mardi, 09 décembre 2025
Touch - Nos étreintes passées
Séance de rattrapage pour moi, qui avais raté ce film à sa sortie, l'été dernier. Fort heureusement, il bénéficie d'un très bon bouche-à-oreille, à tel point que certains cinémas ont eu la bonne idée de le reprogrammer. Je l'ai donc découvert récemment, à l'occasion d'un déplacement... et je n'étais pas le seul à avoir eu cette idée, puisque la petite salle était copieusement garnie (plutôt de "tempes argentées", l'auteur de ces lignes faisant office de gamin dans cette auguste assemblée).
Tout commence lors d'un enterrement, en Islande. L'ambiance n'est pas à la gaudriole, d'autant que le personnage principal, Kristófer, apprend qu'il est gravement malade. Peut-être à cause de cela, il se replonge dans son passé et repense à sa période estudiantine, à Londres, en 1969-1970. Alors féru d'économie, il s'était découvert une passion pour la cuisine... et la fille d'un restaurateur japonais. Au départ, on ne sait pas comment a fini cet amour de jeunesse. Les scènes de 2020 (en plein Covid) alternent avec les retours en arrière, que j'ai trouvés splendides et d'une grande subtilité. On aurait pu intituler ce film La Délicatesse des sentiments. A la mise en scène se trouve Baltasar Kormákur, auquel on doit plusieurs épisodes d'une excellente série policière islandaise : Trapped ainsi que le polar Jar City.
La suite prend la forme d'une enquête biographique. Kristófer part à la recherche de son ancien amour, d'abord à Londres, puis au Japon. Le restaurateur ferme son établissement, évite de répondre à sa belle-fille au téléphone, mais noue de précieuses relations à chaque étape de son voyage. C'est l'un des bonheurs de cette histoire, pétrie d'humanité, qui montre ce vieil homme malade, animé par un feu aussi ancien qu'ardent, mener sa quête. L'une des plus belles séquences le voit rencontrer un autre veuf, au Japon.
Dans les scènes du passé, rien n'est à jeter. De la naissance d'un amour improbable à la transmission d'un art culinaire (en passant par les questionnements concernant l'exil au Royaume-Uni de cette famille japonaise incomplète), tout est amené avec subtilité, douceur, le tout servi par une photographie superbe.
C'est incontestablement l'un des plus beaux films de l'année 2025, qui fut pourtant riche en bonheurs cinématographiques... et n'est pas encore terminée !
21:32 Publié dans Cinéma, Histoire, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 06 décembre 2025
Jean Valjean
Quatre ans après Délicieux, Eric Besnard retrouve Isabelle Carré et Grégory Gadebois, pour l'adaptation des deux premiers livres des Misérables. Alors qu'on annonce la sortie sur nos écrans, en 2026, d'une nouvelle adaptation complète de l’œuvre de Victor Hugo (par Fred Cavayé), pourquoi se lancer dans cette demi-aventure ? Peut-être pour fournir à Gadebois un rôle à sa mesure. Il sera d'ailleurs intéressant de comparer sa prestation à celle de Vincent Lindon. En effet, après Harry Baur, Jean Gabin, Lino Ventura, Henri Golant et Gérard Depardieu (celui-ci sur le petit écran), ce sera bientôt au tour de l'un des acteurs les plus "engagés" du cinéma français de revêtir les habits du bagnard hugolien.
En attendant cet événement, on peut apprécier le jeu de Gadebois, qui incarne très bien la force brute, taiseuse, un peu mystérieuse de Valjean. Je regrette toutefois que le réalisateur ait accentué le côté menaçant du personnage. Dans le roman, Hugo montre très tôt l'étincelle de lumière qui subsiste aux tréfonds de la carapace de l'homme brisé. Il n'y est notamment pas question de menace contre les femmes... et Valjean n'est pas aussi miséreux que ce qui nous est montré.
Cela passe, parce que Gadebois est épaulé par un trio de bons comédiens : Isabelle Carré donc, accompagnée d'Alexandra Lamy et de Bernard Campan, dont la coiffure et certaines mimiques m'ont toutefois un peu gêné : à plusieurs reprises, j'ai eu l'impression de me retrouver face à l'un des interprètes des sketches des Inconnus.
Au niveau de la mise en scène, ce sont les retours en arrière, décrivant la période du bagne, qui m'ont le plus plu.
Il reste une peinture efficace de la grande pauvreté, celle qui frappait tant de gens dans la France de 1795-1815. Cela peut-être une bonne leçon pour les générations actuelles (adultes comme enfants, d'ailleurs), qui vivent dans un confort dont les miséreux de jadis n'auraient même pas rêvé, et qui ne songent souvent qu'à se plaindre.
11:02 Publié dans Cinéma, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, livres, livre, littérature, roman, romans
vendredi, 05 décembre 2025
Pompéi, sous les nuages...
C'est la traduction, en français, du titre italien Sotto le Nuvole, à prendre au sens propre comme au sens figuré.
Pourquoi aller voir ce documentaire ? D'abord pour en apprendre un peu plus sur le site de fouilles de l'une des plus célèbres catastrophes naturelles. Ensuite parce que c'est réalisé par Gianfranco Rosi, dont le Fuocoammare m'avait favorablement impressionné, il y a une dizaine d'années. Enfin, parce que c'est tourné en noir et blanc... et, franchement, c'est superbe.
Seule une partie du sous-sol de Pompéi a été fouillée, sans doute faute de moyens, pour mener les recherches... et sauvegarder ce qui a été mis à jour. Le film nous propose plusieurs aperçus des réserves, riches en œuvres d'art (notamment des sculptures)... et en figures statufiées, les fameux moulages réalisés jadis, qui nous montrent humains comme animaux face à une mort brutale. On ne peut pas ne pas être ému devant ce couple avec un enfant en bas âge, ce chat esseulé ou ces chiens piégés dans les cendres durcies, pour l'éternité.
Les chercheurs (italiens, anglo-saxons et même japonais) ne sont pas les seules personnes intéressées par ces vestiges. Depuis des années, des individus peu scrupuleux (et bien organisés) réalisent des fouilles clandestines (dont la cartographie présentée à l'écran montre l'ampleur des ravages...)... ou bien s'introduisent sur des sites officiels, pour les piller. Saisissante est la découverte des tunnels, parfois creusés sur des dizaines de mètres... et dotés de l'éclairage (voire d'un moyen de communication sommaire). Cela n'atteint pas l'ampleur des aménagements réalisés par le Hamas (sous Gaza et une partie d'Israël et de l’Égypte), mais c'est tout de même impressionnant.
Pour les habitants actuels de la région de Naples, même si le Vésuve semble un peu endormi, la menace demeure présente, perceptible dans les petites secousses qui surviennent assez fréquemment, provoquant un afflux d'appels téléphoniques au centre de secours des pompiers. La caméra s'attarde dans ces locaux, où les appels les plus nombreux concernent les actes de délinquance, dans une ville où une partie de la population est paupérisée, sans parler de l'influence subreptice de la Camorra (sur laquelle le film demeure allusif, peut-être par prudence).
On est donc très surpris d'entendre les marins syriens d'un navire-cargo se féliciter du calme et de la sécurité qui règnent à Naples... en comparaison de leur pays d'origine... et de l'Ukraine, où ils se sont arrêtés auparavant pour charger une cargaison de blé.
Risi profite de la moindre occasion pour nous offrir des portraits de Napolitains, qu'ils soient des résidents anciens ou de passage. J'ai beaucoup aimé les scènes avec le retraité entouré de livres, qui propose du soutien scolaire à des enfants des quartiers pauvres. A l'occasion de ces scènes, on entendra parler de la France, celle de la Révolution, de Napoléon... et de Victor Hugo.
Même si c'est, à mon avis, un poil trop long (1h50), j'ai été passionné, transporté par cette tranche de vie, qui traverse le temps et les classes sociales pour nous proposer un portrait de ville qui n'a rien de fumeux.
mercredi, 03 décembre 2025
Bugonia
Moins d'un an et demi après Kinds of kindness, Yórgos Lánthimos revient avec une nouvelle œuvre dérangeante, parfois difficile à analyser, mais servie par des acteurs éblouissants. Compte tenu des divergences d'appréciation que ce film à suscitées, il m'est apparu nécessaire d'en proposer deux critiques.
COMMENÇONS PAR UNE CRITIQUE DE GAUCHE
Le brillant cinéaste grec nous livre un film engagé, qui dénonce le système capitaliste qui opprime les peuples et conduit la planète à sa perte. Emma Stone incarne une patronne insensible, sans scrupule, qui exploite ses employés (sauf quand elle découvre qu'une apparente sollicitude est bonne pour l'image) et berne les consommateurs de ses produits.
L'introduction nous présente, en alternance, les personnages antagonistes dans leur préparation quotidienne, l'une dans un environnement urbain luxueux et maîtrisé, les autres dans la précarité d'une périphérie rurale peu engageante.
Les deux ravisseurs sont des hommes du peuple, dont la famille a été victime des pratiques de l'entreprise. Faisant acte de subtilité, Lánthimos décide de passer par la métaphore extraterrestre pour dénoncer l'inhumanité des puissants qui nous dominent. Même emprisonnée et physiquement diminuée, la cheffe d'entreprise demeure une prédatrice, capable de retourner le cerveau de ses geôliers. (Excellent performance d'Emma Stone, soit dit en passant.)
La séquence finale perturbera forcément les spectateurs qui croyaient savoir où le réalisateur nous emmenait. Ce retournement n'en est pas moins très cohérent, pris au second degré.
A PRÉSENT, PASSONS A UNE CRITIQUE « UN PEU MOINS DE GAUCHE »
Le metteur en scène iconoclaste nous prouve une fois de plus qu'il ne respecte rien et qu'il ne faut pas chercher à le faire entrer dans une case, tant son style et son discours cinématographique ne se cantonnent pas à une idéologie, fût-elle à la mode.
La séquence initiale nous fait découvrir les futurs adversaires, un peu à la façon Amicalement vôtre ou Hobbes & Shaw. Le contraste entre les deux environnements est saisissant... et cocasse, les futurs ravisseurs y apparaissant déjà ridicules. Un degré est franchi lors de la séquence de l'enlèvement (brillamment conçue et réalisée), qui, évidemment, ne se passe pas comme prévu, l'un des personnages y apparaissant particulièrement maladroit. Dans le rôle, Jesse Plemons confirme tout le bien qu'on pensait de lui.
En face, il y a du répondant, avec une Emma Stone éblouissante, qui se prête à une transformation qui n'est pas sans rappeler ce qu'a subi jadis Natalie Portman, dans V pour Vendetta. (La grande différence est que, dans ce film-ci, l'héroïne féminine était façonnée par un mentor, tandis que, chez Lánthimos, il est question d'une victime qui ne se laisse pas faire.) L'affrontement, mi-verbal, mi-physique, qui se joue dans la cave d'une maison en bois est un régal, le rapport dominant/dominé évoluant à plusieurs reprises au cours de l'histoire.
Pour Lánthimos, c'est l'occasion de dénoncer l'un des cancers de notre époque : le complotisme, associé à l'immaturité affective et à la crédulité. Le scénario va très loin, pour montrer à quelles extrémités peut porter ce genre de croyance.
Hélas, les dix dernières minutes affaiblissent la portée du film. Lánthimos retombe dans certains de ses travers, la tentation du pied-de-nez, le refus d'être catalogué. Le côté apprêté de cette dernière séquence contraste avec la maestria de ce qui a précédé. C'est dommage, mais je pense que cela n'empêchera pas ce Bugonia de figurer dans mon palmarès 2025.
20:38 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 29 novembre 2025
Eleanor the Great
Eleanor Morgenstein a 94 ans. Elle vit une retraite paisible en Floride, où elle cohabite, depuis une dizaine d'années, avec sa meilleure amie Bessie, veuve comme elle. Celle-ci a parfois des nuits agitées, troublées par des souvenirs enfouis, ceux de son enfance en Pologne : Bessie est une rescapée de la Shoah, tandis qu'Eleanor, juive aussi, est née aux États-Unis.
La première partie nous fait suivre la vie quotidienne de ces deux mamies, l'une timide, l'autre plutôt grande gueule : c'est Eleanor, qui "harponne" l'employé peu zélé d'une supérette pour qu'il aille chercher dans les stocks le produit qui a disparu des rayons. Elle ose davantage que son amie, qui est ravie de suivre son sillage. La vivacité de la nonagénaire n'épargne pas sa famille (sa fille et son petit-fils) que son retour à New York (dans des conditions que je laisse à chacun le soin de découvrir) n'enchante pas trop.
C'est là que la situation dérape : se sentant seule et ne parvenant pas à faire son deuil, Eleanor va se laisser entraîner dans une série de mensonges... ou plutôt de demi-mensonges : les souvenirs qu'elle raconte ne sont pas faux, mais ce sont ceux de Bessie, pas les siens. Tout cela est mis en scène avec délicatesse, de la subtilité, des non-dits. Pour sa première réalisation, Scarlett Johansson fait preuve d'une incontestable maîtrise.
Une relation prend de plus en plus de place, celle nouée entre Eleanor et Nina, une étudiante, fille d'un présentateur vedette de la télévision, qui vient de perdre sa mère et ne trouve personne à qui parler. De surcroît, cette mère était juive (contrairement à son père), ce qui accroît le nombre de questions que se pose la jeune femme.
Dans ce film, les hommes sont au second plan... et ce n'est pas un problème, tant les relations entre les personnages féminins sont riches. Il y a bien sûr celle entre Eleanor et Bessie, mais aussi celles entre Eleanor et sa fille Lisa, entre Eleanor et Nina, entre Eleanor et April (une authentique rescapée des camps)...
Si les mensonges d'Eleanor suscitent le malaise (un peu à l'image de ce qu'on ressent en regardant Marco, l'énigme d'une vie), la réalisatrice ne juge pas, elle donne sa chance à chaque personnage, avec ses qualités et ses défauts. Cela va même un peu trop loin à mon goût, puisque, dans le dernier quart d'heure, on sent la volonté de réconcilier tout le monde. Cela n'en demeure pas moins une histoire forte, servie par de très bons interprètes.
21:49 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
vendredi, 28 novembre 2025
Le Gang des Amazones
Cette fiction s'inspire d'une authentique (et "vieille") histoire, celle d'une bande de braqueuses, pas vraiment professionnelles, qui a sévi pendant plusieurs mois en Provence, entre Carpentras et Avignon.
Du coup, dans cette tentative de reconstitution, il y a du soleil et des accents chantants, qui contrastent avec la misère sociale de la plupart des protagonistes. C'est ce qui relie quatre des cinq amies d'enfance, tout confrontées à d'importants problèmes personnels : Laurence (Laura Felpin, étonnante) est battue par son compagnon, Carole (Mallory Wanecque) ne supporte plus le climat familial (assez réac), Hélène (Izïa Higelin, étonnamment bonne), mère de trois enfants, abandonnée par tous les hommes de sa vie (son père et les géniteurs de ses enfants), n'arrive plus à joindre les deux bouts, Malika (Kenza Fortas, convaincante) a quitté une cité HLM pour tenter d'échapper au déterminisme social... ce que peine à faire sa sœur Katy (Lina Khoudri, épatante), qui sort de prison.
Ces (futures) prédatrices (qui ont tout de même braqué six banques, l'une d'entre elles deux fois) sont donc à la base plutôt des victimes... du moins, pas des gagnantes au jeu de la société française des années 1980. Elles sont aussi fort charmantes, sexualisées par leurs tenues et la manière qu'a la réalisatrice de les filmer. Voilà qui a de quoi contenter le vieux mâle hétérosexuel que je suis. Mais, si ce film avait été tourné par un mec, peut-être que quelques voix se seraient élevées contre la manière de représenter ces jeunes femmes, plus "sexy" que leurs modèles, que l'on peut découvrir dans le documentaire que leur a jadis consacré la regrettée Solveig Anspach.
La première partie ne manque pas de comique, notamment quand on nous montre les débuts approximatifs des apprenties braqueuses. Au départ déguisées de manière à passer pour des hommes, elles ont dérouté les enquêteurs, qui ont pensé avoir affaire à des adolescents. Quand ils ont commencé à soupçonner certaines des jeunes femmes d'être mêlées aux braquages, ils ont pensé qu'elles étaient les petites copines des vrais truands.
Autre qualité du film : il ne tombe pas dans l'angélisme, même si cela met du temps à venir. Quelques tensions apparaissent entre les filles, certaines étant moins prudentes que d'autres, limite flambeuses. On les sent (déjà) bouffées par la société de consommation... et peu soucieuses du traumatisme qu'elles peuvent provoquer chez les clients et les employés des banques. A ce titre, en dépit de la belle plaidoirie de l'un des avocats de la défense, les scènes de procès apportent un précieux contrepoint.
J'ai au final été touché par ces parcours de femmes, dont on apprend, à la toute fin, ce qu'elles sont devenues depuis. Lors de la séance, j'étais le seul homme dans une salle quasi exclusivement féminine, hélas peu remplie.
mercredi, 26 novembre 2025
Dossier 137
Plus de trois ans après La Nuit du 12, Dominik Moll revient avec un nouveau film ancré dans la société française contemporaine. L'intrigue nous plonge au cœur de "la police des polices" (l'IGPN) avec, en toile de fond, le mouvement des gilets jaunes, durant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
Même si tous les acteurs sont bons, il est incontestable que le film repose sur les (frêles) épaules de son interprète principale, Léa Drucker, qui joue une capitaine de police soucieuse de faire toute la lumière sur ce qui semble être une bavure, commise par un groupe de la BRI. Ce personnage est à l'image du film : rigoureux, probe, méticuleux, empathique sans être complaisant. (Il est aussi sans doute un double du réalisateur, chargé de faire passer certains messages, ce sur quoi je reviendrai plus bas.)
L'enquête est passionnante à suivre, à deux titres. Il y a bien sûr l'aspect suspens. On se demande ce que les membres de l'IGPN vont découvrir et l'on suit leur analyse des images tournées la nuit de l'agression (avec une bonne utilisation des vidéos issues de smartphones). Il y a un peu du Blow-Up d'Antonioni (ou du Blow Out de Brian de Palma) dans cette enquête sur images, qui ne manque pas de brio. L'autre aspect est la plongée dans "la France d'en-bas", provinciale, avec ses qualités et ses défauts...
Cela m'amène aux limites de ce film... et à un peu de divulgâchage. Ne lisez donc surtout pas la suite si vous n'avez pas encore vu le film !
Dominik Moll le méticuleux enferme ses spectateurs dans un dispositif, un peu à l'image de ce qu'on a pu voir à l’œuvre l'an dernier dans L'Histoire de Souleymane. Nous est présentée comme emblématique l'histoire de ce jeune gilet jaune non violent, victime d'une bavure policière. Ce personnage est fictionnel, son histoire est un assemblage d'épisodes arrivés à plusieurs personnes. Tout est dans le choix effectué... et celui du réalisateur et de son coscénariste n'est pas neutre : alors que l'écrasante majorité des violences commises à cette époque a été le fait, soit de gilets jaunes, soit de délinquants infiltrés dans leurs manifestations, le film pointe quasi uniquement la bavure policière. D'autre part, s'il y a bien eu des dérives policières, celles-ci sont à comparer au déferlement de violence dont les forces de l'ordre ont été la cible. Celui-ci ne justifie pas celles-là, mais j'aurais aimé que le réalisateur nous plonge aussi dans le vécu de cette petite troupe de policiers, qui, avant que deux d'entre eux ne se comportent comme des crétins, venait d'essuyer, semble-t-il, plusieurs vagues d'agression.
S'ajoute à cela un élément pas du tout crédible : la filature et le quasi-harcèlement d'un témoin potentiel par la principale enquêtrice, mais que l'on peut aussi interpréter comme le basculement de l'héroïne, au départ drapée dans sa neutralité vertueuse, avant qu'elle ne prenne le parti des "victimes".
Ces réserves émises, on peut quand même profiter d'un film très bien construit, qui apporte sa pierre au débat, même s'il biaise quelque peu sa démonstration.
00:11 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
mardi, 25 novembre 2025
L'Incroyable Femme des neiges
Il y a une dizaine d'années, j'avais été agréablement surpris par Le Voyage au Groenland, l'un des précédents films de Sébastien Betbeder. Sa fascination pour ce territoire arctique (et sa population) se retrouve ici, assaisonnée de la présence d'une chercheuse un peu borderline, incarnée par l'incontournable Blanche Gardin... et quoi de plus logique qu'une comédienne prénommée Blanche, pour incarner une scientifique en milieu polaire ?
Toutefois, si l'introduction nous présente l'héroïne "dans son élément", il va falloir ensuite attendre trois bons quarts d'heure avant de revenir sur la gigantesque île enneigée. Un retour au pays (dans le Jura) est intercalé. Coline va y retrouver ses deux frères, l'aîné interprété par Philippe Katerine (débonnaire), le cadet (coiffé comme un dessous de bras) par Bastien Bouillon. Ces deux nigauds barbus sont un peu écrasés par la personnalité versatile et tempétueuse de leur sœur, qui, par dessus le marché, décide de renouer avec son amour de jeunesse, pourtant époux comblé et père d'un adolescent. Cela nous vaut de bonnes scènes de comédie, culminant dans l'intervention des gendarmes dans une maison dont Coline ne veut pas sortir. J'ajoute que l'un des deux hommes en uniforme est incarné par Aymeric Lompret....
L'aspect comique passe peu à peu au second plan, même si, lors du retour au Groenland, le "choc culturel" ne manque pas de saveur. L'intrigue se drape dans une couche supplémentaire, celle évoquant une femme voulant décider de la meilleure manière de finir sa vie. C'est amené avec une certaine subtilité (ce qui contraste quelque peu avec la partie déconnante).
Betbeder a su gérer les ruptures de ton, entre comique farcesque, fiction à caractère documentaire et réflexion sur la vie.
Ce n'est pas un grand film, mais une comédie douce-amère maîtrisée, pleine d'humanité et de cocasserie.
23:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 20 novembre 2025
La Bonne Etoile
A travers cette improbable épopée familiale, en pleine Seconde Guerre mondiale, Pascal Elbé a le projet de dénoncer les préjugés antisémites, par l'absurde : c'est parce qu'il pense (à tort) que les "Israélites" sont mieux traités que les autres que le catholique Jean Chevalin fait faire des faux papiers juifs pour toute sa famille.
Si la scène chez l'horloger-faussaire est plutôt bien troussée, en revanche, ce qui se déroule avant n'est pas très engageant. On découvre Chevalin pendant la Débâcle de 1940 (avec une confusion chronologique entre l'invasion de la Pologne de septembre 1939 et celle de la France en mai-juin 1940). Ce n'est pas bien joué, mais c'est une séquence nécessaire pour comprendre l'un des fils rouges de l'intrigue : Chevalin a le cul bordé de nouilles, puisqu'il réchappe d'un bombardement de l'armée allemande, récupère divers biens, se fait passer pour un résistant et survit à un accident de camion. Et pourtant, il en fait des conneries... La faconde et l'engagement de Poelvoorde ne suffisent pas à rendre le personnage crédible, contrairement à celui de son épouse, très bien incarnée par Audrey Lamy.
Je n'ai pas envie de m'acharner, d'autant que certains gags sont réussis, mais c'est quand même globalement mal foutu, pas très crédible, monté à l'arrache. Les intentions ont beau être généreuses, je n'ai pas accroché.
11:01 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 18 novembre 2025
Détective Conan : la mémoire retrouvée
Presque un an et demi après la sortie dans les salles françaises de L’Étoile à un million de dollars (lui aussi réalisé par une femme), ce film d'animation est pour moi la quatrième occasion de voir sur grand écran les aventures du plus perspicace des mini-détectives, Conan (prononcer "Conanne"), dont je rappelle qu'il s'agit d'un jeune homme prisonnier d'une version enfantine de son corps, ce qu'ignorent presque tous les autres personnages de l'histoire.
Une fois de plus, le scénario est particulièrement fouillé. Pendant un peu moins de deux heures, on s'efforce de trouver les éléments qui relient l'attaque d'une armurerie au fonctionnement d'un observatoire spatial, à une mystérieuse avalanche... et au décès d'une jeune femme. Clairement, cette production japonaise ne prend pas les jeunes pour des imbéciles et, si l'on n'est pas très familier des protagonistes de ce manga, il convient de s'accrocher.
La mise en images est correcte, d'un meilleur niveau que celui du tout-venant des productions télévisuelles nippones, sans atteinte toutefois la finesse des meilleurs films des maîtres de l'animation.
Au niveau des relations entre les personnages, ce n'est pas cucul-la-praline (comme trop souvent dans les œuvres de ce genre). Il est question d'amitié, d'amour, de patriotisme... et de la mort (non édulcorée, sans que ce soit tapissé de sang).
C'est parfois drôle et surtout passionnant à suivre, plusieurs groupes de personnes joignant leurs efforts pour tenter d'élucider l'énigme : policiers locaux, enquêteurs de la criminelle, espions agents de la Sécurité Intérieure (SI), détective privé (ex-flic)... et enquêteurs du dimanche.
Ces péripéties ont pour toile de fond une interrogation sérieuse, portant sur le rôle ambigu joué par la SI, un peu à l'image de ce qu'on a pu voir dans nombre de films états-uniens (sur la CIA). Je note aussi la mise en avant de références culturelles chinoises, chez plusieurs protagonistes, signe de l'ouverture intellectuelle de certains enquêteurs.
Le générique de fin se déroule sur fond d'images réelles, celles de ce "Japon de l'envers", enneigé, où les téléphones ne passent pas, qui a servi de cadre à l'intrigue... et, attention, après cela, on a droit à une séquence bonus... qui elle-même précède une ultime gâterie, annonçant le long-métrage suivant.
20:42 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 15 novembre 2025
La Femme la plus riche du monde
Cette femme est Marianne Farrère, héritière d'un empire (français) de la cosmétique, mariée à un ancien résistant/collabo et fille d'un homme au passé trouble, ami proche d'un président de la République de gauche. Les changements de noms ne tromperont pas grand monde : l'épatante Isabelle Huppert campe Liliane Bettencourt.
La comédienne, qui n'a plus rien à prouver, interprète une femme revenue de tout, qui n'a besoin de rien... mais qui a envie de vibrer, malgré son grand âge. L'argent ne permet pas tout, mais il va la rapprocher d'un escroc aventurier du monde des arts, Pierre-Alain Fantin (évidemment François-Marie Banier) homosexuel gouailleur et cultivé, formidablement incarné par Laurent Lafitte, servi par des dialogues d'une délicieuse infâme crudité.
La première heure montre l'intrusion du gigolo dans la famille de l'héroïne. C'est vraiment très bon, avec quelques personnages secondaires savoureux : le majordome (très bien joué par Raphaël Personnaz) et la fille de Liliane Marianne, interprétée par Marina Foïs. A celle-ci échoit le rôle ingrat, celui de la peine-à-jouir, de l'ex-petite fille modèle qui voudrait être prise au sérieux et qui voit clair dans le jeu de Fantin. (Cette Frédérique Spielman est un non moins évident décalque de Françoise Bettencourt-Meyers.)
Durant la deuxième heure, le rythme retombe un peu, peut-être parce que les tensions l'emportent sur les situations de comédie. Nous sommes alors en pleine affaire Bettencourt-Banier, où le judiciaire se mêle au commercial... et au politique. (J'ai rarement vu relevé le fait que les Bettencourt avaient acheté la connivence de certaines figures majeures de la droite française, de 1995 à 2007. J'aurais bien aimé que l'on nous parle davantage de ces -grosses- enveloppes de liquide...)
Cela reste néanmoins plaisant, ce qui me conduit à ma principale réserve : la mise en scène de personnages "améliorés" par rapport à leurs modèles. Ce n'est que tardivement que l'on nous montre la milliardaire victime de déficiences cognitives. Je pense que c'est lié à la volonté de présenter, dans un premier temps, une femme libre, consciente de ses actes et peu soucieuse du qu'en-dira-t-on. Dans la réalité, "mamie zinzin" a sans doute commencé à perdre le fil dès les années 1990. Quant à son "compagnon de folies", il nous est montré sous un jour un peu trop favorable, la faute aux dialogues (parfois brillants)... et au talent de Lafitte.
Cet aspect-là mis de côté, on ne peut que se réjouir de voir le cinéma français capable de produire une comédie de cette tenue, loin du tout-venant qui nous est proposé quasiment chaque semaine.
14:58 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Insaisissables 3
Il a fallu attendre presque dix ans après le deuxième volet pour voir sortir les nouvelles aventures des magiciens-cambrioleurs, adeptes de la communication de masse... et un peu justiciers sur les bords.
On a visiblement essayé de réunir le maximum de personnages présents dans les deux précédents films. Du coup, le trio de mecs, incarnés par Eisenberg, Harrelson et Franco, retrouve les deux acolytes féminins, interprétés par Isla Fisher et Lizzy Caplan. On leur a adjoint deux vieilles connaissances, une que l'on voit plutôt au début (Morgan Freeman, tout droit sorti de l'EHPAD), l'autre à la fin (Mark Ruffalo).
La nouveauté vient de l'introduction d'un trio de djeunses, présentés comme les émules des prestigieux anciens. La séquence introductive les montre dans leurs œuvres, l'illusion et les faux-semblants étant évidemment de mise.
C'est bien conçu, scénaristiquement et visuellement. Derrière la caméra se trouve Ruben Fleisher, auquel on doit, entre autres, Venom, Retour à Zombieland et Uncharted. On pourra regretter que la réalisation soit toujours aussi tape-à-l’œil mais, franchement, tout ce qui touche à l'illusion, à la tromperie est réussi. On est impressionné par les trucages et l'on se prend à essayer de deviner comment telle ou telle supercherie a été montée, même si, au bout du compte, la vraisemblance n'est pas toujours de mise.
La confrontation puis l'association des "anciens" et des "modernes" porte ses fruits. Au début, on sent poindre de petites rivalités entre les magiciens. L'écart de générations est perceptible, à tel point qu'on s'attend à ce que l'un des trois djeunses balance un « OK, boomeur » à l'un des anciens. (Ceci, dit, démographiquement parlant, si Harrelson et Ruffalo sont bien des enfants du baby boom, tel n'est pas le cas d'Eisenberg et de Franco.)
La diversité se retrouve aussi (hélas) au niveau de la qualité du jeu. Des trois petits nouveaux, Charlie (Justice Smith) est le plus convaincant, devant June (Ariana Greenblatt). Je suis moins emballé par Bosco (Dominic Sessa). Du côté des anciens, on sent que le poids des ans pèse désormais sur les épaules de Woody, même s'il apporte toujours le même entrain. Eisenberg/Atlas est trop verbeux et les deux acolytes féminins sont peu mis en valeur (le poids des ans se faisant là aussi sentir, en dépit des couches de maquillage et, peut-être, des retouches numériques).
La bonne surprise vient de la principale antagoniste, la sulfureuse Veronika Vandenberg, à la tête d'un conglomérat familial qui a fait fortune grâce aux mines de diamants sud-africaines. On a demandé à la délicieuse Rosamund Pike de prendre un accent un poil germanique, peut-être pour suggérer une origine néerlandaise ou afrikaner. Bien que son personnage ait été "chargé" (on lui colle du trafic de diamants, l'exploitation de la main-d’œuvre, des liens avec des milices interlopes... et de vieilles accointances nazies), je trouve que la comédienne s'en sort bien, parvenant même à ne pas sombrer dans le ridicule en portant un pantacourt avec des talons aiguilles...
Le scénario, fouillé, malin, nous emmène de New York à Abou Dabi, en passant par Anvers, l'Afrique du Sud et... le Roussillon (en réalité sans doute la Hongrie), où l'on découvre un étonnant château dédié à la magie. C'est aussi l'occasion (dans la version originale) d'entendre plusieurs personnages s'exprimer dans la langue de Sébastien Lecornu.
Au bout d'un moment, on se rend tout de même compte que cette histoire ressemble beaucoup à celle du premier opus. Une vengeance est à l’œuvre, mais il faut attendre la fin pour en comprendre tous les ressors.
Du coup, le film est moins original qu'il n'y paraît, mais il constitue un agréable divertissement.
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lundi, 10 novembre 2025
T'as pas changé
Il y a un peu plus de trois ans, Jérôme Commandeur m'avait agréablement surpris avec Irréductible. Il revient aujourd'hui, devant et derrière la caméra, avec une intrigue à nouveau sociétale et une brochette d'acteurs connus.
Le jour des funérailles de l'un de leurs meilleurs amis, les trois héros se demandent ce que sont devenus leurs camarades de lycée, ceux de la classe de Terminale. Le début (qui est un retour en arrière) nous donne une petite idée de la manière dont chacun a "morflé", les trente ans passés depuis cette (plus ou moins) heureuse époque ayant laissé des traces.
Le trio d'enfoirés est incarné (à l'âge avancé) par François Damiens, Laurent Lafitte (qui a presque la même coupe de cheveux que dans La Femme la plus riche du monde, dont je vais bientôt causer) et Jérôme Commandeur lui-même, qui laisse volontiers le premier rang à ses acolytes... et, surtout, à Vanessa Paradis, l'ancienne première de la classe devenue médecin hospitalier. Dans le rôle de la belle énigmatique et dépressive, je la trouve très bonne et elle nous livre une jolie performance lors d'une séquence nocturne, son personnage s'étant fortement alcoolisé.
De leur côté, les messieurs ne sont pas gâtés. L'avocat fortuné s'aigrit, ne supportant pas de vieillir, l'ancien chanteur de charme est has been et le copain sympa, à l'avenir prometteur, est devenu un auto-entrepreneur précaire, qui se fait manger la laine sur le dos par son ex-femme et le nouveau petit ami de celle-ci.
La satire n'est pas mal troussée, surtout quand on découvre l'autre versant de l'histoire, à savoir le vécu des camarades de classe qui ne faisaient pas partie de cette petite bande d'influenceurs avant l'heure. Plusieurs des protagonistes demeurent assez antipathiques à mes yeux, même si le scénario s'oriente de manière (trop) visible vers une fin consensuelle, limite rédemptrice.
Ce serait même cucul-la-praline s'il n'y avait pas le resurgissement des mystères du passé, de l'incendie d'une maison bourgeoise aux conséquences du départ de certains de ces jeunes Rémois pour Paris.
Au final, c'est une petite comédie, pas indigne, mais que j'ai trouvée moins réussie que le précédent film de Commandeur.
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dimanche, 09 novembre 2025
Yoroï
En japonais, ce terme désigne une armure. Il s'agit de celle (magique) qui va se fixer sur le corps du rappeur Orelsan, en villégiature avec sa compagne (enceinte) au pays du soleil levant. A la fois producteur, acteur et coauteur de ce qui ressemble à une auto-fiction, Orelsan mêle traditions japonaises et éléments personnels pour s'interroger sur le sens de la vie, le monde dans lequel il vit... et peut-être aussi pour, au passage, régler quelques comptes.
Le début n'est pas très emballant. Pensez donc : Orelsan incarne un artiste à succès, beau gosse, tourmenté et un peu crétin. On se demande s'il s'agit d'un rôle de composition... Ce n'est que bien plus tard, quand surgit un double maléfique du héros, qu'on découvre qu'il est capable d'interpréter autre chose. En attendant ce moment de révélation, il faut se fader de nombreuses scènes de couple, la plupart mal jouées. Pourtant, Clara Choï fait le job en compagne "moderne", féministe, adepte des arts martiaux. Mais son abdomen à géométrie variable (plus ou moins gros selon le type de scène) nuit à la vraisemblance du personnage.
Qu'est-ce qui sauve le film ? D'abord, l'autodérision, Orelsan n'hésitant pas à présenter son alter ego comme un type un peu lâche, pas très futé. L'autre qualité de ce long-métrage est le soin apporté aux scènes de baston, à commencer par les entraînements infligés au héros par sa compagne. La suite est encore mieux, quand débarquent les redoutables yōkai, ces esprits plus ou moins malfaisants, issus de la mythologie japonaise ou bien projections de l'esprit d'Orelsan. Petit à petit, lui et sa compagne apprennent à les combattre... mais un coup de théâtre va relancer l'intrigue.
Dans cette dernière partie (en compagnie de la version négative du héros), la situation est toujours aussi fantasque mais, cette fois-ci, on est de retour en France. Les intentions des scénaristes sont plus apparentes : sur le point de devenir père, Orelsan se pose beaucoup de questions sur sa vie, son métier, ses amis, la renommée. Cela se conclut hélas sur une morale convenue (la génération actuelle semblant redécouvrir l'eau chaude en terme de relations humaines). Par dessus le marché, il faut supporter quelques titres de rap. Là, j'ai failli craquer (contrairement à la masse de djeunses qui peuplait la salle).
C'est dommage, parce que, sur le plan visuel, le film est plutôt bien fait et que son histoire, un peu bancale, est assaisonnée d'humour.
10:24 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 08 novembre 2025
Predator : Badlands
Depuis qu'elle racheté la Twentieth Century Fox, la firme aux grandes oreilles a décidé d'en relancer certaines franchises, jugées potentiellement très lucratives. Tel est le cas de Predator, dont les nouvelles aventures n'ont pourtant eu droit, dans un premier temps, qu'à une sortie sur plate-forme.
Cette fois-ci, c'est sur grand écran qu'on peut profiter de la traque menée par les plus redoutables chasseurs que l'univers ait connus. Au tout début, ce sont deux frères qui s'affrontent, avant qu'on ne découvre... leur papounet. (A la toute fin de l'histoire, il est question d'un quatrième membre de la famille, dont le surgissement annonce sans doute une suite.) Dans la famille Predator, le géniteur est le mâle dominant, le plus impitoyable, le plus brutal... et il veut que ses fils soient comme lui, ne supportant pas la moins faiblesse.
Cette histoire-ci introduit donc plusieurs nouveautés. Outre un esprit de clan très particulier, on découvre que les tueurs ont un langage (présenté sous-titré). Mais, surtout, l'intrigue place au premier plan un quasi-loser, le frère cadet, un peu moins redoutable, un peu moins cruel que les autres membres de la famille... mais aussi sanguinaire sur le fond. Cela suffit toutefois pour qu'il soit considéré comme une lavette !
Dans des conditions que je ne révèlerai pas, Dek (parce qu'en plus, le Predator a un nom) échappe à la mort et quitte sa planète d'origine. Son objectif est de réaliser un exploit, une chasse d'exception qui lui permettra (rayer la mention inutile) : d'être autorisé à revenir sur sa planète / de retrouver sa place dans le clan / de prouver que c'est lui qu' a la plus grosse.
Plus classiquement, la suite propose une sorte de roman de formation. Dek est confronté à un choix. Soit il suit la tradition fixée par son clan, soit il trace sa propre route. La planète à l'environnement apocalyptique sur laquelle il atterrit va le pousser à faire ce choix. Sur celle-ci, on peut être à la fois la proie et le chasseur, tant le nombre de prédateurs potentiels est élevé. On ne sait jamais où va se nicher le danger, comme va rapidement le découvrir Dek, dans une séquence à la fois brillante et (un poil) humoristique. C'est aussi la marque de ce long-métrage, qui perpétue (efficacement) la tradition de l'action ultra-violente mâtinée d'effets spéciaux (brillants... merci Lucasfilm). Fort heureusement, la demi-douzaine de scénaristes a pensé à assaisonner le tout de scènes cocasses, où est à l’œuvre un comique de situation. J'ajoute que les dialogues sont parfois savoureux (quand ils ne sont pas sentencieux), à double sens, jouant sur le contraste entre le narcissisme du tueur orgueilleux et l'empathie d'un demi-humanoïde, Thia, qui a la plastique avantageuse d'Elle Fanning. Dans un rôle double, la comédienne (vue notamment dans Les Proies, Mary Shelley et Un parfait inconnu) confirme qu'elle n'est pas qu'une ravissante poupée.
Dans un premier temps, Thia occupe la place du comparse bavard, à la fois acolyte du "héros" mais aussi un peu boulet sur les bords. On pense, par exemple, au duo formé par Shrek et son âne. Ce duo va rapidement devenir un trio, avec l'ajout d'une sorte de singe carapaçonné (qui réserve quelques surprises). Ce personnage-là joue à la fois le rôle d'animal de compagnie et de substitut d'enfant. En effet, au contact de Thia, Dek petit à petit s'humanise, à tel point qu'on finit par penser être face à une sorte de famille recomposée, avec le papa bourrin, la maman savante et le bambin facétieux. (Back to the basics, comme on dirait, chez Disney.)
J'ai été emporté par ces aventures. C'est feuilletonnesque à souhait, visuellement impressionnant et marqué par un humour souvent savoureux (un peu macabre il est vrai, mais c'est tout à fait à mon goût). J'ai particulièrement aimé la séquence durant laquelle la partie basse du corps de Thia se met à évoluer en totale autonomie, à l'intérieur d'un camp retranché... Il vaut mieux ne pas se trouver sur son chemin ! (Cela m'a rappelé l'évasion de Harley Quinn dans The Suicide Squad.)
Sur le fond, l'intrigue n'est pas complètement idiote. Les scénaristes veulent nous montrer que les grosses bêtes ne sont pas les prédateurs les plus à craindre. Plus redoutable encore est la Weyland Corporation, un évident clin d’œil à la saga Alien (que complète le personnage de Thia, qui n'est pas sans rappeler Call, interprété par Winona Ryder dans Alien, la résurrection). Les humains se trouvant à la tête de la multinationale de biotechnologies pourraient donc être les prédateurs ultimes... à ceci prêt qu'il semble désormais qu'une intelligence artificielle ait pris le contrôle de l'entreprise, dirigeant une armée d'humanoïdes.
Vivement la suite !
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mercredi, 05 novembre 2025
Nouvelle Vague
Richard Linklater (dont j'avais apprécié Boyhood) s'est lancé dans une périlleuse entreprise : rendre hommage à la célèbre secte école intellectuelle du cinéma, en reconstituant le tournage d'un de ses films emblématiques, A bout de souffle.
Il y a donc un aspect documentaire dans cette œuvre, du recours au noir et blanc (très beau) aux décors, costumes... en passant par le choix des acteurs principaux. C'est l'un des atouts du film : présenter des comédiens qui, outre le fait qu'ils ressemblent à leur modèle, adoptent la gestuelle voire le phrasé des originaux. C'est mieux que du mime, parce que ce ne sont pas de simples sosies. Il y a un vrai travail d'acteur pour ressusciter l'ambiance et les personnalités.
C'est là que le projet de Linklater atteint sa limite : pour rendre compte de ce que fut le tournage, il s'éloigne des préceptes des fondateurs de la Nouvelle Vague. Son film est très écrit, soigneusement préparé en amont et je pense que le tournage a suivi des règles plus rigoureuses que celles qui furent appliquées en 1959...
... et c'est tant mieux pour les spectateurs. Au début, j'ai eu un peu peur, parce que le film semblait prendre la forme d'un hommage aussi bien sur la forme que sur le fond, en choisissant la (supposée) spontanéité plutôt que le réalisme, avec, par dessus le marché, des dialogues farcis de citations.
Fort heureusement, la mayonnaise prend. Les interprètes sont vraiment bons et la mise en scène assez élaborée, avec plusieurs plans de toute beauté (notamment lors des scènes de tournage). C'est de surcroît assez souvent drôle, les comédiens et certains membres de la petite équipe technique ne témoignant pas toujours un grand respect au réalisateur, qui, à cette époque, n'était pas encore devenu une icône intouchable de la gauche intellichiante.
Du coup, j'ai passé un bon moment cinéphilique et j'ai eu envie de revoir A bout de souffle.
22:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 30 octobre 2025
Arco
Cela ressemble (visuellement) à du Miyazaki, cela a un goût (l'atmosphère) d'un Miyazaki, mais cela n'est pas un film d'Hayao Miyazaki, puisqu'il a été réalisé par le (jeune) Français Ugo Bienvenu.
Le début est vraiment troublant, tant on a l'impression de se trouver dans une œuvre du maître japonais... ou d'un de ses élèves. L'animation a cette fluidité un peu surannée qui fait le charme de ce genre de production, qu'on ne risque pas de confondre avec le tout-venant de l'animation nippone ou anglo-saxonne.
Dans un premier temps, l'intrigue nous présente deux groupes de Terriens, séparés, chacun ignorant l'existence de l'autre. Sur de grandes plateformes situées dans les nuages vivent de petits groupes familiaux, dotés d'une technologie très avancée, le sol étant en grande partie recouvert par les mers et océans... quand il n'est pas peuplé de dinosaures ! Le second groupe vit ailleurs, au sol, dans une région touchée à la fois par des tempêtes et de gigantesques incendies. Cette population, plus nombreuse, est elle aussi technologiquement avancée, puisque les robots font partie de son quotidien, jouant le rôle de domestiques, policiers, éboueurs... Chaque quartier est aussi protégé, quand cela devient nécessaire, par un gigantesque dôme.
Les deux mondes vont entrer en contact par l'intermédiaire d'Arco, un préadolescent un peu capricieux, qui fait une grosse bêtise, et va être recueilli par Iris. Leur histoire d'amour/amitié constitue l'un des moteurs de l'intrigue. Sur ce plan, je n'ai pas été très convaincu, le scénario ayant aussi tendance à recourir à quelques grosses ficelles : les bêtises faites par certains personnages immatures. Par rapport à son modèle japonais, il manque aussi les références animistes et la présence de petits êtres surnaturels, typiques de la culture d'Asie orientale.
On n'en découvre pas moins avec plaisir les rôles secondaires (incarnés parfois par des voix connues), en particulier le robot domestique Mikki et les trois jeunes adultes un peu crétins (et traqueurs d'OVNI).
De plus, la nature comme les animaux sont représentés avec soin. Il y a clairement un soubassement écologiste à cette histoire, celle d'une Terre futuriste où le progrès technologique côtoie les conséquences du dérèglement climatique, la population de la planète semblant avoir fortement diminué.
Même si ce n'est pas parfait, même si le film a été quelque peu survendu par les critiques professionnels, je recommande cette animation techniquement de (très) bon niveau.
09:15 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 29 octobre 2025
Le Million
C'était la dernière séance... Un soir, après le travail, en quête de comédie facile, je me suis laissé tenter. A l'affiche se trouve un duo associant l'Ancien (Christian Clavier) et le Moderne (Rayane Bensetti), sous la houlette de Grégoire Vigneron, à la base plutôt un scénariste, notamment du Retour du héros.
La bonne surprise est que, comme cette comédie est très écrite, les deux acteurs vedettes ne sont pas en roue libre, je dirais même qu'ils sont un peu corsetés. Du coup, Bensetti a dû se couler dans le rôle d'un jeune ambitieux à qui (presque) tout réussit, avant que l'édifice patiemment construit ne menace de s'effondrer. De son côté, Clavier sort des rôles de grand bourgeois (de Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ? à Jamais sans mon psy, en passant par Cocorico) pour interpréter un travailleur indépendant, un serrurier un peu magouilleur, qui tient un discours plutôt de droite (ce qui fait que l'acteur ne sort pas totalement de sa zone de confort...).
La confrontation des deux (qui débute par une rencontre que je n'ai pas vu venir) fonctionne, avec une accumulation d'emmerdes, qui tombe aussi bien sur l'un que sur l'autre. Les deux gugusses finissent par comprendre qu'ils doivent coopérer pour s'extirper du guêpier dans lequel ils se sont fourrés. Si l'accumulation des guignes devient invraisemblable à la longue, voir ces deux types pleins de défauts s'agiter éperdument ne manque pas de saveur.
Le problème vient des personnages féminins. Les trois principaux sont des femmes de caractère. Je passe vite sur celui de la mère du serrurier, un clone de Clavier, qui a fait couler beaucoup d'encre (numérique). Ce n'est pas si mal fait que cela, je trouve. En revanche, les deux autres sont assez gratinés. Il s'agit de la petite amie de Stan (Bensetti) et de son ex-femme. J'ai trouvé les deux caricaturales. Ceci dit, les comédiennes se démènent comme elles peuvent pour donner de la chair à leur personnage, Claire Chust incarnant de surcroît la femme vertueuse, engagée (de gauche), qui essaie de faire appel à la conscience civique de son petit ami, qui ne pense qu'à sa pomme. (Comme c'est une comédie familiale, vous vous doutez bien qu'elle ne va pas complètement échouer...)
Sur le fond, le propos est un peu puant. D'un côté sont dénoncées les manœuvres d'un grand groupe de BTP, qui corrompt pour obtenir certains marchés. De l'autre, les magouilles du cadre dynamique et du serrurier (totalement illégales) sont presque portées au pinacle... alors que l'artisan se vante plus ou moins de gruger la Sécu et le fisc. Tentant de ménager la chèvre et le chou, le film se révèle être une comédie populiste, très dans l'air du temps. Mais, comme c'est bien fichu (avec notamment une séquence hilarante chez l'ex de Stan, en compagnie de son fils et de celui qui est surnommé « le gros »), on passe un bon moment.
18:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
dimanche, 26 octobre 2025
Marche ou crève
Stephen King est à la mode, outre-Atlantique. Cette année 2025 aura vu les adaptations d'au moins trois de ses œuvres sortir sur nos écrans, puisque ce film-ci succède à The Monkey et à Life of Chuck.
Dans un futur proche dystopique, de jeunes hommes participent à un concours sordide : une marche de la mort, dont l'unique vainqueur empoche une grosse somme et a droit à la réalisation de son vœu le plus cher. Ceux qui abandonnent en cours de route, ou qui ne respectent pas le rythme imposé, sont exécutés. La compétition a lieu sous la surveillance d'une escouade militaire et elle est suivie par les médias, lorsque les candidats traversent une ville.
Voici donc une histoire de couilles, cinquante paires pour être précis, puisque chaque État des États-Unis est représenté par un candidat. A ces cent boules il faut ajouter celles des soldats qui encadrent la compétition, ravitaillent les concurrents... et procèdent aux exécutions.
La présence féminine est donc rare en ce film. Celle que l'on voit le plus est la mère du héros (Ray Garraty), caricaturée en chialeuse. On croise aussi quelques jeunes femmes sur les bords de la route, de manière fugace.
On est donc globalement entre mecs... mais ceux-ci n'ont pas grand chose à dire. Bien entendu, on attend les moments de tension, ceux au cours desquels les candidats qui ont reçus leurs trois avertissements vont se faire dézinguer, mais on finit par s'en lasser. Quant à l'espèce de camaraderie qui naît entre certains concurrents, elle m'est apparue un peu artificielle, connaissant l'enjeu et les règles. Mais, aux States, il est possible qu'on ait apprécié cette ambiance de Bros, qui est très tendance.
Enfin, au niveau du suspens, l'intrigue ne réserve guère de surprises. Ce n'est pas pour me vanter, mais, dès le début, j'avais misé sur les bons chevaux : j'avais parié sur l'identité des deux derniers... et je ne me suis pas trompé. Il faut dire que la manière dont les candidats sont filmés, alliée à une bonne dose de "politiquement correct", nous balise le chemin.
Je me suis ensuite tourné vers le roman de King (un de ses premiers, publié sous le nom de Richard Bachman), que je n'avais jamais lu.
Sans surprise, l'intrigue du bouquin est plus fouillée que celle du film. Davantage de personnages sont développés... et les concurrents sont au nombre de 100, au départ (deux par État), auxquels il faut ajouter autant de potentiels remplaçants. L'un des protagonistes est d'ailleurs un de ces remplaçants, qui a "bénéficié" des désistements de dernière minute de quelques sélectionnés pour accéder à la compétition.
Le livre m'a semblé plus cru que le film. Datant de la fin des années 1970, il n'est pas affadi par les idées à la mode de notre époque, ni par la volonté de plaire à tout le monde (ce qui caractérise le film, qui a tendance à ménager la chèvre et le chou). Donc, dans le livre, la bande de mecs âgés grosso modo de 16 à 25 ans parle de filles et de cul, ce qui ne ressort que de manière très aseptisée dans le film. Dans les tensions entre candidats (et dans les pensées de l'un d'entre eux), on note aussi une part d'homophobie, tandis qu'une certaine attirance sentimentale naît entre deux d'entre eux (ce que le film ne traduit qu'à la toute fin, de manière un peu abrupte). Enfin, le passé des candidats est plus développé dans le roman.
Bref, j'ai trouvé celui-ci plus intéressant que le film... mais aussi plus long. Mais cette intrigue ne m'a pas particulièrement passionné, parce que je trouve ce jeu de la mort à la base complètement débile. Les participants n'ont pas agi sur un coup de tête. Ils ont été sélectionnés, ils se sont entraînés, ils ont eu l'occasion de se rétracter... Leur désir de participer, malgré tout, révèle soit un profond désespoir, soit une authentique connerie.
09:21 Publié dans Cinéma, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, roman, littérature, livres, livre, romans
samedi, 25 octobre 2025
Hopper et le secret de la marmotte
A l'occasion de ce deuxième long-métrage d'animation, je découvre l'univers mi-féérique mi-déjanté de Hopper, un "poulapin" (lapin-poule) qui fut adopté jadis par un lion-lapin. Ses deux meilleurs amis sont une tortue érudite et trouillarde et... une mouffette (ou un putois), dont l'action, dans la bande-annonce, m'a donné furieusement envie de tenter l'expérience...
On tombe assez vite sur cet épisode "olfactif", à l'intérieur de la séquence initiale, qui fait clairement référence aux films de type Indiana Jones, Allan Quatermain ou A la poursuite du diamant vert. La suite de l'intrigue aura aussi un petit air de déjà-vu pour les fans des Mystérieuses Cités d'or.
Le scénario à rebondissements n'est pas le seul atout de ce film. L'animation y est soignée, notamment pour les animaux à poil, comme la moufette, le lion-lapin, le héros Hopper et les lapins-oiseaux que l'on croise plus tard dans l'histoire.
On nous propose aussi une belle galerie de personnages secondaires, comme la chatte voleuse, adepte du kung-fu (avec un joli combat de meufs à la clé, contre la mouffette), ses acolytes caméléons (particulièrement crétins... mais parfois très utiles), une marmotte érudite (très souple au niveau du cou)... et une armée de petits cochons-cubes, dont l'un des membres va connaître un destin particulier.
Au-delà des péripéties, il est question d'amitié, de relations frère-sœur, d'ouverture à autrui... et de mensonges en famille. De belles valeurs sont mises à l'honneur, même si je trouve les scénaristes très optimistes sur la nature humaine (les animaux n'étant qu'un substitut commode, bien entendu). Quoi qu'il en soit, l'humour est grand public. On passe un bon moment.
21:18 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 23 octobre 2025
Marcel et Monsieur Pagnol
De Marcel Pagnol, j'ai gardé en mémoire quelques lectures d'adolescence (notamment Le Château de ma mère) et des films très "couleur locale", truculents. Mais, si je me suis tourné vers ce long-métrage d'animation, c'est parce qu'il a été tourné par Sylvain Chomet, auquel on doit, entre autres, Les Triplettes de Belleville et L'Illusionniste.
Visuellement, on retrouve la patte du cinéaste. C'est soigné, dans un style qui mélange le réalisme et les envolées poétiques, la description des étapes de la vie de Pagnol cohabitant avec des moments plus surréalistes... à commencer par le dialogue entretenu entre l'artiste âgé et la version "gamin" de lui-même.
Je ne suis pas spécialiste de la vie de Pagnol. J'ai donc appris des trucs. L'homme a connu des moments de bonheur et d'autres de grande tristesse. Il a dû encaisser, jeune, le décès de sa mère adorée, puis celui de l'un de ses frères, enfin, plus tard, celui de sa fille. Tout cela est amené avec délicatesse et la présence de fantômes comme les retours en arrière gomment un peu l'aspect macabre.
Au niveau de la carrière, on suit d'abord l'apprenti-écrivain (fils d'un instituteur très IIIe République), poète puis auteur de théâtre. On découvre l'ambiance dans ce milieu, durant l'Entre-deux-guerres, juste avant que le cinéma parlant ne vienne concurrencer l'art dominant. Pagnol s'y est lancé avec enthousiasme, allant jusqu'à créer ses propres studios (en Provence), dont le fonctionnement est devenu compliqué pendant la Seconde Guerre mondiale.
Ce biopic illustré est donc aussi un pan d'histoire politico-culturelle française, ressuscitant par exemple la figure de Raimu (Fernandel étant moins présent). On y croise aussi des comédiennes à fort tempérament, des investisseurs à moitié magouilleurs... et des gens ordinaires, pris dans la vie comme elle va. L'ambiance est en général douce, avec de la malice, beaucoup de petits traits d'humour. On n'éclate pas de rire, mais l'on a souvent le sourire aux lèvres.
Je recommande vivement.
18:36 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 22 octobre 2025
L'Homme qui rétrécit
Jan Kounen nous livre sa lecture du roman de Richard Matheson, avec Jean Dujardin en vedette (et coproducteur), accompagné de Marie-Josée Croze, d'une gamine éveillée, d'un chat (Toufou), d'un poisson-rouge, mais aussi d'une araignée, de fourmis, d'un moustique...
On peut analyser ce film de deux manières. La première considère une œuvre fantastique, au cours de laquelle le héros, confronté à un phénomène extraordinaire, est conduit à revoir ses priorités. Initialement plutôt matérialiste, il va, de gré mais surtout de force, se reconnecter à la nature et trouver un nouveau sens à sa vie, prenant conscience de sa place minuscule dans le cosmos. Les effets spéciaux sont réussis, la montée en tension un peu lente à mon goût, mais, une fois qu'on y est, c'est assez prenant. Si l'on reste à ce niveau, on est face à un honnête film de genre, un peu dans l'air du temps, mais rien de bien enthousiasmant.
Sauf que... il m'est rapidement paru évident que l'intrigue était métaphorique. Cet homme qui rétrécit est un homme qu'on dé(cons)truit. Avec cette optique en tête, on comprend mieux la présence des diverses scènes d'exposition. Au début de l'histoire, Paul (Jean Dujardin, impeccable) incarne l'homme blanc hétérosexuel dominant. On nous le montre successivement chef d'entreprise plein d'allant, sportif de bon niveau, époux prenant l'initiative dans le couple (la scène de sexe ayant pour but de suggérer sa puissance), père demi-dieu aux yeux de sa fille adorée, maître dominateur du chat et prédateur magnanime avec l'araignée.
Sa progressive réduction de taille correspond à sa perte de puissance, d'abord physique : il est de moins en moins grand et costaud. Il ne peut bientôt plus assumer sa fonction de chef d'entreprise. A la maison, c'est désormais son épouse qui mène la danse, quitte à prendre des décisions qui lui déplaisent. Concernant la fille, il y a une inversion des rôles dans le "jeu du monstre". Le chat, de compagnon docile, devient prédateur, tout comme bien sûr l'araignée (avec sans doute une référence à Harry Potter).
Si l'on tire le fil du raisonnement jusqu'au bout, on arrive à la conclusion que, pour le réalisateur, le bain sociétal dans lequel l'homme contemporain est plongé lui coupe peu à peu les ailes, finissant par le réduire à l'état d'homme préhistorique : Paul/Dujardin se retrouve vêtu d'une tunique approximative (évoquant une peau de bête), part à la chasse, utilise des outils rudimentaires, qu'il a bricolés. A ce moment de l'histoire, plusieurs interprétations sont possibles. Veut-on nous dire qu'à force de déconstruire les mâles, on suscite, en retour de bâton, la réapparition des modèles virilistes ? Ou bien Kounen se contente-t-il de suggérer que l'homme blanc traditionnel est voué à l'extinction ? Le mystère demeure, en partie en raison d'une conclusion elliptique.
Du coup, j'ai trouvé ce film moins anodin qu'il n'y paraît... et j'ai l'impression que beaucoup de spectateurs sont passés à côté du sous-texte.
21:31 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
mardi, 21 octobre 2025
Tron : Ares
Il y a un peu plus de quatorze ans, la sortie du deuxième volet (près de trente ans après le premier) des aventures virtuelles en milieu ludique m'avait laissé sur ma fin. C'est donc plutôt à reculons que je suis allé voir cette nouvelle version, qui n'est pas vraiment une suite, même si plusieurs clins d’œil renvoient aux épisodes précédents.
Eh bien... j'ai été scotché. Le début utilise un procédé qui a fait ses preuves, notamment dans la saga Star Wars : montrer, en alternance, trois trames narratives qui vont finir par se rejoindre. Durant ce début, on a droit aux recherches menées par une entrepreneuse en zone polaire, au lancement d'un nouveau jeu lors d'une convention numérique, aux Etats-Unis... et à l'action de programmes informatiques, dans la Grille / la Matrice / le cloud / ton cul. (Rayer les mentions inutiles.)
C'est bien joué, bien monté (non, je ne parle pas de l'entrejambe du principal personnage masculin), dans des décors parfois époustouflants. Si vous voulez voir ce qu'une masse de pognon investie dans le numérique peut donner de réussi à l'écran, alors allez voir ce film.
La suite nous replonge dans l'univers virtuel, où se trouve piégée une humaine (référence évidente aux anciens films). C'est plus convenu, mais toujours superbe à voir, sur très grand écran.
La troisième partie nous fait faire le chemin inverse : les personnages virtuels débarquent de plus en plus dans le monde réel, pour y jouer un rôle déterminant. C'est (enfin !) émaillé d'humour, le duo formé par Jared Leto et Greta Lee fonctionnant à merveille. Les effets spéciaux sont à tomber, associant jeux lumineux et poursuites en milieu urbain. Il sont bien accompagnés par la musique, un mélange de sonorités contemporaines et de tubes des années 1980.
Aux nostalgiques, je signale que, dans la dernière partie, on nous propose une séquence vintage, dans l'ancien jeu... Je n'en dis pas plus !
Sur le fond, ce n'est pas idiot du tout. Les personnages issus du monde numérique sont censés n'être que des programmes incarnés, exécutant les tâches qui leur sont données. Mais voilà que l'un des programmes se met à avoir des... sentiments (contrairement d'ailleurs à certains humains qu'il côtoie). Cela donne une épaisseur supplémentaire à l'histoire (qui n'est pas sans rappeler Blade Runner). Cerise sur le gâteau : les programmes sont imparfaits, dotés d'une vie matérielle transitoire. C'est un autre enjeu du film, qui contribue d'ailleurs à intensifier le suspens. Je n'ai relevé qu'une seule grosse invraisemblance : le fait qu'Athéna (le second d'Ares) tarde à rattraper des personnages en fuite, leur laissant le temps d'arriver à destination... et de changer le cours de l'intrigue.
A part cela, c'est un excellent spectacle, intelligent sur le fond, avec à la clé une belle performance d'acteur, celle de Jared Leto.
19:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, film, films
dimanche, 19 octobre 2025
Jour J
Cette pantalonnade signée Claude Zidi Junior mêle des éléments authentiquement historiques, d'autres fictionnels mais plausibles, d'autres encore totalement grotesques.
Du côté de la réalité se trouve l'Opération Fortitude, une entreprise de désinformation qui avait pour but de faire croire aux Allemands que le premier débarquement de 1944 allait se produire non pas en Normandie, mais dans le Pas-de-Calais. Il y a donc bien eu des chars gonflables, entre autres, pour leurrer les avions espions. Mais, à ma connaissance, c'étaient des soldats américains et britanniques qui œuvraient dans ce domaine, pas des Français.
C'est là que les ennuis commencent. Kev Adams et Brahim Bouhlel ont beau avoir un certain talent à jouer les imbéciles, quand l'histoire est mauvaise et les dialogues mal écrits, ça ne le fait pas.
Il y a bien quelques moments piquants, comme lorsque les deux trouducs débarquent, tout seuls, en Normandie, et se retrouvent dans un bar qui affiche les portraits d'Hitler et de Pétain (la suite réservant quelques surprises). J'ai aussi aimé les (rares) interventions de Chantal Ladesous. Dans les rôles secondaires, Didier Bourdon (en officier nazi) et Jonathan Lambert (en curé très très ouvert) font un boulot qui n'est pas déshonorant. Mais l'on sent bien que pas grand monde n'y croit. Trop de situations sont invraisemblables, ce que ne compense pas la loufoquerie assumée. (Je déconseille particulièrement ce film aux gaullistes fervents, en raison de la vision du Général qui y est proposée.)
Le scénario est donc faiblard. Il comportait pourtant un élément intéressant, faisant intervenir une arme secrète (fictive) des nazis. Ici, on s'inspire plutôt des aventures de Blake et Mortimer (première mouture), quand les auteurs faisaient se rencontrer histoire et science-fiction. Hélas, le site du phare est sous-exploité par le réalisateur.
Ce pathétique long-métrage aurait pu être pour moi une nouvelle occasion de partir avant la fin... et cela aurait été une erreur (hélas commise par les deux autres seuls spectateurs de la séance). Le générique de fin est entrecoupé d'un bêtisier... et c'est le meilleur moment du film !
P.S.
Papy fait de la résistance va bientôt ressortir en salles... et la comparaison risque d'être sévère pour Jour J, qui se place dans la continuité de La Grande Vadrouille, mais ne lui arrive pas à la cheville.
09:45 Publié dans Chine, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 18 octobre 2025
Chien 51
Voici donc l'adaptation, par Cédric Jimenez, du roman de Laurent Gaudé (que je n'ai pas lu), dont l'intrigue futuriste est transposée de Grèce à Paris, divisée en trois zones, la première abritant l'élite politico-économique, la troisième les pauvres.
Dans ce monde qui n'est pas sans rappeler celui du Minority Report de Spielberg, la lutte contre la délinquance ne passe pas par le recours à des "précogs", mais par l'utilisation d'Alma, une intelligence artificielle de dernière génération, capable de proposer des scénarios de crime à partir des indices relevés par les policiers sur le terrain. Elle se charge aussi de lancer des alertes, de diffuser les avis de recherche, voire d'affecter les enquêteurs aux différentes affaires.
C'est lorsque le créateur de cette IA est assassiné, un soir, que la mécanique semble s'enrayer. Les deux policiers associés (une rigide commandante de la zone 2 et un lieutenant débrouillard de la zone 3, le "chien" de l'histoire) commencent à avoir des doutes. D'autres meurtres surviennent jusqu'au jour où Alma, pour la première fois, ne parvient pas à proposer un scénario plausible de reconstitution de crime. L'IA est-elle défectueuse ? manipulée ? L'ambiance complotiste est à son comble...
On prend la première séquence de plein fouet. Cela m'a mis dans de bonnes dispositions pour la suite, d'autant que les décors, la musique et l'habillage numérique du Paris futuriste sont soignés. La tension ne naît pas que des scènes d'action (domaine dans lequel on sait que Jimenez excelle), mais aussi des zones d'ombre de l'enquête.
Mes réserves portent sur la distribution. Personne n'est vraiment mauvais, mais seule une partie des principaux interprètes m'est apparue au top : Gilles Lellouche (en vieux routard de la police, qui a perdu le sommeil) et Louis Garrel (en gourou multiforme d'un groupe de rebelles anarco-numériques). La coiffure (perruque ?) d'Adèle Exarchopoulos m'a posé problème et je l'ai trouvée moyennement convaincante dans les scènes d'action. Enfin, je en sais pas si c'est dans le roman, mais l'on aurait pu nous épargner un énième rapprochement sentimental entre une jolie trentenaire et un mec qui a l'âge d'être son père.
Cela reste un bon divertissement, à voir sur grand écran. Mais ce n'est pas le meilleur film de Jimenez, dont j'ai (entre autres) préféré La French et Novembre.
20:58 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
Oui
A priori, la proposition cinématographique était intéressante : une vue d'Israël de l'intérieur, par un cinéaste hostile à Benyamin Netanyahou, deux ans après le pogrom perpétré par le Hamas et ses alliés.
Hélas, cela commence mal, avec une séquence tape-à-l’œil, lors d'une soirée chic, au cours de laquelle les deux animateurs (deux intermittents du spectacle en quête d'argent facile) versent dans ce qui doit être conçu comme de la provocation... sauf que, sur place, personne n'est choqué. Ce sont les spectateurs de la salle qui sont la cible de ce qui est plus une "performance d'artistes" (le mot performance étant ici particulièrement mal choisi) qu'une scène de cinéma. On va s'en taper quelques-unes comme cela durant le film (au moins une dans chacune des trois parties).
Quand on compare ce "machin" à un film comme Un simple accident, on mesure ce qui sépare un faiseur à la mode (encensé par la critique) d'un authentique metteur en scène. Jafar Panahi n'a pas besoin de grand chose (à part son talent) pour créer un "moment de cinéma", signifiant, tandis que Nadav Lapid pense que, pour être réussi, un plan doit forcément comporter un élément qui, dans son esprit, sorte de l'ordinaire : un type qui se promène avec un canard, un couple qui se balance un bébé, ou qui lèche l'oreille interne d'une vieille pétée de thunes, un mec qui suce une teub, ou qui plonge sa tête dans un bol à punch... j'en passe, et des meilleurs pires. S'ajoute à cela une musique insupportable et un montage clipesque.
Si, malgré ce tapage visuel et sonore, on tente de s'intéresser au film, on s'aperçoit qu'il y a des invraisemblances (ou de la paresse) dans le tournage et le montage, comme ce bébé qui, dans un plan, est un réel enfant et qui, le plan d'après, est visiblement... un baigneur.
Sur le fond, attention, il y a du lourd. Je préviens les âmes sensibles, le message est terrible :
La guerre, c'est moche.
En fait, Lapid n'a pas grand chose à nous dire. En revanche, inconsciemment, il révèle peut-être son malaise d'Israélien "de gôche" : les massacres commis par le Hamas (dont nombre de victimes habitaient des kibboutz progressistes) ont fichu une énorme trouille à ses concitoyens, qui sont en attente de sécurité. Dans le même temps, ils se désolent de l'image donnée par leur gouvernement, lancé dans une guerre vengeresse sans pitié.
Conclusion (d'une grande subtilité) : prends l'oseille et tire-toi ?...
... En fait, je ne sais pas (mais je me suis renseigné, après coup), puisque, comme d'autres spectateurs de la séance, je suis parti avant la fin. (J'ai vu ce film au cours d'une journée-marathon, qui m'a vu enchaîner plusieurs longs-métrages.) La vie étant trop courte pour passer 2h40 à s'emmerder avec des prétentieux, j'ai commis un sacrilège de cinéphile, ce qui m'est arrivé moins de cinq fois en 35-40 ans de fréquentation des salles obscures. (La dernière, il y a une douzaine d'années, c'était lors de la projection d'une comédie états-unienne encore moins subtile que ce à quoi je m'attendais.)
P.S.
Avec ce film, j'ai trouvé un concurrent à Rumours pour le titre d'étron de l'année 2025.
09:29 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Alger... confidentiel
Ce polar algérien, par son intrigue urbaine, un peu dégueulasse, mêlant question sociale et arrière-plan politique, n'est pas sans rappeler d'autres films de genre, comme l'espagnol Que dios nos perdone, l'iranien La Loi de Téhéran... et donc Le Caire confidentiel.
Un soir, dans un quartier populaire d'Alger, une petite fille disparaît, enlevée par un conducteur masqué. Pour mener cette enquête délicate, la police se voit adjoindre une psychiatre, une femme de tête qui, très tôt, a la conviction que ce n'est pas un événement isolé. Si la confrontation entre ce personnage (bien interprété par Meriem Medjkane) et les flics bourrus est assez conventionnelle (voire, parfois, cliché), l'association des deux tempéraments fait, petit à petit, progresser l'enquête, que l'on suit avec beaucoup d'intérêt.
Du côté des flics, l'empathie n'est pas trop au programme. Le chef d'équipe se voit en serviteur du bien commun, mais, il est du genre cassant, limite méprisant. Son principal adjoint, proche de la retraite, ne pense qu'à sa pomme et semble quelque peu corrompu. Les agents de base n'aiment pas être bousculés dans leurs habitudes. Complète le groupe un petit nouveau, qui hésite entre deux attitudes à adopter.
C'est filmé essentiellement de nuit et c'est assez joli à regarder. Le metteur en scène a su tirer parti de l'entrelacement de ruelles du vieil Alger... et la musique est bien choisie. En revanche, ce n'est pas toujours bien interprété. J'ai trouvé le jeu de certains acteurs parfois caricatural, outré. C'est dommage, parce que le film tient globalement la route, avec un bon suspens et quelques beaux personnages. Il n'atteint toutefois pas le niveau de maîtrise des longs-métrages qui l'ont inspiré.
P.S.
Comme ce film n'est, à ma connaissance, diffusé qu'en version originale sous-titrée, les spectateurs français peuvent constater à quel point la langue de Sébastien Lecornu est associée à l'arabe dialectal dans le quotidien des Algérois.
08:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 17 octobre 2025
C'était mieux demain
Cette comédie familiale, dans l'air du temps, joue sur les "clichés de genre", ceux des années 1950 et ceux de notre époque. La première partie nous présente la France de jadis, à travers une famille de classe moyenne. Le père est employé de banque, la mère au foyer. Ils ont deux enfants, l'un des deux ayant fait une grosse bêtise. Nous sommes dans un monde patriarcal, satisfait de lui-même (du point de vue des adultes). On s'amuse du fossé qui sépare les mentalités de jadis de celles de notre époque (enfin... pas partout). Didier Bourdon est efficace en père de famille sûr de son autorité... et de ses placements financiers. L'une des sources de gag est le peu de flair de l'employé de banque. Ce n'est pas bien subtil, pas toujours hyper bien joué (notamment de la part des rejetons), mais on rigole.
La deuxième partie projette le couple dans la France du XXIe siècle, où ils retrouvent leur progéniture... quelque peu changée par l'époque. C'est la meilleure part du film, avec la stupéfaction du couple de quasi-Néandertaliens face au monde moderne. S'ajoute à cela la transformation de l'épouse, qui se plaît de plus en plus à notre époque. Dans le rôle, Elsa Zylberstein est épatante de drôlerie. Bourdon qui, en théorie, partage avec elle le haut de l'affiche, accepte de jouer les utilités, son personnage devenant homme au foyer, tandis que son épouse gère l'agence bancaire... plutôt bien, ma foi !
Entre problèmes de (cul et de) cœur, gadgets technologiques et sens du travail, les questionnements ne manquent pas, rendus plus savoureux par la présence de quelques personnages secondaires. Dans un premier temps, le scénario nous surprend un peu, évitant le conte de fées... mais la dernière partie suit une voie (trop) balisée, consensuelle, qui affadit l'intrigue.
C'est dommage, mais l'on passe quand même un bon moment.
16:56 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société, france
dimanche, 12 octobre 2025
Une Bataille après l'autre
L'intense conflictualité interne qui mine actuellement les Etats-Unis trouve ici sa troisième traduction cinématographique en moins de deux ans, après Civil War et surtout Eddington.
La première partie se déroule dans un passé indéterminé, l'Amérique des années Reagan dans le roman de Pynchon, ici sans doute celle des années George W Bush. Cette grosse demi-heure est globalement décevante, compte tenu de ce que j'avais lu et entendu à propos de ce film. Anderson verse dans une sorte de néo-romantisme révolutionnaire très manichéen. Il hypersexualise les femmes noires rebelles, qui s'acoquinent à des hommes blancs mal rasés récitant péniblement leur catéchisme marxiste. Si, sur le plan de la dynamique, certaines scènes sont assez spectaculaires, j'ai trouvé les dialogues sommaires, se limitant trop souvent à des sentences peu naturelles. De surcroît, certaines scènes manquent de réalisme, comme celle de la rencontre entre la rebelle boutefeu et l'officier réac ou encore celle de l'entraînement à la mitraillette, qui nous montre une femme en fin de grossesse (dotée d'un ventre outrageusement factice) manipulant sans peine une arme lourde. Enfin, la musique est omniprésente, souvent inutilement, comme pour masquer le vide de cette séquence (ou empêcher les spectateurs de réfléchir).
Fort heureusement, cela s'arrange lorsque l'intrigue bascule à l'époque contemporaine, seize ans plus tard. J'ai aimé l'interprétation de Leonardo DiCaprio, mi-cassos mi-papa poule, à la fois pathétique et touchant. Il en fait parfois un peu trop, notamment dans la grossièreté langagière (ou quand il tente désespérément de recharger un portable), mais ses pérégrinations en robe de chambre ont plus que retenu mon attention.
Deux autres "mecs" se distinguent, à ses côtés. Benicio Del Toro livre une interprétation presque facétieuse d'un ancien révolutionnaire devenu un militant discret, cachant son engagement derrière des activités commerciales tout ce qu'il y a de plus respectables. Concernant l'acteur, Anderson se permet un petit clin d’œil, lorsque le personnage incarné par DiCaprio lui lance un « Viva la revolución ! » Il s'agit (à mon avis) d'une allusion au Che jadis incarné par Benicio.
Le troisième mâle de l'intrigue est l'enfoiré de service Steven J. Lockjaw, auquel Sean Penn prête son visage tanné par les ans... et son corps marqué par les séances de musculation. Globalement, j'ai trouvé l'acteur très bon, mais son personnage est vraiment caricatural. Le concernant se pose un autre problème : son non-vieillissement apparent. On a eu beau lui changer sa coiffure, il apparaît aussi vieux dans les deux époques de l'histoire. C'est tout de même gênant.
Du côté des dames, le réalisateur promeut des personnages forts. Teyana Taylor incarne efficacement la tête brûlée (hélas elle aussi dessinée à la hache). Chase Infiniti est une révélation en rebelle plus réfléchie (qui, au départ, paraît plus adulte que son papounnet alcoolique et drogué). Ma préférée est toutefois Regina Hall (ex-star des Scary Movie), qui joue une militante moins flamboyante, plus rigoureuse, avec une certaine subtilité.
Les deux dernières heures du film m'ont donc davantage intéressé, avec quelques séquences marquantes, comme la poursuite automobile en pleine cambrousse, sur une route vallonnée où les conducteurs perdent temporairement, à intervalle régulier, la vue sur les véhicules qui les précèdent et les suivent. Là, on retrouve le metteur en scène de Boogie Nights, Magnolia et There will be blood. Mais ce n'est pas toujours le cas.
P.S.
Sur le plan politique, je pense que le film, qui est "de gauche" (voire d'extrême-gauche) joue contre son camp. Il justifie la violence des radicaux (anti-Trump), voyant en celle-ci le meilleur moyen de lutter contre l'extrême-droite. Il aurait mieux fait de se poser la question des causes de la défaite des démocrates et des moyens pour la gauche de reprendre le pouvoir par les voies légales. Trump et la galaxie Maga l'ont emporté sans tricher... et c'est bien là le cœur du problème, qui n'est pas abordé par ce film... ce qui n'est pas anormal, puisqu'il présente une vue de l'intérieur de l'autre camp. Mais caricaturer son adversaire n'est pas la meilleure façon de le vaincre.
00:51 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 11 octobre 2025
Cervantes avant Don Quichotte
Le critique a été sévère pour ce film d'Alejandro Amenábar, à la diffusion restreinte. Il évoque pourtant une partie de la jeunesse du grand écrivain espagnol, en y instillant des éléments qui montrent la progressive naissance d'un (talentueux) raconteur d'histoires.
L'épisode (réel) de la captivité de Miguel de Cervantes est évoqué, de manière allusive, dans l'une de ses Nouvelles exemplaires, celle qui est intitulée « L'Espagnole anglaise ».
Le scénario a aussi puisé dans un récit ultérieur, officiellement rédigé par un moine, mais qui pourrait avoir été coécrit par Cervantes lui-même. Amenábar y a ajouté quelques inventions de son cru, ce qui lui a été reproché.
J'ai trouvé l'entame plutôt emballante. On nous y montre les débuts de la captivité d'un groupe d'Espagnols, vendus aux enchères comme esclaves à Alger, où ils ont été livrés par des pirates à la solde des Ottomans (turcs). Signalons que le film a été tourné dans le sud de l'Espagne, où subsiste une abondante architecture de l'époque musulmane. De superbes décors ont été ajoutés, conçus en partie par un Français. Le résultat est assez bluffant.
La suite est tout aussi passionnante. Les captifs jugés "de valeur" sont extraits de la vente aux enchères. Le pacha d'Alger Hassan Veneziano (un Italien converti) veut en tirer un bon prix, grâce à la rançon payée par les familles. A ceux pour qui le temps passe trop lentement, ou qui n'ont plus de perspective de libération par rachat, on propose la conversion (publique), qui permet de sortir de la captivité (mais pas de quitter l'Algérie).
Les plus courageux (inconscients ?) n'envisagent qu'une sortie honorable : l'évasion. Au départ, Cervantes fait partie de ceux-ci. Le film n'évoque qu'une de ses quatre tentatives... en fait plusieurs, puisque, pour rendre plus agréable la vie de ses camarades de détention, le jeune Espagnol se met à leur raconter des histoires, tantôt inspirées de la réalité, tantôt complètement imaginées. C'est l'un des attraits de ce film que de mêler habilement les deux, sollicitant la sagacité des spectateurs.
La réputation de conteur de Cervantes atteint les oreilles du pacha, avec lequel le captif va nouer une bien étrange relation. Ici, le film se teinte d'homo-érotisme, ce qui a provoqué quelques réactions outrées en Espagne : les spécialistes de l'écrivain réfutent l'existence d'un penchant homosexuel chez Cervantes. Dans le film, Amenábar introduit le sujet avec une certaine délicatesse... mais, bon, ce n'est pas vraiment ma came. Certaines scènes témoignent toutefois d'un incontestable savoir-faire, bien servies il est vrai par le talent de l'interprète du pacha, Alessandro Borghi. (Chez nos voisins transalpins, il est connu pour avoir récemment joué dans la mini-série Supersex, où il incarne un certain Rocco Siffredi...)
D'autres comédiens m'ont marqué, comme Fernando Tejero (qui incarne un religieux aussi fanatique que fourbe), Miguel Rellán (qui interprète l'autre écrivain de cette histoire) et César Sarachu, alias frère Juan Gil, l'un des deux Trinitaires chargés de racheter les captifs. La première apparition des deux religieux dans l'enceinte fortifiée dirigée par le pacha ne manque pas de sel :
En dépit de quelques entailles à la réalité historique, j'ai été captivé par cette histoire, qui dénonce tous les extrémismes, de la cruauté des barbaresques musulmans au fanatisme d'une partie de l’Église catholique espagnole. Un grand appétit de vivre et un humanisme sincère émergent de cette petite épopée, qui se distingue des productions actuellement en salles.
23:07 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire





