipse, on retrouve Aia (l'intelligence artificielle) au moment où est elle installée dans la maison de l'un des employés d'une boîte de communication, celle qui sera chargée de faire la promotion du nouveau produit. Le choix de cette installation semble être le fait du hasard... en réalité non. Si le couple et les trois enfants sont des adeptes des outils numériques, c'est avec moins d'angélisme que les personnes que l'on a vues au début : les parents lisent de vrais livres et limitent la consultation d'internet du fils cadet (collégien), qui n'a pas de smartphone. Quant au petit dernier, on le prive le plus possible d'écrans.
Sans surprise, Aia va d'abord se montrer utile aux membres de la maisonnée. Elle permet à la mère d'accomplir plus rapidement des tâches administratives, l'aide dans la gestion du foyer et des enfants. Elle vient au secours de la fille aînée, victime d'un deep fake, permet au cadet de surmonter sa phobie scolaire et elle lit des histoires au petit dernier.
Très vite, les choses vont déraper. Il semble que plusieurs personnages soient manipulés. A partir de ce moment-là, on se demande qui est derrière les événements qui surviennent. L'I.A. est-elle un outil au service d'un programme gouvernemental ultra-secret ? Sert-elle les visées d'un couple de génies de l'informatique mégalomane ? Est-elle une émanation du Diable ? S'agit-il d'une nouvelle forme de vie ?
Dans la salle, le public, plutôt jeune, à pop corn, semble avoir été pris par cette histoire. Le fantastique enrobe des problèmes de notre époque qui les touchent : les difficultés relationnelles entre parents et enfants, les premières amours contrariées d'une adolescente en quête de visibilité numérique et les tentations du net pour deux garçons.
Sans utiliser d'effets spéciaux tape-à-l’œil, la réalisation (que l'on doit à Chris Weitz, auteur jadis d'un Twilight, d'À la croisée des mondes... et du premier American Pie) suscite l'étrangeté, le trouble puis (un peu) la peur, par quelques scènes chocs et l'intrusion de plans décalés, ceux d'inconnus faisant des gestes mystérieux (dont l'explication n'est donnée qu'au cours du générique de fin : ne partez donc pas trop vite).
Sans renouveler le genre, je trouve le film plutôt bien fichu. Il tient globalement ses promesses, en moins d'1h30, ce qui laisse la possibilité de faire autre chose de sa soirée.
P.S.
Pour les spectateurs âgés désireux d'accroître leur connaissance des us et coutumes contemporains, ce film a l'avantage de mettre en scène une pratique très connue outre-Atlantique (et qui commence à faire des dégâts en France) : le swatting.
11:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, film, films
samedi, 14 septembre 2024
Le Procès du chien
Quelques mois après Les Chèvres, voici une nouvelle fiction (inspirée d'une histoire vraie), dans laquelle une procédure judiciaire s'interroge sur le statut d'un animal domestiqué, au comportement erratique. Il est possible que le ratage du film de Fred Cavayé explique la faible affluence dans la salle : certains spectateurs n'ont pas voulu se faire avoir deux fois...
... eh bien ils ont eu tort ! Derrière et devant la caméra, Laetitia Dosch (vue l'an dernier dans Acide) est épatante. Elle incarne une avocate suisse "engagée" (ça veut dire : de gauche), un peu excentrique, empathique, bosseuse... mais qui ne gagne guère de procès, étant donné qu'elle choisit un peu trop souvent de défendre des causes perdues d'avance.
Cette fois-ci, elle va être servie ! Elle est le dernier recours d'un handicapé, dont le chien a mordu une femme de ménage au visage. Comme il n'en est pas à sa première agression, la loi prévoit qu'il soit euthanasié (le chien, pas son maître, hein). Mais, quand on rencontre Cosmos, on ne peut qu'être séduit pas son regard expressif et son côté cabot. (Bon, celle-là, je l'ai faite.) Comme en plus son maître est incarné par François Damiens (un poil colérique, tout de même), on comprend que l'avocate, au lieu d'éviter de prendre en charge une énième affaire ingagnable, va se jeter à corps perdu dans cette nouvelle cause.
C'est donc d'abord une comédie, qui commence par un dialogue très cru, dans un café. La suite nous propose d'autres répliques bien assaisonnées, soit dans la bouche de l'héroïne (en voix off), soit dans celle du fils de ses voisins, un gamin très futé pour son âge, mais vivant dans une famille dysfonctionnelle.
Deux procès nous sont présentés, le premier, bref, permettant la tenue du second, qui va occuper presque une heure. J'ai été agréablement surpris par le fait que le scénario ménage suffisamment de rebondissements pour tenir la distance. Cela tient en partie à de truculentes scènes de dialogues, qui font notamment intervenir une autre avocate (celle de la partie civile), candidate populiste à la mairie, et un maître-chien comportementaliste perspicace (Pascal Zaïdi, sobre et efficace).
Certaines scènes valent leur pesant de croquettes, comme la réunion d'un comité d'éthique, en plein procès, au sein duquel siègent un psychiatre, un philosophe, une éthologue, un rabbin, un imam, un pasteur et une moine bouddhiste ! J'ai aussi beaucoup aimé la tentative de faire dialoguer le juge qui préside l'audience avec l'accusé (canin), à l'aide d'un procédé révolutionnaire... que je laisse à chacun le plaisir de découvrir.
Au-delà de la comédie, il est question de la place des animaux dans notre société, du rôle des femmes, des immigré(e)s... et des (mé)faits des réseaux sociaux.
En 1h20, la réalisatrice brasse beaucoup de thèmes, de manière tonique. Le film fait à la fois rire et réfléchir, ce qui n'est pas si fréquent ces dernières semaines, dans les salles obscures de l'Hexagone.
P.S.
Je pense que le titre du film s'inspire de celui d'un vieux (très bon) long-métrage, Procès de singe.
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vendredi, 13 septembre 2024
Silex and the City, le film
Après la série de bandes dessinées, après les courts-métrages télévisés, après le jeu de société, voici le film ! (Si cela continue ainsi, Jul pourrait, dans une sorte d'involontaire mise en abyme, devenir l'incarnation de ce que son film dénonce...)
Le tout début est sympatoche. Il fait intervenir un ancien président de la République et sa compagne (que l'on retrouve à la fin), qui se révèlent capables d'autodérision. C'est conforme à la marque de fabrique des adaptations de la BD, qui ont fait intervenir quantité de personnalités (plutôt de gauche) dans des rôles taillés sur mesure.
La suite est beaucoup moins emballante. On a beau retrouver le style, les anachronismes, les jeux de mots, les effets de décalage, cela ne fonctionne qu'en de rares occasions. Dans la salle où je me trouvais, personne n'a ri pendant la projection. (Certaines bandes-annonces se sont révélées plus drôles...) Le meilleur moment est pour moi la brève incursion dans un programme télévisuel parodiant L'Île de la tentation. Ah, si tout le reste avait été de cette veine...
Le pire est atteint quand le film d'animation est interrompu par une séquence avec de vrais acteurs. C'est très mauvais. En revanche, plusieurs épisodes situés dans la deuxième partie m'ont paru plus réussis : le cours d'économie commerciale de Crao de la Pétaudière et la dérision appliquée aux religions, qui érigent en objet de culte un minuscule outil de valeur ridicule.
Quand Jul se lance dans la philosophie politique, l'intrigue, de qualité médiocre, gagne un peu en épaisseur. Mais cela ne soulève pas l'enthousiasme, d'autant que la fin est ratée.
C'est donc une déception. Mieux vaut (re)lire les albums.
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mercredi, 11 septembre 2024
Le fantôme des égouts ruthénois
La Une de l'hebdomadaire aveyronnais Le Villefranchois du 5 septembre dernier comporte un titre qui n'a pas manqué de piquer ma curiosité :
Lorsqu'on se rend page 9 du journal, on peut lire, sous la plume de Pascal Cazottes, un article relatant cet étrange fait divers, qui s'est déroulé en février-mars 1918, en plein centre-ville de Rodez.
Derrière la cathédrale, au cœur de la vieille ville, au coin de la Place de la Cité, là où commence la rue du Touat (la bien nommée, le mot signifiant "égout" en langue d'oc), un vendredi d'hiver finissant, une voix semblant venir d'outre-tombe a commencé à interpeller les passants. Voici ce qu'en dit le quotidien local de l'époque, Le Journal de l'Aveyron, dans son édition du 17 mars 1918 (page 3) :
Moins d'une semaine plus tard, l'information est reprise dans l'hebdomadaire Le Narrateur, ancêtre du Villefranchois (page 2):
L'article est accompagné d'un poème satirique, le même qui a été auparavant publié dans Le Journal de l'Aveyron. Il est signé Bertrand Bonpunt.
Nos locales follicules
Ont tout récemment cité
Que, Place de la Cité,
Lorsque choient les crépuscules,
A l'heure où des magasins,
Sort la frisque Ruthénoise,
Pour laquelle en rut et noise
Se mettent les fantassins,
Un singulier noctambule
Intrigue de son bagout
Par la bouche d'un égout
Les badauds qu'il accumule ;
Et que, malgré qu'hivernal
Soit le temps, le sieur Tarfume
Depuis huit jours se parfume
En ce lieu sub-vicinal.
Hypothèse et commentaire
Aussitôt d'aller bon train :
Est-ce quelque militaire
Que cache ce souterrain ?
N'est-ce point quelque fumiste
Qui se gausse du bourgeois ?
- Mais non, dit un alarmiste,
C'est quelque espion sournois !
D'un habile ventriloque
Quelques-uns ont le soupçon,
Mais tous battent la breloque
Du fait de ce polisson.
Haranguant notre police
Tel écrit, non sans malice :
« Tant pis pour ces beaux galons
Qui te vont jusqu'aux talons,
Tant pis pour les uniformes !
Il convient que tu t'informes,
Qu'au devoir tu te dévoues
Et poursuives jusqu'aux boues !
A quiconque te débine
Prouve que ta carabine
Ne sort de chez Offenbach :
Plonge-toi donc... au fin bac ! »
Sur le cas chacun discute
Nonobstant que le bon goût
Exige qu'on ne dispute
Ni des couleurs... ni d'égout.
Le mystérieux fantôme de la rue du Touat a disparu aussi brusquement qu'il était apparu... peut-être refroidi par la descente que les gendarmes aveyronnais ont fini par effectuer dans le vieil égout (dont une partie remonte à l'époque gallo-romaine). Aujourd'hui, en raison des travaux qui ont eu lieu aussi bien dans la rue que sur la Place de la Cité (considérablement embellie), à l'endroit signalé (au pied d'une bijouterie), on ne peut plus voir que ceci :
21:48 Publié dans Aveyron, mon amour, Histoire, Presse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, presse, médias, journalisme, occitanie
dimanche, 08 septembre 2024
Beetlejuice
Avant la sortie en salles, mercredi prochain, de la suite tournée elle aussi par Tim Burton, certains cinémas ont eu l'excellente idée de reprogrammer le premier film, datant de 1988. A l'époque, ce fut pour moi une découverte, celle de l'univers d'un cinéaste dont j'ai par la suite vu presque toutes les œuvres (y compris animées) sorties en salles.
Avec le recul, on constate que la distribution principale était prestigieuse... ce qui n'était pas évident à l'époque : Michael Keaton (délicieusement vulgaire dans le rôle-titre) n'avait pas encore endossé le costume de Batman, Geena Davis (actuellement à l'affiche de Blink Twice) ne s'était pas encore enfuie en voiture avec Susan Sarandon, Alec Baldwin était loin de se douter qu'il regretterait un jour d'avoir manipulé une arme à feu... et Winona Ryder (mmmm) en était à ses tout débuts.
La première partie fait un peu kitsch. L'image est datée et l'aspect nunuche du couple formé par les jeunes Davis et Baldwin est encore plus apparent des années plus tard. Le contraste avec le vocabulaire et le comportement plus que déplacés de Beetlejuice n'en est que plus frappant. Comme, depuis, une certaine décence a gagné la représentation des interactions humaines à Hollywood (sauf dans des productions mal élevées comme Deadpool & Wolverine), la caractérisation du personnage éponyme fonctionne à merveille. Je préviens toutefois le jeune public qui n'aurait jamais vu ce film : Beetlejuice/Keaton y est finalement assez peu présent, et uniquement dans la deuxième partie.
Quand bien même les effets spéciaux apparaîtraient parfois un peu datés, il faut souligner la qualité des décors et du maquillage, avec, en bonus, l'utilisation de maquettes et de poupées animées. Burton s'est amusé à retourner la mise en abyme : au début, l'action se déroule dans le vrai village, dont on peut voir une représentation réduite dans le grenier de la maison des héros ; par la suite, l'action se déroule à plusieurs reprises dans la maquette, d'où l'on peut voir le grenier.
Sur le fond, la jeune Lydia et son père incarnent les aspirations de Burton : vivre à l'écart du monde contemporain, perçu comme peu intéressant voire hostile, le côté gothique de l'adolescente étant appelé à un brillant avenir au sein de l’œuvre de Burton...
Ce film est aussi une dénonciation de la mentalité reaganienne régnant à l'époque aux États-Unis : l'arrivisme, l'appât du gain et l'adhésion (selon Burton) à de fausses valeurs sont incarnés par les promoteurs immobiliers et les "cultureux", l'un d'entre eux (excellent Glenn Shadix) se révélant d'un incommensurable snobisme.
Burton le rêveur n'est pas "politiquement correct". Son humour est macabre, parfois scabreux. Il humilie certains de ses personnages, tout en gardant une âme poétique. Cet improbable équilibre est l'une des grandes réussites de film, accompagné d'une bande son entraînante.
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lundi, 02 septembre 2024
La Belle Affaire
Intitulée Zwei zu eins ("Deux pour un") dans la version originale, cette fiction allemande (inspirée d'une histoire vraie) évoque les mois qui ont précédé l'absorption de la RDA par la RFA la réunification allemande. Au-delà d'une certaine somme, les citoyens de RDA ont été autorisés à échanger leurs vieux marks est-allemands contre de bons Deutsche Marks, au taux (avantageux) de deux pour un... sachant qu'à l'époque, le DM s'échangeait contre environ 3,40 francs français.
L'intrigue, loufoque, met en scène des gens de peu, anciens employés de la grosse usine locale, désormais à la retraite ou au chômage et habitant le même immeuble. Durant la première demi-heure, j'ai craint d'avoir choisi de voir une de ces comédies germaniques lourdingues, aussi digestes qu'une choucroute bien grasse accompagnée d'une bière qui sent la pisse.
Ce début est à la fois misérabiliste et maladroit. La manière dont une bande de branquignoles va mettre la main sur un paquet de billets entreposés dans un bunker secret n'est guère crédible. Mais, de temps à autre, il règne une petite ambiance à la The Full Monty (le strip-tease en moins, les habitants étant de surcroît très mal vêtus).
Cela devient vraiment intéressant à partir du moment où les héros se demandent quoi faire de tout ce pognon. Ils mettent au point une première combine, avec la complicité de petits commerçants ouest-allemands aussi débrouillards que cupides.
L'immeuble d'habitat collectif devient à la fois une métaphore de la RDA finissante et une tentative d'utopie néo-communiste, mâtinée de consumérisme frénétique. J'ai beaucoup aimé cette partie, qui ne se limite pas à la comédie. Elle pose de bonnes questions sur le rôle de l'argent et les choix de vie qui se présentent parfois. Dans l'immeuble, tout le monde n'a pas envie de jouer collectif et, parmi ceux qui adhèrent à l'action de groupe, des dissensions émergent sur la manière de procéder. On nous propose une belle brochette de seconds rôles, bien qu'un peu caricaturale.
Se greffe là-dessus une intrigue amoureuse. La crise de fin de régime (communiste) provoque des retrouvailles. Les rapports humains se développent à trois niveaux : l'immeuble collectif, la famille (de cœur) élargie de l'héroïne Maren et le triangle amoureux. Je trouve que la partie sentimentale est bien insérée dans l'histoire politique... l'interprétation de Sandra Hüller n'y étant pas pour rien. De manière stupéfiante, cette comédienne réussit à incarner aussi bien l'idéaliste communiste que, naguère, l'épouse nazie du commandant du camp d'Auschwitz (dans La Zone d'intérêt). J'ai aussi apprécié l'intelligence et la malice d'une gamine à la paternité douteuse, qui contribue à un ultime rebondissement, dans un épilogue qu'il ne faut pas rater. Le générique est aussi coupé par des images d'époque, qui nous racontent la véritable histoire (pour le peu qu'on en connaisse).
Je recommande donc ce film, qui n'est pas une grande réussite en terme de comédie, mais qui mérite le détour pour les questionnements politico-sociaux qu'il met en scène.
23:41 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
mardi, 27 août 2024
Project Silence
Le jeune cinéaste sud-coréen Tae-gon Kim mélange les genres dans cette production horrifique qui n'est pas sans rappeler de précédents films (Dernier train pour Busan et, plus récemment, Projet Wolf Hunting).
Plus précisément, il croise le film-catastrophe (genre accident d'avion, immeuble en feu ou bateau qui coule) avec le film d'horreur, une créature quasi surnaturelle (requin particulièrement coriace, alien diabolique ou crocodile très très affamé) menaçant la survie des personnages principaux, ici les occupants de divers véhicules, qui se retrouvent coincés sur un gigantesque pont à haubans (peut-être celui d'Incheon), à proximité de Séoul. Ils ignorent qu'au cours du carambolage, une troupe de chiens dressés pour tuer s'est évadée d'un fourgon...
Le côté film d'horreur est bien porté par les chiens (réels comme virtuels), la meute obéissant aux ordres d'une créature alpha, qui a échappé au contrôle des humains. Signalons que le dominant est ici une dominante, une femelle redoutable, mais dotée de sentiments.
Le problème vient des personnages humains, une brochette de caricatures comme je croyais ne plus pouvoir en trouver dans une fiction du XXIe siècle : scientifique lâche, politicien manipulateur, haut-fonctionnaire imbu de lui-même qui va renouer en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire avec un humanisme aussi bien-pensant qu'irréaliste (dans le contexte de survie sur le pont). Sa fille est faite du même tonneau, n'hésitant pas à quitter un abri sûr à plusieurs reprises, réussissant à chaque fois à échapper aux molosses qui viennent pourtant de dézinguer une unité de policiers surentraînés... et je ne vous parle pas du comique troupier de la bande, un petit arnaqueur, officiellement dépanneur routier, dont le véhicule de fonction est capable de remonter un fourgon blindé militaire...
Bref, les incohérences sont nombreuses et le comportement, soit larmoyant à l'extrême, soit totalement irresponsable, de nombreux personnages ne permet pas de relancer l'intérêt. C'est dommage, parce que les effets spéciaux sont bien fichus : le carambolage autoroutier, l'accident d'hélicoptère et la progressive désagrégation du viaduc sont mis en scène avec un incontestable savoir-faire.
A trop vouloir copier des modèles états-uniens, le réalisateur tombe à mon avis dans les mêmes travers : l'exploitation d'une intrigue familiale cousue de fil blanc et le déversement maladroit d'une morale lénifiante.
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vendredi, 23 août 2024
Blink Twice
Slater King est un milliardaire de la tech, qui tente de se racheter une conduite. Le brillant jeune homme (Channing Tatum, excellent), un poil arrogant, au management un peu autoritaire et dont on sent qu'il n'a pas toujours été très correct avec les dames, a décidé de devenir un type bien. Il suit une thérapie et se ressource régulièrement sur une île paradisiaque des Caraïbes, où l'on vit frugalement, sans smartphone, où l'on mange bio et où l'on se respecte. De temps à autre, il y invite quelques amis... et de jolies jeunes femmes.
Deux d'entre elles se sont tapé l'incruste lors d'une soirée consacrée au tycoon, sur le continent. Ce sont des employées de la société qui gère l'événement, mais elles font tout pour se rapprocher des vedettes... et se font remarquer... puis inviter sur l'île. Au départ, tout semble merveilleux, mais, petit à petit, Frida commence à avoir des pertes de mémoire et remarque des trucs bizarres... jusqu'à la disparition d'un invité dont personne d'autre qu'elle ne semble se souvenir.
Même si j'estime ces deux premières parties un peu trop longues, je trouve que la progressive montée en tension (liée notamment à l'étrangeté grandissante de la situation) est maîtrisée. Il y a du Shyamalan (première époque) dans ce film de Zoé Kravitz... en tout cas plus que dans le récent Trap. J'y vois aussi une pincée d'ambiance lynchienne (à la Twin Peaks), pas uniquement en raison de la présence de Kyle MacLachlan dans la distribution.
On attend évidemment que l'apparente ambiance paradisiaque vole en éclat et, quand cela arrive, on n'est pas déçu. Petit à petit, la vérité se fait jour, avec une deuxième couche concernant l'un des personnages, marqué par une discrète cicatrice, antérieure à son séjour dans l'île.
Du coup, je trouve que ce film de genre est bien maîtrisé, avec en sous-texte un brûlant sujet de société sur lequel je ne peux m'attarder, sous peine de trop déflorer l'intrigue...
... MAIS J'EN DIS PLUS CI-DESSOUS.
NE LISEZ SURTOUT PAS LA SUITE SI VOUS COMPTEZ VOIR LE FILM.
CELA RISQUE DE VOUS PRIVER D'UNE PARTIE DU PLAISIR.
Blink Twice est un film Metoo. Ce n'est pas tant le monde de la tech qui est dépeint que, par métaphore, celui du cinéma... et ce qu'il impose aux femmes en général, aux actrices en particulier.
Les hommes sont donc (presque) tous des prédateurs... et blancs (gros défaut du film, qui exonère les mâles issus des "minorités visibles" des comportements sexistes). La petite nuance porte sur l'un des mecs, qui ne participe pas, mais qui se tait et préfère oublier. A travers lui, Kravitz dénonce la passivité de certains acteurs ou réalisateurs hollywoodiens, qui ont fermé les yeux sur les déviances d'Harvey Weinstein, tant que cela ne les touchait pas de près.
La contexte des comportements prédateurs pourrait aussi faire allusion à l'affaire Epstein, même si l'intrigue se concentre sur des femmes majeures.
Enfin, il y a le cas du personnage de Stacy, la sœur de Slater, qui en sait plus qu'elle ne le dit et qui se fait la complice de l'entreprise de prédation de son frère. Elle est incarnée par Geena Davis, une comédienne investie dans la défense des droits des femmes, mais, surtout, une femme de la "génération d'avant". Je pense qu'à travers ce personnage, la réalisatrice pointe (selon elle) la responsabilité partielle de ces actrices qui n'ont pas été victimes des violences sexuelles (parce qu'elles étaient intouchables, protégées par un compagnon, aptes à se défendre... ou tout simplement très prudentes), mais se doutaient de ce qui se passait dans certaines chambres d'hôtel. Le film met en avant la sororité, cette solidarité féminine qui aurait peut-être permis d'éviter certains comportements scandaleux.
Ce petit film de genre, en apparence assez lisse, est donc au final plus profond qu'il n'en a l'air, un peu à l'image du Get out de Jordan Peele il y a quelques années.
23:28 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
jeudi, 22 août 2024
Petit mensonge historique sur France Culture
L'été demeure propice à l'enrichissement intellectuel, sur les radios publiques. Ainsi, actuellement, sur France Culture, on peut profiter, au choix, d'une "Grande Traversée" en compagnie de Christophe Colomb, d'une série documentaire consacrée aux Guerres de religions (en France, au XVIe siècle)... ou se contenter d'avoir raison avec... Charles de Gaulle.
C'est l'audition du quatrième épisode de ce dernier programme qui, ce midi, m'a fait dresser l'oreille. Présenté par Xavier Mauduit, il a confronté les visions de Jean-Luc Barré, biographe de Charles de Gaulle (marqué à droite), et de Ludivine Bantigny, universitaire marxisante. L'animateur leur a longuement laissé la parole, leur permettant de développer leurs arguments. C'était très intéressant... jusqu'à la toute fin, qui a évoqué les élections législatives de juin 1968.
(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)
Consécutives à la dissolution prononcée par le président de Gaulle, elles ont vu débarquer à l'Assemblée nationale une majorité absolue de députés UDR (gaullistes), alors que les précédentes élections (celles de 1967) avaient failli aboutir à ce qui aurait été appelé la première cohabitation.
A ce sujet, Jean-Luc Barré mettait (fort justement) l'accent sur la nette victoire du parti au pouvoir, dans des conditions démocratiques, tandis que Ludivine Bantigny affirmait (à raison) que la forme du scrutin (uninominal majoritaire à deux tours) avait favorisé le parti au pouvoir, alors que, selon elle, gauche et droite représentaient un poids équivalent dans le corps électoral... C'est là que le bât blesse.
Voici le résultat du premier tour des législatives de 1968 (d'après le site france-politique.fr) :
Comme on peut le constater, contrairement à ce qu'a affirmé l'historienne, la gauche et la droite ne faisaient pas jeu égal en juin 1968. A eux seuls, les gaullistes ont rassemblé près de 44 % des suffrages exprimés, auxquels il faudrait ajouter ceux (entre 4 et 5 %) qui se sont portés sur les Républicain indépendants (de Valéry Giscard d'Estaing), classés la plupart du temps dans les "divers droite". Au premier tour des législatives de 1968, l'ensemble des candidats de droite a donc bien recueilli la majorité des voix, autour de 50 %... contre environ 37 % (40 % en incluant les trotskystes) pour la gauche (PCF + FGDS + divers gauche).
Il reste le cas des centristes du PDM (la mouvance de Jean Lecanuet, en jaune dans le tableau ci-dessus, en bleu clair sur les diagrammes semi-circulaires), qui refusent de soutenir systématiquement le gouvernement, mais qui n'ont pas moins refusé de rejoindre l'alliance de gauche. Lorsqu'il y a eu second tour, les voix des centristes se sont plutôt portées sur les candidats gaullistes. (J'ajoute qu'au vu du profil des élus de ce camp, il serait de nos jours plutôt classé à droite par les oracles de la gauche intellectuelle...)
Les invités auraient aussi pu évoquer la règle d'âge (pour pouvoir voter) : en 1968, elle était de 21 ans. Or, il ne fait pas mystère que, parmi les millions de manifestants anti-gaullistes de mai-juin 1968, il s'en trouvait beaucoup qui n'avaient que 18, 19 ou 20 ans. Le corps électoral de juin 1968 était plutôt de droite... et sans doute plus à droite que la société française. Enfin, il ne faut pas négliger le "vote de la peur" de la part de certains Français, pas forcément marqués à droite, mais que la tournure des événements de 68 a inquiétés.
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mardi, 20 août 2024
L'épouse aveyronnaise du résistant parisien
Sous la plume de Philippe Broussard, Le Monde vient d'achever la publication d'une passionnante série d'articles consacrée à un mystérieux photographe, qui a pris, durant l'Occupation, des centaines de clichés en plein Paris (ce qui était interdit).
Mort en déportation (sans doute à cause d'une dénonciation...), Raoul Minot n'a pas eu droit au statut de résistant, réclamé en vain, après-guerre, par son épouse, Marthe, que l'un des articles présente comme étant « originaire de l'Aveyron ». On n'en sait guère plus sur elle, si ce n'est qu'elle a été enterrée dans le caveau de la famille de son époux, à Montluçon, dans l'Allier.
Voilà qui fait des deux membres du couple de nouveaux exemples des habitants du Massif central "montés" à Paris. En effet, Marthe Julienne Nathalie Minot est née Bedos, le 8 février 1894, à Pont-de-Salars, dans l'Aveyron, pas très loin de Rodez.
Les parents étaient installés dans le village de Crespiaguet, situé dans la partie sud-ouest de la commune. Il semblerait que d'autres membres de la famille (du côté paternel ou maternel) aient vécu dans les environs, entre Le Vibal, Arvieu et Ségur.
Notons que Marthe a eu sept frères et sœurs (tous plus âgés qu'elle), situation assez courante dans les familles aveyronnaises de l'époque. D'après Geneanet, deux de ses frères se sont mariés à Paris, l'un en 1915, l'autre en 1917 (ce dernier avec une fille Laur, peut-être elle aussi d'origine aveyronnaise). Les deux frères semblent avoir été associés (à Paris) en tant que marchands de vin. Marthe a-t-elle rejoint ses frères "montés" à la capitale avant elle ou bien sont-ils tous les trois partis ensemble ? Mystère. Le décès de leur mère, deux semaines après la naissance de la petite dernière (Marthe), en février 1894, a dû jouer un rôle. Le père, Louis Bedos, s'est remarié en 1897, avec Marie Bouloc, elle aussi habitante de Pont-de-Salars, mais issue d'un autre lieu-dit, Camboulas, très proche de Crespiaguet.
Pour la petite histoire, je signale que le père de Marthe a eu d'autres enfants avec sa seconde épouse. Deux sont signalés par Geneanet. Il en manque au moins un : Gabriel Marie Joseph Bedos -orthographié Bédos par le dictionnaire Maitron- né en 1898, au Monastère, mort il y a bientôt 80 ans, le 26 août 1944. Ce demi-frère de Marthe était lui aussi résistant ! Sur le site Mémoire des hommes, il est marqué comme victime civile... alors qu'une plaque commémorative lui est dédiée, à Montmorency :
Un décès a peut-être aussi contribué à la migration de Raoul Jean Minot, futur époux de Marthe Bedos. L'article du Monde précise qu'il a été engagé au Printemps en mars 1911. Comme il est né (à Montluçon) en septembre 1893, il était à l'époque âgé de 17 ans. D'après Geneanet, on ne trouve plus trace de ses parents, Marie-Antoinette et Jean, après 1907. Le père (né en 1856) étant mécanicien tourneur, il ne serait pas surprenant que son décès soit survenu autour de la cinquantaine.
Un décès précoce d'au moins un des parents, associé sans doute à une grande précarité économique, expliquerait le départ pour Paris de ces jeunes habitants du Massif Central. Le grand magasin a peut-être joué le rôle de site de rencontre...
Quoi qu'il en soit (toujours d'après Geneanet), le mariage aurait été conclu en 1921, en banlieue (ouest) parisienne, à Louveciennes, aujourd'hui dans les Yvelines, à l'époque en Seine-et-Oise. Cette commune n'est pas très éloignée de Courbevoie, sise dans les Hauts-de-Seine, à l'époque dans le département de la Seine. C'est là que le journaliste du Monde a retrouvé la trace du couple, entre les deux guerres mondiales.
Marthe Bedos-Minot est décédée en 1960. Philippe Broussard n'est parvenu à retrouver qu'une petite-nièce et un petit-neveu. Pourtant, le couple a bien eu une fille, Jacqueline. Qu'est-elle devenue ? Est-elle partie vivre à Montluçon avec sa mère ou bien est-elle restée en région parisienne ? En cherchant sur la toile, je suis tombé sur une Jacqueline Minot, née en 1926, morte en 2023 dans le XIVe arrondissement de Paris. Son année de naissance est compatible avec l'existence du couple. L'identité déclarée au moment du décès indique qu'elle n'était pas mariée. Mais, a-t-elle eu des enfants ?
Une dernière question se pose. Marthe a-t-elle joué un rôle dans le fantastique travail de documentation réalisé par son époux ? A plusieurs reprises, le journaliste du Monde souligne qu'il paraît peu probable que Raoul Minot ait agi seul. Il évoque la possibilité de la participation de gendarmes résistants. Mais, sur au moins une des photographies, on peut voir une main gantée tenir le coin d'une affiche, permettant au photographe de réussir son cliché.
Cette main ne pourrait-elle pas être celle de Marthe ? Quoi de plus innocent en effet qu'un couple en promenade (peut-être même avec une enfant) ? Cela pourrait constituer une bonne couverture pour masquer une activité photographique interdite.
Aussi riche soit-elle, la série d'articles du Monde ne répond pas à toutes les questions... On attend la suite !
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lundi, 19 août 2024
Highway 65
Cette autoroute israélienne se trouve dans le nord du pays, coincée entre Liban, Cisjordanie, mer Méditerranée et lac de Tibériade. On la voit à plusieurs reprises dans le film, lorsque l'héroïne (Daphna) se trouve sur le balcon du logement qu'elle occupe à Afoula. Pour elle, cette autoroute symbolise peut-être la possibilité d'un retour à Tel-Aviv, d'où la policière a été récemment mutée.
La police locale ne semble pas très ardente au travail... et surtout veille à respecter les notables du coin. On le constate notamment avec l'affaire de la disparition d'une femme, Orly, peu avant le dixième anniversaire de la mort de son mari, fils d'un entrepreneur du BTP qui semble connaître tout le monde.
Le problème est que personne n'a signalé la disparition de la veuve (qui n'en est pas à sa première tentative), alors que son téléphone portable a été trouvé au bord d'un champ de maïs. On fait comprendre à la policière qu'il ne faut pas trop embêter la famille de l'entrepreneur. Ses deux fils sont jadis partis se battre au Liban. L'un n'est pas revenu, l'autre, qui travaille dans une pépinière, a été marqué à vie.
Un mystère plane, donc, que les patients et laborieux efforts de Daphna vont tenter d'éclaircir. Le problème est que la manière dont l'enquête est menée n'est pas très réaliste. Je ne suis pas au fait des procédures en Israël, mais il me semble tout de même que la policière enfreint pas mal de règles (de procédure comme de prudence). Je suis finalement arrivé à la conclusion que le réalisme n'était pas le souci de l'auteure du film, l'enquête n'étant qu'un prétexte pour aborder certaines thématiques.
Au cœur de l'intrigue se trouve la place des femmes dans cette ville provinciale qui semble fortement marquée par la domination masculine. Les quatre personnages féminins un tant soit peu développés sont tous de potentielles victimes... tout en ayant la possibilité, à certains moments, de mener le jeu. Ainsi, la disparue, Orly, ravissante trentenaire, faisait tourner la tête de bien des hommes, mais était aussi un objet de convoitise. La policière Daphna se fait rapidement gifler au cours de son enquête, puis agresser par un motard. Mais elle peut menacer des hommes, voire les mettre en garde à vue. Sa supérieure hiérarchique est à peine mieux lotie. En tant que cheffe du poste de police, elle fait partie des notables, mais, quand l'entrepreneur de BTP vient lui faire la leçon dans son propre bureau, elle est obligée d'obtempérer. Quant à la belle-mère de la disparue (épouse du chef d'entreprise), elle symbolise la génération en apparence soumise, mais qui dispose de discrètes marges de manœuvre.
En parallèle est développée la thématique de la sororité (pour employer un terme à la mode). Plus le film avance, plus deux femmes qu'a priori tout oppose voient leurs profils se rapprocher. Il s'agit de la disparue (archétype de la jolie fille, en apparence un peu superficielle) et de la policière, célibataire sans enfant, dont la cinéaste a voulu faire, au départ, un personnage aussi peu glamour que possible : elle est mal coiffée, porte des lunettes à la Harry Potter, s'habille comme une demi-clocharde et mange vraiment salement, comme on prend bien soin de nous le montrer à plusieurs reprises. On comprend toutefois assez vite que Daphna est elle-même une jolie jeune femme, mais qu'elle s'oppose, par sa manière de vivre, aux stéréotypes de genre imposés aux femmes. Comme elle a aussi envie de vivre, de vibrer, il lui faut tout de même (parfois) faire des concessions... Petit à petit, la réalisatrice instille l'idée d'une quasi-gémellité entre Orly et Daphna.
Du coup, on comprend mieux pourquoi la manière dont l'intrigue policière est menée semble artificielle. Elle n'est qu'un cadre pour un propos militant. C'est tout à fait louable, mais cela ne fait pas forcément un bon film.
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dimanche, 18 août 2024
City of Darkness
Cette "cité de l'obscurité" (au sens littéral comme au sens figuré) est un quartier de la mégapole hongkongaise. Celle-ci a la forme d'un petit archipel, la péninsule de Kowloon se trouvant sur la partie continentale, au sud de Shenzhen.
On y trouvait (jusqu'aux années 1990) un gigantesque bidonville, étalé (en hauteur) sur une quinzaine d'étages. Le contrôle de cette "citadelle" (et des trafics qui y prospéraient, en toute impunité) fut l'objet de la rivalité entre deux bandes, l'une finissant par triompher de l'autre, des années auparavant. Dans le même temps, un autre gang a mis la main sur le reste de la ville chinoise.
Deux trames historiques s'entremêlent donc dans ce film. A l'arrière-plan se trouve l'époque de lutte pour le contrôle de la citadelle, dans les années 1950. La majorité de l'action se déroule toutefois à la fin des années 1980, à une époque où l'on comprend que la présence britannique va tôt ou tard prendre fin. L'autonomie dont jouit la citadelle est du coup menacée.
Celle-ci est un véritable personnage de l'histoire, pas uniquement un (vertigineux) décor. C'est à la fois un labyrinthe (pour qui n'en connaît pas la géographie), un lieu de vie, de mort, de chaleur humaine... et une verrue urbaine, marquée par le manque de lumière naturelle et une grande insalubrité.
Soi Cheang (auquel on doit aussi le surestimé Limbo) réussit à rendre crédible sa reconstitution du quartier détruit. Il en tire très bien parti dans la construction de son film.
Mais ce n'est pas forcément cet aspect qui va marquer les spectateurs. A l'écran, on est surtout frappé par la virtuosité des scènes de combat, que ce soient les anciennes (se déroulant trente ans auparavant) ou les nouvelles (celles des années 1980). Des jeunes voyous aux chefs de triade, ça castagne sec. On résout ses problèmes à coups de poings, de pieds... éventuellement de couteaux. Ce n'est qu'à l'ultime fin que l'on voit débarquer des armes à feu, entre les mains de personnages montrés comme foncièrement déloyaux.
Dans ce monde en apparence sans foi ni loi, il existe pourtant des règles, dont va profiter un jeune réfugié (sans doute venu de Chine communiste). Il s'embrouille d'abord avec la triade de "Mr Big", avant d'atterrir dans la citadelle, "sécurisée" par les troupes de "Cyclone"... qui, étonnamment, va prendre le jeune homme sous son aile.
Pour celui qu'on surnomme dans un premier temps "crâne d’œuf", l'existence au sein du bidonville représente une renaissance. Il y recouvre ses forces, trouve du travail, réussissant à mettre de l'argent de côté... et se fait même des amis, le patron des voyous incarnant une figure paternelle de substitution. Tous ces aspects sont bien mis en scène, tout comme la description de la vie quotidienne des habitants de la citadelle, majoritairement commerçants et artisans (avec leurs employés, plus ou moins bien traités). Cela donne au film une épaisseur sociale inattendue.
Le passé finit par ressurgir et les bastons reprennent, encore plus sanglantes qu'au début. Certes, c'est remarquablement chorégraphié, filmé, monté... mais, au bout d'un moment, on tombe dans l'exagération, la vraisemblance ayant visiblement sombré dans les égouts de la cité. C'est un peu le retour de l'effet Chevaliers du Zodiaque, manga dans lequel, à de fréquentes reprises, les héros frôlaient la mort, se vidaient de leur sang, avant de finalement administrer une raclée au super-méchant qui semblait invincible auparavant.
Ceci dit, dans ce film-ci, les défauts sont nettement moins présents que dans Limbo. C'est plus rigoureux, plus riche aussi sur le plan scénaristique... et toujours splendide sur le plan visuel.
15:46 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 14 août 2024
Mon Ami le petit manchot
Comme il existe la World Music, au cinéma, on pourrait parler parfois de World Movies, ces "objets gentils" conçus pour plaire au plus grand nombre, en général tournés en anglais, autour d'une vedette, avec une histoire un peu cucul-la-praline. Telle était ma crainte en allant voir ce film, se déroulant entre les côtes du Brésil et celle du sud de l'Argentine... mais où tout le monde parle anglais/français (selon la version du film que l'on voit).
La première séquence m'a sorti de mes idées préconçues. Tout d'abord, j'ai cru que je m'étais trompé de film, tant ce qui était montré à l'écran ne cadrait pas avec l'histoire d'amitié trans-spéciste que je m'attendais à voir. L'action se déroule 20-25 ans avant le cœur de l'intrigue et elle a un impact sur la suite, que je ne peux révéler. J'ai trouvé assez gonflé de commencer par là. Le jeune public risque d'être un peu perturbé mais, dans la salle où j'ai vu le film, il a été accroché par cette entrée en matière peu conventionnelle.
On finit par tomber sur ce bon vieux pêcheur brésilien, Jean Reno, rescapé du Grand Bleu... et se portant au secours d'un manchot de Magellan victime d'un dégazage sauvage. Il ne le fait pas parce qu'il est membre d'une ONG environnementale, simplement par humanisme dirais-je... mais aussi parce que l'animal qu'il recueille est un substitut (la mise en scène finissant même par suggérer la possibilité d'une réincarnation... mouais).
La relation qui se noue entre le vieil homme désabusé et le jeune animal égaré est à la fois drôle et touchante... inspirée d'une histoire vraie. DinDim (comme le surnomme une gamine du coin) se met tout le monde dans la poche, pas uniquement le pêcheur... mais il finit par partir.
Le scénario s'étoffe avec la présence d'une équipe de scientifiques, en Argentine. A la stupéfaction de tout le monde, on découvre que le petit manchot est capable d'effectuer plusieurs milliers de kilomètres pour regagner alternativement les deux mêmes endroits : sa colonie d'origine (lors de l'été austral, c'est-à-dire à partir de décembre, dans l'hémisphère Sud) et le village de pêcheurs brésiliens, plutôt en automne-hiver.
Il y a donc un aspect documentaire dans ce feel good moovie. On a filmé de véritables manchots (une dizaine rien que pour incarner DinDim, d'après le générique de fin). Les animaux sont montrés en colonies, sur terre, mais aussi dans l'eau, ce qui est l'occasion de faire de très belles images.
Plusieurs dangers guettent le manchot : les prédateurs aquatiques, l'épuisement lors de ses longues migrations, les filets de la pêche industrielle... et l'intérêt qu'il suscite auprès des scientifiques, divisés quant à l'attitude à adopter vis-à-vis de lui : le laisser évoluer dans son environnement naturel... ou le déplacer pour pouvoir l'observer tout à loisir ?
C'est parfois vraiment émouvant. Il arrive qu'une poussière se glisse dans l’œil. A proximité de moi, une maman ayant accompagné ses deux filles a fini par se moucher. Mais je rassure tout le monde : on a ménagé une fin heureuse, à la fois à l'écran et dans le texte d'accompagnement final. Il est suivi de quelques images des véritables personnages.
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mardi, 13 août 2024
Joséphine Baker
On reparle de l'artiste engagée à l'occasion du 80e anniversaire du débarquement de Provence, au cours duquel, rappelons-le, les troupes anglo-américaines ont été épaulées par la nouvelle armée française, issue de la fusion de plusieurs unités de résistants (à divers degrés). Membre de la France Libre, Joséphine Baker a accompagné ces troupes et a même chanté pour elles, comme à Belfort (dans le nord-est de la France métropolitaine), comme le rappelle un récent article du quotidien L'Est Républicain, illustré par une photographie dont voici un détail :
(Outre la présence des drapeaux, à l'arrière-plan, vous noterez, au premier plan, celle d'une floppée de bouteilles d'un liquide sans doute alcoolisé, signe que la soirée avait été placée sous le signe de la détente festive.)
Pour en savoir plus sur cette grande dame (dont l'action ne s'est pas limitée à la Seconde Guerre mondiale), on peut profiter de la diffusion, cet été, sur France Inter, d'une série (en neuf épisodes) consacrée à la chanteuse-résistante-militante des droits humains.
Si l'on manque de temps, on peut se contenter d'un documentaire, Joséphine Baker, première icône noire, qu'Arte rediffuse bientôt et qui est déjà disponible sur son site internet et ce jusqu'au 31 août prochain.
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lundi, 12 août 2024
Petit Panda en Afrique
Comptant peut-être profiter du succès du Kung Fu Panda de DreamWorks (dont le quatrième volet est sorti au printemps dernier), cette coproduction internationale nous transporte entre Chine et Afrique australe.
Le début de l'intrigue se déroule dans le "pays du milieu", dans un village de pandas pelucheux qui cohabitent avec... des dragons. Ceux-ci ne mettent pas le feu au village, mais contribuent à faire tomber la pluie. L'ambiance est donc un mélange de réalisme (les pandas représentant des "Chinois moyens") et de féérie, le tout sur fond de musique traditionnelle asiatique.
On suit davantage les enfants que les adultes (signe que le film s'adresse davantage aux premiers qu'aux seconds). Il est question d'amitié mais aussi d'acquisition de maturité... et de courage, le petit panda partant à la recherche de son amie dragonne, qui se fait enlever.
La séquence du trajet, sur le bateau d'un babouin commerçant, est plutôt réussie, aussi bien visuellement qu'au plan de l'humour.
Pendant ce temps-là, en Afrique, on découvre un royaume fonctionnant sur le principe d'une régence : le couple de souverains lions est mort, d'une manière pas totalement claire. L'héritier du trône, un lionceau immature et capricieux, gouverne sous la férule de son oncle, redouté par tous les habitants de la savane... y compris les hyènes, réfugiées dans la forêt voisine et en conflit avec le royaume des lions. L'idée d'enlever un petit dragon vient du régent, qui a des projets en tête...
C'est donc une histoire d'amitié, de courage et d'ambition, assez classique. On apprend aux jeunes qu'il faut aider un(e) ami(e) dans le besoin et qu'il ne faut pas se décourager devant les épreuves de la vie. Le scénario privilégie aussi la négociation à la violence pour résoudre les conflits.
De belles valeurs sont mises en avant, appuyées par une animation assez réussie, en particulier les pandas et les hyènes, celles-ci très mignonnes et, une fois n'est pas coutume, présentées de manière sympathique. Ce n'est toutefois pas aussi brillant que les productions Pixar ou DreamWorks. Un œil avisé pourra distinguer, ici ou là, quelques défauts dans les mouvements ou les décors, mais c'est globalement du bon boulot. Je regrette quand même la quasi-absence de double niveau de lecture. Si les enfants aiment le film (qui apprendra aux tout-petits à reconnaître certains animaux), les adultes risquent d'un peu s'ennuyer.
P.S.
Le fond de l'histoire n'est pas tout à fait innocent. C'est grâce à des animaux chinois (un panda et une dragonne) que les peuples africains en conflit (ici principalement les lions et les hyènes) vont apprendre à cohabiter pacifiquement. On pourrait être tenté d'y voir une justification de la présence chinoise en Afrique, de plus en plus importante ces dernières années.
12:19 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 10 août 2024
Borderlands
Tourné en plein covid (comme en témoigne abondamment le générique de fin), ce film sort presque confidentiellement, en plein été. A priori, ce n'est pas bon signe... et pourtant, la distribution est alléchante, avec Kevin Hart (en super-soldat), Cate Blanchett (en chasseuse de primes bad ass... et très maquillée), Jaimie Lee Curtis (en scientifique un brin loufoque) et la jeune pousse Ariana Greenblatt (vue l'an dernier dans 65 - La Terre d'avant).
Des individus qu'au départ tout sépare vont constituer une improbable troupe, pas très disciplinée, assez gouailleuse : une gamine rebelle aux étranges pouvoirs, un soldat as de la gâchette, une chasseuse de primes dont l'apparente désinvolture masque des failles profondes, un grand balèze, supposé sadique... et un petit robot porté sur la plaisanterie.
Cette famille recomposée (ou cette bande de faux potes - au départ) n'est pas sans rappeler Les Gardiens de la galaxie (en moins bien toutefois). L'habillage du film quant à lui fait immanquablement penser à l'univers de Star Wars, avec une touche de Mad Max.
J'ai eu l'impression qu'on avait cherché à copier ce qui avait marché dans plusieurs franchises populaires, pour en créer une nouvelle. Alors, oui, les effets spéciaux sont chouettes, mais, au niveau du scénario comme de la crédibilité des situations, la copie ne vaut pas les originaux.
Dans la première moitié du film, le mélange d'action et d'humour, mâtiné d'effets spéciaux, fonctionne. Dans la seconde moitié, cela se prend un peu trop au sérieux et vise -parfois- l'épique, sans forcément l'atteindre. Les acteurs (même Cate) prennent un peu trop la pose. Comme aux manettes il y a Eli Roth (auquel on doit, entre autres, Hostel et Death Wish), c'est plutôt du bon boulot, mais, là encore (comme dans d'autres œuvres commerciales sorties cet été), certains rebondissements surgissent de manière trop abrupte. Il aurait fallu davantage développer (ou moins couper) certains fils narratifs secondaires.
Au fait, c'est l'histoire d'une gamine qui serait la clé pour accéder à l'Arche, un endroit mythique qui abriterait les secrets d'une brillante civilisation disparue. L'entrée se trouverait sur la planète Pandora, dont est originaire la chasseuse de primes, chargée de retrouver la gamine pour le compte d'un méchant industriel. Sa rencontre avec les autres protagonistes va la faire évoluer... jusqu'à un point assez inattendu ma foi (pour qui ne connaît pas le jeu vidéo d'origine).
21:54 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 08 août 2024
Largo Winch (film et BD)
Sans doute inspiré par la récente sortie en salles de la troisième adaptation cinématographique (Le Prix de l'argent), le service de programmation de la chaîne TMC a eu la bonne idée de rediffuser le premier film issu de la célèbre bande dessinée, lundi dernier. (Il est encore visible en séance de rattrapage pendant quelques jours, sur la plateforme TF1+.)
Pour moi, ce fut une découverte, qui m'incita à lire aussi le diptyque d'origine, les deux premiers volumes de la série, intitulés L'Héritier et Le Groupe W.
On a parfois accusé Jérôme Salle (réalisateur) et Julien Rappeneau (co-scénariste) d'avoir trahi l’œuvre de Jean Van Hamme et Philippe Francq. En effet, le film s'émancipe quelque peu des deux tomes de la bande dessinée... mais ce n'est pas forcément un mal.
Les grands traits de l'intrigue n'ont pas été modifiés. Le PDG multi-milliardaire est, dans les deux cas, mort apparemment de manière non suspecte, avant qu'on ne découvre un assassinat masqué. Largo est bien son fils adoptif caché, originaire des Balkans. Il a reçu une éducation soignée, avant de se rebeller contre son pygmalion de père. Il finit par accepter son héritage et rencontre de fortes oppositions, qui vont jusqu'à des tentatives de meurtre. Un complot est à l’œuvre pour lui faire perdre les parts du groupe W qu'il possède. Enfin, s'il convient de se méfier de presque tout le monde, Largo va quand même pouvoir s'appuyer sur de rares personnes de confiance, pour déjouer le complot.
Les modifications interviennent à trois niveaux : l'époque des faits, les lieux de l'action et certains personnages.
Commençons par l'époque... ou plutôt LES époques. Si les deux tomes ont été publiés respectivement en 1990 et 1991, le film lui date de 2008. Entre la fin de la Guerre froide et la période de guerre civile irakienne, post 11 septembre, les contextes ne sont pas les mêmes.
Voilà qui explique sans doute le changement des lieux. En 1990, l'empire de Nerio Winch est centralisé à New York, cœur du capitalisme mondial triomphant. Dix-huit ans plus tard, l'émergence de l'Asie orientale (et, peut-être, le fait que le film soit une coproduction hongkongaise...) explique la localisation à Hong Kong.
L'autre grand changement géographique porte sur l'espace où évolue Largo avant d'apprendre le décès de son père. Dans la bande dessinée, il s'agit d'Istanbul, où se déroule d'ailleurs une grande partie de l'action du volume 1. Dans le film, on découvre Tomer Sisley au Brésil, où il fait la rencontre fortuite (croit-il) d'une charmante permanente d'ONG (incarnée par la délicieuse Mélanie Thierry).
Or, ce personnage-ci est absent de la bande dessinée, dans laquelle le héros se frotte principalement à des hommes. Il fait bien la rencontre de deux (ravissantes) jeunes femmes, à Istanbul, mais il s'agit de filles de diplomates (l'une britannique, l'autre états-unienne), qui elles sont absentes du film. Cela m'amène tout naturellement à la vision des femmes. De ce point de vue, la BD est clairement datée : à l'exception d'une assistante de direction âgée (mais qui a dû être très belle), elle ne met en scène que des "bombasses", dans des rôles subalternes (employées, secrétaires, rencontres d'un soir), même si la volontaire Charity sort un peu du lot. En revanche, Marilyn Apfelmond est une caricature de "poupée" : mince, blonde à forte poitrine, court-vêtue, un peu naïve, que l'un des personnages masculins fait boire avec la claire intention de la mettre dans son lit.
Au contraire, dans le film, plusieurs personnages de femme forte nous sont proposés : outre Naomi la traîtresse (qui n'est pas sans cœur), on croise notamment Ann Ferguson, le bras droit de Nerio, interprétée par Kristin Scott Thomas.
Le film est dynamisé par ses scènes d'action et des vues paysagères dans l'ensemble réussies. Mais, au niveau du scénario, clairement, la BD est plus forte. Du coup, je trouve que les deux se complètent bien.
22:01 Publié dans Cinéma, Livre, Loisirs, Télévision | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, télévision, télé, bd, bande dessinée, bande-dessinée
mercredi, 07 août 2024
Trap
Au cours d'un gigantesque concert (réunissant une quinzaine de milliers de spectateurs, majoritairement adolescents, parfois venus avec leurs parents), un impressionnant dispositif policier est mis en place. Même le FBI est présent, pour tenter de tuer/capturer "le boucher" un machiavélique tueur en série.
Il y a vingt ans, M. Night Shyamalan (dont les derniers films, Old et Knock at the cabin, n'ont guère suscité d'enthousiasme) nous aurait servi un huis clos étouffant, nous offrant une multitude de suspects, plus crédibles les uns que les autres, avec retournement complet de situation à la fin.
Tel n'est pas le cas ici (ce qui a peut-être déçu certains fans). Shyamy n'a pas eu envie de reproduire un schéma déjà utilisé, même si la première heure de ce thriller prend effectivement l'apparence d'un huis clos, dans un gigantesque complexe dont nous découvrons les arrière-cours... en suivant le tueur recherché, sur l'identité duquel ne plane aucun mystère.
Ce Cooper a les traits d'une "gueule d'ange", Josh Harnett, ex-tombeur de ces dames, dont, à l'occasion, on peut revoir le torse et l'abdomen... plutôt bien entretenus ma foi, même si l'on sent qu'au niveau des "poignées d'amour", le temps a fait son effet...
Pour certains, ce choix dans la narration et la mise en scène ne manquera pas d'être gênant. Le héros est une ordure, mais une ordure qui aime sa famille, en particulier sa fille Riley, pour laquelle ce papounet pompier a cassé sa tirelire : il s'est procuré deux places pour le concert de Lady Raven, une vedette de la pop qui semble être un mélange de Lady Gaga, Beyonce et Jennifer Lopez. Elle est interprétée (texte et chansons) par une certaine Saleka Night Shyamalan... eh, oui, l'aînée des trois filles du réalisateur, qui semble profiter de ce film pour tenter de donner un élan supplémentaire à la carrière de chanteuse et/ou d'actrice de sa progéniture. (La cadette est déjà réalisatrice.)
La première heure est une sorte d'attrape-moi-si-tu-peux. La profileuse du FBI semble avoir bien cerné la psychologie du tueur, mais elle n'en connaît pas l'apparence physique. C'est donc aux trois cents policiers, aidés de la reconnaissance faciale, de débusquer les pères trentenaires ou quadragénaires correspondant au profil. De son côté, Cooper (Coupeur ?... jeu de mots hélas sans aucun sens pour des oreilles anglo-saxonnes), une fois qu'il a compris qu'il était tombé dans un traquenard, doit développer des trésors d'ingéniosité pour échapper à une arrestation promise. C'est assez bien foutu, le suspens se mâtinant d'humour : Shyamalan pointe (gentiment) certains des travers du monde du spectacle et met en scène un tueur très organisé, tout en étant capable d'improviser. Le prédateur est devenu la proie, mais il n'est pas facile à attraper.
Si cela s'était limité à cette trame, venant de Shyamalan, le film aurait été un peu décevant. Mais, au bout d'une heure, dans des circonstances que je m'interdis de révéler, le cinéaste nous fait sortir du site du concert, avec des rebondissements à la clé. Il faut aussi s'attendre à ce que l'intrigue prenne un nouveau chemin dans la troisième partie, qui contient une révélation capitale.
Même si la fin n'est pas des plus originales, je trouve que Shyamalan a plutôt réussi son coup. Dans la salle pleine de djeunses à pop corn où je me trouvais, le public a été captivé.
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samedi, 03 août 2024
Les Fantômes
Ces fantômes sont parfois des morts, parfois des vivants. Les morts sont les victimes de la dictature de Bachar el-Assad, comme l'épouse et la fille unique du héros, dont il ne parvient pas à faire le deuil. Les vivants sont les rescapés des geôles syriennes... et certains de leurs anciens bourreaux, qui ont fui en Occident et tentent, sous une nouvelle identité, de s'y faire oublier.
Ce film prend la forme d'un polar, puisque le héros a rejoint un groupe clandestin, parmi les réfugiés en Europe (principalement en Allemagne), qui traque les anciens (?) serviteurs du dictateur sanguinaire, pour les faire juger. Dans le même temps, les rencontres faites par Hamid nous mettent en contact avec différentes catégories de victimes. Comme presque tout le monde se méfie de (presque) tout le monde (à cause des agents infiltrés), il est difficile de savoir si tel ou tel interlocuteur est sincère. S'ajoutent à cela les effets secondaires de la détention d'Hamid. Il peine à surmonter les séquelles des tortures qu'il a subies, cumulées au traumatisme de la perte de son épouse et de sa fille. Par moments il se demande (et nous aussi) s'il n'a pas perdu sa lucidité.
C'est plutôt bien joué, avec Adam Bessa en réfugié justicier mutique, pas encore prêt à nouer une nouvelle relation. J'ai surtout remarqué Tawfeek Barhom, vu il y a deux ans dans La Conspiration du Caire... et surtout remarqué naguère en chanteur de Gaza ! Il réussit parfaitement à semer le trouble concernant son personnage, un étudiant en chimie qui ne veut surtout pas retourner en Syrie... mais pour quelle raison exactement ? La scène la plus marquante est celle du déjeuner, qui le voit partager une table avec Hamid, censé le traquer discrètement. Le dialogue entre les deux hommes, en arabe et en français (la scène se déroule à Strasbourg), est plein d'ambiguïtés.
Il y a d'autres réussites dans ce film, comme la mise en scène de l'utilisation de l'espace dialogue d'un jeu vidéo en ligne pour communiquer secrètement à distance. J'ai aussi aimé la sorte d'enquête auditive menée par Hamid, qui commence par essayer de capter la voix actuelle du suspect (il n'a jamais vu le visage de son tortionnaire), puis récupère des enregistrements de témoignages d'autres rescapés de la même prison. Le moindre détail peut être important. Ce n'est pas tout à fait du niveau du Chant du loup, mais c'est quand même bien foutu.
Le film, inspiré nous dit-on d'une histoire vraie (je dirais plutôt de plusieurs histoires vraies, dont celle d'Omar Alshogre et celle du tortionnaire Abdulhamid C.) est minutieusement construit, avec un évident souci du détail, essayant peut-être de pallier le manque de moyens. Les personnages secondaires sont assez bien construits.
Je n'aurais peut-être qu'une réserve à émettre : quelques longueurs, le film se traînant un peu inutilement par moments (durée officielle : 1h40... au moins 2h en ressenti). Mais il est bien construit, autour d'une histoire forte.
P.S.
La traque des criminels syriens se poursuit. Récemment, c'est aux États-Unis qu'elle a abouti.
20:18 Publié dans Cinéma, Politique étrangère, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 02 août 2024
Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain
L'été est l'occasion de ressortir en salle de "bons vieux films", soit parce qu'ils ont été restaurés, soit à l'occasion d'un anniversaire... ou, pour le cas qui nous intéresse, en raison de la tenue des Jeux Olympiques d'été à Paris. Le film véhicule une certaine image du quartier de Montmartre, déjà un peu datée à l'époque de sa sortie (2001... comme le temps passe).
Dès le début, on est pris par la voix de conteur d'André Dussolier, par les effets comiques, par la beauté de certains plans et la nostalgie douce qui émane de l'ensemble.
Revoir ce film est l'occasion de vérifier que la distribution était impressionnante. Aux côtés d'Audrey Tautou et de Mathieu Kassovitz évoluaient Isabelle Nanty, Armelle, Claude Perron, Yolande Moreau, mais aussi Rufus, Jamel Debbouze, Dominique Pinon, Urbain Cancelier, Maurice Benichou... et tant d'autres encore.
J'adore cette histoire parce qu'elle met en scène, au départ, deux perdants du monde contemporain : un jeune employé de sex shop passionné par les photomatons, se déplaçant à mobylette (sans casque !) et une jeune serveuse, orpheline de mère, amoureuse des petits plaisirs quotidiens... et à l'âme justicière.
Le film est truffé d'inventions, au plan scénaristique comme au plan visuel. On savoure les stratagèmes élaborés par Amélie pour venir en aide à ses contemporains et l'on est impressionné, plus de vingt ans après, par la qualité des effets numériques, par exemple quand Amélie se liquéfie (au propre comme au figuré) dans le restaurant où elle travaille, ou quand le mobilier de sa chambre s'anime, une fois qu'elle est endormie, ou encore quand quatre versions de Ticky Holgado (hélas prématurément décédé) rabrouent Nino Quincampoix.
J'aime aussi la progression laborieuse de cette histoire d'amour, follement romantique, qui débouche sur un moment d'une beauté absolue, sans musique ni dialogue, sur le seuil d'un appartement parisien.
Cette opportune ressortie offre bien plus de bonheur que la plupart des nouveautés qui débarquent dans nos salles obscures.
P.S.
A (re)voir aussi : Paddington. Mon impression de 2014 était bonne... et j'ai de nouveau passé un très bon moment.
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mercredi, 31 juillet 2024
Largo Winch - Le prix de l'argent
Je ne suis pas un lecteur de la bande dessinée d'origine (scénarisée par Jean Van Hamme), ni un spectateur des précédentes adaptations cinématographiques. Mais j'apprécie le comédien Tomer Sisley (vu notamment dans les séries Balthazar et Vortex)... ainsi que les moments passés en zone climatisée, par temps caniculaire. (Je me demande d'ailleurs si ce ne sont pas les récents succès télévisuels de l'acteur-vedette qui ont incité les producteurs à retenter l'aventure du long-métrage.)
Première surprise : cette coproduction, internationale dans son financement, son tournage et sa distribution, est projetée en version multilingue, le français se mêlant à l'anglais, au thaï et au birman.
J'ai trouvé la majorité des acteurs plutôt bons, avec une mention spéciale pour James Franco, qui semble avoir éprouvé un plaisir évident à incarner le super-méchant de l'histoire. Sisley fait le job, plus musculeux que jamais, tandis que Clotilde Hesme apporte un peu de subtilité, avec un personnage plus riche qu'il n'y paraît. La bonne surprise vient d'Elise Tilloloy, dont j'aurais pu jurer qu'elle était québécoise de naissance... eh bien non ! Elle a réussi à me le faire croire et, rien que pour cela, je lui tire mon chapeau. De surcroît, son personnage est assez drôle, bien qu'un peu cliché.
C'est d'ailleurs le principal défaut de ce film, qui accumule pas mal de poncifs, tant au niveau des relations entre les personnages que dans la contextualisation de fond. Ainsi, il est évident que l'assistante de Largo en pince (secrètement ?) pour son patron (comme Pepper Potts pour Tony Stark dans Iron Man). Il est tout aussi évident qu'entre l'influenceuse altermondialiste casse-couilles (pléonasme ?) et le capitaliste en cavale, l'hostilité du début va se muer en association, puis en amitié.
Je pourrais aussi m'amuser à établir la liste des invraisemblances qui émaillent l'intrigue, comme cette voiture accidentée tombée dans une rivière, qu'on ne retrouve pas (ce qui, par la suite, ne semble poser de problème à personne) ou encore le fait que Largo, après avoir assommé l'un des méchants gardiens d'une mine (c'est son côté chevaleresque), n'en subisse aucune conséquence, un trio d'infiltrés (peu discrets) se permettant même de filmer l'activité de la mine sans se faire repérer.
Ma (coupable ?) indulgence vient peut-être du fait que l'action est resserrée (à tel point que certains rebondissements surviennent parfois de manière trop abrupte), ou parce que les scènes de baston et de poursuite sont bien filmées, la musique (un peu tonitruante) accompagnant pertinemment cette meringue survitaminée.
Au vu de ce qu'on nous a proposé depuis dix-quinze ans en matière de films d'espionnage ou d'action, c'est une œuvre de gamme moyenne, pas nulle mais pas enthousiasmante non plus.
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mardi, 30 juillet 2024
Se cultiver avec Radio France
J'écoute la radio principalement en déplacement, qu'il soit professionnel ou personnel. Je recours aussi au podcast (que l'on a naguère tenté d'appeler balladodiffusion). Cet été, deux des radios publiques proposent, en exclusivité ou en rediffusion, des programmes fort intéressants.
Commençons par la moins connue, France Culture. En semaine, actuellement, dès 9 heures, on peut écouter Les Grandes Traversées. Le florilège en cours de diffusion est centré sur Al Capone, mais l'on peut aussi écouter avec profit ceux qui l'ont précédé, consacrés à Indira Gandhi puis Mohamed Ali.
A 12h, pas besoin de changer de radio. On nous propose une demi-heure quotidienne sur Pierre Mendès France, dans le cadre du programme Avoir raison avec... Le parcours de celui qui fut, entre autres, un bref et efficace chef de gouvernement sous la IVe République, est riche d'enseignements.
En revanche, à 13h30, il faut basculer sur France Inter, pour profiter des rediffusions de Rendez-vous avec X, un programme parfois un peu trop complotiste à mon goût, mais souvent nourri de sources pertinentes.
A 14h, on retourne sur France Cul', pour Mécaniques du journalisme. Je recommande tout particulièrement l'épisode sur Bellingcat.
A 15h, on repasse sur Inter, pour Face à l'histoire, de Philippe Collin. Il vient de nous régaler avec « Résistantes », qui met en valeur l'engagement de Lucie Aubrac, Renée Davelly (chanteuse), Geneviève de Gaulle (nièce de Charles), Simonne Mathieu (plus connue comme joueuse de tennis) et Mila Racine. Depuis peu, il nous propose la rediffusion du « Fantôme de Philippe Pétain » un ensemble de dix épisodes qui croise les regards des historiens à la fois sur le Maréchal et le régime de Vichy. (Les séries consacrées à Vladimir Poutine et Jean-Marie Le Pen méritent aussi le détour.)
A celles et ceux qui n'ont pas la possibilité d'écouter en direct, deux possibilités s'offrent : les redifs du soir, à 20h30 ou 21h... ou bien le podcast, meilleur ami de l'internaute peinant à se plier aux contraintes d'une grille horaire.
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samedi, 27 juillet 2024
Le Comte de Monte-Cristo
Un mois après sa sortie, le film fait encore (presque) salle comble à Rodez. C'est, avec Un P'tit Truc en plus, Vice Versa 2 et Moi, moche et méchant 4, l'un des gros succès de ces dernières semaines.
Les trois heures passent comme un rêve. C'est prenant du début à la fin, pour différentes raisons. Il y a bien sûr l'histoire d'amour contrariée entre Edmond et Mercédès. Pierre Niney est parfait en jeune homme amoureux, un poil moins convaincant en ex-taulard revanchard, même s'il tient son rôle. Anaïs Demoustier a dû bénéficier d'un maquillage exceptionnel (ou de trucages numériques de pointe) pour paraître aussi jeune dans la première partie. Dans la seconde, elle n'est pas toujours à son aise, en particulier dans la grande scène des retrouvailles (vers la fin), dont j'ai du mal à déterminer si elle a été mal écrite ou mal jouée.
Il faut signaler la pléiade de seconds rôles, qui volent parfois la vedette aux protagonistes : Bastien Bouillon, Laurent Lafitte, Patrick Mille (stupéfiant en Danglars), Adèle Simphal et Anamaria Vartolomei, dont on comprend sans peine qu'elle puisse subjuguer le fils de Mercédès. (Notons que la comédienne aurait plutôt le physique du rôle de Mercédès jeune, celle-ci étant, dans le roman, d'origine catalane, brune au teint mat.)
Cela m'amène aux complots, d'abord celui ourdi par le trio d'enfoirés, puis celui, bien plus élaboré, préparé minutieusement par cet inconnu maltais, le richissime comte de Monte-Cristo. C'est feuilletonnesque à souhait.
Le roman de Dumas est suffisamment foisonnant pour enrichir le scénario. Il a plutôt fallu procéder à des coupes, nous privant ainsi des aventures de Dantès évadé en compagnie d'une bande de contrebandiers. Delaporte et De La Patelière ont aussi apporté des modifications à la trame d'origine. Par exemple, chez Dumas, ce n'est pas à cause du comportement de sa sœur que le substitut du procureur s'engage dans le complot, mais parce que son père est un bonapartiste non repenti. Dans le roman, il n'y a pas de sauvetage de demoiselle en détresse en mer... mais je reconnais que, dans le film, la scène a de la gueule.
Ces modifications ne m'ont pas gêné. Si l'on veut adapter en détail le roman d'origine, c'est le format d'une série qu'il faudrait choisir. Ici, le pari est tenu, celui de nous conter la perte d'un amour naissant, la chute dans un cachot (excellentes scènes de prison), l'évasion, la découverte du trésor et la machiavélique vengeance, qui ne va pas se dérouler comme prévu. C'est du grand et beau cinéma populaire, porté par une superbe photographie.
Des films français comme ça, j'en redemande.
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jeudi, 25 juillet 2024
Deadpool & Wolverine
Il a fallu attendre six ans (depuis Deadpool 2) pour revoir sur grand écran les aventures du super-héros malpoli, à la bisexualité égrillarde... et ça valait le coup.
Dès le début, on est cueilli par une séquence de combat ébouriffante, sanglante, grossière, comique au possible, avec un Deadpool à la fois pathétique et mal élevé, s'adressant à la caméra... ou faisant des commentaires sarcastiques (en voix-off). Ryan Reynolds (qui coproduit et a participé à l'écriture du scénario) profite de l'occasion pour (par l'intermédiaire de son personnage) casser du sucre sur le dos de Disney-Marvel, la multinationale ayant, depuis le précédent film, racheté la 20th Century Fox (qui produisait Deadpool).
Dès le départ, c'est bourré de clins d’œil aux "anciens" films de l'univers Marvel, les auteurs ayant visiblement une prédilection pour ceux qui ont été produits avant la prise de contrôle par Disney. Sans surprise, Logan est l'un des mieux traités... et ça tombe bien, puisque les scénaristes ont dû se creuser la tête pour en contredire la fin : il fallait ressusciter Wolverine... Merci le Multiverse !
Après un retour en arrière des plus réjouissants (qui voit Deadpool "essayer" différentes versions de Serval), la rencontre tant attendue finit par se produire, tout comme la baston. Les deux énergumènes vont finir par s'allier... ce qui ne les empêche pas, un peu plus tard, de "remettre ça" dans une voiture, une véritable boucherie tournée comme une scène d'amour un peu ardente...
C'est l'occasion de préciser que les effets spéciaux sont saisissants. On connaît déjà ceux mis en œuvre pour illustrer les pouvoirs des deux super-héros. Il faut y ajouter ceux déployés quand la méchante (Cassandra Nova) se trouve à l'écran. C'est imaginatif et brillant, tout comme la chorégraphie des bagarres. (Derrière la caméra se trouve Shawn Levy, auquel on doit, entre autres, Free Guy.)
Cette redoutable méchante apparaît dans l'un des univers parallèles, celui qui sert un peu de déchetterie de super-héros, dans une ambiance à la Mad Max.
On ne s'ennuie pas une seconde... et il faut bien tendre l'oreille, pour capter toutes les allusions et tous les jeux de mots (très souvent à connotation sexuelle). Ainsi, quand Deadpool évoque les 206 os du corps humain, c'est pour ajouter qu'il lui en pousse un 207e quand il regarde Gossip Girl, la série où a joué Blake Lively... compagne de Ryan Reynolds... et dont la plastique avantageuse n'a échappé à aucun des spectateurs d'Instinct de survie.
(Je recommande d'ailleurs de voir le film en version française, Ryan Reynolds étant doublé par l'excellent Pierre Tessier.)
Du coup, ce film d'action survitaminé, politiquement incorrect, dit deux-trois choses pas idiotes à l'occasion. Hugh Jackman s'est laissé convaincre de rempiler une dernière fois dans le rôle de Wolverine, même si l'on sent, dans quelques scènes, qu'il ne raffole pas du côté ambigu donné à la relation entre son personnage et Deadpool. Je pense que la générosité de son cachet (20 millions de dollars, Ryan Reynolds recevant lui 30 millions) a contribué à faire passer la pilule... et à l'inciter à retourner passer des heures sur le banc de muscu.
Je me suis ré-ga-lé.
P.S.
Bien entendu, il ne faut quitter la salle trop vite.
00:22 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
lundi, 22 juillet 2024
Santosh
C'est le prénom d'une jeune femme, veuve, dans le nord de l'Inde, sans doute dans une petite ville pas très éloignée de New Delhi. L'intrigue va faire évoluer les personnages dans cette région semi-rurale de l'Uttar Pradesh (me semble-t-il), jusqu'à Bombay.
Le début nous présente la future héroïne comme une victime. Elle est rejetée par sa belle-famille, qui n'a jamais apprécié son caractère indépendant, et, avec le décès de son époux, policier, elle risque de perdre tous les avantages afférents à la fonction, à commencer par l'appartement où le couple était installé.
C'est là que la réalisatrice-scénariste, Sandhya Suri, introduit un élément qui paraîtra, à certains spectateurs occidentaux, complètement absurde, mais qui est inspiré de la réalité : la veuve peut "hériter" du poste de son mari (ou d'une fonction approchante), à condition de suivre une formation à l'école de police.
On retrouve donc Santosh sans son sari, en uniforme de gardienne de la paix (« constable »). Inspirée par la rigueur morale de son défunt époux, elle pense pouvoir agir au nom du bien, tout en profitant des avantages de la fonction (un logement garanti, une paie régulière... et davantage de respect).
Elle va rapidement déchanter. Elle découvre, de l'intérieur, une police locale, dotée d'éléments féminins, un peu considérés comme des pièces rapportées. Elle remarque très vite des actes de corruption, des arrangements, sans parler des propos misogynes, racistes, homophobes...
L'histoire est un prétexte pour évoquer les inégalités qui frappent l'Inde : entre les hommes et les femmes (l'entrée dans la police étant, pour ses éléments féminins, un moyen d'échapper, au moins en partie, au poids du patriarcat), entre les différentes castes d'hindous (les plus mal lotis étant les dalits, ou intouchables), entre hindous et musulmans...
Une affaire criminelle va servir de détonateur. Une adolescente de quinze ans disparaît. On finit par retrouve son cadavre mais, comme c'est une intouchable, la police ne semble, au départ, pas pressée d'élucider l'affaire... sauf que les médias s'en mêlent et qu'on découvre que, parmi les relations de la victime, se trouve un jeune homme musulman.
Commence alors un véritable polar, dans lequel l'héroïne n'a pas toujours le beau rôle. Elle doit très vite décider de la manière dont elle va se comporter vis-à-vis des petits accommodements du quotidien policier. Elle est rapidement prise son son aile par une lieutenante expérimentée, rescapée des premières unités féminines et qui a su s'imposer dans un monde de mecs. Il faut signaler la performance des deux actrices, Sunita Rajwar dans le rôle de l'officier, et Shahana Goswami (Santosh), qui transmet beaucoup de choses à travers sa posture et son regard.
J'ai aussi noté une certaine habileté dans la mise en scène. A plusieurs reprises, la réalisatrice fait passer des informations avec une certaine subtilité. Je pense, par exemple, à une scène d'interrogatoire, au cours de laquelle l'un des personnages croit que cela est allé trop loin, avant d'être détrompée. Je pense aussi à la complicité qui s'installe entre les deux femmes, qui n'est pas sans sous-entendus.
Un pic de tension est atteint à deux reprises, la première fois lorsque Santosh, sortie de sa juridiction pour tenter de retrouver le principal suspect, habillée en civil, se risque seule dans une ville à majorité musulmane. La seconde fois montre la policière de nouveau seule, en zone rurale, alors que, sans le savoir, elle touche au but...
Santosh, simple agente de terrain s'obstine à découvrir le fond de l'affaire, alors que les autorités se contenteraient d'une résolution simpliste de l'enquête. La conclusion de l'intrigue policière, comme celle de l'histoire personnelle de l'héroïne, sont amenées avec finesse.
Avec Sons, voilà peut-être l'autre polar de l'été.
12:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéa, cinema, film, films, inde