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vendredi, 03 novembre 2023

Le Garçon et le héron

   Dans ma vie de (vieux) cinéphile ruthénois, il m'aura été donné le plaisir d'assister à la scène suivante : une file d'attente de spectateurs, avant la projection d'un film d'Hayao Miyazaki... en version originale sous-titrée, au CGR de Rodez ! 

   Il y a une dizaine d'années, j'étais sorti un peu déçu de la vision du Vent se lève. En 2019, l'espoir était revenu quand, au détour d'un documentaire consacré au Maître, il était annoncé la mise en chantier de son ultime long-métrage d'animation.

   Autant le dire tout de suite, Miyazaki conclut son œuvre cinématographique par l'un de ses plus beaux films, tant sur la forme que sur le fond. Sur le plan technique, l'animation est de grande qualité. On retrouve ce souci du détail, par exemple la volonté de transcrire au plus près de la réalité les mouvements des êtres vivants, humains comme animaux. Les décors sont soignés... et quel éblouissement dans certaines scènes ! Dès le début, on est cueilli par celle de l'incendie de Tokyo (hélas dramatique). La première discussion entre le garçon (Mahito) et le héron est aussi prétexte à virtuosité visuelle... assaisonnée d'humour. Dès qu'un oiseau est dans les parages (héron, pélican, perruche..), les humains se font chier dessus !

   Le film prend une ampleur supplémentaire quand le garçon pénètre dans le "monde magique", celui auquel mènent à la fois la Tour du mystérieux grand-oncle et la forêt proche, perçue comme dangereuse. Le héron perd sa grandiloquence du début pour devenir un acolyte gouailleur, tandis que surgissent de gigantesques perruches et d'adorables petites créatures blanches (des wakawaka ?).

   Que ce soit dans le "monde réel" (le Japon de la Seconde Guerre mondiale) ou dans le "monde magique", l'ambiance est celle du conte. Bien que baignant dans la culture japonaise, le film contient des références à des œuvres occidentales. Ainsi, les mamies qui accueillent le garçon à la campagne sont au nombre de sept... et de petite taille. L'une d'entre elles (la grincheuse) joue un rôle particulier dans l'intrigue. Dans le "monde magique", Mahito est guidé par une étrange jeune fille, sorte de décalque d'Alice... dont le véritable rôle sera compris par les spectateurs adultes avant même Mahito. Cette ambiance de conte n'est pas aseptisée (ce qui est conforme aux versions traditionnelles des histoires populaires). La nature est parfois cruelle, comme un troupeau de pélicans ou une armée de perruches, tous et toutes diablement affamés (comme les Japonais de 1944-1945 d'ailleurs).

   De plus, même si le héros est un garçon, on a quelques beaux personnages féminins : la mère, la tante, les mamies, la pêcheuse-pirate (au cœur d'une des séquences les plus brillantes) et cette étrange Himi. J'ai remarqué que c'est lorsque intervient un personnage féminin que l'animation se fait la plus virtuose.

   A l'arrière-plan se trouve le Japon de l'enfance de Miyazaki : impérialiste, militariste, affamé (sauf les élites)... et sur le point d'être vaincu par les États-Unis (qui n'apparaissent pas ouvertement dans l'intrigue). L'incendie dans lequel meurt la mère du héros est sans doute provoqué par l'un des bombardements de Tokyo, peut-être celui de mars de 1945 (rappel que, pour vaincre les nazis comme leurs alliés japonais, il a fallu parfois commettre des actions extrêmes... aucune guerre n'est propre). Le royaume des perruches, dictature populiste, est une référence au Japon impérial, le Maître des pierres (qui détient le pouvoir magique, mais ne gouverne pas réellement le pays) pouvant s'inspirer de la figure de l'empereur Hiro-Hito (dont Miyazaki nous livrerait là une version assez... édulcorée, pour être poli).

   A un autre niveau, le film est un drame psychologique. Le héros ne parvient pas à faire le deuil de sa mère, alors que débarque la nouvelle épouse de son père, déjà enceinte de ses œuvres ! Cela pourrait être lourdingue, excessivement mélo... mais, fort heureusement, ce n'est pas un film français. Miyazaki, à l'image de ce qu'on a pu voir récemment dans Le Château solitaire dans le miroir, insère subtilement le problème des relations familiales dans son intrigue fantastique.

   Au final, cela donne un film grandiose, que les (pas trop) petits peuvent se contenter de voir comme un conte, une histoire telle qu'on n'en raconte quasiment plus. Les adultes peuvent se plonger avec délectation dans les méandres des références et des possibilités d'interprétation, tout en profitant du spectacle visuel.

00:35 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mercredi, 01 novembre 2023

Sophie Cross

   France 3 vient de commencer la diffusion de la deuxième saison de cette série policière franco-germano-belge, dont l'action est censée se dérouler dans le Nord de la France métropolitaine. Auparavant, France Télévisions a rediffusé la saison 1, l'intégralité des six épisodes (durant chacun 1h30 à 1h45) étant disponible en ligne.

   Au début de la première saison, nous assistons à la disparition du fils unique d'un couple jeune et beau, composé d'un commissaire de police et d'une avocate. Celle-ci, ravagée par la culpabilité et le chagrin, décide de lâcher sa profession d'origine pour rejoindre les forces de l'ordre, en tant que lieutenante. Pour sa première affectation (en sortant de l’École de police), elle obtient d'intégrer le commissariat où travaille son mari. Si l'on accepte ce présupposé (ainsi que le fait que le couple ait pu se payer une baraque de folie), on peut entrer dans cette mini-série.

   Les trois épisodes de la première saison suivent un double fil rouge : les tentatives de la nouvelle lieutenante pour relancer l'enquête sur la disparition de son fils et l'action mystérieuse d'un tueur en série, qui semble vouloir exercer une vengeance personnelle.

   Les interrogations (nombreuses) qui accompagnent chaque enquête maintiennent l'attention, même si tous les acteurs ne sont pas excellents. Dans le rôle de l'ex-avocate devenue la plus vieille "bleue" du commissariat (mais pas la plus timide), Alexia Barlier s'en sort bien, même si je regrette qu'on fasse trop pleurer son personnage. Parmi ses collègues, je distingue son supérieur hiérarchique direct, le capitaine Deville (incarné par Cyril Lecomte, vu notamment dans BAC Nord) et l'expérimentée lieutenante Amina Dequesne (interprétée par Mariama Gueye).

   A la fin de la saison 1, une piste émerge enfin à propos d'une filière d'enlèvement d'enfants.

   Dans Sans laisser de traces (diffusé mardi 31 octobre), l'enquête fil rouge se poursuit, alors que l'équipe de policiers doit résoudre une affaire très étrange, le faux accident qui a frappé un bibliothécaire en apparence sans histoire. La découverte du passé de celui-ci réserve bien des surprises.

   La semaine prochaine est programmé Médaille d'or (pour moi le moins bon des trois épisodes inédits). Le décès d'un ancien grand espoir de l'athlétisme, mêlé à une affaire de dopage, soulève de nombreuses questions, dont la résolution m'est apparue peu réaliste. Dans le même temps, la partie fil rouge tombe dans l'émotion facile.

   L'intérêt remonte avec l'épisode conclusif, Casino Royal, dont le scénario s'inspire à la fois de James Bond et d'un film d'Alfred Hitchcock (dont je ne peux révéler le titre sous peine de déflorer l'intrigue). L'aboutissement de l'enquête fil rouge survient en deux étapes, avec un coup de théâtre final qu'on sent un peu venir. En revanche, la machination qui est à l’œuvre dans un double assassinat est particulièrement complexe... et passionnante à découvrir.

   La toute fin ménage la possibilité d'une troisième saison, si les audiences sont bonnes. C'est à mon avis souhaitable : même si l'on n'atteint pas le niveau d'Astrid et Raphaëlle par exemple (surtout question humour), on est nettement au-dessus des téléfilms du samedi soir (ou de certaines séries comme Capitaine Marleau et Alexandra Ehle).

   P.S.

   La diffusion de la quatrième saison d'Astrid et Raphaëlle va commencer vendredi 10 novembre, avec deux épisodes inédits.

dimanche, 29 octobre 2023

Les renards de l'Aubrac

   Ils font l'objet d'une exposition (visible jusqu'à mardi 31 octobre seulement), à la médiathèque de Saint-Amans-des-Cots, un village situé au nord de Rodez, à environ une heure de route.

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   En planquant pendant des heures et des heures, des jours, des semaines durant, un jeune photographe naturaliste aveyronnais, Théo Bonnefous, est parvenu à capturer des moments privilégiés, comme celui ci-dessus, avec ce renard des rochers roulé en boule, qui semble avoir repéré le bipède qui l'observe.

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   La quinzaine de photographies exposées montre des canidés de tout âge, du renardeau isolé (explorateur) à l'adulte en chasse, en passant par des familles et des duos. Les vues ont été prises à l'aube, en journée, au crépuscule, au printemps, à l'été, à l'automne comme en hiver.

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   Celles et ceux qui ne pourraient se rendre à l'exposition ou qui souhaiteraient en savoir plus peuvent consulter le site du photographe, ou son compte Instagram, qui propose aussi d'intéressantes vidéos.

   P.S.

   D'autres photographies de la faune de l'Aubrac sont visibles à la coopérative Jeune Montagne, à Laguiole. Elles ont été placées dans le couloir d'exposition, celui dans lequel figurent les panneaux retraçant l'histoire de la coopérative, celui aussi à partir duquel on peut observer (en matinée) la fabrication du fromage AOP. L'auteur des photographies est le Lozérien Francis Rouffiac, sous le pseudo de Loz Évasion.

samedi, 28 octobre 2023

3 jours max

   Trois ans après 30 jours max, Tarek Boudali revient derrière la caméra, avec ses potes de la bande à Lacheau au casting, toujours accompagnés de quelques "pointures" de la comédie, comme Marie-Anne Chazel, Chantal Ladesous et José Garcia.

   Toutefois, dans cet opus, ces glorieux anciens sont clairement mis au second plan, l'essentiel de l'action tournant autour du trio de potes (Boudali-Lacheau-Arruti)... et de Vanessa Guide, qui incarne le principal personnage féminin (déjà présent dans le précédent film, mais plus percutant ici). D'autres visages connus font une fugace apparition, Rossy de Palma se voyant octroyer une partition plus importante (mais dans une séquence à moitié ratée).

   Le début se passe dans un centre de recrutement des services secrets français. Une brochette de flics passe les tests pour tenter de devenir agent de terrain... mais, évidemment, tout ne se passe pas comme prévu. Le héros, Rayane, bien que courageux, se montre particulièrement maladroit.

   Le suite est du même tonneau : avec ses amis, il organise une expédition pour tenter de sauver sa grand-mère. La séquence aux Émirats arabes unis (qui louche à la fois sur James Bond et Mission : Impossible - Protocole fantôme) n'est pas mal du tout. Au niveau de l'action, cela tient la route. Au niveau de la distribution, on sent que la sélection a dû être éprouvante au vu du nombre de jolies jeunes femmes peu vêtues qui font de la figuration... Cela m'amène à l'ambiguïté du film quant aux personnages féminins. On a deux beaux exemples de femme forte, avec Stéphanie (Vanessa Guide) et l'espionne française (Elodie Fontan, dont le personnage s'inspire un peu de celui interprété par Sofia Boutella dans Kingsman). En revanche, presque toutes les autres sont des "bombasses" hyper-sexualisées, qui s'entichent d'hommes peu charismatiques, mais riches ou célèbres... A noter quand même une belle scène de combat, mettant en valeur l'un des personnages féminins.

   Il est vrai que la "masculinité toxique" reçoit quelques coups, souvent administrés par la compagne du héros. Quant à Tony (Philippe Lacheau, très à l'aise dans le rôle), il en prend pour son grade... mais il est aussi une source récurrente de gags, fondés sur la ressemblance entre son personnage et David Guetta. On en voit un exemple dans la bande-annonce, mais cela continue dans l'avion, à Dubaï, dans la jungle américaine...

   A la poursuite du diamant vert des émeraudes magiques, les héros voguent du Moyen-Orient à l'Amérique latine. Je trouve que les gags sont moins bons dans cette partie. Dans la salle, les enfants rient toujours, les adultes plus rarement. C'est franchement crétin et pas toujours réussi.

   Au final, j'ai trouvé cela un peu moins bon que 30 jours max... et surtout moins bon que les films écrits et mis en scène par Philippe Lacheau. Dans l'équipe, c'est lui qui a la vista. Tarek Boudali n'est pas sans talent, mais, dans ce film-ci, trop de gags sont poussifs.

   J'ai quand même passé un agréable moment, mais il ne fallait pas que cela dure davantage.

23:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Les Invisibles

   Alors que France 2 a entamé la diffusion de la troisième saison de cette série policière atypique, je me rends compte que je n'en ai encore jamais parlé sur ce blog. Il n'est que temps de combler cette lacune.

   Le titre ne désigne pas tant les enquêteurs de cette unité très spéciale (fictive) que les victimes auxquelles ils consacrent leur attention. Ces invisibles sont à la base presque toujours des anonymes, qu'il s'agit dans un premier temps d'identifier (avant de trouver les responsables du meurtre - ou de l'accident). Au premier abord, ils n'ont pas de famille, pas d'ami. Ce sont souvent des "cas sociaux". Les épisodes explorent donc les marges de notre société, avec une certaine empathie.

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   Cette empathie est chevillée au corps du chef de groupe, le commandant Gabriel Darius (à gauche ci-dessus), charismatique et tourmenté, interprété par Guillaume Cramoisan, que les téléspectateurs ont naguère pu découvrir (déjà en officier de police) dans les deux premières saisons de la série Profilage, sur TF1.

   Pour diriger son équipe, il s'appuie sur une capitaine expérimentée et bougonne, Marijo (Nathalie Cerda, très présente au théâtre), à droite sur la photographie.

   Deux lieutenants les secondent : Ben (Quentin Faure) et celle qu'on surnomme Duchesse (en raison de ses origines familiales), incarnée par Déborah Krey, dont la voix paraîtra familière à certains : cette jeune comédienne fait aussi carrière dans le doublage. Complète le groupe la médecin-légiste (à la personnalité affirmée) : Ange, interprétée par Cécile Rebboah.

   La manie des surnoms ne touche pas que l'équipe de Darius. Chaque victime non identifiée a droit au sien, inspiré par les circonstances de la découverte du corps. Ce sont ces surnoms qui donnent leur titre aux épisodes.

   L'intégralité des trois saisons (soit 18 épisodes au total) est accessible sur le site de France Télévisions.

   Pour des raisons que je ne révèlerai pas (pour ne pas gâcher le plaisir de la découverte à celles et ceux qui ne connaîtraient pas la série), à la fin de la saison 2, l'équipe de Darius a été disloquée et ses membres sanctionnés. La reformation du groupe est donc au cœur du premier épisode (double) de la saison 3, intitulé Cassel.

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   La découverte d'une mystérieuse poupée dans le manteau d'une victime est le point de départ d'une enquête surprenante, impliquant, à son corps défendant, le commandant Darius. Le cadavre ayant été retrouvé dans un pré, à proximité de panneaux indicateurs, l'un donnant la direction de la commune de Cassel (dans le département du Nord), il est décidé de le nommer ainsi, en attendant mieux.

   Dans cet épisode (diffusé le 18 octobre dernier), il est question d'intégrisme religieux, de femme battue et d'adultère. Cela pourrait plomber excessivement l'ambiance ou être traité de manière lourdingue (à l'image de tant de productions françaises) mais, ici, cela donne un tour réaliste à l'intrigue. Cette impression est renforcée par les dialogues (pas du tout littéraires) et le jeu des acteurs. J'ajoute que le passage de la première à la seconde partie de l'épisode réserve un petit coup de théâtre, que je n'avais pas senti venir (comme quoi un épisode de série télévisée peut-être mieux scénarisé que le dernier long-métrage d'Albert Dupontel).

   Mercredi 25 octobre a été programmé Vauban, là encore un épisode très bien construit. Le fil rouge de la saison (l'exploration de l'enfance du commandant Darius) alterne avec la présentation d'un groupe de jeunes féministes et la découverte du monde des Gitans. Ces trois trames s'entremêlent avec subtilité. Même si, derrière, on perçoit la volonté de traiter de sujets de société, cela reste au service d'une intrigue policière crédible.

   Pour d'obscures raisons de programmation, il faudra attendre le 8 novembre pour que soit diffusé le prochain épisode, intitulé Camelia (déjà disponible en ligne). On y découvre une jeune chanteuse de rue, à laquelle s'intéresse un séduisant motard, récemment sorti de prison. On se demande longtemps quel est le lien entre ces personnages et le squelette découvert dans le jardin d'une maison abandonnée, à côté d'un plan de... camélias.

   Je recommande aussi chaudement l'épisode 5, intitulé Stardust. Il faudra beaucoup de temps et de patience aux enquêteurs avant de découvrir les circonstances de la mort d'un jeune fêtard (doué en dessin), dans un bâtiment désaffecté. Ici encore il faut souligner la qualité du scénario et du montage, qui croisent plusieurs intrigues secondaires mettant en scène de jeunes sportives, un couple très aisé et d'autres ados pas très sages, le tout sur fond d'usage de drogues, avec un passé lycéen chargé. C'est de plus très bien joué.

   La saison se terminera par Fleur, un épisode (moins bon que les autres) qui démarre de manière un peu inhabituelle, puisque le cadavre découvert (observez le T-shirt)... n'en est pas un, la jeune femme allongée étant encore vivante. Elle est liée à un groupe de "zonards". On n'est pas au bout de nos surprises, avec cette histoire qui va toucher intimement l'équipe de policiers. Dans le même temps, l'enquête sur le passé familial de Darius progresse.

   Pour être honnête, je dois relever un point faible dans les épisodes : la mise en scène de la vie privée des policiers. Elle semble avoir pour fonction de faire baisser la tension créée par les aspects parfois sordides des enquêtes. Là, on tombe un peu trop souvent dans les clichés.

   J'espère toutefois qu'il y aura une quatrième saison.

jeudi, 26 octobre 2023

Second Tour

   Quand j'ai appris quel était le sujet du dernier film d'Albert Dupontel, j'ai d'abord eu une impression de déjà-vu. En effet, il y a un peu plus de quinze ans, l'acteur-réalisateur a campé un homme politique briguant la magistrature suprême dans Président (de Lionel Delplanque).

   Ici, le scénario est plus alambiqué. En démêler les fils est le principal enjeu de la première heure. Deux complots sont à l’œuvre, un pour faire élire Pierre-Henry Mercier (Dupontel, que j'ai connu en meilleure forme), l'autre pour le faire tuer. S'ajoute à cela un secret de famille bien gardé.

   Plus que l'intrigue politique, qui fait un peu cliché, ce sont les pérégrinations du binôme de journalistes qui m'ont intéressé. Cécile de France, en rebelle qui ronge son frein en attendant de tomber sur un scoop, est le véritable moteur de l'histoire, épaulée par Nicolas Marié, caméraman érudit et un peu gaffeur. Tous les deux sont marrants, mais j'ai trouvé leur jeu trop appuyé. (Le sourire surgit aussi lors des interventions d'un duo de gardes du corps, deux impitoyables et charmantes jeunes femmes, formées au Mossad...)

   Les spectateurs les plus attentifs auront deviné avant l'heure fatidique quel est le fameux secret de famille... et la plus grande partie de la salle aura sans peine senti quelle supercherie allait être mise au point. Cela aurait pu être piquant, aérien, mais, malheureusement, Dupontel filme cela avec lourdeur. Cela culmine dans le débat de l'entre-deux-tours, qui oppose le candidat étiqueté libéral à un populiste d'extrême-droite : les interactions sont mal fichues et l'usage d'un dispositif secret n'est pas crédible.

   Pire : je ne retrouve pas le style mordant de Dupontel. La partie critique de l'intrigue manque de relief et, quand le réalisateur verse dans l'émotion, c'est pataud, surligné, avec une musique d'accompagnement limite insupportable.

   Du coup, en dépit de la première partie émaillée d'humour et un poil mystérieuse, je suis sorti de la séance déçu.

mercredi, 25 octobre 2023

Une Année difficile

   Je ne suis pas un grand fan du duo Nakache-Toledano. Dans leur filmographie, je retiens surtout Le Sens de la fête (plus qu'Intouchables)... mais je n'ai pas tout vu. Ici, j'ai été pris dès le début. Le film démarre par une bonne idée d'introduction, qui nous fait remonter le temps, et donne une indication sur la morale de l'histoire. Les auteurs ne sont partisans ni du "C'était mieux avant", ni du "Le monde est foutu". Du coup, les vieux cons comme les jeunes crétins risquent de ne pas apprécier.

   ... et pourtant, au départ, ces écologistes militants sont dépeints sous un jour favorable. La mise en scène nous les présente comme organisés, instruits, plutôt altruistes et pas bien méchants. Au blocage de l'entrée de l'hypermarché répondent les manifestations en extérieur. La réalisation est tonique, le montage donne du rythme et les acteurs sont convaincants, parfois percutants.

   Parmi eux, il faut bien entendu distinguer Pio Marmaï et Jonathan Cohen, celui-ci drôlissime et, au moins une fois, émouvant (quand il "hume"...). Le duo (inversé par rapport à ce qui était prévu au départ : Pio devait jouer le dépressif et Jonathan le magouilleur) fonctionne très bien. Le fait que tous les deux soient (au départ) très dubitatifs quant au combat des jeunes bobos donne peut-être une indication sur le point de vue des réalisateurs... mais, à la fin, ils ont évolué.

   Parmi les sources de gag, il y a l'usage des pseudos : Cactus, Quinoa, Antilope, Sirène, Poussin, Lexo... Les rires fusent dans la salle, encore plus quand l'idéalisme béat de certains écolos est confronté au matérialisme (parfois un peu gras) des deux surendettés, pour qui le climat passe après leur propre survie quotidienne.

   Dans ce marigot de mecs soit goguenards soit gauchisants, la sincérité de Cactus (Noémie Merlant, très bien) tranche. Elle est en quelque sorte le noyau atomique de la cellule militante, celle qu'on admire, celle qu'on suit aveuglément, celle dont on tombe amoureux. On comprend très vite que son militantisme extrême masque une sorte de "complexe de l'imposteur" : elle est issue d'une famille riche, a eu une vie de privilégiée. Elle se juge donc en partie responsable du désastre actuel et appréhende fortement la suite, ce qui l'empêche d'être heureuse. Il faudra ce qui ressemble à l'intervention du covid (d'une manière que je ne révèlerai pas) pour qu'elle envisage la vie autrement.

   C'est une jolie histoire, nourrie d'humour, qui fait passer un bon moment.

mardi, 24 octobre 2023

Anselm : le bruit du temps

   C'est à Wim Wenders que l'on doit ce documentaire consacré à l'artiste allemand Anselm Kiefer. Une partie des images a été tournée dans le gigantesque atelier de Barjac, dans le Gard, une ancienne filature où Kiefer a posé ses valises, au début des années 1990.

   Le film commence par des vues étonnantes de robes de mariée, qui semblent fixées à des mannequins sans tête. Assez vite, on se demande si cette installation (en partie en plein air) est composée de véritables robes ou bien de sculptures en plâtre imitant le tissu.

   On en sait un peu plus en pénétrant dans quelques-uns des imposants bâtiments, réaménagés à sa convenance par Kiefer, qui a toutefois laissé tels quels certains éléments, auxquels il a adapté ses créations. Wenders déploie travellings et panoramiques pour nous faire découvrir l'endroit et les déambulations du peintre. On le suit à l’œuvre, avec divers outils, de la palette au chalumeau.

   J'étais un peu dubitatif au début mais, franchement, quand on voit le résultat, on est sidéré par l'impression qu'il donne. Quand on a le nez sur le détail d'une toile en gestation, on ne voit que des tracés informes. Quand la caméra prend du recul, on a la vue d'ensemble... et c'est souvent impressionnant. (Le style est appelé néo-expressionnisme.) Notons que l'artiste s'appuie souvent sur des photographies, qu'il peut insérer dans ses œuvres, ou s'en servir comme matériau de départ, qu'il modifie à sa guise.

   Après cette démonstration, le film nous plonge dans le passé de Kiefer. Dès le début, l'insertion d'images d'archives (tournées en  1945, année de naissance du peintre) nous indique que sa jeunesse a été marquée par la pauvreté, dans une Allemagne vaincue et placée au ban des nations.

   La mémoire du nazisme fait partie intégrante de l’œuvre de celui dont le père a servi dans la Wehrmacht. C'est d'abord au philosophe Martin Heidegger (dont la compromission avec le régime hitlérien a été longtemps masquée, voire niée) qu'il règle son compte, à travers un cahier d'artiste décrivant la décomposition progressive du cerveau présumé du penseur allemand. Mais c'est une série de photographies le montrant faire le salut nazi, en des lieux naguère conquis par l'armée allemande, qui a attiré l'attention des médias et suscité la polémique. On l'a un temps soupçonné d'être un artiste inspiré par le fascisme (parce qu'il réemployait certains mythes allemands, qui avaient fait l'objet d'une récupération sous le nazisme)... mais c'était à une époque où, quand on n'était pas (au minimum) sympathisant communiste, on était accusé de tous les maux.

   Pour ces séquences anciennes, Wenders a mélangé des images d'actualité (y compris télévisuelles) à des scènes tournées avec deux acteurs. Le plus jeune d'entre eux (peut-être le propre petit-fils du cinéaste) incarne Kiefer enfant, quand il s'éveille à l'art. Un adulte (peut-être le fils du peintre) incarne l'artiste débutant, en Allemagne.

   Dès qu'il l'a pu, Kiefer s'est installé dans de grands bâtiments pour nourrir son inspiration. Cela commença par une grande maison perdue dans les bois, puis des immeubles industriels, comme une ancienne briqueterie ou la filature de La Ribaute, devenue aujourd'hui le siège d'une fondation, l'artiste ayant fini par déménager à proximité de Paris. On voit quelques images de son nouvel atelier, situé dans un ancien entrepôt de La Samaritaine.

   Le film se veut à l'image de l’œuvre, monumental et inspirant. Wim Wenders promène doucement sa caméra, permettant aux spectateurs de profiter des œuvres et d'observer le travail de Kiefer. Il convient d'être aussi attentif aux sons : bruits du quotidien, musique et chuchotements n'ont pas été insérés au hasard. Je trouve que Wenders (comme pour Le Sel de la terre) a réussi son coup.

dimanche, 22 octobre 2023

Promenade à Cracovie

   Ce documentaire polonais est le résultat d'un travail effectué entre 2016 et 2021 (de la recherche historique au montage, en passant par le tournage). Une fois que Roman Polanski (ici témoin, et non cinéaste) a donné son accord, il a fallu trouver une période au cours de laquelle lui et son ami le photographe Ryszard Horowitz soient disponibles pour retourner dans la ville de leur enfance, Cracovie.

   Cela débute avec les retrouvailles des deux octogénaires, dans une voiture où il prend l'envie à l'un des deux de couper les poils qui dépassent du nez de l'autre ! C'est un peu la marque de fabrique de ce film, qui évoque des moments souvent dramatiques, mais avec parfois un humour salutaire.

   Déambulant dans les rues de la Cracovie moderne (devenue une importante ville touristique, point de passage quasi obligé avant de se rendre à Auschwitz), les deux hommes retrouvent le vieux cinéma où, enfant, Polanski a connu ses premiers émois sur grand écran. Sa demi-sœur aînée l'y emmenait... mais pas forcément voir ce qui l'intéressait, lui.

   Ils pénètrent ensuite dans l'appartement où logeait la famille Liebling (qui n'a pris le nom de Polanski qu'après la guerre, au retour de la déportation). Il en est un autre dans lequel le cinéaste n'ose demander à pénétrer, de peur de voir de précieux souvenirs gâchés par les images du présent.

   L'un des moments forts du documentaire est la séquence au cimetière (biconfessionnel), où est enterrée une partie de la famille. La remémoration des obsèques du père est riche en anecdotes, certaines très drôles.

   La suite est plus triste, puisqu'il est question du "déménagement" dans le ghetto, créé après l'invasion allemande. Il ne reste quasiment plus aucune trace de celui-ci dans la Cracovie moderne... et pourtant, les souvenirs sont douloureux. Lors des déportations qui ont suivi, Polanski perd une partie de sa famille (notamment sa mère). Son père lui permet de s'échapper. De son côté, Horowitz, déporté à Auschwitz, a eu la chance de figurer sur la célèbre Liste de Schindler. Tous deux sont des exceptions : l'écrasante majorité des 70 000 juifs de Cracovie (sur une population avoisinant les 250 000 habitants  à la veille de la guerre) a été exterminée par les nazis.

   Parmi les rescapés, beaucoup ont fui la Pologne devenue communiste, où leur retour n'a pas toujours été bien accepté. Le film se voulant un pont entre les deux cultures du pays (la catholique et la juive), il se garde de rappeler qu'entre 1945 et 1970, il y eut plusieurs "piqûres de rappel" antisémites (par exemple en 1953 ou 1970). De leur côté, les familles Polanski et Horowitz (du moins, ce qu'il en restait) sont revenues en ville, le père se remariant très vite, au grand dam de son fils. Roman (surnommé Romek par son ami) a pris l'habitude de passer plus de temps chez les Horowitz, en particulier avec Ryszard, avec lequel il va ensuite développer son goût pour les arts et la culture.

   Un autre moment marquant est la rencontre entre Polanski et le petit-fils du couple de paysans polonais qui l'ont caché, au péril de leur vie, à la fin de la guerre. Cela débouche sur la cérémonie qui déclare les défunts "Justes parmi les Nations", à Yad Vashem.

   Si le documentaire est passionnant, sur le plan historique, je dois reconnaître qu'il est parfois difficile à suivre, ayant été tourné en polonais, sous-titré pour sa sortie en France. A la longue (1h15), c'est un peu usant, en dépit des moments humoristiques qui introduisent une salutaire légèreté.

   P.S.

   Mon billet aurait dû s'arrêter là... mais la séance a été suivie d'un mini-débat, au cours duquel l'un des intervenants a signalé que le film semblait avoir été victime d'une forme de boycott. Déjà, à sa sortie, l'été dernier, la distributrice s'était alarmée du petit nombre de salles ayant programmé le documentaire, certaines s'étant même rétractées.

   A Toulouse, aucun cinéma n'aurait accepté de diffuser le film. Les intervenants n'ont pas voulu insister là-dessus (ni nommer les cinémas). Rappelons simplement que, dans la "Ville rose", l'art et essai est très bien installé, avec l'ex-Utopia, renommé American Cosmograph (qui fut en travaux en juillet-août), l'Utopia Borderouge, l'ABC et Le Cratère (qui reprogramme des films déjà diffusés ailleurs). S'ajoutent deux mastodontes, le Pathé Wilson (ex-Gaumont) et l'UGC Montaudran (inauguré en 2021, deux ans après la fermeture de l'enseigne du centre-ville).

   Je n'aime pas cette sorte de néo-maccarthysme qui se développe dans notre  pays (très minoritairement, mais impliquant des gens influents). Des activistes peu soucieux de la vraie justice tentent d'imposer leur bien-pensance, au détriment de la présomption d'innocence... et de la liberté artistique.

samedi, 21 octobre 2023

Bernadette

   Je n'éprouve pas vraiment de sympathie pour l'ancienne Première Dame qui, à mon avis, avait une trop haute opinion d'elle-même (de par son statut social). Mais l'idée de tourner une comédie politique sous l'angle de l'épouse du président Chirac m'a paru bonne, surtout vu la distribution.

   Catherine Deneuve nous livre une nouvelle facette de son talent... et elle contribue à donner de son personnage une image un peu trop belle à mon goût. Ceci dit, j'ai quand même de la compassion pour l'épouse archicocufiée, aux ordres de son mari et (au départ) méprisée par l'entourage politique. Les images d'archive nous rappellent que Bernadette Chirac fut une jeune femme dotée d'un certain charme et, avec son caractère et son engagement, elle aurait très bien pu mener une vraie carrière politique sans se contenter d'évoluer dans l'ombre de son mari.

   Celui-ci est incarné avec un plaisir évident par Michel Vuillermoz qui, lui aussi, a tendance à rendre son personnage un peu trop sympathique. Toutefois, comme l'épouse finit par prendre un peu d'indépendance, la seconde partie du film est l'occasion d'égratigner (gentiment) un homme politique menteur, égocentrique et malhonnête, dont le bagout (et certains choix judicieux en politique étrangère) a fait oublier bien des défauts.

   La Comédie française est décidément bien représentée dans ce film, puisque outre M. Vuillermoz, on trouve Denis Podalydès en conseiller de la Première Dame et Laurent Stocker en Nicolas Sarkozy. Les apparitions de ce dernier sont toujours une source d'amusement.

   Dans la faune des conseillers de Chirac, il faut distinguer François Vincentelli, lui aussi visiblement ravi d'incarner Dominique de Villepin. A noter, dans la masse des seconds rôles, l'excellente performance d'Olivier Breitman en Karl Lagerfeld.

   Du côté féminin le casting est beaucoup plus restreint. (Ce film est d'ailleurs l'occasion de vérifier qu'au tournant des années 1990-2000, l'élite politique française est principalement constituée d'une meute de mâles dominants.) Sara Giraudeau est très bien en Claude Chirac (bien que moins tranchante que la vraie), cette fille au prénom androgyne qui est en fait le fils que Chirac n'a pas eu. J'ai trouvé aussi Maud Wyler convaincante dans le rôle de "l'autre fille", celle qu'on ne montre pas.

   Quand on a connu cette époque, on revit des moments de son passé, sous un angle particulier. Le film fourmille de situations cocasses et de bons mots. Cela ne va pas révolutionner l'histoire du cinéma, mais on passe un bon moment.

vendredi, 20 octobre 2023

The Creator - Hollywood décolonial

   Sur une Terre ravagée par une guerre opposant les méchants Occidentaux (qui ont banni les intelligences artificielles) aux gentils Asiatiques (qui vivent en harmonie avec elles), un agent infiltré tente de concilier sa mission et l'amour qu'il éprouve pour la fille d'une sorte de gourou des IA. Il croise la route d'une enfant de synthèse, considérée comme une arme extrêmement redoutable (et donc recherchée par les deux camps)... mais qui se révèle de plus en plus humaine.

   Sur un thème dont la présence ne cesse de croître sur les écrans de cinéma, Gareth Edwards (Rogue One tout de même) a bâti un scénario assez conventionnel, dont il est possible de prévoir presque toutes les péripéties. Dès le début, on sent comment va se terminer la séquence initiale. Il est aussi évident qu'un personnage important va changer de camp. Il est tout aussi prévisible que la gamine va s'attacher à lui... pour une raison de plus en plus transparente, à mesure que se développe l'intrigue. Enfin, quasiment depuis le début, on sent où l'histoire pourrait trouver sa conclusion et même de quelle manière.

   Cet assemblage de recettes faciles, un brin éculées, passe plutôt bien à l'écran parce que c'est réalisé avec un incontestable souffle. Les scènes aériennes sont emballantes, utilisant judicieusement des effets spéciaux très réussis (merci LucasFilm !) et les séquences de combat sont spectaculaires. Ajoutons qu'on a soigné les décors et que ce cher Hans Zimmer a apporté son incontestable savoir-faire à l'emballage musical.

   Un bémol toutefois : on note quelques erreurs de montage (des faux-raccords), par exemple quand un personnage court vers une plage, sur le point de rattraper un bateau qui embarque... et qu'on voit, deux secondes plus loin, au large... ou encore, quand une "méchante", après avoir examiné ce qu'il reste de conscience de l'un de ses soldats, retourne à son véhicule en laissant sur place le précieux équipement qui lui permet de fouiller dans les cerveaux... équipement qui a mystérieusement disparu quand, quelques minutes plus tard, un autre groupe arrive à proximité du cadavre...

   Précisons que cette "méchante" est américaine. Hollywood semble avoir un sérieux problème avec les femmes de pouvoir, quand elles sont blanches. Ces dernières années, on croise de plus en plus souvent ce type de personnage repoussoir, sans que cela semble choquer personne. Récemment, on y a eu droit notamment dans Wakanda Forever (avec l'ambassadrice française), Blue Beetle (avec une cheffe d'entreprise) ou encore Ninja Turtles (avec une femme d'affaires). Le fait que ces clichés dépréciatifs se répandent dans des œuvres populaires me paraît un peu inquiétant.

   Mais, sur le fond, il y a pire. Globalement, ici, les méchants sont les Blancs occidentaux (principalement américains), les populations "colorées" (asiatiques, mais aussi afro-américaines) étant présentées soit comme d'innocentes victimes, soit comme de méritantes combattantes de la liberté. Bref, comme on a mis tout le pognon dans les FX, il ne restait plus grand chose pour la subtilité scénaristique... ou alors (hypothèse audacieuse), c'est parce que l'intrigue a été rédigée... par une IA !

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jeudi, 19 octobre 2023

La fake news de l'hôpital Al-Ahli

   Le conflit israélo-palestinien est déjà bien assez dramatique pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y ajouter les pires ignominies. Il y a bientôt deux semaines, le Hamas n'a pas déçu ses supporteurs en organisant une attaque d'une sauvagerie inouïe dans le sud d'Israël. Dans un premier temps, en France comme en Europe, les réactions horrifiées ont pris le dessus, avant que la consternation ne gagne quand l'armée israélienne a commencé ses bombardements, faisant des centaines de victimes civiles...

   Mais voilà que, mardi dernier, les médias de tous les pays se mettent à relayer la propagande des islamistes palestiniens : un hôpital aurait été bombardé par Tsahal, le nombre de victimes approchant le demi-millier. S'en suivit un déchaînement de manifestations anti-israéliennes, dont le déclenchement quasi simultané laisse planer quelques doutes sur leur spontanéité...

   Et puis voilà qu'une autre version de l'affaire commence à circuler. Une version qui s'appuie sur des faits. Dans un premier temps, c'est l'armée israélienne qui démonte la théorie du bombardement. Mais ses arguments, bien que pertinents, ne sont pas audibles dans le déferlement de haine et d'inconscience qui marque notamment les réseaux sociaux.

   Aujourd'hui, c'est au tour du Monde de publier son debunking : ce que montre l'analyse détaillée des images. Le quotidien français (notamment les plumes de sa rubrique proche-orientale) a beau être marqué par un prisme plutôt pro-palestinien, ces jours-ci, ses pages consacrées au conflit ont été nourries de reportages des deux côtés du drame (parce que ce sont majoritairement des civils qui trinquent, dans les deux camps).

   On note qu'une équipe de près d'une dizaine de personnes s'est consacrée à la collecte et l'analyse d'images de diverses origines. Au bout du compte, la conclusion est claire comme de l'eau de roche : à l'heure précise où l'hôpital gazaoui a été frappé, aucune bombe israélienne n'a été larguée dans le coin. En revanche, des roquettes ont été lancées de la bande de Gaza, à proximité de l'hôpital. Le Monde n'ose toutefois pas aller au bout de son analyse. L'article se contente d'énoncer des faits, sobrement. Je regrette qu'au vu du déferlement de haine mensongère auquel nous avons assisté ces derniers jours, le quotidien n'ait pas mis plus franchement les points sur les i... mais le travail de ses journalistes, factuel, dépassionné, mérite les louanges.

   P.S.

   La fake news du Hamas ne porte pas que sur l'origine des armes qui ont frappé l'hôpital. Apparemment (selon les informations dont on dispose actuellement), le nombre de victimes serait très surestimé, ce qui pose la question de la pertinence des chiffres communiqués aux médias par les autorités palestiniennes, qui pourraient systématiquement grossir les pertes arabes pour faire pencher la balance de l'émotion en leur faveur.

mercredi, 18 octobre 2023

Terminator 2

   Moins d'un an après la ressortie en salles de Terminator, le deuxième volet (le dernier signé James Cameron) a refait son apparition au cinéma CGR de Rodez, dans le cadre de ses fameux "plans cultes", qui proposent aux cinéphiles locaux d'alléchantes pépites.

   Au début, les spectateurs de l'époque ont dû avoir une impression de déjà-vu, avec ces deux hommes nus débarqués du futur, l'un pour tuer John Connor, l'autre pour le protéger... sauf que, pendant un bon quart d'heure, la mise en scène entretient le doute quant à la mission de chacun... d'autant qu'il s'agit de deux terminators, l'un plus perfectionné que l'autre.

  Ce début est d'autant plus emballant qu'il est émaillé d'humour, comme lorsque le personnage incarné par Schwarzy débarque dans un bar de bikers pour se procurer vêtements et moyen de locomotion. D'autres moments sont devenus cultes, comme lorsque le jeune John enseigne au tueur mécanique certaines subtilités des relations humaines... son (très grand) élève se révélant capable d'étonnants progrès !

   Au niveau de l'intrigue, c'est encore meilleur que dans le premier opus, puisque Sarah Connor y occupe une place plus grande, à tel point que, parfois, le culturiste californien passe au second plan. J'ai pris plaisir à retrouver Linda Hamilton en femme d'action, aux ovaires bien arrimés... et assez sexy, ma fois.

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   L'intrigue se déroule un peu moins de dix ans après celle du premier opus. On y croise un John Connor préadolescent, incarné par Edward Furlong... qui, rappelons-le, a repointé le bout de son nez, il y a quelques années (tout comme Linda Hamilton), dans Dark Fate.

   A l'époque, on avait souligné la qualité des effets spéciaux du film de Cameron. Ils ont un peu vieilli aujourd'hui, mais leur insertion dans l'intrigue est remarquable. Ils ne sont pas là juste pour faire joli.

   Ce Terminator est aussi marquant par ses scènes de poursuite, en moto, en voiture, en poids lourd, en hélicoptère... et ça canarde !

   En revanche, je ne regrette pas la mode capillaire de l'époque : on aperçoit plusieurs personnages dotés d'une coupe mulet (notamment le meilleur copain de John Connor), dont jusqu'à il y a peu, je me réjouissais qu'elle fût tombée en désuétude, passant pour un summum de ringardise.

   Sur le fond, l'histoire n'est pas idiote, avec la prémonition des dégâts qu'une sorte d'intelligence artificielle pourrait faire. A noter aussi l'évolution du personnage de Sarah Connor, tentée à un moment par une posture radicale, qui transforme le personnage en quasi-terminator humain (et féminin). Comme le déclare l'un des protagonistes, les humains possèdent l'étrange faculté de s'autodétruire et de s'entretuer, une réflexion hélas corroborée par la brûlante actualité...

21:48 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 12 octobre 2023

Expend4bles

   Expendables, c'est, pour moi, le souvenir d'un film maté dans une chambre d'hôtel climatisée, au cours d'un déplacement professionnel, un début d'été caniculaire, il y a des années. Je me trouvais dans une zone périphérique peu animée... et je n'avais pas envie de ressortir, vu la chaleur qu'il faisait. Va donc pour le bouquet de chaînes d'un célèbre groupe privé. Ce soir-là, l'un des films de la franchise était diffusé. Je me suis endormi avant la fin de la première demi-heure...

   Mais, ce coup-ci, alléché par une bande-annonce promettant bastons spectaculaires et humour facile, j'ai tenté l'aventure de la salle obscure (avec une séance en version originale sous-titrée).

   Le début est percutant. Il est censé se dérouler en Libye (et pas en Lybie, contrairement à ce qu'annonce l'incrustation)... et ça dépote. Le nouveau méchant est impitoyable, organisé et maîtrise les arts martiaux.

   Ça tombe bien, parce qu'en face, la troupe de contractuels (vieillissants) de la CIA compte un certain Christmas (alias Jason Statham) dans ses rangs. Dans cet épisode, le grincheux acariâtre prend le pas sur Stallone et nous régale de quelques bagarres particulièrement bien chorégraphiées.

   Avis aux âmes sensibles : c'est hyper-violent et graphiquement très sanglant. Mais il ne me déplaît pas de voir cette bande de corsaires des temps modernes dézinguer plusieurs centaines de terroristes et trafiquants en tous genres.

   Les cascades sont top et les effets spéciaux plutôt corrects (mais un peu trop visibles). On y a sans doute mis plus d'argent que dans le scénario, parce que j'avais deviné qui était le fameux Ocelot (le mystérieux patrons des terroristes) au bout d'un gros quart d'heure.

   Il reste l'humour, pas d'une grande subtilité, mais efficace. Les gros bras de la troupe n'arrêtent pas de se chambrer. Soyez aussi attentifs aux détails de certaines scènes. Ils sont parfois croustillants, comme le support où la bague de Barney (Stallone) a été fixée après que celui-ci l'a perdue lors d'un pari.

   Après une journée de boulot et un bon repas, un soir, ça détend.

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Marie-Line et son juge

   C'est le titre du nouveau film de jean-Pierre Ameris, dont j'avais apprécié Les Folies fermières, sorti l'an dernier. J'ai aussi été attiré par la présence de Michel Blanc au générique. Le risque était qu'il incarne un personnage un peu trop proche de ce qu'on a vu au printemps dernier dans Les Petites Victoires. Ici, le travailleur manuel retraité et illettré cède la place à un juge bien actif, veuf (quasi) inconsolable et un brin alcoolique.

   Dans des circonstances que je me garderai bien de révéler, cet homme cultivé, gagné par la misanthropie, entre en contact avec une jeune serveuse, fille d'un docker victime d'un accident de travail, déscolarisée, un peu paumée, mais tenaillée par l'envie de vivre pleinement sa vie.

   Concernant ce personnage, je n'ai pas aimé le début ; je n'ai pas cru à la naissance de cette improbable histoire d'amour, où les ellipses semblent masquer la difficulté d'insérer des scènes crédibles.

   En revanche,  quand cela se gâte, en particulier quand devient patent le fossé culturel qui sépare Marie-Line de l'entourage de son nouveau petit copain, j'ai trouvé cela plutôt bien fichu, correctement joué et mis en scène.

   Petit à petit, on découvre les antécédents d'une ancienne bonne élève, traumatisée par la mort de sa mère et la dégringolade (physique et mentale) de son père, auquel elle est liée par une étrange relation, mélange d'incompréhension et de dépendance mutuelles. Dans le rôle du paternel, Philippe Rebbot est très bon.

   La réalisateur semble avoir voulu brosser le portrait d'une sympathique "cassos", qui déploie des efforts maladroits pour tenter de s'en sortir... et aurait besoin d'un coup de pouce, sans trop oser le demander. De son côté aussi le juge aurait besoin qu'on l'aide... mais il est trop fier (et acariâtre) pour le reconnaître... du moins au début. Dans le rôle de Marie-Line, Louane est crédible, son physique (empâté par rapport à ses débuts dans La Famille Bélier) se révélant un atout. A l'image de bien des jeunes femmes issues de milieux populaires, c'est une adepte de la malbouffe (ou, du moins, elle mange peu équilibré), avec les conséquences qu'on devine sur sa silhouette.

   L'histoire semble suivre un chemin balisé, avec deux personnages qui vont se découvrir, s'apprivoiser, s'engueuler, s'entraider... Cela nous réserve beaucoup de moments cocasses, qui reposent principalement sur les postures de l'acteur Blanc et les réflexions parfois brutes de décoffrage de la serveuse, devenue chauffeur... en attendant mieux.

   Ce film est une agréable petite chose, dont on sort de bonne humeur.

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dimanche, 08 octobre 2023

Acide

   Il y a deux ans était sortie dans les salles La Nuée, de Just Philippot, qui m'avait agréablement surpris. Je me suis donc laissé tenter par ce long-métrage fantastique, qu'on aurait pu jadis (dans les années 1980) qualifier "d'anticipation" et qui, aujourd'hui (heureusement), est plutôt de la science-fiction.

   L'argument fantastique est constitué par les pluies (très acides), qui perforent de plus en plus de bâtiments et provoquent la mort des animaux et des hommes qui n'ont pas trouvé d'abri. C'est bien mis en scène, que cela se passe à l'extérieur ou à l'intérieur, avec des effets spéciaux saisissants.

   Mais, au départ, c'est un film social. La séquence introductive est filmée en caméra subjective, au smartphone ou en caméra-piéton. C'est de la violence brute, façon reportage de l'intérieur : des grévistes prennent le contrôle de leur entreprise (et le patron en otage) ; la police intervient et, de part et d'autre, la violence se déchaîne. L'habileté de la mise en scène permet à chacun de s'y retrouver, soit qu'on estime que la police en fait trop, soit qu'on juge que certains grévistes ont perdu les pédales.

   Le héros de l'histoire, père de famille, est présent dans cette scène... mais je ne dirai pas où. On le retrouve quelques mois plus tard, séparé de son épouse, dans une situation précaire, dans l'attente d'un procès. Cela perturbe la relation qu'il entretient avec sa fille, assez forte au départ, et qui va évoluer. Le père est (très bien) incarné par Guillaume Canet, qui joue un personnage à la Matt Damon, Tom Cruise ou Bruce Willis, un gars ordinaire qui, dans des circonstances extraordinaires, va tout faire pour sauver sa famille.

   Le film oppose deux comportements, un, tranché (celui du père), dans l'action, qui ne se pose pas trop de questions et l'autre, plus empathique (celui de la mère puis celui de la fille), pour qui tout n'est pas possible, en tout cas pas acceptable.

   Fantastique au départ, l'intrigue penche ensuite vers un bon vieux survival, entre le nord de la France (métropolitaine) et la Belgique. J'ai été pris par cette histoire familiale chaotique sur fond de chute d'une civilisation. On ne s'ennuie pas une seconde et certaines scènes sont d'une force inouïe. Je mettrais deux bémols à mon enthousiasme : l'évolution du personnage de la fille, une ado à fort caractère au départ, qui se mue en chialeuse invétérée (avec certes, une fois, une bonne raison de pleurer), et les dix-quinze dernières minutes, durant lesquelles, pour moi, l'intrigue sort du chemin rationnel suivi jusqu'alors, privilégiant l'émotion facile.

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jeudi, 05 octobre 2023

Souffler dans l'anus

   Ce matin, j'étais en voiture, la radio branchée sur France Cul', lorsque j'en ai entendu une bien belle. C'était dans le cadre d'une série d'émissions intitulée « Ni mort, ni vivant, une histoire ». Il était question de la réanimation des noyés. L'un des intervenants a évoqué une méthode des plus inattendues : l'insufflation de fumée de tabac... dans l'anus !

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   La gravure ci-dessus date de 1775. Je l'ai trouvée dans le billet écrit il y a quelques années par l'un des invités de l'émission de France Culture, Anton Serdeczny. Apparemment, ce n'était pas la plus répandue des méthodes d'insufflation, qui impliquaient plutôt un soufflet (sans doute pour augmenter l'efficacité de la projection de gaz).

   Il semblerait que ce fût assez douloureux, soit en raison du procédé (l'introduction violente d'une masse gazeuse, de surcroît chaude), soit en raison de la nature du produit insufflé, le tabac, qui serait particulièrement irritant (quel que soit l'orifice d'entrée).

   Au XIXe siècle, quand les effets nocifs du tabac furent connus, on renonça peu à peu à cette méthode, remplacée par les techniques répandues aujourd'hui (bouche-à-bouche, massage cardiaque...).

   L'émission évoque aussi la peur d'être enterré vivant et le délai qui a été progressivement fixé avant les inhumations. A l'origine, les autorités (civiles comme religieuses) imposaient d'enterrer les cadavres dans la journée. Reporter l'inhumation d'un ou deux jours a sans doute permis aux familles de mieux vivre leur deuil... et a en outre sauvé quelques vies.

mardi, 03 octobre 2023

Le Procès Goldman

   Dans la famille Goldman, c'est le petit jeune, Jean-Jacques, qui est devenu célèbre, et même une icône de la chanson populaire contemporaine. Seules quelques milliers de personnes (adeptes des mouvements qui vont de scission en scission) se souvenaient qu'il avait un (demi-)frère aîné, du genre teigneux, emprisonné, jugé pour meurtre et, finalement, assassiné.

   C'est à ce demi-frère maudit que le film de Cédric Kahn est consacré, à travers une tentative de reconstitution de son second procès aux Assises, en 1976. Nous voilà donc confrontés à un nouveau "film de procès" (un genre en vogue chez l'extrême-gauche branchouille), qui se veut à la fois une mise en scène de la Justice, une réflexion sur l'engagement révolutionnaire... et un peu un film de propagande, nourri de préoccupations plus contemporaines.

   Au centre de tout se trouve Pierre Goldman, incarné, habité même par Arieh Worthalter, qui porte le film sur ses épaules. Il n'a pas cherché à rendre son personnage sympathique, pas plus que le réalisateur d'ailleurs, qui filme tout cela de manière froide (un peu scolaire : c'est souvent du champ/contrechamp), avec suffisamment de détails pour permettre à différents types de public de s'y retrouver.

   Après une entame ratée (le dialogue entre les deux avocats -qui n'a pas existé- étant mal joué, le texte récité comme une leçon apprise par cœur), on rentre dans le vif du sujet avec un plan du "héros", d'abord mutique, assez impressionnant. L'ambiance du procès est bien rendue, avec un chahut très fréquent (on a reproché au président de la Cour de ne pas avoir su maîtriser les débats), celui mené par les soutiens gauchistes de Goldman, une agitation qui contraste fortement avec la dignité des familles des victimes, que souligne la mise en scène de Kahn.

   Indirectement, la situation fait un peu penser à une lutte des classes, mais pas dans le sens où le pensent les amis marxistes de Pierre Goldman. En effet, celui-ci est issu d'une famille de notables, le père étant un commerçant aisé (certes aux origines modestes), ancien résistant, bref une sorte de figure morale, qui a financé les errances scolaires de son fils aîné à une époque où seule une faible proportion d'une génération (autour de 10 %) accédait au baccalauréat. En face se trouvent des personnes appartenant à la petite classe moyenne (notamment l'employée de pharmacie, l'un des clients blessés et le policier agressé). L'aisance verbale de Goldman, au tribunal, contraste avec l'expression maladroite de certains de ses contradicteurs, qui n'ont pas reçu une éducation aussi soignée que lui, ni fréquenté d'aussi bonnes écoles... Tout cela est très bien rendu par les comédiens qui campent les seconds rôles.

   Au niveau du déroulé, le réalisateur essaie de montrer comment la Défense a démonté l'accusation, en décrédibilisant certains des témoins, parfois de manière outrancière. Ce fut le travail de Georges Kiejman, un avocat promis à un brillant avenir, mais dont Arthur Harari peine à faire passer le talent. (Il s'est naguère montré beaucoup plus habile derrière la caméra, avec Diamant noir et Onoda.) Le film n'évoque pas une autre piste possible dans l'enquête sur le double meurtre, piste qui aurait pu contribuer à innocenter Goldman.

   La plus grande gêne surgit au détour d'une scène pourtant très belle, celle de l'interrogatoire de la compagne antillaise du délinquant révolutionnaire. La comédienne est très bien... mais cette scène est une pure invention, au service (selon moi) d'une propagande qui ne dit pas son nom.

   Nous sommes en pleine fiction intersectionnelle. Scénaristes et réalisateur ont voulu mettre en scène un "peuple de victimes" (juifs, militants de gauche, Noirs, femmes), tous devenus les cibles d'une police supposée quasi intégralement raciste et d'une Justice aux ordres. La ficelle est un peu grosse, d'abord parce que, si second procès il y a eu (alors qu'à l'époque il n'est pas possible de faire appel d'une condamnation aux Assises), c'est en raison d'un généreux vice de forme : l'absence de la mention de la date sur un document officiel ! Dame Justice s'est donc montrée bien complaisante envers Pierre Goldman.

   Le film a quand même le mérite de montrer cette justice en fonctionnement. Le procès ne permettait pas de conclure de manière irréfutable à la culpabilité de Pierre Goldman (pas plus qu'à son innocence, d'ailleurs). Il était logique que le doute profite à l'accusé.

   Depuis, toutefois, on a appris que l'alibi de l'accusé était bidon... et l'ancien rebelle, devenu chroniqueur au Nouvel Obs puis à Libération, a déçu une partie de ses soutiens à gauche. On l'a découvert sans doute plus attiré par la violence physique qu'authentiquement révolutionnaire... et il s'est lié à de drôles de personnages...

   Cela nous mène à sa mort, à peine évoquée par des insertions à l'écran, dans le film. Un spectateur peu informé serait tenté de conclure de celles-ci que ce sont des policiers d'extrême-droite qui auraient assassiné Pierre Goldman. Aucune preuve n'a été trouvée en ce sens. En revanche, comme il est expliqué (notamment) dans un numéro de Rendez-vous avec X (une émission qui remonte à 2005), les relations troubles entretenues par Goldman avec des types du Milieu pourraient expliquer son exécution. Mais cette fin peu glorieuse ternit trop l'étoile de l'ancien rebelle pour avoir été retenue par les thuriféraires du braqueur soi-disant révolutionnaire.

DogMan

   A part l'amour des chiens, le dernier film de Luc Besson n'a pas grand chose à voir avec l’œuvre homonyme de Matteo Garrone, sortie en 2018.

   C'est vers d'autres films de genre que louche cette enquête à rebours, qui commence par l'arrestation d'une drag-queen handicapée, couverte de sang et se poursuit par son interrogatoire (par une psychiatre), entrecoupé de retours en arrière.

   On pense immanquablement au Silence des agneaux et au Joker de Todd Phillips, avec, comme dans ces deux prestigieux devanciers, un acteur exceptionnel, ici Caleb Landry Jones. Qu'il interprète un jeune handicapé énamouré, le directeur zélé d'un refuge pour chiens, une drag-queen souffreteuse ou un tueur psychopathe, le comédien est époustouflant, impressionnant par sa maîtrise technique tout en réussissant à susciter l'émotion. (Mon gars, ça mérite un Oscar !)

   Besson a eu la chance de bénéficier de la contribution de cet acteur de talent... mais, de son côté, il n'est pas manchot. La mise en scène campe plusieurs ambiances, du glamour au glauque, en passant par l'inquiétante tranquillité d'une banalité affligeante, le tout servi par une chouette musique, intégrée à la construction des plans.

   Et puis il y a ces chiens, de race ou bâtards, grands ou petits, propres ou sales, affectueux ou menaçants, utilisés de manière extraordinaire dans certaines scènes. (Chapeau à la dresseuse !)

   Bref, c'est prenant de bout en bout, la première partie étant plutôt psychologisante, tandis que dans le dernier tiers, on retrouve le Besson filmeur d'action, dans une séquence virtuose qui voit un éclopé entouré de chiens venir à bout d'une bande de voyous surarmés.

   En dépit de considérations religieuses oiseuses, ce film fait peut-être partie de ce que Besson a filmé de plus fort.

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dimanche, 01 octobre 2023

Brokenwood, saison 8

   C'est (outre l'arrivée d'un bel été indien) la bonne nouvelle de ce dimanche : le début de la diffusion, sur France 3, de la huitième saison de cette série policière atypique, néo-zélandaise, rurale (country même), ironique et bedonnante, regorgeant de personnages savoureux.

   L'intégralité de la saison est déjà disponible sur le site de France Télévisions. Au vu de la médiocrité des programmes télévisuels actuels, j'ai choisi de déguster cela petit à petit. Commençons donc par l'épisode diffusé ce dimanche soir sur France 3, intitulé "Du berceau au tombeau".

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   Au cœur de l'histoire se trouve un improbable quatuor, composé de la directrice du musée local et de trois abrutis, l'un d'entre eux, Frodon (à droite sur la photographie ci-dessus) étant un personnage récurrent de la série, du genre à se retrouver régulièrement mêlé à toute sorte d'embrouille.

   Ce début d'épisode est impossible à raconter, tant il accumule les cocasseries. Il met d'excellente humeur, notamment quand une momie supposée morte surgit d'un sarcophage et lance un « Gros bâtard ! » avant de (définitivement) décéder !

   Démêler les bandelettes fils de l'intrigue va se révéler particulièrement ardu, dans une région où le calme apparent masque différentes activités louches (prostitution, vol, trafic de drogue, escroquerie...).

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   Au cours de l'enquête, le véhicule conduit par le commandant Shepherd va occuper le devant de la scène. Cette antiquité est une Holden Kingswood (voiture produite jadis par la filiale australienne de General Motors), datant des années 1980. Équipée d'un lecteur de cassettes audio, elle est considérée par l'officier de police comme une extension de lui-même. Il la bichonne et ne la prête jamais... ou quasiment jamais. Dans cet épisode, pour le bien de l'enquête, il en confie exceptionnellement les clés à l'un de ses subordonnés (qui l'assure de son plus grand respect pour les ancêtres)... mais celles-ci vont tomber entre de mauvaises mains. La séquence de poursuite automobile vaut son pesant de kiwis !

   A noter aussi, parmi les personnages secondaires, celui d'un père particulièrement fertile, dont la découverte de l'activité professionnelle contribue à épicer l'histoire. Il est incarné par Joel Tobeck, vu notamment dans One Lane Bridge.

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   PS

   En guise de dessert, en seconde partie de soirée, la chaîne publique propose la rediffusion d'un épisode de la saison 2, intitulé "Les fantômes de la ligne de touche". Au vu de l'actualité sportive de ces dernières semaines, ce choix apparaît approprié, puisque l'intrigue a pour cadre le club local de rugby.

samedi, 30 septembre 2023

Max à Sandhamn

   Arte vient à peine de diffuser le deuxième épisode (Esther) de la neuvième saison de Meurtres à Sandhamn que le dixième a été mis en ligne, par la chaîne franco-allemande.

   Une fois n'est pas coutume (ces dernières saisons), son titre, Max, ne fait pas référence à l'une des victimes ou à une personne disparue, mais au tueur. On a pu apercevoir celui-ci lors des épisodes précédents, en train d'observer, de suivre ou de prendre en photographie certains des protagonistes. Il va s'en prendre à eux. C'est l'originalité de cette histoire, durant laquelle policiers et magistrate sont en danger.

   Cela change un peu du ronronnement qui s'était installé ces dernières saisons. L'univers un brin bobo de cette région touristique du Sud de la Suède, où juges, avocats, médecins, chefs d'entreprises, cadres supérieurs et officiers de police se fréquentent, est menacé par l'intrusion violente d'un élément perturbateur... lui-même perturbé.

   On comprend assez vite que Max a pour but d'assouvir une vengeance. Il est issu d'une famille de la petite classe moyenne, est d'apparence ordinaire et exerce une activité sans prestige intellectuel. Mais il est déterminé et bien organisé. La manière dont certains personnages vont tomber dans les mailles de son filet, sans être très originale, est bien mise en scène.

   La séquence la plus "flippante" (comme disaient les djeunses naguère) est pour moi la première, nourrie d'angoisse et d'incertitude, sans effets spéciaux, juste avec des décors, un peu de musique, un montage efficace et le jeu de l'acteur qui incarne le tueur.

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   Le concernant, les scénaristes ont toutefois évité de tomber dans les travers de certaines productions d'outre-Atlantique (comme Esprits criminels), qui font de leurs tueurs des sortes de "génies du mal". Ici, Max est terriblement efficace et menaçant... mais son action est parfois enrayée par un événement inattendu : une personne qui sort d'une pièce censée être vide, l'arrivée d'un vigile dans un parking, l'inattendue débrouillardise d'une cible qu'on pense facile...

   J'ai beaucoup aimé cet épisode, même si j'ai trouvé la fin trop mélo avec, de surcroît, un cliffhanger qu'on sent venir à des kilomètres... mais on nous prépare une saison 10. Bonne nouvelle !

 

   PS

   Deux références francophones sont perceptibles dans cet épisode : Jacques-Yves Cousteau (lié à un personnage qui n'apparaît pas à l'écran, mais qui joue un rôle important) et Hergé (à travers l'album L'Ile noire, dont je laisse à chacun.e le plaisir de découvrir quel lien il entretient avec l'intrigue).

mercredi, 27 septembre 2023

Nouveaux meurtres à Sandhamn

   La série policière suédoise est de retour sur Arte, avec six épisodes inédits, ceux des saisons 8 et 9. Il y a un peu plus de quatre ans, j'avais signalé la diffusion de la saison 4, l'une des plus réussies. J'ai continué à suivre la série jusqu'à la saison 6. Malheureusement, à l'issue de celle-ci, la distribution a changé, du côté policier : Jacob Cedergren et ses acolytes ont cédé la place à de nouveaux enquêteurs, des personnages beaucoup moins intéressants, plus caricaturaux, qui m'ont fait lâcher le programme.

   Je n'en aurais pas reparlé si je n'avais pas vu Esther, le deuxième épisode de la saison 9 et le cinquième des six nouveaux proposés par la chaîne franco-allemande.

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   J'ai retrouvé avec plaisir ce faux rythme lent, qui suit en fait une ligne scénaristique habilement sinueuse. (Ce n'est hélas pas le cas de tous les épisodes.) Tout commence quand un groupe d'adolescents chrétiens (qui cherchent à épicer leur retraite spirituelle), fait une macabre découverte, sur une île appartenant à une communauté religieuse. Cette découverte impose la réouverture d'une enquête vieille de trente ans, sur la disparition de trois ados, deux garçons et une fille, dans des circonstances jamais élucidées, les cadavres n'ayant pas été retrouvés.

   J'ai aimé l'alternance entre les scènes du XXIe siècle et celles, plus anciennes, montrant certains personnages alors beaucoup plus jeunes. Parmi eux se trouvent l'héroïne de la série, la procureure Nora Linden (Alexandra Rapaport), et son ex-mari Henrik, qui vient de devenir, à l'époque, son petit ami. C'est touchant, parce qu'on suit alternativement un couple naissant, charmant, et un duo d'ex, qui ne s'entendent plus aussi bien. Les acteurs sont convaincants... en tout cas plus que ceux qui incarnent les policiers. Que ce soit en V.O. ou en V.F., j'ai du mal avec ces enquêteurs peu charismatiques au possible.

   En revanche, l'intrigue policière est palpitante, faisant intervenir un pasteur, son ex-femme devenue prof de yoga, un religieux défroqué, une ancienne gamine jalouse, le tout entre le sud de la Suède (paysages superbes) et... l'Estonie (qui est très proche de la Finlande, voisine de la Suède).

   Cet épisode, déjà disponible en ligne, va être diffusé sur Arte vendredi 29 septembre... en même temps que Nouvelle-Zélande - Italie. Les All Blacks ont beau proposer un jeu spectaculaire, je conseille de choisir le polar !

dimanche, 24 septembre 2023

France 3 soutient ouvertement l'immigration illégale...

   ... avec des fonds publics ! J'ai failli tomber de mon fauteuil, ce soir, en regardant Meurtres à Font-Romeu, énième épisode d'une collection qui alterne l'acceptable et le moins bon. Mais, ça, c'est sur le plan technique : des comédiens approximatifs, des dialogues écrits avec les pieds, des rebondissements abracadabrantesques... mais de beaux paysages et, parfois, un scénario bien troussé.

   L'épisode inédit de ce soir respecte le cahier des charges de la série : un duo d'enquêteurs qui, au départ, ne s'entend pas, va unir ses forces pour résoudre une ténébreuse affaire, sur fond de paysages superbes, dans une province où les langues ne se délient pas facilement. Cette fois-ci, hélas, on n'a pas de légende locale (ni d'anecdote historique marquante) à se mettre sous la dent.

   La distribution comprend du lourd (sur le plan télévisuel... le budget n'est tout de même pas illimité) : Béatrice de La Boulaye (remarquée dans Tropiques criminels) côtoie Stéphane Henon, issu lui d'un programme iconique de la chaîne publique : Plus belle la vie. C'est dire l'importance que la direction des programmes accorde à ce téléfilm. (La titulaire du poste, Anne Holmes, s'est fait la main en supprimant des séries parmi les plus populaires des chaînes publiques -Mongeville et Commissaire Magellan- sans doute jugées pas assez dans le coup de la "modernitude"...)

   Déjà, le côté enquête policière n'est pas des plus réussis. On nous ressert le coup de la Parisienne -forcément dynamique- qui débarque dans une rugueuse province et qui se retrouve avec un collègue plutôt taiseux. Il faut plaindre B. de La Boulaye, pas uniquement en raison de l'horrible coupe de cheveux dont est affublé son personnage :

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   En effet, la comédienne, qui pouvait légitimement penser qu'on lui réservait le rôle phare, se retrouve à jouer les faire-valoir du principal interprète masculin, incarnant un officier de gendarmerie qui... aide les migrants clandestins !

   Les promoteurs de l'épisode se sont bien gardés d'informer le public de la teneur de cette intrigue secondaire, qui prend de plus en plus de place au fur et à mesure que l'histoire se déroule. Seule une courte bande-annonce a été diffusée, en avant-première, dans laquelle il est impossible de deviner ce qu'on s'apprête à nous servir.

  L'enquête gendarmesque prend un tour pas du tout crédible, certains personnages secondaires étant mal campés. Même l'enquêtrice est mise dans des situations qui prêtent à sourire : par une soirée glaciale, elle épie son collègue pendant plusieurs heures, sans s'être emmitouflée, ses vêtements restant ouverts au niveau du col !

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   Ce soir-là comme la nuit suivante (quand elle prend son collègue en filature), elle est d'une absence de discrétion consternante pour un officier supposé chevronné.

   En revanche, les scénaristes semblent s'être appliqués à rendre les migrants les plus sympathiques possibles. Tous sont calmes, gentils, craintifs. Au besoin, on tente d'attendrir les spectateurs avec les enfants, de manière limite putassière (le coup du gamin qui fait tomber son jouet au moment de fuir une intervention de la gendarmerie...). Que tout cela est lourd, appuyé !

   Ah, j'allais oublier : on finit par apprendre que le capitaine de gendarmerie a entretenu une liaison avec une sans-papier... Par-dessus le marché, le commandant qui a le capitaine dans le viseur et qui mène la chasse aux migrants s'appelle... Hicham Naouri ! N'en jetez plus, la coupe de la bien-pensance est déjà pleine !

   P.S.

   Sans surprise, la personne qui a commis les meurtres est blanche, de culture catholique.

dimanche, 17 septembre 2023

Les (nouveaux) carnets de Max Liebermann

   Cette série autrichienne, tournée en anglais, est de retour sur France 3, où elle a le grand avantage de remplacer l'insipide commissaire Dupin. J'avais découvert ce programme il y a deux ans et demi mais, déçu par le tour pris par certains épisodes, je n'avais pas suivi la saison 2. J'avais tort. Celle-ci est actuellement rediffusée en deuxième partie de soirée, après les épisodes inédits de la saison 3. Le tout est visible en replay de longue durée sur le site de France Télévisions.

   Commençons par la saison 2. La semaine dernière a été diffusé La Comtesse mélancolique (disponible pendant encore trois semaines environ).

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   L'apparent suicide d'une riche comtesse cache un meurtre que l'exploration du cerveau humain va permettre aux enquêteurs de résoudre. Le jeune psychanalyste Max Liebermann n'a pas eu le temps de découvrir la source du traumatisme subi jadis par sa patiente, désormais décédée. Mais, avec l'inspecteur Oskar Rheinhardt, il va apprendre qu'un traumatisme peut en cacher un autre. L'intrigue est excellemment construite, superbement mise en images et interprétée avec talent.

   Ce soir, c'est au tour du deuxième épisode de la saison 2 d'être rediffusé... et il est sensationnel. Le Baiser du diable (visible pendant un mois) nous entraîne dans les méandres de la géopolitique d'Europe centrale, au début du XXe siècle, juste avant le déclenchement des Guerres Balkaniques (annonciatrices de la Première Guerre mondiale).

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   Tout commence par la découverte, en apparence fortuite, du cadavre d'un homme disparu une vingtaine d'années auparavant. Très vite, l'inspecteur Rheinhardt est prié de se détacher de l'enquête, qui a des implications qui le dépassent. Mais il semble disposer d'un informateur privilégié. Dans cette histoire, (presque) rien ni personne ne semble conforme aux apparences. Dans l'ombre agit la Main noire (serbe), tandis que Liebermann essaie de faire parler une petite fille traumatisée. Le dénouement est stupéfiant. (Je me dois toutefois de signaler un petit anachronisme : la Main noire n'a été créée officiellement qu'en 1911, alors qu'ici l'action se déroule en 1908.)

   Passons aux inédits. La semaine dernière a été diffusé le premier épisode de la saison 3 : Étreinte mortelle (qui restera accessible en ligne pendant plus de deux ans).

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   On y retrouve Max Liebermann, désormais confortablement installé dans son cabinet privé. Il s'est un peu éloigné des enquêtes policières. Mais une affaire particulière va le rapprocher de l'inspecteur Rheinhardt. De jeunes femmes sont victimes de meurtres machiavéliques, assassinées au cours d'un rapport sexuel consenti... La psyché du criminel fascine le psychiatre, qui devient aussi l'objet de l'attention du tueur. Notons que l'intrigue a pour cadre principal le milieu de la mode, au début du XXe siècle.

   Ce soir est diffusé l'épisode 2, Le Dieu des ombres. Deux affaires s'entrecroisent : de mystérieux vols commis chez de riches propriétaires de mobilier chinois et le cas d'un malade particulier, ancien soldat du corps expéditionnaire européen à Pékin, traumatisé par la Révolte des Boxeurs, quelques années plus tôt.

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   Ce n'est pas le meilleur du lot, mais il est fidèle au style et aux qualités de la série, réalisée avec soin et s'appuyant sur un sympathique duo d'acteurs principaux : Matthew Beard (le psy) en intellectuel raffiné et Jürgen Maurer (l'inspecteur) en ours mal léché. L'ambiance se situe quelque part entre Les Enquêtes de Murdoch et Les Brigades du Tigre.

samedi, 16 septembre 2023

Le Château solitaire dans le miroir

   Bien placée dans la course du film au titre le plus long sorti en France cette année, cette animation japonaise est assez étonnante, en raison du croisement des genres qu'elle opère. Sur le fond, il s'agit d'une œuvre sociétale, qui traite de la phobie scolaire et du harcèlement, entre autres. Mais le traitement s'effectue par le prisme d'une intrigue fantastique.

   Les héros sont sept adolescents, tous collégiens (même si certains ont plutôt un physique de lycéens), tous japonais, tous (sauf un) réfugiés au domicile de leurs parents. Par le biais de miroirs magiques, ils vont se retrouver, à intervalle régulier, pendant un an, dans un mystérieux château, perché sur une île-rocher perdue au milieu de nulle part, avec pour hôtesse une mystérieuse reine-louve, apparemment une enfant portant un masque, mais qui semble diablement mûre (et forte) pour son âge. Elle assigne une mission au groupe : trouver une clé dissimulée dans le château. Elle permettra à l'un(e) d'entre eux de réaliser son vœu le plus cher.

   Des sept nous suivons surtout le parcours de Kokoro, fille unique d'un couple de cadres urbains, scolarisée dans un collège public où elle est devenue le souffre-douleur d'une bande de pétasses. Au fil de ses séjours dans le château, elle découvre qu'elle a d'autres points communs avec ses six compagnons, qui vont devenir des amis. Mais pourquoi ont-ils été réunis là ? Et comment trouver la clé ?

   Le mystère semble dans un premier temps s'épaissir (l'existence d'univers parallèles ne tenant pas la route). Sans me vanter, j'ai assez vite deviné le twist... ainsi que l'identité réelle de la reine-louve. Cela n'a nullement entamé mon plaisir, puisque le scénario (adapté d'un roman) est foisonnant, ouvrant de multiples perspectives.

   La réalisation est cependant inégale. La majeure partie des scènes est assez plan-plan. Toutefois, dès qu'il est question d'une surface réfléchissante (miroir, glace, vitre...), on remarque un incontestable brio.

   C'est visible par les petits et les grands. Je pense que le film est conçu pour susciter des discussions dans les familles... et c'est aussi une histoire particulièrement énigmatique, pour qui aime se triturer les méninges.

   PS

   Du réalisateur, Keiichi Hara, on a déjà pu voir dans les salles : Wonderland, le royaume sans pluie, Miss Hokusai et Colorful.

vendredi, 15 septembre 2023

Mystère à Venise

   Jamais deux sans trois... Un an et demi après Mort sur le Nil (qui succédait au médiocre Crime de l'Orient-Express), Kenneth Branagh revient en Hercule Poirot, adaptant (très très librement) cette fois-ci Le Crime d'Halloween, l'intrigue étant déplacée à Venise, ce qui nous vaut quelques jolis plans (surtout à la fin).

   Comme dans les précédents films, le casting secondaire est impeccable. Du côté féminin, j'ai été marqué par Kelly Reilly et Camille Cottin (qui confirme la qualité de son basculement à l'international, déjà perçu dans Stillwater). Du côté masculin, on peut signaler les prestations de Jamie Dornan et de Jude Hill, stupéfiant en gamin à la maturité précoce.

   Je suis moins enthousiasmé par le duo d'enquêteurs, incarné par K. Branagh et Tina Frey, celle-ci tenant le rôle d'Ariadne Oliver, le double littéraire d'Agatha Christie.

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   Leurs interactions sont parfois savoureuses (l'écrivaine s'étant autoparodiée et profitant aussi de l'occasion pour se moquer de son célébrissime détective, qui avait peut-être pris trop d'importance à ses yeux)... mais, clairement, les comédiens, aussi talentueux soient-ils, n'ont pas le charisme de Zoë Wanamaker et David Suchet, qui tenaient ces rôles dans la série d'ITV.

   Fort heureusement, la photographie est soignée et l'intrigue fouillée, croisant l'univers d'Agatha Christie avec le surnaturel. C'est suffisamment bien écrit pour que chaque type de spectateur s'y retrouve : les rationalistes  estimeront que toutes les réponses ont été données à la fin de l'enquête (principalement par Poirot), tandis que les adeptes de paranormal affirmeront qu'il y a bien eu intervention surnaturelle.

   Je crois que les puristes n'ont pas trop apprécié ce mélange des genres. J'ai trouvé cela plutôt réussi, même si je pense que le film aurait pu avoir plus de force sans cet attirail tape-à-l'oeil. De surcroît, Branagh aurait pu se dispenser de certains effets de caméra, en particulier quand il se filme sans doute équipé d'un harnais et d'une sorte de caméra GoPro (en plus évoluée).

   Comme cela dure moins d'1h45 et que le suspens est assez prenant, j'ai tendance à recommander ce film, en dépit de ses imperfections.

16:23 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 09 septembre 2023

Equalizer 3

   Cinq ans après le volume 2, revoilà Robert McCall dans ses œuvres... à ceci près que, dorénavant, l'ancien employé de magasin de bricolage, ancien chauffeur VTC... et surtout ancien tueur à la solde d'Oncle Sam est à la retraite. Il coule des jours paisibles dans un coin de l'Italie... qu'il découvre pas si bien fréquenté que cela.

   Cette fois-ci, ce sont des mafieux (d'abord siciliens, puis napolitains... faites la queue, les gars, y en aura pour tout le monde) qui vont tâter des méthodes expéditives de l'ange exterminateur américain.

   Mais le réalisateur Antoine Fuqua prend son temps avant de nous montrer le héros en action. Il surprend agréablement avec la séquence inaugurale, durant laquelle, dans un premier temps, on ne découvre que les conséquences du passage de la tornade exterminatrice (avec un joli plan-séquence à la clé). C'est tout aussi parlant qu'une scène d'action chorégraphiée. Autre atout de cette introduction (annonciateur du ton du film) : le mystère qui plane autour de l'identité ou des motivations de certains personnages. Ici, c'est à propos d'un père et de son fils que l'on se pose des questions. Entre le début et la fin de la séquence, ils auront totalement changé de statut à nos yeux.

   Denzel Washington se faisant vieux, Fuqua ne pouvait plus le faire passer pour un as du corps-à-corps... mais il lui a laissé la maniaquerie et une incontestable dextérité dans le maniement des armes, qu'elles le soient par nature ou par destination. Les quelques scènes de combat sont impeccablement réalisées.

   Il m'a aussi semblé que la bobine du héros avait été volontairement un peu "retravaillée". Parfois, le visage de Denzel est presque difficile à reconnaître. Il devient une sorte de colonel Kurtz de la lutte contre le crime organisé. Cet aspect est une nouveauté et je trouve qu'il donne une saveur supplémentaire au film.

   S'ajoute à cela un scénario assez bien troussé (émaillé d'humour), qui ménage quelques surprises. A noter que la version originale marie l'anglo-américain et l'italien. C'est un plaisir pour les oreilles.

   J'ai passé un excellent moment.

22:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 02 septembre 2023

Joseph Staline et sa Cour

   Arte a récemment rediffusé le film La Mort de Staline (que j'avais chroniqué à sa sortie, en 2018). Il est visible sur le site internet de la chaîne pendant encore quelques jours.

   A celles et ceux qui n'auraient jamais vu cette coproduction franco-britannique, je conseille vivement de remédier à cette lacune, de préférence en version originale (anglaise) sous-titrée. Cela permet de mieux profiter du talent des interprètes, qui ont su parfaitement rendre compte de l'ambiance tragi-comique des derniers jours du tyran communiste et de la "course à l'échalote" qui a suivi son décès.

   Je profite de l'occasion pour signaler la réédition d'un ouvrage historique remarquable, Staline, La Cour du tsar rouge, de Simon Sebag Montefiore. Sorti au début du XXIe siècle, ce pavé de plus de mille pages avait rencontré un grand succès. En français, on en connaissait une édition de poche, en deux tomes. Pour les soixante-dix ans de la mort de Staline (décédé en mars 1953), les éditions Perrin ont ressorti le bouquin, dans une version "semi-poche" de luxe (sur un papier de qualité) :

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   La lecture est vraiment aisée. C'est bien écrit (bien traduit ?), divisé en chapitres assez courts, disposés grosso modo de manière chronologique, de 1928-1929 à 1953. Une conclusion prolonge jusqu'au XXIe siècle, les descendants des dirigeants staliniens (du moins, ceux qui ont survécu) s'étant très bien intégrés à la Russie poutinienne. Les notes érudites sont repoussées en fin de volume. Si l'on veut en savoir plus, il est utile de les lire, mais le bouquin se savoure très bien sans.

   Attention : ce n'est ni une biographie, ni une histoire de l'URSS, ni une analyse stricte des mécanismes de la dictature stalinienne... mais tout cela figure dans le livre. L'originalité de l'auteur est d'avoir choisi l'angle des relations entre les familles des dirigeants bolcheviks (certains connus, d'autres moins). C'est à la fois instructif et riche en anecdotes.

   Je pense que les scénaristes de La Mort de Staline et de la bande dessinée d'origine se sont inspirés du livre de Montefiore, même s'ils s'en écartent un peu de temps à autre (pour mieux servir leurs effets comiques ou dramatiques).

   J'ai longtemps rechigné à me plonger dans le bouquin (à cause de son volume). Ce fut mon "pavé de l'été" (coucou dasola)... et je me suis régalé.

lundi, 28 août 2023

La Coupe du monde mise en pièces

   Dans un peu plus d'une semaine, de grands malabars musclés originaires de tous les continents vont commencer à se rentrer dedans, en short, sur gazon vert. Le début de la Coupe du monde de rugby (à XV) approche... et c'est en faisant mes courses que je m'en suis rendu compte :

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   J'ai récupéré une pièce de deux euros, dont, curieusement, la Monnaie de Paris ne signale la disponibilité qu'à partir du... 8 septembre !

   Au centre est dessiné un joueur sur le point de réaliser une passe (à la main). On note la présence des deux doubles poteaux, alors que le terrain a été remplacé par le globe terrestre, sans qu'il soit possible de distinguer de quel hémisphère il s'agit. (Dans le ciel semble être présente la planète Saturne, qui est visible des deux hémisphères. La faible hauteur -par rapport à la surface terrestre- pourrait indiquer que nous sommes dans l'hémisphère Nord.)

   Le texte principal est gravé deux fois : en arc de cercle au-dessus de la scène et, en petits caractères, en bas à gauche. On repère aussi, en bas à droite, les majuscules RF (symboles de la France), ainsi que, semble-t-il, une corne d'abondance (à gauche)... et peut-être le poinçon du graveur ou de l'imprimerie, à droite.

Hypnotic

   L'intrigue de ce thriller fantastique ne repose pas tant sur l'hypnose (au sens strict) que sur la faculté de tromper, de mystifier voire d'annihiler la volonté d'autrui que possèdent certains individus. Cette capacité semble être à l’œuvre lors de l'intervention à laquelle participe un officier de police, qui sort de chez sa psy. Le traumatisme qu'il a naguère subi (la disparition de sa fille) joue un rôle clé dans l'intrigue, mais l'on met un bon bout de temps à comprendre les dessous de l'affaire...

   ... parce qu'on nous mystifie nous aussi, spectateurs ! Il faut se méfier de ce que l'on nous montre à l'écran, y compris quand un personnage dénonce une manipulation. Il peut y avoir mystification dans la mystification, avec, cerise sur le gâteau, l'effacement de certains souvenirs et l'implantation d'autres, fictifs.

   Cela ne vous rappelle rien ? Inception, bien sûr. Certes, Robert Rodriguez n'est pas aussi talentueux que Christopher Nolan (et Ben Affleck est plus convaincant dans la première partie de l'histoire que dans la seconde, où son personnage change de statut), mais j'ai trouvé les critiques bien sévères pour ce très honnête film de genre. Entre le brio de Nolan et le navet intersidéral (qui se porte bien dans les salles françaises), il y a de la place pour des films de qualité, divertissants. Celui-ci entre dans cette catégorie... mais il nécessite un peu de gymnastique intellectuelle, dans sa seconde partie.

   P.S.

   A la fin de la séance, ne quittez pas la salle trop vite...

13:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films