mercredi, 16 février 2022
Moonfall
J'ai déjà entendu de mauvaises langues affirmer que les œuvres de Roland Emmerich sont au cinéma ce que la fanfare militaire est à la musique classique. En tout cas, quand on achète son billet, on sait ce qu'on va voir. Ici, il s'agit évidemment d'un film catastrophe, que d'autres mauvaises langues qualifient de catastrophique. Voyons ce qu'il en est.
Au niveau de l'intrigue comme de la mise en scène, aucune surprise n'est à attendre. Emmerich et sa brigade de scénaristes ont entremêlé des références à Armageddon, Alien, Independence Day (un peu d'auto-citation ne fait pas de mal), Le Jour d'après (peut-être son meilleur film), Mission to Mars et même 2001, L'Odyssée de l'espace. (Trop de modestie tue la modestie.)
Sur le plan visuel, cela dépote... parfois. J'ai particulièrement apprécié deux séquences : celle qui mène au décollage d'une navette en pleine situation apocalyptique (où l'on retrouve la "patte Emmerich") et celle qui voit un groupe de civils tenter d'échapper à une bande de voyons, avec une belle poursuite en voitures à la clé, dans des conditions climatiques extrêmes. J'ai toutefois été assez attentif pour remarquer, dans d'autres séquences, des imperfections techniques dont le réalisateur n'est pas coutumier : quand deux (ou trois) plans sont superposés, le montage est parfois voyant. Cela fait factice... et un peu désuet, rappelant de vieux films de science-fiction.
Que dire de l'interprétation ? Les acteurs font ce qu'ils peuvent. Patrick Wilson (vu notamment dans Midway et Aquaman) a pris la place de Bruce Willis dans le rôle du petit Blanc aux couilles de béton qui va sauver le monde... mais, désormais, pas tout seul. Il a bien besoin du coup de main de la nouvelle patronne (afroaméricaine) de la Nasa, incarnée par Halle Berry, que j'ai eu grand plaisir à retrouver. Se greffe sur ce duo un petit gros, un fils à maman genre geek conspirationniste. Cet astrophysicien du dimanche va se révéler très utile. Comme Emmerich fait du cinéma inclusif, il a complété sa distribution par d'autres archétypes. Je note aussi que le scénario, s'il oppose dans un premier temps certains "Américains d'en-bas" à l'élite, prône leur alliance pour sauver New York la planète. Enfin, comme ce "Blockbuster" (à l'image d'autres, de plus en plus nombreux) est une coproduction chinoise (coucou Tencent !), on ne s'étonnera pas de voir à l'écran une nounou issue du "pays du milieu", ni que le fils de la patronne de la Nasa apprenne le mandarin. Mieux encore : le pays soumis à la poigne de fer de présidé avec tact et délicatesse par l'honorable Xi Jinping est présenté comme un ami des États-Unis.
A la réflexion, je pense que les scénaristes ont aussi puisé à une source française : le Voyage au centre de la Terre, de Jules Verne. Ici, c'est plutôt "Voyage au centre de la Lune". La troisième partie de l'intrigue a beau accumuler les invraisemblances (et le "juste à temps"), elle n'en est pas moins entraînante, alternant les scènes futuristes (dans l'espace et sur la Lune) et les pérégrinations des personnages restés sur Terre. Cela suffit pour passer un début de soirée divertissant, sans plus.
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lundi, 14 février 2022
Mort sur le Nil
Quatre ans après le très moyen Crime de l'Orient-Express, Kenneth Branagh revient avec cette nouvelle adaptation du roman d'Agatha Christie, un des plus machiavéliques qu'elle ait écrits. Cette fois-ci, j'ai fait l'effort de trouver une séance en version originale sous-titrée, histoire de ne pas être perturbé par un mauvais doublage (celui de Branagh en l'occurrence).
Au niveau de la distribution, j'ai été plutôt impressionné par la partie féminine. On nous propose une quinte magique, avec Gal Gadot, Annette Bening, Emma Mackey, Sophie Okonedo et Letitia Wright, qui donnent vie à de superbes personnages, certains légèrement modifiés par rapport à ceux qu'a créés la romancière.
Je suis moins emballé par les messieurs. Je trouve leurs prestations assez stéréotypées. Je ne repêche ni Tom Bateman, ni Armie Hammer, ni Kenneth Branagh. Celui-ci a droit a sa petite séquence historique, au début du film. Elle est censée nous faire découvrir la cause de l'existence (et de l'entretien) de son horrible moustache. Cette séquence ne tient pas la route pour deux raisons. La première est liée aux accents. Poirot/Branagh est censé être un Belge francophone. Or, dans la version originale, le contraste est flagrant entre la manière de parler des autres soldats (qu'on pourrait prendre pour des Français) et celle de Poirot, qui parle comme un Anglais tentant de s'exprimer en français. Cela passe peut-être auprès du public anglo-saxon, mais, pour un Frenchie, c'est totalement ridicule ! (David Suchet, qui incarnait le détective dans la série d'ITV, s'en sortait beaucoup mieux.)
On touche le fond avec la moustache. Elle est censée masquer une blessure de guerre. Or, quand, durant la majorité du film, le héros, portant moustache, est filmé en gros plan, aucune micro-cicatrice n'est visible, même au bord de la moustache, ce qui est invraisemblable compte tenu des dégâts constatés aussi bien au début qu'à la fin de l'histoire (moustache rasée).
Si Branagh n'est pas un bon Poirot, il peut néanmoins s'appuyer sur la distribution féminine (vraiment classe)... et sur l'habillage (décors, costumes, effets spéciaux), superbe, bien qu'un peu clinquant. Peut-être suis-je influencé par ma récente vision de Vaillante, mais je suis tenté de dire que le réalisateur verse dans l'art pompier.
Il reste que l'histoire d'origine est assez fidèlement suivie. Quand on aime les intrigues à énigme, on est pris. Mais je conseille quand même de retourner voir le téléfilm de 2004, rediffusé dimanche dernier, et accessible sur MyTF1. Outre David Suchet en Hercule Poirot, on peut y découvrir David Soul, la Française Félicité du Jeu et surtout la délicieuse Emily Blunt (vue récemment dans Jungle Cruise et Sans un bruit 2), alors peu connue.
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samedi, 12 février 2022
Vaillante
Salle comble à Rodez pour ce film d'animation féministe, avec, dans le public, outre les bambins (et bambines) habituel(le)s, des adultes... dont, me semble-t-il, quelques "soldats du feu".
La première partie de l'histoire se situe en dehors de l'univers des pompiers, puisqu'elle montre un papa... couturier, veuf, tentant d'élever une intrépide garçonne (Georgia) qui rêve de passer plus tard ses journées sur un camion rouge. Problème : nous sommes à New York, en 1920. Il n'est pas question qu'un individu de sexe féminin puisse rejoindre la rugueuse confrérie des manieurs de lance à incendie.
Une dizaine d'années plus tard, "Pistache" a grandi et semble avoir oublié ses rêves d'enfant... au grand soulagement de son père. Mais, dans la "grosse pomme", un mystérieux pyromane détruit les théâtres les uns après les autres, provoquant la disparition de presque tous les pompiers de la ville. Déguisée en garçon, Georgia contribue à former, en compagnie de son père, d'un chauffeur de taxi farfelu et d'un chimiste du dimanche, la dernière équipe de secours.
La suite est une farandole d'aventures, avec cascades, humour, rebondissements et émotion (autour des relations père-fille). J'ai ri, j'ai été pris par le suspens... et j'ai eu les yeux qui piquent (vers la fin).
Je recommande vivement cette production française. Aux manettes se trouve Laurent Zeitoun, l'un des scénaristes de Ballerina.
P.S. I
Ne quittez pas la salle trop vite : le générique de fin est accompagné d'images d'archives, des photographies des premières pompières dans plusieurs pays. Figure dans le florilège la Française Françoise Mabille.
P.S. II
Les spectateurs attentifs noteront le soin apporté au contexte états-unien de l'intrigue. Les décors urbains ont été vraiment bien travaillés. Au niveau des personnages, il est évident que Shawn Nolan (le papa) est en réalité "Sean", un Irlando-Américain, souvent habillé de vert. Dans la famille, on a la passion du service public, tout comme d'autres descendants de migrants catholiques, les Reagan, policiers au cœur de la série Blue Bloods.
mardi, 08 février 2022
La Place d'une autre
Au cours de la Première Guerre mondiale, une infirmière d'origine modeste se retrouve, à proximité du Front Ouest, dans une bâtisse, en compagnie de soldats (français) blessés, d'un médecin militaire et d'une civile qui a quitté la Suisse à cause de la mort de son père. Soudain, un obus frappe le bâtiment, ouvrant le champ des possibles...
Le fond de l'intrigue est social... et culturel. C'est l'amour de la lecture qui permet à l'imposture de fonctionner... et à la transfuge sociale de changer de vie. C'est aussi une histoire de femmes, entre la notable âgée, riche, guindée mais au cœur ouvert (Sabine Azéma, malicieuse et impeccable), l'ancienne infirmière qui cherche sa place (Lyna Khoudri, un peu effacée) et la fille de bourgeois déclassée qui veut retrouver un rang qu'elle estime digne d'elle (Maud Wyler, chargée d'incarner une victime antipathique).
Le début a pour fonction de faire comprendre aux spectateurs ignorants quelle était la précarité de la situation des jeunes femmes pauvres au début du XXe siècle. Sans perspective scolaire (à une époque où les enfants du peuple doivent, à moins d'être très doués, se contenter au mieux d'un certificat d'études), soumises au harcèlement sexuel, sombrant dans la mendicité voire la prostitution, les jeunes prolétaires n'ont pas la vie facile. Dit comme cela, l'impression est celle d'un tableau misérabiliste. Il n'en est rien. Tout est suggéré par petites touches. De la même manière, la séquence de guerre parvient à transmettre l'essentiel, avec une étonnante économie de moyens. Certains trouveront ça un peu cheap. Moi, j'ai apprécié.
La mise en scène de la relation qui naît entre la lectrice et son employeuse est hyper classique. On est dans le "qualité française". Les dialogues sont parfois trop littéraires. Je me suis quand même un peu inquiété quand est survenu le coup de théâtre que tout le monde attendait. Je trouvais qu'il arrivait trop tôt... eh bien les scénaristes ont trouvé de quoi relancer l'intrigue.
C'est une belle histoire, qui se laisse regarder avec plaisir.
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dimanche, 06 février 2022
Morse... fin ?
Ce soir, France 3 diffuse le troisième et dernier épisode de la huitième saison de la série Les Enquêtes de Morse. Intitulé "Terminus" dans la version originale comme dans la version française, il joue sur une ambiguïté : fait-il référence au dernier arrêt d'une ligne d'autobus périurbains (à proximité duquel survient un crime), ou bien à la dernière étape d'une série qui pourrait s'arrêter au trente-troisième épisode, comme ses deux devancières (Inspecteur Morse et Inspecteur Lewis) ?
Que le premier meurtre soit commis au terminus de la ligne 33 (clin d’œil au numéro de l'épisode) n'est pas le fruit du hasard. Morse est directement concerné, puisque c'est la ligne qu'il emprunte pour rentrer chez lui, quand il est trop bourré pour prendre le volant. C'était le cas le soir du meurtre. Il a donc côtoyé la future victime... et peut-être l'assassin.
L'enquête se déroule en plein hiver, en période neigeuse, ce qui n'arrange pas les policiers... au contraire du meurtrier. Le lendemain du premier crime, le même bus se retrouve piégé par le verglas. Certains passagers (sans doute des habitués) sont identiques à la veille, accompagnés de quelques nouveaux. Tout ce petit monde trouve refuge dans un hôtel abandonné, où s'est déroulée une horrible tuerie huit ans plus tôt.
Outre le policier, sont présents le chauffeur et le contrôleur du bus, une retraitée des Postes, un ancien prof, un avocat, un étudiant, une serveuse, une doctoresse et deux autres (une femme et un homme), au métier indéfini.
Nous voilà embarqués dans une intrigue à la Agatha Christie, Morse coincé avec les suspects dans l'hôtel, apparemment inoccupé, tandis que ses collègues, restés au poste, voient leur inquiétude grandir au fur et à mesure qu'ils découvrent les dessous de cette affaire.
C'est une excellente conclusion pour cette huitième saison... une conclusion qui laisse des interrogations en suspens et pourrait donc, en théorie, permettre une continuation.
J'espère !
17:14 Publié dans Télévision | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, télévision, actu, actualite, actualites, actualité, actualités
samedi, 05 février 2022
Super-héros malgré lui
Pour présenter ce film, je pourrais affirmer qu'il propose une réflexion sociologique sur le malaise narcissique contemporain... mais je crois qu'il est plus juste de dire que la "bande à Lacheau" s'appuie sur le triptyque "bite anus vomi" pour rendre un hommage parodique aux films de super-héros hollywoodiens.
Lacheau réalisateur était attendu avec impatience, tant son Nicky Larson était tordant. (Comme acteur, on l'a vu entre temps dans le film de son pote Boudali 30 jours max.) Ici, il incarne un acteur de seconde zone, qui peine à percer, et qui, suite à un accident, va se prendre pour le personnage qu'il incarne dans un film.
Ce Badman est évidemment un décalque de Batman, tout comme le méchant Clown est un décalque du Joker... mais c'est le personnage interprété par Lacheau qui plagie la fameuse scène des escaliers (avec Joaquin Phoenix). Tout le film est comme ça : tantôt dans le faux sérieux, avec des bastons et des poursuites qui font authentique, bien vite contrebalancées par "le détail qui tue", forcément parodique et qui remet tout le monde à sa place. (... et, parfois, révèle quelques secrets de fabrication !) Je recommande la bagarre avortée de la fin, dans l'entrepôt, qui est peut-être un clin d’œil à Deadpool 2. Les connaisseurs apprécieront aussi la scène qui fait intervenir un personnage doté de grands favoris... et une voiture de marque roumaine ! On remarque que Lacheau a puisé aussi bien chez DC (Batman) que chez Marvel, des Avengers à Spiderman, en passant par les X-Men.
Il ne faut pas plus relâcher l'attention quand sont proposés des flashs d'information. Intéressez-vous aux sous-titres... (Allez, je vous en donne un : sachez que Michèle Thor va reprendre la chanson Si j'avais un marteau...) Une autre révélation est présente dans ce film : la cause réelle de l'accident qui a eu lieu sur le tournage d'un film américain...
Au niveau de la distribution, il faut noter le retour de Chantal Ladesous (pas très présente mais marquante dès qu'elle est à l'écran) et la venue de Régis Laspalès (qui semble se demander ce qu'il fait là). De son côté, Jean-Hugues Anglade incarne le père du héros, dans un rôle qui est sans doute une manière de faire référence à la série Braquo. Soyez attentifs à tout ce qui concerne un nouveau modèle de voiture...
Dès le début, le ton est donné, avec un personnage qui subit un "coup du sort" et un autre qui se voit ridiculisé par une publicité. On est au-dessous de la ceinture et l'on ne va pas beaucoup en bouger durant cette histoire. Les scénaristes ne respectent rien, ni les enfants, ni les animaux... ni Notre-Dame de Paris !
Dans la salle, la plupart des spectateurs savaient ce qu'ils venaient voir et ont bien ri. J'ai toutefois été étonné que plusieurs couples soient accompagnés d'un garçon en bas âge. Je ne pense pas que la nature des gags visuels ni les dialogues soient adaptés à ce type de public.
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Twist à Bamako
Robert Guédiguian fait escale au Mali (en réalité au Sénégal, où le film a été tourné), en 1962, alors que le pays est indépendant depuis peu. Au pouvoir se trouve Modibo Keita, formé dans des écoles françaises puis devenu marxiste : le nouveau Mali penche davantage du côté de l'URSS que de celui des États-Unis, même si la culture occidentale est omniprésente dans le pays... du moins dans les villes.
Le cinéaste (qui n'a quasiment tourné qu'avec des acteurs noirs, français ou africains) a constitué un joli couple de héros. Lui, Samba (Stéphane Bak, vu l'an dernier dans Tokyo Shaking), est un fils de bourgeois converti au marxisme, adepte fervent de la Révolution. Elle, Lara (Alicia Da Luz Gomes, une révélation), vient d'une famille descendant d'esclaves ruraux et a été mariée de force au petit-fils du chef du village. Tous deux ont de la fougue et du charme. Leur love story fonctionne à merveille, sur fond de musique occidentale : américaine bien sûr, mais aussi française, puisqu'on entend Dick Rivers (à l'époque membre des Chats sauvages), Johnny Hallyday et Claude François, dont les posters ornent les murs du côté de la chambre occupé par le frère de Samba. L'aîné, lui, a accroché les images du président Keita, du communiste vietnamien Hô Chi Minh de Patrice Lumumba... ainsi que "l'affiche rouge", un clin d’œil à l'un des précédents films de Guédiguian, L'Armée du crime.
Sur le plan visuel, la mise en scène intègre des photographies prises sur le vif (dans les dancings) ou dans un atelier, qui font référence au travail de Malick Sidibé (décédé en 2016). Bien qu'étant en noir et blanc, ces photographies donnent une couleur supplémentaire au film, déjà fort chamarré par ailleurs.
Je suis plus partagé sur la partie politique du film. Je trouve intéressant d'avoir choisi de donner une version africaine de l'histoire... ce qui implique que les malheurs des Maliens ne proviennent pas forcément de la France, mais parfois (souvent ?) de leurs compatriotes. Mine de rien, Guédiguian dénonce le patriarcat, le conservatisme religieux, les chefferies traditionnelles... et (même) les vues étriquées des nouveaux dirigeants révolutionnaires. Tout le monde en prend pour son grade, de manière relativement nuancée (concernant les chefferies et les "anciens", présentés certes comme très conservateurs, mais avec un sens du collectif). A la fin, peut-être (selon moi) pour éviter toute accusation de "regard néocolonial", Guédiguian fait dire à l'un des personnages que le Mali n'en serait pas arrivé là s'il n'avait pas été colonisé... une manière un peu facile de faire porter le chapeau aux méchants Européens.
Je note que, contrairement aux séquences consacrées à la vie privée des héros, celles évoquant le combat politique ne sont pas toujours très bien jouées. C'est dommage, parce que le film ne manque pas d'allant, se concluant par une séquence contemporaine, dans laquelle on retrouve l'une des protagonistes, qui a survécu.
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vendredi, 04 février 2022
Lynx
La sortie de ce documentaire animalier fait inévitablement penser à celle de La Panthère des neiges (à voir absolument). Dans les deux cas, un passionné de la nature tente de débusquer un félin et rencontre en cours de route une flopée d'animaux sauvages, dans des paysages somptueux.
Là s'arrêtent les similitudes. Contrairement à Sylvain Tesson, Laurent Geslin n'existe que par la voix. Il n'apparaît pas physiquement dans le film, s'effaçant derrière son sujet. De plus, l'objet de sa quête n'est pas un animal mystérieux, dont il explore l'un des derniers refuges sur Terre, mais un animal autrefois disparu du Jura (suisse), et qui a été réintroduit. C'est d'ailleurs le sens de l'une des premières scènes.
J'aime les félins, dans la vie et sur les écrans (grands comme petits). Ce documentaire-ci leur rend hommage. Quand le réalisateur est parvenu à les repérer, il nous en propose des images à la fois belles et saisissantes.
Au début, c'est un mâle adulte qu'il a débusqué. Au moment des amours, il se lance à la recherche d'une femelle, qu'il finit par rencontrer. (Étranges chants nuptiaux que ceux des lynx !...) Visiblement, on se trouve mutuellement très à son goût, on copule... et un trio de chatons débarque, deux mâles et une femelle. Le cinéaste s'amuse à remarquer que cette dernière semble plus dégourdie que ses frangins, qui ne pensent qu'à s'amuser. On la voit commencer très jeune à explorer son environnement. (Quand on connaît la suite, on se demande toutefois si ce n'est pas une réécriture a posteriori.)
Je vais essayer de ne pas trop divulgâcher mais, sachez qu'au bout du compte, une partie de la "famille" aura disparu. Entre temps, on aura croisé "le borgne" (un mâle rival du père), mais aussi des renards, des chats, des hermines, des marmottes, des corbeaux, des geais, des hiboux, des chamois, des chouettes... et des humains (des promeneuses), lors d'une scène stupéfiante, que le réalisateur n'avait pas anticipée. Je n'en dis pas plus ! Hélas, à d'autres occasions, quand un lynx croise le chemin d'un humain, cela se passe moins bien...
On saura gré au réalisateur de ne pas avoir caché que la nature est cruelle (même sans les humains)... et parfois solidaire : les proies potentielles s'avertissent les unes les autres de la présence d'un prédateur.
Dans la salle, on a été captivé de 7 à 77 ans.
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Adieu Monsieur Haffmann
Je ne connais pas la pièce de théâtre dont ce film est (très librement) inspiré. J'ai été attiré par la distribution, le bouche-à-oreille (très bon) et le sujet. Au cœur de l'intrigue se trouve la spoliation des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les territoires qu'ils contrôlent, les nazis ont interdit aux juifs de posséder des entreprises, les contraignant à les vendre (souvent à prix cassé) voire à les abandonner, au profit soit des nazis eux-mêmes, soit de collaborateurs peu scrupuleux.
Pour tenter de contourner ces mesures discriminatoires, certains artisans ou commerçants ont transmis (plus ou moins fictivement) leur boîte à un employé ou un ami non-juif. C'est ce qu'il se passe ici, au tout début de l'histoire, quand le bijoutier Joseph Haffmann (Daniel Auteuil, très bien) décide de faire partir sa famille en zone non-occupée et de passer la main (officiellement) à François Mercier.
Toute la première partie dresse le tableau des relations complexes entre les deux familles, si dissemblables. Le couple de bijoutiers est riche, celui formé par son employé et son épouse, sans être dans la misère, tire le diable par la queue. Haffmann est heureux en ménage et père de trois enfants. Mercier pense qu'il est stérile et son couple n'est pas serein. Enfin, le bijoutier jouit d'une bonne santé, tandis que l'employé a un pied-bot. Cela lui a permis d'éviter d'être mobilisé en 1939, mais, à une époque où l'on est très pointilleux sur le patriotisme et les signes de virilité, l'employé "chanceux" souffre d'un gros complexe d'infériorité.
L'arrivée des nazis et ses conséquences permettent à François Mercier (ainsi qu'à son épouse) de vivre une sorte de revanche sociale. Certes, en théorie, il n'est que le gardien de la boutique (passée à son nom, tout de même), mais il se sent pousser des ailes... et puis l'occupant n'est pas toujours antipathique... et il permet de très bien gagner sa vie.
C'est sur ce couple modeste, auquel la vie semble sourire enfin, que le film est centré. Sara Giraudeau et Gilles Lellouche sont remarquables, le second encore plus que la première. J'ai toutefois eu de grandes appréhensions quand j'ai découvert le "marché" que François proposait à son ancien patron. Je n'en dirai pas plus, mais j'ai eu peur que l'on tombe dans le très glauque. La suite m'a rassuré.
À porter aussi au crédit du film la mise en scène du travail manuel des bijoutiers. On comprend mieux ce que signifie l'expression "être orfèvre en la matière". (Les deux acteurs principaux ont été doublés dans les scènes de taille des bijoux.)
C'est un beau film sensible, subtil, humaniste, féministe même à travers l'évolution du personnage de Blanche, d'abord épouse soumise, puis de plus en plus indépendante (dans la mesure du possible, à l'époque).
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samedi, 29 janvier 2022
Marché noir
Intitulé Koshtârgâh ("L'Abattoir") à l'origine, The Slaughterhouse à l'international, ce polar iranien croise deux intrigues en apparence distinctes, mais qui vont finir par se rejoindre.
L'histoire débute par la découverte de trois cadavres dans l'une des chambres froides d'un abattoir de Téhéran. Le propriétaire semble furieux et demande au gardien de "régler le problème". Celui-ci, qui se sent responsable (sans qu'on sache très bien pourquoi au début), demande à Amir, son fils aîné, de l'épauler. Celui-ci, tout juste revenu de France (d'où il a été expulsé), voudrait désormais éviter les embrouilles, mais il se voit mal laisser son père dans la panade.
Ce début est bien mystérieux, les principaux personnages ayant tous quelque chose à cacher. Si l'interprétation est globalement bonne, j'ai toutefois été un peu agacé par celui qui incarne le père : il en fait trop. Il faut dire que la caractérisation est à la louche : l'homme âgé, veuf, obèse, est autoritaire avec les siens mais servile vis-à-vis du patron de l'abattoir (qui lui a fourni un logement).
En parallèle, on découvre petit à petit l'importance prise par le trafic de devises (des euros et des dollars). Elles sont très recherchées dans le pays, en particulier par tous ceux qui veulent faire du commerce international, surtout s'il est illégal. C'est aussi un objet de spéculation : vendre puis refourguer des dollars permet, si l'on est malin et qu'on réussit à se procurer une grande quantité d'espèces, de faire de jolies culbutes. Pour anticiper les fluctuations du billet vert, certains Iraniens suivent avec attention les remous de la politique internationale, même s'ils n'en comprennent pas tous les ressorts. Je signale aussi une séquence nocturne, impressionnante, construite autour d'un marché de devises (illégal) à ciel ouvert, dans un quartier peu fréquenté de la capitale iranienne. On y voit de vieux messieurs côtoyer le frisson de la spéculation, quitte à frôler l'arrêt cardiaque. On se croirait à la corbeille d'une bourse occidentale, il y a quarante-cinquante ans !
Amir finit par trouver du travail auprès du propriétaire de l'abattoir, qui est mêlé au trafic de devises... ainsi qu'au commerce de bétail. La mort (accidentelle ?) des trois hommes du début pourrait ne plus être qu'un souvenir, mais voilà qu'un petit bout de femme en tchador vient semer la pagaille. Il s'agit d'Asra, la fille de la plus âgée des trois victimes (et cousine des deux autres). C'est une Iranienne arabophone, à l'image d'une communauté qui vit dans l'ouest du pays et profite de la proximité de la frontière irakienne pour se livrer à de menus trafics. Par son intermédiaire, on finit par comprendre quel est le lien avec la folie du dollar.
J'ai été pris par ce polar social, une nouvelle réussite iranienne après Un Héros et surtout La Loi de Téhéran. Si l'occasion se présente, courez voir ce film !
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The Card Counter
Ce "compteur de cartes" est William Tell, un type hyper-méticuleux, adepte du contrôle total, un peu autiste sur les bords. Mais on est loin de Rain Man : ici, le héros est un ancien militaire, qui vient de faire près de dix ans de prison.
La mise en scène de Paul Schrader est suffisamment habile pour nous faire comprendre qu'en prison comme à l'hôtel, le héros suit une discipline quasi monacale et vit dans une forme d'enfermement. S'ajoute à cela la prestation d'Oscar Isaac, marmoréen, digne d'un Joaquin Phoenix. A côté de lui, quel que soit leur talent, tous les autres interprètes paraissent mineurs (même Willem Dafoe, que j'ai trouvé plus marquant dans Nightmare Alley et le dernier Spider-Man).
Il en est quand même un qui sort du lot... parce qu'il m'est particulièrement antipathique : Cirk (prononcer "Queurque, avec un K"), incarné par Tye Sheridan, qui a naguère réussi à me dégoûter du personnage de Cyclope dans les X-Men. J'ai du mal à démêler ce qui m'irrite le plus, entre la vacuité de "Cirk" et la fadeur de son interprétation. De surcroît, j'ai senti venir à des kilomètres le petit coup de théâtre le concernant, dans la troisième partie de l'histoire.
Fort heureusement, le film a d'autres atouts dans sa manche. Schrader est parvenu à m'intéresser aux tournois de Poker et au Black Jack (ce qui n'est pas une mince affaire). Je suis surtout resté accroché à son personnage principal, fascinant par sa retenue et ses obsessions. Et puis il y a le fond de l'histoire, lié à la politique étrangère des États-Unis et à la condamnation de Tell. Ses cauchemars nous apprennent l'essentiel.
Cerise sur le gâteau : c'est vraiment bien réalisé, dans des styles différents. L'ambiance des casinos est joliment rendue. J'ai trouvé toutefois l'austère contexte des chambres d'hôtel bien plus passionnant. Ce goût pour la sobriété ne m'a pas empêché d'apprécier la scène qui se déroule dans le "jardin de lumières", un intermède romantique inattendu, magnifique à voir sur grand écran.
Bref, je conseille vivement (même si j'ai trouvé la dernière scène très "cliché"). C'est l'un des films à ne pas rater en ce moment.
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Ouistreham
Emmanuel Carrère adapte (à sa manière) le livre-reportage de Florence Aubenas, la journaliste devenant une écrivaine, incarnée (sobrement) par Juliette Binoche. Il fut un temps où un film avec cette comédienne en tête d'affiche aurait bénéficié d'une sortie sur un nombre impressionnant d'écrans. Tel n'est pas le cas ici, en dépit de l'adaptation d'un livre à succès.
Et pourtant, Juliette Binoche y fait montre de son talent, tout comme la brochette d'actrices non professionnelles recrutées pour l'occasion, au premier range desquelles il faut signaler Hélène Lambert, qui interprète Christèle, mère célibataire de trois enfants et abonnée aux micro-jobs à horaires flexibles.
En immersion, Marianne l'écrivaine bobo découvre la précarité et la vie de femmes dont elle est à la fois si lointaine et si proche. Le sujet n'est plus nouveau-nouveau, mais cela fait malgré tout du bien quand, de temps en temps, on nous rappelle quelle est la situation de la "France d'en-bas", celle qui permet au système de fonctionner, tout en vivant avec des salaires minables.
On suit d'abord les héroïnes dans une entreprise de nettoyage, qui intervient aussi bien dans des commerces que des campings (ah, les odieuses propriétaires !). Une partie de ce petit monde va se retrouver au nettoyage des ferrys, un travail réputé particulièrement pénible, notamment en raison du rythme imposé (des centaines de cabines à nettoyer en 1h30, avec, en bonus, les parties communes). Comme chez les mineurs ou les fondeurs, la dureté du travail, couplée à la fréquentation quotidienne des mêmes têtes, crée des proximités, voire des solidarités. Ces éclairs de lumière sont beaux à voir, d'autant que l'intrigue évite l'écueil du conte de fées : la vie ne fait pas de cadeau à ces femmes et certains des personnages principaux vont se brouiller, pour une raison que je laisse à chacun le soin de découvrir.
C'est une belle œuvre humaniste, sur notre époque et les rapports humains.
00:33 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
vendredi, 28 janvier 2022
La Leçon d'allemand
Le réalisateur Christian Schwochow, auquel on doit notamment De l'autre côté du mur, s'est lancé dans l'adaptation du roman éponyme de Siegfried Lenz, dont l'action fait dialoguer deux époques.
Dans les années 1950, un jeune homme est emprisonné, à Hambourg. Il a l'air un peu perdu et il rechigne à rédiger ce qui ressemble à une autocritique. Nous ne sommes pas en RDA (communiste), mais en RFA (capitaliste), on appelle donc cela une rédaction sur "les joies du devoir". Cela pousse le jeune homme à se replonger dans ses souvenirs...
L'essentiel de l'histoire se déroule dans la deuxième partie de la Seconde Guerre mondiale. Les personnages vivent en Allemagne du Nord, pas très loin de la frontière danoise si l'on en juge par les patronymes : Jepsen, Nansen... (Il s'agit sans doute du Schleswig-Holstein, une région récupérée par la Prusse au XIXe siècle à l'issue de la "Guerre des Duchés".)
Jens Jepsen est le chef de la police du village, une charge qui ne lui vaut guère de travail, mais lui procure du prestige et un bel uniforme. L'homme est un père de famille autoritaire, qui tient par-dessus tout à "faire son devoir"... voire à l'imposer aux autres. Il règne en petit tyran sur une famille où la mère est totalement soumise. Leurs trois enfants ont des destins et des personnalités contrastés. L'aîné, sans doute sur la pression du père, s'est engagé dans l'armée et a été envoyé sur le Front de l'Est. La cadette est un peu rebelle. On la sent attirée par la ville et surtout par une vie moins ennuyeuse que celle de son village peuplé de sinistres adultes.
Le réalisateur focalise son attention sur le second fils, Siggi, qu'on ne voit jamais se rendre à l'école. Il explore les alentours, les prés, les plages, une maison abandonnée (dont il n'est pas difficile de comprendre ce qu'il est advenu des occupants...) et Max, un peintre du même âge que son père, avec lequel il a jadis fait les 400 coups. Mais les temps ont changé et Jens semble désormais prendre un malin plaisir à persécuter son ancien pote, qui a la suprême audace de continuer à produire une peinture qualifiée de "dégénérée" par les autorités nazies.
Cette plongée dans le passé ressuscite la vie d'un village ordinaire, où l'on accepte le régime hitlérien sans forcément adhérer à son idéologie. D'ailleurs, on s'accommodera facilement de la nouvelle république, d'autant que, d'après ce qu'on nous montre à l'écran, nombre de cadres de l'ancien régime ont pu s'y recycler...
Mais là n'est pas le plus important. Le film met en scène une lutte entre le principe d'autorité (incarné par le père policier) et la liberté artistique, qui passe par la peinture, mais aussi le chant, la musique, la danse. Le garçon est tenaillé par un conflit d'allégeance : doit-il obéir aveuglément à son père, qui s'occupe de lui et semble vouloir lui indiquer le droit chemin, ou bien, de temps en temps, donner un coup de main au peintre maudit, accompagné de sa délicieuse épouse ?
J'ai eu du mal à entrer dans cette histoire mais, une fois que j'ai compris les présupposés scénaristiques, j'ai été pris. L'un des intérêts consiste à deviner comment l'enfant sans histoire d'un notable rural a pu se retrouver des années plus tard en prison.
En revanche, ce n'est pas très bien réalisé. J'ai trouvé la mise en scène pataude, la photographie médiocre (un comble pour un film illustré de tableaux expressionnistes). Les plus belles images (en noir et blanc) sont celles qui accompagnent le générique de fin ! Mais l'intrigue et le jeu des acteurs méritent le détour.
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mercredi, 26 janvier 2022
Les Leçons persanes
Cette "fantaisie historique" a un parfum d'ex-URSS. Le film est considéré comme biélorusse, son réalisateur (Vadim Perelman) est d'origine ukrainienne, son producteur (Timur Bekmambetov) kazakh et la partie technique a bénéficié du savoir-faire russe. Pourtant, l'action se déroule en Europe de l'Ouest, quelque part entre le nord-est de la France et la Belgique, dans ce qui est censé être un camp de transit, pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le cœur de l'intrigue concerne la relation ambiguë qui va naître entre un détenu juif et l'un des cadres (SS) du camp, qu'il réussit à convaincre qu'il est (à demi) persan. Au crédit de cette histoire il faut porter l'interprétation de Nahuel Perez Biscayart (remarqué dans Au revoir là-haut), impressionnant dans le rôle du détenu malingre, tenaillé par l'inquiétude et déployant des trésors d'imagination pour tenter de survivre. Face à lui, Lars Eidinger tient la route, même si son jeu est moins subtil. Au niveau de l'interprétation, c'est à peu près tout, parce qu'on ne peut pas dire que les seconds rôles soient de grandes réussites. Du côté des détenus, on nous présente des personnages à peine esquissés, auxquels on a du mal à croire. Mais que dire des SS, gradés comme sous-fifres, qui gèrent le camp ? Au départ, l'idée de nous présenter les persécuteurs comme des personnes faisant leur boulot, sans la moindre considération pour le bien-être des détenus (juifs ou non), m'a semblé bonne. Mais la mise en scène de cette vie quotidienne est plate, souvent maladroite... voire pas crédible du tout.
L'un des problèmes vient de la volonté des auteurs de dire beaucoup de choses, en "mixant" différents apports. Ainsi, le camp qui sert de cadre à l'intrigue est un mélange de différents types de lieux d'incarcération : transit, internement (en France), concentration et extermination. L'insertion d'un plan aérien montrant des cadavres nus et la proximité d'un bâtiment doté d'une cheminée en train de fonctionner ont visiblement pour fonction d'évoquer l'extermination... sauf que celle-ci ne s'est pas déroulée en Europe de l'Ouest, mais bien plus à l'est. Même chose pour la fusillade du début. Elle est une référence à l'action des Einsatzgruppen... qui ont sévi en Europe de l'Est, pas en Belgique ni en France. Mais cette scène est indispensable à l'intrigue, puisqu'elle introduit le sauvetage du héros et son énorme mensonge. (Elle est de surcroît très mal jouée.) Les spectateurs un poil cultivés remarqueront aussi quelques incohérences, par exemple la confusion entre les SS et la Wehrmacht (l'armée allemande).
Le pire concerne l'argument principal : la duperie mise au point par Gilles. Même si, à l'époque, rares étaient les personnes (en Europe) à connaître ne serait-ce que quelques bribes de farsi, il n'est pas vraisemblable qu'un officier SS envisageant de s'installer en Iran après la guerre n'ait pas commencé à s'intéresser un peu à la langue qui y est majoritaire. Je n'ai pas marché dans la combine, de surcroît totalement fictive, puisqu'elle n'est en rien inspirée de la véritable histoire d'un détenu. (Claude Lanzmann doit se retourner dans sa tombe...) Du procédé je retiens toutefois un effet marquant : la manière dont Gilles invente les faux mots persans va finalement le rendre très utile, après que les registres du camp auront été brûlés. Je n'en dis pas plus, mais cela fait partie des aspects réussis du film, qui n'est pas une daube intégrale, juste une production maladroite, qui considère la Shoah comme un produit de consommation cinématographique, au même titre que la boxe, le bricolage ou la gravure sur string.
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dimanche, 23 janvier 2022
Le retour de Morse
Un an après le final tragique de la saison 7, France 3 nous propose le premier épisode de l'ultime saison de cette passionnante série policière, intitulé Choisir son camp.
L'intrigue débute à l'université d'Oxford, quand un colis piégé explose dans le bureau d'un enseignant (exerçant des fonctions de direction). On se demande si le prof était bien la cible (à cause des financements privés qu'il a acceptés) ou bien ses secrétaires, l'une d'entre elles étant décédée. Dans le même temps, des tensions émergent autour de l'équipe de football locale. C'est une équipe anglaise, dans laquelle évoluent des joueurs nord-irlandais. La vedette reçoit des menaces de mort... mais l'on se demande si c'est lié au conflit touchant l'Ulster (l'action se déroule en 1971), à la vie privée du joueur, à son passé en Irlande du Nord... ou bien au fait qu'il soit métis.
Les deux affaires se révèlent plus complexes que prévu... et liées l'une à l'autre. La police a bien du mal à démêler l'écheveau, son meilleur enquêteur (Morse) sombrant dans l'alcool. Dans un premier temps, celui-ci doit chaperonner le joueur vedette... alors qu'il ne connaît rien au football. La résolution de l'affaire va prendre du temps, laissant planer une menace au-dessus de la tête de plusieurs personnages.
Comme d'habitude, c'est bien écrit, bien joué, bien filmé. Je n'aime pas l'arc narratif qui montre Morse se saouler de plus en plus, mais, bon, faut voir ce que la suite va donner.
P.S.
Au cours de l'épisode, le footballeur vedette est amené à participer à l'émission "This is your life", un programme télévisé qui a duré près de cinquante ans outre-Manche... bien plus que son décalque français, "Avis de recherche", présenté jadis par Patrick Sabatier.
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jeudi, 20 janvier 2022
Nightmare Alley
Cette "allée cauchemardesque" est à la fois une attraction de fête foraine et la métaphore de ce qui peut arriver à certains personnages, comme ces imbéciles alcooliques qui acceptent de déchiqueter le cou d'une poule en public... jusqu'à ce qu'on les retrouve, à demi morts, au fond d'une ruelle.
Ce film m'a surpris tout d'abord parce qu'il ne s'ouvre pas sur la relation trouble qui va lier le héros, le "charlatan" du roman d'origine, et le docteur Ritter, une femme au charme glacial, forcément fatale (ahhhhhh, Caaaate !). La première heure nous raconte comment Stanton (Bradley Cooper, très bon), un vagabond au passé obscur, doté de certains talents (dont celui de dessiner), va devenir le roi de la fausse télépathie, un bonimenteur couronné de succès. Son intégration à la troupe et sa progressive acquisition des codes et des trucs des artistes-voyous est bigrement bien mise en scène et interprétée. Au détour des personnages, on croise Rooney Mara, Toni Collette (la reine du savonnage...), Ron Perlman et le toujours inquiétant Willem Dafoe.
L'intrigue prend une nouvelle direction quand le duo de "magiciens" commence à se produire devant la bonne société urbaine. L'appât du gain pousse le héros à tenter des arnaques plus risquées... mais plus lucratives. La manière dont il "harponne" un juge et son épouse est un des grands moments du film... tout comme la conclusion de cette intrigue annexe, qui a pris la salle par surprise !
La deuxième partie voit le "télépathe" entrer en contact avec une psychologue en qui il croit reconnaître une sœur de destin : tous deux sont d'habiles manipulateurs, anciennes victimes avides de revanche... mais qui manipule l'autre, vraiment ? Je laisse à chacun le loisir de découvrir qui l'emporte, au jeu du chat et de la souris.
En dépit de toutes ces qualités, j'ai trouvé certaines péripéties un peu téléphonées : on sent venir le retournement de la troisième partie... tout comme la conclusion finale, à laquelle le réalisateur a préparé ses spectateurs en laissant de petits cailloux, à intervalle régulier. Je n'ai pas trop aimé l'aspect moralisateur de l'histoire, où il est question d'une multitude de "pécheurs", certains se repentant, d'autres étant punis. Mais, globalement, cela reste un bel ouvrage.
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samedi, 15 janvier 2022
Le Test
Annie (Alexandra Lamy, irradiante) est une "super-maman". Elle semble avoir tout réussi dans la vie, notamment son mariage et ses enfants. Cependant, un jour, de passage aux toilettes, elle remarque la présence, dans la poubelle, d'un test de grossesse... positif. Comme ce n'est pas le sien, elle démarre une enquête pour découvrir le fin mot de l'histoire. Sa fille, à peine adolescente, serait-elle enceinte ? Ou bien s'agit-il de la copine de César, son fils "bogosse" éperdument amoureux ?... à moins que son autre fils, Max, ne cache bien son jeu ? Pire : son mari entretiendrait-il une liaison ?
La première partie développe ces questionnements, de manière burlesque, sans trop de subtilité, mais avec efficacité. On s'amuse de la progressive découverte, par la mère, de la réalité de la vie affective de trois de ses enfants... On n'en est pas moins consterné de constater que les rejetons de la classe moyenne ne semblent pas savoir ce qu'est un préservatif, ni la pilule. (Mais, sans cela, il n'y aurait pas de film...)
Au bout d'environ de 35-40 minutes, l'intrigue prend une autre direction. La vie affective des enfants passe au second plan. La mère occupe l'espace. Elle se trouve à un moment clé de sa vie, entre deux âges. L'histoire est plus teintée d'émotion... avant que ne ressurgisse l'histoire du test, censée être résolue plus tôt... mais les spectateurs les plus attentifs n'y auront pas cru... et l'on se dirige vers la solution qui, dès le début, semblait la plus vraisemblable.
Au niveau de l'interprétation, je distingue Alexandra Lamy et Joaquim Fossi (aperçu récemment dans Les Choses humaines), qui incarne avec malice l'un des fils. Un autre fils a les traits de Matteo Perez, aperçu lui dans L'heure de la sortie et C'est quoi cette mamie ?! Il a aussi un rôle dans le téléfilm Meurtres au Mont Saint-Michel, diffusé ce samedi sur France 3... un des plus mauvais de la série : le scénario est intéressant, mais ce n'est pas bien filmé et surtout pas bien joué.
16:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 08 janvier 2022
The King's Man : Première Mission
Au vu du titre, on comprend qu'il ne s'agit pas du troisième volet d'une série assez brillamment commencée en 2015 (le deuxième volet, sous-titré Le Cercle d'or, sorti en 2017, étant décevant), mais d'une préquelle.
Pas de Colin Firth à l'écran donc... et pour cause : l'action débute en 1902, en pleine Guerre des Boers. En dépit de sa conclusion mélodramatique appuyée, j'ai bien aimé cette introduction, ne serait-ce que parce qu'elle rappellera/apprendra aux spectateurs que nos amis Britanniques avaient créé des camps de concentration (peut-être les premiers du genre).
La suite est moins rigoureuse sur le plan historique... et c'est un sacré euphémisme ! L'intrigue est un gloubi-boulga de théories complotistes sur la Première Guerre mondiale et l'émergence des régimes totalitaires. Les héros croisent d'authentiques personnages historiques, mais dont les motivations voire le comportement n'ont pas grand chose à voir avec les personnes qui les ont inspirés.
À partir de là, soit le film perd ses spectateurs (qui ne peuvent adhérer à ce qu'ils voient à l'écran tant le fond est farfelu, jusque dans les péripéties, souvent invraisemblables), soit il les accroche grâce à son énergie, en particulier celle dégagée par quelques séquences assez enlevées. La première d'entre elle voit les héros affronter le moine Raspoutine (stupéfiante interprétation de Rhys Ifans). L'éminence grise de l'impératrice russe est transformée en super-vilain quasi indestructible, dans une séquence survitaminée.
Je recommande aussi toute la partie se déroulant sur le front germano-britannique (pendant la Première Guerre mondiale). C'est à la fois spectaculaire et prenant, avec une conclusion inattendue, qui a fait réagir dans la salle.
Enfin, il ne faut pas rater le morceau de bravoure, l'assaut du repaire du très-méchant-dont-on-ne-voit-pas-le-visage. Même si, sur le fond, c'est souvent limite débile, j'ai pris du plaisir à voir ce bon film d'action.
P.S.
Attention : le générique de fin est interrompu par une scène (totalement invraisemblable...) qui annonce la suite des aventures des espions britanniques.
ATTENTION :
GROS
DIVULGÂCHAGE !
Ne lisez surtout pas la suite si vous n'avez pas encore vu le film.
J'ai été étonné qu'un fort sentiment anti-écossais imprègne l'intrigue. Ainsi, le décès de l'un des personnages principaux est lié à deux soldats écossais de l'armée britannique... le pire étant atteint quand on découvre l'identité réelle du chef des méchants !
Il aurait été plus logique de faire de lui un Irlandais (catholique), tant l'hostilité entre les deux peuples était grande. Ainsi, en France, on ignore souvent qu'en 1916, alors que le Royaume-Uni connaissait de grandes difficultés sur tous les fronts, les républicains irlandais ont organisé une insurrection contre la domination de Londres.
18:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
355
La signification du titre n'est donnée qu'à la fin de l'histoire : c'était le nom de code d'une espionne, dont l'identité est longtemps restée secrète. En quelque sorte, c'est une figure tutélaire pour la brochette de déglingueuses qui évolue sous nos yeux.
Au centre, un peu en avant par rapport aux autres, se trouve l'Américaine Mace, agent de la CIA, inévitablement interprétée par Jessica Chastain (qui coproduit le film). Lui tient la dragée haute l'Allemande Marie (Diane Kruger... mmmm). Les autres sont un peu un cran en-dessous : la Britannique Khadijah, meilleure amie de Mace (MI6 et CIA main dans la main ?), la Colombienne Graciela (Penelope Cruz, dans un rôle stéréotypé au possible)... et une Chinoise (il y a vingt ans, ç'aurait été une Russe), la méticuleuse Lin (qui a les traits de Bingbing Fan). La distribution est de qualité... et remarquablement internationale, tout comme les dialogues. (Dans la version originale, on entend parler anglais, espagnol, allemand, français, arabe, russe et chinois !)
Avant de former une équipe soudée, les dames vont un peu se foutre sur la gueule, en particulier Mace et Marie, la seconde ayant subtilisé un sac que convoitait la première. S'en suit une affriolante poursuite dans les rues et le métro de Paris, Jessica Chastain en robe fleurie se lançant dans le 400 mètres haies pour tenter de rattraper une intrépide Diane Kruger à moto. J'adore! La rivalité entre les deux fortes têtes culmine dans une baston "poissonnière" du plus bel effet.
Le problème est qu'après cette tonitruante première partie (succédant à une introduction explosive en Colombie), l'histoire patine un peu. Les espionnes commencent à s'apprivoiser et à déjouer les combines d'à peu près tous les mecs qui se dressent sur leur chemin, au Maroc comme à Shanghai. On est sur le point de tomber dans le film de copines quand, soudain, la violence masculine reprend le dessus, dans une séquence particulièrement intense.
L'intrigue est cousue de fil blanc mais, franchement, c'est très correctement filmé et les actrices se donnent à fond. Le dénouement survient lors de l'attaque (spectaculaire) d'une suite, dans un hôtel de luxe. Même si je pense que cela sera assez vite oublié, c'est incontestablement divertissant.
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vendredi, 07 janvier 2022
Ma Trique IV
Échaudé par l'avalanche de critiques négatives que la sortie du film a suscitée, j'ai tardé à tenter ma chance, comme un grand, dans une salle... et puis voilà encore un long-métrage qui n'usurpe pas sa dénomination : 2h30 de délire sociétalo-romantico-numérique, réalisé par Larry Lena Wachowski, sans son frangin sa frangine (dont je suis sans nouvelle depuis Cloud Atlas).
La première demi-heure m'a emballé. On y croise Trinity vêtue de cuir noir, mais aussi une version "bis", plus jeune et asiatique, d'elle. J'aime bien ce petit côté badass... et puis Carrie-Ann Moss a de la classe, même quand elle incarne une MILF ! Il va cependant falloir longtemps s'en contenter, puisqu'après cet amuse-gueule bien foutu, le personnage est placé au deuxième voire au troisième plan... avant de resurgir pleinement dans la dernière demi-heure.
En attendant, on retrouve Thomas Anderson, le créateur génial du jeu addictif (et profitable) "Matrix", englué dans une vie matériellement aisée mais spirituellement et sentimentalement vide... Cependant, est-ce sa véritable vie ? Le scénario laisse aux spectateurs la liberté de choisir leur version.
Soit le début décrit la réalité et la suite fantasmagorique n'est que la vision de celles et ceux qui subissent un quotidien tristounet et tentent de vivre une existence exaltante, dans l'univers alternatif.
Soit le monde qui apparaît réel n'est qu'une illusion, les humains étant plongés par la Matrice et ses concepteurs dans une léthargie contemplative... d'où une suite de péripéties mises en scène avec un incontestable brio. De plus les décors sont vraiment superbes.
Alors, oui, on pourra reprocher à la réalisatrice de puiser dans le vieux livre de recettes, histoire de jouer sur la nostalgie des fans des premiers films. Les retours en arrière et les effets de miroir (une scène du nouveau film au regard d'une scène d'un ancien) sont loin d'être tous justifiés.
Larry/Lana a aussi mis dans ce film tout ce qui le/la préoccupe sur le plan personnel : le statut des minorités sexuelles et ethniques, l'identité de genre, la quête (et la conservation) du grand amour... ainsi que ses relations avec Hollywood. J'ai savouré la mise en abyme que constitue la création d'une nouvelle mouture du jeu "Matrix", une allusion évidente à la sortie d'un nouveau film, ardemment souhaitée par la production, qui espère se faire des nouilles encore... Alors, combien de "bullet time" faut-il insérer dans l'intrigue ? Jusqu'à quel point peut-on insister sur les bastons ? N'oublions pas le côté geek et, surtout, le duo de héros iconiques, Trinity et Néo.
Leur relation est la clé de l'intrigue, pas uniquement parce qu'elle motive l'élu à un point tel qu'il est prêt à revenir "dans le jeu". On finit par apprendre pourquoi la Matrice a survécu. La guerre montrée dans le précédent film s'est conclue sur une "paix des braves". À chacun son monde, mais l'un des deux est nourri par la tension amoureuse inassouvie subsistant entre Trinity et Néo... la première étant supposée morte. (Sur le fond, c'est loin d'être con : faute d'une vie amoureuse épanouie, nombre de personnes se plongent dans les univers virtuels sans retenue.) Et c'est ce même amour, s'il parvient à renaître, qui pourrait tout faire basculer.
Vous en concluez que j'ai globalement apprécié. C'est moins sentencieux (pseudo-philosophique) que jadis, c'est superbe à voir sur grand écran, avec du bon son, de l'humour... et j'ai aimé retrouver l'un des plus beaux couples qui ait été créé au cinéma.
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samedi, 01 janvier 2022
La légion d'honneur pour Ben Laden
La promotion de janvier 2022 de l'ordre de la Légion d'honneur fait chauffer les claviers, mais pas forcément pour les bonnes raisons. Certaines minorités actives ont ravivé le « Buzyn bashing » contre l'ancienne ministre de la Santé... avec des motivations pas toujours avouées ni avouables. Ces extrémistes masqués reprochent à la ministre sa gestion de la pandémie... dont les dégâts se faisaient à peine sentir au moment où elle a quitté son poste, en février 2020. On semble avoir aussi oublié qu'à l'époque, nombre de spécialistes (ou prétendus tels), le fameux Raoult inclus, minimisaient la gravité de la crise sanitaire.
Mais revenons à la promotion 2021. Elle comporte beaucoup de noms d'élus, de hauts fonctionnaires et de professionnels de la santé. Mais ce n'est pas ce qui a attiré mon regard. Voici ce qu'on peut lire page 9 de la version pdf du décret :
Bien entendu, ce Ben Laden n'est pas Oussama, dont le cadavre gît sans doute quelque part au fond de l'océan Indien, dévoré par les bactéries (un juste retour des choses). Le Ben Laden dont il est question est l'un de ses neveux, Mohamed, avocat de profession. Sa biographie nous apprend qu'il a suivi toutes ses études en France. C'est la troisième présidence française sous laquelle il reçoit une breloque. En 2010, sous Nicolas Sarkozy, il avait (curieusement) reçu les Palmes académiques. En 2013, sous François Hollande, il fut fait chevalier de la Légion d'honneur... quelques années avant que ce même président ne décore l'un des princes saoudiens.
Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour soutenir nos exportations !
17:58 Publié dans Politique, Politique étrangère, Presse, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : société, france, presse, médias, journalisme, actu, actualité, actualités, actualite, actualites
vendredi, 31 décembre 2021
Un Héros
Le cinéaste Asghar Farhadi a mis fin à ses tribulations européennes (on se souvient notamment d'Everybody knows) pour retourner à son « fonds de commerce » irano-iranien, à vocation universelle. (Naguère, cela a donné le brillant Une Séparation.)
Il était une fois Rahim, un peintre-calligraphe au chômage, emprisonné pour dettes. Un jour, après s'être retrouvé avec un sac rempli de pièces d'or entre les mains, il décide de rendre celui-ci à sa propriétaire. Son acte civique lui vaut la reconnaissance de tous...
... ou pas. Parce que l'intrigue, en apparence simpliste, cache une multitude de faux-semblants. Certains d'entre eux concernent le « héros ». Ce n'est pas lui qui a trouvé le sac, ni qui l'a remis à sa propriétaire (une bien mystérieuse personne, soit dit en passant). Au départ, loin de vouloir faire preuve de civisme, il avait plutôt songé à régler ses problèmes grâce à ce cadeau tombé d'un autobus du ciel.
À partir de là, deux grilles de lecture s'offrent à nous. Soit on croit à la sincérité du héros et l'on se dit qu'il se prend une bien belle série de coups du sort sur la tronche. La morale de l'histoire est que la vertu n'est pas récompensée en ce bas monde, alors que c'est le mode de comportement qui est érigé en modèle. L'autre possibilité est de regarder cela en considérant que le héros est un peu filou sur les bords. Dans ce cas, la morale est qu'au pays des ayatollahs donneurs de leçons, pour s'en sortir, mieux vaut ruser avec les règles... Choisissez votre camp !
Entre temps, on a droit à une satire du monde contemporain, iranien certes, mais avec un aspect universel. Ainsi l'auteur dénonce les dirigeants de la prison et du système pénitentiaire, qui mettent en avant le détenu civique, pour mieux se faire mousser. Il se moque aussi des médias, qui braquent les projecteurs sur un inconnu sans avoir vérifié son histoire. Il dénonce surtout (même s'ils ne sont guère visibles à l'écran) les réseaux sociaux, qui prospèrent sur la rumeur, le dénigrement, la calomnie.
Cela donne une histoire qui oscille entre le vaudeville et le drame. C'est bien joué, prenant à suivre, tant le mystère demeure quand aux pensées secrètes du héros. Ce n'est pas virtuose au niveau de la mise en scène, mais c'est bien écrit et bien joué.
23:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Copyright Van Gogh
Ce surprenant documentaire chinois a été tourné dans le sud du "pays du milieu", mais aussi en France et aux Pays-Bas. Curieusement, à l'écran, jamais personne ne porte de masque... et pour cause : les images datent de 2015-2016. C'est à la fois si loin et si proche...
La majeure partie de « l'action » se déroule dans le village de Dafen, un gros bourg situé à la périphérie de Shenzhen, la mégapole industrielle qui fait face à Hongkong. Certains des « ouvriers-peintres » qui nous sont présentés (en particulier Zhao Xiaoyong) sont originaires d'une région rurale du Hunan, une province située un peu plus au nord.
La première partie du documentaire nous montre ces familles de peintres au travail. On pense que plusieurs milliers de personnes ont pour activité principale la production de copies (à différentes échelles) des chefs-d’œuvre occidentaux, notamment ceux de Vincent Van Gogh, qui jouit d'une faveur particulière. Le film s'attarde sur seulement quelques ateliers. C'est du travail à la chaîne, intense, par des artisans dont certains semblent particulièrement doués. Ceux qui se sont spécialisés dans l’œuvre de Van Gogh sont quasiment devenus des experts du peintre. Pourtant, ils ne le connaissent (ainsi que ses tableaux) que par des livres et des vidéos. Apparemment, au sein des ateliers, chacun accomplit une tâche particulière. Les copies sont le plus souvent des œuvres collectives, même si les plus doués (comme Zhao Xiaoyong) sont capables d'en réaliser une à eux seuls.
La deuxième partie suit un petit groupe de peintres chinois en Europe. Passionnés par leur travail et désireux de voir en vrai les tableaux qu'ils copient depuis des années, ils ont économisé pour financer un voyage qui est tout autant un enrichissement personnel qu'un investissement professionnel. Le principal client de Zhao, un Néerlandais résidant à Amsterdam, est prêt à les loger.
Quand la petite troupe débarque en Europe, elle va de surprise en surprise. Contrairement à leurs homologues chinoises, les « grandes » villes du vieux continent (notamment Amsterdam et Paris) ne sont pas constellées de gratte-ciel. Dans des villes plus modestes (comme Arles), une politique patrimoniale intelligente a préservé les bâtiments. On sent qu'une tentation taraude Zhao : rester sur place, là où van Gogh a vécu, et y vivre de son art : quand il se met à peindre des copies, à Arles, elles rencontrent un succès immédiat.
Cet enthousiasme contrebalance certaines déceptions : loin d'être exposées dans des galeries d'art, les copies de Zhao sont vendues dans une boutique de souvenirs installée à proximité du musée Van Gogh. De plus, il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que son généreux client réalise une belle "culbute" avec ses œuvres : les plus grandes, achetées 40-50 euros au copieur chinois, sont revendues 500... À un moment, on sent qu'une négociation s'ébauche devant la caméra. On n'en voit pas la conclusion, mais, au vu de la suite, on comprend que le client néerlandais n'a sans doute pas accepté de payer plus...
Du coup, quand le groupe est de retour en Chine, Zhao se demande s'il ne devrait pas se lancer dans la création de ses propres peintures, tout en conservant le marché rémunérateur des copies. Ainsi, sans que ce soit peut-être l'intention des auteurs, le film démontre que l'activité picturale chinoise suit le même chemin que l'industrie : au départ sous-traitante des Occidentaux, dont elle copie les créations à moindre coût, elle devient par la suite capable de produire ses propres œuvres qui, peut-être, vont pouvoir concurrencer celles des anciens donneurs d'ordre.
Le documentaire mérite aussi le détour pour la plongée qu'il offre dans la Chine contemporaine. Outre le gros village de Dafen (une petite ville, en réalité), on voit la mégapole moderne de Shenzhen, qui abrite un incroyable parc d'attractions (appelé « Window of the World ») contenant les répliques de nombreux monuments du monde. On découvre aussi une autre Chine, plus rurale, plus âgée, plus traditionnelle... et plus pauvre... mais avec une belle scène de cimetière à la clé.
Ne ratez pas ce film formidable !
Le Dernier Duel
Séance de rattrapage pour ce film (anti)chevaleresque, signé Ridley Scott et sorti en octobre dernier. À l'époque, la charge de travail et la durée du film (2h30) m'avaient un peu découragé, d'autant qu'à partir de la deuxième semaine, à Rodez, il n'était plus proposé qu'en dernière séance (après 22 heures). J'ai enfin pu le voir récemment... et lire dans la foulée l'ouvrage historique qui l'a inspiré.
Le film commence alors que le duel judiciaire est sur le point de s'engager. S'en suit un long retour en arrière, constitué de la version successive des trois protagonistes : le mari Jean de Carrouges (Matt Damon, très bon dans un rôle inhabituellement antipathique), le violeur présumé Jacques Le Gris (Adam Driver, presque un peu trop bon dans le personnage) et l'épouse présumée violée, Marguerite de Carrouges (Jodie Comer, vue l'été dernier dans Free Guy, et qui parvient à susciter un peu d'ambiguïté autour de son personnage).
La première version, celle de Jean de Carrouges, correspond à la vision que nous donnent depuis des décennies nombre d’œuvres médiévales. Quand vient le tour de Jacques Le Gris, on sourit aux écarts de perception entre les deux anciens amis, le même événement nous étant raconté sous deux angles différents. Ce n'est pas nouveau nouveau, mais c'est bien fichu.
On attend évidemment la version de l'épouse. Beaucoup de cinéphiles se sont étonnés qu'elle ne s'écarte pas plus de celles des messieurs. Elle n'en propose pas moins une autre vision du mariage, tel qu'il a été imposé à la jeune femme, avec un prétendant certes valeureux, mais pas très bon amant... Quant à la version du "viol", il n'est pas nécessaire qu'elle soit très différente de celle du "violeur". Les nuances de détail ont une importance capitale. (Dans l'ouvrage de l'historien, on trouve davantage d'anecdotes et une argumentation serrée qui ne permet pas de douter de ce qu'il s'est réellement passé à l'époque.)
La dernière partie de l'intrigue est constituée de la séquence de duel, brillamment mise en scène par R. Scott. (J'ai retrouvé le réalisateur de Kingdom of Heaven, bien meilleur que dans son médiocre Robin des Bois.)
Au final, les 2h30 passent comme un charme, que l'on privilégie la reconstitution d'époque, l'ambiance de chevalerie ou le propos féministe, la forme s'accordant bien au fond. Ce sera sans aucun doute un de mes films de l'année.
mercredi, 29 décembre 2021
Meurtre au paradis... du Père Noël
Ce soir, France 2 diffuse un épisode inédit de la série Meurtres au Paradis. Intitulé "Noël aux Caraïbes", il s'intercale entre les saisons 10 et 11, la diffusion de celle-ci devant commencer début janvier 2022, sur la BBC. J'ajoute, qu'exceptionnellement, il dure environ 1h30 (contre 50 minutes pour les épisodes classiques). Il a été programmé dimanche dernier (26 décembre) sur la BBC. (Pour une fois, la diffusion en France suit de peu celle au Royaume-Uni.)
L'esprit de Noël souffle sur cette enquête criminelle particulièrement ardue. Aux Antilles, on n'a pas de neige, mais cela n'empêche pas de perpétuer les traditions ! Plus présent qu'à l'accoutumée, le commandant Patterson (à droite sur la photographie ci-dessus) donne une saveur particulière à l'épisode.
On n'y retrouve qu'une partie de l'équipe. On ne voit le sergent Cassel (Joséphine Jobert) qu'en début et fin d'histoire. Pour épauler l'inspecteur Neville Parker, outre le commandant, il ne reste que le stagiaire (et ex-délinquant) Marlon Pryce. Mais un renfort inattendu arrive...
L'agent Dwayne Meyers (Danny John-Jules) est de retour, alors que son personnage a quitté la série à la fin de la saison 7. Il apporte un peu de fantaisie à une histoire qui pourrait sinon sembler trop balisée.
Au passage, vous remarquerez qu'alors que l'épisode a été tourné principalement en Guadeloupe (et que ce DROM a été explicitement intégré à l'intrigue), c'est une monnaie britannique de la zone antillaise, le dollar est-caribéen (des billets de 50), qui est brandie par le policier.
Pourtant, dans les saisons précédentes, à plusieurs reprises, on a pu voir à l'écran des étals affichant des prix en euros. Quoi qu'il en soit, les téléspectateurs ne peuvent ignorer qu'au cours de leur enquête, deux des policiers sont amenés à quitter l'île (fictive) de Sainte-Marie pour la Guadeloupe proche, où ils subissent un déluge, non pas de neige, mais d'eau :
Sur l'imperméable transparent, on distingue clairement, outre le nom du DROM, la carte de son territoire... une bonne manière de faire sa publicité... même si c'est par temps de pluie !
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mardi, 28 décembre 2021
Injection force 3
Quand je pense que, lorsque j'étais enfant, j'avais une trouille bleue des piqûres... Me voilà à trois injections en sept mois ! J'ai donc très récemment complété mon profil vaccinal, avec une nouvelle dose de Moderna. (Le fait d'avoir choisi ce vaccin, de préférence au Pfizer, pour ma première injection, m'avait permis de décrocher un rendez-vous plus rapidement, en soirée.)
Lorsque le gouvernement avait annoncé que le "passe sanitaire" perdrait de sa validité si l'on n'ajoutait pas un rappel, j'ai laissé passer deux jours, tant je pensais que le flux de demandes de rendez-vous risquait d'être important, sur internet. Quand je m'y suis mis (toujours par l'intermédiaire de Doctolib), je suis comme beaucoup tombé sur une page m'annonçant une attente d'une dizaine de minutes... qui, au bout d'un bon quart d'heure, n'était passée qu'à 8 minutes ! Agacé, j'ai laissé tomber, pour m'y remettre en pleine nuit, à la faveur d'une insomnie. Et là, ô miracle, j'ai immédiatement accédé à la plate-forme de prise de rendez-vous et j'en ai obtenu un sur ma période de congés.
Sur la carte ci-dessus, j'ai mis en valeur plusieurs points de repère :
- le "vaccinodrome" d'Onet-le-Château (commune limitrophe de Rodez), où j'ai reçu mes deux premières injections
- l'usine Bosch (ex-premier employeur privé du département), actuellement en grande difficulté
- la cathédrale de Rodez, la plus belle du Monde
- le centre de vaccination de Bourran, situé à proximité immédiate de l'hôpital, sur un plateau séparé du centre de Rodez par la vallée de l'Auterne (un affluent de l'Aveyron)
Comme ce centre est aussi voisin de l'IFSI (l'école d'infirmières ruthénoise), une rumeur a circulé, comme quoi ce seraient les jeunes apprenties qui procèderaient aux vaccinations. Je peux certifier ici que ce n'est nullement le cas. Qu'elles soient en vacances ou requises à d'autres tâches, les demoiselles en blouse blanche n'étaient pas là.
Quoi qu'il en soit, le centre est bien organisé. Un parcours fléché a été mis en place. On doit commencer par remplir une fiche et montrer sa carte d'identité, celle de Sécurité sociale ainsi que son certificat de vaccination... quand on vient pour une troisième dose. À ma grande surprise, le jour où je me suis fait "perforer" le bras, j'ai assez souvent entendu parler de primo-vaccination ou de deuxième injection (pour des personnes ayant déjà eu le covid). Globalement, la moyenne d'âge était élevée, avec une grande majorité de personnes de plus de cinquante ans et un petit groupe de lycéens-étudiants.
Au niveau des effets secondaires, je n'ai à signaler que l'habituelle petite douleur au bras, le soir et le lendemain de l'injection. Je précise que, sur les conseils d'une infirmière, j'ai pris un cachet de paracétamol dans la demi-journée suivant mon rappel.
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lundi, 27 décembre 2021
Un papa, une maman... oui, mais, lesquels ?
Je recommande vivement l'écoute d'un reportage d'une demi-heure, intitulé "Les liens du sang", diffusé ce lundi, sur France Culture, dans le cadre de l'émission Les Pieds sur terre. Je trouve ce programme parfois très intéressant, bien qu'inégal en fonction du sujet abordé... et de son "angle d'attaque".
Le reportage de ce jour est en réalité une rediffusion du 5 mars 2014. Sans trop en dire sur le contenu, je peux quand même affirmer que ce genre d'histoire a sans doute influé sur l'écriture du scénario du dernier film (surcoté) de Pedro Almodovar, Madres Paralelas.
Il est question d'une mère et de sa fille. La première a eu une existence un peu cabossée, quittée par l'homme qu'elle aimait et diffamée par le voisinage. La seconde est ce qu'on pourrait appeler "une belle personne", une jeune adulte pleine de promesses. J'étais en train de conduire quand je suis tombé sur cette émission, que j'écoute de temps à autre. Cela a embelli mon début d'après-midi.
18:26 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : médias, presse, journalisme, actu, actualite, actualites, actualité, actualités, société
dimanche, 26 décembre 2021
Ils ont bien du mérite !
Régulièrement, je jette un œil aux promotions de la Légion d'honneur, cet aréopage de vanités facilement contentées. Les (vieux) lecteurs de ce blog se souviennent peut-être qu'en 2011, j'avais consacré trois billets aux promotions de janvier (où figurait Jean-Claude Luche, à l'époque président du Conseil général de l'Aveyron), avril (avec, entre autres, Pierre Soulages) et juillet (concernant Simone Anglade, aujourd'hui décédée).
J'avais récidivé en 2012, avec les promotions de janvier (vue sous l'angle lozérien) et juillet (centrée sur les Aveyronnais, avec un petit bonus sur l'Ordre national du Mérite). En 2013, je m'étais intéressé à la promotion de Pâques, sous l'angle politique (national et régional, au sens large).
Ensuite, j'ai un peu laissé tomber, tant cela me paraissait répétitif. J'ai quand même jeté un œil attentif à la promotion de juillet 2019, histoire de voir si, sous Emmanuel Ier, les pratiques avaient un peu changé.
Jusqu'à présent, j'avais laissé de côté l'autre décoration. C'est un article du quotidien Centre Presse, paru (en ligne) hier, qui m'a incité à me replonger dedans. Première surprise : l'information n'est pas d'une extraordinaire fraîcheur, puisque le décret auquel il est fait allusion date du 24... novembre 2021. Difficile dans ces conditions de parler d'un "cadeau de Noël" pour les personnes distinguées (à supposer que recevoir ce genre de décoration soit une distinction).
En consultant la liste de ces compatriotes méritants, je suis tombé sur plusieurs Aveyronnais, ainsi que sur quelques personnes ayant un lien avec le département.
La première de la liste est Colette Cambournac (nommée "chevalier"... "chevalière" ?), une militante de la cause des femmes.
Lui succèdent deux hauts fonctionnaires, nommés chevaliers sur le contingent du ministère de l'Intérieur. Michel Laborie, né à Montbazens, a travaillé pendant une vingtaine d'années dans l'Aveyron avant de partir pour d'autres horizons. Après son dernier poste dans le Tarn voisin, il vient tout juste de prendre sa retraite. L'ironie de l'histoire est que, dans la liste des promus de novembre 2021, quelques lignes plus haut, on trouve son jeune successeur à la préfecture du Tarn, Fabien Chollet.
Du côté des élus, c'est dans le contingent du ministère de la Cohésion des territoires qu'il faut chercher. On y trouve Élodie Gardes, agricultrice et maire de Lassouts depuis 2008. J'ajoute la présence d'un voisin cantalien, André Dujols, maire de Saint-Cernin, lui aussi nommé chevalier.
En déroulant la liste, nous voilà arrivés à Michel Malet, qui seul a les honneurs de l'article de Centre Presse mentionné dans la première partie de ce billet. En Aveyron, il est connu pour deux raisons. Récemment, il a aidé les agriculteurs de l'Aubrac lozérien à ressusciter la culture de pommes de terre sur leur territoire, afin notamment de pouvoir produire (avec de la tome de Laguiole) un aligot "100 % aubracien" (même s'il reste la question de l'ail). Je me suis laissé dire que cette initiative lozérienne avait éveillé la curiosité d'autres producteurs, du côté aveyronnais... Mais ce n'est sans doute pas cette (louable) contribution à l'authenticité gastronomique locale qui a valu sa nomination à Michel Malet. Je pense que son action bénévole et son investissement dans l'aide au développement ont davantage compté.
Il n'est pas le seul Aveyronnais distingué sur le contingent du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. On y trouve aussi Sarah Singla, une agricultrice devenue une référence dans son domaine de prédilection, la préservation des sols.
Voilà pour ce florilège. Les trente-cinq (!) pages du décret recèlent sans doute d'autres pépites, mais je préfère garder des forces pour la prochaine promotion de la Légion d'honneur (celle de janvier 2022).
18:38 Publié dans Aveyron, mon amour, Politique aveyronnaise, Presse, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, actualité, actualités, actu, actualite, actualites, occitanie, société
jeudi, 23 décembre 2021
Les Amants sacrifiés
Le titre de ce long-métrage japonais est trompeur. Il laisse entendre qu'une histoire d'amour constitue l'essentiel de l'intrigue et que les héros sont amants... alors qu'ils sont mariés. Peut-être est-ce une erreur de traduction. (Le titre d'origine est "Supai no tsuma", "Wife of a spy" chez les Anglo-Saxons.)
Du coup, au début, j'étais un peu dans le brouillard. L'action commence en 1940, dans un Japon impérialiste et dictatorial, qui occupe une partie de la Chine mais n'est pas encore en guerre contre les États-Unis. (L'attaque de Pearl Harbor date du 7 décembre 1941.)
Le couple de héros est asymétrique. Yusaku Fukuhara est un prospère négociant en soie, très occidentalisé, un peu rétif à l'idéologie dominante. Son épouse Satoko a une dizaine d'années de moins que lui. Jeune et naïve, elle ne s'épanouit pas dans son rôle d'épouse (sans enfant). Elle a sans doute plus d'affinités avec son neveu par alliance (qui travaille pour son époux) et pour un ami d'enfance, qui vient de rentrer au pays en tant qu'officier de la redoutable Kempetai (la police militaire japonaise, qui fut souvent comparée à la Gestapo de sinistre mémoire).
Il faut se méfier de l'apparente simplicité de certaines scènes. Le réalisateur Kiyoshi Kurosawa (remarqué grâce à des œuvres aussi différentes que Real, Creepy et surtout Shokuzai) a pris un malin plaisir à placer en début d'histoire une séquence (celle du tournage d'un mini-film d'espionnage) qui va servir de mise en abîme. De manière générale, les films occupent une place décisive dans l'intrigue... et l'on peut penser que le cinéaste leur attribue le pouvoir de changer les choses.
Tel pourrait être le cas ici d'une mystérieuse bobine, rapportée de Chine, plus précisément de Mandchourie. L'histoire du couple bancal va percuter la grande histoire, celle de l'unité 731, dont on a peu entendu parler en Europe, mais qui a laissé des traces indélébiles en Asie orientale.
Un fois qu'on a compris de quoi il retourne, le suspens devient haletant. La relation de couple paraît bien secondaire, aussi bien au spectateur qu'au réalisateur d'ailleurs. Même s'il faut tenir compte de l'époque et des différences culturelles, je pense qu'il a surtout voulu évoquer l'héroïsme de gens relativement ordinaires... et dénoncer le nationalisme japonais, très puissant à l'époque et qui semble connaître une nouvelle jeunesse de nos jours, en réaction à la montée de la puissance chinoise.
22:38 Publié dans Cinéma, Histoire, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
mercredi, 22 décembre 2021
La Panthère des neiges
Ce documentaire est issu d'images (fixes et mobiles) prises pendant plusieurs semaines au Tibet. Deux hommes sont à l'écran : le photographe animalier Vincent Munier (charismatique) et l'écrivain-baroudeur Sylvain Tesson, dont je recommande vivement la lecture du livre Dans les forêts de Sibérie, adapté au cinéma il y a un peu plus de cinq ans. Une troisième personne est à l’œuvre, derrière la caméra (ce qu'un spectateur un tant soit peu attentif aura compris). Il s'agit de Marie Amiguet, à laquelle on doit la photographie de La Vallée des loups.
L'objectif affiché de l'expédition est la rencontre (à distance, bien sûr) de la panthère des neiges, un superbe et mystérieux animal, roi du camouflage, parfois photographié sans que l'humain manipulant l'appareil ne se soit rendu compte de sa présence. Ce fut d'ailleurs le cas de Vincent Munier par le passé : on voit à l'écran cette fameuse photographie, centrée sur un faucon (crécerelle, je crois), dans le coin de laquelle se détache (pour peu qu'on concentre son regard sur cette partie de l'image) le haut du corps d'une panthère des neiges, qui s'était fondue dans le paysage rocailleux. Saisissant !
(Aux amateurs du genre, je rappelle qu'on peut apercevoir le félidé dans Nés en Chine, un superbe documentaire produit par Disney il y a un peu plus de quatre ans.)
En attendant d'atteindre son Graal, le duo masculin crapahute entre montagnes et steppes, s'arrêtant à plusieurs reprises pour se mettre à l'affût : rester immobiles, (presque) silencieux et le moins visibles possible pour avoir une chance de capturer le mouvement des animaux sauvages peuplant la région.
On va ainsi successivement rencontrer des oiseaux (rapaces et non rapaces), des cervidés, des yaks, des antilopes, des bharals, des rongeurs, un étonnant chat sauvage, appelé chat de Pallas (dont les pattes ont la teinte du sol et le pelage celle des rochers)... et un renard du Tibet, qui semble avoir les yeux bridés ! Réalité ou autosuggestion ? Comparez-le à son cousin d'Europe :
La nature est belle, certes, mais elle est cruelle. Le chat sauvage boulotte un oisillon qui a trop tardé à quitter le sol, tandis que le renard arrive à extirper un rongeur d'une galerie ! (Séquence animation.)
Les humains eux-mêmes ne sont pas à l'abri. Notre duo de routards fait ainsi une rencontre inattendue... et périlleuse : une famille d'ours (sans doute une mère avec ses deux petits... déjà grands). Sagement, quand ils se rendent compte qu'ils ont été repérés et que les plantigrades s'approchent, ils décident de rebrousser chemin. (Séquence émotion.)
Et la panthère dans tout ça ? On va finir par la voir, rassurez-vous. Les premières images sont prises par une caméra à détection de mouvements, laissée devant l'entrée d'un canyon qu'on suppose très fréquenté (surtout la nuit). Une panthère des neiges finit par passer devant... et nous faire un petit numéro.
Persévérants, les explorateurs de la nature finissent par en voir une, en vrai, en direct. Je ne vais pas raconter dans quelles circonstances, mais sachez que l'animal a perçu la présence des humains. À un moment, je crois même qu'il a pris la pose, à distance, regardant la caméra qui le filmait. Magnifique ! (Séquence jubilation.)
P.S.
Restez bien à la fin du film. Le générique est agrémenté d'images bonus. En complément, je recommande le numéro de ce mercredi de l'émission "La Terre au carré", consacré au film et à son tournage.
22:17 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films