mercredi, 29 mai 2013
F. Hollande et les mouches ruthénoises
La visite (très médiatisée localement) du président de la République à Rodez a donné lieu à une compétition acharnée entre les politiques locaux... pour apparaître sur les photographies aux côtés de François Hollande. Celui-ci devrait s'en réjouir car c'est le signe que, à gauche au moins, il n'est pas démonétisé.
Le quotidien aveyronnais Centre Presse a très vite mis en ligne deux diaporamas consacrés aux deux visites principales du président. Le plus intéressant des deux est sans conteste celui qui est composé des photographies prises sur le chantier du musée Soulages.
J'ai compté que sur les quinze photographies apparaissent au moins une fois 11 figures politiques locales... et celui dont la bobine est la plus présente n'est pas celui que l'on croit : il s'agit de Ludovic Mouly, le président de la Communauté d'agglomération du Grand Rodez, visible (totalement ou partiellement) sur 12 des 15 photographies ! Ce pro de la com' (récemment passé chez le coiffeur) remporte haut la main la compétition. Notons que sa présence s'explique car le musée Soulages est un projet communautaire et que, plus tôt dans la journée, le président ne se trouvait pas dans le chef-lieu, mais à Onet-le-Château, autre commune du Grand Rodez. Une question subsiste néanmoins : est-il un grand pote (ou un cousin éloigné) du photographe de Centre Presse ?
Sur le podium des politiques, la médaille d'argent est décernée à la ministre et conseillère générale Anne-Marie Escoffier, visible huit fois, malgré sa petite taille... et très souvent juste à côté de François Hollande. Quel métier ! Son expérience est perceptible dans le choix de ses habits. La veste qu'elle porte, d'un bleu très particulier, se remarque dans n'importe quel coin de photo !
A côté de ces deux renards, les autres font figure d'amateurs. Ancienneté et prestige oblige, on voit tout de même cinq fois le président du Conseil régional Martin Malvy. Juste après lui se trouve le maire de Rodez (et tout récent vice-président du même Conseil) Christian Teyssèdre, qui semble un peu faire la gueule. Se serait-il aventuré à demander une rallonge pour le musée Soulages et l'aurait-on éconduit ? Mystère.
En cinquième position, ô surprise, ce n'est pas un local de l'étape que l'on rencontre, mais le maire de Millau, Guy Durand, dont le teint étrangement hâlé contraste fortement avec la pâleur de l'assistance. Ce n'est pourtant pas dans les rues de la cité du gant qu'il a pu attraper de coup de soleil ces dernières semaines !
Avec trois apparitions, il est ex-aequo avec le maire d'Onet-le-Château (et 2e vice-président du Grand Rodez), Fabrice Geniez, stratégiquement placé à côté de la maquette du site du Foirail, une position que l'on imagine conquise de haute lutte.
Ce duo devance d'une courte tête un quatuor hétéroclite. On entraperçoit Jean-Louis Chauzy, le président du conseil économique, social et environnement régional (un conseiller municipal d'opposition en très bons termes avec le maire de Rodez). Le Sud Aveyron est à nouveau présent à travers le sénateur-maire de Saint-Affrique, Alain Fauconnier, accessoirement grand connaisseur des arcanes du PS midi-pyrénéen. Dans ce groupe, la parité est respectée, avec la députée de Villefranche-de-Rouergue (et conseillère régionale) Marie-Lou Marcel et la maire de Sébazac-Concourès (3e vice-présidente du Grand Rodez) Florence Cayla. Toutes deux ont fourni des efforts méritoires pour ne pas laisser aux mâles le monopole de la représentation politique :
Sur cette photographie, elles ne sont pas les seules à tendre le cou. Entre F Cayla et A-M Escoffier, on distingue nettement Jean-Philippe Sadoul, le maire (divers droite) de Luc-Primaube et premier vice-président de la Communauté d'agglomération. Sans sa présence, l'hégémonie radicale-socialiste aurait été totale !
Pour croiser les représentants locaux de l'opposition, il fallait se rendre, plus tôt, à l'usine Bosch. L'une des photographies du premier diaporama nous permet de repérer Jean-Claude Luche (le président du Conseil général) et Yves Censi (député UMP de Rodez).
Ils ont l'air un peu perdus dans cette ambiance ouvrièro-socialiste. Seraient-ils entrés par effraction ?
Incidemment, lorsque j'ai visionné le diaporama en grand format, dans le coin en haut à droite, une mention est apparue. D'habitude, c'est tout ce qu'il y a de plus innocent, mais, vu le contexte, j'ai trouvé cela cocasse.
Mais... mais, voilà que je me rends compte que j'ai oublié quelqu'un. Et pour cause : on le distingue à peine, une fois, sur l'une des photographies du diaporama "muséal" :
Vous ne voyez pas de qui il s'agit ? Bon, allez, je vous aide : un grand gaillard, sportif, dont la coupe de cheveux est (secrètement) jalousée par le Dalaï-lama... Oui, c'est le sénateur Stéphane Mazars !
21:36 Publié dans On se Soulages !, Politique, Politique aveyronnaise | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, actualité, ps, parti socialiste, hollande, france
samedi, 25 mai 2013
Bienvenue chez les Frères !
Ce vendredi soir, au théâtre La Baleine d'Onet-le-Château, s'est tenue une conférence-débat sur la franc-maçonnerie, à l'occasion de la célébration du 250e anniversaire de la loge "la Parfaite-Union", fondée officiellement en juin 1762 à Rodez.
La salle était copieusement garnie. Je dirais que peut-être 450 des 500 places étaient occupées. Même si l'on compte la soixantaine de francs-maçons locaux et leurs proches, cela veut dire que la majorité des spectateurs n'étaient pas membres de l'organisation. Certains même lui étaient sans doute hostiles.
La soirée a commencé par un discours du maire d'Onet-le-Château, Fabrice Geniez. Fiches à la main, le premier magistrat municipal a lié son action politique au thème de la conférence, évoquant la devise républicaine (liberté égalité fraternité), qu'il il s'est félicité d'avoir fait inscrire au fronton de la mairie. Dans la dernière partie de son allocution, il a rappelé l'origine du nom du lieu et la symbolique de la baleine. Il a terminé par une évocation combative de la laïcité, tout en annonçant sa volonté de briguer à nouveau les suffrages des Castonétois : au cas où certains ne l'auraient pas encore compris, la campagne des municipales est lancée.
Dans la salle, d'autres politiques étaient présents, notamment le conseiller général et conseiller municipal Jean-Louis Roussel, le conseiller régional et élu du Grand Rodez Guilhem Serieys, le conseiller municipal Serge Bories représentant Christian Teyssèdre. Ces figures de la gauche étaient accompagnées du député UMP Yves Censi, qu'on s'attendrait plutôt à rencontrer à une réunion de la Grande Loge de France ou de la Grande Loge Nationale Française, deux obédiences classées à droite, alors que la loge ruthénoise fait partie du Grand Orient de France, classé à gauche. D'ailleurs, au cours de la soirée, à plusieurs reprises, il a été question de l'engagement des maçons en faveur de la réduction des inégalités sociales. Cerise sur le gâteau, José Gulino, Grand maître du Grand Orient de France, présent à la conférence, a rappelé et justifié son soutien au "mariage pour tous"... contre lequel Yves Censi a manifesté.
Coïncidence (?), à l'extérieur, un groupe de jeunes hommes (bien habillés, plutôt coupés court) distribuait des tracts contre la loi Taubira :
On notera la tentative de récupération de Marianne, symbole républicain, souvent représentée le sein dénudé, qui évoque pour moi davantage la liberté sexuelle que la stricte orthodoxie familiale telle que les religions monothéistes l'ont imposée en Occident. On peut aussi remarquer l'amalgame entre la loi Taubira (qui ne légalise que le mariage et l'adoption - qui, soit dit en passant, ne sera pas plus facile pour les couples homosexuels que pour les couples hétérosexuels) et deux mesures qui n'ont pas été adoptées : la procéation médicalement assistée et la gestation pour autrui. Un esprit mal intentionné serait tenté de croire que les auteurs de ce tract masquent leur opposition au mariage homosexuel derrière le refus de la PMA...
Au verso, le propos se fait plus largement politique :
Une partie des Français qui auraient pu être tentés de défiler a déjà compris que certains organisateurs des manifestations ne cherchent pas vraiment à obtenir gain de cause sur ce sujet-là, l'affaire étant pliée depuis un petit moment. Il s'agit plutôt de capitaliser sur un sujet de société et sur la déception des électeurs vis-à-vis de François Hollande pour renforcer des partis politiques aujourd'hui (en partie) discrédités. Qui croira que c'est au seul gouvernement Ayrault que l'on doit la forte hausse du chômage et l'échec partiel du système scolaire français ? C'est à croire que dix ans de chiraco-sarkozysme n'ont fait que du bien à la France...
Mais revenons à la conférence. Au discours de Fabrice Geniez a succédé un exposé d'environ une heure, faisant l'historique de la loge ruthénoise, de la monarchie absolue à la Ve République. Je n'ai malheureusement pas retenu le nom de l'intervenant, alors que sa communication était vraiment très intéressante, nourrie d'anecdotes et dite sur un ton vivant.
L'orateur a commencé par évoquer les origines. En fait, ce n'est pas en 1762, mais dans les années 1740 que la loge aurait été fondée. Un texte de 1749 sous-entend que dès 1748 elle était constituée. Un autre évoque, en 1746, la loge ruthénoise comme une fille de celle d'Albi, née un an plus tôt. Pourtant, d'après un site maçonnique, quand elle a rejoint le Grand Orient de France (en 1789), c'est semble-t-il sous le patronnage de Montauban.
Qui étaient ces premiers Aveyronnais francs-maçons ? Des cadets de famille, aux origines sociales aisées ou assez aisées. Certains francs-maçons aveyronnais se sont enthousiasmés pour les débuts de la Révolution (même s'il en existait de royalistes). Ils se sont divisés sous la Terreur, entre jacobins (comme François Chabot) et modérés (comme le chevalier de Panat).
Sous Napoléon Bonaparte, l'organisation est passée sous la coupe des autorités. Les maçons ont perdu leur liberté, mais certains y ont gagné une jolie carrière. Ainsi, le premier préfet Sainthorent était membre de la confrérie. A la même époque, les quatre sous-préfets (trois d'après Jean-Michel Cosson, dans son Dictionnaire de l'Aveyron), le directeur des postes et les ingénieurs d'Etat nommés dans le département étaient tous francs-maçons !
La loge ruthénoise n'a pas profité de la chute de l'empire. Les débuts de la Restauration (sous Louis XVIII) ont été marqués par une chasse aux révolutionnaires. A cette occasion, le conférencier a évoqué l'affaire Fualdès sous un jour méconnu, celui des rivalités francs-maçonnes. La victime était un notable de l'Empire, dont auraient cherché à se venger certains royalistes locaux, revenus au pouvoir en 1815. Signalons que, dès le départ, on a cherché à étouffer le crime : bien que le cadavre ait été retrouvé ligoté, il avait été demandé au policier menant l'enquête de classer l'affaire en suicide. Il a refusé et, peu de temps après, a été muté...
Sous Louis-Philippe (1830-1848), la loge retrouve des couleurs. Mais c'est sous la IIe République (1848-1852) qu'elle semble s'épanouir. On n'est donc pas étonné d'apprendre que certains francs-maçons locaux ont été déportés par Louis-Napoléon Bonaparte, devenu Napoléon III après son coup d'Etat.
Sous la IIIe République, la loge se porte bien. Rodez est une "ville rouge" (dirigée par un maire radical, Louis Lacombe, de 1886 à 1925) dans un département très conservateur, réputé être la "Bretagne du Midi". Le tempérament local semble d'ailleurs avoir grandement surpris les frères venus célébrer en Aveyron le 150e anniversaire de la fondation de la loge, en 1912. Le conférencier a lu plusieurs extraits de rapports écrits à cette occasion, l'un d'entre eux qualifiant même les Ruthénois d' "aborigènes" ! Dans le département, les polémiques s'observaient à travers les journaux, La Dépêche étant réputée être l'organe des francs-maçons, leur adversaire le plus irréductible étant L'Union Catholique. Les débats sur l'école publique et la séparation des Eglises et de l'Etat furent leurs terrains privilégiés d'affrontement.
Les sources concernant cette période sont abondantes, parce qu'on ne cherchait pas à se dissimuler. D'après l'orateur, c'est la répression mise en oeuvre par le gouvernement de Vichy qui a poussé les maçons à développer la culture du secret qui est devenue par la suite leur marque de fabrique.
Dès août 1940, les organisations maçonniques sont dissoutes et leurs biens confisqués. Les membres de la loge ruthénoise se font discrets, certains se repliant sur eux-mêmes. D'autres s'engagent dans la Résistance. Ils semblent cependant avoir évité la déportation... et aucun n'a été mis en cause pour faits de collaboration. Cependant, en 1945, lorsque la loge reprend ses activités, seules neuf personnes sont présentes. Il a fallu vingt ans pour reconstituer une équipe étoffée.
A cet intéressant exposé a succédé le Grand maître du Grand Orient, qui a tenu à revenir sur certaines des idées reçues qui circulent au sujet des francs-maçons. Il a aussi évoqué l'origine mythique du mouvement, remontant au Moyen Age, à la construction des cathédrales. Mais l'essentiel de son intervention a été consacré aux travaux actuels de l'organisation, à sa méthode. Il s'est montré inquiet de la montée de l'intolérance, de l'extrémisme religieux et du retour de la violence politique en France. Deux anecdotes sont venues noircir le tableau, en fin de soirée.
La première a été racontée par José Gulino. Il a révélé à l'assistance qu'un curé franc-maçon venait d'être révoqué par l'Eglise catholique, sans doute sur ordre du Vatican. Il n'a pas donné son nom ni la situation géographique de la cure. Sachez que cela s'est passé en Haute-Savoie. Une telle attitude rappelle les temps d'affrontement "musclé" entre l'Eglise et les Frères, sous la IIIe République. Est-elle l'annonce d'un durcissement doctrinal du clergé ? Je pense plutôt qu'elle témoigne de l'orientation prise par l'Eglise sous les deux précédents pontificats. Ainsi Benoît XVI, quand il n'était que le cardinal Josef Ratzinger, avait rappelé l'incompatibilité entre l'adhésion à la franc-maçonnerie et l'appartenance à la communauté catholique.
La seconde anecdote a été racontée par le maire d'Onet, inaugurant la séance des interventions du public. Assistant à des obsèques hors du département, il a été choqué par les propos tenus par le curé, durant la messe. Celui-ci, faisant allusion aux temps troublés que nous vivons, aurait dénoncé l'action de "loups", présents jusque dans les plus hautes sphères de notre pays.
D'autres spectateurs sont intervenus par la suite. L'un d'entre eux a bien fait rire la salle. Ce papy catholique, visiblement guère partisan de la franc-maçonnerie, s'est réjoui que la loi de séparation des Eglises et de l'Etat ait été votée en France. Grâce à elle, c'est à la puissance publique qu'incombe l'entretien de la grande majorité des bâtiments religieux. Sans cela, beaucoup seraient tombés en ruine. Le vieil homme malicieux s'est d'ailleurs réjoui que les francs-maçons participent à cette oeuvre, par leurs impôts !
Pour être juste, il faudrait préciser que ce sont les communes qui ont en charge l'entretien des églises (construites avant 1905), les cathédrales relevant de l'Etat. On se doit d'ajouter que José Gulino a rappelé, à plusieurs reprises, son attachement la liberté de culte et son respect pour toutes les convictions religieuses, pour peu qu'elles demeurent dans le cadre démocratique.
Il reste la question que j'avais l'intention de poser, mais que j'ai préféré garder sous le coude, pensant que la réponse risquait de ne pas sortir d'une forme de "politiquement correct". Ma question aurait été : "Le cas de Jérôme Cahuzac est-il révélateur de l'attitude d'une partie des membres de votre organisation ?"
Comment, vous ne saviez pas ? Pourtant, dès janvier dernier, la possible appartenance du ministre du budget avait été évoquée par la presse. Notons que Jérôme Cahuzac refusait de confirmer l'information, une attitude qui, on l'a découvert par la suite, est assez coutumière chez lui. Par contre, quand le scandale a occupé le devant de la scène, la référence franc-maçonne a été presque gommée. Le 6 avril, c'est par un minuscule entrefilet, en bas de page intérieure, que Le Monde informe ses lecteurs que Jérôme Cahuzac a été suspendu du Grand Orient de France (ce qui a sans doute permis à nombre d'entre eux d'apprendre qu'il en était membre) :
Voilà que je vieillis... je n'ai pas voulu "casser" l'ambiance conviviale de cette réunion, finalement fort instructive.
01:39 Publié dans Histoire, Politique, Politique aveyronnaise | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, actualité, ps, parti socialiste, france, histoire
mercredi, 22 mai 2013
Gruiiiik ! (2)
Un article paru aujourd'hui dans Midi Libre (et un autre dans Centre Presse) témoigne d'un nouveau rebondissement dans l'affaire de la porcherie de Causse-et-Diège. Le directeur général de Nutergia, Antoine Lagarde, envisage sérieusement de quitter l'Aveyron, à cause de l'extension de l'élevage industriel. (Il n'aurait peut-être pas à faire beaucoup de chemin pour être cordialement accueilli, dans le Lot.) Certains sont peut-être en train de se faire du souci, vu le nombre d'emplois concernés (plus de 100). L'entrepreneur ne s'est pas senti soutenu par les politiques locaux (notamment le Conseil général), qui se sont contentés de déclarations consensuelles. Les mauvaises langues disent que la majorité départementale est trop liée à la FNSEA pour pouvoir agir sereinement dans ce dossier.
Qu'en est-il de l'Aveyron dans la filière porcine ? Les statistiques les plus répandues donnent des informations à l'échelle régionale. Voici ce qu'il en est du cheptel porcin en 2011 :
Midi-Pyrénées (entourée en rouge) paraît posséder un faible cheptel (moins de 800 000 têtes), comparée à la Bretagne (8 millions de têtes) ou même à Pays-de-la-Loire. Dans la revue dont j'ai tiré la carte, un tableau donne les effectifs précis : 433 000 pour la région Midi-Pyrénées, qui est la cinquième de France dans ce secteur, juste derrière le Nord-Pas-de-Calais.
Mais, quand on recherche les données départementales, l'impression change, pour la bonne et simple raison que les quatre départements bretons possèdent de gros effectifs, ce qui fait ressortir fortement la région, alors que l'écart au niveau des départements est plus faible. Pour se faire une idée plus précise, il faut piocher dans les résultats du recensement agricole de 2010. Voici quels sont les effectifs porcins des départements français :
Voici ce que cela peut donner sur une carte des départements métropolitains :
Que remarque-t-on ? Bien sûr, que les quatre départements bretons (Côtes-d'Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine et Morbihan, en rouge sur la carte) sont largement en tête, avec chacun plus d'un million de têtes. Les départements dont l'effectif est le plus proche (entre 200 000 et 500 000 têtes, en orange sur la carte) sont presque tous des voisins : la Manche, la Mayenne, la Sarthe, la Loire-Atlantique, le Maine-et-Loire et la Vendée. Seul le Nord fait figure d'isolat porcin.
C'est dans la troisième catégorie (entre 150 000 et 200 000 têtes, en jaune sur la carte) que l'on retrouve l'Aveyron, un peu seul dans son coin, tout comme les Pyrénées-Atlantiques. Notons que notre département (un des huit de Midi-Pyrénées) concentre à lui seul 43 % du cheptel porcin régional. De leur côté, le Pas-de-Calais et les Deux-Sèvres se raccrochent à une zone déjà marquée par l'élevage porcin. Encore que... il est au moins un produit qui rapproche aussi bien les Deux-Sèvres que l'Aveyron des Pyrénées-Atlantiques : le Jambon de Bayonne. Si celui-ci est élaboré dans le bassin de l'Adour, les porcs ont pu être élevés beaucoup plus loin, dans un grand Sud-Ouest qui semble manquer de cohérence :
La dernière catégorie de départements regroupe ceux dont le cheptel est de 100 000 à 150 000 têtes : l'Orne, la Charente et l'Ain (en beige sur la carte). Seul ce dernier fait figure d'exception, les autres se rattachant à l'une des catégories précédentes. Les autres départements ont des cheptels plus réduits, voire quasi inexistants
Qu'en conclure ? Que l'élevage porcin français est très concentré géographiquement, qu'il a tendance à s'étendre par proximité, à quelques exceptions près, comme l'Aveyron. Notre département a-t-il vocation à prendre le relais de l'agro-industrie bretonne ? Voilà un bon sujet de débat agricole... d'autant plus que l'élevage industriel n'est pas la seule option. S'engager dans la filière bio (par exemple) pourrait s'avérer pertinent, surtout si l'on veut continuer à miser sur l'image de qualité associée aux productions aveyronnaises. D'autres départements, certains très proches, font preuve de moins de "timidité" que le nôtre :
Si l'on regarde au-delà de nos frontières, on s'aperçoit qu'en Europe, l'Allemagne, dans ce domaine-là comme dans d'autres, a quelques longueurs d'avance...
19:09 Publié dans Economie, Politique aveyronnaise | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, actualité, environnement, développement durable, économie
dimanche, 19 mai 2013
L'aire de repos d'Olemps
Elle est située sur la route nationale 88, accessible dans le sens Albi - Rodez (en violet sur le plan) :
Autrefois connue pour sa pissotière et comme lieu de rencontre nocturne des sodomites du Grand Rodez (aujourd'hui, il paraît que cela se passe place Foch), elle était aussi fréquentée, le jour, par les personnes désireuses d'accéder à une jolie vue de Rodez :
Elle a été fermée pendant une dizaine d'années et complètement réaménagée. Les places de parking ont été refaites. Mais, lorsque l'on arrive sur les lieux (y compris à pieds, en venant de la déchetterie ou du cimetière d'Olemps), c'est un bâtiment qui attire l'attention :
Cette aire de repos est dotée de sanisettes neuves... et gratuites, comme toutes celles de Rodez, depuis une décision du Conseil municipal du 25 février 2011 (page 6). D'après La Dépêche du Midi, l'entretien sera assuré par les services de la Communauté d'agglomération du Grand Rodez.
A gauche l'on distingue l'urinoir, qui place les usagers dos à la descente. Les hommes plus timides, ceux qui sentent l'arrivée d'une grosse commission ainsi que les dames peuvent utiliser l'une des deux cabines, dont l'intérieur ressemble à cela :
C'est ultramoderne. La porte se verrouille automatiquement (une fois qu'elle est bien fermée) et l'on semble avoir pensé à tout : la rembarde pour les personnes âgées ou à mobilité réduite, le papier hygiénique et un mini-lavabo, complété par un système de sèche-mains. L'ensemble a été réalisé par l'entreprise Michel Planté Systèmes, basée dans les Landes.
A peine entré dans l'habitacle, j'en étais à m'émerveiller du progrès technologique lorsqu'une scène horrible se déroula sous mes yeux :
Non, vous ne rêvez pas, la lunette des WC était en train de s'abaisser toute seule ! Un fantôme avait-il pénétré en même temps que moi dans les toilettes ? Etais-je sur le point de subir une agression sexuelle de la part d'un délinquant invisible ? Fort heureusement, non ! Il s'agit là encore d'un procédé automatique... ce qui implique qu'aucun homme ne va uriner debout dans cette cabine. Au cas où cela arriverait, précisons que le matériel est automatiquement nettoyé après chaque passage.
Aux coquins qui songeraient à utiliser cet équipement à d'autres fins qu'urinatoires ou défécatoires, il faut révéler qu'au bout d'un quart d'heure, la porte se déverrouille. Quoi que vous y fassiez, ne soyez donc pas trop longs !
16:26 Publié dans Aveyron, mon amour, Vie quotidienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, actualité
samedi, 18 mai 2013
Mon Fiancé chinois
Non, ce titre n'est pas du tout l'annonce de mon coming out ! J'ai simplement lu une bande dessinée qui porte ce titre :
L'auteure est Laure Garancher. C'est donc une femme, qui a créé une histoires de femmes, racontée par une femme. En effet, la narratrice est une Vietnamienne qui va être amenée à épouser un Chinois. La bande dessinée est divisée en quatre parties, chacune évoquant le destin d'un personnage en particulier. Signalons que chaque histoire est racontée à la première personne du singulier.
Le premier chapitre est consacré à la (future) belle-mère de la narratrice, originaire d'une grande ville du sud de la Chine (proche du nord du Vietnam), Kunming :
C'est l'occasion de découvrir le sort réservé aux femmes, dont le mariage est arrangé et qui ont vocation à fournir un héritier mâle à la famille de l'époux. La séquence avec l'entremetteuse est particulièrement bien "croquée" :
En attendant que "l'heureux événement" survienne, la nouvelle épouse travaille sans répit dans le restaurant familial. Sa situation ne s'améliore que lorsqu'elle tombe enceinte.
Le deuxième chapitre est consacré à la mère de la narratrice. Il nous emmène donc au Vietnam, à la campagne, dans une région où vit une ethnie minoritaire, les Hmongs. (Les oreilles des cinéphiles connaissent ce nom, certains membres de ce peuple étant au coeur de l'intrigue du film Gran Torino.)
On découvre la vie quotidienne de ces familles de paysans. On nous présente aussi certaines de leurs traditions. Aller en ville est toute une expédition avec, à la clé, pour les jeunes, l'occasion de rencontrer des représentants de l'autre sexe...
Le troisième chapitre tranche avec les autres, puisqu'il est consacré à un homme, le futur époux de la narratrice. C'est un enfant unique, qui a d'abord le statut d'enfant-roi :
On lui passe ses caprices, mais on veut qu'il réussisse dans ses études. L'adolescence du jeune homme le voit souffrir d'un conflit interne : il est très attiré par ce que produit l'Asie occidentalisée, mais doit se soumettre aux traditions familiales... et notamment accepter une épouse pour perpétuer le clan.
Cela nous mène au quatrième chapitre, dans lequel la narratrice conte sa propre histoire. Là encore, l'accent est mis sur certains aspects de la civilisation hmong, notamment sa mythologie :
On comprend mieux le statut de cette minorité, de surcroît dans un Etat communiste. On se dit finalement que ces enfants de la campagne, obligés d'apprend à l'école la langue nationale, sous la férule d'un gouvernement autoritaire (mais qui semblait vouloir leur bien) ne sont pas sans rappeler ces enfants de la Troisième République, parlant occitan, breton, basque, corse, alsacien dans leur village, mais instruits en français.
Bien entendu, dans cette partie, il est question du mariage arrangé. La Chine connaît un fort déséquilibre des sexes (les couples privilégiant l'enfant unique de sexe masculin, quitte à avorter pour éviter d'avoir une fille) ; certaines familles font donc le choix de l'étranger proche (culturellement et géographiquement) pour trouver une épouse. La BD se conclut sur la petite-fille de la narratrice qui, comble du progrès, a pu choisir et son travail et son mari !
PS
On peut découvrir d'autres planches de l'auteure sur sa page Facebook.
13:45 Publié dans Chine, Livre, Loisirs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, bande-dessinée, femme, fille, culture
vendredi, 17 mai 2013
De la thune labellisée
Aujourd'hui, j'ai contribué à relancer la consommation des ménages dans une grande surface notariale de la périphérie ruthénoise. J'ai réglé en liquide. La caissière m'a rendu de la monnaie. Parmi les pièces figurait celle-ci :
Cette pièce commémorative (de 2 euros) a été frappée pour célébrer le cinquantième anniversaire du traité de l'Elysée, signé en janvier 1963 par Charles de Gaulle (alors président de la République) et Konrad Adenauer (alors chancelier de la RFA).
Les visages des deux hommes sont gravés sur l'avers, avec un texte bilingue. En y regardant bien, on peut aussi distinguer deux drôles de gribouillis :
Il semblerait que ce soient les signatures des deux hommes d'Etat. Pour en avoir confirmation, il faut consulter une reproduction du document officiel, accessible sur le site de l'Année franco-allemande :
Voici ce que cela donne quand on agrandit la zone de signatures :
Les curieux peuvent se rendre sur le site de l'INA, où l'on peut trouver une archive intéressante.
PS
Le Gerhard Schröder, ministre des Affaires étrangères de la RFA, qui cosigne le traité n'est évidemment pas le même homme qui est devenu, bien des années plus tard, chancelier (social-démocrate) de l'Allemagne réunifiée.
23:58 Publié dans Economie, Histoire, Vie quotidienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, france, europe, actualité
dimanche, 12 mai 2013
Du monde au balcon
C'est ce que j'ai pensé en regardant les photographies de la manifestation des Femen place des Pyramides, à Paris, notamment cette exquise contre-plongée, publiée dans un article du Monde :
Ce coup d'éclat avait pour but de parasiter l'une des sempiternelles tentatives de récupération de Jeanne d'Arc par l'extrême-droite. Il y a bien sûr la manifestation du 1er mai, autour du Front National... et puis il y a l'action de certains groupuscules (qui peinent à réunir quelques dizaines de personnes), en ce deuxième dimanche de mai. Mais pourquoi diable cette discordance entre les dates ?
Depuis la Troisième République, l'extrême-droite a pris l'habitude de manifester autour de la statue d'Emmanuel Frémiet. Le choix du premier mai s'explique par la volonté de contrebalancer la fête des travailleurs, initiée par la gauche. De plus, c'est au début du mois de mai 1429 que Jeanne d'Arc, à la tête des troupes du Dauphin (futur Charles VII) mena la délivrance d'Orléans. Cette victoire se commémore le 8 mai ou, plus fréquemment, le deuxième dimanche du mois. Le 10 juillet 1920 (année de sa canonisation), une loi a créé officiellement cette deuxième fête nationale.
Voilà pourquoi, tous les deuxièmes dimanches du mois de mai, les bâtiments publics sont pavoisés aux couleurs nationales, tout comme la statue de la place des Pyramides, ainsi qu'on peut le voir dans une vidéo mise en ligne sur le site du quotidien gratuit Metro :
Je ne suis pas un inconditionnel des Femen, mais je n'aime pas la récupération dont la Pucelle fait l'objet de la part de l'extrême-droite. A cet égard, j'ai trouvé fort pertinent l'un des "touittes" publiés par les Femen :
De surcroît, le dévoilement de la poitrine, marque de fabrique des Femen, est un hommage à la féminité de Jeanne d'Arc. Plusieurs témoignages, émis lors du procès en réhabilitation (en 1456), accréditent l'idée qu'elle était bien pourvue de ce côté-là.
Jean d'Aulon, à la fois garde du corps et chevalier-servant, fut sans doute celui qui la côtoya le plus. A la fin de son témoignage, il parle d'elle comme d'une "jeune fille, belle et bien formée" (il évoque même ses "tétins" !). Le duc d'Alençon fut quant à lui plutôt un partenaire de combat. Il eut l'occasion de la voir s'habiller et se déshabiller. Voici ce qu'il déclare : "parfois il voyait ses seins, qui étaient beaux". Il nous reste la déposition d'Aymond (ou Haimond) de Macy, du parti adverse des Bourguignons, alliés du roi d'Angleterre. Cet enfoiré a essayé de lui tripoter les nibards ! (C'est donc qu'ils lui semblaient "appétissants"...) : "Plus d'une fois, par manière de jeu, j'ai essayé de lui toucher les mamelles, en m'efforçant de lui mettre les mains dans le sein. Jeanne ne voulait pas le souffrir ; elle me repoussait de toutes ses forces."
Mais revenons aux Femen. L'exhibition de leur poitrine est un acte ambigu. D'un côté, elles affirment ainsi la maîtrise de leur corps. D'un autre côté, elles choquent bien de peu de monde en Occident. Elles excitent même plutôt la curiosité des mâles avides de chair fraîche... parce que ces dames sont mignonnes ! Elles ont bien compris comment fonctionne notre société du spectacle : jolies femmes + poitrines exhibées = retentissement médiatique assuré.
Terminons par leur positionnement idéologique. On les a étiquetées un peu vite "gauchistes". Elles s'opposent au néo-stalinisme florissant en Europe de l'Est (Ukraine, Biélorussie et Russie). Elles rejettent violemment la droite extrême en Occident et s'opposent tout aussi fortement à l'islamisme. C'est à l'évidence un mouvement anti-totalitaire et anticlérical, qui peut tout à fait s'apparenter à une forme de libéralisme politique.
23:26 Publié dans Jeanne d'Arc, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, société, france, femme, actualité
samedi, 11 mai 2013
Les Gamins
Au départ, je m'étais dit : voilà le genre de comédie formatée, destinée à passer en première partie de soirée sur TF1, que je vais éviter d'aller voir. Malgré Chabat. Finalement, le bouche-à-oreille (favorable) et les extraits vus sur la Toile m'ont incité à tenter le coup.
Cela fait presque un mois que le film est sorti et la salle était pourtant presque comble. La première partie est le début d'une comédie sentimentale, l'intrigue essayant de sortir (un peu) des sentiers battus. Cela marche : j'ai bien aimé les tourtereaux qui se vannent, leurs petits jeux d'amoureux et la scène de demande en mariage.
La deuxième partie voit intervenir le père de la (future) mariée, incarné par un Alain Chabat au sommet de sa forme.
Il est très bon en vieux mari dépressif et bougon. Il est encore meilleur en quinqua qui fait sa crise et veut de nouveau kiffer la life. Je recommande les deux premières virées avec son futur gendre (Boublil, en général bon, bien que parfois trop "politiquement correct"). La première sortie voit d'abord les deux hommes s'énerver l'un contre l'autre, avant qu'ils ne deviennent les meilleurs amis du monde. A cette occasion, ils font la connaissance d'un dealer très spécial de sa race, un dénommé Abdelkader (Thomas Soliveres, un nom à retenir) qui a dû en surprendre plus d'un !
J'ai toutefois un gros bémol à apporter à cet enthousiasme : la vision clinquante de la fête, qui passe visiblement par la fréquentation de la "haute" et les dépenses inconsidérées. C'est l'un des aspects démagos du film. C'est de surcroît un brin misogyne : Sandrine Kiberlain incarne une horrible bobo castratrice et sa fille, pour sérieuse qu'elle soit, passe l'essentiel de son temps à sourire ou pleurer.
La suite nous met en contact avec le monde du show-biz, où naviguent nombre de parasites et de dégénérés. Là encore le film est ambigu, hésitant entre le portrait satirique et l'empathie. On retiendra l'insupportable chanteuse-enfant Mimi Zozo, interprétée avec conviction par Mélusine Mayance.
La fin voit tout ce beau monde renter dans le rang, avec quand même une séquence au domicile des parents qui se termine d'une manière digne de Mary à tout prix !
Je pourrais m'arrêter là et m'en tenir à la "critique" cinématographique. Les scénaristes ont pourtant tenu à insérer de la politique dans l'histoire. A trois reprises, un personnage incarnant un dirigeant iranien est l'objet de moqueries assez faciles. La première fois, on le voit tenter de parler en français à ses interlocuteurs. On veut visiblement nous montrer qu'il est assez imbu de lui-même. La scène tombe à plat ; la salle rit peu, contrairement à ce qui se passe dans la deuxième séquence, qui met en scène Thomas (Max Boublil) traduisant à sa manière le discours de l'Iranien (qui s'exprime cette fois en farsi). Je reconnais que c'est assez tordant, bien qu'un peu trop appuyé (et limite invraisemblable).
Alors, pourquoi tant d'insistance ? Ce personnage est-il une caricature d'un dirigeant iranien réel ? Il ne me semble pas que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad se soit jamais vanté de pouvoir parler français. Ce pourrait être le négociateur du dossier nucléaire Saïd Jalili, réputé polyglotte. Précisons que, dans le film, la future épouse du héros travaille au gouvernement, sans doute au ministère des Affaires étrangères. Mais cette volonté de stigmatiser le dirigeant iranien cache peut-être autre chose.
Il se trouve que l'équipe au pouvoir (en Iran) depuis 2005 s'est souvent "distinguée" par sa grande hostilité à l'Etat d'Israël. Or, les producteurs du film (Alain Goldman et Simon Istolainen) sont juifs (jusque là, rien à dire), le premier étant un ancien militant du Bétar et un fervent défenseur d'Israël. Quant au scénario, il a été coécrit par le réalisateur, Anthony Marciano et Max Boublil. Le premier est l'un des cofondateurs de MyMajorCompany, aux côtés de Simon Istolainen et de Michael Goldman (l'un des fils de Jean-Jacques). Il est possible qu'il ait été victime d'une agression antisémite, il y a une dizaine d'années de cela. Le second est fils d'un médecin juif d'origine tunisienne.
Mine de rien, cette petite comédie a donc un arrière-plan communautaire. Le reste du casting renforce cette impression. On y croise bien sûr Alain Chabat (né en Algérie), mais aussi Arié Elmaleh (frère de Gad) et Patrick Bruel, dans une séquence-hommage de mauvais goût. Cela ne m'a pas empêché de profiter du film, exemple convaincant de bonne comédie à la française. Mais j'ai quand même éprouvé un petit malaise, dû à l'impression que l'humour servait à faire passer un message politique, presque à l'insu des spectateurs.
01:41 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
jeudi, 09 mai 2013
Sous surveillance
Le nouveau film de Robert Redford (dont le titre original est The Company you keep) peut se lire à plusieurs niveaux. C'est d'abord un polar, avec un fugitif et une énigme concernant un crime commis plus de 40 ans auparavant. Une seconde énigme apparaît en cours d'histoire, autour du personnage d'un enfant. Les spectateurs découvrent la plupart des secrets en suivant l'enquête du jeune journaliste (hommage de Redford au "quatrième pouvoir", qu'il n'hésite pourtant pas à critiquer). C'est aussi un film politique, sur l'engagement gauchiste d'une partie de la jeunesse étudiante américaine des années 1960. C'est enfin un film sur l'amour, celui avec un grand A, inatteignable (?) et fugace (?), mais aussi celui qui dure.
Le scénario est bien ficelé et le casting alléchant. Robert (un peu âgé pour le rôle, même s'il s'entretient) a fait venir de vieux potes, comme Nick Nolte (qu'on a dû sortir de l'hospice sur un brancard, tant il semble voir du mal à se déplacer... et à parler, dans la V.O.) Susan Sarandon et Julie Christie. Ils sont accompagnés d'autres valeurs sûres comme Brendan Gleeson, Stanley Tucci, Chris Cooper et Terrence Howard, tous excellents seconds rôles. On a ajouté quelques djeunses, notamment Brit Marling, Anna Kendrick et l'énervant Shia LaBeouf (qui arbore durant tout le film la même barbe de trois jours et semble toujours mastiquer le même chewing gum)... sans doute pour élargir le public.
Toutefois, cela manque un peu de pêche. Redford n'est pas toujours crédible en fugitif. Heureusement que les autres assurent, autour de lui. Ce n'est donc pas LE grand film sur l'activisme politique. Il pose néanmoins de bonnes questions, sur l'engagement (superbe scène avec S. Sarandon en prison) et sur l'amour. Cela se suit sans déplaisir. C'est un peu meilleur que le décevant Lions et agneaux, sans plus.
23:12 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
Stanko Kristic à Albi
Cet artiste d'origine yougoslave (il est serbe), arrivé en France il y a une quarantaine d'années (et installé dans le charmant village de Cordes-sur-Ciel), expose certaines de ses oeuvres à l'Hôtel Rochegude, à Albi, jusqu'au 15 mai. (C'est ouvert de 13 heures à 19 heures, sauf le mardi.)
Dès l'entrée dans la cour, on est accueilli par quatre sculptures de grande taille, le plus belle étant pour moi la licorne en acier inoxydable :
Elle est notamment accompagnée d'une "Centauresse comédienne" et d'une "Pégasine mama". C'est donc la mythologie grecque qui inspire Stanko Kristic, qui travaille toutes sortes de matériaux, principalement les métaux et la céramique.
A l'intérieur du bâtiment, les oeuvres sont réparties dans trois pièces. On y trouve des représentations de divinités grecques, notamment Zeus et Athéna, en buste. Mais la plus impressionnante est sans conteste Aphrodite, qui occupe presque la totalité de la hauteur de la salle :
L'absence de bras évoque évidemment la Vénus de Milo (qui est sans doute une représentation d'Aphrodite). On remarque aussi l'étrange lueur au niveau du visage : les statues de céramique sont éclairées de l'intérieur, ce qui, sur place, leur donne un aspect encore plus étonnant, que les photographies ne rendent que très partiellement.
De la mythologie grecque, Stanko Kristic a retenu l'importance de certains animaux, au premier rang desquels le taureau, présent une dizaine de fois dans l'exposition. J'ai été particulièrement impressionné par le "Taureau de combat" que voici :
Quand ce ne sont pas les taureaux qui l'inspirent, ce sont les chevaux. Ils sont aussi très présents. N'oublions pas que le plus célèbre d'entre eux est un animal géant, mais factice :
Ce "Cheval de Troie", cabré, est marqué de visages humains (parfois rieurs), ceux des soldats grecs cachés à l'intérieur. L'un d'entre eux est sans doute celui d'Ulysse. L'un des équidés est représentés dans une curieuse posture :
Intitulée "La Musique divine", cette oeuvre témoigne de l'influence du surréalisme sur l'artiste serbe. Notons que l'animal possède quatre pattes et deux bras ! On n'est donc pas très étonné de trouver, à quelques mètres de là, une sculpture rappelant le style de Picasso :
"La Puissance de la coiffe bleue" m'a fait penser à "La Femme qui pleure" :
Concernant la sculpture, je conseille d'essayer de la regarder de profil, des deux côtés. Il me semble que Kristic a essayé de transcrire en trois dimensions ce que Picasso avait réussi à représenter en deux.
Outre le surréalise et le cubisme, l'expressionnisme a inspiré l'artiste, notamment dans certaines représentations humaines, comme "Les Emotions nostalgiques" :
L'humour n'est pas absent de son oeuvre, comme dans "Bisou mon amour". De temps en temps, un petit clin d'oeil vient égayer le résultat d'un travail sérieux. C'est d'ailleurs parfois intrigant, comme dans "La Déesse Sylvie" :
Allez, je vous aide :
Sachez que cette oeuvre risque de ne plus être exposée, puisque c'est une commande. (La dame doit se prénommer Sylvie, je présume.) Les fautes d'orthographe sont volontaires. Appelons ça une licence poétique...
Et la politique dans tout cela ? Elle ne semble guère inspirer Kristic, qui ne l'aborde que dans une seule oeuvre, "Etude de la politique" :
Bref, pour lui, c'est du bla-bla. Un peu lapidaire, certes, mais la sculpture a de la gueule, si j'ose dire ! Je termine par une production un peu particulière, qui parlera aux Aveyronnais :
Elle s'intitule "L'Homme mouton".
Vraiment, si vous en avez le temps et l'occasion, d'ici le 15 mai, courez voir cette exposition, qui mériterait de figurer dans un musée aveyronnais.
13:05 Publié dans Loisirs | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art, culture, actualité
mercredi, 08 mai 2013
Purée d'homonymie !
Hier soir, après le boulot, j'ai eu une belle surprise en écoutant La Morinade. L'une des rubriques est celle de la "très très bonne musique" proposée par Daniel Morin lui-même. (Elle est parfois introduite par un jingle évoquant un lieu emblématique de l'Aveyron.) L'animateur nous y propose des extraits qu'il juge particulièrement puissants... Voici donc ce que j'ai entendu dans l'émission de mardi 7 mai :
Le morceau de musique en question existe bel et bien. Il s'agit du rap arabe, d'un individu qui s'appelle Henri Golan (sans le "t", attention, hein !). C'est évidemment un pseudonyme, celui du Belge Willy Dehaibe, qui a mis un terme à sa carrière d'humoriste en 2010.
09:17 Publié dans Musique, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chanson, musique, médias
mardi, 07 mai 2013
Entrée du personnel
Ce court documentaire (d'environ 1 heure) est consacré aux employés de plusieurs abattoirs de l'Ouest de la France métropolitaine. Il résulte de l'entrecroisement d'images tournées devant et dans les usines et de témoignages recueillis ailleurs, enregistrés et réinterprétés par des acteurs. Visiblement, ce procédé s'est imposé pour éviter que certains salariés ne soient victimes de représailles.
Globalement, quel que soit le poste occupé, quel que soit le sexe de l'employé, le travail est présenté comme répétitif, souvent pénible physiquement, usant à la longue.
Le montage nous fait d'abord remonter la chaîne, de l'emballage avant expédition à l'entrée des animaux avant leur exécution. On ne nous montre toutefois pas frontalement la mise à mort. Le film s'arrête juste avant ou montre le moment qui suit immédiatement.
Ceci dit, ce que l'on voit à l'écran n'est pas horrible. A la différence des établissements cités dans un scandale (en 2012), ces abattoirs semblent bien entretenus, fonctionnels, aux normes. De temps à autre, on a toutefois l'impression que la présence de la caméra incite certains employés à systématiquement nettoyer leurs outils (entre deux usages) et à faire preuve d'un zèle excessif dans le nettoyage des équipement.
J'ai trouvé très réussie la superposition des images et des témoignages réinterprétés. On regrette presque que le film s'interrompe aussi vite.
21:25 Publié dans Cinéma, Economie, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, société
dimanche, 05 mai 2013
Poupées gigognes
Il ne va pas être question des poupées russes (certaines très originales), mais d'économie régionale. Il y a un peu moins d'un mois, la presse, d'abord locale, puis nationale, a commencé à évoquer la possible fermeture de la librairie Privat de Toulouse. Les gens du cru continuent à appeler ainsi l'établissement devenu l'une des enseignes du groupe Chapitre. C'est là que l'emboîtement commence.
En effet, indépendante à l'origine, la librairie Privat (séparée de la maison d'édition) a intégré le groupe Chapitre, connu notamment pour son site internet. S'est ainsi constitué un réseau hétéroclite de librairies, plus ou moins spécialisées. L'ensemble appartient à Actissia, une entité qui contrôle aussi France Loisirs.
Mais ce n'est pas fini ! L'entreprise qui s'appelle depuis 2011 Actissia est née en 1970. C'était une filiale du groupe allemand Bertelsmann. Elle dépend aujourd'hui de Najafi, un fonds d'investissement américain, plus précisément d'Arizona... et pas du Nevada, comme l'a imprudemment affirmé le directeur de la librairie... bon, d'accord, c'est pas loin :
Voilà donc la chaîne reconstituée : Privat - Chapitre - Actissia - Najafi. Mais ce n'est pas tout. La plupart du temps, Najafi est présenté comme étant un fonds de pension. Ses investissements servent donc à garantir le paiement de retraites (ainsi que celui des salaires et bonus de ses employés).
Or, dans le cas qui nous préoccupe, la stratégie du groupe conduit à supprimer des emplois d'actifs actuels. D'après Le Monde, Actissia a vu son chiffre d'affaires se contracter de 10 % entre 2011 et 2012. C'est énorme. Cela justifierait donc des mesures drastiques ? Le problème est que la librairie Privat est en bonne santé économique, puisque, d'après son directeur, son chiffre d'affaires ne cesse de progresser (+ 4 % en 2012), en dépit d'un contexte de crise générale (avec la concurrence des sites internet). On peut même penser que l'activité a de l'avenir en centre-ville, puisque deux concurrents ont récemment disparu, la librairie Castéla (autre institution locale) fin 2011 et le Virgin Mégastore en 2012.
Précisons que ces trois exemples ne sont pas identiques. Castéla s'est trouvée confontée à un quadruplement du loyer (et aussi, à mon avis, à une baisse des ventes). Le groupe Virgin était lui, globalement, en mauvaise posture... et aux mains de financiers, Butler Capital Partners. De surcroît, à Toulouse, la FNAC est trop bien implantée pour qu'un commerce qui lui ressemble beaucoup puisse réussir durablement.
Concernant la librairie Privat, tout n'est peut-être pas encore joué. Alors que les rumeurs les plus folles circulent (comme la délocalisation au Cambodge de la comptabilité des magasins Chapitre), il semblerait que trois des douze sites menacés de fermeture puissent bénéficier d'une reprise : Belfort, Colmar et Toulouse. Les salariés ont lancé une pétition en ligne. Le Comité de soutien a créé une page Facebook. Toutefois, à mon humble avis, la meilleure action à réaliser est de continuer à acheter des livres en librairie...
16:27 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : france, société, actualité, culture
vendredi, 03 mai 2013
La Saga des Conti
J'ai un peu hésité à aller voir ce documentaire, consacré à la lutte des salariés de l'usine de pneumatiques Continental de Clairoix (à côté de Compiègne) pour deux raisons : je craignais le film militant lourdingue et j'avais l'impression que cela risquait d'être un peu funèbre.
... eh bien j'avais tort car, même si c'est incontestablement une oeuvre engagée, elle n'est ni pesante ni plombée par le pessimisme. C'est vivant parce que c'est filmé de l'intérieur, avec empathie. C'est de plus souvent drôle, les personnages principaux ne se prenant pas (trop) au sérieux. Si un large éventail des grévistes nous est proposé, le choix de suivre plus particulièrement quelques meneurs s'avère payant.
Pendant l'essentiel du film, on est dans les pas d'un sympathique délégué CGT, Xavier Mathieu, à la fois brut de décoffrage et rusé, avec une "gueule" grande comme ça :
Il est très souvent accompagné d'un autre cégétiste emblématique du mouvement, Didier Bernard, le rocker au grand coeur, tatoué et "piercé" (à l'époque) :
On voit moins les syndicalistes de la CFDT et de la CGC (les cadres). C'est le représentant de la CFTC qui est principalement chargé d'incarner la voix modérée à l'écran... et il est un peu caricatural. On sent donc où vont les sympathies du réalisateur.
Ces syndicalistes sont épaulés par un retraité, qui se joint à leur mouvement, Roland Szpirko :
Son intégration ne s'est visiblement pas faite sans heurt, même si c'est à peine abordé par le film. On reconnaît au bonhomme une compétence indéniable dans l'organisation d'un mouvement social, mais son appartenance à Lutte Ouvrière fait tiquer certains salariés de l'usine.
Une fois la fine équipe présentée, on la voit en action. Bon, alors, ça fait quoi des salariés revendicatifs ? Ben, ça manifeste. On suit donc cette troupe très solidaire (la grande majorité des 1 200 personnes menacées par la fermeture a participé aux actions), d'abord à Compiègne, puis à Reims, à Paris, à Sarreguemines (où l'usine, moins moderne que celle de l'Oise à l'époque, n'était pas menacée parce que moins coûteuse...)... et même en Allemagne !
On remarque (proximité de Compiègne oblige) que les manifestants ont eu tendance à se rassembler autour de statues de Jeanne d'Arc (copieusement garnies d'autocollants à l'occasion... shocking !) :
Ici, c'était à Compiègne, près de la statue équestre. Plus loin dans le film, il me semble que l'on voit l'autre statue (locale) de la Pucelle :
Je pense aussi que la grande manifestation parisienne est passée par la place saint Augustin, où se trouve une statue identique à celle de Reims :
Pour la petite histoire, signalons que le bourg de Clairoix, en périphérie de Compiègne, où se trouvait l'usine Continental, fut sans doute le lieu de détention de Jeanne d'Arc après qu'elle a été faite prisonnière par les troupes de l'infâme Jean de Luxembourg. (Le château a disparu à la fin du Moyen Age.)
Ironie de l'affaire : quand j'ai recherché sur la Toile des traces vidéo de ces manifestations, j'ai notamment visionné un enregistrement de la manifestation parisienne. Voici ce qui est apparu à l'écran :
C'est ce qui s'appelle de la publicité ciblée !
La partie la plus émouvante est celle qui décrit l'organisation et le déroulement de la manifestation à Hanovre, avec les employés allemands. Ou comment les syndicalistes redécouvrent l'internationalisme... que les financiers mettent en pratique depuis des décennies (à leur profit). Ce fut aussi l'occasion de pratiquer une langue étrangère et d'apprendre un slogan fédérateur :
"Zu-sammen, zu-sammen, ja ! ja !"
La partie la plus tendue fut celle des négociations, qui ont mis beaucoup de temps à démarrer, tant on a essayé d'enfumer les salariés... jusqu'au bout. Dans cette histoire, les pouvoirs publics français ont été d'une inefficacité (voulue ?) lamentable.
La fin est apaisée. Une partie des objectifs ont été atteints. Mais, sur le fond, au-delà du succès du mouvement, il faut établir un constat d'échec : l'usine a fermé et de nombreux employés n'ont pas retrouvé de situation stable.
P.S.
Je recommande vivement ce documentaire aux salariés de l'usine Bosch d'Onet-le-Château.
23:54 Publié dans Cinéma, Jeanne d'Arc, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, société
jeudi, 02 mai 2013
Claude Guéant pété de thunes
La polémique enfle concernant les sommes d'origine suspecte qu'aurait reçues Claude Guéant entre 2002 et 2012. Des internautes facétieux se sont moqués de la défense de l'ancien ministre de l'Intérieur, qui a argué de la vente de tableaux. Des "mèmes" circulent sur la Toile, dont le quotidien Midi Libre propose un échantillon savoureux. Voici mon préféré :
... A comparer avec l'original, La Création d'Adam, de Michel-Ange :
Je me suis amusé à en fabriquer un (dans un genre approchant), Le Sultan offrant ses richesses au petit marquis :
Je me suis inspiré d'un tableau du XVIe siècle de Cornelis de Vos, Crésus et Solon (qui a été récemment restauré), dont j'ai bien entendu détourné le sens :
Si l'on veut rester davantage dans l'esprit du tableau original, il vaut mieux inverser les rôles, et créer une nouvelle toile, intitulée Le Conseiller impécunieux et le Prince :
14:53 Publié dans Politique, Presse, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, france, actualité, presse
mercredi, 01 mai 2013
Iron Man 3
L'histoire est un gros retour en arrière (qui dure près de deux heures !). En voix off, Tony raconte les péripéties, un peu désabusé. De cette introduction le spectateur moyen peut déjà déduire que soit le héros est au paradis (d'où il nous raconte toutes ces choses horribles et parfois réjouissantes), soit il est encore vivant à la fin de l'histoire... ce qui lui permettra de participer non seulement à Iron Man IV, mais aussi à Avengers II, qui est déjà dans les cartons. (Pour avoir la réponse la plus complète, restez après le générique de fin.)
Commercialement parlant, on incite vivement à pirat... euh louer acheter le DVD d' Avengers : au bout d'un moment, j'ai arrêté de compter les références à la bataille de New York, l'un des grands moments de ce film.
Ce troisième opus est donc assez tape-à-l'oeil, très bruyant aussi bien au niveau de la musique que des sons d'ambiance. Cela a au moins le mérite d'étouffer le bruit des gorets qui bouffent leur pop corn pendant la séance... mais je suis sorti de là avec un mal de crâne !
Heureusement, ce film d'action est doté d'un bon scénario. Ouf ! Après le retour en arrière dans le retour en arrière (on remonte quand même jusqu'à 1999... antédiluvien !) débute l'intrigue avec deux mystères. Quelle est cette nouvelle arme utilisée dans les récents attentats terroristes et qui se cache derrière le personnage du Mandarin ?
La solution à ces deux énigmes ne résulte pas de l'imagination débordante de Shane Black (qui se révèle de surcroît moins bon réalisateur que Jon Favreau), mais d'emprunts à deux séries télévisées. L'origine des pouvoirs des principaux "méchants" n'est pas sans rappeler certains épisodes de l'excellente série Fringe (actuellement rediffusée le samedi soir sur la chaîne NT1) et l'identité du commanditaire suprême s'inspire de l'intrigue de la première saison de 24 heures chrono.
Ajoutez à cela que la rivalité qui va opposer Tony Stark à un autre scientifique ressemble furieusement à celle qui a vu s'affronter Spiderman et le Bouffon Vert (Guy Pearce a d'ailleurs des airs de Willem Dafoe), que bien évidemment, le principal point faible d'Iron Man est son amour pour sa "femme à tout faire" (Gwyneth Paltrow, toujours très bien... et de plus en plus active !) et vous pourrez légitimement penser que cela manque terriblement d'originalité.
Alors, pourquoi est-ce que ça marche ? D'abord, parce qu'il y a une vraie histoire, des coups de théâtre et des effets spéciaux bluffants. Ensuite parce que les dialogues sont remplis d'humour. Tony/Downey a toujours la tchatche et c'est tant mieux ! Même son rapport à l'armure (aux armures devrais-je plutôt dire) est parfois tourné en dérision, à l'image des scènes faisant intervenir un nouveau prototype, vraiment révolutionnaire... mais pas encore totalement au point.
Finalement, on laisse passer les facilités, les copiages et les invraisemblances (par exemple des habits qui devraient brûler et qui ne brûlent pas...) pour profiter de l'histoire et du spectacle. C'est un divertissement très correct, bien qu'un peu décevant.
22:59 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
mardi, 30 avril 2013
Tu seras sumo
C'est en gros ce que déclare un père (veuf) à l'un de ses deux enfants, son fils cadet Takuya. Nous sommes dans le nord du Japon, sur l'île d'Hokkaido :
Ce documentaire de la Française Jill Coulon, tourné en 2008, traite du difficile apprentissage que va suivre le jeune homme, à Tokyo (au sud). Dans cette école de sumo, les jeunes sont totalement pris en charge, mais doivent vivre en communauté.
C'est la voix du jeune homme qui rythme les séquences tournées par la réalisatrice. Le tout début permet d'avoir un aperçu de la vie encore assez traditionnelle des provinciaux d'Hokkaido. Takuya, lui, achève le lycée (il va décrocher son bac) et ressemble à beaucoup de grands adolescents. Il a une bande de potes, aime s'amuser et, s'il est un sport qui le passionne, c'est le judo.
Mais c'est le père qui commande. Je pense, de surcroît, que la famille n'est pas riche : il n'est visiblement pas question de financer de coûteuses études pour le jeune homme, qui ne semble pas particulièrement doué en quoi que ce soit.
La deuxième partie du film nous fait découvrir la vie en collectivité de cette brochette de gars obèses, plutôt sympas, mais avec une hiérarchie à respecter. Le nouveau va devoir faire ses preuves et, avant toute chose, il faut qu'il prenne du poids. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'ils bouffent à longueur de journée, mais ils s'empiffrent quand même sacrément ! (Et moi qui avais mangé juste avant la séance... La digestion fut laborieuse.)
On nous montre aussi les phases d'entraînement. C'est assez répétitif et très physique.
On découvre aussi quelques aspects du combat de sumo. Le poids seul ne suffit pas, même si le "héros" se rend vite compte qu'il y a quand même une masse minimale à atteindre (autour de 130 kilos) si l'on veut espérer faire carrière. Faute d'avoir un corps de rêve, les lutteurs prennent grand soin de leur chevelure, dont l'organisation est presque un art.
On finit par voir ces jeunes en compétition. Ils passent en lever de rideau, la soirée étant réservée aux combats de têtes d'affiche. Les assauts sont en général très courts. On suit les progrès réalisés par Takuya, qui passe par différentes phases.
Si vous voulez savoir jusqu'où il va aller, vous pouvez vous laisser tenter par ce documentaire un peu aride, mais passionnant.
22:30 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
lundi, 29 avril 2013
Cloud Atlas
Pas facile de voir ce film quand on est un pauvre petit cinéphile aveyronnais. Sa durée (2h45), la complexité de son intrigue (héritée du roman qui l'a inspirée : Cartographie des nuages, de David Mitchell) ont rebuté bien des programmateurs. Du coup, il faut être vigilant et saisir l'occasion quand elle se présente, par exemple une séance unique dans un cinéma tarnais.
L'intrigue entremêle six histoires, qui se déroulent à six époques différentes. Évidemment, elles sont toutes liées. Quelques indices sont disséminés dans le film pour permettre aux spectateurs attentifs de combler les vides. La narration est elle-même découpée : les six histoires ne nous sont pas racontées à la suite l'une de l'autre, dans l'ordre chronologique. Il faut donc s'accrocher un peu... ou, tout simplement, se laisser emporter par le flot romanesque.
Contrairement à ce que certaines images pourraient laisser croire de prime abord, l'histoire la plus ancienne se passe au milieu du XIXe siècle, entre l'océan Pacifique et la Californie. Le "bien" y est incarné par un jeune homme de bonne famille, révolté par l'esclavage et habité par un amour profond pour sa jeune épouse, qu'il espère retrouver bientôt.
Le "mal" est incarné par un médecin cupide, mais aussi un capitaine autoritaire, des marins racistes et un père de famille bouffi de préjugés. J'ai trouvé cet épisode un peu trop appuyé.
Le journal qu'a rédigé le jeune homme sert de lien avec la deuxième histoire, qui se déroule au Royaume-Uni, dans les années 1930. Le "bien" y est représenté par un apprenti musicien homosexuel, intrigant sur les bords (Ben Whishaw, révélé par Le Parfum, vu récemment dans Skyfall), et par son jeune amant très conventionnel.
Le héros affronte l'intolérance sexuelle de l'époque, mais aussi l'ambition égoïste de son nouvel employeur, un compositeur sur le déclin. C'est dans la bibliothèque de celui-ci que l'apprenti musicien trouve la moitié d'un livre de voyage, celui écrit au siècle précédent.
Une partie des lettres que s'échangent les deux jeunes homosexuels (celles conservées par l'amant conventionnel, qui a vieilli) se retrouvent dans la troisième histoire, sise au début des années 1970. L'autre pont entre les deux histoires (qui sert aussi de fil rouge à l'ensemble) est la symphonie composée par le jeune homosexuel, intitulée Cloud Atlas. Dans cette partie, une ravissante journaliste (Halle Berry, qui n'a jamais aussi bien joué... et qui est plus craquante que jamais) incarne l'engagement civique, face à l'appât du gain et au meurtre.
Le style n'est pas sans rappeler la Blaxploitation, voire les films de dénonciation de cette époque (Votez McKay, Les Trois Jours du condor, Les Hommes du président, par exemple). Dans son enquête, elle est successivement épaulée par trois hommes et un garçon. C'est assez trépidant.
Le livre tiré de son enquête nous mène, une quarantaine d'années plus tard, à un éditeur un peu fantasque, qui va se retrouver prisonnier d'un drôle d'institut.
C'est l'épisode le plus burlesque de la série. C'est un peu "Panique à la maison de retraite", avec ces papys et ces mamies en apparence si vulnérables... mais qu'il ne faut pas sous-estimer. Face à eux se dresse une infirmière intraitable, interprétée par Hugo Weaving, qui incarne un "méchant" à chaque époque. Car, en effet, les ex-frères Wachowski ont distribué les rôles de manière que certains acteurs interprètent plusieurs personnages, à des époques différentes (parfois en changeant de sexe). J'ai trouvé un tableau synthétique sur un blog spécialisé :
Concernant cette histoire, sachez que l'antagonisme pluriséculaire qui oppose Écossais et Anglais va tirer nos vieillards d'un bien mauvais pas !
Le livre qui raconte les avanies qu'ils ont subies devient un film, que l'on retrouve dans la cinquième histoire, qui se déroule dans un futur proche, celui d'un monde hyper-technologique et hyper-inégalitaire. Aux commandes, les Wachowski nous livrent une resucée très convaincante de Matrix, sans pseudo-philosophie à la con.
Jim Sturgess y incarne un résistant absolu, qui noue une relation très forte avec un clone atypique (l'exquise Donna Bae, vue notamment dans The Host). C'est une nouvelle version du Neo de Matrix, cette fois sous la forme d'un duo. Les réalisateurs ont aussi puisé à d'autres sources que leur propre mythologie. Pêle-mêle, on retrouve notamment un peu du Cinquième élément, de Brazil, de Blade Runner et de V pour Vendetta. C'est vraiment un épisode épatant et je regrette qu'il n'ait pas été exploité jusqu'au bout.
Les échos de cette époque tumultueuse sont perçus dans la dernière histoire, qui se passe quelque 200 ans plus tard.
La Terre est peuplée de trois groupes d'individus, deux sont des sortes d'hommes préhistoriques, parlant une langue dégradée. Le troisième est une élite en voie de dépérissement. L'action conjuguée d'un chef de famille taraudé par un mauvais génie (Tom Hanks, excellent tout au long du film) et d'une femme d'exception (Halle Berry, surprenante) va leur permettre de connaître le fin mot de l'histoire...
... enfin presque, parce qu'on ne nous dit pas tout. Même quand l'histoire est terminée, il reste des blancs, que le conteur s'est bien gardé de combler :
C'est "l'époque bonus", la septième, preuve que tout n'a pas disparu. Mais où diable se trouve-t-on ?
Bilan de tout cela ? Un film-testament. Les Wachowski, épaulés par le talentueux Tom Tykwer (réalisateur naguère du Parfum), font l'apologie de l'amour véritable, celui qui unit deux âmes-sœurs, qui peuvent être un homme et une femme, deux hommes, un homme et un clone, un Blanc et une Noire (ou une Asiatique)... Ils y tracent une limite claire entre ce qu'ils perçoivent comme bon (la lutte pour l'égalité des droits, la création artistique, la dénonciation de la corruption, des mauvais traitements...) et ce qu'ils stigmatisent comme mauvais (le racisme, l'homophobie, l'esclavage, la cupidité, l'autoritarisme, la bigoterie...).
A l'amour et à l'engagement politique s'ajoute la création artistique (au sens large) comme moteurs de l'existence. Écrire, composer, jouer et filmer donnent aussi un sens à la vie. Dit comme cela, ça a l'air pompeux, mais c'est plus subtilement énoncé dans le film. On peut laisser tomber le propos sur la réincarnation et se plonger dans ces images superbes, illustrant une intrigue foisonnante, servie par des acteurs excellents.
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dimanche, 28 avril 2013
Les Croods
Ce nom à coucher dehors est porté par les six membres d'une famille de Néandertaliens aux prénoms tout aussi improbables. A sa tête se trouve le papa, Grug :
C'est un costaud, le papa. Il a des bras épais comme trois cuisses, un coeur gros comme ça... mais une cervelle de moineau, qu'il va devoir pourtant mettre à contribution pour sortir sa famille du pétrin. Sa compagne est Ugga :
Pour camper l'épouse de l'Américain (très) moyen, on a choisi une belle plante entre deux âges, certes amoureuse de son mari, mais d'abord soucieuse de la survie du clan familial. Elle est donc plus ouverte d'esprit. Le couple a eu trois enfants, l'aînée étant Eep :
On ne le voit pas très bien comme cela, mais elle est bâtie comme une gymnaste est-allemande. A l'image de la majorité des membres de la famille, elle a un fort tempérament et n'hésite pas à donner des coups. Cette rouquine révoltée, un peu casse-cou, n'est pas sans rappeler la Rebelle de Pixar (en moins sage). Notons que ces hommes préhistoriques ont dû inventer l'épilation au silex, puisque la demoiselle arbore des aisselles exemptes de toute pilosité ! Son frère cadet porte le doux prénom de Thunk :
C'est un gros bêta, qui n'a ni la force ni la réactivité de son père. On est prié d'espérer que c'est un ado en devenir, une image guère flatteuse de ces millions de moutards américains gavés de hamburgers et de pop corn. Sa petite soeur, Sandy, mérite elle le détour :
Cette adorable sauvageonne est dotée d'une coiffure à désespérer tous les "visagistes" de Paris. J'aurais tort d'oublier le sixième élément de la troupe, la grand-mère :
Celle-ci apparaît au départ plutôt acariâtre, à l'image de la mamie de Sid dans L'Age de glace IV. (Eh, oui, on se marque à la culotte dans les films d'animation !). L'un des fils rouges de l'histoire est la détestation que semblent éprouver Grug et sa belle-mère l'un pour l'autre, le premier y trouvant une motivation pour tenter d'avoir des idées (afin de se débarrasser de la vioque).
Au quotidien, la famille pense d'abord à se nourrir. Cela nous vaut une hilarante scène de course-poursuite, au début du film :
Les animaux sont vus comme des rivaux dans la quête de nourriture. Ce sont parfois des proies... plus souvent des prédateurs. L'environnement des habitants de la caverne regorge de grosses bébêtes dangereuses, comme celle-ci...
... et celle-là :
D'autres animaux, moins impressionnants de prime abord, ne sont pas à prendre avec des pincettes, tels les singes batailleurs :
Mais les plus redoutables sont incontestablement ces oiseaux colorés (magnifiquement rendus par la 3D, une des grandes réussites du film), qui volent en groupe... et ont un appétit vorace, comme va le découvrir une baleine terrestre (!) :
Signalons que le gros minet, à la tête disproportionnée, va jouer un rôle essentiel dans les pérégrinations de la famille. L'un des moments-clés est celui où l'un des personnages découvre que, comme lui, le félidé a peur du noir !
Cette terreur, savamment entretenue par le papa, gouverne la vie de la troupe. Le père voudrait garder son petit monde auprès de lui, engoncé dans ses habitudes, refusant la nouveauté. Sa fille va braver les interdits, découvrir le feu (anachronisme, mais bon, cela nous vaut de très belles scènes en 3D) et faire une rencontre déterminante :
Guy (prononcer "Gaille") a plutôt le physique d'un homo sapiens. On nous le présente donc comme plus faible physiquement que les Néandertaliens. Mais il est diablement inventif et plus débrouillard que ces derniers. Il est accompagné d'un étrange animal, qui lui sert accessoirement de ceinture :
On remarque d'ailleurs qu'au fur et à mesure que l'histoire avance, les humains s'attachent de plus en plus à des animaux, qui deviennent domestiques. C'est le cas du père comme de la petite fille (que cela contribue à "civiliser")... mais aussi du fils balourd :
Poussés par des mouvements tectoniques brutaux (nouveau décalque de L'Age de glace...), humains comme animaux cherchent à sauver leur peau. La collaboration cahotique entre Néandertaliens et sapiens va leur permettre, après moult péripéties, d'atteindre la terre promise.
Pendant un peu plus d'1h30, on a droit à une pluie d'images superbes et à une foultitude de gags. Même si l'histoire n'est pas d'une originalité débordante, on passe un très bon moment.
P.S.
Je déconseille toutefois le film aux jeunes enfants, qui ne comprendront pas tout et risquent d'avoir peur à plusieurs reprises.
13:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
samedi, 27 avril 2013
Hannah Arendt
Ce n'est pas un biopic consacré à la philosophe germano-américaine. Le film tourne autour de sa perception du procès d'Adolf Eichmann, un des rouages essentiels de l'extermination des juifs par les nazis et leurs collaborateurs. Toutefois, certaines scènes nous font revivre une partie du passé de l'héroïne, principalement la période étudiante, en Allemagne.
La réalisatrice nous brosse d'abord un tableau de l'intelligentsia de la côte Est des États-Unis. On remarque le poids dans anciens réfugiés européens, encore en 1960-1961. Le seul élément du contexte américain qui nous soit donné est la campagne présidentielle de 1960, qui voit John Fitzgerald Kennedy s'opposer au vice-président sortant, Richard Nixon.
Le paradoxe de ce film est de nous montrer la puissance intellectuelle d'une femme qui, dans sa vie personnelle, a connu bien des avanies. Dans sa jeunesse, elle a été la "groupie" crédule du philosophe Martin Heidegger qui, par la suite, s'est compromis avec le nazisme. Plus tard, elle a rencontré celui qui est devenu l'homme de sa vie, Heinrich Blücher. Dans le film, celui-ci est l'un des rares à la soutenir dans la tempête... mais c'est un compagnon infidèle. Enfin, la réception des articles écrits par Hannah Arendt sur le procès a été très mauvaise ; elle fut copieusement injuriée, diffamée... et perdit bien des amitiés.
Le premier moment-clé du film est donc le séjour de la philosophe en Israël, un État pour lequel, bien que juive, elle n'éprouvait pas d'affection particulière. On la voit déroutée par le déroulement du procès et cet accusé qui ne correspond pas au profil de l'antisémite maladif auquel elle s'attendait. On sent son désir de comprendre et de faire comprendre la complexité de l'époque, quitte à parler de la collaboration de certaines élites juives avec les autorités nazies.
La réalisatrice a inséré des images d'archive, pas forcément les plus pertinentes. Mais cela permet au public peu familier de cette histoire de découvrir un important bureaucrate nazi et certains témoignages de survivants du génocide. Le procès a aussi servi à cela.
Cette séquence et celles qui suivent voient donc s'élaborer, au fur et à mesure, la grille d'analyse qui va mener la philosophe à écrire une série d'articles (pour le magazine The New Yorker) puis un livre sur la "banalité du mal" :
Il faut signaler la composition re-mar-quable de l'actrice Barbara Sukowa qui, si elle ne ressemble pas physiquement à la philosophe âgée, réussit à l'incarner de manière stupéfiante.
Il y a bien sûr le tabagisme maladif d'Hannah Arendt, son accent lorsqu'elle parlait anglais (et, à de rares occasions, français), son indulgence pour les petits péchés de ses proches, sa force de travail et sa rigueur intellectuelle, qui ne se préoccupait guère des convenances. C'est au final un beau portrait de femme, qui culmine dans l'une des dernières séquences, qui voit l'héroïne expliquer sa démarche et défendre ses conclusions devant un amphithéâtre rempli d'étudiants finalement acquis à sa cause, malgré la contestation des mandarins de l'université. Au passage, elle règle son compte à l'une des théories de son ancien maître et amant (Heidegger), sur la pensée et la morale.
Ce film est donc très riche et son intérêt ne se limite pas au sujet principal. Incidemment, on perçoit le début d'une certaine sacralisation de la Shoah, voire de son instrumentalisation. La démarche de la philosophe a au contraire incité des historiens à retravailler le sujet. Des années plus tard ont été publiés des livres (comme celui de Christopher Browning) qui, fondés sur des cas concrets, ont donné raison à Hannah Arendt :
P.S.
Au cours du film, on apprend qu'elle avait fui l'Allemagne pour la France, où elle a résidé entre 1933 et 1940. Cette année-là, comme nombre d'étrangers, elle a été enfermée dans un camp d'internement, celui de Gurs (situé dans l'actuel département des Pyrénées-Atlantiques, il est entouré en rouge sur la carte), dont elle est par la suite parvenue à s'enfuir :
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jeudi, 25 avril 2013
The Land of hope
Le titre est bien entendu ironique, à l'image du roman de Zola La Joie de vivre. Il est plus question de désespoir que d'espoir, même si le film ouvre des perspectives. L'histoire se déroule dans une préfecture imaginaire du Japon, Nagashima, mot-valise résultant du télescopage de Nagasaki et Fukushima, dont il est d'ailleurs question à plusieurs reprises.
Le scénariste imagine que ce qui s'est produit en mars 2011 à Fukushima arrive à nouveau, dans une zone plutôt rurale, pas très éloignée de la mer et d'une centrale nucléaire. Il choisit de mettre l'accent non pas sur les victimes directes, mais sur les victimes secondaires, ceux qui vivaient dans la zone dangereuse (ou à proximité immédiate) et qui ont subi les conséquences des radiations.
On suit principalement trois couples. Le héros est le père, agriculteur semi-retraité, dont l'épouse est atteinte de démence sénile. Au début du film, il cohabite avec son fils et sa belle-fille. Lui est un gamin attardé de 30 ans. Elle est plus indépendante et volontaire. En face de chez eux habite une autre famille. Le film privilégie le fils et sa petite amie, encore un peu adolescents ; les événements dramatiques auxquels ils se trouvent confrontés vont les faire rapidement évoluer.
Si le contexte de la catastrophe et les réactions qu'elle a suscitées sont bien mis en scène (de l'opacité des autorités au rejet de certains habitants du reste du Japon), j'ai trouvé que les scènes familiales étaient surjouées voire mal jouées (surtout de la part de l'acteur qui incarne le fils du patriarche, assez insupportable).
Le couple âgé fonctionne "à l'ancienne" : c'est l'homme qui domine, avec le cas particulier de l'épouse mentalement dérangée. Même si sa maladie n'est pas montrée comme un sujet de moquerie, j'ai été gêné par l'accumulation facile : le couple vit plusieurs déchirements et, en plus, l'un des deux a perdu la tête. Dans leur relation subsiste un seul moment de grâce, quand l'épouse s'est enfuie du domicile et a gagné la zone interdite. Elle imagine revivre la Fête des morts, en costume traditionnel. Son mari finit par la retrouver et joue le jeu, pendant quelques instants. C'est un beau moment de cinéma, hélas noyé dans un ensemble maladroit.
Le couple formé par le fils et la belle-fille est plus moderne. C'est elle qui prend les choses en mains. Sa grossesse influe sur ses choix. Là, par contre, j'ai trouvé intéressante la mise en scène de sa phobie des radiations. Inconsciemment, elle rend la situation plus difficile pour son jeune mari... mais c'est peut-être celle qui a le plus la tête sur les épaules.
Le troisième couple est le plus volatile. Au départ, on prend le jeune homme pour un petit con immature. Il se révèle généreux et soudainement plus intéressant, pendant que sa copine perd ses illusions d'adolescente. Leur parcours, en moto, les mène en plusieurs endroits, tous symboles de désolation. Mais leur couple en sort fortifié.
Cela donne un film long, avec des maladresses, mais aussi des qualités et quelques instants privilégiés. A chacun de juger s'il mérite le déplacement.
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mardi, 23 avril 2013
Oblivion
Cet "oubli" est l'amnésie programmée dont souffre le personnage principal, Jack (Tom Cruise, assez transparent). Il est l'un des derniers humains présents sur une Terre qui a été dévastée par une guerre nucléaire. Sa mission de 5 ans est sur le point de s'achever, et lui de partir pour Titan (un satellite de Saturne) où l'humanité s'est réfugiée.
Pour des raisons de sécurité, la mémoire des employés exerçant des missions délicates est effacée au bout de 5 ans. Mais pourquoi diable rêve-t-il de cette femme brune (Olga Kyurylenko, évidemment superbe, mais non moins évidemment potiche) qui semble l'accompagner au sommet de l'Empire state building ?
Un mystère plane donc sur la première partie du film. On suit le héros dans son travail quotidien, dangereux parce que sur la planète survivent des envahisseurs (qu'il n'a jamais réellement vus). La tension monte. Le tout est servi par une très bonne lumière, des décors superbes et une musique bien choisie.
L'action démarre vraiment quand une tour commence à émettre un signal vers l'espace. Jack se pose de plus en plus de questions. C'est parce qu'il ne va pas suivre la procédure officielle qu'il va découvrir la vérité sur ses employeurs, sur ce qui est arrivé à la Terre... et sur lui-même.
Le problème est que le scénario est mal ficelé. Tantôt les révélations nous sont balancées brutes de décoffrage, tantôt l'on reste dans les sous-entendus qui n'en disent pas assez. Voilà pourquoi, dans la dernière demi-heure, il a fallu insérer un retour en arrière qui explique tout.
Les dialogues ne sont pas toujours très bons. On sent aussi parfois que les acteurs ont eu du mal à jouer devant des fonds bleus ou verts. Un esprit pointilleux trouverait des choses à redire aux scènes d'action. Il y a même une énorme bourde. Quand Jack se retrouve prisonnier d'un groupe de mystérieux rescapés, il se prend une balle, qui fait un joli trou dans sa combinaison. Par contre, il ne saigne pas et, deux minutes plus tard, le voilà sur pieds comme si de rien n'était ! Dans un premier temps, on voit encore le trou sur sa combinaison mais, très vite, il disparaît de l'écran !
Bref, si vous êtes fans de science-fiction et pas trop regardants sur la qualité des dialogues et la cohérence du scénario, ce film peut constituer un agréable divertissement digestif. Sans plus.
22:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
lundi, 22 avril 2013
Guerrière
L'héroïne, Marisa, est une jeune femme paumée. Fille unique, elle a été élevée par une mère célibataire, qui gère une supérette.
Dans son entourage, le personnage solaire est le grand-père Franz, qui adore sa petite-fille, mais qui, dès son plus jeune âge, a voulu en faire une combattante : il lui a imposé des marches, le sac à dos rempli de sable et, de temps à autre, cet ancien militaire lui a livré le fond de sa pensée sur le passé de l'Allemagne... ainsi que sur son présent.
On ne s'étonne donc pas de voir la jeune femme fréquenter un groupe de néo-nazis. Pour les hommes, à une exception près (celui qui va se faire exclure du groupe... et encore), le réalisateur ne fait pas dans la dentelle. Il nous présente ces garçons comme une bande d'abrutis tatoués, qui passent leurs journées à écouter de la musique débile et à se saouler à la bière. Ah, j'oubliais : de temps en temps, ils se défoulent sur des "pas-comme-il-faut" : des "niakoués", des "bougnoules" (on me pardonnera de ne pas avoir retenu les termes allemands), des costards-cravates, des cheveux-longs... (On pourrait trouver ces scènes quelque peu complaisantes : c'est rythmé, parfois presque humoristique : le réalisateur n'est pas dans la simple condamnation ; il nous montre une bande de jeunes qui s'amusent, même si c'est de manière très contestable.)
Le film a donc un aspect documentaire dans sa description de ces jeunes d'extrême-droite, à qui l'on bourre le mou à l'aide de films de propagande hitlériens. Toute cette engeance se garde bien d'ouvrir le moindre bouquin, alors que ceux qui les instrumentalisent sont plutôt des intellos.
Du côté des femmes, le portrait est plus en nuances. Il y a bien sûr l'héroïne, excessive en tout, aussi bien dans ses haines (elle peut aller jusqu'à tenter de tuer) que dans son amour (dans des scènes "intenses" avec son partenaire masculin, Sandro, le chef de la bande de nazilllons). C'est en fait une romantique frustrée, capable de s'ouvrir à autrui... ce qui va faire basculer le film.
Deux autres filles sont mises en valeur. La plus effacée des deux est Melanie, que j'ai d'abord prise pour une lesbienne :
Dans la dernière demi-heure, elle va révéler à ses camarades le secret qui a bouleversé sa vie.
La troisième est un rejeton de la classe moyenne. Svenja est aussi une enfant unique (quand on vous dit que les Allemands ne font plus de gosses !), élevée par sa mère et son beau-père.
La première est un peu larguée. Le second est strict, mais l'adolescente s'ingénie à déjouer sa surveillance. Le conflit naissant et l'incompréhension mutuelle vont la pousser à rejoindre les néo-nazis, dans une démarche voulue comme une transgression.
Il me reste à présenter l'élément déclencheur, le garçon émigré d'Afghanistan (en rouge sur la carte), qui tente de rejoindre la Suède (en vert). Auparavant, il est passé par l'Iran, la Turquie, la Grèce et la France :
On ne sait pas trop ce qui attire l'héroïne chez ce jeune homme, prénommé Rasul. Il est paumé, comme elle, mais cela ne suffit pas à tout expliquer. Paradoxalement, il se pourrait que les leçons de son grand-père aient servi à quelque chose. En tout cas, cette "bifurcation" (qui s'ébauche pendant que le petit copain nazi est en taule), au départ source d'espoir, va donner un tour encore plus noir à cette histoire déjà plutôt triste.
A conseiller aux coeurs bien accrochés.
17:12 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
dimanche, 21 avril 2013
Promised Land
Gus Van Sant a réalisé un film à la fois hollywoodien et subtil sur la question du gaz de schiste. Co-écrit par l'interprète principal, Matt Damon, le scénario se veut ouvertement écologiste... et pourtant... le début ne fait en rien penser à un film militant... et c'est très bien !
Pendant environ trois quarts d'heure, on suit les employés de la puissante compagnie gazière Global dans leur travail de prospection... de signatures (celles des propriétaires qu'il faut convaincre de vendre). A ma grande surprise, c'est le ton de la comédie qui domine dans cette partie. Le duo formé par Frances McDormand (l'organisée, la tenace, la citadine) et Matt Damon (le créatif, l'émotif, le rural) fonctionne à merveille, les deux acteurs s'étant visiblement plu à se chambrer mutuellement.
Au niveau de la réalisation, dès le début, on comprend qu'on n'a pas affaire à un manchot. Soyez attentifs à la séquence du restaurant, qui voit le héros décrocher une nouvelle mission, susceptible de lui valoir une grosse promotion. Cela commence par une contreplongée du fond du lavabo, où semble bouillonner de l'eau. (A cette scène répond une autre, dans l'avant-dernière séquence du film.) Cela continue par le parcours qui mène des toilettes à la table, où Steve/Matt se retrouve face à son supérieur hiérarchique, puis au patron lui-même.
D'autres moments savoureux confrontent Frances McDormand au gérant de la supérette (qui vend de la nourriture, des fringues, des armes... et des guitares !). Là encore le ton de la comédie l'emporte, sur fond de possibilité de romance. Signalons la performance de Titus Welliver :
L'habileté de Gus Van Sant est de ne pas diaboliser ces employés, qui ne savent visiblement pas tout du gaz de schiste. C'est là que le film devient vraiment puissant, puisqu'il va opposer des "gens bien", qui ont tous d'excellentes raisons de défendre leurs idées.
Les "héros" voient plusieurs personnes se mettre en travers de leur chemin. La première d'entre elles est Frank Yates, un ingénieur à la retraite, qui enseigne bénévolement les sciences aux jeunes du village. Il est incarné par le vétéran Hal Holbrook, que l'on a vu récemment dans Lincoln :
Mais la menace la plus grande vient d'un inconnu, qui se présente comme un fils de fermiers victimes des compagnies gazières devenu militant anti-gaz de schiste. Il est incarné par le co-scénariste du film, John Krasinski :
Curieusement, il a une apparence qui m'a fait penser à celle du réalisateur de Gasland, Josh Fox (que l'on voit aujourd'hui davantage en costume-cravate) :
Au conflit socio-politique qui oppose le commercial gazier à l'écologiste s'ajoute la rivalité sentimentale. En effet, l'une des institutrices locales (Rosemarie DeWitt, impeccable), qui possède de surcroît une belle propriété, semble très sensible au charme des deux hommes. Steve Butler paraît moins flamboyant, lui l'employé à qui tout réussissait jusque-là. A ce propos, je pense que le choix du nom n'est n'est pas le fruit du hasard. Ce n'est pas tant lié à l'un des personnages d'Autant en emporte le vent qu'à la signification, en anglais, du mot "butler" : le majordome. Le héros se fait le valet d'une puissante compagnie, qui n'a que faire de la qualité de vie des habitants de cette contrée perdue.
Le film bascule dans cette deuxième partie, qui voit une partie grandissante des habitants repousser les commerciaux, parfois avec violence. Le contraste est d'autant plus saisissant que, la crise aidant, ils semblaient au départ très réceptifs aux arguments (principalement pécuniers) de Matt Damon et Frances McDormand. Tout à coup, on perçoit les formules de politesse et les plaisanteries pour ce qu'elles sont : un moyen d'endormir la méfiance du client, de gagner sa sympathie, pour arriver à ses fins. Il reste que Steve est intimement persuadé de rendre service à ces ruraux qui vivent dans la précarité. Il leur apporte la sécurité financière, un avenir pour leurs enfants, voire la fortune.
La troisième partie du film, plus courte que les deux premières, s'articule autour de deux retournements, que je me garderai bien de révéler ici. Elle donne plus de force à l'histoire, même si la fin est un peu convenue (mais ouverte). Les auteurs ont voulu montrer que le plus important était de dire la vérité, que c'est aux populations de faire leur choix, pas aux grands groupes. Du coup, le message véhiculé par le film est plus largement politique que strictement environnemental, ce qui pourrait décevoir certains militants purs et durs. Mais, selon moi, cela rend le film meilleur.
P.S. I
Où en est-on de l'exploitation des gaz de schiste en France ? Le sujet pourrait redevenir d'actualité, si la technologie de l'arc électrique s'avère efficace (et rentable).
P.S. II
L'exploitation du gaz de schiste n'est pas la seule activité qui recourt à la fracturation hydraulique. C'est le cas aussi de la géothermie. Même si les quantités d'eau mises en oeuvre sont bien moindres, la "stimulation" s'effectue à des profondeurs comparables.
P.S. III
Le combat des ruraux pour protéger leur cadre de vie contre l'installation d'une activité polluante (mais créatrice d'emplois et de richesses) ne concerne pas que le gaz de schiste. Il me semble que les questions soulevées par Promised Land ne sont pas sans parenté avec la situation dans le département de l'Orne, même si, dans ce cas précis, les défenseurs de l'environnement sont davantage des "pipoles" et des gens de la "Haute"...
P.S. IV (Après j'arrête, c'est promis !)
Une partie (minoritaire) du financement du film vient d'Imagenation Abu Dhabi, une société sise aux Emirats arabes unis, qui, d'après le rapport annuel de British Petroleum, figurent parmi les dix premiers producteurs de pétrole et possèdent d'énormes réserves aussi bien de gaz que de pétrole. On pourrait donc suspecter le film de partialité, les monarchies du Golfe arabo-persique n'ayant pas intérêt à ce que l'exploitation de gaz non conventionnel se développe. Mais le scénario semble avoir été écrit indépendamment du financement et Matt Damon a répondu aux accusations, notamment dans les colonnes du Figaro.
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samedi, 20 avril 2013
Effets secondaires
Ce polar médico-sentimental de Steven Soderbergh a décontenancé une partie de la critique. On va voir qu'il n'est pas tout à fait ce à quoi l'on pouvait s'attendre... mais est-ce un mal pour autant ?
L'action tourne autour de quatre personnages principaux. Ronney Mara incarna Emily, l'épouse perturbée, aux multiples facettes. L'actrice, que je n'avais vue auparavant que dans The Social Network, m'a impressionné par la variété de son jeu :
L'autre personnage féminin de premier plan est la psychiatre, jouée par Catherine Zeta-Jones, dont la quarantaine épanouie a de quoi faire enrager toutes les "pisseuses" d'Hollywood :
Face à ces dames, il fallait du lourd, physiquement et intellectuellement. Pour le physique, la production a choisi un beau gosse aux muscles saillants, Channing Tatum, qui incarne le mari d'Emily :
Le pauvre garçon casse un peu son image dans ce film, puisqu'il y est présenté comme un type assez crédule (il s'est fait piéger par un collègue de travail), pas super-performant au pieu (son agent ne lui a pas dit qu'on risquait de l'associer à l'éjaculation précoce ?)... et qui, de surcroît, se fait poignarder comme une buse.
Le "héros" est donc l'autre mâle dominant, le psychiatre aux idées généreuses, j'ai nommé Jude Law, que l'on a récemment vu exceller dans Anna Karenine (et que Soderbergh avait fait tourner dans Contagion) :
L'acteur nous révèle un nouvel aspect de son talent : il parle français. On peut le constater en regardant le film en version originale sous-titrée. Au début, le psychiatre, qui est accrédité comme expert auprès de la police et de la justice, est requis pour interroger un drôle de client, censé être haïtien. Notons que l'acteur (sans doute américain ou canadien) qui incarne ce dernier s'exprime nettement moins bien que Jude Law dans la langue de François Hollande.
L'intrigue entremêle plusieurs thématiques : le désarroi d'une partie de la bourgeoisie américaine, le rôle de la spéculation boursière, la puissance des groupes pharmaceutiques, le manque d'éthique de certains professionnels de la médecine et la difficulté de faire durer une histoire d'amour.
Il est donc d'abord question de tromperie(s). L'histoire semble commencer de manière limpide, assez linéaire, sans guère de surprise. Mais, très vite, à quelques signes, on comprend que la réalité est plus complexe que ce que l'on voit. Le jeu consiste à trouver qui trompe qui. Attention toutefois : on peut être trompeur et se faire tromper à son tour. De même, on peut avoir été trompé et devenir trompeur. C'est très habile sur le plan scénaristique et, comme c'est très bien joué, j'ai passé un excellent moment.
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vendredi, 19 avril 2013
La Religieuse
Guillaume Nicloux s'est donc lancé dans une nouvelle adaptation du roman de Denis Diderot. Ce réalisateur a pris le risque de changer de style, lui qui a réussi dans le polar (voir notamment La Clef, injustement "descendu" par des critiques crétins à sa sortie).
Le film baigne logiquement dans une atmosphère religieuse : le fond a déteint sur la forme, d'un classicisme épuré (comme on dit dans les revues pédantes). Ce n'est pas sans rappeler d'autres œuvres comme le Thérèse d'Alain Cavalier et surtout La Vie de Marianne de Benoît Jacquot. Hélas, la comparaison ne joue pas en faveur de La Religieuse, dont le rythme, volontairement lent, est moins maîtrisé que dans les deux "modèles" cités.
Il est cependant un point commun qui explique l'intérêt que chacun de ces films a suscité : le talent de la jeune actrice principale. Thérèse avait révélé Catherine Mouchet (auparavant seulement connue des théâtreux) et La Vie de Marianne Virginie Ledoyen (déjà remarquée dans L'Eau froide, La Cérémonie et La Fille seule). Il va falloir suivre la petite Pauline Etienne. On lui souhaite un meilleur avenir que ses deux consœurs, les carrières de ces dernières n'ayant pas totalement confirmé leurs débuts étincelants. (Même si Ledoyen était très bien récemment dans Les Adieux à la reine.)
Cette jeune femme se retrouve confrontée à de fortes personnalités, deux mères supérieures aux influences très différentes. La "méchante" est incarnée par une Louise Bourgoin surprenante... une véritable saleté, très loin de son rôle dans Les Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec ! La "gentille" est jouée par Isabelle Huppert, qui semble enfin consentir à vieillir... mais avec un personnage finalement très coquin !
N'oublions pas les interprètes des seconds rôles, parmi lesquels je distingue Françoise Lebrun (adorable) et Agathe Bonitzer (piquante).
Il est donc dommage que la réalisation (et le montage) n'aient pas un peu mieux servi cette brochette d'actrices de talent. Le film n'en reste pas moins efficace dans la dénonciation du totalitarisme religieux qui sévissait dans certains couvents français, au XVIIIe siècle. Mais il aurait pu être encore plus fort.
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mardi, 16 avril 2013
Le Repenti
Le cinéaste algérien Merzak Allouache s'est penché sur l'histoire récente de son pays de naissance : les conséquences de la guerre civile, qui a ensanglanté l'Algérie principalement dans les années 1990.
On suit d'abord un "blédard", Rachid, ancien des maquis islamistes, qui rejoint sa famille et espère bénéficier d'une amnistie.
Dès le début, on comprend que la "concorde civile" prônée par Abdelaziz Bouteflika ne suscite pas l'enthousiasme de la population... surtout qu'un homme habitant le village des parents du "héros" a vu sa famille massacrée par les islamistes.
Son salut va peut-être venir du commissaire de police auquel il s'est rendu. Mais celui-ci veut obtenir des informations en échange du nouveau statut. Il lui trouve quand même un petit boulot, en ville, dans un café, auprès d'un vieux sage qui le loge en sous-sol. Durant cette partie du film, on se demande dans quelle mesure ce jeune homme très discret a dit la vérité aux autorités. N'était-il vraiment qu'un sous-fifre ? Ne sait-il vraiment rien ? Quel est le secret qui semble le hanter ?
Dans le même bourg travaille un pharmacien encore jeune :
Il semble proche de la population, vit à l'occidentale (dans la mesure du possible). L'appartement qu'il habite est mal entretenu, quasiment pas meublé... et il s'y alcoolise presque tous les soirs, en regardant la télévision chinoise ! Il finit par y mettre un peu d'ordre lorsque débarque, à sa demande, une ravissante jeune femme, Djamila (Adila Bendimered, lumineuse) :
Qu'est-ce qui relie ces deux êtres et qu'est-ce qui va les rapprocher de Rachid ? Je vous laisse le découvrir. Le réalisateur excelle à faire monter la tension. Il part d'une scène a priori anodine, fort bien jouée. Puis il l'étire de manière à faire ressortir la douleur. De plus, il laisse planer une part de mystère, jusqu'à la conclusion de l'histoire, logique mais assez inattendue.
P.S.
Les spectateurs attentifs s'amuseront à relever l'occurrence de la France, à travers sa langue (jusque sur les panneaux de cette petite ville située loin d'Alger), ses productions (par exemple les voitures) ou la trace coloniale (le nom d'un café, par exemple) qu'elle a laissée.
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dimanche, 14 avril 2013
La Maison de la radio
Nicolas Philibert est l'un des très bons documentaristes français contemporains. Le grand public (moi compris) l'a découvert à l'occasion du superbe Etre et avoir, en 2002. Plus récemment, il a réalisé Retour en Normandie et surtout Nénette.
Aujourd'hui, il s'est attaqué à un "monument", le bâtiment qui abrite les différentes stations de radio du service public : France Inter, France Info, France Culture, France Musique, France Bleu, FIP, RFI et (normalement) Le Mouv'. Cependant, comme le film a été tourné au début de 2011 (juste après le transfert à Paris de la radio "jeunes" du groupe), celle-ci est absente à l'écran, tout comme FIP me semble-t-il.
On commence par un florilège de voix, d'abord distinctes, mais qui finissent par s'entrecroiser, se mélanger. La suite détaille la vie de cette fourmilière.
On pourra le regretter mais, vu la richesse du personnel et la diversié des programmes diffusés, seule une partie du matériau est montré à l'écran.
Comme il s'agit de radio, le travail sur le son est mis en valeur. On assiste donc à divers enregistrements musicaux (classiques bien sûr, mais aussi modernes). Cette partie est très réussie. Les artistes sont excellents, jusque dans leur perfectionnisme. J'ai aussi apprécié les moments capturés d'une fiction radiophonique (sans doute pour France Culture).
Une assez grande place est donnée à la gestion de l'information. Je regrette toutefois que l'accent soit mis sur la matinale, alors qu'il existe d'autres programmes, plus riches, en matière de traitement de l'actualité. Ceci dit, découvrir le travail quotidien des anonymes, loin des vedettes de l'antenne, est très intéressant.
D'un point de vue logistique, les spectateurs constateront avec surprise que les techniciens du son sont presque tous des hommes, alors que le secrétariat (au sens large) est assuré par un personnel quasi exclusivement féminin.
Les "petites mains" ne sont pas oubliées, l'accent étant mis sur le service du café.
En dépit des séquences humoristiques dont le film est émaillé, mon intérêt est souvent retombé à cause du choix des émissions dont une partie de la "cuisine" nous est montrée. Souvent, ce ne sont pas celles que j'écoute et les plus populaires sont, sauf exception, absentes du film. C'est globalement assez "intello bobo". Du coup, en dépit de l'intérêt factuel de telle ou telle séquence, j'ai été un peu déçu.
22:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
samedi, 13 avril 2013
Inch'Allah
L'histoire de ce film canadien, tourné en Jordanie, se déroule entre Israël et Palestine (la Cisjordanie). L'action est principalement menée par trois personnages féminins. Chloé est une jeune et compréhensive sage-femme canadienne :
Elle est incarnée par une actrice à suivre, Evelyne Brochu. La soldate israélienne Ava est jouée par Sivan Levy :
Plus connue est la Française Sabrina Ouazani, révélée jadis dans un rôle de "tchatcheuse" dans L'Esquive et vue récemment dans Des Hommes et des Dieux. Elle interprète Rand, la Palestinienne enceinte, dont le compagnon est en passe d'être jugé par les Israéliens :
Les personnages masculins ne sont pas transparents mais ils sont plutôt placés au second plan, à l'inverse de ce qui se passe d'habitude dans le cinéma commercial. (Précisons que la mise en scène est l’œuvre d'une femme, Anaïs Barbeau-Lavalette.)
L'intrigue s'appuie sur des éléments "classiques" de la représentation du conflit proche-oriental : la présence militaire israélienne en Palestine, la construction du mur de séparation, l'organisation des check-points, l'énergie brouillonne des gamins palestiniens et le recours aux attentats-suicides d'une partie des nationalistes arabes.
Le film démarre par une séquence en apparence anodine, interrompue par un événement inattendu. On découvre ensuite les personnages principaux. On est d'abord conduit à penser que tout se passe dans la continuité et que, par exemple, la femme que Chloé voit en pleurs de la fenêtre de son appartement a un lien avec ce que l'on vient de nous montrer à l'écran. En réalité, sans que cela soit dit, il s'agit d'un retour en arrière. On reverra cette séquence initiale à la fin du film, mais d'un autre œil.
Entre les deux, on aura appris à connaître la jeune sage-femme, qui tente de tout concilier : elle habite en Israël mais travaille en Palestine, où elle passe aussi une partie de son temps libre... sans parvenir à oublier son Québec natal, avec lequel elle a besoin de rester en contact. Elle aime la compagnie des femmes et des hommes, palestiniens comme israéliens.
Elle côtoie une drôle de soldate, mélange de garçon manqué et d'enfant gâtée, un peu pétasse, un peu bêtasse, mais pas mauvaise au fond. Des trois femmes, c'est le personnage le moins fouillé.
Rand fait ce qu'elle peut pour joindre les deux bouts. Elle tente de récupérer ce qu'elle peut dans une décharge et aimerait bien revoir le plus vite possible son chéri, emprisonné par l'occupant israélien auquel il s'est visiblement fortement opposé.
Tout n'est pas réussi dans le film. Le propos est parfois trop appuyé. Certaines séquences émergent toutefois, comme celles tournées dans le dispensaire, ou encore cette sortie de l'autre côté, que Chloé parvient à organiser pour ses amis palestiniens. (C'est un thème que l'on retrouve aussi dans le récent Zaytoun.)
Si la réalisatrice se garde de présenter tous les Palestiniens comme des anges victimes de démons israéliens, on sent néanmoins clairement l'engagement du propos. Pour elle, la posture de l'Occidental généreux et détaché, qui sait faire la part des choses, ne tient pas à moyen terme. Trop d'horreurs et d'injustices surviennent dans ce petit bout de terrain... au point de transformer certains individus en bombes humaines. On n'est pas obligé d'adhérer entièrement à la démonstration, mais le film a le mérite de poser certaines questions.
22:57 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film
vendredi, 12 avril 2013
4 ou 4,5 jours de classe ?
D'après un article paru dans Midi Libre jeudi 11 avril, la majorité des maires aveyronnais ont choisi de n'appliquer la réforme Peillon qu'à la rentrée 2014. Sur les 228 communes possédant au moins une école, seules 29 vont (re)passer à la semaine de 4,5 jours en 2013 :
Sans surprise, certains territoires, dont les élus penchent à gauche, ont décidé d'appliquer la réforme avec zèle :
- 4 des 8 communes du Grand Rodez (accompagnées de Salles-la-Source, qui vit dans son orbite)
- la majorité des communes du canton de Naucelle
- une bonne partie du Saint-Affricain (presque toute la communauté de communes)
- la majorité du bassin decazevillois (à l'exception notable d'Aubin)
Quelques communes (comme Najac) se retrouvent isolées dans leur démarche.
Un autre espace homogène se détache, dans le nord. Il s'agit du Carladez qui, s'il a récemment élu un conseiller général classé à gauche, n'en reste pas moins une terre encore marquée par un certain conservatisme politique. Il est possible que les choix en matière d'investissement culturel aient déterminé la position des élus locaux : depuis une bonne décennie, le Carladez se fait remarquer par un indéniable dynamisme, qui tente d'associer ruralité, tourisme et culture au sens large. Ce territoire est donc déjà bien outillé pour s'adapter aux changements induits par le passage à la semaine de 4,5 jours. Il dispose sans doute du volant d'activités et des animateurs susceptibles d'être orientés vers le jeune public qu'il faudra "occuper" intelligemment pendant le petit créneau quotidien libéré par la reventilation des heures de cours.
Je me suis aussi demandé si l'on pouvait établir un lien entre ces communes pionnières et celles qui sont sorties du paysage scolaire, les 76 (sur 304) ne possédant plus d'école (marquées par des pointillés bleus) :
Une partie de ces communes forment des blocs assez homogènes, où les enfants (scolarisés ailleurs) ne connaîtront la réforme qu'en 2014 (aucune commune coloriée en rouge ne se trouvant à proximité). On remarque qu'elles sont situées dans des bastions de la majorité départementale (à proximité de Laguiole, Entraygues-sur-Truyère et Saint-Geniez-d'Olt). Les autres communes "a-scolaires" se trouvent dans l'orbite d'un pôle qui va passer aux 4,5 jours dès septembre 2013 (autour de Decazeville, Naucelle et Saint-Affrique principalement).
Il reste un cas particulier, que j'en encadré en vert : le pôle du sud-est du département, centré sur la communauté de communes de Millau-Grands-Causses. C'est le seul territoire, où la gauche est très présente, dont les élus ont choisi de différer l'application de la réforme. L'unique commune s'engageant dès 2013 est Verrières (connue notamment pour son viaduc, qui précède celui de Millau-Creissels)... qui ne fait pas partie de la communauté de communes. Signalons qu'elle est rattachée au canton de Saint-Beauzély, et non à l'un des deux incluant une partie de Millau.
01:34 Publié dans Politique, Politique aveyronnaise, Société | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, société, actualité