Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 20 novembre 2013

Capitaine Phillips

   Paul Greengrass, à qui l'on doit (notamment) Bloody Sunday, Vol 93 et Green Zone, s'est lancé dans la mise en scène de cette histoire vraie, celle de pirates somaliens partis à l'assaut d'un cargo américain, en 2009. Aux cinéphiles avertis, cette intrigue rappellera quelque chose, puisque l'été dernier, une autre fiction (palpitante) avait abordé le même thème (avec un arrière-plan danois toutefois) : Hijacking.

   Le film sorti ce mercredi s'en démarque sur plusieurs points. Il nous propose d'abord, dans sa première partie, un portrait de ces groupes de Somaliens désœuvrés, qui attendent leur salut d'un bon coup pour le compte de mystérieux commanditaires, qui tirent les ficelles de cette lucrative activité qu'est le détournement de navires de commerce (associé à la prise d'otages). Les acteurs qui incarnent ceux qui vont mener à bien l'attaque du cargo sont inconnus... mais excellents : Barkhad Abdi (dont le personnage est indéchiffrable, charismatique et déterminé), Barkhad Addirahman (qui interprète un jeune qui doute), Faysal Ahmed et Mahat M. Ali (dans des rôles moins nuancés). Signalons que, dans la version française, seuls les Américains sont doublés, les dialogues entre les Somaliens étant sous-titrés, ce qui renforce l'impression de réalisme.

   Sans surprise, Tom Hanks "assure"... mais, là, franchement, comme une bête. Au début, on nous présente Richard Phillips comme un bon "taulier", rigoureux, méthodique et en aucun cas démago avec l'équipage. La deuxième partie du film révèle le héros... avant que la troisième n'en dévoile les faiblesses, avec quelques moments d'émotion très réussis. L'acteur américain parvient à nous y faire croire, quel que soit le registre de son jeu. (Normalement, c'est le moment qu'il faut choisir pour suggérer qu'il est oscarisable... sans oublier qu'il a déjà reçu la précieuse récompense à deux reprises.)

   Evidemment, Greengrass a soigné les scènes d'action. Je recommande tout particulièrement l'assaut du cargo (après deux scènes de traque très maîtrisées), à la fois spectaculaire et (relativement) dépouillé. Voilà une jolie leçon donnée aux godelureaux qui ne jurent que par le numérique. On passe ensuite au huis-clos des soutes du navire, lorsque les pirates partent à la recherche de l'équipage. La tension monte. C'est formidable, avec des plans dans la demi-obscurité d'une grande beauté. L'ambiance est encore plus confinée dans la troisième partie, qui se déroule essentiellement dans un module de sauvetage.

   C'est à ce moment de l'intrigue que les militaires et les forces spéciales vont débarquer. Un conseil : si vous ne supportez pas les uniformes et le complexe militaro-industriel, n'allez pas voir ce film. Greengrass sait comment utiliser ce type de personnages, et ici, il les met particulièrement en valeur. De surcroît, le Pentagone semble lui avoir facilité la tâche pour intégrer les équipements de la Défense à son histoire.

   C'est donc un formidable divertissement, qui dit aussi beaucoup de choses sur notre époque et sonde les tréfonds de l'âme humaine.

   P.S.

   A Rodez, j'ai eu la chance de voir le film dans la salle 1, la plus grande. LE PIED !

21:08 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 17 novembre 2013

La Brigade juive - tome 1 Vigilante

   Cette nouvelle bande dessinée, dont l'histoire sera développée sur trois tomes, a pour toile de fond un aspect méconnu de l'histoire :

cinéma,cinema,film,histoire

   La Seconde guerre mondiale vient de s'achever (officiellement) en Europe... mais la violence n'a pas disparu. En Pologne, deux soldats juifs rattachés à l'armée britannique mènent une bien étrange mission, qui les mène dans un couvent :

cinéma,cinema,film,histoire

   La gamine aux cheveux bruns va jouer un rôle croissant dans l'intrigue, mais elle constitue une sorte d'épisode imprévu dans le projet des deux soldats, qui sont là d'abord pour se venger. Il leur faut ruser avec les principales forces d'occupation de la Pologne libérée du nazisme, celles de l'Armée rouge :

cinéma,cinema,film,histoire

   Mais c'est au détour d'une colline que peut surgir le plus terrible danger. La Prusse orientale n'est pas loin... et l'on se demande un instant si cette apparition n'est pas celle d'un fantôme :

cinéma,cinema,film,histoire

   Si la quête des deux soldats est fictive, le contexte dans lequel elle est placée est authentique : les massacres ont continué (certes, avec une intensité plus faible) dans plusieurs régions d'Europe, après la capitulation allemande... et la Brigade juive, recrutée en Palestine mandataire, a bien existé. (Comme on le voit dans la bande dessinée, avant d'arriver en Europe de l'Est, les soldats ont combattu en Italie du Nord.) Certains de ses membres ont même constitué un groupe de vengeurs, dont les projets, s'ils n'ont pas toujours abouti, étaient assez "radicaux".

   A la fin de l'épisode, les personnages principaux se demandent si leur avenir n'est pas plutôt en Palestine. A suivre...

samedi, 16 novembre 2013

L'école au péril des égoïsmes

   Pour un gouvernement (de gauche comme de droite), il est toujours risqué d'enclencher une réforme sociétale en période de crise économique. Il peut voir s'agglutiner contre lui les opposants traditionnels, les déçus d'hier et les aigris de toujours. J'ai le sentiment que c'est ce qui se passe avec la réforme des rythmes scolaires, dont j'ai déjà causé en février dernier.

   Il faut commencer par aborder le temps de travail des professeurs des écoles. Dans ce domaine, on tombe vite dans la caricature, soit qu'on les estime excessivement privilégiés (peu d'heures de cours, de longues vacances...), de surcroît jamais contents, soit qu'on les plaigne pour le stress, la charge de travail à domicile... et le fait de devoir supporter des progénitures au comportement de moins en moins exemplaire.

   Qu'en est-il de leur temps de travail (hors domicile) ? L'analyse des textes officiels publiés sous la Ve République permet de se faire une idée de son évolution :

politique,société,éducation

      On constate que c'est l'année 1969 qui constitue la rupture. Sinon, en apparence, depuis près de 45 ans, le volume global n'a pas changé. Dans le détail, les différentes réformes ont abouti à diminuer les heures de cours dispensées aux élèves (30, puis 27, 26 et enfin 24 par semaine). Le temps dégagé a été réaffecté à d'autres tâches : le travail en équipe, la formation pédagogique, le suivi des élèves handicapés, le lien avec les parents et l'organisation des conseils d'école. C'est une reconnaissance du travail qui était (normalement) déjà effectué auparavant par les enseignants. On pourrait en conclure que leur charge de travail a diminué. Pour être honnête, il faudrait ajouter que le fait que ces "activités complémentaires" soient officiellement reconnues a sans doute contribué à inciter les enseignants à s'y investir davantage. Ne restent plus hors du décompte de leur service que la préparation des cours et la correction des cahiers des élèves.

   J'ai volontairement laissé de côté la partie "aide personnalisée" du complément horaire. Introduite en 2008, elle devait permettre aux professeurs de davantage se consacrer aux élèves en difficulté. C'est le talon d'Achille de notre système éducatif : il forme des élites efficaces mais laisse trop de gens sur le côté de la route. Le problème est que le trio Sarkozy-Fillon-Darcos a couplé cette nouveauté avec le passage généralisé à la semaine de quatre jours. Or, il se trouve que cette aide personnalisée (comme une partie du reste des activités complémentaires) a très souvent été dispensée les mêmes jours que ceux de classe, alourdissant encore l'emploi du temps de nos chères têtes blondes. (Ce ne fut pas le cas partout. Je connais au moins un cas, hors Aveyron, où les professeurs organisaient le soutien en français et mathématiques durant les vacances.)

   Curieusement, la fronde contre la réforme Darcos n'a pas suscité le même rejet que celle de Vincent Peillon. Elle a définitivement libéré le week-end des enseignants et des parents (qui n'ont plus eu à se lever le samedi matin... tu parles !). Elle a par contre laissé de côté les élèves les plus faibles, ceux qui ont besoin de plus de temps pour apprendre, qui ne peuvent pas assimiler énormément de choses en une journée. Mais ce ne sont pas des enfants d'enseignants, ni d'hommes politiques, ni de délégués de parents d'élèves. Ces enfants sont plutôt issus de catégories modestes, qu'on entend peu... et qui votent de moins en moins.

   Il y a beaucoup d'hypocrisie dans l'opposition à la réforme Peillon. Il y a d'abord ceux qui estiment que l'école telle qu'elle est fonctionne très bien... pour leurs enfants. Si les gamins des pauvres sont plus souvent en échec scolaire (et ce dès le primaire), c'est leur problème ! Il y a ensuite ceux qui n'ont pas envie de changer leurs habitudes, n'hésitant pas à proférer de gros mensonges à propos du mercredi matin. Beaucoup d'enfants se levaient, ce jour-là comme les autres, pour être emmenés en garderie ou chez un membre de la famille (ou une connaissance), qui acceptait de s'en occuper pendant que les parents travaillaient.

   Et parmi ceux qui dénoncent la supposée fatigue plus grande des gamins aujourd'hui, combien veillent à ce que leurs enfants soient couchés tôt le soir, loin de la télévision, de l'ordinateur ou de la console de jeux ?

   Du côté des politiques, l'honnêteté n'est pas forcément plus grande. La droite et l'extrême-droite, c'est de bonne guerre, sautent sur l'occasion pour gêner le gouvernement. (Ceux qui croient que le FN ou la nouvelle génération de l'UMP ont l'intention de faire de la politique autrement se font de grosses illusions...) Enfin, quelle que soit la couleur politique de la municipalité (s'il y en a une), c'est la capacité à s'organiser qui fera la différence, plus que les moyens. Certaines communes font preuve d'imagination. Celles (pas forcément riches ou très peuplées) qui avaient déjà réfléchi à l'animation locale ont des ressources pour se lancer dans la semaine de 4,5 jours.

   Une dernière chose : contrairement à ce qu'affirment certains opposants à la réforme Peillon, la masse des enseignants du primaire semble plutôt y adhérer. Le récent appel à la grève n'a été suivi que par environ un quart d'entre eux (encore moins dans l'Aveyron).

politique,société,éducation

(Centre Presse, 15 novembre 2013)

   Certes, on peut estimer qu'une (faible ?) partie de ceux qui rejettent la réforme ont choisi de faire cours ce jour-là. Il est aussi possible que d'autres motivations aient poussé certains grévistes à participer au mouvement : la "gauche de la gauche" est surreprésentée dans le monde enseignant ; c'était là l'occasion d'exprimer le rejet d'une politique jugée trop sociale-libérale.

   Pourtant, le gouvernement avait pris soin de caresser les professeurs des écoles dans le sens du poil. Le 31 août dernier est paru au Journal Officiel un décret instaurant une "indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves". Elle est censée permettre la mise en place de la réforme... sauf qu'elle ne rémunère aucune nouvelle activité, celles mentionnées dans le décret étant déjà assurées auparavant par les professeurs des écoles.

   Paris constitue une exception, avec un corps enseignant visiblement très remonté contre Vincent Peillon. Et pourtant... En février dernier, dans un article qui n'a pas eu le retentissement qu'il méritait, Le Monde rappelait l'existence dans la capitale des P.V.P. (professeurs Ville de Paris). Dans les faits, ces personnes sont payées par la mairie pour faire une partie du travail qui incombe aux professeurs des écoles. Voilà de quoi rendre le métier plus confortable qu'en province... et ce sont ceux-là qui se plaignent le plus !

mercredi, 13 novembre 2013

Il était temps

   Camarades mâles hétérosexuels, soyons honnêtes : il est des films que l'on se résout à aller voir par esprit de conciliation... et c'est parfois source d'un plaisir inattendu ! Que celui qui n'a jamais apprécié une (bonne) comédie romantique avec Julia Roberts me jette la première bobine de pellicule !

   Cette bluette sort de l'ordinaire grâce au petit argument de science-fiction qu'on lui a greffé : le personnage principal peut retourner dans son passé, le revivre... et le modifier. S'ajoute une touchante relation père-fils, qui ne cesse de prendre de l'épaisseur au fur et à mesure de l'intrigue.

   Le postulat de base est un peu éculé : le héros est un jeune Anglais coincé (pléonasme ?), qui semble toutefois très bien s'en sortir dans ses études de droit (il va intégrer un cabinet d'avocats). Ses parents sont l'équivalent des bobos français : riches, décontractés, cultivés et un brin excentriques, à leur manière. J'adore le personnage de la mère, interprété par Lindsay Duncan. Signalons aussi la jolie performance de Lydia Wilson dans le rôle de Kit Kat, la soeur un peu fofolle du héros.

   A partir du moment où Tim (Domhnall Gleeson, pas dément) commence à tester son pouvoir, cela devient drôle. Il est évidemment maladroit... et profite de son don pour revivre certaines situations le plus avantageusement possible ! Petit à petit, il va découvrir que, parfois, on ne peut échapper à son destin...

   Sa vie sentimentale tourne autour de trois jeunes femmes : le flirt d'un soir de nouvel an, la bonne copine de sa soeur et le possible grand amour, rencontré lors d'un dîner en aveugle... dans un restaurant portant un nom français (Dans le noir si je me souviens bien). Le romantisme à la française est aussi présent à travers la grande affiche du Fabuleux Destin d'Amélie Poulain qui orne la chambre du héros. Les situations faisant intervenir ces trois personnages féminins sont inégales : soit c'est très drôle, soit cela tombe à plat, peut-être en raison d'un doublage en français pas toujours réussi.

   Au niveau du scénario, on a pris soin de ne pas tomber dans la facilité. Sans complexifier l'intrigue comme dans L'Effet papillon, on a limité les possibilités d'action du jeune homme : remonter avant la naissance d'un membre de la famille en perturbe radicalement le destin. Voilà donc Tim voué (comme son père) à utiliser son talent pour améliorer le quotidien. Cela donne une belle petite histoire, à la fois délicate et morale.

21:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

dimanche, 10 novembre 2013

L'endettement des communes aveyronnaises

   C'est l'un des thèmes qui sera sans doute l'objet de débats intenses lors de la prochaine campagne des municipales (en 2014). Les premières salves ont d'ailleurs déjà été tirées.

   Cette semaine, l'hebdomadaire Le Villefranchois s'est intéressé à l'endettement des communes de l'Ouest du département. Cela nous vaut un bel article, page 2 du premier cahier, agrémenté d'un tableau comparatif tenant compte du facteur démographique. Le commentaire est nuancé et essaie d'apporter d'autres éléments d'analyse que les chiffres bruts : une commune peu endettée peut tout simplement être une commune qui n'investit pas et où les équipements sont vieillissants voire inexistants.

   Certains cas sont néanmoins inquiétants, comme celui de Saint-Parthem, où l'endettement culmine à 2 400 euros par habitant, alors que la moyenne de la strate est d'environ 500. Des travaux d'assainissement sont la cause de cette poussée (en 2010, l'endettement se montait à 521 euros par habitant). Visiblement, la communauté de communes de la vallée du Lot n'a pas épaulé Saint-Parthem, ce secteur ne faisant pas partie de ses compétences. (Elle aurait quand même pu donner un coup de pouce...)

   Il faudrait aussi croiser ces informations avec la fiscalité locale. Certaines communes font le choix de faibles taux d'imposition, ce qui les oblige à davantage emprunter. A l'inverse, les municipalités qui veulent éviter le recours à l'emprunt auront tendance à jouer sur la fiscalité pour augmenter leurs ressources. Voyons ce qu'il en est dans les principales villes du département.

   Le cas de Rodez est assez connu, puisqu'il en a déjà été question dans la presse à plusieurs reprises, soit que le maire Christian Teyssèdre se soit vanté de la bonne gestion de son équipe, soit que ses adversaires aient contesté les chiffres avancés. Qu'en est-il en réalité ?

politique,actualité,france,presse,journalisme

   De 2000 à 2012, l'endettement par habitant est toujours resté inférieur à la moyenne des communes appartenant à la même strate (la courbe bleue est sous la courbe rouge). De ce point de vue, il n'y a donc pas de réelle rupture entre la gestion Censi et la gestion Teyssèdre. On remarque toutefois qu'alors que l'endettement avait tendance à (lentement) diminuer de 2000 à 2006, l'approche des élections de 2008 l'a vu remonter. De mauvais esprits pourraient suspecter l'ancienne majorité municipale d'avoir davantage recouru à l'emprunt pour éviter d'augmenter la pression fiscale (déjà bien assez grande) à un moment stratégique du mandat. Cela n'a pas suffi pour conserver la mairie de Rodez. De son côté, l'équipe Teyssèdre a, dans un premier temps, diminué l'endettement, avant que le lancement des grands travaux (à partir de 2010) ne fasse remonter la courbe. Il reste néanmoins 20 % plus bas que celui des communes de la strate.

   Pour être juste, je dois signaler que l'endettement de la communauté d'agglomération ne cesse lui d'augmenter. (La hausse est de plus de 50 % depuis 2008.) Elle assume le gros du financement des projets.

politique,actualité,france,presse,journalisme

   Cette fois-ci, les mauvaises langues vont dire que le chef-lieu se déleste d'une partie des dépenses d'investissement sur l'agglomération... mais ce n'est que justice, si l'ensemble de l'agglomération en tire bénéfice.

   Passons à Villefranche-de-Rouergue. Serge Roques est en place depuis 2001.

politique,actualité,france,presse,journalisme

   Jusqu'en 2006, la situation de la commune était plus enviable que la moyenne de celles de sa strate. Elle s'est dégradée depuis, si bien qu'aujourd'hui elle est comparativement plus endettée que Rodez : 1 017 euros par habitant (contre 852). Et elle ne bénéficie pas d'un environnement aussi dynamique. Mais la situation n'est pas désespérée : le taux de la taxe d'habitation y est faible, très en-dessous de la moyenne de la strate de Villefranche (environ 5 points). Autant dire tout de suite qu'après les municipales de 2014, quelle que soit la liste qui l'emportera, les impôts vont augmenter.

   Mais il existe plusieurs communes plus mal en point que Villefranche-de-Rouergue. Parmi celles-ci se trouve Millau :

politique,actualité,france,presse,journalisme

   Elle est dans une situation diamétralement opposée à Rodez : depuis 2000, que ce soit sous la gestion Godfrain ou la gestion Durand, l'endettement par habitant est élevé, davantage que la moyenne de la strate (la courbe bleue est toujours au-dessus de la courbe rouge). En 2012, on en est à 1 400 euros par habitant ! Et pourtant, au niveau de la fiscalité, les marges ne sont pas grandes : toutes les taxes (habitation, foncier bâti et foncier non bâti) ont des taux supérieurs (voire très supérieurs) à la moyenne de la strate. Le salut viendra peut-être de l'extension géographique de la communauté de communes de Millau-Grands-Causses et de l'augmentation du nombre de ses compétences...

   Retour à droite, à présent, avec Espalion :

politique,actualité,france,presse,journalisme

   Du seul point de vue de l'endettement et en dépit de toutes les critiques que la gestion de Gilbert Cayron peut susciter, il semble que la situation de la commune se soit améliorée au fil du temps. Jusqu'en 2005, l'endettement par habitant était supérieur à la moyenne de la strate. La situation s'est inversée depuis. Espalion n'a pas suivi le mouvement de hausse de l'endettement des communes de sa catégorie, peut-être en raison de ressources fiscales suffisantes (les taux sont assez élevés, notamment sur le foncier). Espalion bénéficie aussi de sa position stratégique, entre le Nord Aveyron et Rodez : notons que le conseil général va intégralement financer le contournement de la commune !

   Terminons avec l'une des communes les plus peuplées du département, Onet-le-Château. Sa situation apparaît très enviable :

politique,actualité,france,presse,journalisme

   En effet, l'endettement par habitant y est bas (à peine plus de 300 euros par habitant) et surtout trois fois plus faible que la moyenne de la strate. De surcroît, des marges existent au niveau de la fiscalité, puisque le taux de la taxe d'habitation représente moins de 60 % de celui appliqué par les communes de la même catégorie.

   Et pourtant... Dieu sait que le maire Fabrice Geniez est impopulaire auprès des "élites" du Grand Rodez (de gauche comme de droite). Cela ne l'a pas empêché d'être réélu en 2008 et je pense que, s'il arrive à constituer une liste d'union de la gauche, il a toutes ses chances pour 2014. Il aura pourtant un adversaire habile face à lui : Jean-Philippe Keroslian, qui a accordé un long et instructif entretien au Ruthénois de cette semaine. A mon avis, celui-ci part toutefois avec deux gros handicaps : il n'a pas réussi (pour l'instant) à rallier à lui l'équipe de Didier Gaffard, qui a pourtant mené un travail d'opposition sérieux pendant 5 ans et il ne pourra pas longtemps tenir son positionnement apolitique. Sa liste sera de droite ou de centre-droit. Son ambiguïté pourrait finalement lui nuire.

samedi, 09 novembre 2013

Lettre à Momo

   Contrairement à ce que pensait un petit garçon dans la file d'attente du cinéma, "Momo" n'est pas ici le diminutif de Mohammed, d'abord parce que le héros éponyme est une fille, ensuite parce qu'elle est japonaise.

   C'est une préadolescente d'une dizaine d'années. Elle est fille unique. Son univers a récemment été bouleversé par la mort de son père, océanographe, et le déménagement de sa mère, qui  a choisi de tout quitter à Tokyo pour retourner s'installer dans le village d'origine de sa famille, sur une île située dans la mer Intérieure :

cinéma,cinema,film

   Le film illustre le manque de communication entre une mère encore jeune, moderne, dotée d'un caractère solide et une fille citadine dans l'âme, tiraillée par la dispute qu'elle a eue avec son père, juste avant la mort de celui-ci. Il n'a même pas eu le temps d'écrire la lettre qu'il lui destinait.

cinéma,cinema,film

   Se greffe là-dessus la vie tranquille d'un bourg de province, complètement isolé du pays quand survient un typhon. Les personnes âgées sont nombreuses. Les plaisirs des rares enfants y sont simples. La petite Momo a quelques difficultés à s'intégrer.

   La troisième couche est d'ordre surnaturel. Dès le début, on comprend que des événements peu communs vont survenir. Cela commence par des bruits suspects dans le grenier de la vieille maison que les arrivantes vont occuper. Seuls les enfants distinguent des ombres suspectes. On se demande alors si le réalisateur ne va pas orienter l'histoire dans un sens effrayant : ce sont là des codes propres aux films d'horreur japonais.

   Comme c'est un dessin animé destiné au (pas trop) jeune public, on se dit que l'intrigue ne va pas s'engager dans cette voie. C'est plutôt le ressort comique qui est mis à contribution. Momo va devoir apprendre à surmonter sa peur et à dompter ces esprits facétieux, capricieux... et affamés ! Cela nous vaut une séquence ébouriffante, avec un drôle de quatuor embarqué dans l'ascension d'une montagne verdoyante, sur un chariot automatique... fuyant une meute de sangliers !

   L'entente finit par régner (à peu près) entre ces protagonistes. Les esprits ont une mission à mener, que Momo ne doit surtout pas découvrir avant qu'elle ne soit réalisée. J'ai encore en mémoire la scène qui voit tout ce petit monde se lancer dans une danse magique, pour faire parvenir un message à l'au-delà !

cinéma,cinema,film

   La dernière partie du film tourne autour du typhon. Le déchaînement des éléments précipite la résolution de l'énigme et place chacun face à ses responsabilités. Je recommande tout particulièrement le franchissement d'un pont, grâce à un tunnel de fantômes en mouvement... impressionnant !

   L'histoire se conclut sur une plage, où est célébrée une fête traditionnelle, au cours de laquelle de petits bateaux illuminés sont mis à l'eau. C'est visuellement magnifique. (C'est le moment de signaler que l'auteur n'est autre qu'Hiroyuki Okiura, à qui l'on doit le superbe Jin-Roh - La Brigade des loups et qui a contribué à l'animation de chefs-d'oeuvre comme Ghost in the Shell, Metropolis et Paprika.)

   A l'issue de ces aventures, la jeune Momo a mûri et va pouvoir enfin se jeter dans le grand bain !

21:36 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 08 novembre 2013

Anne Frank au pays du manga

   J'ai récemment découvert (par hasard) ce reportage en bandes dessinées, publié par Les Arènes et Arte Editions :

politique,histoire,bd,culture,bande dessinée,bande-dessinée

   A l'origine, c'est une oeuvre multimédia, encore consultable sur le site d'Arte. Aux dessins s'ajoutent des contenus audio et vidéo, ainsi que des animations particulières à certains dessins. On remarque que le chef de l'équipe qui s'est rendue au Japon n'est pas le dessinateur, qui a semble-t-il eu tout loisir d'égratigner son patron (Alain Lewkowicz) dans le récit qu'il a mis en images.

   Le projet était de comprendre les raisons du succès du Journal d'Anne Frank adapté en manga et de confronter la mémoire occidentale de la Seconde guerre mondiale à la perception qu'en ont les Japonais.

   Le premier chapitre est consacré à la découverte de l'ampleur du phénomène des mangas. Il y en a pour tous les goûts... et l'on publie vraiment sur tout et n'importe quoi, sans hiérarchiser (les oeuvres de Victor Hugo côtoient Mein Kampf d'Hitler), ce qui a conduit Alain Leiwkowicz à imaginer le générique d'une émission "grand public" pour rendre cette idée :





   Les reporters ne sont pas au bout de leurs surprises. Ils rencontrent la personne qui veille à la publication du manga consacré à l'enfant juive. C'est un chrétien, qui a appris l'hébreu. Il est même à l'origine de la création d'un musée de l'extermination des juifs... près d'Hiroshima !

   Les Français constatent que la population japonaise est ignorante de ce qui s'est passé en Europe durant la Seconde guerre mondiale... et qu'elle n'en sait pas plus sur les crimes commis par l'armée japonaise en Asie. L'ironie de l'histoire est qu'un diplomate japonais est l'auteur de l'un des plus beaux gestes d'humanité de la guerre : Chiune Sugihara a accordé des milliers de visas pour le Japon à des juifs lituaniens, malgré l'opposition formelle de ses supérieurs. (Bien entendu, un manga lui a été consacré.) L'équipe de journaliste finit par rencontrer son fils, qui leur paraît peu concerné par la chose.

   Le deuxième chapitre mène le groupe au sanctuaire de Yasukuni, où sont vénérés les mânes des soldats morts pour la patrie... y compris les criminels de guerre condamnés par le procès de Tokyo :

politique,histoire,bd,culture,bande dessinée,bande-dessinée

   C'est le début d'une série de rencontres avec divers représentants de l'extrême-droite nippone. Nombre d'entre eux disent être "non acceptionnistes" : ils nient la réalité du massacre de Nankin commis par les troupes japonaises en 1937.

   Au temple, plusieurs entretiens ont été réalisés. Le premier montre un homme encore jeune, développer un discours argumenté, sur un ton calme. On peut aussi entendre une vieille dame, inoffensive au premier abord, mais qui finit par se déclarer fière de l'attaque de Pearl Harbor, à laquelle son beau-père a participé. Plus tard, les journalistes rencontrent des militants nationalistes, plus ou moins subtils.

   Cependant, si l'on peut regretter leur aveuglement quant aux crimes du Japon militaristes, on ne peut pas rejeter tous leurs arguments : l'impérialisme américain n'est pas une légende et la Chine communiste a massacré bien plus de monde. C'est peut-être de ce côté-là que les journalistes auraient dû creuser : dans quelle mesure l'émergence de la Chine comme puissance économique explique-t-elle la résurgence du nationalisme nippon ?

   Le troisième chapitre met les Français en contact avec le monde des mangas engagés. Ils font la rencontre de Motomiya Hiroshi, qui a osé jadis mettre en scène le massacre de Nankin. Ils découvrent un homme ordinaire, qui a dû en rabattre pour continuer à gagner sa croûte. Par la suite, c'est un éditeur "révisionniste" qui les reçoit. Pour se remonter le moral, le trio d'enquêteurs part à la rencontre d'une enseignante qui a été suspendue pour avoir contesté les aspects nationalistes de l'éducation de son pays.

politique,histoire,bd,culture,bande dessinée,bande-dessinée

   Le quatrième et dernier chapitre mène les journalistes dans la préfecture d'Hiroshima (au sud). Ils y retrouvent le révérend Otsuka et son musée du génocide. (On peut y entendre un témoignage marquant, celui d'Otto Frank, le père d'Anne, qui a rencontré jadis le révérend et a été très touché par la connaissance que les Japonais avaient de l'histoire de sa fille.) Ils sont un peu désarçonnés par le fait que, pour l'équipe du musée, il soit plus important de transmettre un message de paix et de gentillesse que d'enseigner de manière rigoureuse l'histoire de la Seconde guerre mondiale.

politique,histoire,bd,culture,bande dessinée,bande-dessinée

   Le périple s'achève au mémorial d'Hiroshima, qui est dirigé par... un Américain, Steven Leeper, un sage :

politique,histoire,bd,culture,bande dessinée,bande-dessinée

   Les journalistes français quittent le Japon avec peut-être moins de certitudes qu'à leur arrivée. La bande dessinée a l'honnêteté de retracer ce cheminement, sans chercher à enjoliver : elle montre notamment qu'Alain Lewkowicz avait, au départ, des idées très (trop ?) arrêtées. C'est de plus joliment dessiné (en noir et blanc) et cela fourmille d'anecdotes sur le Japon contemporain.

jeudi, 07 novembre 2013

Inside Llewyn Davis

   Les frères Coen s'attaquent à la folk song et à l'Amérique contemporaine, mais attention, pas celle des paillettes et du clinquant, celle des gens pas connus, certains vivant à l'aise, d'autres tirant le diable par la queue.

   C'est dans la seconde catégorie qu'il faut placer le héros éponyme, un chanteur et guitariste talentueux mais qui joue de malchance et semble un peu trop souvent choisir les chemins qui le mènent à l'échec. Dans la première moitié du film, cela donne de nombreux moments de comédie. L'un des fils rouges est... un chat au pelage... roux... très ronronnant, très docile (il ne bouge pas dans les bras du héros, même sous la pluie !... on voit bien qu'on est au cinéma...)... et vraiment très photogénique :

cinéma,cinema,film

   Bon, en fait, il y a deux chats, un mâle (nommé Ulysse... qui va faire un "beau" voyage) et une femelle des rues. Franchement, je les kiffe tous les deux. Le héros ne mérite pas l'affection de ces deux adorables sacs-à-puces !

   Parlons-en, du héros. Il a du talent, mais ne perce pas. Il plaît à la copine de son frère (incarnée par Carey Mulligan, exquise jusque dans la grossièreté) mais ne veut pas s'engager avec elle. Il est reçu comme le nouveau Bob Dylan par un couple de bobos new-yorkais et finit par couvrir d'injures la femme de son hôte...

   On rigole quand même souvent, de ses mésaventures comme des situations cocasses dans lesquelles certains personnages vont se fourrer. Et puis il y a cette savoureuse séquence avec John Goodman, dans une bagnole improbable en route vers Chicago. De quoi vous dégoûter du covoiturage à vie !

   La seconde partie est clairement mélancolique... et très complaisante avec le héros. Certes, il semble avoir eu une enfance difficile et le suicide de son partenaire a plombé sa carrière. Mais il ne réagit pas, a du mal a saisir les perches qui lui sont tendues.

   J'ai néanmoins apprécié le "volet social" de son histoire. On découvre qu'il appartient à une famille de marins, son père finissant péniblement ses jours dans un hospice miteux, où le fils décide de se rendre et lui joue un superbe morceau. Ce très beau moment ne suffit toutefois pas à faire de ce long métrage un grand film. C'est un "Coen" mineur, à rapprocher de Burn after reading, loin derrière There will be blood, No Country for old men et True Grit.

22:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mercredi, 06 novembre 2013

Snowpiercer, le Transperceneige

   Ce film d'anticipation grand public est une surprise à plus d'un titre. C'en fut d'abord une pour moi quand, à l'occasion de sa sortie, j'ai appris que cette oeuvre américano-coréenne est l'adaptation d'une bande dessinée française, dont l'intégrale, encore disponible dans le commerce il y a moins d'un moins, est actuellement en cours de réimpression, tant la demande est forte. (Fallait anticiper, les gars !)

   L'intrigue est construite en trois actes. Dans le premier, on découvre le fond du convoi, où végète ce qui est supposé être la lie de la population. Ils sont sales, vivent les uns sur les autres, dans le bruit et l'insécurité, celle-ci imposée par les nervis aux ordres de l'élite qui vit très bien, presque à l'autre bout du train. Je me demande si, dans la peinture de ce sous-univers qui ne manque toutefois pas de dignité, le réalisateur n'a pas été influencé par Les Bas-Fonds (ceux d'Akira Kurosawa ou peut-être ceux de Jean Renoir). C'est très bien filmé, par l'auteur de The Host et de Memories of murder.

   On notera la présence d'un personnage absent de la BD... un dessinateur, qui "croque" ce trouble univers et distribue une partie de ses oeuvres à ses modèles. Si, dans le film, le rôle est tenu par un acteur, les dessins ont été exécutés par l'auteur français, "invité" à participer au tournage.

   Le portrait de groupe placé au début pose bien les bases de l'intrigue et expose le relationnel qui unit tel personnage à tel autre. Au niveau de la distribution, il faut d'ailleurs signaler la bonne performance de Chris Evans, limite méconnaissable... et surtout de Tilda Swinton, dans un rôle ingrat (une méchante très très laide) qu'elle illumine de son talent.

   Les cinéphiles invétérés remarqueront peut-être quelques clins d'oeil placés ici ou là. A un moment, on a même voulu faire croire aux vieux fans de SF qu'on allait leur resservir un peu de Soleil vert...

   La deuxième partie est un concentré de tension et d'action. Et va-s-y que je te cogne, que je t'écrase, que je te renverse, que je t'étripe... Là encore, c'est bien foutu. Faut juste supporter ce genre de spectacle.

   De temps en temps, une séquence en apparence plus anodine vient interrompre le déferlement de violence. J'ai particulièrement aimé celle de la classe d'école, dans laquelle la bonne conscience rivalise avec la fausse mièvrerie. D'autres épisodes (qui suivent la progression du groupe de rebelles vers l'avant du train) sont plus convenus. Mais si ce n'est pas toujours très original, ce n'est jamais mauvais.

   La dernière partie est plus philosophique. On y découvre aussi certains éléments clés de l'intrigue. La fin m'a un peu déçu, mais elle est dans la logique de ce qui a été dit et montré plus tôt dans le film.

22:28 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 02 novembre 2013

Un couteau policier

   Après Les Experts, après Profilage, une nouvelle série policière a mis en scène le plus célèbre couteau du monde, je veux bien entendu parler du Laguiole. Cette fois-ci, c'est le service public qui est à l'honneur, avec la nouvelle série Cherif, diffusée le vendredi sur France 2 depuis une semaine.

   Au cours du quatrième épisode, intitulé "Injustice", on voit le héros, le capitaine Kader Cherif, s'introduire subrepticement dans le bureau d'un expert judiciaire (soupçonné de meurtre), au sein même du tribunal. Comme il n'est pas très discret de nature, il se fait surprendre par deux avocates, l'une d'entre elles étant son ex-femme. Assis au bureau de l'expert judiciaire, le policier se voit asséner une leçon de droit... et lève soudain la main droite, qui semble tenir un objet à la forme familière :

actualité,société,télévision

   Quelques instants plus tard, à la consternation des avocates (à qui il promet d'aller chercher une commission rogatoire dès qu'il sortira du bureau...), il entreprend d'ouvrir un tiroir fermé à clé :

actualité,société,télévision

   La forme de la lame ne laisse plus aucun doute. On n'est donc guère surpris de le voir, quelques instants plus tard, replier celle-ci pour ranger le couteau dans la poche gauche de son pardessus :

actualité,société,télévision

vendredi, 01 novembre 2013

Gravity

   Cette "gravité" n'est pas que l'attraction terrestre. En anglais comme en français, le terme fait aussi bien allusion au sérieux qu'à la dangerosité. C'est d'abord un film à grand spectacle... et assez peu bavard. Les dialogues soit ont un aspect comique (avec cette véritable machine à blagues qu'est le commandant Kowalski, alias George Clooney, en forme), soit évoquent la vie de l'héroïne Ryan Stone (Sandra Bullock, habituée aux films insignifiants, à quelques exceptions près comme Entre deux rives). Le reste du temps, les sons sont distribués parcimonieusement et la musique (parfaitement adaptée) n'est pas envahissante.

   On peut donc se concentrer sur les images, qui sont magnifiques. C'est joli et spectaculaire, avec notamment un triple bombardement de particules à la dérive. On nous a abondamment montré le premier, mais sachez qu'il y en a deux autres plus tard, dans le film. Cuaron, déjà remarqué (entre autres) pour Les Fils de l'homme, confirme qu'il est un metteur en scène de talent.

   Par contre, je me suis posé la question du réalisme de l'intrigue. Si la vie en orbite semble fidèle à la réalité (comme a pu en témoigner par exemple Claudie Haigneré), je me demande s'il est faisable de rejoindre la station internationale puis la station chinoise.

   En tout cas, cela nous vaut la plus belle séquence du film, dans l'ISS puis le module Soyouz. C'est l'occasion pour le réalisateur de nous faire admirer la plastique de Sandra Bullock (encore super bien gaulée à près de cinquante balais... mais avec un visage qui a subi des retouches) :

cinéma,cinema,film

   Le grand écran permet aux spectateurs attentifs de remarquer les superbes abdominaux et les cuisses de nageuse de l'actrice : comme son rôle est assez physique, il est évident qu'elle a dû compléter sa gym régulière par un entraînement un peu plus poussé. (D'ailleurs, d'après Allociné, on avait d'abord pensé à la sportive Angelina Jolie pour incarner l'héroïne.)

   Mais revenons à l'épisode Soyouz. Il est riche à plus d'un titre. Il montre l'apprentie astronaute hésiter entre l'abandon et l'instinct de survie. La relation avec Kowalski-Clooney prend de plus un tour inattendu (alors que ce personnage masculin a connu une évolution à la Mission to Mars quelques minutes auparavant...). L'avant-dernière séquence, dans la station chinoise (elle aussi abandonnée) est presque aussi réussie... et contient une surprenante conversation avec un Chinois !

   La fin pourra décevoir certains, mais elle est dans la logique de l'histoire. J'ai plutôt été agacé par la prolifération du "juste à temps". Le réalisateur aime jouer avec nos nerfs... un peu trop souvent !

12:52 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

Omar

   La première demi-heure de ce film palestinien est une comédie de moeurs. On y découvre trois amis d'enfance : Tarek, le meneur (qui sort des blagues pourries de chez pourries), Amjad, le hâbleur (dont l'imitation de Marlon Brando fait les délices du quartier) et Omar, le beau gosse intègre, employé sérieux dans une boulangerie. Le héros en pince secrètement pour Nadia, la soeur cadette de Tarek. Régulièrement, il "fait le mur" pour rencontrer en cachette sa dulcinée... et il lui écrit des mots doux.

   Sauf que tout ceci se passe entre Israël et Palestine, la Cisjordanie étant traversée par le mur de séparation. En maints endroits rôdent des soldats de Tsahal qui, à l'occasion, humilient le Palestinien de passage.

   De plus, les trois jeunes hommes sont engagés politiquement, plutôt dans la résistance laïque (peut-être les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa). Notons que la soeur de Tarek ne porte pas le moindre voile. La décision de passer à l'action va bouleverser la vie des trois hommes... et de la jeune femme.

   L'armée israélienne (plus précisément son service de renseignement) se met à jouer un rôle crucial. L'intérêt de ce film est de dénoncer non pas la violence physique exercée par l'occupant, mais la violence morale, à travers les choix cornéliens qui sont imposés aux jeunes Palestiniens. Qu'est-ce qui compte le plus à leurs yeux ? Jusqu'où chacun est-il prêt à aller pour la cause ?... Et qui trahit qui ?

   Le film devient un polar très bien construit, où l'on tente de démêler le vrai du faux. On ne sait pas jusqu'à quel point les personnages mentent. C'est du niveau d'une tragédie grecque : il n'y a pas de bonne solution. Alors, quelle est la moins mauvaise ?

   La montée en tension est maîtrisée, avec toutefois deux invraisemblances : Omar croit un peu trop vite un gros mensonge qu'un personnage lui balance pour sauver sa vie et, plus tard, c'est au tour d'un agent israélien de se faire un peu trop facilement berner.

   La réalisation est au cordeau, avec quelques scènes très enlevées, celles des poursuites dans les ruelles de la ville palestinienne. Après Ajami, Inch'Allah et L'Attentat, c'est une nouvelle fiction coup-de-poing sur le conflit proche-oriental.

   Malheureusement, le talent déployé dans ces films semble inversement proportionnel aux perspectives de règlement du conflit...

mercredi, 30 octobre 2013

Turbo

   Au départ, je n'avais pas l'intention d'aller voir cette nouvelle animation de chez DreamWorks. Et puis j'ai croisé une collègue qui a coutume d'emmener sa progéniture voir ce genre de film. Tout comme moi, elle avait aimé le premier Cars (le second volet étant un peu moins réussi). Turbo lui a plu, alors qu'elle a été déçue par Planes.

   L'histoire démarre de manière comique dans ce jardin où une colonie d'escargots gère la récolte des tomates. La vie des gastéropodes est d'une monotonie affligeante : même les attaques foudroyantes des corbeaux sont intégrées dans le train-train quotidien. De son côté le héros, qui s'appelle en réalité Théo, rencontre quelques difficultés avec les solanacées les plus mûres... On notera aussi la présence d'un personnage négatif, celui d'un petit garçon très très con... mais un peu trop sûr de lui.

    Le schéma narratif est classique. L'individu qui se sent exceptionnel veut sortir de la routine dans laquelle son entourage est engoncé. Le film rend hommage à l'esprit d'initiative, au dépassement de soi et à l'amitié. Il est rempli de clins d'oeil cinématographiques. La séquence qui voit Théo acquérir ses super-pouvoirs est une référence évidente à Fast and Furious... ainsi (sans doute) qu'à Spiderman. Les courses automobiles m'ont fait immanquablement penser à Cars... et je me demande si la présence d'un avion un peu lourdeau, dans une scène, n'est pas une manière de se moquer de Planes.

   Heureusement, cette omniprésence des bagnoles est contrebalancée par un humour efficace. J'ai particulièrement aimé la mise en scène du contraste entre la perception (notamment de la vitesse) des escargots et la vision "objective" qui est donnée ensuite.

   Par contre, je n'ai guère apprécié de voir qu'encore une fois le méchant est un Français. Cela semble être une tendance lourde chez certains tâcherons d'outre-Atlantique. DreamWorks est même un récidiviste, puisque Madagascar 3 était marqué par la même francophobie stupide.

   Ici, elle est concentrée dans le personne de Guy La Gagne, champion automobile égocentrique, toujours vêtu de rouge :

cinéma,cinema,film

   C'est un mélange de Michael Schumacher (pour sa grande taille élancée et l'omniprésence du rouge) et d'Alain Prost (pour le visage aux traits marqués et la fierté tricolore, soulignée jusque sur le circuit d'Indianapolis) :

cinéma,cinema,film

   Observez bien le sourire de Guy La Gagne dans le film : c'est un décalque évident de celui d'Alain Prost. Le personnage est pourtant présenté au début sous un jour positif : c'est le modèle de Théo et il défend cet esprit d'initiative si cher aux auteurs. On s'aperçoit assez vite qu'il est surtout soucieux d'attirer les caméras et les photographes. Il devient un rival impitoyable pour Turbo... jusqu'au bout du bout !

   Si l'on supporte ces aspects déplaisants, on pourra jouir de la virtuosité de certaines scènes (notamment sur le circuit automobile) et goûter les interventions piquantes des acolytes de Turbo, les escargots (une bande de voyous sympathiques) comme les humains (pas des lumières, mais des gens à tempérament).

20:21 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 29 octobre 2013

Ma maman est en Amérique...

   ... elle a rencontré Buffalo Bill ! Tel est le titre complet de cette animation franco-luxembourgeoise, autobiographique, qui nous plonge dans la France des Trente Glorieuses. Le héros est un petit garçon, Jean, fils d'un chef d'entreprise surtout préoccupé par son travail.

cinéma,cinema,film

   Doté d'une imagination débordante, il s'invente des histoires. Il est très influencé par le cinéma américain... et les westerns spaghettis ! Il a un frère cadet, avec lequel il ne s'entend pas toujours très bien... et il regrette l'absence de sa maman. Il y a quand même une femme à la maison : la nounou, Yvette, à la fois inventive et patiente avec les enfants. Julie Depardieu lui prête sa voix, avec talent :

cinéma,cinema,film

   Mais la partenaire de jeux que Jean préfère est la (grande) fille des voisins (visiblement moins riches), Michèle, une rouquine à fort tempérament qui se fait coiffer par le garçon... et lui raconte plein d'histoires :

cinéma,cinema,film

   Curieusement, c'est elle qui reçoit les cartes postales envoyées par la mère de Jean, partie faire le tour du monde. Comme le garçon ne sait pas lire, il est très dépendant de ce que veut bien lui dire sa jeune voisine. Il y a donc un mystère familial à éclaircir.

   En même temps, ce film restitue très bien l'ambiance qui règnait jadis entre les garçons dans les cours de récréation et l'incroyable rivalité qui portait sur le jeu de billes, celles-ci savamment classées en fonction de leur matériau (terre, verre, métal...) :

cinéma,cinema,film

   J'ai failli oublier les heures de classe (bien plus nombreuses à l'époque qu'aujourd'hui, sans que l'on songe à se plaindre...) et cette maîtresse "à l'ancienne" (déjà à l'époque... je vous laisse imaginer le personnage !). L'histoire introduit même la notion de différences culturelles (autour de la fête de Noël).

   Entre roman familial, tranches de vie et tableau historique, ce court film (1h15) est décidément très riche... et à réserver à des enfants déjà un peu grands... ainsi qu'aux parents nostalgiques !

20:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

lundi, 28 octobre 2013

Astérix chez les Pictes

   Les aventures des héros créés par René Goscinny et Albert Uderzo ont bercé mon enfance. Lorsque le dessinateur s'est retrouvé seul pour continuer la série, j'ai suivi, au départ. Mais j'ai été assez rapidement déçu. Avant aujourd'hui, l'album le plus récemment sorti que j'avais lu était Astérix chez Rahazade, que l'on m'avait offert. A l'époque, j'avais remercié pour le cadeau, mais la lecture m'avait convaincu de définitivement arrêter. C'est la présence de Jean-Yves Ferri au scénario qui m'a incité à retenter l'expérience.
france,actualités,bd,livre,société,bande dessinée,humour

   J'avais aimé son De Gaulle à la plage et les extraits du nouvel album qui ont été diffusés m'ont encouragé à l'acheter. Le dessin y est en effet fidèle à la tradition : les personnages n'ont pas physiquement changé. En revanche, au cours de l'histoire, les hommes du village, sous la pression de leurs femmes, vont devoir troquer les braies gauloises contre des habits plus "tendance", dont la mode a été introduite par un drôle d'invité, le Picte Mac Oloch.

   Le nom "Picte", sans doute d'origine latine, désignait les habitants du nord de la Grande Bretagne restés indépendants de Rome. Sur le terrain, le terme est plutôt un générique sous lequel on regroupait différentes populations "peintes", c'est-à-dire tatouées :

france,actualités,bd,livre,société,bande dessinée,humour

   On ne sera donc pas étonné de constater que Mac Oloch arbore de curieux dessins sur son torse :

france,actualités,bd,livre,société,bande dessinée,humour

   Notons que cet "indigène" n'est pas sans rappeler un autre grand costaud créé par Goscinny et Uderzo, l'Indien des plaines Oumpah-pah :

france,actualités,bd,livre,société,bande dessinée,humour

(extrait de Oumpah-pah et la mission secrète)

   Comme l'Indien, le Picte sait se battre, même si on le voit peu à l'oeuvre dans cette histoire. De plus, ses cheveux sont arrangés de manière particulière et il lui arrive régulièrement de lancer un cri de ralliement qui n'est pas sans rappeler le cri de guerre de l'Indien.

   Ici s'arrête la ressemblance. Mac Oloch est un personnage somme toute secondaire. L'intrigue, si elle tourne autour d'une rivalité au sein de sa tribu, est portée par les deux héros, le chien Idéfix ne participant pas à l'expédition outre-mer... et, au vu de la pratique sportive qu'affectionnent les Pictes (le lancer de tronc d'arbre), c'est sans doute mieux. Par contre, on voit souvent Astérix et Obélix se chamailler. C'est parfois un peu outrancier.

   Du côté des réussites, il faut signaler les jeux de mots et les clins d'oeil anachroniques, marque de fabrique de cette bande dessinée. Du centurion Taglabribus au petit frère de Mac Oloch, nommé Mac Mini, on ne s'ennuie pas à déchiffrer ces traits d'esprits.

   Ceci dit, cela manque un peu de folie. C'est bien conçu, mais de manière assez sage, presque scolaire. Même l'intervention d'un célèbre monstre, pour pertinente qu'elle soit, manque de relief. On n'a sans doute pas voulu prendre le moindre risque pour l'album de la passation des pouvoirs. Espérons que, par la suite, les auteurs "se lâcheront" un peu plus.

samedi, 26 octobre 2013

Heimat 1 et 2

   Au départ, Heimat fut une série télévisée d'Edgar Reitz, qui connut un grand succès en R.F.A. puis dans l'Allemagne réunifiée. Par le biais de la fiction (et d'un village imaginaire), elle relatait le siècle tumultueux que la population allemande avait vécu, de 1919 aux années 1980, puis 1990, enfin 2000.

   Le film en deux parties qui vient de sortir en France en constitue une sorte de prologue, situé au début des années 1840. A cette époque, l'Allemagne n'existe pas en tant qu'Etat. Le sentiment national est lui bien vivant, mais la "patrie" (traduction imparfaite du mot "Heimat") est plus le petit pays qui sert d'horizon aux ruraux qui se tuent quotidiennement à la tâche.

   L'action se déroule dans la part occidentale du royaume de Prusse, en Rhénanie (aujourd'hui partagée entre deux Länder, la Rhénanie-Palatinat et la Rhénanie-du-Nord-Westphalie), dans une région appelée Hunsrück (dont l'étendue correspond à la moitié de celle de l'Aveyron) :

cinéma,cinema,film

cinéma,cinema,film

cinéma,cinema,film

   La première partie est sous-titrée "Chronique d'un rêve". Pour les Aveyronnais, il faut imaginer l'Allemagne profonde cent ans avant Farrebique, dans un pays qui n'a pas connu la Révolution française (certains privilèges n'ont pas été abolis), même si, la guerre aidant, les troupes françaises ont laissé des traces dans la région. (Trente ans après, une femme a encore en sa possession le savon d'un officier tricolore !)

   C'est un magnifique noir et blanc, d'où émerge de temps à autre un détail coloré, comme une pièce d'or, un morceau de verre déformant, un drapeau ou les pétales d'une fleur :

cinéma,cinema,film

   Mais, alors que Georges Rouquier, au-delà "des travaux et des jours", avait voulu montrer la communion des hommes et de la nature, Edgar Reitz fait plutôt oeuvre d'historien, reconstituant la vie au village dans ce qu'elle avait de pénible et de joyeux, de routinier et de changeant. L'Ouest de la future Allemagne est sur le point de s'ouvrir à la modernité.

   Le noble du coin, auquel on doit respect, n'est pas présenté au départ comme un mauvais bougre. Il sait même se montrer généreux à l'occasion. On découvre la vie simple et globalement difficile de ces ruraux qui n'ont rien d'exceptionnel, à première vue.

   Tout le monde est un peu paysan, même ceux qui ont une activité principale autre, comme le forgeron, père du héros. Celui-ci, Jakob, est le fils indigne. Alors que l'aîné s'est illustré dans l'armée et, une fois de retour, se dévoue à l'entreprise familiale, le cadet est le plus souvent le nez dans les bouquins, au désespoir de son père. Le jeune homme s'est vite rendu compte qu'il parvenait à apprendre vite beaucoup de choses, grâce à ses lectures. Il dévore notamment les récits de voyageurs... et apprend petit à petit à déchiffrer des langues étrangères. Les confrontations avec son père constituent souvent des moments de comédie.

   Mais il y a aussi cet amour naissant pour Henriette, une ravissante blonde, dont la réserve naturelle cache un tempérament fougueux. Elle et sa meilleure amie brune sont l'objet de l'attention des deux fils du forgeron. Une soirée festive va sceller le sort d'au moins un couple, mais pas dans le sens auquel les spectateurs se seraient attendus.

   Pour Jakob, la déception amoureuse et la répression des revendications républicaines des révolutionnaires allemands vont être des déclencheurs.

   La seconde partie du film est sous-titrée "L'Exode". Plus longue, elle donne à voir les causes multiples du mouvement d'émigration qui a frappé les territoires germaniques au XIXe siècle. On a plus souvent entendu parler de l'installation en Amérique du Nord. Ces personnages-ci ambitionnent de partir au Brésil. Cela nous vaut une séquence pittoresque, au cours de laquelle des Portugais viennent faire de la retape pour l'empire sud-américain.

   Auparavant, on aura vu le village traverser les pires épreuves, de l'hiver glacial à l'épidémie, en passant par la prison royale, pour quelques-uns des héros. De retour, Jakob comprend qu'il aura du mal à s'intégrer à nouveau à la communauté. Un mariage est célébré. Dans le même temps, le frère aîné est tenté par la modernité : il met au point une machine à vapeur. Mais, dans le village, beaucoup songent à partir.

   L'histoire alterne moments de joie et de douleur. La mort et la maladie frappent, sans parler même des déconvenues sentimentales. Incidemment, on perçoit aussi les tensions religieuses, entre catholiques et protestants, qui ne cohabitent pas dans le village, mais peuvent se croiser dans la contrée. La seule soeur survivante de Jakob (les parents ont perdu six enfants en bas âge) a été reniée parce qu'elle a épousé un "papiste" (un gars de la Moselle par dessus le marché !). La situation évolue dans cette partie du film.

   L'une des dernières séquences montre le départ de l'expédition. Elle doit rejoindre d'autres convois issus eux aussi de Rhénanie, direction la mer du Nord puis, au terme de plusieurs étapes, le Brésil. On ne les voit désormais plus à l'écran, mais, grâce à des lettres, on finit par savoir ce qu'ils sont devenus.

   Sur presque quatre heures, cela constitue une fresque impressionnante, d'une grande qualité plastique, très bien jouée. La grande histoire se marie parfaitement avec la petite, celle du quotidien de ces gens ordinaires auxquels on finit par beaucoup s'attacher.

23:59 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 25 octobre 2013

Sur le chemin de l'école

   Ce documentaire suit en alternance quatre types d'enfants, tous nés dans un "pays en développement" : Jackson et Salomé dans la savane kényane, Zahira et ses copines dans les montagnes marocaines, Samuel et ses frères dans la campagne indienne, Carlos et sa soeur en Patagonie.

   Le montage est habile : on retrouve chaque groupe d'enfants à plusieurs reprises, à chaque fois à un stade différent de son périple. Trois des quatre groupes effectuent leur trajet (de 10 à 20 kilomètres) chaque jour, aller et retour, alors que les Marocaines partent le lundi pour ne revenir que le vendredi. Dans la salle, les parents sont accompagnés de leurs petits... alors que c'est aux ados blasés, gâtés pourris, rivés à leur téléphone portable (ou à leur console de jeux) que cette projection ferait le plus grand bien.

   Qu'en retenir ? Que le Kényan Jackson est d'une vive intelligence, qui transparaît en particulier dans l'une des scènes de la dernière partie du film. Au passage, son périple (et celui de sa soeur cadette) nous aura permis d'accéder à de superbes images de la savane, avec ses girafes et ses éléphants.

   De leur côté, les gamines de l'Atlas doivent faire preuve d'inventivité pour arriver à l'internat dans les temps. On s'aperçoit aussi que la société marocaine est devenue très individualiste. Chacun vaque à ses occupations, sans se préoccuper de l'autre. Je vous laisse aussi découvrir le rôle de la poule que Zahira transporte dans un sac.

   Les plus méritants sont les Tamouls (originaires du Sud-Est de l'Inde), l'un des frères étant sévèrement handicapé sur le plan physique (mais brillant sur le plan intellectuel), les deux autres joignant tant bien que mal leurs forces pour l'emmener jusqu'à l'école, où il reçoit un accueil qui fait chaud au coeur. C'est dans cette partie de l'histoire que sont glissés quelques moments de comédie.

   En Argentine, les paysages sont aussi magnifiques, mais je dois avouer que j'ai été moins touché par ce chapitre-là.

   Le gros défaut du film est le doublage en français, vraiment mauvais (il sonne très artificiel). Il aurait mieux valu procéder comme dans certains reportages télévisés : garder les vraies voix des protagonistes en fond sonore et leur superposer la traduction. On sent aussi à plusieurs reprises le côté scénarisé de certaines scènes, que l'on a visiblement demandé aux gamins de rejouer. Mais cela reste globalement un divertissement plaisant... et civique.

21:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mercredi, 23 octobre 2013

Eva

   Par le plus grand des hasards, j'ai découvert ce petit film espagnol, sorti l'an dernier. Avec une économie de moyens et beaucoup de talent, l'auteur nous livre un bijou de science-fiction, un peu à l'image de ce que fut [Rec] pour le genre horrifique et Insensibles pour le drame historique.

   Nous sommes en 2041. Des voitures électriques circulent en grand nombre. Dans leur vie quotidienne, les humains côtoient des robots plus ou moins évolués. Perdu dans les montagnes enneigées, un centre de recherche innove dans ce domaine. L'histoire commence avec le retour d'un ancien jeune prodige, incarné par Daniel Brühl :

cinéma,cinema,film

   Et là vous vous dites que vous connaissez ce type. Il s'agit de l'acteur révélé par l'excellent Good Bye, Lenin !, qui a fait du chemin depuis. On a pu le voir notamment dans Joyeux Noël, 2 Days in Paris et John Rabe. Etrangement, cet acteur allemand parle un espagnol parfait. Ce serait oublier qu'il est né à Barcelone, d'une mère espagnole !

   Face à lui se trouve principalement une jeune fille d'une dizaine d'années, la fameuse Eva, interprétée avec conviction par une actrice à surveiller, Claudia Vega :

cinéma,cinema,film

   Plusieurs mystères planent dès le début. On ne sait pas pourquoi le héros est parti il y a dix ans. On sent que quelque chose s'est passé entre lui, son frère et la femme de celui-ci, qui était sa partenaire autrefois. A ce non-dit familial se rajoutent les recherches secrètes. Sur quel projet travaillait-il autrefois ? Est-ce le même que celui pour lequel il vient d'être engagé ? Pourquoi Lana (la compagne de son frère) a-t-elle renoncé à la recherche pour se consacrer exclusivement à l'enseignement ? Et qui est réellement Eva, cette gamine pour laquelle le héros ressent immédiatement de l'affection ?

   Le film fonctionne sur la base d'un long retour en arrière. La fin permet d'éclairer la séquence du début. Entre temps, on aura découvert cette Espagne futuriste, où un scientifique vit en compagnie d'un chat-robot :

cinéma,cinema,film

   Signalons que s'il miaule et ronronne comme un vrai sac-à-puces, il n'urine pas ! (Vive le progrès !)

   Dans l'univers du héros gravite aussi un domestique d'un genre très particulier, Max. C'est un robot très perfectionné, d'une obséquiosité extrême, mais capable d'initiatives. Il est précieux au quotidien, même s'il semble parfois inquiétant :

cinéma,cinema,film

   Les effets spéciaux, peu nombreux mais bien dosés, sont remarquables. J'ai particulièrement apprécié la représentation de la construction de "l'âme" des robots (leur mémoire émotive), à l'aide d'une animation numérique qui évoque une architecture neuronale de cristal :

cinéma,cinema,film

   Pendant 1h30, je suis resté littéralement scotché à mon fauteuil. A voir absolument si vous en avez l'occasion.

20:11 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

mardi, 22 octobre 2013

L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet

   Jean-Pierre Jeunet se fait rare. Il a fallu attendre quatre ans après Micmacs à tire-larigot. Malheureusement, c'est outre-Atlantique que le créateur français a trouvé l'inspiration : cette histoire se déroule aux Etats-Unis, du Montana jusqu'à Washington, en passant notamment par Chicago.

   C'est donc une sorte de road movie, ou plutôt un railway movie, puisque que le jeune héros voyage principalement par train. Il veut se rendre dans la capitale fédérale pour y présenter son invention. En même temps, il fuit le contexte familial, marqué par le décès de son frère, dont il se sent responsable.

   Le film embrasse plusieurs thèmes. C'est d'abord une comédie familiale, qui présente une drôle de tribu, bien dans l'esprit de Jeunet. Le père est un cowboy mutique mais aimant. La mère (Helena Bonham Carter, vraiment très bien) est une scientifique hyper pointilleuse, qui travaille à la maison. La soeur aînée rêve de concours de beauté... et surtout de sortir de ce pays de "bouseux" ! Le jeune T.S., qui se désespère de ne pas être le fils idéal qu'aurait aimé avoir son père, se réfugie dans ses inventions et ses obsessions.

   A l'écran, en 3D, cela donne des plans magnifiques. Jeunet sait utiliser la technologie pour mettre en valeur certains éléments du décor ou certains objets. Voilà enfin un film qui mérite le supplément de deux euros !

   L'intrigue regorge de moments cocasses, qui rappellent Amélie Poulain. Jeunet a le sens du détail. Mais en route, il perd un peu le jeune public qui, dans la salle, a eu tendance à demander des explications aux adultes. De plus, j'ai trouvé que le héros s'exprimait de manière trop littéraire. Ajoutez à cela les gros plans, qui permettent de se rendre compte du doublage, et vous aurez les quelques défauts du film.

   L'intérêt remonte dans la dernière partie. Le gamin va être "pris en mains" par des ambitieux (Judy Davis et Rick Mercer, excellents cabots). Si l'émotion nous prend au moment du discours, l'humour nous saisit lors de l'avant-dernière séquence, qui se déroule sur un plateau de télévision.

   C'est un film sympathique, souvent drôle, brillant sur le plan formel, où l'on sent malgré tout poindre un mélange de tristesse et de nostalgie.

00:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

lundi, 21 octobre 2013

Merci Groland !

   L'émission du 12 octobre dernier fut d'un bon niveau. Parmi les reportages marquants, il faut relever celui consacré à une retentissante affaire de détournement de fonds, dite "affaire Bitencourt" :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Les enquêteurs grolandais peinent à démontrer l'abus de faiblesse dont la milliardaire aurait été victime de la part d'un ancien candidat à la présidence de la République.

   L'actualité "chaude" traite de la délinquance, sous toutes ses formes. La fine équipe d'humoristes a mis au point une séquence qui, tout en se payant la tête d'une chaîne populiste (admirez le logo, en haut en droite), pointe les vrais voyous qui ruinent nos sociétés :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Après les vieux, place aux jeunes ! C'est avec ironie que le journal évoque les emplois d'avenir hollandiens, à travers le "contrat d'emploi cool", une manière de stigmatiser la fainéantise d'une partie de la jeunesse française d'aujourd'hui :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Du côté des actifs, on ne chôme pas. Des voleurs s'en sont pris à un caviste... mais ils ont commis l'erreur de consommer très vite une partie du produit de leur larcin :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   La remise des prix Nobel étant d'actualité, l'équipe de Made in Groland s'est intéressée aux recherches portant sur l'accouchement masculin... une entreprise risquée :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Enfin, les bruits de guerre devenant le quotidien des informations, l'armée grolandaise a décidé de se préparer au pire, face aux troupes brésiliennes (dotées de sacrés obus !) :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Mais le titre de ce billet est en relation avec une autre séquence de l'émission, consacrée au comportement de certains spectateurs de cinéma :

cinéma,cinema,film,humour,télévision

   Cela fait du bien qu'à une heure de grande écoute, une émission prenne une partie du public à rebrousse-poil. D'ailleurs à Rodez, depuis l'ouverture du multiplexe, on sent que l'on pousse les clients à manger sur place, quitte à ce que les salles soient jonchées de détritus à la fin de la séance... parce que figurez-vous que les consommateurs de pop-corn, non contents d'être des petits-bourgeois égoïstes adeptes de la junk food, sont mal élevés et en renversent plein dans l'allée, quand ce n'est pas sur les sièges... Et voilà les opérateurs du cinéma, désormais priés d'être polyvalents. Ils font donc office de projectionnistes, caissiers, vendeurs de confiseries... et "techniciens de surface" dans les salles.

dimanche, 20 octobre 2013

Blue Jasmine

   Le nouveau film de Woody Allen marie l'anglo-américain et le français, dans une comédie douce-amère qui tourne autour des rapports entre les hommes et les femmes. L'héroïne, bien qu'incarnée (à la perfection) par la superbe Cate Blanchett, est antipathique. Si je ne répugnais pas à être grossier, je dirais que le film aurait pu s'intituler Grandeur et misères d'une pétasse.

   Jasmine est une snob de la côte Est, fascinée par l'Europe... surtout la France (Paris, Saint-Tropez, Cannes...). Coup de bol pour elle, elle s'appelle French. Elle porte même un prénom français, à l'origine : Jeanette. C'est aussi une inconditionnelle de la mode d'outre-Atlantique (Hermès, Louis Vuitton...). De temps à autre, les dialogues sont émaillés de mots français (dans la version originale sous-titrée). On découvre ce personnage dans toute sa splendeur grâce aux retours en arrière, qui, judicieusement placés, éclairent un passage de l'histoire qui se déroule sous nos yeux, celle d'une dame de la haute société en pleine déchéance.

   Cate Blanchett est épatante à tous les niveaux. Elle livre une excellente interprétation aussi bien de la mondaine sûre d'elle et de son bonheur, que de l'ex-madame au purgatoire chez sa sœur méprisée (Sally Hawkins, très bien) et de la femme perdue, entre ses mensonges et ses rêves de grandeur.

   L'intrigue est agrémentée d'un humour acide, fondé sur le fossé socio-culturel (caricatural) entre les classes supérieures de la côte Est, richissimes, arrogantes et la conscience tranquille malgré leur malhonnêteté et les gagne-petit de la côte Ouest, à la fois hostiles et fascinés par les premières.

   Le film se veut aussi moral. Le mensonge ne mène pas au bonheur. Certains personnages vont en faire l'expérience cruelle. On découvre aussi petit à petit la complexité de la personnalité de Jasmine, que le réalisateur place dans beaucoup de situations inconfortables. (Il reste toutefois assez indulgent avec elle, les défauts des autres prenant parfois le pas sur les siens.)

   Ce n'est pas un grand Woody Allen, mais l'on passe un bon moment, dans une ambiance jazzy (avec pour fil conducteur le morceau  Blue Moon), en compagnie d'une actrice qui n'a jusqu'à présent pas été reconnue à sa juste valeur.

14:27 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 19 octobre 2013

Panpan cucul sur la propagande

   Ces derniers temps, on a beaucoup parlé de la récente condamnation d'un père qui a administré une fessée "cul nu" à son fils récalcitrant. Au passage, les médias se sont parfois gardés de souligner que cet incident s'inscrit dans une histoire familiale difficile (la séparation d'un couple)... et que c'est la mère (et pas l'enfant, bien entendu) qui a porté plainte. Je ne suis pas loin de penser qu'au-delà du rejet du châtiment corporel, la mère cherche à s'appuyer sur une décision de justice dans une procédure de divorce.

   N'allez pas croire que je sois un fervent partisan de ce genre de correction. Il existe bien des manières de faire comprendre à un-e enfant qu'il(elle) a dépassé les bornes. La violence physique ne doit être qu'un ultime recours. Mais vouloir l'interdire quelle que soit la situation me paraît aussi stupide que la croyance que c'est à coups de ceinturon qu'on dresse efficacement sa progéniture. Dans le cas qui nous occupe, d'après ce que j'ai pu lire ici et là, il semble que le père se soit un peu emballé ; il aurait pu agir autrement. (Ceci dit, il est facile pour moi de lui faire la leçon, confortablement assis devant l'écran de mon ordinateur...)

   Si les médias ont fréquemment évoqué l'affaire, certains n'en sont pas restés aux faits. Ils ont visiblement voulu peser sur l'opinion, qui reste attachée au "droit de correction". Le supplément "Culture et idées" du Monde de ce samedi 19 octobre (version papier) fait sa "une" sur le sujet :

presse,médias,actualité,société,journalisme

   L'illustration n'est pas datée. Ce n'est évidemment pas une photographie "spontanée", comme en témoigne le regard de l'enfant tourné vers l'objectif. Elle a d'ailleurs déjà servi, puisqu'on la retrouve dans un article du quotidien gratuit 20minutes du 27 avril 2011. C'est une scène simulée. En pages intérieures, l'article du Monde est accompagné d'une gravure française de 1900 :

presse,médias,actualité,société,journalisme

   Sur le site internet du quotidien, on peut trouver un billet du blog "Big Browser" consacré à l'affaire, illustré par une image italienne de la seconde moitié du XIXe siècle :

presse,médias,actualité,société,journalisme

   Curieux de nature, je suis allé jeter un oeil à la version numérique de l'article que j'ai évoqué plus haut. O surprise, elle n'est pas introduite par la même photographie :

presse,médias,actualité,société,journalisme

   Cette différence n'est pas anodine. D'habitude, elle est due à des questions de droits. Ici, il y a volonté de guider subrepticement l'interprétation des faits. La légende de la photographie est là pour montrer au public cultivé que seuls des esprits barbares peuvent fesser leurs enfants. Pensez donc ! La photo a été prise "vers 1935", c'est-à-dire sous le régime nazi. Quelle subtilité !...

   Ce n'est pas la première fois que je surprends le quotidien en flagrant délit de manipulation. L'an dernier, j'avais remarqué ce genre d'attaque discrète au détour de la campagne de Marine Le Pen (mais elle ne fut pas la seule visée). Quelques temps plus tard, les illustrations d'un article consacré au vote préférentiel étaient marquées par la même subjectivité.

   P.S.

   L'émission Made in Groland de ce samedi a abordé (brièvement) le sujet avec tact et délicatesse :

presse,médias,actualité,société,journalisme

9 mois ferme

   Cela fait quatre ans que l'on attendait la nouvelle réalisation d'Albert Dupontel. Entre temps, il a (bien) fait l'acteur, dans Le Bruit des glaçons et Le Grand Soir. Il réitère certains choix de casting : on retrouve des têtes connues dans les rôles secondaires et, comme dans Le Vilain, Dupontel partage l'affiche avec une actrice de renom, ici Sandrine Kiberlain.

   On aurait pu craindre que le "choc des cultures" entre ces deux pointures ne soit pas très productif. Ce serait oublier que La Kiberlain a de la ressource. (Si vous ne l'avez pas vu, courez télécharger, louer ou acheter Romaine par moins 30 !) De surcroît, dans un premier temps, on lui fait incarner une magistrate coincée, totalement dédiée à son travail... et intransigeante dans le boulot. Une cuite monumentale, lors du réveillon 2012-2013, va changer sa vie.

   Il faut aller voir ce film pour les performances d'acteurs. Celle de Dupontel ne sort pas particulièrement du lot. On a l'impression de retrouver l'un des personnages de ses sketchs qui aurait mûri (mais quand même mal tourné). Ce n'est pas déplaisant. Kiberlain est vraiment excellente, aussi bien en juge inflexible qu'en célibataire bourrée et en future maman désemparée.

   Que dire aussi des seconds rôles ! C'est avec plaisir que l'on retrouve Nicolas Marié (qui en fait toutefois un peu trop) et Bouli Lanners, hilarant dans la séquence de visionnage des bandes de vidéo-surveillance ! Ces deux compères étaient déjà présents dans Le Vilain. Il faut ajouter Philippe Uchan (un vieux complice de Dupontel), qui s'en prend plein la tête, au propre comme au figuré !

   Je laisse à chacun découvrir les apparitions des multiples invités. Je signale juste celles de Terry Gilliam (en admirateur... mais de qui ?) et de Jean Dujardin, excellent dans le rôle du traducteur en langage des signes (un procédé pas nouveau nouveau, mais toujours efficace !).

   J'ajoute l'apparition d'une non-professionnelle, Michèle Bernard-Requin, ex-magistrate (qui incarne la supérieure hiérarchique de l'héroïne) que le grand public a découverte naguère dans le documentaire de Raymond Depardon 10e Chambre, instants d'audience.

   Je conseille aussi d'être attentif aux scènes qui font intervenir la télévision, en particulier à ce qui défile en bas de l'écran !

   C'est donc une comédie (brève : moins d'1h30) tonique, aux dialogues bien écrits, parfois inventive sur le plan visuel. Enfin un film français qui sort du lot !

17:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 18 octobre 2013

Diana

   Je ne suis pas "client" de ce genre de film, a priori. De plus, la bande-annonce doublée en français est mauvaise. Mais il y a Naomi Watts... et une histoire que je ne connaissais pas, celle de l'amour né entre l'ex-femme du prince Charles et un chirurgien pakistanais.

   L'histoire fonctionne sur la base d'un grand retour en arrière. A la fin, on reverra la première séquence, assez énigmatique. Sans trop en dire, je peux révéler qu'elle accentue le côté mélodramatique du film. Ce n'est pas ce qu'il a de meilleur.

   Le meilleur (en version originale sous-titrée) ? La comédie romantique qui occupe le coeur de l'intrigue. J'ai ri sincèrement à la naissance de cette passion entre la vedette et l'inconnu, entre la protestante et le musulman. Toutefois, le couple d'acteurs ne resplendit pas du même éclat. J'ai trouvé Naveen Andrews assez fade, alors que Naomi Watts est épatante (et bien plus jolie que celle qu'elle incarne). Elle est particulièrement charmante quand elle invente des stratagèmes pour retrouver son homme :

cinéma,cinema,film

(Ici, elle s'est déguisée en Laure Adler jeune.)

   Cependant, le film est un peu trop en empathie avec l'héroïne, même s'il ne cache pas qu'elle a usé de sa notoriété à des fins autres qu'humanitaires. La relation ambiguë qu'elle a nouée avec la presse poubelle n'est qu'esquissée. De plus, l'action de celle-ci n'est dénoncée que parce qu'elle pourrit la vie de Diana. Rien n'est dit de son côté abrutissant. Le paradoxe est que ces médias qui la harcèlent contribuent à faire d'elle une icône. Pas de cohortes de fans sans photos et articles racoleurs...

   On semble aussi avoir soigneusement évité de trop évoquer la famille royale d'Angleterre. La reine n'est même pas mentionnée et l'on entraperçoit à peine les fils de l'héroïne.

   Les voyages de celle-ci sont toutefois prétextes à de jolies tranches de vie, que ce soit dans un champ infesté de mines antipersonnel ou au Pakistan, chez les parents de son chéri d'amour, dans une séquence vraiment très enlevée.

   Cela se regarde comme certains bons films sentimentaux avec Julia Roberts. Sans plus.

20:33 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 17 octobre 2013

L'enfance de l'art

   En cette fin d'après-midi ensoleillée, je déambulai paisiblement dans le vieux Rodez lorsque, passant par la rue Louis Blanc, je croisai une femme d'âge moyen, tenant celle qui était sans doute sa fille par la main. Voici ce que j'entendis :

- Dis, nous, on n'est pas en France, là ?

- Mais si, puisqu'on est dans l'Aveyron !

   Je vous souhaite le bonjour, nous vivons une époque moderne.

dimanche, 13 octobre 2013

Shérif Jackson

   Le héros éponyme est un homme de loi peu conventionnel : il chante et il danse, y compris pendant qu'il exerce ses fonctions. Sa coupe de cheveux détonne dans le monde du Far West. Il est incarné par un Ed Harris (un vieux routier des seconds rôles) très inspiré :

cinéma,cinema,film

   Il débarque dans ce coin paumé de l'Amérique à la recherche de deux frères (interprétés par les réalisateurs), l'un étant le petit ami de la fille du gouverneur. Il va falloir qu'il cherche beaucoup, puisque, dès la deuxième séquence, les spectateurs ont pu constater qu'il leur arrivait quelques bricoles !

   Au cours de l'enquête, le shérif va se muer en Gil Grissom et utiliser les méthodes les plus modernes de l'époque pour identifier les responsables des crimes qui sont commis. La séquence qui aboutit à l'analyse de la composition de quatre balles est particulièrement réussie. J'ai aussi beaucoup apprécié la manière dont est mis en scène le recouvrement des balles. La scène la plus réjouissante est sans conteste l'exploration du cadavre d'un commerçant. Le shérif est filmé de dos, mais je peux vous dire qu'il y a eu un gros travail sur le son !

   Le deuxième personnage principal est le prophète Josiah, un homme à qui l'on serait tenté de donner le bon Dieu sans confession... et l'on aurait tort. C'est une véritable pourriture, un chef de bande qui s'est construit une petite secte fanatisée par la lecture de la Bible, secte dans laquelle il puise sans vergogne pour satisfaire ses besoins sexuels...

cinéma,cinema,film

   Il faut relever l'interprétation très convaincante de Jason Isaacs, dont le nom ne vous dit peut-être rien, mais qui s'est rendu célèbre naguère dans le rôle de Lucius Malefoy (dans la saga Harry Potter) :

cinéma,cinema,film

   Il s'est aussi fait remarquer en lieutenant Briggs, dans l'excellent Green Zone :

cinéma,cinema,film

   On pourrait ajouter à ce tableau masculin le personnage de l'épicier libidineux (promis à un sort particulier) et celui du banquier véreux. Bref, l'histoire déconstruit le mythe des pionniers du Far West. Ce n'est pas nouveau nouveau, mais cela ne fait pas de mal... d'autant plus qu'est ajoutée une satire du fondamentalisme protestant. Mais tous ces bonshommes vont se faire damner le pion par la véritable héroïne de ce film :

cinéma,cinema,film

   January Jones (déjà vue dans Good Morning England, Sans Identité et X-Men : le commencement) ne paie pas de mine, de prime abord. Elle est l'épouse aimante d'un fermier sans doute originaire du Mexique. Seul petit détail : elle tire beaucoup mieux que lui au révolver, élément qui a son importance dans la suite de l'histoire.

   Très vite, on comprend qu'elle cache un lourd passé... et que les mecs du coin ont terriblement envie de lui mettre le grappin dessus. Sachez qu'ils seront punis par où ils ont péché. J'ai en mémoire cette scène merveilleuse, qui montre Sarah en train de se baigner nue dans un étang isolé. On ne la voit que de dos. Deux acolytes du prophète pensent que c'est l'occasion à saisir. Les spectateurs qui possèdent plus de dix neurones se disent que tout cela est bien louche... et ils ont raison !

   Moins glorieuse pour l'héroïne (mais très maîtrisée du point de vue de la réalisation) est la troisième rencontre entre le prophète et Sarah. Le religieux se montre d'une incroyable hypocrisie, accentuée par la mise en scène : il est souvent filmé en contre-plongée ou de biais. Soyez notamment attentif au réveil de l'héroïne...

   Je ne peux pas terminer ce billet sans évoquer la scène du dîner, chez le prophète. Le shérif fait partie des invités, presque tous obséquieux avec l'homme fort de la contrée, qui a fait installer à grand frais une magnifique table en bois dans son salon. Notre bon vieux Jackson va se montrer d'une urbanité désopilante au cours du repas...

   Ce western atypique est l'excellente surprise de cet automne. Il est bien filmé, bourré d'humour... et les "méchants" en prennent pour leur grade !

12:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 11 octobre 2013

Jimmy P.

   C'est un film d'Arnaud Desplechiant, avec Mathieu Amalric... tout pour me faire fuir, donc. Mais l'histoire, inspirée de faits réels, a piqué ma curiosité et les extraits vus ont achevé de me convaincre de tenter l'expérience.

   Pourtant, la première scène qui fait intervenir Mathieu Amalric m'a fait craindre le pire. L'un des médecins de l'hôpital américain le contacte par téléphone. Le psychanalyste se trouve dans un bar, visiblement sans domicile fixe ni travail. L'acteur exprime maladroitement un enthousiasme exacerbé. Heureusement, cela s'améliore par la suite, notamment lors du premier entretien entre les deux héros, qui voit le psy utiliser ses connaissances anthropologiques pour nouer le contact avec son patient.

   Le film est principalement composé de scènes de dialogues. Les plus nombreuses sont celles qui font intervenir l'Indien Blackfoot (Benicio Del Toro, excellent) et le psy européen juif (Amalric, qui a trouvé le ton juste). D'autres confrontent chacun des deux héros aux femmes, le premier à sa soeur ou à son ex, le second à sa maîtresse. On comprend que, malgré leurs différences, ils éprouvent des difficultés semblables à gérer leurs relations avec la gent féminine. Cet aspect du film a suscité des réactions, parce que les portraits de femmes (les trois citées, plus quelques autres) ne sont pas très positifs. Le plus beau personnage est sans conteste celui de la grande soeur de Jimmy, femme de tête, forte et faible à la fois. Elle est incarnée par Michelle Trush.

   Un autre élément rapproche les deux hommes : l'appartenance à deux peuples qui ont subi un massacre de masse. Il est amusant de constater qu'ils communiquent dans un anglais abâtardi. L'Indien acculturé s'exprime difficilement, avec une syntaxe approximative. Le psy a un langage plus fluide, mais un accent prononcé, censé évoquer une origine centre-européenne.

   J'ai du mal à l'expliquer, mais je ne peux que le constater : le montage réussit à faire toucher du doigt ce que peut être une thérapie s'appuyant sur certains acquis de la psychanalyse. Mais le grand talent du film est de montrer que les deux hommes en tirent profit. L'Indien se débarrasse de ses cauchemars et envisage de redonner un sens à son existence. Le psy obtient la reconnaissance de ses compétences (avec un poste en fac en bout de piste) et peut espérer refaire sa vie en Amérique, loin de cette Europe guerrière, raciste et à moitié détruite.

   C'est donc un beau film, bien joué, mais de facture classique. Il nécessite un certain effort de la part des spectateurs. Mais il le mérite.

23:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 10 octobre 2013

The Place to be

- Allo, Riri ? Devine ce que je viens de récupérer !

- Euh... comment veux-tu que je sache ?

- Allez, essaie !

- Euh... la bague de ta grand-mère ? Tu m'as bien dit que tu l'avais perdue ?

- Non... enfin si, mais ce n'est pas ça ! Pense plutôt à l'actualité !

- ... Ne me dis pas que tu as réussi à mettre la main sur le programme d'Yves Censi pour les municipales ?

- Mais qu'il est con !!!! Pense à tes centres d'intérêt !

- Mmmm... aurais-tu un abonnement ciné pour le nouveau multiplexe ?

- Presque ! J'ai deux places pour l'inauguration de mardi ! Je pense y aller avec un mec sympa, drôle... et surtout pas trop râleur !

- Tu as ça dans tes relations ?

- Il paraît... mais je suis pas sûre pour le "pas trop râleur"... Bon, ça commence à 18 heures, sur l'esplanade. Tu pourras m'y rejoindre ?

- Attends, je réfléchis... Ils font quand même chier... encore un horaire pour fonctionnaires, femmes au  foyer, retraités et chômeurs ! Et puis je suis fatigué, moi !

- L'apéritif est offert par la municipalité... et, dans le cinéma, une collation gastronomique sera servie après le concert.

- OK, j'y serai.

   Vint le mardi. Autour de l'esplanade, du Foirail à la salle des fêtes, des policiers municipaux orientaient piétons et automobilistes. Il y avait un monde fou. On parle de plus de 600 invitations lancées ce qui, avec les accompagnateurs, fait plus de 1 000 pékins.

   Au départ, je n'avais même pas vu le buffet planté devant l'entrée du cinéma, tant la foule était compacte. Une fois ce détail stratégique assimilé, j'ai enfilé mon costume de chevalier servant et j'ai tenté une approche, en quête de victuailles. Il a fallu un peu jouer des coudes, d'autant plus que plusieurs groupes semblaient maîtriser la tactique d'occupation du territoire : toujours proches du buffet, mais jamais vus en train de se servir, ils buvaient et mangeaient à volonté. Pendant un instant, j'ai été presque admiratif. Vite, j'ai réalisé qu'il ne fallait pas trop rêvasser, sinon je risquais d'être percuté par l'une des innombrables sommités politico-économico-administratives qui hantaient cette foule. Eux sont habitués à ce que l'on s'écarte sur leur chemin. L'un d'entre eux me parut plus habile encore. Il s'agit de Passepartout Manuel Cantos, qui évoluait dans la foule avec une facilité déconcertante, passant sans problème entre les jambes des invités.

   Arrivé au buffet, je respirai un peu. La nourriture était composée d'amuse-gueule bon marché. Je reconnais là la gestion Teyssèdre, qui veut bien prendre la peine de régaler l'assemblée... mais à moindre coût. Du côté des liquides, on trouvait les traditionnels jus de fruit, de l'eau et, heureusement, du vin blanc et de la crème de cassis.

   C'est au moment où j'ai dû me saisir des deux gobelets remplis d'un liquide rougeâtre que je me suis rendu compte qu'il allait être difficile d'emporter du solide avec. Comment faire ? Je songeai à poser les gobelets pour me remplir les poches de cochonneries aux acides gras insaturés. J'envisageai aussi de récupérer une assiette en plastique pour la garnir d'un florilège desdites cochonneries. La crainte du scandale me retint. Finalement, je choisis de commencer à boire mon kir, puis de transvaser un peu du second dans le premier verre. Ensuite, je pus tenir les deux gobelets avec les doigts d'une seule main, sans les faire tremper dans le précieux liquide. De l'autre, j'emportai de quoi grignoter.

   Revenu auprès de Dulcinée, je constatai qu'elle avait été abordée par l'une de ses connaissances, un individu louche de sexe masculin.

- Tiens, Henri ! Quel plaisir de voir ta gueule d'abruti ! Comment vas-tu ?

- Ca va, ça va. Tu es venu seul ?

- Non, avec ma copine. D'ailleurs, je l'ai perdue. Je crois qu'elle est partie chercher du vin blanc.

- Il paraît qu'il est très correct. Désolé, je n'en ai pris que pour nous deux. Sinon, tu penses bien que j'aurais pris plaisir à cracher dans un troisième gobelet !

- Bon, ben, je vais voir si je la trouve. A plus !

- C'est ça, casse-toi, pov' con ! Bonne soirée !

   Peu après, des applaudissements ont retenti. Le ruban était coupé. La masse des invités pouvait commencer à entrer dans le multiplexe. Très vite, un groupe s'est mis en tête de faire le siège des entrées de la salle 1, négligeant d'effectuer la visite des locaux. L'explication n'allait pas tarder à venir : le nombre de places étant limité, seuls les "pipoles" et les premiers entrés auraient droit au concert, les autres devant se contenter de la retransmission dans la salle 2.

   Et pourtant, la visite valait le coup. Nous avons déambulé entre les salles, testant les fauteuils, regardant et écoutant les bandes-annonces. Conclusion : on est bien assis, les sièges sont disposés en gradins, les écrans sont grands et le son est bon. Cerise sur le gâteau : les toilettes, très jolies, fonctionnelles. Elles donnent envie d'aller dans le multiplexe rien pour y uriner ! Ah, j'oubliais : le sèche-mains automatique, merveille de technologie... avec un petit écran sur lequel s'affiche la durée de courant d'air asséchant !

   Après les discours, après le concert, après la première séance (offerte aux invités), la collation a été servie. On a retrouvé les mêmes pique-assiette. Mais, là, le menu était plus haut de gamme. Ce fut la ruée. J'ai plus tard entendu dire qu'on avait prévu la présence de 300 convives. On avait visiblement sous-estimé la gloutonnerie de certains invités. Seule note positive : le champagne, abondamment servi, était délicieux.

   Bon, c'était pas tout ça, mais les gens normaux travaillaient le lendemain. Nous sommes donc partis avant le feu d'artifice, dont je ne sais même pas s'il a eu lieu. En quittant le cinéma, j'ai croisé un visage qui me disait quelque chose. Je me suis souvenu l'avoir vu dans un mini-multiplexe aveyronnais, pas très éloigné de Rodez. Une mienne connaissance m'a appris qu'il avait candidaté pour la direction du nouveau cinéma ruthénois, mais qu'il avait été finalement engagé au poste de directeur-adjoint. Voilà au moins une personne qui est persuadée que ce multiplexe est destiné à un grand avenir !

mercredi, 09 octobre 2013

Le Majordome

   A la base, il y a l'histoire (vraie) d'Eugene Allen, un Noir né dans une plantation qui a fini par devenir majordome à la Maison Blanche. Il a servi sous une brochette de présidents : Harry Truman (ce qui n'apparaît pas dans le film), Dwight Eisenhower, John Kennedy, Lyndon Johnson, Richard Nixon, Gerald Ford, Jimmy Carter et Ronald Reagan.

   Le film entremêle l'histoire familiale de cet homme ordinaire au destin exceptionnel (incarné avec talent par Forest Whitaker) et la lutte pour les droits civiques, à laquelle l'un de ses fils va activement participer. Au second niveau, le film pose la question de l'efficacité de l'action politique. Qu'est-ce qui a le plus fait progresser la cause des Noirs ? La révolte des activistes, parfois violemment injuste, ou les accommodements de la majorité silencieuse, qui ont rendu la cohabitation avec les Blancs acceptable ? Les scènes de dispute entre le père majordome et le fils étudiant sont des moments clés.

   On suit avec plaisir les pérégrinations familiales parce que des individus ordinaires sont incarnés par des acteurs de renom... ou des célébrités de la Communauté. Jetez un œil au casting !

   Attention toutefois. Pour les besoins de la dramatisation, la vie du héros a été quelque peu scénarisée. Un billet publié sur un blog du site américain Slate propose d'intéressantes mises au point.

   Même si le film dure plus de deux heures, on passe assez rapidement sur les différents présidents. Je suis tout de même satisfait que l'on rende justice à l'administration (républicaine) Eisenhower, qui a réellement enclenché la lutte contre la ségrégation. Robin Williams est un bon interprète de ce président humaniste. Sans surprise, hélas, il n'est donné qu'une version hagiographique de son successeur, John Fitzgerald Kennedy. Quelques anecdotes (réelles, comme celle de la cravate) donnent du relief à cet épisode convenu. On ne sera donc pas étonné que le portrait de Lyndon Johnson (Liev Schreiber, truculent) soit essentiellement à charge, comme souvent dans le cinéma américain, qui ne pardonne pas l'enlisement au Vietnam. C'est oublier un peu vite que l'essentiel de la "déségrégation" est dû à l'action de ce président sudiste, un peu brut de décoffrage, mais soucieux du bien commun... et des deniers publics !

   On passe très vite sur le bilan de Richard Nixon, d'abord présenté comme un vice-président (d'Eisenhower) arriviste et sans scrupule, puis comme un alcoolique magouilleur. Ce n'est pas dénué de fondement, mais je pense qu'il méritait mieux. On ne fait qu'entr'apercevoir Gérald Ford et Jimmy Carter, bien que ce dernier (et son épouse) aient laissé un très bon souvenir au vrai majordome. Mais ils sont tellement moins "glamour" que les Kennedy...

   La carrière du serviteur zélé s'achève sous Reagan, montré comme un mec sympa mais aux convictions parfois très arrêtées. On laisse à l'un de ses opposants le soin d'évoquer les ravages sociaux de sa politique. Il faut souligner la qualité de l'interprétation d'Alan Rickman et Jane Fonda, qui ressuscitent Ronald et Nancy avec brio. La fin du film montre le vieux couple noir soutenir Barack Obama. C'est un peu trop "politiquement correct"...

   On peut aussi lire ce film comme une histoire de la lutte des Noirs pour les droits civiques. Là encore, deux figures majeures sont à peine esquissées : Martin Luther King et Malcolm X. On nous propose une vue plus fouillée des militants de base et de leurs actions coup de poing. Cela nous vaut certains des meilleurs moments du film.

   A plusieurs reprises, celui-ci dénonce la violence dont les Blancs racistes sont les auteurs. Cela commence dans la plantation (un épisode fictif)... On  se croirait plutôt au temps de l'esclavage que dans l'Entre-deux-guerres. Anachronisme ? Cela se poursuit par ces petits Blancs de base qui ne supportent pas que des manifestants pacifiques remettent en question la ségrégation. Le summum est atteint lors de l'intervention de membres du Ku Klux Klan.

   Tout cela forme un ensemble plutôt bien fichu, un peu convenu... et parfois gâché par une musique trop insistante. Mais, pour moi, la qualité de l'interprétation emporte l'adhésion et cette petite leçon d'histoire mérite le détour.

   P.S.

   Après discussion avec d'autres cinéphiles, qui n'ont pas tous eu le même ressenti à propos de ce film, une conclusion s'impose : il faut le voir en version originale sous-titrée, la VF étant assez mauvaise.

lundi, 07 octobre 2013

La cantonale du désamour

   On a dit et écrit quelques bêtises à propos du premier tour de l'élection cantonale partielle de Brignoles (dans le Var). Pour bien en comprendre les enjeux, il convient de comparer les résultats de 2013 avec ceux de 2012 et ceux de 2011... parce que, eh oui, dans ce canton, les électeurs ont été appelés trois fois aux urnes en deux ans, pour le même scrutin.

   Si l'on ajoute à cela deux tours de présidentielle et deux tours de législative, on réalise qu'avec dix consultations en un peu plus de deux ans, la lassitude a peut-être gagné une partie de l'électorat. Qu'en est-il de l'abstention ? En 2011, elle était déjà de presque 52 %. En 2012 (pour la première partielle), elle est montée à 62 %, pour culminer à presque 67 % en 2013. La montée de la non-participation est donc une tendance lourde. Elle désavantage le candidat arrivé troisième, qui ne peut réunir 12,5 % des inscrits. C'est aujourd'hui le cas de Laurent Carratala, qui n'atteint même pas 5 % des inscrits... mais aussi de la candidate UMP Catherine Delzers, qui a recueilli un peu moins de 7 % des inscrits.

   Seul le frontiste Laurent Lopez dépasse la barre fatidique... mais de très peu : 13,11 % des inscrits. Ce n'est donc pas un triomphe, loin s'en faut. La lecture des précédents résultats me confirme dans cette analyse. Ainsi, en 2011, le candidat FN Jean-Paul Dispard avait recueilli 2 757 voix, soit 39 de plus que Laurent Lopez en 2013.. En 2012, le même Dispard avait quasiment maintenu son score : 2 734 voix (16 de plus que Lopez aujourd'hui). De plus, l'abstention aidant, en dépit de sa très légère baisse, il avait vu son pourcentage des exprimés augmenter et passer de 32,97 à 34,9. Cependant, cette semaine, deux concurrents FN s'opposaient : l'officiel Laurent Lopez et l'ex-officiel Jean-Paul Dispard, qui a été suspendu de son parti.

   Comme à Villeneuve-sur-Lot (pour la législative partielle), la direction du FN a misé sur un candidat plus jeune, plus "propre sur lui", quitte à laisser de côté le militant bien implanté, qui, pourtant, avait déjà été victorieux une fois et n'avait été battu que d'extrême justesse lors du scrutin précédent. Qui a dit que l'UMP et le PS avaient le monopole des conflits d'appareil ? En tout cas, le choix s'est révélé encore plus payant qu'à Villeneuve. Si l'on ajoute les voix obtenues par les deux candidats d'extrême-droite, on obtient 3 330, soit une progression de plus de 20 % par rapport à 2012. Mais... ces voix sont-elles à comptabiliser à l'extrême-droite ? Figurez-vous que l'ancien conseiller général FN vient d'appeler à voter UMP au second tour !

   L'ancien parti présidentiel n'est pas en grande forme. Il a présenté trois candidats différents aux trois cantonales. En 2011, Jean-Michel Rousseaux avait recueilli 1 981 voix. En 2012, Annie Giusti avait fait à peine mieux, avec 1 991 voix, résultat toujours insuffisant pour pouvoir se maintenir au second tour. Le paradoxe est qu'aujourd'hui, avec un score médiocre (et plus bas !) de 1 397 voix, Catherine Delzers est qualifiée pour le second tour ! Ceci dit, pour la première fois, elle avait un candidat divers droite dans les pattes.

   Cela nous amène à observer l'effondrement de la gauche, véritable clé du scrutin. En 2011 comme en 2012, le communiste Claude Gilardo avait fait bonne figure, recueillant respectivement 2 636 et 3 100 voix, soit 31,53 % et 39,6 % des suffrages exprimés. On peut attribuer cette petite progression à la disparition, entre les deux scrutins, de la candidature écologiste, qui avait recueilli 987 voix en 2011. Mais, en 2013, Magda Igyarto-Arnoult a décidé de remettre le couvert. Il n'est donc pas étonnant de constater la baisse du résultat du candidat communiste, qui chute à 981 voix ! Il n'est cependant pas juste d'attribuer cette diminution à la seule candidature écologiste. Les électeurs de gauche (notamment socialistes) sont restés massivement à la maison. Quant à ceux qui ne sont gère politisés, ils n'ont visiblement pas fait la différence entre un candidat communiste (quasi dans l'opposition) et un candidat PS (émanation du gouvernement).

   On peut apporter d'autres éléments d'explication. Le candidat communiste manquait sans doute d'expérience. Le PCF et le PS n'ont de plus sans doute pas suffisamment accordé leurs violons. On peut aussi penser qu'une partie de l'électorat socialiste n'a pas voulu voter pour un candidat communiste. Enfin, il n'est pas exclu qu'au-delà de certaines divergences idéologiques entre écologistes et communistes, certains dirigeants des Verts aient décidé de torpiller des candidatures communistes, pour affaiblir le PCF et consolider la place des Verts aux côtés du PS. En clair, les bisbilles à gauche font le lit du FN.

   En théorie, les jeux ne sont pas faits pour le second tour. Si plus de 1 300 voix séparent le candidat FN de son adversaire UMP, cela représente moins de 7 % des inscrits. La dynamique est du côté de Lopez, mais sa rivale dispose sans doute d'un plus grand réservoir de voix. Il n'est pas certain qu'elle parvienne à mobiliser les abstentionnistes.