mardi, 30 avril 2013
Tu seras sumo
C'est en gros ce que déclare un père (veuf) à l'un de ses deux enfants, son fils cadet Takuya. Nous sommes dans le nord du Japon, sur l'île d'Hokkaido :
Ce documentaire de la Française Jill Coulon, tourné en 2008, traite du difficile apprentissage que va suivre le jeune homme, à Tokyo (au sud). Dans cette école de sumo, les jeunes sont totalement pris en charge, mais doivent vivre en communauté.
C'est la voix du jeune homme qui rythme les séquences tournées par la réalisatrice. Le tout début permet d'avoir un aperçu de la vie encore assez traditionnelle des provinciaux d'Hokkaido. Takuya, lui, achève le lycée (il va décrocher son bac) et ressemble à beaucoup de grands adolescents. Il a une bande de potes, aime s'amuser et, s'il est un sport qui le passionne, c'est le judo.
Mais c'est le père qui commande. Je pense, de surcroît, que la famille n'est pas riche : il n'est visiblement pas question de financer de coûteuses études pour le jeune homme, qui ne semble pas particulièrement doué en quoi que ce soit.
La deuxième partie du film nous fait découvrir la vie en collectivité de cette brochette de gars obèses, plutôt sympas, mais avec une hiérarchie à respecter. Le nouveau va devoir faire ses preuves et, avant toute chose, il faut qu'il prenne du poids. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'ils bouffent à longueur de journée, mais ils s'empiffrent quand même sacrément ! (Et moi qui avais mangé juste avant la séance... La digestion fut laborieuse.)
On nous montre aussi les phases d'entraînement. C'est assez répétitif et très physique.
On découvre aussi quelques aspects du combat de sumo. Le poids seul ne suffit pas, même si le "héros" se rend vite compte qu'il y a quand même une masse minimale à atteindre (autour de 130 kilos) si l'on veut espérer faire carrière. Faute d'avoir un corps de rêve, les lutteurs prennent grand soin de leur chevelure, dont l'organisation est presque un art.
On finit par voir ces jeunes en compétition. Ils passent en lever de rideau, la soirée étant réservée aux combats de têtes d'affiche. Les assauts sont en général très courts. On suit les progrès réalisés par Takuya, qui passe par différentes phases.
Si vous voulez savoir jusqu'où il va aller, vous pouvez vous laisser tenter par ce documentaire un peu aride, mais passionnant.
22:30 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
lundi, 29 avril 2013
Cloud Atlas
Pas facile de voir ce film quand on est un pauvre petit cinéphile aveyronnais. Sa durée (2h45), la complexité de son intrigue (héritée du roman qui l'a inspirée : Cartographie des nuages, de David Mitchell) ont rebuté bien des programmateurs. Du coup, il faut être vigilant et saisir l'occasion quand elle se présente, par exemple une séance unique dans un cinéma tarnais.
L'intrigue entremêle six histoires, qui se déroulent à six époques différentes. Évidemment, elles sont toutes liées. Quelques indices sont disséminés dans le film pour permettre aux spectateurs attentifs de combler les vides. La narration est elle-même découpée : les six histoires ne nous sont pas racontées à la suite l'une de l'autre, dans l'ordre chronologique. Il faut donc s'accrocher un peu... ou, tout simplement, se laisser emporter par le flot romanesque.
Contrairement à ce que certaines images pourraient laisser croire de prime abord, l'histoire la plus ancienne se passe au milieu du XIXe siècle, entre l'océan Pacifique et la Californie. Le "bien" y est incarné par un jeune homme de bonne famille, révolté par l'esclavage et habité par un amour profond pour sa jeune épouse, qu'il espère retrouver bientôt.
Le "mal" est incarné par un médecin cupide, mais aussi un capitaine autoritaire, des marins racistes et un père de famille bouffi de préjugés. J'ai trouvé cet épisode un peu trop appuyé.
Le journal qu'a rédigé le jeune homme sert de lien avec la deuxième histoire, qui se déroule au Royaume-Uni, dans les années 1930. Le "bien" y est représenté par un apprenti musicien homosexuel, intrigant sur les bords (Ben Whishaw, révélé par Le Parfum, vu récemment dans Skyfall), et par son jeune amant très conventionnel.
Le héros affronte l'intolérance sexuelle de l'époque, mais aussi l'ambition égoïste de son nouvel employeur, un compositeur sur le déclin. C'est dans la bibliothèque de celui-ci que l'apprenti musicien trouve la moitié d'un livre de voyage, celui écrit au siècle précédent.
Une partie des lettres que s'échangent les deux jeunes homosexuels (celles conservées par l'amant conventionnel, qui a vieilli) se retrouvent dans la troisième histoire, sise au début des années 1970. L'autre pont entre les deux histoires (qui sert aussi de fil rouge à l'ensemble) est la symphonie composée par le jeune homosexuel, intitulée Cloud Atlas. Dans cette partie, une ravissante journaliste (Halle Berry, qui n'a jamais aussi bien joué... et qui est plus craquante que jamais) incarne l'engagement civique, face à l'appât du gain et au meurtre.
Le style n'est pas sans rappeler la Blaxploitation, voire les films de dénonciation de cette époque (Votez McKay, Les Trois Jours du condor, Les Hommes du président, par exemple). Dans son enquête, elle est successivement épaulée par trois hommes et un garçon. C'est assez trépidant.
Le livre tiré de son enquête nous mène, une quarantaine d'années plus tard, à un éditeur un peu fantasque, qui va se retrouver prisonnier d'un drôle d'institut.
C'est l'épisode le plus burlesque de la série. C'est un peu "Panique à la maison de retraite", avec ces papys et ces mamies en apparence si vulnérables... mais qu'il ne faut pas sous-estimer. Face à eux se dresse une infirmière intraitable, interprétée par Hugo Weaving, qui incarne un "méchant" à chaque époque. Car, en effet, les ex-frères Wachowski ont distribué les rôles de manière que certains acteurs interprètent plusieurs personnages, à des époques différentes (parfois en changeant de sexe). J'ai trouvé un tableau synthétique sur un blog spécialisé :
Concernant cette histoire, sachez que l'antagonisme pluriséculaire qui oppose Écossais et Anglais va tirer nos vieillards d'un bien mauvais pas !
Le livre qui raconte les avanies qu'ils ont subies devient un film, que l'on retrouve dans la cinquième histoire, qui se déroule dans un futur proche, celui d'un monde hyper-technologique et hyper-inégalitaire. Aux commandes, les Wachowski nous livrent une resucée très convaincante de Matrix, sans pseudo-philosophie à la con.
Jim Sturgess y incarne un résistant absolu, qui noue une relation très forte avec un clone atypique (l'exquise Donna Bae, vue notamment dans The Host). C'est une nouvelle version du Neo de Matrix, cette fois sous la forme d'un duo. Les réalisateurs ont aussi puisé à d'autres sources que leur propre mythologie. Pêle-mêle, on retrouve notamment un peu du Cinquième élément, de Brazil, de Blade Runner et de V pour Vendetta. C'est vraiment un épisode épatant et je regrette qu'il n'ait pas été exploité jusqu'au bout.
Les échos de cette époque tumultueuse sont perçus dans la dernière histoire, qui se passe quelque 200 ans plus tard.
La Terre est peuplée de trois groupes d'individus, deux sont des sortes d'hommes préhistoriques, parlant une langue dégradée. Le troisième est une élite en voie de dépérissement. L'action conjuguée d'un chef de famille taraudé par un mauvais génie (Tom Hanks, excellent tout au long du film) et d'une femme d'exception (Halle Berry, surprenante) va leur permettre de connaître le fin mot de l'histoire...
... enfin presque, parce qu'on ne nous dit pas tout. Même quand l'histoire est terminée, il reste des blancs, que le conteur s'est bien gardé de combler :
C'est "l'époque bonus", la septième, preuve que tout n'a pas disparu. Mais où diable se trouve-t-on ?
Bilan de tout cela ? Un film-testament. Les Wachowski, épaulés par le talentueux Tom Tykwer (réalisateur naguère du Parfum), font l'apologie de l'amour véritable, celui qui unit deux âmes-sœurs, qui peuvent être un homme et une femme, deux hommes, un homme et un clone, un Blanc et une Noire (ou une Asiatique)... Ils y tracent une limite claire entre ce qu'ils perçoivent comme bon (la lutte pour l'égalité des droits, la création artistique, la dénonciation de la corruption, des mauvais traitements...) et ce qu'ils stigmatisent comme mauvais (le racisme, l'homophobie, l'esclavage, la cupidité, l'autoritarisme, la bigoterie...).
A l'amour et à l'engagement politique s'ajoute la création artistique (au sens large) comme moteurs de l'existence. Écrire, composer, jouer et filmer donnent aussi un sens à la vie. Dit comme cela, ça a l'air pompeux, mais c'est plus subtilement énoncé dans le film. On peut laisser tomber le propos sur la réincarnation et se plonger dans ces images superbes, illustrant une intrigue foisonnante, servie par des acteurs excellents.
20:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
dimanche, 28 avril 2013
Les Croods
Ce nom à coucher dehors est porté par les six membres d'une famille de Néandertaliens aux prénoms tout aussi improbables. A sa tête se trouve le papa, Grug :
C'est un costaud, le papa. Il a des bras épais comme trois cuisses, un coeur gros comme ça... mais une cervelle de moineau, qu'il va devoir pourtant mettre à contribution pour sortir sa famille du pétrin. Sa compagne est Ugga :
Pour camper l'épouse de l'Américain (très) moyen, on a choisi une belle plante entre deux âges, certes amoureuse de son mari, mais d'abord soucieuse de la survie du clan familial. Elle est donc plus ouverte d'esprit. Le couple a eu trois enfants, l'aînée étant Eep :
On ne le voit pas très bien comme cela, mais elle est bâtie comme une gymnaste est-allemande. A l'image de la majorité des membres de la famille, elle a un fort tempérament et n'hésite pas à donner des coups. Cette rouquine révoltée, un peu casse-cou, n'est pas sans rappeler la Rebelle de Pixar (en moins sage). Notons que ces hommes préhistoriques ont dû inventer l'épilation au silex, puisque la demoiselle arbore des aisselles exemptes de toute pilosité ! Son frère cadet porte le doux prénom de Thunk :
C'est un gros bêta, qui n'a ni la force ni la réactivité de son père. On est prié d'espérer que c'est un ado en devenir, une image guère flatteuse de ces millions de moutards américains gavés de hamburgers et de pop corn. Sa petite soeur, Sandy, mérite elle le détour :
Cette adorable sauvageonne est dotée d'une coiffure à désespérer tous les "visagistes" de Paris. J'aurais tort d'oublier le sixième élément de la troupe, la grand-mère :
Celle-ci apparaît au départ plutôt acariâtre, à l'image de la mamie de Sid dans L'Age de glace IV. (Eh, oui, on se marque à la culotte dans les films d'animation !). L'un des fils rouges de l'histoire est la détestation que semblent éprouver Grug et sa belle-mère l'un pour l'autre, le premier y trouvant une motivation pour tenter d'avoir des idées (afin de se débarrasser de la vioque).
Au quotidien, la famille pense d'abord à se nourrir. Cela nous vaut une hilarante scène de course-poursuite, au début du film :
Les animaux sont vus comme des rivaux dans la quête de nourriture. Ce sont parfois des proies... plus souvent des prédateurs. L'environnement des habitants de la caverne regorge de grosses bébêtes dangereuses, comme celle-ci...
... et celle-là :
D'autres animaux, moins impressionnants de prime abord, ne sont pas à prendre avec des pincettes, tels les singes batailleurs :
Mais les plus redoutables sont incontestablement ces oiseaux colorés (magnifiquement rendus par la 3D, une des grandes réussites du film), qui volent en groupe... et ont un appétit vorace, comme va le découvrir une baleine terrestre (!) :
Signalons que le gros minet, à la tête disproportionnée, va jouer un rôle essentiel dans les pérégrinations de la famille. L'un des moments-clés est celui où l'un des personnages découvre que, comme lui, le félidé a peur du noir !
Cette terreur, savamment entretenue par le papa, gouverne la vie de la troupe. Le père voudrait garder son petit monde auprès de lui, engoncé dans ses habitudes, refusant la nouveauté. Sa fille va braver les interdits, découvrir le feu (anachronisme, mais bon, cela nous vaut de très belles scènes en 3D) et faire une rencontre déterminante :
Guy (prononcer "Gaille") a plutôt le physique d'un homo sapiens. On nous le présente donc comme plus faible physiquement que les Néandertaliens. Mais il est diablement inventif et plus débrouillard que ces derniers. Il est accompagné d'un étrange animal, qui lui sert accessoirement de ceinture :
On remarque d'ailleurs qu'au fur et à mesure que l'histoire avance, les humains s'attachent de plus en plus à des animaux, qui deviennent domestiques. C'est le cas du père comme de la petite fille (que cela contribue à "civiliser")... mais aussi du fils balourd :
Poussés par des mouvements tectoniques brutaux (nouveau décalque de L'Age de glace...), humains comme animaux cherchent à sauver leur peau. La collaboration cahotique entre Néandertaliens et sapiens va leur permettre, après moult péripéties, d'atteindre la terre promise.
Pendant un peu plus d'1h30, on a droit à une pluie d'images superbes et à une foultitude de gags. Même si l'histoire n'est pas d'une originalité débordante, on passe un très bon moment.
P.S.
Je déconseille toutefois le film aux jeunes enfants, qui ne comprendront pas tout et risquent d'avoir peur à plusieurs reprises.
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samedi, 27 avril 2013
Hannah Arendt
Ce n'est pas un biopic consacré à la philosophe germano-américaine. Le film tourne autour de sa perception du procès d'Adolf Eichmann, un des rouages essentiels de l'extermination des juifs par les nazis et leurs collaborateurs. Toutefois, certaines scènes nous font revivre une partie du passé de l'héroïne, principalement la période étudiante, en Allemagne.
La réalisatrice nous brosse d'abord un tableau de l'intelligentsia de la côte Est des États-Unis. On remarque le poids dans anciens réfugiés européens, encore en 1960-1961. Le seul élément du contexte américain qui nous soit donné est la campagne présidentielle de 1960, qui voit John Fitzgerald Kennedy s'opposer au vice-président sortant, Richard Nixon.
Le paradoxe de ce film est de nous montrer la puissance intellectuelle d'une femme qui, dans sa vie personnelle, a connu bien des avanies. Dans sa jeunesse, elle a été la "groupie" crédule du philosophe Martin Heidegger qui, par la suite, s'est compromis avec le nazisme. Plus tard, elle a rencontré celui qui est devenu l'homme de sa vie, Heinrich Blücher. Dans le film, celui-ci est l'un des rares à la soutenir dans la tempête... mais c'est un compagnon infidèle. Enfin, la réception des articles écrits par Hannah Arendt sur le procès a été très mauvaise ; elle fut copieusement injuriée, diffamée... et perdit bien des amitiés.
Le premier moment-clé du film est donc le séjour de la philosophe en Israël, un État pour lequel, bien que juive, elle n'éprouvait pas d'affection particulière. On la voit déroutée par le déroulement du procès et cet accusé qui ne correspond pas au profil de l'antisémite maladif auquel elle s'attendait. On sent son désir de comprendre et de faire comprendre la complexité de l'époque, quitte à parler de la collaboration de certaines élites juives avec les autorités nazies.
La réalisatrice a inséré des images d'archive, pas forcément les plus pertinentes. Mais cela permet au public peu familier de cette histoire de découvrir un important bureaucrate nazi et certains témoignages de survivants du génocide. Le procès a aussi servi à cela.
Cette séquence et celles qui suivent voient donc s'élaborer, au fur et à mesure, la grille d'analyse qui va mener la philosophe à écrire une série d'articles (pour le magazine The New Yorker) puis un livre sur la "banalité du mal" :
Il faut signaler la composition re-mar-quable de l'actrice Barbara Sukowa qui, si elle ne ressemble pas physiquement à la philosophe âgée, réussit à l'incarner de manière stupéfiante.
Il y a bien sûr le tabagisme maladif d'Hannah Arendt, son accent lorsqu'elle parlait anglais (et, à de rares occasions, français), son indulgence pour les petits péchés de ses proches, sa force de travail et sa rigueur intellectuelle, qui ne se préoccupait guère des convenances. C'est au final un beau portrait de femme, qui culmine dans l'une des dernières séquences, qui voit l'héroïne expliquer sa démarche et défendre ses conclusions devant un amphithéâtre rempli d'étudiants finalement acquis à sa cause, malgré la contestation des mandarins de l'université. Au passage, elle règle son compte à l'une des théories de son ancien maître et amant (Heidegger), sur la pensée et la morale.
Ce film est donc très riche et son intérêt ne se limite pas au sujet principal. Incidemment, on perçoit le début d'une certaine sacralisation de la Shoah, voire de son instrumentalisation. La démarche de la philosophe a au contraire incité des historiens à retravailler le sujet. Des années plus tard ont été publiés des livres (comme celui de Christopher Browning) qui, fondés sur des cas concrets, ont donné raison à Hannah Arendt :
P.S.
Au cours du film, on apprend qu'elle avait fui l'Allemagne pour la France, où elle a résidé entre 1933 et 1940. Cette année-là, comme nombre d'étrangers, elle a été enfermée dans un camp d'internement, celui de Gurs (situé dans l'actuel département des Pyrénées-Atlantiques, il est entouré en rouge sur la carte), dont elle est par la suite parvenue à s'enfuir :
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jeudi, 25 avril 2013
The Land of hope
Le titre est bien entendu ironique, à l'image du roman de Zola La Joie de vivre. Il est plus question de désespoir que d'espoir, même si le film ouvre des perspectives. L'histoire se déroule dans une préfecture imaginaire du Japon, Nagashima, mot-valise résultant du télescopage de Nagasaki et Fukushima, dont il est d'ailleurs question à plusieurs reprises.
Le scénariste imagine que ce qui s'est produit en mars 2011 à Fukushima arrive à nouveau, dans une zone plutôt rurale, pas très éloignée de la mer et d'une centrale nucléaire. Il choisit de mettre l'accent non pas sur les victimes directes, mais sur les victimes secondaires, ceux qui vivaient dans la zone dangereuse (ou à proximité immédiate) et qui ont subi les conséquences des radiations.
On suit principalement trois couples. Le héros est le père, agriculteur semi-retraité, dont l'épouse est atteinte de démence sénile. Au début du film, il cohabite avec son fils et sa belle-fille. Lui est un gamin attardé de 30 ans. Elle est plus indépendante et volontaire. En face de chez eux habite une autre famille. Le film privilégie le fils et sa petite amie, encore un peu adolescents ; les événements dramatiques auxquels ils se trouvent confrontés vont les faire rapidement évoluer.
Si le contexte de la catastrophe et les réactions qu'elle a suscitées sont bien mis en scène (de l'opacité des autorités au rejet de certains habitants du reste du Japon), j'ai trouvé que les scènes familiales étaient surjouées voire mal jouées (surtout de la part de l'acteur qui incarne le fils du patriarche, assez insupportable).
Le couple âgé fonctionne "à l'ancienne" : c'est l'homme qui domine, avec le cas particulier de l'épouse mentalement dérangée. Même si sa maladie n'est pas montrée comme un sujet de moquerie, j'ai été gêné par l'accumulation facile : le couple vit plusieurs déchirements et, en plus, l'un des deux a perdu la tête. Dans leur relation subsiste un seul moment de grâce, quand l'épouse s'est enfuie du domicile et a gagné la zone interdite. Elle imagine revivre la Fête des morts, en costume traditionnel. Son mari finit par la retrouver et joue le jeu, pendant quelques instants. C'est un beau moment de cinéma, hélas noyé dans un ensemble maladroit.
Le couple formé par le fils et la belle-fille est plus moderne. C'est elle qui prend les choses en mains. Sa grossesse influe sur ses choix. Là, par contre, j'ai trouvé intéressante la mise en scène de sa phobie des radiations. Inconsciemment, elle rend la situation plus difficile pour son jeune mari... mais c'est peut-être celle qui a le plus la tête sur les épaules.
Le troisième couple est le plus volatile. Au départ, on prend le jeune homme pour un petit con immature. Il se révèle généreux et soudainement plus intéressant, pendant que sa copine perd ses illusions d'adolescente. Leur parcours, en moto, les mène en plusieurs endroits, tous symboles de désolation. Mais leur couple en sort fortifié.
Cela donne un film long, avec des maladresses, mais aussi des qualités et quelques instants privilégiés. A chacun de juger s'il mérite le déplacement.
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mardi, 23 avril 2013
Oblivion
Cet "oubli" est l'amnésie programmée dont souffre le personnage principal, Jack (Tom Cruise, assez transparent). Il est l'un des derniers humains présents sur une Terre qui a été dévastée par une guerre nucléaire. Sa mission de 5 ans est sur le point de s'achever, et lui de partir pour Titan (un satellite de Saturne) où l'humanité s'est réfugiée.
Pour des raisons de sécurité, la mémoire des employés exerçant des missions délicates est effacée au bout de 5 ans. Mais pourquoi diable rêve-t-il de cette femme brune (Olga Kyurylenko, évidemment superbe, mais non moins évidemment potiche) qui semble l'accompagner au sommet de l'Empire state building ?
Un mystère plane donc sur la première partie du film. On suit le héros dans son travail quotidien, dangereux parce que sur la planète survivent des envahisseurs (qu'il n'a jamais réellement vus). La tension monte. Le tout est servi par une très bonne lumière, des décors superbes et une musique bien choisie.
L'action démarre vraiment quand une tour commence à émettre un signal vers l'espace. Jack se pose de plus en plus de questions. C'est parce qu'il ne va pas suivre la procédure officielle qu'il va découvrir la vérité sur ses employeurs, sur ce qui est arrivé à la Terre... et sur lui-même.
Le problème est que le scénario est mal ficelé. Tantôt les révélations nous sont balancées brutes de décoffrage, tantôt l'on reste dans les sous-entendus qui n'en disent pas assez. Voilà pourquoi, dans la dernière demi-heure, il a fallu insérer un retour en arrière qui explique tout.
Les dialogues ne sont pas toujours très bons. On sent aussi parfois que les acteurs ont eu du mal à jouer devant des fonds bleus ou verts. Un esprit pointilleux trouverait des choses à redire aux scènes d'action. Il y a même une énorme bourde. Quand Jack se retrouve prisonnier d'un groupe de mystérieux rescapés, il se prend une balle, qui fait un joli trou dans sa combinaison. Par contre, il ne saigne pas et, deux minutes plus tard, le voilà sur pieds comme si de rien n'était ! Dans un premier temps, on voit encore le trou sur sa combinaison mais, très vite, il disparaît de l'écran !
Bref, si vous êtes fans de science-fiction et pas trop regardants sur la qualité des dialogues et la cohérence du scénario, ce film peut constituer un agréable divertissement digestif. Sans plus.
22:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
lundi, 22 avril 2013
Guerrière
L'héroïne, Marisa, est une jeune femme paumée. Fille unique, elle a été élevée par une mère célibataire, qui gère une supérette.
Dans son entourage, le personnage solaire est le grand-père Franz, qui adore sa petite-fille, mais qui, dès son plus jeune âge, a voulu en faire une combattante : il lui a imposé des marches, le sac à dos rempli de sable et, de temps à autre, cet ancien militaire lui a livré le fond de sa pensée sur le passé de l'Allemagne... ainsi que sur son présent.
On ne s'étonne donc pas de voir la jeune femme fréquenter un groupe de néo-nazis. Pour les hommes, à une exception près (celui qui va se faire exclure du groupe... et encore), le réalisateur ne fait pas dans la dentelle. Il nous présente ces garçons comme une bande d'abrutis tatoués, qui passent leurs journées à écouter de la musique débile et à se saouler à la bière. Ah, j'oubliais : de temps en temps, ils se défoulent sur des "pas-comme-il-faut" : des "niakoués", des "bougnoules" (on me pardonnera de ne pas avoir retenu les termes allemands), des costards-cravates, des cheveux-longs... (On pourrait trouver ces scènes quelque peu complaisantes : c'est rythmé, parfois presque humoristique : le réalisateur n'est pas dans la simple condamnation ; il nous montre une bande de jeunes qui s'amusent, même si c'est de manière très contestable.)
Le film a donc un aspect documentaire dans sa description de ces jeunes d'extrême-droite, à qui l'on bourre le mou à l'aide de films de propagande hitlériens. Toute cette engeance se garde bien d'ouvrir le moindre bouquin, alors que ceux qui les instrumentalisent sont plutôt des intellos.
Du côté des femmes, le portrait est plus en nuances. Il y a bien sûr l'héroïne, excessive en tout, aussi bien dans ses haines (elle peut aller jusqu'à tenter de tuer) que dans son amour (dans des scènes "intenses" avec son partenaire masculin, Sandro, le chef de la bande de nazilllons). C'est en fait une romantique frustrée, capable de s'ouvrir à autrui... ce qui va faire basculer le film.
Deux autres filles sont mises en valeur. La plus effacée des deux est Melanie, que j'ai d'abord prise pour une lesbienne :
Dans la dernière demi-heure, elle va révéler à ses camarades le secret qui a bouleversé sa vie.
La troisième est un rejeton de la classe moyenne. Svenja est aussi une enfant unique (quand on vous dit que les Allemands ne font plus de gosses !), élevée par sa mère et son beau-père.
La première est un peu larguée. Le second est strict, mais l'adolescente s'ingénie à déjouer sa surveillance. Le conflit naissant et l'incompréhension mutuelle vont la pousser à rejoindre les néo-nazis, dans une démarche voulue comme une transgression.
Il me reste à présenter l'élément déclencheur, le garçon émigré d'Afghanistan (en rouge sur la carte), qui tente de rejoindre la Suède (en vert). Auparavant, il est passé par l'Iran, la Turquie, la Grèce et la France :
On ne sait pas trop ce qui attire l'héroïne chez ce jeune homme, prénommé Rasul. Il est paumé, comme elle, mais cela ne suffit pas à tout expliquer. Paradoxalement, il se pourrait que les leçons de son grand-père aient servi à quelque chose. En tout cas, cette "bifurcation" (qui s'ébauche pendant que le petit copain nazi est en taule), au départ source d'espoir, va donner un tour encore plus noir à cette histoire déjà plutôt triste.
A conseiller aux coeurs bien accrochés.
17:12 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
dimanche, 21 avril 2013
Promised Land
Gus Van Sant a réalisé un film à la fois hollywoodien et subtil sur la question du gaz de schiste. Co-écrit par l'interprète principal, Matt Damon, le scénario se veut ouvertement écologiste... et pourtant... le début ne fait en rien penser à un film militant... et c'est très bien !
Pendant environ trois quarts d'heure, on suit les employés de la puissante compagnie gazière Global dans leur travail de prospection... de signatures (celles des propriétaires qu'il faut convaincre de vendre). A ma grande surprise, c'est le ton de la comédie qui domine dans cette partie. Le duo formé par Frances McDormand (l'organisée, la tenace, la citadine) et Matt Damon (le créatif, l'émotif, le rural) fonctionne à merveille, les deux acteurs s'étant visiblement plu à se chambrer mutuellement.
Au niveau de la réalisation, dès le début, on comprend qu'on n'a pas affaire à un manchot. Soyez attentifs à la séquence du restaurant, qui voit le héros décrocher une nouvelle mission, susceptible de lui valoir une grosse promotion. Cela commence par une contreplongée du fond du lavabo, où semble bouillonner de l'eau. (A cette scène répond une autre, dans l'avant-dernière séquence du film.) Cela continue par le parcours qui mène des toilettes à la table, où Steve/Matt se retrouve face à son supérieur hiérarchique, puis au patron lui-même.
D'autres moments savoureux confrontent Frances McDormand au gérant de la supérette (qui vend de la nourriture, des fringues, des armes... et des guitares !). Là encore le ton de la comédie l'emporte, sur fond de possibilité de romance. Signalons la performance de Titus Welliver :
L'habileté de Gus Van Sant est de ne pas diaboliser ces employés, qui ne savent visiblement pas tout du gaz de schiste. C'est là que le film devient vraiment puissant, puisqu'il va opposer des "gens bien", qui ont tous d'excellentes raisons de défendre leurs idées.
Les "héros" voient plusieurs personnes se mettre en travers de leur chemin. La première d'entre elles est Frank Yates, un ingénieur à la retraite, qui enseigne bénévolement les sciences aux jeunes du village. Il est incarné par le vétéran Hal Holbrook, que l'on a vu récemment dans Lincoln :
Mais la menace la plus grande vient d'un inconnu, qui se présente comme un fils de fermiers victimes des compagnies gazières devenu militant anti-gaz de schiste. Il est incarné par le co-scénariste du film, John Krasinski :
Curieusement, il a une apparence qui m'a fait penser à celle du réalisateur de Gasland, Josh Fox (que l'on voit aujourd'hui davantage en costume-cravate) :
Au conflit socio-politique qui oppose le commercial gazier à l'écologiste s'ajoute la rivalité sentimentale. En effet, l'une des institutrices locales (Rosemarie DeWitt, impeccable), qui possède de surcroît une belle propriété, semble très sensible au charme des deux hommes. Steve Butler paraît moins flamboyant, lui l'employé à qui tout réussissait jusque-là. A ce propos, je pense que le choix du nom n'est n'est pas le fruit du hasard. Ce n'est pas tant lié à l'un des personnages d'Autant en emporte le vent qu'à la signification, en anglais, du mot "butler" : le majordome. Le héros se fait le valet d'une puissante compagnie, qui n'a que faire de la qualité de vie des habitants de cette contrée perdue.
Le film bascule dans cette deuxième partie, qui voit une partie grandissante des habitants repousser les commerciaux, parfois avec violence. Le contraste est d'autant plus saisissant que, la crise aidant, ils semblaient au départ très réceptifs aux arguments (principalement pécuniers) de Matt Damon et Frances McDormand. Tout à coup, on perçoit les formules de politesse et les plaisanteries pour ce qu'elles sont : un moyen d'endormir la méfiance du client, de gagner sa sympathie, pour arriver à ses fins. Il reste que Steve est intimement persuadé de rendre service à ces ruraux qui vivent dans la précarité. Il leur apporte la sécurité financière, un avenir pour leurs enfants, voire la fortune.
La troisième partie du film, plus courte que les deux premières, s'articule autour de deux retournements, que je me garderai bien de révéler ici. Elle donne plus de force à l'histoire, même si la fin est un peu convenue (mais ouverte). Les auteurs ont voulu montrer que le plus important était de dire la vérité, que c'est aux populations de faire leur choix, pas aux grands groupes. Du coup, le message véhiculé par le film est plus largement politique que strictement environnemental, ce qui pourrait décevoir certains militants purs et durs. Mais, selon moi, cela rend le film meilleur.
P.S. I
Où en est-on de l'exploitation des gaz de schiste en France ? Le sujet pourrait redevenir d'actualité, si la technologie de l'arc électrique s'avère efficace (et rentable).
P.S. II
L'exploitation du gaz de schiste n'est pas la seule activité qui recourt à la fracturation hydraulique. C'est le cas aussi de la géothermie. Même si les quantités d'eau mises en oeuvre sont bien moindres, la "stimulation" s'effectue à des profondeurs comparables.
P.S. III
Le combat des ruraux pour protéger leur cadre de vie contre l'installation d'une activité polluante (mais créatrice d'emplois et de richesses) ne concerne pas que le gaz de schiste. Il me semble que les questions soulevées par Promised Land ne sont pas sans parenté avec la situation dans le département de l'Orne, même si, dans ce cas précis, les défenseurs de l'environnement sont davantage des "pipoles" et des gens de la "Haute"...
P.S. IV (Après j'arrête, c'est promis !)
Une partie (minoritaire) du financement du film vient d'Imagenation Abu Dhabi, une société sise aux Emirats arabes unis, qui, d'après le rapport annuel de British Petroleum, figurent parmi les dix premiers producteurs de pétrole et possèdent d'énormes réserves aussi bien de gaz que de pétrole. On pourrait donc suspecter le film de partialité, les monarchies du Golfe arabo-persique n'ayant pas intérêt à ce que l'exploitation de gaz non conventionnel se développe. Mais le scénario semble avoir été écrit indépendamment du financement et Matt Damon a répondu aux accusations, notamment dans les colonnes du Figaro.
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samedi, 20 avril 2013
Effets secondaires
Ce polar médico-sentimental de Steven Soderbergh a décontenancé une partie de la critique. On va voir qu'il n'est pas tout à fait ce à quoi l'on pouvait s'attendre... mais est-ce un mal pour autant ?
L'action tourne autour de quatre personnages principaux. Ronney Mara incarna Emily, l'épouse perturbée, aux multiples facettes. L'actrice, que je n'avais vue auparavant que dans The Social Network, m'a impressionné par la variété de son jeu :
L'autre personnage féminin de premier plan est la psychiatre, jouée par Catherine Zeta-Jones, dont la quarantaine épanouie a de quoi faire enrager toutes les "pisseuses" d'Hollywood :
Face à ces dames, il fallait du lourd, physiquement et intellectuellement. Pour le physique, la production a choisi un beau gosse aux muscles saillants, Channing Tatum, qui incarne le mari d'Emily :
Le pauvre garçon casse un peu son image dans ce film, puisqu'il y est présenté comme un type assez crédule (il s'est fait piéger par un collègue de travail), pas super-performant au pieu (son agent ne lui a pas dit qu'on risquait de l'associer à l'éjaculation précoce ?)... et qui, de surcroît, se fait poignarder comme une buse.
Le "héros" est donc l'autre mâle dominant, le psychiatre aux idées généreuses, j'ai nommé Jude Law, que l'on a récemment vu exceller dans Anna Karenine (et que Soderbergh avait fait tourner dans Contagion) :
L'acteur nous révèle un nouvel aspect de son talent : il parle français. On peut le constater en regardant le film en version originale sous-titrée. Au début, le psychiatre, qui est accrédité comme expert auprès de la police et de la justice, est requis pour interroger un drôle de client, censé être haïtien. Notons que l'acteur (sans doute américain ou canadien) qui incarne ce dernier s'exprime nettement moins bien que Jude Law dans la langue de François Hollande.
L'intrigue entremêle plusieurs thématiques : le désarroi d'une partie de la bourgeoisie américaine, le rôle de la spéculation boursière, la puissance des groupes pharmaceutiques, le manque d'éthique de certains professionnels de la médecine et la difficulté de faire durer une histoire d'amour.
Il est donc d'abord question de tromperie(s). L'histoire semble commencer de manière limpide, assez linéaire, sans guère de surprise. Mais, très vite, à quelques signes, on comprend que la réalité est plus complexe que ce que l'on voit. Le jeu consiste à trouver qui trompe qui. Attention toutefois : on peut être trompeur et se faire tromper à son tour. De même, on peut avoir été trompé et devenir trompeur. C'est très habile sur le plan scénaristique et, comme c'est très bien joué, j'ai passé un excellent moment.
21:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
vendredi, 19 avril 2013
La Religieuse
Guillaume Nicloux s'est donc lancé dans une nouvelle adaptation du roman de Denis Diderot. Ce réalisateur a pris le risque de changer de style, lui qui a réussi dans le polar (voir notamment La Clef, injustement "descendu" par des critiques crétins à sa sortie).
Le film baigne logiquement dans une atmosphère religieuse : le fond a déteint sur la forme, d'un classicisme épuré (comme on dit dans les revues pédantes). Ce n'est pas sans rappeler d'autres œuvres comme le Thérèse d'Alain Cavalier et surtout La Vie de Marianne de Benoît Jacquot. Hélas, la comparaison ne joue pas en faveur de La Religieuse, dont le rythme, volontairement lent, est moins maîtrisé que dans les deux "modèles" cités.
Il est cependant un point commun qui explique l'intérêt que chacun de ces films a suscité : le talent de la jeune actrice principale. Thérèse avait révélé Catherine Mouchet (auparavant seulement connue des théâtreux) et La Vie de Marianne Virginie Ledoyen (déjà remarquée dans L'Eau froide, La Cérémonie et La Fille seule). Il va falloir suivre la petite Pauline Etienne. On lui souhaite un meilleur avenir que ses deux consœurs, les carrières de ces dernières n'ayant pas totalement confirmé leurs débuts étincelants. (Même si Ledoyen était très bien récemment dans Les Adieux à la reine.)
Cette jeune femme se retrouve confrontée à de fortes personnalités, deux mères supérieures aux influences très différentes. La "méchante" est incarnée par une Louise Bourgoin surprenante... une véritable saleté, très loin de son rôle dans Les Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec ! La "gentille" est jouée par Isabelle Huppert, qui semble enfin consentir à vieillir... mais avec un personnage finalement très coquin !
N'oublions pas les interprètes des seconds rôles, parmi lesquels je distingue Françoise Lebrun (adorable) et Agathe Bonitzer (piquante).
Il est donc dommage que la réalisation (et le montage) n'aient pas un peu mieux servi cette brochette d'actrices de talent. Le film n'en reste pas moins efficace dans la dénonciation du totalitarisme religieux qui sévissait dans certains couvents français, au XVIIIe siècle. Mais il aurait pu être encore plus fort.
19:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
mardi, 16 avril 2013
Le Repenti
Le cinéaste algérien Merzak Allouache s'est penché sur l'histoire récente de son pays de naissance : les conséquences de la guerre civile, qui a ensanglanté l'Algérie principalement dans les années 1990.
On suit d'abord un "blédard", Rachid, ancien des maquis islamistes, qui rejoint sa famille et espère bénéficier d'une amnistie.
Dès le début, on comprend que la "concorde civile" prônée par Abdelaziz Bouteflika ne suscite pas l'enthousiasme de la population... surtout qu'un homme habitant le village des parents du "héros" a vu sa famille massacrée par les islamistes.
Son salut va peut-être venir du commissaire de police auquel il s'est rendu. Mais celui-ci veut obtenir des informations en échange du nouveau statut. Il lui trouve quand même un petit boulot, en ville, dans un café, auprès d'un vieux sage qui le loge en sous-sol. Durant cette partie du film, on se demande dans quelle mesure ce jeune homme très discret a dit la vérité aux autorités. N'était-il vraiment qu'un sous-fifre ? Ne sait-il vraiment rien ? Quel est le secret qui semble le hanter ?
Dans le même bourg travaille un pharmacien encore jeune :
Il semble proche de la population, vit à l'occidentale (dans la mesure du possible). L'appartement qu'il habite est mal entretenu, quasiment pas meublé... et il s'y alcoolise presque tous les soirs, en regardant la télévision chinoise ! Il finit par y mettre un peu d'ordre lorsque débarque, à sa demande, une ravissante jeune femme, Djamila (Adila Bendimered, lumineuse) :
Qu'est-ce qui relie ces deux êtres et qu'est-ce qui va les rapprocher de Rachid ? Je vous laisse le découvrir. Le réalisateur excelle à faire monter la tension. Il part d'une scène a priori anodine, fort bien jouée. Puis il l'étire de manière à faire ressortir la douleur. De plus, il laisse planer une part de mystère, jusqu'à la conclusion de l'histoire, logique mais assez inattendue.
P.S.
Les spectateurs attentifs s'amuseront à relever l'occurrence de la France, à travers sa langue (jusque sur les panneaux de cette petite ville située loin d'Alger), ses productions (par exemple les voitures) ou la trace coloniale (le nom d'un café, par exemple) qu'elle a laissée.
20:34 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, histoire
dimanche, 14 avril 2013
La Maison de la radio
Nicolas Philibert est l'un des très bons documentaristes français contemporains. Le grand public (moi compris) l'a découvert à l'occasion du superbe Etre et avoir, en 2002. Plus récemment, il a réalisé Retour en Normandie et surtout Nénette.
Aujourd'hui, il s'est attaqué à un "monument", le bâtiment qui abrite les différentes stations de radio du service public : France Inter, France Info, France Culture, France Musique, France Bleu, FIP, RFI et (normalement) Le Mouv'. Cependant, comme le film a été tourné au début de 2011 (juste après le transfert à Paris de la radio "jeunes" du groupe), celle-ci est absente à l'écran, tout comme FIP me semble-t-il.
On commence par un florilège de voix, d'abord distinctes, mais qui finissent par s'entrecroiser, se mélanger. La suite détaille la vie de cette fourmilière.
On pourra le regretter mais, vu la richesse du personnel et la diversié des programmes diffusés, seule une partie du matériau est montré à l'écran.
Comme il s'agit de radio, le travail sur le son est mis en valeur. On assiste donc à divers enregistrements musicaux (classiques bien sûr, mais aussi modernes). Cette partie est très réussie. Les artistes sont excellents, jusque dans leur perfectionnisme. J'ai aussi apprécié les moments capturés d'une fiction radiophonique (sans doute pour France Culture).
Une assez grande place est donnée à la gestion de l'information. Je regrette toutefois que l'accent soit mis sur la matinale, alors qu'il existe d'autres programmes, plus riches, en matière de traitement de l'actualité. Ceci dit, découvrir le travail quotidien des anonymes, loin des vedettes de l'antenne, est très intéressant.
D'un point de vue logistique, les spectateurs constateront avec surprise que les techniciens du son sont presque tous des hommes, alors que le secrétariat (au sens large) est assuré par un personnel quasi exclusivement féminin.
Les "petites mains" ne sont pas oubliées, l'accent étant mis sur le service du café.
En dépit des séquences humoristiques dont le film est émaillé, mon intérêt est souvent retombé à cause du choix des émissions dont une partie de la "cuisine" nous est montrée. Souvent, ce ne sont pas celles que j'écoute et les plus populaires sont, sauf exception, absentes du film. C'est globalement assez "intello bobo". Du coup, en dépit de l'intérêt factuel de telle ou telle séquence, j'ai été un peu déçu.
22:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
samedi, 13 avril 2013
Inch'Allah
L'histoire de ce film canadien, tourné en Jordanie, se déroule entre Israël et Palestine (la Cisjordanie). L'action est principalement menée par trois personnages féminins. Chloé est une jeune et compréhensive sage-femme canadienne :
Elle est incarnée par une actrice à suivre, Evelyne Brochu. La soldate israélienne Ava est jouée par Sivan Levy :
Plus connue est la Française Sabrina Ouazani, révélée jadis dans un rôle de "tchatcheuse" dans L'Esquive et vue récemment dans Des Hommes et des Dieux. Elle interprète Rand, la Palestinienne enceinte, dont le compagnon est en passe d'être jugé par les Israéliens :
Les personnages masculins ne sont pas transparents mais ils sont plutôt placés au second plan, à l'inverse de ce qui se passe d'habitude dans le cinéma commercial. (Précisons que la mise en scène est l’œuvre d'une femme, Anaïs Barbeau-Lavalette.)
L'intrigue s'appuie sur des éléments "classiques" de la représentation du conflit proche-oriental : la présence militaire israélienne en Palestine, la construction du mur de séparation, l'organisation des check-points, l'énergie brouillonne des gamins palestiniens et le recours aux attentats-suicides d'une partie des nationalistes arabes.
Le film démarre par une séquence en apparence anodine, interrompue par un événement inattendu. On découvre ensuite les personnages principaux. On est d'abord conduit à penser que tout se passe dans la continuité et que, par exemple, la femme que Chloé voit en pleurs de la fenêtre de son appartement a un lien avec ce que l'on vient de nous montrer à l'écran. En réalité, sans que cela soit dit, il s'agit d'un retour en arrière. On reverra cette séquence initiale à la fin du film, mais d'un autre œil.
Entre les deux, on aura appris à connaître la jeune sage-femme, qui tente de tout concilier : elle habite en Israël mais travaille en Palestine, où elle passe aussi une partie de son temps libre... sans parvenir à oublier son Québec natal, avec lequel elle a besoin de rester en contact. Elle aime la compagnie des femmes et des hommes, palestiniens comme israéliens.
Elle côtoie une drôle de soldate, mélange de garçon manqué et d'enfant gâtée, un peu pétasse, un peu bêtasse, mais pas mauvaise au fond. Des trois femmes, c'est le personnage le moins fouillé.
Rand fait ce qu'elle peut pour joindre les deux bouts. Elle tente de récupérer ce qu'elle peut dans une décharge et aimerait bien revoir le plus vite possible son chéri, emprisonné par l'occupant israélien auquel il s'est visiblement fortement opposé.
Tout n'est pas réussi dans le film. Le propos est parfois trop appuyé. Certaines séquences émergent toutefois, comme celles tournées dans le dispensaire, ou encore cette sortie de l'autre côté, que Chloé parvient à organiser pour ses amis palestiniens. (C'est un thème que l'on retrouve aussi dans le récent Zaytoun.)
Si la réalisatrice se garde de présenter tous les Palestiniens comme des anges victimes de démons israéliens, on sent néanmoins clairement l'engagement du propos. Pour elle, la posture de l'Occidental généreux et détaché, qui sait faire la part des choses, ne tient pas à moyen terme. Trop d'horreurs et d'injustices surviennent dans ce petit bout de terrain... au point de transformer certains individus en bombes humaines. On n'est pas obligé d'adhérer entièrement à la démonstration, mais le film a le mérite de poser certaines questions.
22:57 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
vendredi, 12 avril 2013
4 ou 4,5 jours de classe ?
D'après un article paru dans Midi Libre jeudi 11 avril, la majorité des maires aveyronnais ont choisi de n'appliquer la réforme Peillon qu'à la rentrée 2014. Sur les 228 communes possédant au moins une école, seules 29 vont (re)passer à la semaine de 4,5 jours en 2013 :
Sans surprise, certains territoires, dont les élus penchent à gauche, ont décidé d'appliquer la réforme avec zèle :
- 4 des 8 communes du Grand Rodez (accompagnées de Salles-la-Source, qui vit dans son orbite)
- la majorité des communes du canton de Naucelle
- une bonne partie du Saint-Affricain (presque toute la communauté de communes)
- la majorité du bassin decazevillois (à l'exception notable d'Aubin)
Quelques communes (comme Najac) se retrouvent isolées dans leur démarche.
Un autre espace homogène se détache, dans le nord. Il s'agit du Carladez qui, s'il a récemment élu un conseiller général classé à gauche, n'en reste pas moins une terre encore marquée par un certain conservatisme politique. Il est possible que les choix en matière d'investissement culturel aient déterminé la position des élus locaux : depuis une bonne décennie, le Carladez se fait remarquer par un indéniable dynamisme, qui tente d'associer ruralité, tourisme et culture au sens large. Ce territoire est donc déjà bien outillé pour s'adapter aux changements induits par le passage à la semaine de 4,5 jours. Il dispose sans doute du volant d'activités et des animateurs susceptibles d'être orientés vers le jeune public qu'il faudra "occuper" intelligemment pendant le petit créneau quotidien libéré par la reventilation des heures de cours.
Je me suis aussi demandé si l'on pouvait établir un lien entre ces communes pionnières et celles qui sont sorties du paysage scolaire, les 76 (sur 304) ne possédant plus d'école (marquées par des pointillés bleus) :
Une partie de ces communes forment des blocs assez homogènes, où les enfants (scolarisés ailleurs) ne connaîtront la réforme qu'en 2014 (aucune commune coloriée en rouge ne se trouvant à proximité). On remarque qu'elles sont situées dans des bastions de la majorité départementale (à proximité de Laguiole, Entraygues-sur-Truyère et Saint-Geniez-d'Olt). Les autres communes "a-scolaires" se trouvent dans l'orbite d'un pôle qui va passer aux 4,5 jours dès septembre 2013 (autour de Decazeville, Naucelle et Saint-Affrique principalement).
Il reste un cas particulier, que j'en encadré en vert : le pôle du sud-est du département, centré sur la communauté de communes de Millau-Grands-Causses. C'est le seul territoire, où la gauche est très présente, dont les élus ont choisi de différer l'application de la réforme. L'unique commune s'engageant dès 2013 est Verrières (connue notamment pour son viaduc, qui précède celui de Millau-Creissels)... qui ne fait pas partie de la communauté de communes. Signalons qu'elle est rattachée au canton de Saint-Beauzély, et non à l'un des deux incluant une partie de Millau.
01:34 Publié dans Politique, Politique aveyronnaise, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, société, actualité
dimanche, 07 avril 2013
Estremoni
Vendredi soir, à Rodez, la venue de Zinedine Zidane n'était pas le seul événement notable. Au cinéma Le Royal a été projeté un documentaire d'Yves Garric et Georges Berte, consacré à l'église Saint-Austremoine, située sur le territoire d'une des plus vastes communes de l'Aveyron, Salles-la-Source (entourée en rouge), proche de Rodez (en noir) :
La salle 1 était presque comble, principalement remplie d'habitants du coin. Le village, pittoresque, se trouve à la limite du Causse comtal et du Vallon de Marcillac. La campagne est donc marquée par les moutons et la viticulture.
Cette église a été restaurée à l'initiative d'habitants du cru. Certains ont fondé une association, "Les amis d'Austremoine". Trois de ses présidents successifs interviennent dans le film :
Le fondateur Jean Poujade (absent le soir de la projection)
Marcel Maillé
... et l'actuel président Pascal Hubert, que l'on voit "mettre le pied à la pâte" à un moment du film :
Leurs propos alternent avec ceux de spécialistes, notamment Louis Causse, architecte des Bâtiments de France :
Précis et "pointus", ses commentaires sont très intéressants. Ils sont complétés, pour la partie intérieure, par ceux de Claire Delmas, ancien conservateur des Antiquités de l'Aveyron :
Elle utilise sa connaissance de l'histoire de l'art et de la symbolique religieuse pour présenter dans toute leur richesse les oeuvres situées dans l'église. L'une des plus belles est le retable, datant du XVIIIe siècle :
Il est intact et présente des scènes faisant allusion à la vie de Jésus sur trois époques : avant qu'il ne se fasse connaître, dans ses derniers jours et après la résurrection. Deux bustes encadrent l'objet : celui de saint Austremoine, à gauche, et celui de saint Amans (premier évêque de Rodez selon la tradition), à droite. En regardant attentivement l'image, vous remarquerez que le second buste est trop grand pour sa niche. Il n'est donc sans doute pas d'origine.
Quant à saint Austremoine, il est présent bien au-delà de l'Aveyron. Il est réputé avoir mené l'évangélisation de l'Auvergne. Une église abbatiale lui est consacrée à Issoire, dans le Puy-de-Dôme. Le documentaire se plonge dans cette passionnante digression. On découvre les splendides peintures murales du bâtiment. (On peut en voir d'autres, ainsi qu'une centaine d'images de l'édifice, sur un site dédié à l'art roman.)
La façade extérieure est aussi joliment ouvragée. On peut notamment y voir une représentation des signes du zodiaque. Voici par exemple celui des Gémeaux :
A cette occasion, on apprend qu'un treizième signe a été sculpté, sans doute pas à l'origine. Plusieurs hypothèses sont citées quant à sa présence et à sa signification :
De retour en Aveyron, le film s'attarde sur certaines pièces de l'église rouergate, comme la Croix des vignerons, autrefois située à l'extérieur :
Mais c'est sans conteste un Christ du XIIe siècle, aux lignes épurées, qui suscite les commentaires les plus riches :
Plus proche des gens apparaît une magnifique statue de la Vierge (du XIXe siècle), en bois d'ormeau :
Les croyants se rendaient parfois dans l'église pour des raisons plus anecdotiques, comme celle qu'évoque l'une des paroissiennes, Josette Croizat :
Sachez qu'il est question d'énurésie !
Le documentaire, parfois austère, se veut néanmoins vivant. Il ne cache pas les petites tensions qui existaient dans le village, entre les différentes églises, chaque section (le bourg de Salles, Pont-les-Bains, Cougousse, Mernac et bien sûr Saint-Austremoine) étant attachée à la sienne :
Au fil du documentaire, des anecdotes sur la vie quotidienne des habitants de jadis s'ajoutent aux histoires, plus érudites, évoquant les liens avec le comte de Rodez, ou son évêque ou encore l'église Saint-Amans. Les périodes troublées voient l'église devenir un refuge, un entrepôt ou un bien à préserver.
L'époque contemporaine a vu le site se garnir d'une croix, oeuvre d'un sculpteur local, Henri Duffourg :
Il s'est inspiré de l'histoire locale et des symboles religieux pour réaliser une oeuvre ambitieuse, foisonnant de détails.
L'atmosphère religieuse est rendue par la musique d'accompagnement, souvent sacrée... et de très bonne qualité. Parmi les différents morceaux, j'ai particulièrement apprécié le Salve Regina du choeur masculin de l'abbaye de Sylvanès, dont voici un extrait :
Moins renommé, mais tout aussi remarquable, est le Petit Choeur du Dimanche, qui, enregistré dans les conditions du direct (comme plusieurs autres artistes), nous livre une performance originale :
Pour clore ce chapitre musical, je propose une devinette : de quel instrument joue le baryton dans l'extrait qui suit ?
A l'image du fond musical, l'image est soignée, même si l'on peut trouver certaines incrustations un peu trop rudimentaires. Le commentaire, lu par Yves Garric, est toujours utile, jamais envahissant.
Sachez enfin que le film est déjà disponible en DVD au prix de 10 euros.
D'après Yves Garric, les trois quarts des sommes récoltées seront consacrés à l'entretien de l'église.
15:36 Publié dans Aveyron, mon amour, Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, histoire, société
samedi, 06 avril 2013
Zidane à Rodez
Pour les médias et pas mal de fans de football, c'est l'événement du week-end : l'ancien champion du monde est venu animer une soirée-spectacle à l'amphithéâtre de Rodez. (Il va de surcroît donner le coup d'envoi de la rencontre opposant les Ruthénois aux Biterrois.) Cette manifestation de soutien au club de football local, en situation délicate, se situe dans le prolongement de l'annonce de l'entrée de Zinedine Zidane dans l'actionnariat du RAF (Rodez Aveyron Football). Il aurait apporté 10 000 euros à l'occasion de l'augmentation de capital décidée pour sauver le club, aux finances chancelantes.
Autant son intervention a pu susciter l'enthousiasme, autant elle a pu aussi déchaîner les commentaires hargneux... à raison ? Les râleurs de base soulignent que la somme investie est une miette pour celui qui gagnerait environ 5 millions d'euros par an. Certes, mais rien ne l'obligeait à faire ce geste. Même si sa belle-famille a ses attaches juste à côté de Rodez, même s'il arrive à l'ancien champion du monde de venir passer un peu de bon temps, tranquille, dans l'Aveyron, pourquoi serait-il allé mettre 10 000 euros dans un club qui se cassait la figure ?
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il réalise ce genre d'investissement. En effet, il y a trois ans, en compagnie de Bixente Lizarazu, il a apporté la même somme au club d'Evian-Thonon, dont le principal sponsor est l'entreprise Danone, dirigée par Franck Ribout, présenté comme un ami de Zizou... mais qui est surtout l'un de ses principaux employeurs : depuis 2004, Zidane est l'ambassadeur mondial de la marque. Il participe activement au mécénat (pas forcément désintéressé) de Danone : il parraine (depuis une dizaine d'années) la Danone Nations Cup et a intégré le conseil d'administration de danone.communities. Il a même soutenu un projet d'investissement du groupe en Algérie. Que l'amitié qui lie les deux hommes soit grande ou pas, on imagine mal l'ancien footballeur refuser de faire un "petit geste" en faveur de la nouvelle "danseuse" de son patron.
Il ne semble pas possible d'établir un tel lien à propos de l'investissement dans le RAF. Dans le Grand Rodez, c'est plutôt Lactalis (le rival de Danone) et les groupes coopératifs qui dominent le secteur laitier. Alors, il est tout simplement possible que, sollicité pendant sa formation à Limoges par l'un des membres du staff du RAF, il ait été convaincu... et tenté par un "beau geste" finalement peu coûteux.
P.S.
Faut-il voir un lien de cause à effet ? Alors qu'en début de saison le RAF se traînait dans les profondeurs du classement de CFA (groupe C), depuis l'annonce du sauvetage financier, les résultats sont devenus nettement meilleurs (jusqu'à ce soir...). Alors, pourquoi se plaindre ?
19:10 Publié dans Société, Sport | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, médias, presse, société
dimanche, 31 mars 2013
Des cloches qui apportent des oeufs... et des médailles
La promotion de Pâques de la Légion d'honneur confirme que la gauche, tout comme la droite, est très attachée aux décorations symboliques. Se confirme aussi une tendance déjà perceptible en janvier dernier : la volonté de distinguer le monde économique. Selon Le Monde, il représente 28 % des décorés, devant l'enseignement et la fonction publique. On devrait donc dire après la fonction publique au sens large (la majorité des enseignants étant fonctionnaires), qui cumule un gros tiers des hochets.
A ce propos, la lecture du principal décret (le quatrième de la liste parue au Journal Officiel) permet de constater que ce sont rarement les fonctionnaires "de base" qui sont récompensés. Aujourd'hui comme hier, on privilégie "l'élite", se contentant, ici ou là, de glisser le nom d'un prolétaire méritant.
Je me suis intéressé à une autre catégorie de décorés, les élus. Ils sont 48 sur un total 563, soit 8,5 %. (Et encore, je n'ai compté que ceux qui étaient clairement identifiés comme exerçant ou ayant exercé une fonction politique élective.) Rappelons que la France compte environ 600 000 élus, pour une population d'environ 65 millions d'habitants, soit un peu moins de 1 % du total. Les politiques sont donc surreprésentés. Qu'en est-il de leur origine géographique ?
Sans surprise, la région Ile-de-France arrive en tête, avec 9 élus : 2 pour Paris (Serge Blisko et Michèle Blumenthal - deux socialistes) et 7 pour la banlieue, dont 4 pour la Seine-Saint-Denis : Josiane Bernard, Daniel Guiraud, Gilbert Klein et Corinne Valls. Il me semble que deux d'entre eux ne sont pas socialistes (J. Bernard et G. Klein, communistes). L'ouverture est encore plus grande au niveau des autres banlieusards. S'il n'est pas étonnant de trouver Francis Chouat (successeur de Manuel Valls à la mairie d'Evry) dans cette liste, on pourra s'étonner de la présence de Gilbert Dijon (UMP) et de Pierre-André Wiltzer, qui a fait carrière sous les couleurs de l'UDF puis de l'UMP.
Viennent ensuite deux régions, avec 5 décorés chacune : Rhône-Alpes et Midi-Pyrénées. 4 des 5 heureux élus rhônalpins sont socialistes, la cinquième (Christiane Echallier) plutôt centriste. En Midi-Pyrénées, les cinq personnes sont issues de cinq départements différents. Un seul n'est pas de gauche : Pierre Montastruc, ancien député UDF de Haute-Garonne.
Le Tarn-et-Garonne voisin est représenté par le maire de Villemade, Francis Labruyère, membre du PRG :
Les autres sont tous socialistes, à commencer par Thierry Carcenac, ancien député et président du Conseil général du Tarn :
Il est accompagné de la Lotoise Geneviève Lagarde, adjointe au maire de Cahors et vice-présidente du Conseil général :
Voici enfin l'Aveyronnaise de la bande, Hélène Thibal, ancienne adjointe au maire de Saint-Affrique (de 2001 à 2008).
On reste dans le grand Sud-Ouest avec la région suivante, le Languedoc-Roussillon. 4 de ses élus (3 socialistes) ont été désignés, une seule venant des Pyrénées-Orientales (Renée Soum). Les trois autres sont gardois : Alain Journet (ancien sénateur-maire du Vigan et ancien président du Conseil général), Jean Denat (actuel vice-président du Conseil général) et Renée Bouvier (maire divers gauche du Cailar).
Cinq régions ont deux élus au palmarès : la Franche-Comté, la Lorraine, le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et le Poitou-Charentes. C'est dans ce dernier cas qu'il est intéressant de relever les noms : Maxime Bono (maire PS de La Rochelle) et Jean-François Douard (maire divers droite de Lagord, en Charente-Maritime). Cela nous ramène aux législatives de 2012, qui ont vu la défaite de Ségolène Royal face à Olivier Falorni, socialiste dissident soutenu par une partie de la gauche... et de la droite. Durant la campagne, Maxime Bono (le sortant qui avait eu l'amabilité de ne pas se représenter) avait apporté son soutien à Ségolène Royal. Le voilà promu officier sur le contingent du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, presque un voisin.
Il est beaucoup plus étonnant de voir figurer sur la liste le nom de Jean-François Douard, un divers droite proche de Dominique Bussereau (rival de Ségolène dans la région). Durant la campagne des régionales, en 2010, le maire de Lagord s'était même laissé aller à des propos outranciers à l'égard de la candidate socialiste. Notons qu'il est nommé sur le contingent de la ministre de la Réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique, au titre de la Décentralisation. C'est donc soit aux bons soins de Marylise Lebranchu, soit à ceux d'Anne-Marie Escoffier que ce bretteur de droite doit sa décoration.
Les autres régions sont représentées par un seul décoré : Aquitaine, Basse-Normandie, Bourgogne, Bretagne, Centre, Pays-de-la-Loire, Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Alsace, celle-ci avec Philippe Richert, président UMP (tendance centre-droit) du Conseil régional. On n'a pas oublié l'outre-mer, avec la Guadeloupe, la Martinique et la Réunion. Même les Français de l'étranger (pas forcément de gauche) ont eu leurs décorés (trois) !
Cette brochette éclectique laisse toutefois quelques territoires à l'écart, notamment quatre régions de France métropolitaine, dont deux de cœur du président de la République : la Haute-Normandie (où il a passé les 14 premières années de sa vie) et le Limousin (sa terre d'élection). Les élus de Corse et d'Auvergne vont eux aussi devoir patienter un peu avant de décrocher de nouveaux hochets !
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vendredi, 29 mars 2013
Un nouveau vice-président aveyronnais
A l'issue de la réunion plénière du Conseil régional de Midi-Pyrénées, le maire de Rodez, Christian Teyssèdre, est devenu vice-président de ladite assemblée. Cette réunion a été retransmise en direct et enregistrée, ce qui permet de la regarder sur le site du Conseil régional. Plusieurs caméras ont filmé la séance : une placée en hauteur, qui donnait à voir presque toute la salle (ses images sont à l'écran en début et fin de réunion, ainsi que durant la pause méridienne), une face à la tribune où siégeait l'exécutif régional, une (la même ?) dirigée sur le pupitre (où se sont exprimés Martin Malvy et Jean-Louis Chauzy), une ou deux autres proposant des vues de l'hémicycle et des plans rapprochés des conseillers qui avaient la parole.
Le début était annoncé à 10 heures. Or, quand Martin Malvy lance le départ de la déposition des listes pour le renouvellement partiel de la commission permanente, il annonce qu'il est 11h35, alors que, selon l'horloge de l'écran, la réunion a débuté 1h09 auparavant... soit à 10h26. Ah, le "quart-d'heure toulousain"...
Comme le début a été tardif, la pause méridienne ne survient qu'à 13h16 (2h50 après le début). Les débats ont repris à 14h30 pétantes 14h44 (à l'insistance du président du Conseil régional, qui devait trouver que les troupes s'attardaient trop au café), pour s'achever, 9h35 après le départ, à 20 heures semble-t-il.
La séance a commencé avec l'appel des conseillers, par Gérard Onesta. Sur les 91 élus, 78 étaient présents (dont 3 perdus dans les couloirs visiblement), 13 d'entre eux ayant prévu de "sécher" une partie de la réunion : leur départ était annoncé qui pour 18h30, qui pour 18h, qui pour 17h, qui pour 16h... voire 14h ! Il y en a même une (Michèle Garrigue, je crois) qui s'est fait excuser pour la tranche 11h-13h30, histoire sans doute de déjeuner en paix. (Elle est de surcroît élue de la Haute-Garonne.) Notons que la dame n'a donc suivi les débats matinaux que de 10h26 à 11h... trop dure, la life ! Les véritables absents ne seraient donc qu'au nombre de 13, soit 14 % du total. Le nombre de présents a tout de même varié durant la journée. Au maximum, il y a eu 80 votants lors des scrutins :
Mais, étant donné qu'une dizaine d'absents (ou de présents temporaires) avaient donné procuration à un autre conseiller, on penser qu'il y avait en moyenne entre 65 et 75 élus, soit entre 71 % et 82 %. Et les Aveyronnais là-dedans ? 7 sur 10 étaient présents. Les trois absents étaient Jean-Claude Luche (qui avait donné pouvoir de vote à Anne-Sophie Monestier-Charrié), Marie-Françoise Vabre (qui avait donné pouvoir de vote à François Simon, autre représentant d'Europe Ecologie) et Pierre Pantanella (qui avait donné pouvoir de vote à une Ariégeoise, Rolande Sassano). Marie-Lou Marcel est partie à 18h30, laissant pouvoir de vote... à un Ariégeois (Marc Carballido). La ministre (de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme) Sylvia Pinel était aussi absente.
Si l'on ajoute le cas d'un président d'intercommunalité qui a quitté les lieux un peu avant la fin, on arrive à la conclusion que les cumulards sont moins assidus que les autres. Voilà qui devrait inspirer les rédacteurs de la future loi sur le cumul des mandats. Un président de Conseil régional, une députée et une ministre n'ont aucune raison (autre que financière) de garder un mandat de conseiller régional. Au niveau local, on s'aperçoit que ceux qui empilent les casquettes (maire, président de structure intercommunale, de syndicats divers voire secrétaire d'un parti politique) ont tendance à déserter l'hémicycle toulousain... tout en étant payés !
Ma deuxième remarque s'applique aux élus aveyronnais de gauche. Il est étonnant que les socialistes Marie-Lou Marcel et Pierre Pantanella aient donné procuration à des Ariégeois. Les relations entre camarades aveyronais seraient-elles tendues à ce point ?
Cela nous mène tout naturellement à Christian Teyssèdre. D'après Midi Libre de ce vendredi, le maire de Rodez semble avoir retenu les leçons de l'an passé ; il a joué la partie de manière discrète. Le voilà donc intronisé vice-président :
Cette annonce a été faite 2h21 après le début de la retransmission, soit à 12h47. Dans le quotidien montpelliérain, Laurent Hortes précise que c'est vers 13h30 (au début de la pause méridienne, donc) qu'un "touitte" de Martin Malvy a répandu la nouvelle. Il a pourtant été pris de vitesse (toujours d'après Midi Libre) :
Déjà, en septembre dernier, Daniel Rozoy s'était signalé en félicitant publiquement Christian Teyssèdre pour une promotion qu'il a obtenue... cinq mois plus tard. Quelle prescience ! Rappelons que c'est le départ de Nicole Belloubet pour le Conseil constitutionnel (où elle a été nommée par le président du Sénat Jean-Pierre Bel... encore un Ariégeois !) qui a libéré un poste de vice-président. De surcroît, il écarte un candidat de poids de la course à la succession de Martin Malvy (qui a pris un petit coup de vieux).
Si l'on écoute attentivement les minutes qui suivent, on s'aperçoit qu'une conseillère a demandé à intervenir au sujet des vice-présidences. Il s'agit de l'écologiste Marie-Christine Pons, qui regrette que les récentes retouches apportées à l'exécutif régional aient fait reculer la parité. En effet, le rapport hommes/femmes (au niveau des vice-présidences) est passé de 8/7 à 9/6. Martin Malvy a rappelé que la parité n'était qu'un des facteurs pris en compte dans la composition de l'équipe dirigeante. S'y ajoutent notamment l'origine départementale et l'appartenance politique : c'est une majorité plurielle qui administre la région.
Je ne sais pas si cela peut consoler Mme Pons, mais le respect de l'esprit de la parité a conduit une nouvelle femme au poste de 1ère vice-présidente : Janine Loïdi. Celle-ci a connu une promotion fulgurante, puisque, n'étant pas membre de l'exécutif en 2010 (elle est néanmoins conseillère depuis 2004), elle n'est devenue vice-présidente que fin 2012, suite à trois démissions. La voilà propulsée dauphine de Martin Malvy !
J'ai envie de terminer ce billet par quelques touches humoristiques. Certains élus n'ont visiblement pas encore réalisé que les séances étaient filmées. Se croyant protégés des regards d'en face par le rebord élevé de leur pupitre, plusieurs conseillers ont carrément sorti l'ordinateur portable. Disposant sans doute d'une connection wi-fi, ils doivent mettre à profit certains temps morts pour perfectionner leur connaissance des dossiers...
En voici un qu'il est difficile d'identifier (compte tenu de la prise de vue) :
En voici un autre, qui ne se cache nullement :
J'ai pointé sa joue droite parce, dans la vidéo, à plusieurs reprises, on le voit mâcher ostensiblement un chewing-gum. Je ne dirai rien du col largement ouvert. Il paraît que c'est à la mode chez les bobos. Le monsieur en est peut-être un. Je pense qu'il s'agit d'un élu d'Europe Ecologie (compte tenu de son voisinage), sans doute François Arcangeli qui, lorsqu'il veut paraître, prend soin de se présenter sans lunettes :
Il ressemble quand même plus à celui qui était interrogé par Le Petit Journal, en 2006 :
Les plus malins ont peut-être placé une tablette numérique à plat sur leur bureau... ou alors ils surfent grâce à leur téléphone haut de gamme. Vont-ils jusqu'à passer des coups de fil durant la séance ? Oui... et c'est un Aveyronnais qui donne le mauvais exemple, en la personne de Jean-Louis Chauzy :
Le présdent du CESER (et conseiller municipal de Rodez) est intervenu au début de la réunion, puis il s'est rassis immédiatement à la droite de Martin Malvy, signe de l'estime dont il jouit. C'est peut-être la raison pour laquelle il s'est permis, quelques minutes plus tard, de prendre un appel au vu de tous.
La fin de la séance a été émaillée de quelques joutes verbales et de mini-incidents divers. Je relève le concours de photographies auquel se sont livrés l'écologiste Gérard Onesta et le conseiller d'opposition Jacques Thouroude (un Tarnais qui siège avec J-C Luche, A-S Monestier-Charrié et S Roques dans le groupe "Osons Midi-Pyrénées") :
Le premier semble avoir voulu mettre en évidence les bancs quelque peu dégarnis de la droite en cette fin de journée. Son adversaire a décidé d'en faire autant... avec les bancs de la gauche. J'en profite pour signaler à mes lecteurs villefranchois que si, dans un futur proche, ils reçoivent un document illustré d'une photographie de Serge Roques dans l'hémicycle régional, il devront certainement celle-ci à son collègue tarnais.
23:40 Publié dans Politique, Politique aveyronnaise | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, actualité
jeudi, 28 mars 2013
Une nouvelle localisation du Groland
Je l'ai trouvée dans l'émission Made in Groland de samedi 23 mars dernier. Très en forme, Jules-Edouard Moustic a commencé par évoquer la pédophilie, à travers une référence religieuse d'actualité et une autre, scolaire. Pédagogue, il a conclu sa présentation par cette formule pleine de bon sens : "No zob in job."
Le journal s'est ensuite intéressé à la nouvelle génération de médicaments... et de pharmacies :
Cela nous a tout naturellement menés aux scandales alimentaires qui semblent s'accumuler ces temps-ci. Un autre vient d'ailleurs d'éclater au Groland, plus précisément dans les grandes surfaces d'un groupe local :
Après une fantaisie sur la "flexisécurité" et une fiction sur la bombe atomique bio, il a été question de ces emplois d'assistance téléphonique délocalisés on ne sait où. C'est à cette occasion qu'une carte d'Europe intégrant le Groland nous a été proposée :
La présipauté se trouverait donc à la frontière tchéco-slovaque. En décembre dernier, dans un autre numéro, c'était à la limite de l'Allemagne et de la République tchèque qu'elle avait été placée.
La suite de l'émission contient quelques perles, notamment ce faux documentaire animalier dont les personnages principaux (lions et buffles) portent des prénoms humains (en général) démodés. J'ai aussi bien aimé la parodie du clash entre les deux rappeurs Booba et La Fouine :
Une devinette pour terminer. Quel est l'écrivain contemporain (à succès) dont l'oeuvre est caricaturée avec tant de finesse ?
23:28 Publié dans Télévision | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, médias, humour
mardi, 26 mars 2013
La Morinade aime le Roquefort
L'émission humoristique du Mouv', désormais diffusée entre 13h et 14h, toujours du lundi au jeudi, semble apprécier les produits du terroir aveyronnais. Ainsi, il y a environ six mois, le père Albert avait fait mention de l'aligot, dans sa chronique hautement spirituelle.
Tout récemment, c'est le sud du département qui a été à l'honneur. Dans l'émission d'hier, l'un des jingles utilisés pour introduire la séquence de "grande musique" (sélectionnée par Daniel Morin en personne) mentionnait "le roi des fromages" (certes associé à un collègue nordique à forte "personnalité") :
Aujourd'hui mardi, c'est dans le journal de l'émission qu'il a été question du même produit emblématique. Le reportage portait sur le projet de la mairie de Paris d'utiliser des moutons pour tondre les pelouses municipales. L'entreprenante équipe de La Morinade est parvenue à dénicher un témoignage original, traduit par l'inénarrable Jean-Kévin :
21:38 Publié dans Aveyron, mon amour, Loisirs, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, france, actualité
Week-end royal
Dans la seconde moitié des années 1930, le président des Etats-Unis Franklin Roosevelt s'entiche d'une lointaine cousine (Daisy). Une maison de campagne est le théâtre de leurs rencontres... et un pique-nique très spécial y est organisé, peu avant la guerre, en l'honneur du roi d'Angleterre (George VI... oui, celui du Discours d'un roi).
Le scénario fait donc se percuter ces deux trames historiques. Pépé Roosevelt, bien qu'handicapé moteur, avait gardé l'entier usage de son appendice pénien... et cherchait ailleurs que dans les bras de son épouse Eleanor les occasions de le mettre en action. Dans le rôle du président coquin, (faussement ?) passionné de timbres, Bill Murray excelle. Il s'est parfaitement coulé dans le personnage et fait oublier ses précédentes incarnations. Face à lui, Laura Linney (une habituée des seconds rôles) se débrouille très bien, tout comme les autres membres de l'entourage présidentiel, notamment Olivia Williams, brillante en épouse indépendante et lucide. La meilleure scène de la première partie est sans doute la "conclusion" de la romance entre le vieil homme et la cousine coincée (et fauchée... un aspect qui a peut-être pesé plus qu'il n'est dit), en voiture, dans un pré, devant un paysage magnifique... et à la force du poignet !
Le film décolle avec l'arrivée du couple royal. Le réalisateur sait jouer sur le contraste entre l'aristocratie très attachée aux apparences et l'élite décontractée d'outre-Atlantique. Samuel West et Olivia Colman sont épatants, le premier réussissant (presque) à faire oublier Colin Firth. Une scène magnifique voit le roi et le président partager quelques verres dans un bureau, le soir, après le dîner. Chacun est conscient de ses faiblesses et, la franchise aidant, un courant de sympathie passe entre les deux hommes. Marquant est le moment qui voit Bill Murray passer d'un canapé à un fauteuil par la seule force de ses bras, en s'appuyant sur une série de meubles, sans doute pas disposés au hasard dans la pièce. Durant ce moment magique, la qualité de la mise en scène s'ajoute à la beauté de la photographie, au talent des interprètes et aux dialogues piquants.
Bref, cette heure et demi passe en douceur, sans déplaisir. On peut juste regretter la trop grande présence de la voix-off (celle de Daisy) dans le dernier tiers du film.
20:54 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
dimanche, 24 mars 2013
Mystery
C'est le nouveau film de Lou Ye, cinéaste né à Shanghaï, remarqué il y a quelques années pour Une Jeunesse chinoise. En à peine plus d'1h30, ce long-métrage réussit à entremêler les thématiques : drame bourgeois, portrait social, polar urbain.
La séquence initiale est indicatrice de ce que va être la suite. On commence avec une musique douce, des personnages jeunes et riches, dans des voitures luxueuses. L'action se situe sur l'une des autoroutes urbaines qui enserre la ville de Wuhan (située sur le fleuve Yangzi) :
Survient un événement qui va bouleverser la vie des personnages... et révéler leur véritable tempérament. Mais c'est d'autres personnes dont il va être principalement question durant le reste du film. Petit à petit, le réalisateur dévide sa pelote, nous montrant les tenants et les aboutissants de cette séquence initiale.
On passe aux véritables personnages principaux. Ils incarnent la bourgeoisie chinoise en pleine expansion. Ils sont riches, ont un bel appartement et une ravissante petite fille (politique de l'enfant unique oblige... ce n'est pas sans importance). Attention toutefois : ce tableau idyllique est trompeur. La suite du film va nous montrer ces personnages sous un autre jour, soit qu'ils cachent leur jeu, soit qu'ils évoluent. Mention spéciale pour Hao Lei (déjà vue dans Une Jeunesse chinoise), que l'on pourrait comparer à Kate Winslet : elle peut tout jouer.
Le drame bourgeois tourne autour de l'infidélité et de la double vie. Le réalisateur donne la part belle aux actrices, (principalement les deux jeunes femmes, mais aussi l'étudiante, sa mère et celle du héros). Je le trouve néanmoins trop indulgent pour l'un de ses personnages masculins, qui est un bel enfoiré.
Le portrait social est soigné. La grande bourgeoisie est présente à travers les fils à papa et l'une des épouses. A l'écran, un spectateur attentif notera la présence des marques étrangères : le téléphone portable de l'une des femmes (qui joue un rôle non négligeable dans l'intrigue) est de marque japonaise (Sharp), les voitures sont souvent américaines (Ford) et les vêtements chics viennent de Corée du Sud. La musique même est européenne (on entend L'Hymne à la joie, de Beethoven)... et on la voit jouée une fois sur un piano de marque Strauss. On remarque la différence de classes au niveau des loisirs : les rejetons de la bourgeoisie fréquentent les jardins d'enfants, ont des cours de musique et de danse. Les pauvres jouent au football sur un terrain vague.
Plus bas dans l'échelle sociale se trouvent la seconde jeune femme, qui ne possède pas de voiture (ni sans doute de permis de conduire), ainsi que la mère de l'étudiante. On rencontre aussi un garagiste et un policier qui, lui, bénéficie d'un bel appartement, dans un immeuble donnant sur le fleuve. Mais sa paie ne lui permet visiblement pas de faire des folies. Il s'en sort toutefois bien mieux que le sans-abri, qui survit dans les bois en récupérant des déchets urbains. Cependant, il est flagrant que, dans le film, l'argent ne semble pas faire le bonheur... ou plutôt il ne suffit pas.
Le titre indique que l'intrigue est aussi celle d'un polar. Au départ, on ne comprend pas tout ce qui s'est passé autour de l'événement auquel sont confronté les gosses de riches en voiture. Le mystère prend donc deux formes. D'un côté, les spectateurs cherchent à comprendre qui a fait quoi... et surtout qui sait quoi (les personnages ont furieusement tendance à se mentir ou à dissimuler). De son côté, le policier (et son copain le garagiste) cherchent d'abord à établir les responsabilités dans un accident, avant de s'intéresser à ce qui ressemble à une tentative de meurtre.
Certains spectateurs un peu mous du bulbe ont été désorientés par ce foisonnement scénaristique. Le film réclame certes de l'attention, mais il est bigrement bien construit et interprété. Au niveau du style, on retrouve les marottes du réalisateur : la caméra à l'épaule pour suivre les personnages qui marchent, les prises de vue aériennes pour montrer la ville et l'usage du flou et du fondu quand il est question des sentiments. Cela se situe quelque part entre Claude Sautet et Michel Deville, avec une touche d'Assayas.
14:41 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
vendredi, 22 mars 2013
No
1988. La Guerre Froide touche à sa fin. Les États-Unis savent qu'ils ont gagné. Du coup, ils deviennent plus sensibles aux aspirations des populations dans les dictatures qu'ils soutiennent, quand ils n'ont pas contribué à les mettre en place. C'est le cas de la Corée du Sud, en voie de démocratisation. C'est le cas de plusieurs pays d'Amérique latine, à commencer par l'Argentine (dès 1983) et le Brésil (en 1985). Voilà donc le Chili d'Augusto Pinochet prié de présenter une image plus "convenable", en organisant un référendum.
Après Santiago 73, Pablo Larrain nous propose l'histoire de la campagne en faveur du "non" (au maintien de Pinochet au pouvoir), vue de l'intérieur... mais aussi du camp d'en face. Cela nous vaut d'ailleurs l'une des plus belles scènes du film, au début : les artisans de la campagne du "oui" (ministres, officiers, conseillers) sont réunis dans une pièce aux boiseries luxueuses. Le réalisateur nous donne à entendre leurs arguments (certains étaient de bonne foi). On perçoit aussi nettement leur anticommunisme primaire, qui tournait à la paranoïa. L'humour est pince-sans-rire (comme dans le reste du film). On sourit du décalage entre tel propos et la réalité ou entre l'écart qui existe entre les différentes manières de percevoir les événements.
Je pense aussi à une scène qui voit le patron du héros (favorable au "oui") discuter, avec un ministre, des partisans du "non". Les deux hommes marchent à proximité d'un bâtiment officiel et finissent dans un jardin. L'homme de pouvoir vieillissant ne comprend pas la symbolique de l'arc-en-ciel choisi par ses adversaires ("un truc de pédés" voire de "Mapuches pédés" ?). La discussion, très drôle au second degré, s'achève devant un canon décoratif, dans le fût duquel le ministre dépose ses pelures d'orange. (On peut y voir aussi le symbole de la décrépitude du pouvoir militaire.)
La mise en scène est habile. On peut cependant contester le choix d'une image "qualité d'époque", qui rappellera aux téléspectateurs un peu âgés certains épisodes de la série Starsky et Hutch. Par contre, la caméra n'est pas placée au hasard, et certains mouvements sont savamment calculés. Je pense notamment à une scène qui montre le héros en train de souper avec son fils. Tous deux sont assis devant le poste de télévision, à proximité duquel est placé, de manière symétrique, un four à micro-ondes. A certains moments, on se demande quel est l'écran qui passionne le plus le duo... d'autant plus que l'émission diffusée pendant le repas est tout à la gloire de Pinochet. De surcroît, quand on voit l'aspect de ce qui sort du four, on comprend que, pour le réalisateur, le contenu du discours n'est pas plus appétissant.
L'intrigue tourne autour du fait que la campagne du "non", au lieu de marteler à l'ancienne les thèmes de prédilection des opposants (principalement) de gauche, prend un tour ludique et commercial, sous l'impulsion du héros. Il a compris que, plus que sur le passé, le vote allait se jouer sur l'avenir. Il va donc mener une campagne sur le thème de la joie. La confrontation de ses idées aux présupposés des opposants est restituée avec une certaine subtilité (le héros n'a pas toujours raison... ouf !).
Partis de bouts de ficelles, les "nonistes" font preuve d'imagination. Ils vont avoir droit, pendant un mois, à 15 minutes quotidiennes qu'il faut remplir de manière convaincante. L'humour est de leur côté. Ils introduisent dans leur quart d'heure une séquence d'information, intitulée "no... ticias" (les news ou les nouvelles). Pour inciter les électeurs à voter non, ils détournent la forme des bulletins :
Cela se dit "no mas", c'est-à-dire "plus" : non pas "davantage de", mais "plus du tout de" ("Plus du tout de Pinochet" par exemple). En face, les partisans du dictateur (beaucoup plus nombreux que ce que l'on imagine en Europe) écrivent ici ou là des "PIN 8". Il ne s'agit pas du code d'un téléphone portable, pas plus que de la taille d'un pénis (au repos ou en érection). Cela se prononce "Pine-otcho"... naaan, pas Pinocchio ! Cela sonne comme Pinochet et cela fait référence aux huit ans de prolongation du pouvoir qu'il réclame ("ocho" signifie huit).
A intervalles réguliers, le film évoque les pressions dont les partisans du "non" ont fait l'objet. Quasi inexistantes au début, elles ont monté en puissance au fur et à mesure qu'a grandi l'agacement du régime, dont certains défenseurs ont fini par prendre au sérieux cette campagne de publicitaires.
Il faut dire quelques mots de l'interprète principal, que j'avais déjà vu dans Babel, La Science des rêves et surtout l'excellent Carnets de voyage (de Walter Salles). Gael Garcia Bernal incarne à la perfection ce "pubard" cool et doué, fils d'opposant de gauche à Pinochet, pas engagé au départ et qui, s'il voit sa vision de la campagne l'emporter, ne connaît pas le même succès dans sa vie privée.
Cependant, je regrette que le réalisateur prenne si peu de recul avec la communication politique moderne. Ici, elle n'est pratiquement présentée que sous un jour positif : c'est nouveau, dynamique, jeune, drôle. On ne dit pas assez que la forme l'emporte sur le fond. Seules quelques touches sont chargées de faire comprendre aux spectateurs un peu grincheux que le réalisateur n'est pas dupe. A deux reprises, le héros se comporte en véritable perroquet : quand il critique la campagne de son adversaire de la même manière que son ex (communiste) critiquait la sienne (au début)... et à la toute fin, qui montre qu'on peut recycler la rhétorique des "nonistes" dans la campagne de promotion d'une série télévisée. (Mais Les Inconnus l'ont démontré avec brio il y a bien longtemps déjà.)
17:36 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, histoire
samedi, 16 mars 2013
Gruiiiik !
C'est l'une des polémiques qui agitent l'Aveyron depuis la fin de l'année 2012 : l'extension programmée d'une porcherie située dans l'ouest du département, sur le territoire de la commune de Causse-et-Diège (en rouge sur la carte) :
En dépit d'une opposition importante, des risques encourus sur le plan environnemental (et touristique), la préfète de l'Aveyron vient d'autoriser ladite extension, suivant en cela le récent avis du CODERST (Conseil Départemental de l'Environnement et des Risques Technologiques) aveyronnais.
Cette affaire nous amène à nous interroger à plusieurs niveaux : sur le type d'élevage pratiqué, sur les rejets de nitrates, sur le rôle des pouvoirs publics et enfin sur le positionnement de l'entreprise Nutergia.
Commençons par le type d'élevage. Le GAEC de Cassan compte, avant l'extension, un peu moins de 1200 bêtes. (Il en passe beaucoup plus durant une année mais, en moyenne, c'est l'effectif que doit compter l'exploitation.) Le premier projet prévoyait de faire passer ce nombre à près de 3 000. Il devrait finalement se limiter à 1956 bêtes. Le nombre paraît important au profane. La revue professionnelle GraphAgri (dans son édition 2012) va nous permettre de resituer cette exploitation dans le contexte français :
L'exploitation porcine se situe dans le "haut du panier" : les 21 % comptant le plus de têtes, cumulant 79 % du cheptel porcin français. Et encore... si le projet initial avait abouti, elle aurait rejoint le club des "2 000 et plus", 9 % des exploitations qui regroupent à elles seules... la moitié du cheptel porcin national. Je pense d'ailleurs que c'est dans cette catégorie qu'il faudra malgré tout classer l'exploitation aveyronnaise agrandie : ponctuellement, il est certain que les 1956 têtes vont devenir 2 000 voire 2 100. Qui va venir perdre des heures à compter l'ensemble ? Ce projet n'est donc pas l'illustration de la défense de la petite ou moyenne agriculture familiale. Il constitue un renforcement des structures dominantes.
Passons à présent aux rejets de nitrates. C'est la grande crainte des riverains, pour leur santé... et pour la préservation d'un important site touristique local : la grotte de Foissac. (La commune est coloriée en vert sur la première carte.) Ceci dit, à l'heure actuelle, la qualité des eaux aveyronnaises ferait bien des envieux du côté de la Bretagne (où l'élevage porcin industriel est particulièrement développé) :
L'écrasante majorité du territoire connaît des taux de nitrates inférieurs à 50 mg/l. On peut considérer toutefois que, dans les zones où ce taux est compris entre 25 et 40 mg, localement, des situations problématiques peuvent se poser. (Rappelons que, pour les nourrissons, il est recommandé d'utiliser une eau contenant moins de 10 mg/l.) C'est le cas de la zone que j'ai entourée en marron, accompagnée d'un point d'interrogation. Il s'agit de la commune de Salles-Courbatiès, qui voisine Causse-et-Diège (mise en évidence par des pointillés rouges). La pollution aux nitrates (ponctuelle) dont cette commune semble être victime ne doit pas toucher ses voisines situées au nord-ouest : elle est sans doute (en partie) emportée par les cours d'eau qui se dirigent au nord, vers le Lot.
Mais la grotte de Foissac (située ci-dessous dans la zone cerclée de vert) pourrait être menacée par les épandages supplémentaires de lisier, prévus sur des centaines d'hectares autour du GAEC de Causse-et-Diège, situé au lieu-dit Cassanus :
Il faut dire que, si l'élevage une fois étendu est censé n'héberger qu'environ 2 000 bêtes, c'est un total de 8 000 qu'il est prévu de faire défiler sur l'exploitation en une année ! Pluies, crues et infiltrations contribuent à mêler le nitrate aux eaux souterraines, qui s'en retrouvent acidifées. A la suite du gestionnaire de la grotte, Sébastien du Fayet de La Tour, la revue Sciences et Avenir et le site hominidés.com (parmi d'autres) ont émis de vives inquiétudes quant au devenir des peintures rupestres (récemment découvertes) et des squelettes vieux de milliers d'années. Le nouveau plan d'épandage (plus restreint) et l'augmentation du nombre de têtes moins importante que prévu suffiront-ils à préserver le site ? A suivre...
Dans cette affaire, quel a été le rôle des pouvoirs publics ? Il est difficile de le dire avec exactitude. Le Conseil général a été d'une discrétion de violette. Traditionnellement, la majorité départementale est très proche de la direction de la FDSEA. Mais il semble que, sur ce sujet, le bloc se soit fissuré. On a même pu lire, dans Centre Presse (mercredi 13 mars), une tribune de Jean Milesi hostile au projet d'agrandissement : "Pourquoi j'ai voté contre le projet d'extension de la porcherie de Causse et Diège".
Il est possible qu'une action discrète ait été engagée, pour inciter l'exploitant à "réduire la voilure", pour faire passer son projet.
De son côté, la préfecture a été attentiste puis suiviste. Il faut dire que la préfète ne connaît pas grand chose à ce type de dossier. Chartiste de formation, ambassadrice avant d'arriver dans l'Aveyron, elle doit sans doute s'en remettre aux fonctionnaires spécialisés... voire aux bons conseils de politiques qu'elle croise fréquemment. Au vu de la composition du CODERST, représentants de la Préfecture et de la majorité départementale peuvent facilement verrouiller un dossier. La nouvelle de l'approbation du projet d'extension n'était donc pas une surprise... sauf peut-être pour le rédacteur en chef du Villefranchois (Michel Heuillet), qui, dans l'édition du 28 février, s'était un peu trop avancé :
Il nous reste à aborder le rôle de l'entreprise Nutergia, dont le laboratoire se trouve à Capdenac-Gare (coloriée en bleu sur la première carte du billet). Le directeur, Antoine Lagarde, prévoyait de s'implanter sur la commune voisine... Causse-et-Diège. A terme, il déclarait envisager la création d'une trentaine d'emplois dans le département. Le projet d'extension de la porcherie avait tout pour lui déplaire, puisque son laboratoire communique sur son respect de l'environnement :
Furieux, il a même menacé un temps de délocaliser son activité... avant d'adopter une tactique plus offensive : il a proposé d'aider l'éleveur porcin à convertir son exploitation à l'agriculture biologique ! Ces coups de théâtre appellent plusieurs remarques. Tout d'abord, il est sidérant que les protestations d'un entrepreneur dynamique, créateur d'emplois, n'aient visiblement pas été considérées par les autorités locales. C'est dire aussi la puissance du lobby qui soutenait l'extension de la porcherie industrielle. Quant au projet de conversion au bio, je ne sais pas s'il tenait vraiment la route. Et puis, pouvait-on ainsi forcer la main à une famille d'exploitants ?
Cette histoire ne me semble pas terminée pour autant. La décision de la préfecture est peut-être attaquable devant un tribunal administratif. Les opposants au projet d'extension auront-ils les moyens juridiques et financiers de continuer leur action ?
22:50 Publié dans Economie, Politique aveyronnaise | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : société, actualité, presse, économie
Pierre Soulages fait la fine bouche
C'est dans un article qui m'avait échappé et dont Le Nouvel Hebdo du 15 mars a eu la bonne idée de signaler l'existence. Le 8 mars dernier, sur le site du Figaro a été mis en ligne un entretien avec le peintre d'origine aveyronnaise.
Il y est notamment question du (futur) musée ruthénois. L'artiste rappelle sa relation privilégiée avec l'ancien maire de Montpellier, Georges Frêche... et son refus d'un bâtiment qui lui soit entièrement consacré. Entre les lignes, on peut comprendre que c'est à l'activisme forcené d'un autre ancien maire, celui de Rodez (Marc Censi) que l'on doit l'implantation ruthénoise des gigantesques boîtes à chaussures.
Tout aussi intéressants sont les passages qui évoquent les convictions philosophiques du peintre, ainsi que la manière de concevoir la scénographie d'un musée. On sent bien que l'artiste a une haute opinion lui et de son oeuvre. Il n'en est pas moins conscient du risque que la fréquentation de l'établissement qui va porter son nom chute rapidement : "Un musée d'artiste dure trois ans. La première année, tout le monde y va. La deuxième aussi. Puis plus personne. Je n'ai pas envie de vivre ça." De surcroît, en lisant les commentaires des internautes, on réalise que les lecteurs ne sont pas aussi enthousiastes que nos élites...
C'est marrant parce que, quelques mois plus tôt, un article paru dans Le Nouvel Observateur (issu d'une dépêche AFP, comme celui paru dans Le Point) offrait une vision plus optimiste du projet. En dépit du rappel de l'opposition du peintre à l'idée d'un "mausolée" artistique, la tonalité était essentiellement positive. En lisant le "papier", on apprend toutefois que Pierre Soulages n'envisageait pas, à cette date, de troisième donation d'oeuvres au musée :
10:55 Publié dans On se Soulages ! | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, médias, art, culture, peinture, presse
vendredi, 15 mars 2013
Le Grand Retournement
Ce court film (1h17) est conçu de manière originale. Les personnages (banquiers, politiques, conseillers), qui parlent de la crise financière, de ses tenants et aboutissants, s'expriment en alexandrins, habillés en costumes-cravates pour la plupart.
Parmi les acteurs, on trouve quelques têtes d'affiche, comme Jacques Weber (le plus constant au niveau de la qualité de la diction), François Morel (très inégal, avec quelques éclairs de génie) et Edouard Baer (inconsistant). D'autres trognes sont connues, davantage que les noms : Franck de La Personne et Thibault de Montalembert notamment. D'autres sont de parfaits inconnus pour moi. Parmi ceux-ci, j'ai remarqué Patrick Mille.
Je vais sans doute hérisser le poil des militants altermondialistes qui lisent ce billet, mais je me suis globalement fait chier durant ce film. Dans la première partie, j'ai même piqué du nez ! Et il n'est pas possible de faire porter la responsabilité de ce ratage aux comédiens, certains étant très bons. Il n'en reste pas moins vrai que la qualité du jeu est très inégale... et que cela se sent.
L'autre problème est l'écriture des dialogues. Il ne suffit pas de construire une phrase de 6, 12 ou 24 pieds et de faire rimer deux d'entre elles pour prétendre avoir versifié. C'est trop souvent boursouflé, maladroit. Au lieu de les aider, les phrases ont considérablement compliqué la tâche des acteurs. Un auteur de talent (genre Racine ou Corneille - non, pas le chanteur) est capable de produire un texte (aussi subtil soit-il) sur lequel un bon acteur doit pouvoir s'appuyer.
Au niveau de la mise en scène, au départ, j'ai trouvé intéressant le contexte de l'usine abandonnée. Cela avait du sens. Mais l'utilisation de cet espace devient vite maladroite, le comble étant atteint lorsque l'un des conseillers du président, devenu trop critique, se fait virer.
Parlons enfin du fond. Le film se veut pédagogique. On commence par les causes de la crise financière, référence à l'affaire Kerviel à l'appui. On continue avec le renflouage des banques et la bêtise des politiques. Plus que les banquiers, la cible est ici l'exécutif français en place en 2009-2010, à savoir le président Sarkozy (un peu trop sobrement campé par Elie Triffault) et le premier ministre Fillon (Montalembert, très bon). Le tour des banquiers vient juste après, quand il est question de l'introduction de nouvelles normes et du rôle de la BCE.
Le problème est que tout cela m'a semblé très manichéen. Ce n'est de plus pas destiné à un public profane, parce que, aussi simpliste soit la description des mécanismes de la crise, le fait qu'elle soit véhiculée par un langage ampoulé n'aide en rien à sa compréhension. Bref, le propos est destiné à un public plutôt cultivé, et/ou déjà convaincu.
Quelles solutions propose l'auteur ? Rien de moins que la Révolution. En gros, les seuls vrais contestataires sont ceux qui manifestent cagoulés, qui cassent des vitrines et renvoient les bombes lacrymos à la police. Cette fin est malheureusement symbolique de l'ensemble du film, qui manque singulièrement de finesse.
PS
Sur la crise financière, Inside Job est plus fouillé. Cleveland contre Wall Street montre ce que peut être un vrai film de cinéma sur des questions politiques, financières et sociales. Tout aussi réussi est Margin Call, qui place le spectateur au coeur du processus. Moralité ? Louez un bon DVD.
22:33 Publié dans Cinéma, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, politique
samedi, 09 mars 2013
Zaytoun
La critique a en général été plutôt sévère avec ce film israélien, dont le réalisateur Eran Riklis a été salué naguère pour La Fiancée syrienne et Les Citronniers. Le genre du film (une fable politique) a pu dérouter. Il est question d'un olivier (zaytoun en arabe) qu'un jeune Palestinien du Liban voudrait planter dans la propriété familiale... en Israël. Dans quelle mesure le pilote israélien récemment fait prisonnier va-t-il lui être utile ?
La première partie du film tente de restituer l'ambiance dans le Liban du début des années 1980, au moment de l'intervention israélienne. Il y est bien entendu question des réfugiés palestiniens (et du camp de Chatila), dont les enfants sont embrigadés très jeunes dans des organisations para-militaires supposées patriotiques. On nous fait aussi comprendre que les Libanais "de souche" n'apprécient guère cette population turbulente, maintenue à l'écart des autres habitants.
Comme dans d'autres films ayant pour sujet les déshérités du monde musulman (Les Chevaux de Dieu, par exemple), un coup de projecteur est mis sur de jeunes garçons fans de football. Le héros Fahed est d'ailleurs surnommé Zico (aujourd'hui, son modèle serait peut-être Lionel Messi) et il ne se sépare pratiquement jamais d'un ballon en cuir. Si les scènes avec les gamins sont très convenues, il faut signaler la performance du jeune Abdallah El Akal (entraperçu, comme un autre acteur du film, dans Lebanon), qui incarne à merveille ce gamin palestinien révolté, un peu dépassé par les événements, mais qui tient à aller au bout de son projet.
Le réalisateur a l'honnêteté de montrer toute la difficulté de la vie quotidienne des civils palestiniens, ainsi que les drames auxquels ils sont confrontés. C'est pourquoi il faut un peu de bonne volonté pour croire à l'argument principal : l'alliance de circonstance entre l'orphelin de guerre et l'aviateur. Si l'on adhère à cet élément de l'histoire, on suivra avec plaisir le périple de cet improbable duo, qui va devoir louvoyer pour éviter divers groupes armés (palestiniens, libanais et même syriens). C'est souvent drôle, parfois émouvant.
La fin est moins réussie. J'ai trouvé assez mauvaises les scènes qui font intervenir Alice Taglioni (qui porte l'uniforme de l'ONU). La séquence du village palestinien détruit ne m'a convaincu qu'à moitié. On sent aussi que le réalisateur a voulu montrer que les deux camps ont souffert des guerres. Je ne dirai rien sur le choix final qui est fait par l'un des personnages principaux. Ceux qui connaissent la suite de l'Histoire savent qu'ils est lourd de conséquences.
16:05 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
mercredi, 06 mars 2013
Công Binh
Ce documentaire (un brin fictionné) est sous-titré "La longue nuit indochinoise". Il n'est toutefois question que du Vietnam (composé du Tonkin, de l'Annam et de la Cochinchine), pas du Laos ni du Cambodge. Ceux qu'on a appelés les Công Binh ("ouvriers-soldats", en vietnamien) ont été envoyés en France métropolitaine au début de la Seconde guerre mondiale. Il y sont restés bloqués au moins jusqu'en 1946. Certains ne sont même jamais retournés dans leur patrie.
Cinq types d'images composent ce film. Classiquement, on y trouve des documents d'archives (datant de la fin des années 1930 au Vietnam indépendant) et des entretiens avec certains des anciens travailleurs envoyés en France (âgés de 89 à 103 ans, si je ne m'abuse). On y entend (et voit) aussi une petite-fille de travailleur déporté lire des extraits de textes anticoloniaux, au premier rang desquels Les Damnés de la Terre (de Franz Fanon) et Discours sur le colonialisme (d'Aimé Césaire). A cela s'ajoutent des scènes de fiction, restituant des situations du passé, et jouées par des (petits-)enfants des travailleurs déportés. Enfin, régulièrement, vient s'intercaler un extrait de spectacle de marionnettes aquatiques, en liaison avec le sujet.
Le plan est chronologique. Le film revient d'abord sur les conditions du recrutement, forcé dans la majorité des cas. On est ensuite effaré par les conditions de vie qui furent celles de ces jeunes hommes. A peine débarqués en métropole, ils sont parqués dans la prison des Baumettes, tout juste construite... mais dont l'intérieur n'a pas été encore aménagé. Ils ont ensuite été envoyés dans différentes usines (des poudreries, entre autres), notamment à Bourges et Clermont-Ferrand. Ils ont été logés dans des camps spéciaux, dans des conditions là encore précaires.
Parmi les multiples anecdotes que contient le film, il y a l'histoire du développement de la culture du riz en Camargue, dû à l'initiative de certains travailleurs d'origine rurale, qui ont vu là l'occasion d'améliorer leur ordinaire... à condition toutefois de faire tout le boulot.
Un des plus beaux passages raconte le processus d'alphabétisation des travailleurs, arrivés en métropole pour la plupart illettrés.
Après guerre, l'enjeu devient politique. De 1946 à 1954 s'est déroulée la guerre du Vietnam. Ces 20 000 jeunes hommes sont une masse à ne pas négliger. Au départ, le gouvernement français n'a pas envie de renvoyer au pays ces bras vigoureux qui pourraient renforcer la rébellion vietminh. A cet égard, le film montre que la petite troupe était divisée. Il n'évoque toutefois que trois groupes : la minorité favorable au colonisateur et les rebelles, communistes ou trotskystes, eux-mêmes rivaux. L'expression "gouvernement fantoche" fait allusion à l'empereur Bao Daï. Est négligée une partie du mouvement nationaliste, celle qui n'était pas d'obédience marxiste et qu'on a parfois qualifiée de "troisième voie".
La fin du documentaire est consacrée à la vie dans le Vietnam indépendant (ou la France, pour ceux qui s'y sont définitivement installés) et la quête de reconnaissance.
Sur le plan formel, c'est correctement filmé et le montage varie suffisamment les types d'images pour qu'on ne s'ennuie pas (trop). Mais le rythme est lent et certaines scènes m'ont paru inutiles. (Concernant le théâtre de marionnettes, si les premiers "interludes" m'ont intéressé, l'accumulaton a fini par me lasser.) On sent bien les deux heures passer !
23:46 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, histoire
mardi, 05 mars 2013
Les Chevaux de Dieu
Ce film de fiction ambitionne de mettre en scène les éléments qui expliquent que de jeunes Marocains, pour la plupart inconnus des services de police, aient participé aux attentats de Casablanca du 16 mai 2003.
L'histoire s'attache au destin d'une demi-douzaine de garçons du bidonville de Sidi Moumen (8 des 14 kamikazes en sont issus), dont une partie seulement va verser dans le terrorisme. Le début du film, maladroit, m'a fait un peu peur. Les images des gamins fans de football, prêts à en venir aux mains... ou à détaler dare-dare, sont proches du cliché. Mais le réalisateur fait preuve d'une incontestable maîtrise derrière la caméra, avec de très beaux plans du bidonville à la clé.
Petit à petit, la psychologie des personnages est creusée, les situations deviennent plus complexes... et le film passionnant. Il faut souligner l'interprétation remarquable des acteurs principaux, qui incarnent les garçons devenus de jeunes adultes.
Abdelilah Rachid est celui dont la palette de jeu est la plus variée. Seul véritable délinquant de la bande au début de l'histoire, son personnage (Hamid) est le premier du groupe à se convertir à l'islam radical, sans doute en prison. (Voilà qui rappellera des choses à nos amis toulousains.)
Comme à d'autres "jeunes en recherche", la religion donne un cadre, pas forcément négatif au départ. Mais ses "maîtres" ont un projet politique en tête. J'ajoute que, dans la troisième partie du film, ce personne recommence à évoluer, dans un sens que je ne révèlerai pas ici. Sachez que l'acteur rend vraisemblables les trois facettes.
L'autre personnage "solaire" est son petit frère, interprété par Abdelhakim Rachid.
Dans le quartier, Tarek est surnommé Yachine, en raison de son poste de gardien de but, au football, où il n'est d'ailleurs pas maladroit. Il idolâtre le Soviétique, seul de sa catégorie à avoir décroché le ballon d'or. Là encore, l'évolution du jeune homme (moins abrupte que pour son frère) est restituée par l'acteur avec subtilité.
Le "troisième homme" de l'histoire est Nabil, le meilleur ami de Tarek-Yachine. Il ne semble pas connaître son père et sa mère a très mauvaise réputation dans le quartier. On finit par comprendre qu'elle monnaye ses "services". Le fils subit la réprobation attachée à sa mère (qui est protégée par le chef de la police)... et son côté efféminé, ainsi que l'amitié extraordinairement forte qui le lie à Tarek, lui valent moqueries et avanies.
Dans le groupe évoluent aussi notamment Fouad, grand-frère (très) protecteur de Ghislaine (dont Tarek est amoureux) et un drôle de lascar, qui ne pense qu'à s'amuser (et qui va résister à l'influence des "Frères").
Ces jeunes ne sont pas bien encadrés par les adultes du bidonville. Le père des deux héros semble frappé d'Alzheimer (et le frère aîné est un peu dérangé... mais pas bête sur le fond). La mère est dépassée par les événements et ne voit pas ce que la nouvelle orientation religieuse de ses gamins peut avoir de menaçant. Les autres parents sont plutôt absents.
Ils laissent donc la place aux propagandistes islamistes, qui en imposent par leur constance, leur charisme... voire leur maîtrise des arts martiaux. (On n'attrape les mouches avec du vinaigre !) On sent aussi que le chef du groupuscule est fin psychologue : il comprend vite quel est le profil de chaque gamin et comment il peut les utiliser.
Mais le réalisateur n'oublie pas la vie quotidienne du bidonville, dans ce qu'elle a de plus sordide. Les gamins sont d'abord des victimes des caïds locaux et de la police, à moitié corrompue et pas franchement respectueuse des droits de l'homme. (Le chef local est surnommé "Pitbull", c'est dire.) Entre eux, enfants comme adolescents sont parfois sans pitié. (Cela va de la bagarre au viol... et le meurtre n'est pas loin.) Hors cadre familial, la solidarité est l'exception. Chacun essaie de se sortir de la misère (qui n'est pas totale, dans ce bidonville un peu aménagé), au besoin en passant sur les autres.
On pourrait regretter que le film ne dénonce pas suffisamment l'influence pernicieuse d'une conception extrémiste de la religion. On aurait aussi pu souhaiter que soit posée la question de la démocratie au Maroc... mais cela aurait peut-être empêché le film de se faire. Il a le grand mérite d'exister et il témoigne d'une certaine habileté.
P.S.
Les cinéphiles français auront l'impression de se retrouver devant une version cousine, d'outre-Méditerranée, de l'excellent long-métrage de Philippe Faucon La Désintégration. On peut aussi être frappé par la ressemblance avec le film palestinien Paradise now.
14:48 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
samedi, 02 mars 2013
7 Psychopathes
Si vous aimez les histoires faciles à comprendre, qui vous prennent par la main d'un début clairement identifiable à une fin sans ambiguïté, si vous tenez à des personnages d'une seule trempe, qui évoluent peu... alors évitez ce film.
Martin McDonagh, à qui l'on doit l'excellent Bons Baisers de Bruges, récidive avec un thriller parodique qui louche sur Pulp Fiction (de Tarantino) et Barton Fink (des frères Coen). La construction prend une forme proche du puzzle. Mais commençons par les personnages principaux.
On suit l'action à travers les pérégrinations d'un improbable trio. Le héros (Marty) est un scénariste en panne d'inspiration (alcoolique de surcroît), interpété par Colin Farrell, qui a un peu tendance à jouer toujours sur le même registre :
Si j'étais mauvaise langue, j'écrirais que ses "qualités physiques" sont pour beaucoup dans sa présence à l'écran.
Le véritable héros de l'histoire est son meilleur ami, Billy, un beauf rigolo, parfois complètement givré, incarné avec talent par Sam Rockwell (que l'on a pu voir dans Iron Man 2 et L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford) :
Pour compléter le trio, on a une pointure, Christopher Walken, très classe en vieil époux attentionné... et plein de mystère :
A cause de l'enlèvement d'un chien (le gagne-pain des deux derniers membres du trio), la fine équipe va se retrouver confrontée à un chef de gang ultraviolent, hystérique et immature, incarné à merveille par Woody Harrelson (remarqué dans A Scanner darkly et No Country for old men) :
Une fois de plus, hélas, les femmes sont au second plan, que ce soit la copine blonde du héros, ou la petite amie brune du mafieux (Olga Kurylenko, toujours aussi charmante). Ne parlons pas de l'employée noire obèse. Seule l'épouse de Christopher Walken dispose d'une part de jeu intéressante.
Les autres personnages sont des rencontres virtuelles ou réelles du scénariste, qui essaie de constituer son "équipe" de sept psychopathes, support du scénario qu'il tente d'écrire. (Mention spéciale pour Tom Waits, le tueur de tueurs en série... qui affirme avoir liquidé le Zodiac !) Il faut donc prendre soin de distinguer les scènes d'imagination pure des scènes se déroulant dans la vie réelle. Au début, cela va. Mais on finit par se rendre compte que ce qui a été raconté auparavant a des répercussions dans la vraie vie des personnages. Les deux mondes se croisent... et le film devient plus compliqué, un peu dingo... J'ai aimé !
Les amateurs de film d'action auront leur lot de meurtres. Les dialogues sont de surcroît fort bien écrits. C'est très souvent drôle, parfois de manière complètement inattendue. J'ai ainsi en mémoire une discussion entre Marty et Billy. Le premier voudrait écrire un thriller, dans lequel domineraient les discussions. Le second lui répond que cela risque d'être hyper-chiant... il n'est tout de même pas en train de faire un film français ! Plus loin dans l'histoire, dans le désert, Christopher Walken parle d'une vision qu'il a eue, dans une ambiance grise. Son interlocuteur lui demande : "Gris ? Comme en Angleterre ? " L'autre lui répond : "Pire."
La fin du film coïncide avec la conception de la fin du scénario. Billy nous offre sa vision d'un finale grandiose, avec beaucoup de détonations et d'hémoglobine. Marty n'est évidemment pas du tout de cet avis. Tout se joue autour du comportement des mafieux, décidément bien imprévisibles. Je vous laisse découvrir dans quelle direction leur intervention conduit le film...
01:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film