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vendredi, 04 janvier 2019

Repas de fête

   Dans ma famille, on n'a jamais été "dinde aux marrons". Les adultes plus âgés étaient plutôt portés sur les produits de la mer (huîtres, coquilles Saint-Jacques) et les escargots. Je ne suis pas fin gastronome. J'ai tendance à me contenter d'un menu basique, pour peu qu'il soit bien préparé.

   Cette année, en déambulant dans les rayons d'une grande surface, j'ai eu la surprise de constater l'apparition d'un nouveau mets : l'aligot à la truffe noire, proposé par la coopérative Jeune Montagne, en association avec les restaurateurs Michel et Sébastien Bras.

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   Attention : ce n'est pas donné. La barquette de 400 grammes était vendue environ 11 euros, alors que la portion équivalente d'aligot traditionnel (de 500 grammes toutefois) coûte un peu moins de 6 euros. Au kilo, l'écart est encore plus marquant : on passe de 12 à 27,5 euros !

   La truffe noire est en grande partie responsable de l'augmentation du prix. En fonction des périodes, tuber melanosporum se vend entre 500 et 1 000 euros le kilogramme ! Dans l'aligot spécial de Jeune Montagne, il y en a 4 grammes (1 % de la portion de 400 grammes). A 1 000 euros le kilo, cela correspond à un surcoût de 4 euros (2 euros si le kilo est à 500 euros). 6 + 4 : 10 euros, auxquels il faut sans doute ajouter une petite marge supplémentaire (grande marge si la truffe a été payée moins cher).

   A deux, on peut compléter par une saucisse grillée chacun.e et une salade aux noix. Cela se consomme aussi bien avec du vin rouge que du vin blanc (sec, de préférence)... et c'était délicieux !

dimanche, 09 décembre 2018

Défèque Niouzes sur l'ONU

   C'est une nouvelle "légende urbaine" que la secte des abrutis du net tente de propager. A l'ONU aurait été signé un traité contraignant visant à faciliter le déferlement migratoire sur les pays développés. Ce serait donc le complot du siècle... enfin un des nouveaux complots du siècle, tant la crédulité des incultes n'a pas de limite.

   Pour aborder le sujet, rien de tel que de se rendre à la source, à avoir le traité en lui-même, de son véritable titre "Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières". Tout d'abord, le texte est-il secret ? Aucunement. Le français étant l'une des langues de travail de l'ONU, on peut même télécharger une version lisible sans traduction ici (au format Word) ou encore (au format pdf).

   Premier constat. Ceux qui affirment que ce Pacte devra être suivi à la lettre n'ont visiblement pas lu le texte. Voici ce qu'on peut lire dès la page 3 :

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   Au cas où un lecteur aurait parcouru un peu trop rapidement ce passage, la page 5 se charge de rappeler quelques principes de base :

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   Il est donc clairement affirmé que les signataires du Pacte peuvent l'appliquer... ou pas, en totalité... ou pas. Surtout, ils conservent la maîtrise des flux migratoires les concernant (c'est-à-dire les flux nationaux) et décider de qui est un.e migrant.e légal.e/illégal.e et donc qui est autorisé à résider dans le pays.

   La suite est tout aussi instructive. Je recommande la lecture des objectifs du Pacte. La liste est donnée pages 7-8, avant que chacun ne soit ensuite développé. Voici par exemple ce qu'on trouve au niveau de l'objectif 9 (page 20) :

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   Les Etats signataires, s'ils mettent en oeuvre le Pacte, s'engagent donc à lutter contre les migrations illégales et les trafiquants qui en tirent du profit. Les conclusions en sont tirées dans l'objectif 21, page 35 :

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   Les pays de départ (dits aussi d'émigration) s'engagent donc, s'ils appliquent le Pacte, à accepter le retour de leurs habitants qui sont expulsés des pays d'arrivée (dits pays d'immigration).

   Loin d'être un traité imposant d'importants flux migratoires aux pays développés, ce Pacte est un compromis de gestion, facultatif, qui s'appuie sur des textes que les pays membres de l'ONU sont déjà censés appliquer, comme la Charte de 1945 et la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948. Là réside le véritable problème : nombre de membres de l'ONU ne respectent même pas ces deux textes très anciens, âgés de plus 70 ans.

jeudi, 06 décembre 2018

Un "gilet jaune" de soie

   Mardi matin, en voiture, j'ai été un peu surpris en écoutant (sur France Inter) l'entretien du jour entre la journaliste Léa Salamé et un drôle d'invité, un "gilet jaune" originaire d'Indre, Jean-François Barnaba :

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   J'ai été étonné parce que j'ai eu l'impression d'entendre un professionnel de la politique, ou un syndicaliste chevronné. (Il a quand même employé de lui-même le mot "paradigme" !) Au moins, il développe un discours argumenté et ne sombre pas dans l'invective, un travers de nombre de ses camarades de lutte. A l'écoute, je déduis qu'il a une sensibilité de gauche. Même s'il se présente comme synthétique au sein du mouvement, je pense qu'il en incarne plutôt l'aile gauche non violente.

   Notons qu'au cours de l'entrevue, Jean-François Barnaba a affirmé qu'il n'avait plus accès à son compte Facebook. Le lendemain, tout semblait revenu à la normale, selon La Nouvelle République.

   Mais ce n'est pas ce qui m'a le plus marqué dans les informations de mercredi. Ce soir-là, L'Obs révélait que ce fonctionnaire territorial est payé 2 600 euros par mois... à ne rien faire ! Voilà pourquoi il était si disponible pour parler au nom des "révoltés du diesel" !

   Aujourd'hui jeudi, ce fut au tour de Capital d'enfoncer le clou. Dans un papier fort intéressant, le magazine a décortiqué le statut très particulier de cet actif payé à se tourner les pouces. Cela fait dix ans que cela dure... et, à l'origine, il touchait même environ 4 300 euros par mois ! (Toutefois, selon un autre article de La Nouvelle République, il touchait plutôt autour de 3 100 euros par mois.)

   Cerise sur le gâteau : cet artiste de la rébellion envisage de se présenter aux prochaines élections européennes. A la fin de l'entretien, on sentait poindre la langue de bois politicienne et les affirmations fondées sur rien (notamment à propos du pouvoir d'achat des classes moyennes et des classes populaires). A bientôt donc, peut-être sur une liste LFI !

mardi, 04 décembre 2018

Macron et son programme

   Depuis plusieurs semaines, on entend tout et n'importe quoi à propos du gouvernement, notamment dans la bouche des "gilets jaunes" ou des personnes qui prétendent les soutenir. Le président de la République aurait trahi ses promesses de campagne, en particulier concernant les taxes sur le carburant. Or, que se passe-t-il quand on retourne lire le programme du candidat Macron ? Stupeur ! La plupart des mesures prises par le gouvernement Philippe figurent dans le texte, accessible à tous les électeurs, mis en ligne en 2017. En voici un échantillon.

   La réduction du nombre de fonctionnaires ? Elle est annoncée dans l'objectif 3 du thème "action publique et fonction publique".

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   On en encore loin des 120 000 suppressions, tout comme, à l'inverse, on n'en est pas à 12 000 créations de postes dans le primaire des zones prioritaires (4 000 plutôt). Au niveau des programmes, il faudrait voir si l'annonce de la priorité donnée aux apprentissages fondamentaux est suivie d'application. Vu l'illettrisme qui caractérise nombre de commentaires sur les réseaux sociaux, force est de constater que, faute de sauver les adultes, il est urgent de s'y mettre pour les enfants.

   La réforme du baccalauréat ? Elle est annoncée (tout comme les changements dans le primaire) dans le volet "éducation" du programme (objectif 2 pour le primaire, objectif 6 pour le bac) :

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   Au niveau de la fiscalité, de programme annonce aussi clairement la couleur : augmentation de la CSG, remplacement de l'ISF par l'IFI et suppression progressive de la taxe d'habitation, tout cela figure noir sur blanc dans le programme rendu public.

   Cela nous mène tout naturellement au volet "transition écologique". Et là... ô surprise ! Il est bien question des carburants fossiles et de la fiscalité du diesel, dans l'objectif 4 "Protéger la santé et l'environnement des Français" :

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   Conclusion ? Soit nombre de Français votent à la présidentielle sans lire les programmes des candidats (ce qui ferait d'eux de fieffés imbéciles - ou de grosses feignasses). Soit ils ont lu ces programmes mais ne les ont pas compris (ce qui ferait d'eux des analphabètes avec droit de vote). Soit ils les ont lus et compris... et ont voté Macron quand même (!!!!!!). Soit, tout simplement, ils les ont lus, compris... et n'ont pas voté Macron. Nombre de ces "gilets jaunes" sont des électeurs de Jean-Luc Mélenchon ou de Marine Le Pen. Leur candidat-e a été battu-e dans les urnes, alors ils essaient de gagner dans la rue ce qui leur a échappé par un scrutin démocratique et transparent. Avec eux, ils entraînent de pauvres diables auxquels on peut faire avaler n'importe quelle fake news.

   Il serait temps que la démocratie française mûrisse. Le pays en a besoin.

 

lundi, 03 décembre 2018

Des "gilets jaunes" fascisants

   Petit à petit, le véritable visage de certains "gilets jaunes" se fait jour. Force est de constater que ce mouvement, qui se veut l'expression d'une démocratie populaire, donne plutôt l'impression de vouloir rétablir l'un des régimes totalitaires en vigueur dans les années 1930. Alors que le mouvement n'est jusqu'à présent jamais parvenu à mettre dans la rue (au niveau national) plus de 400 000 personnes et qu'il apparaît qu'il héberge plusieurs sensibilités, certains de ses nervis tentent d'empêcher toute action sortant de leur ligne.

   La semaine dernière, c'est Jason Herbert, l'un des huit porte-parole désignés, qui en a fait les frais. Le gars est victime de harcèlement, a reçu quantité de menaces de mort... de la part d'adversaires du mouvement, pensez-vous ? Eh bien, non ! Presque toutes les menaces qu'il a reçues proviennent de son propre camp.

   Aurait-il trahi le mouvement ? Rien ne vient étayer cette affirmation. Au contraire, quand il est apparu que le Premier ministre Edouard Philippe refusait que leur entretien soit retransmis en direct sur les réseaux sociaux, Jason Herbert a claqué la porte. Sa supposée faute est d'avoir adopté une attitude responsable, à savoir se montrer prêt à négocier avec le gouvernement pour obtenir quelque chose. Rappelons que, jusqu'à présent, les seuls résultats obtenus par les "gilets jaunes" sont des millions d'euros de dégâts et la chute du chiffre d'affaires des commerces de centre-ville. Joli bilan que voilà.

   Mais ce n'est pas terminé. Aujourd'hui, on apprend que d'autres "gilets jaunes", qui refusent l'extrémisme, ont eux aussi reçu des menaces de mort.

   Pendant ce temps, des feignants en gilet continuent d'emmerder les honnêtes gens qui veulent continuer à travailler pour nourrir leur famille. De leur côté, les forces de l'ordre, qui ont reçu des consignes de modération pour éviter toute bavure, se font (dans les grandes villes) copieusement insulter, caillasser voire tabasser par des manifestants surexcités. Il est temps que le gouvernement remette de l'ordre dans ce pays. L'actuel ministre de l'Intérieur est-il à la hauteur de la tâche ? On se le demande.

dimanche, 02 décembre 2018

Groland à pleins gaz

   La dernière émission du Zapoï, diffusée samedi 1er décembre, mérite vraiment le détour. Cela commence très fort, avec un sketch mettant en scène des couples de classe moyenne réunis autour d'un repas, avec, comme principal sujet de conversation, le changement climatique :

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   A ceux qui ne sont pas familiers de l'humour grolandais, je signale qu'il s'agit de second degré, qui ironise sur l'hypocrisie d'une partie des classes moyennes, qui se déclare très attachée à la lutte contre le réchauffement... mais tient mordicus à son diesel.

   Une thématique semblable est abordée à travers le sketch consacré aux "pompes du coeur", qui lui met en scène des conducteurs de plus modeste extraction :

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   Entre temps, on aura eu droit à un sujet sur l'alcool au volant (à la sauce grolandaise), une parodie d'émission de télé-réalité (Le Grand Frère), une séance de dédicace de l'ancien président François Groland et aux conseils judicieux du médecin de la chaîne (toujours très investi dans son travail), concernant la fessée...

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   Parmi les brèves, je distingue celle qui traite des problèmes sanitaires relevés dans les restaurants d'une célèbre chaîne vendant des hamburgers. Les journalistes grolandais sont même parvenus à déterminer l'origine  des traces de sperme trouvées dans certains produits :

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   La séquence des publicités, fort bienvenue, a été l'occasion de promouvoir un produit d'une incontestable utilité, le "mouchaprout" :

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   La dernière partie commence par deux séquences importantes. La première parodie les pseudo-débats entre spécialistes auto-proclamés, qui ne font que brasser du vent. La seconde est un nouvel épisode de la mini-série Missing Misses, qui met en scène une brochette de ravissantes jeunes femmes en maillot de bain, perdues dans la campagne grolandaise. Je vous donne une idée du problème auquel elles sont confrontées cette fois-ci :

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   L'émission se poursuit par un sketch sur l'ex-PDG d'un célèbre groupe automobile, un autre sur un robot faisant office de centre d'appel... et une délicieuse parodie de "musique urbaine", autour du "rappeur écolo" MC Carotte :

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   Banzai !

lundi, 19 novembre 2018

Des gilets jaunes devant, marron derrière

Du fin fond de nos Jardiland

Hissés sur leurs chevaux fiscaux

Les croisés du Gazoleland

Se prennent pour des hobereaux.

 

Dans leur caprice régressif

Ces gilets à forte haleine

Bloquent nos ronds-points sans peine

Les pandores restant passifs.

 

Insultant certains conducteurs

S'en prenant aux rétroviseurs

Ils se voient déjà dictateurs.

 

Cabu aurait volontiers croqué ces beaufs revendiquant

La liberté de polluer toujours plus la planète

La liberté de financer des Majors prédatrices

La liberté de financer des gouvernements soutenant le terrorisme.

samedi, 17 novembre 2018

Mon cher enfant

   Cet enfant n'est pas le héros du film. Mais tout tourne autour de lui. Sami est le fils unique d'un couple (âgé) de classe moyenne tunisienne. A force de travail, les parents Riadh et Nazli ont acquis une petite aisance matérielle (un appartement dans un quartier tranquille, une voiture récente...), que l'on perçoit toutefois comme fragile. Le fils est sur le point de passer le baccalauréat, mais souffre de migraines.

   La première partie de l'histoire ne m'a pas plu. J'ai trouvé le portrait de famille très conventionnel, filmé platement. On sent la volonté de montrer des "Tunisiens normaux", citadins occidentalisés, modérés. C'est vraiment souligné au marqueur fluorescent... et avec quelques incohérences. Ainsi, le père (insupportable papa-poule) n'assure plus son véhicule, sans doute par souci d'économie, mais dépense à mon avis bien plus d'argent dans des futilités.

   De l'inventivité aurait pu naître du monde adolescent-jeune adulte dans lequel évolue le fils, mais c'est escamoté, puisque tout ou presque est vu du point de vue des parents (du père principalement, au début).

   Le film démarre enfin quand le fils disparaît. Je ne vais pas en dire trop pour ne pas déflorer l'intrigue, mais sachez que c'est inspiré d'une histoire vraie. (Les spectateurs des Cowboys ne seront pas trop dépaysés.) Le père, désormais à la retraite, décide de partir à la recherche de son fils, au cours d'un périple qui va notamment le mener en Turquie. (Les observateurs attentifs remarqueront que, dans les deux premiers tiers de l'histoire, que ce soit en Tunisie ou en Turquie, on ne voit pas une seule femme voilée...) La scène la plus marquante est le dialogue entre Riadh et le propriétaire d'une maison transformée en hôtel, un vieillard que ses enfants ont laissé tomber et qui semble avoir compris beaucoup de choses.

   La troisième partie se déroule en Tunisie. Le personnage de la mère prend un peu plus d'ampleur. J'ai craint que l'on ne retombe dans des clichés mais, finalement, c'est assez inattendu et plutôt bien joué.

mardi, 30 octobre 2018

L'Amour flou

   Ce faux documentaire est une autofiction tragi-comique, s'appuyant sur des situations vécues, d'autres inventées. A la base, il est question de la séparation du couple formé par Romane Bohringer et Philippe Rebbot. On ne présente plus la fille de Richard, qui connut son heure de gloire dans les années 1990. Son ex-compagnon est pour beaucoup un quasi-inconnu, alors que son visage est apparu dans quantité de films/séries, au titre de second, troisième rôle voire de figurant.

   Nos deux lascars font preuve d'une incontestable autodérision. Au niveau professionnel, Rebbot ne cache pas que, bien qu'étant acteur, il vit dans l'ombre, tandis que Bohringer travaille régulièrement, mais plutôt désormais dans des productions assez confidentielles.

   La présentation de l'univers familial mérite aussi le détour. Rebbot est le portrait craché de son père (sur le plan physique), qui n'en désapprouve pas moins la rupture avec Romane, une femme qui a la tête sur les épaules... parce que, autant le dire tout de suite, si vous n'aimez pas le genre "intermittent du spectacle paresseux et gauchisant", le principal personnage masculin risque de sérieusement vous agacer ! Chez les Bohringer, la manière dont Romane choisit de gérer la rupture provoque, dans un premier temps, l'incompréhension. On se croirait (presque) dans une comédie italienne.

   C'est précisément dans la gestion de la rupture que le film fait preuve d'originalité : les anciens amoureux vont emménager dans un appartement double "expérimental" : les logements des parents sont quasi voisins, communiquant par l'intermédiaire de la chambre des enfants, située en position médiane. Evidemment, cela donne lieu à nombre de situations cocasses, les adultes rivalisant d'attentions pour attirer la progéniture de leur côté... Toutefois, ce n'est pas l'aigreur qui domine cette séparation. Les parents se veulent progressistes, mûrs... mais, parfois, le ressentiment l'emporte et l'on se dit franchement (voire méchamment) ses quatre vérités.

   Les autres bons moments de comédie sont liés aux tentatives de chacun pour vivre sa vie de son côté. Rebbot est pathétique dans sa quête de la jeunesse perdue. Bohringer a elle aussi envie de croquer de la chair fraîche. Elle découvre que, bien que superbement gaulée à 44 ans, la route est longue dans la quête d'un nouveau partenaire. J'ai trouvé particulièrement savoureuse la mise en scène des fantasmes féminins...

   Signalons que c'est très correctement filmé, avec un indéniable sens du rythme. On sent aussi une immense tendresse, principalement envers les enfants, mais aussi envers la famille et l'autre, l'ex, si irritant(e) parfois, mais avec lequel (laquelle) on a partagé tellement de choses.

   Même si tout n'est pas parfaitement réussi, je recommande chaudement cette comédie atypique, rafraîchissante.

vendredi, 26 octobre 2018

Gastronomie aveyronnaise (et française)

   Comme j'ai naguère "liké" la page Facebook de la Bibliothèque Nationale de France, je reçois régulièrement des notifications, parfois en liaison avec l'actualité. La plupart du temps, ce sont des documents anciens qui bénéficient d'une mise en lumière. C'était le cas cette semaine, avec une carte gastronomique de la France métropolitaine, datant de 1929. En voici un extrait, centré sur l'Aveyron :

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   Tout d'abord, en regardant la carte d'ensemble, on note la division du territoire en provinces, les régions n'existant pas à l'époque et la gastronomie n'épousant pas rigoureusement les frontières départementales. Toutefois, on s'étonnera que l'auteur ait classé l'Aveyron en Guyenne... dont la ville de Bordeaux (sa capitale historique !) est exclue, étant associée à la Gascogne, que l'auteur a voulue distincte de la précédente.

   Concernant l'Aveyron, sans surprise, on retrouve l'aligot (pas forcément bien placé d'ailleurs), la fouace ("fougasse"), le roquefort (avec là aussi un problème de localisation, pour le village). Capdenac est déjà célèbre pour ses "conserveries alimentaires" (développées par Raynal et Roquelaure depuis la fin du XIXe siècle).

   En revanche, certains lecteurs seront sans doute étonnés de ne trouver les "tripoux" (ou "trippoux" [sic]) et la truffade (le "truffado") qu'en Auvergne.

jeudi, 25 octobre 2018

Amin

   C'est le prénom du principal personnage masculin, un immigré sénégalais (en situation régulière), travaillant dans une entreprise de BTP, en France métropolitaine. Toute sa famille est restée au village, situé dans la région de Thiès, à l'est de Dakar :

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   La première séquence nous présente un groupe d'ouvriers, tous d'origine africaine, semble-t-il. Il est marqué par une assez grande diversité, puisque les Sénégalais y côtoient des Marocains, des Maliens, entre autres. Il y a des jeunes et des vieux, une majorité d'hommes, mais aussi quelques femmes. Presque tous vivent dans ce qu'on appelait il y a des années un foyer Sonacotra (aujourd'hui Adoma).

   La deuxième partie montre le retour au pays d'Amin. Il revient habillé propre et chic, des centaines d'euros planqués dans les chaussettes. Une partie de cette somme va servir à faire construire sa maison, une autre à monter une boucherie avec ses frères, restés au Sénégal. Bien entendu, une part importante est réservée à la famille proche, une petite somme étant gardée pour financer l'école du village.

   Ici, on quitte la langue française (pour le wolof ou le sérère) et les vêtements très colorés remplacent le chemise-pantalon. Paradoxalement, ces retrouvailles ont pour fonction de nous montrer la dureté de la séparation : l'épouse d'Amin (ravissante et au caractère entier) Aïcha (Marème N'Diaye, très bien) a de plus en plus de mal à tenir le fils aîné. Au quotidien, elle doit gérer tous les soucis... et le poids des regards du village et de la famille élargie, avec laquelle elle ne s'entend pas forcément très bien.

   C'est lors du retour en France d'Amin que les choses se compliquent. Il a certes du travail (sans doute en partie payé au noir), mais il aspire à autre chose... tout comme Gabrielle, la cliente du chantier auquel il participe. Emmanuelle Devos incarne une quadra en pleine séparation, qui aimerait sans doute retrouver une part de ses rêves de jeune femme. La présence séduisante d'un homme bien bâti, respectueux et travailleur réveille le désir en elle. Toutefois, cette partie ne m'a pas paru très bien mise en scène. L'acteur Moustapha Mbengue n'est pas très à l'aise (ce n'est pas dû qu'au comportement de son personnage) et la "conclusion" arrive un peu vite.

   La suite gagne en subtilité. Indirectement, deux femmes se retrouvent en concurrence. Chacune essaie d'échapper à l'emprise masculine, plus forte toutefois au Sénégal qu'en France. Gabrielle évite tant que faire se peut son ex, qui a l'air d'un gros lourd (et dont le début laisse supposer qu'il a trompé sa compagne). Pour Aïcha, c'est plus compliqué, entre les enfants désormais adolescents, les travaux du quotidien, la maison qui se construit plus ou moins bien, ses beau-frères autoritaires... et les ragots du village.

   Je ne dirai évidemment pas comment cela se termine.

   J'ai aimé ce film parce que, sur un sujet sensible, il évite d'être manichéen, une constante dans le travail de Philippe Faucon (auteur, il y a trois ans, de Fatima). Les parties africaines m'ont cependant plus emballé (sur le plan cinématographique) que les séquences françaises.

mercredi, 24 octobre 2018

Les enfants de djihadistes

   Un article du Monde mis en ligne aujourd'hui évoque la possible arrivée en France de plus d'une centaine d'enfants de djihadistes, se trouvant actuellement en Syrie. Ce n'est pas tant le nombre de personnes concernées que les principes mis en oeuvre qui sont l'objet de la polémique.

   Rappelons d'abord qu'en droit français, un enfant est doté de la nationalité française si l'un de ses parents est lui-même français, et ce quel que soit le lieu de sa naissance. Cela concerne donc tous les enfants des centaines (milliers...) d'adultes qui sont partis au Moyen-Orient au début des années 2010, que ces enfants soient nés avant l'émigration terroriste ou qu'ils soient nés après.

   En France, on se pose la question un peu tard, vu que, dès l'été 2016, on évoquait plus de 200 retours sur notre territoire. Quant au nombre d'enfants potentiellement concernés, il semble plus élevé que ce qui est dit actuellement. En mai dernier, un article du Figaro évoquait 500 enfants, environ 10 % étant âgés de plus de 13 ans. La limite d'âge choisie n'est pas innocente : au-dessous de 13 ans, un mineur ne peut être emprisonné. On sous-entend que ce sont les parents qui sont responsables de ses actes. C'est aussi l'âge auquel serait décédé le fils (combattant...) d'un couple de djihadistes strasbourgeois.

   Dans un autre article, daté de janvier 2017, le quotidien conservateur prenait l'exemple des enfants de cinq familles récemment revenues en France : ils étaient âgés (à l'époque) de 3 mois à 16 ans. Il me paraît donc évident que, depuis plusieurs années, on laisse rentrer en France des mineurs (possiblement) endoctrinés, en plus des parents qui évidemment, tentent de se présenter comme des victimes et surtout pas comme des sympathisants de l'islam intégriste.

   J'ai cité les âges parce que cela entre en ligne de compte. Je pars du principe que les enfants ne sont pas responsables des conneries faites par leurs parents. Néanmoins, on ne peut pas écarter le risque que ceux qui sont déjà assez grands ont sans doute subi une sorte de lavage de cerveau par les djihadistes (sans oublier ce qu'ils ont pu entendre au quotidien, dans la bouche de leurs parents, en France comme au Moyen-Orient...).

   Voilà pourquoi la déchéance de nationalité est revenue sur le tapis. Proposée naguère par le duo Hollande-Valls, finalement abandonnée, elle réapparaît aujourd'hui comme une solution possible. Pas sûr. Commençons par rappeler que notre Code civil prévoit la perte de la nationalité française sur décision de l'autorité publique. Mais cela ne concerne que les Français par acquisition (donc pas les Français de naissance). Le projet d'étendre cette possibilité aux Français de naissance rencontrait une limite : ne pas créer d'apatrides, et donc restreindre la portée de la réforme aux Français de naissance possédant (au moins) une autre nationalité.

   Dans le cas qui nous concerne (les enfants de djihadistes partis au Moyen-Orient), cela aurait au moins eu le mérite de ne pas attribuer automatiquement la nationalité française aux enfants des terroristes nés là-bas, pour peu que leurs parents aient été déchus auparavant. La loi actuelle précise que, même si les parents perdent la nationalité française, leurs enfants mineurs (déjà nés donc) n'en sont pas déchus. C'est ce qui semble guider la politique gouvernementale actuelle : laisser les parents djihadistes purger leur peine en Syrie, tout en acceptant d'accueillir leurs enfants mineurs en France (sans condition, semble-t-il). C'est une nouvelle application du "en même temps" macronien. Il reste la question de l'éventuel retour, dans cinq, dix, quinze, vingt ans, des parents, anciens (?) djihadistes condamnés, pas forcément repentants, chaleureusement accueillis par la République (supposée) laïque (avec nos impôts de non-djihadistes). Au risque de laisser les nids de frelons se reconstituer...

vendredi, 05 octobre 2018

Un président économe

   Le soixantième anniversaire de la naissance de la Ve République a donné lieu à des articles plus ou moins intéressants. L'un d'eux, publié dans Le Monde, a retenu mon attention : il est consacré à Jérôme Solal-Céligny, l'un des rédacteurs méconnus de notre Constitution, qui a travaillé, sous les ordres de Michel Debré, à mettre en forme les idées politiques de Charles de Gaulle. (Au passage, ceux qui l'ignoreraient apprendront que le futur président de la République voulait un texte limpide et que celui qu'il nous a légué, pour alambiqué qu'il puisse paraître parfois, est une version simplifiée de ce qui lui avait été soumis...)

   A partir de cet article, on peut rebondir sur un autre papier, publié au cours de cet été, dans le cadre d'une série consacrée aux présidents de la République, après leur départ de l'Elysée. Concernant de Gaulle, la journaliste Béatrice Gurrey rappelle son souci d'économiser les deniers publics. Après l'échec du référendum de 1969, le grand Charles a quitté la scène politique aussi brusquement que discrètement, renvoyant la protection rapprochée dont il bénéficiait et refusant de toucher aussi bien sa retraite de président que l'indemnité qui lui était due en tant que nouveau membre du Conseil constitutionnel. De surcroît, il a maintenu jusqu'au bout son refus d'obsèques nationales, souhaitant être enterré à Colombey-les-Deux-Eglises aux côtés de sa fille Anne, née trisomique et décédée à l'âge de 20 ans, en 1948.

   Cette (relative) austérité personnelle s'était vue dès le début de la Ve République, lorsque le tout nouveau président français avait lancé le rapprochement franco-allemand en recevant chez lui, à Colombey, le chancelier de la RFA, Konrad Adenauer. Certes, il y avait un peu de mise en scène dans cette rencontre supposée privée entre les deux dirigeants. Il n'est pas moins vrai que de Gaulle avait, à cette occasion, évité de recourir aux "Ors de la République" pour servir sa politique.

   Les plus âgés d'entre nous connaissent cette anecdote tant répétée autrefois, selon laquelle les époux de Gaulle payaient leurs factures de gaz et d'électricité de l'Elysée, veillant à ce que les lumières soient éteintes quand une pièce se vidait. C'était un autre temps...

   Il n'est peut-être pas si éloigné que cela. L'actuel président de la République, Emmanuel Macron, semble vouloir placer ses pas dans ceux de "Mongénéral", comme le révèlent plusieurs détails récemment rendus publics. Hier, il s'est rendu à Colombey-les-Deux-Eglises pour déposer une gerbe sur la tombe de son illustre prédécesseur, sans oublier de lâcher, au passage, une formule lapidaire dans le genre de celles qu'il affectionne. Dans la foulée, on a appris le retour de la croix de Lorraine sur le blason présidentiel.

   Ce ne fut pas une surprise pour les clients de la Boutique de l'Elysée (ni pour ceux du site parodique d'ailleurs), puisque sur les produits que l'on y commande figure le logo orné de ladite croix, comme ici :

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   Sans être un héritier officiel du général, Emmanuel Macron a perçu dans son propre parcours un écho à la geste gaullienne, en particulier quand, au début de la IVe République, l'ancien chef de la Résistance s'était lancé dans l'arène politique en fondant un mouvement, le RPF, qui avait ratissé large, à droite et à gauche, tout comme l'avait fait le nouveau parti gaulliste quand son fondateur était revenu aux affaires, en 1958. A l'époque, les commentateurs politiques doutaient de la survie du mouvement après le départ de de Gaulle, tant son existence semblait liée à la vie du grand homme...

   Cerise sur le gâteau, celui qui est régulièrement caricaturé comme "le président des riches" semble aussi s'inspirer des vertus domestiques de son (lointain) prédécesseur, puisque le couple Macron règlerait de sa poche la plupart de ses dépenses quotidiennes.

mardi, 02 octobre 2018

Manuel, l'Européen

   L'annonce de la candidature de Manuel Valls aux prochaines élections municipales de Barcelone a suscité une mini-tempête médiatique... et une avalanche de commentaires orduriers, hélas révélateurs de la faiblesse intellectuelle du débat politique en France aujourd'hui. On a de surcroît pu entendre diverses affirmations aussi farfelues qu'infondées sur le parcours politique de l'ancien Premier ministre français.

   Il a été d'accusé de renier la France et de faire peu de cas de sa nationalité... sauf qu'il a toujours revendiqué (encore en 2015) son identité plurielle, française bien sûr, mais aussi espagnole, catalane... et (un peu) italo-suisse (par sa mère). Bref, c'est un Européen, ce qui, soit dit en passant, aurait pu faire de lui un bon candidat aux élections de 2019 (ce qui fut le cas du franco-allemand Daniel Cohn-Bendit, alors de nationalité allemande, tête de liste nationale des Verts en 1999 et élu de la circonscription Ile-de-France en 2009).

   On a aussi entendu des propos nauséabonds déniant la qualité de Français à Manuel Valls. S'il est né espagnol à Barcelone, il a passé toute son enfance et son adolescence à Paris, où il a entamé des études d'histoire. Sans avoir la nationalité française. De sa part, demander la naturalisation à 19-20 ans n'était pas anodin. C'était une adhésion personnelle.

   Son récent choix de tenter sa chance à Barcelone est-il un crachat à la France qui lui aurait tout donné ? Pas davantage. On ne lui a pas "donné" les mandats (de député, de maire) qu'il est allé gagner au cours de campagnes électorales animées. Lui par contre a donné beaucoup de son temps pour agir en politique... peut-être pas toujours avec la plus grande justesse.

   Une autre imbécillité proférée à son encontre est que l'aventure espagnole serait le choix de la facilité... alors qu'il lui aurait été tellement plus aisé de pantoufler comme tant d'autres à l'Assemblée nationale, où il avait un revenu mensuel de plus de 5 000 euros nets (le double avec les frais de mandat) garanti jusqu'en 2022. Il aurait pu se contenter d'attendre tranquillement cette échéance, comptant sur l'érosion d'Emmanuel Macron et la médiocrité de ses rivaux de gauche pour pouvoir se présenter en recours. On a déjà vu des retours en grâce bien plus spectaculaires dans l'histoire de la Ve République, à commencer par celui de Charles de Gaulle, sans oublier ceux de François Mitterrand (déclaré à plusieurs reprises perdu pour la politique), Jacques Chirac (au fond du trou en 1988 et en 1994) ou encore de Nicolas Sarkozy.

   Au contraire, la campagne des municipales de Barcelone s'annonce semée d'embûches... et il risque d'y achever  définitivement sa carrière politique. Il aura une multitude d'adversaires, des nationalistes catalans aux socialistes locaux, en passant par la majorité actuelle, d'une sensibilité proche de notre France Insoumise (ce qui explique sans doute en partie la hargne avec laquelle les mélenchonistes s'acharnent sur M. Valls). Pour la petite histoire, signalons que l'orientation de la liste que devrait conduire Manuel Valls serait en quelque sorte un retour aux sources familiales, puisqu'il me semble que ses grands-parents paternels étaient de sensibilité conservatrice...

   Une autre raison peut expliquer le retour du tropisme catalan dans le cheminement de l'ancien Premier ministre : sa vie privée et la relation qu'il a récemment nouée avec Susana Gallardo. Les gazettes ont lourdement insisté sur la fortune de la nouvelle compagne de Manuel Valls. On pourrait aussi noter que, contrairement à nombre de ses collègues qui, une fois la cinquantaine venue, refont leur vie avec une femme qui pourrait être leur fille, l'ancien Premier ministre s'est lié à une personne de sa génération (elle a seulement trois ans de moins que lui). Tous deux semblent partager un fort attachement à la Catalogne et le refus de l'aventure indépendantiste.

   D'une certaine manière, Manuel Valls se montre plus internationaliste que nombre de politiciens de gauche, qui se contentent de gérer leur petite boutique nationale (voire locale), faisant peu d'efforts pour tenter de construire une alternative progressiste en Europe.

   Je suis quand même d'accord (en partie) avec ceux qui affirment qu'à l'heure actuelle, Manuel Valls est un peu "grillé" en France. (Mais il aurait pu se contenter d'attendre 2022.) Se lancer dans l'aventure espagnole est peut-être un moyen de continuer à croire à son importance politique, lui qui est tombé dans la marmite quand il était étudiant et n'en est jamais sorti.

lundi, 24 septembre 2018

Le français facile

   Récemment, France 3 a voulu faire oeuvre civique en diffusant un téléfilm dont le héros est un jeune illettré. Les téléspectateurs ayant raté sa diffusion avaient la possibilité de profiter du service de vidéo de rattrapage. Voici comment le programme était présenté (dans la catégorie "séries et fictions") :

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   On retrouve la même faute sur la page de l'extrait de deux minutes que propose la chaîne :

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   Par contre, l'erreur a été corrigée sur la page proposant le film intégral.

   Le maîtrise approximative de notre langue semble hélas être chose courante dans les médias, notamment numériques. Vous avez peut-être entendu parler d'un site parodique, enlysée.fr, qui se moque de la Boutique de l'Elysée et de ses produits "personnalisés" façon Macron. Voici ce qu'on peut lire dès la page d'accueil :

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   Rappelons qu'en français, un e suivi d'un x ne prend pas d'accent, faute commise deux fois sur trois dans le texte de présentation. Il semble donc qu'une simple relecture aurait suffi à corriger ces erreurs. Elle aurait aussi permis de mieux accorder deux participes et d'écrire plus correctement certains groupes nominaux. (A priori, chaque SDF n'est en quête que d'un domicile.)

   Cela ne s'arrête pas là. Si vous souhaitez acquérir le poster géant à colorier (un détournement satirique assez savoureux, ma foi), il ne faudra pas vous formaliser du texte d'accompagnement :

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   L'authentique héros Mamoudou Gassama pourrait s'offusquer de voir son prénom mal orthographié. (Etant d'origine malienne, il n'a de surcroît rien à voir avec le chef-lieu de Mayotte...) Ajoutons que l'APL est l'aide personnalisée au logement, de genre féminin, comme l'évasion fiscale, ce dont (presque) tout le monde conviendra, quel que soit le coût de ces pratiques.

   Voilà pour la forme. Sur le fond, je trouve que c'est plutôt une bonne idée de profiter de certaines formules à l'emporte-pièce du président. (Qu'en est-il des droits d'auteur ?) Par contre, nulle part le site ne précise l'origine des produits, moins chers que ceux de la boutique officielle élyséenne (ceux-là annoncés made in France). S'ils ne sont pas fabriqués en France, peut-on au moins nous garantir qu'ils sont issus du commerce équitable ?

   Enfin, en lisant les conditions générales de vente, on apprend que les informations personnelles (pas celles concernant la carte de crédit... ouf !) peuvent être transférées... à une entreprise ayant payé la somme adéquate ?

   Il ne semble pas que les animateurs de l'émission Par Jupiter ! (qui ont offert une publicité gratuite à ce site) aient pratiqué une lecture approfondie des pages principales...

dimanche, 16 septembre 2018

De chaque instant

   La sortie de ce documentaire est l'occasion de (re)découvrir les oeuvres précédentes de Nicolas Philibert, comme le célèbre Etre et avoir, mais aussi Nénette et Retour en Normandie (moins La Maison de la radio). Il y a une vingtaine d'années, le réalisateur s'était intéressé à la vie d'une clinique psychiatrique (dans La moindre des choses). Ici, il s'est plongé dans la formation des infirmières.

   Le film est découpé en trois parties. La première montre le début de la formation des apprenti-e-s (car il y a quelques hommes dans le groupe). Si l'on excepte la surreprésentation des femmes, la plus jeune promotion présente un portrait saisissant de la population française dans toute sa diversité : les Blancs métropolitains côtoient quelques ultramarins (moins nombreux qu'il y a vingt ou trente ans) et des enfants de l'immigration africaine et asiatique. Ces derniers sont sans doute un peu surreprésentés (mais le film a été tourné dans un établissement de Montreuil). C'est souvent drôle, parfois en raison de la maladresse des apprenti-e-s, parfois en raison de la cocasserie des situations (un futur infirmier joue une parturiente... en étant doté d'un vagin artificiel). La première demi-heure passe comme un charme. Je note que les jeunes femmes sont très souvent jolies, un aspect qui ne va pas contribuer à faire disparaître les fantasmes masculins portant sur les infirmières...

   La deuxième partie montre les jeunes sur le terrain, dans différentes situations. Il me semble que c'est à partir de ce moment que l'auteur a choisi de mélanger les promotions : on voit des étudiant-e-s en première, deuxième ou troisième année. Les patients sont majoritairement des personnes âgées ou des enfants. On voit très peu d'adultes de 20 à 60 ans. Comme les soignants, ils sont issus de différentes catégories de population. C'est filmé avec tact et précision. A quelques reprises, j'ai compati avec un-e patient-e. On apprécie quand la prise de sang est pratiquée par une professionnelle expérimentée ! On nous a toutefois évité les cas les plus sordides.

   La troisième partie est centrée sur les retours d'expériences et sur la future affectation des étudiant-e-s en troisième année. Ces dialogues entre formateurs et apprenants sont riches d'anecdotes, dont on comprend souvent qu'elles n'étaient pas montrables à l'écran. La dureté du métier apparaît davantage qu'auparavant, tout comme la motivation des jeunes. Leurs formateurs sont aussi bien mis en valeur, à travers l'expérience et le recul qu'ils apportent aux futures infirmières.

   Même s'il y a quelques longueurs, j'ai beaucoup aimé ce film, qu'il faudrait faire voir à tous les décideurs politiques qui trouvent que l'hôpital coûte trop cher.

samedi, 15 septembre 2018

La préfecture de l'Aveyron sous le Consulat et l'Empire

   C'est le titre de la conférence donnée vendredi soir (au Centre culturel départemental, à Rodez) par Renaud Carrier, un universitaire spécialiste d'histoire du droit et des institutions. Bien qu'enseignant dans les Pyrénées-Atlantiques, il a des racines aveyronnaises, qui expliquent sans doute le choix du sujet de sa thèse, comme il l'a expliqué en introduction.

   Très vite, le conférencier a annoncé qu'il parlerait très peu des bâtiments. Deux raisons expliquent ce choix : la première est (semble-t-il) le manque de documentation sur l'Hôtel de préfecture. La seconde est que, sous Napoléon Bonaparte, les premiers préfets se sont installés... dans les locaux de l'évêché de Rodez (à côté de la cathédrale). Sous la Révolution (à partir de 1791), Rodez a eu deux évêques, un jureur (dit constitutionnel), l'autre réfractaire (suivi par la majorité des prêtres, à ce qu'il me semble). En 1801, la situation devait se décanter après la signature du Concordat entre le Premier consul et le pape Pie VII. L'ancien évêque réfractaire (le plus ancien des deux en poste) devait récupérer son siège... mais il a rejeté le Concordat. Le diocèse de Rodez a donc été rattaché à celui de Cahors, ce qui a libéré les locaux de l'évêché, déjà en très mauvais état à l'époque. (La plupart des Aveyronnais savent que l'évêque de Rodez a récemment déménagé avenue Victor-Hugo, dans l'ancien Carmel, tandis que le projet de transformation de l'ancien évêché en hôtel de luxe a été abandonné.)

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   Trois préfets ont officié en Aveyron sous Napoléon Bonaparte : François Godefroy de Sainthorent (parfois orthographié Saincthorent ou Saint-Horent) de 1800 à 1808, Michel-Augustin de Goyon (et non pas de Gozon, comme il est écrit sur le site de la préfecture) de 1808 à 1810 et Louis-Philippe Girod de Vienney, baron de Trémont, de 1810 à 1814.

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   D'après Renaud Carrier, la nomination du premier préfet a fait l'objet d'un véritable casting avant l'heure. Le ministre de l'Intérieur Lucien Bonaparte (frère de) aurait construit une grille d'analyse de la candidature Sainthorent qui, au départ, n'apparaissait qu'au bas d'une liste de 20 personnes. Cette fameuse grille permettait de comparer l'opinion d'une série de notables sur les candidats. Dans le cas qui nous occupe, plusieurs parlementaires aveyronnais (dont le député Jean-François Vezin, qui siégea au Tribunat et au Corps législatif) auraient soutenu la nomination de Sainthorent, tout comme des "huiles" parisiennes (Lebrun, Cambacérès, Clarke, Talleyrand, peut-être Chaptal). Il n'est pas exclu qu'un réseau franc-maçon ait milité en sa faveur. On peut aussi avancer l'argument du passé commun, Lucien Bonaparte et Sainthorent ayant été proches des Jacobins. Quant à Cambacérès (originaire de Montpellier) et Chaptal (né en Lozère, il est passé par Rodez... et a succédé à Bonaparte au ministère de l'Intérieur), ils avaient des raisons de s'intéresser à l'administration de l'Aveyron.

   Mais revenons à Sainthorent. Il a 34 ans, est issu d'une famille bourgeoise de la Creuse. De formation juridique, il a été journaliste et avocat. Sous le Directoire, il a été député au Conseil des Cinq-Cents (équivalent de notre Assemblée nationale). Il s'est taillé une réputation de spécialiste des questions fiscales, des biens nationaux, des routes... et il est réputé anticlérical.

   Une fois nommé, habilement, Sainthorent va recruter un prêtre local pour le conseiller. Il s'est aussi opposé au rattachement du diocèse de Rodez à celui de Cahors et semble avoir toujours manifesté du respect pour les conseils de fabrique. Travailleur acharné, il est économe des deniers publics, ne faisant effectuer que les travaux strictement nécessaires dans les locaux qu'il occupe, se souciant peu de son logement personnel.

   S'il est resté huit ans en place, c'est qu'il a dû donner satisfaction. Il a d'abord mis fin aux divers actes de brigandage qui pullulaient dans le département, mobilisant toutes ses troupes, appuyées par celles venues de Montpellier. Ceux qui ont échappé aux balles sur le terrain ont en général fini exécutés ou emprisonnés. Dans le même temps, le préfet met en place son administration, veillant à ce que les sous-préfets disposent de moyens dans leur circonscription, qui à "dégarnir" un peu le chef-lieu. Dans le souci de rendre la gestion du département plus efficace, Sainthorent a aussi poussé au regroupement des communes autour d'une mairie principale (par exemple ici)... une démarche qui n'est pas sans faire écho aux préoccupations contemporaines. Son principal échec porte sur la lutte contre le refus de la conscription, ce qui lui a peut-être valu sa révocation.

   Lui a succédé Michel-Augustin de Goyon, un ancien officier des Gardes françaises, qui fut classé "suspect" sous la Révolution et a émigré. Sous-préfet de Vendée (pas très loin de sa ville de naissance, Nantes), il aurait été furieux d'avoir été nommé dans l'Aveyron. Renaud Carrier a cité des extraits de sa correspondance avec Paris, où il se plaint du climat aveyronnais, de l'aspect montagneux du département... bref, c'est la déprime totale pour cet aristocrate conservateur, qui a finalement obtenu d'être nommé... préfet de la Méditerranée (en 1810) !

   Le troisième titulaire du poste a davantage marqué les esprits. Le baron de Trémont a laissé de bons souvenirs aux notables du cru, en raison des travaux d'embellissement des locaux de la préfecture qu'il a engagés... et des fêtes (notamment des bals) qu'il a données. Le conférencier ne s'est pas privé de citer quelques anecdotes croustillantes, l'une d'entre elles concernant les cornes qu'un notable marié portait allègrement (et sans en avoir connaissance). Monsieur le préfet était un homme à femmes (celles des autres).

   Si le baron a pu engager autant de travaux (notamment entre 1811 et 1813), c'est grâce au financement du Conseil général. A plusieurs reprises, Renaud Carrier a souligné que les deux têtes politiques du département ont la plupart du temps travaillé en bonne entente. Mais, en 1814, sentant le vent tourner, Trémont a tenté de "mettre à l'abri" chez des particuliers certains biens de la préfecture, qu'il estimait lui appartenir.  La manoeuvre s'étant ébruitée, des fournisseurs de la préfecture (inquiets à l'idée de ne pas être payés) se sont tournés vers le tribunal de Rodez, qui leur a donné raison. Même si le jugement a, dans un premier temps, été cassé sous la Restauration, les fournisseurs ont fini par recevoir leur dû... Au bilan du baron, on peut néanmoins porter le rétablissement d'une conscription efficace, au besoin en utilisant la force.

   Il s'est donc passé beaucoup de choses à l'époque napoléonienne. Les préfets ont contribué à relancer l'économie aveyronnaise (ses successeurs ayant suivi les traces de Sainthorent). Ce n'était pas gagné au départ. Le premier préfet a dû attendre un mois après sa nomination pour commencer à disposer des moyens (limités) de l'Etat. Il a déployé de grands efforts pour louer à bas prix des locaux destinés à ses collaborateurs. Il s'est montré efficace dans plusieurs domaines. Il a dépassé la demande de fournitures de chevaux (229 envoyés, contre 206 exigés). Il semble d'ailleurs avoir été très soucieux d'élevage équin (la cavalerie napoléonienne ayant de gros besoins). C'est encore Sainthorent qui a obtenu que Rodez soit le centre de gestion des étalons (au détriment de Saint-Affrique, solution un temps évoquée en raison de la proximité du Tarn, du Gard et de la Lozère, destinataires d'une partie des bêtes). C'est sous sa conduite que l'ancienne Chartreuse a été achetée (50 000 francs de l'époque), pour y installer le haras national. Le savoir-faire de l'établissement ruthénois a été rapidement reconnu : des étalons espagnols y ont recouvré la santé, tout comme des juments arabes qui avaient été envoyées par le haras de Pompadour !

   Le domaine textile a lui aussi connu une forte impulsion. Sainthorent a créé (en 1803) l'Ecole de la navette volante (grâce à deux Aveyronnais reçus à l'école de Passy). Le but était de former aux techniques modernes 30 personnes par an. Chaque arrondissement proposait 10 candidats (soit un total de 50), parmi lesquels étaient choisis les 30. L'intention était sans doute de faire "ruisseler" les bonnes pratiques sur l'ensemble du secteur textile, particulièrement répandu dans le département.

   Le premier préfet de l'Aveyron se piquait aussi d'agriculture et de botanique. Il a transformé les jardins de l'évêché en pépinière, y implantant de jeunes pommiers, poiriers, cerisiers, frênes, châtaigniers et noyers. Si les premières pousses ont succombé à une brusque sécheresse (celle de 1803, je pense), l'exploitation a pu être relancée par la suite, Sainthorent ayant sollicité l'aide de communes proches de Rodez (comme La Loubière). Il a ensuite tout fait pour répandre ses pratiques dans le département, encourageant la culture de la rhubarbe, dont il voyait l'utilité pour les hôpitaux et les pharmacies. Des graines de plantes médicinales (faciles à cultiver, sur des sols ingrats) ont ainsi été envoyées dans le sud du département. Il me semble même avoir entendu le conférencier parler de la subtilisation de "sauvageons" (plants) destinés à Cahors par... le sous-préfet de Villefranche-de-Rouergue (Pierre-François Flaugergues) ! On estime que, sous Sainthorent, plus de 40 000 arbres ont été produits dans les pépinières du département.

   Les préfets de l'Aveyron ont aussi agi contre les crues (les rives de l'Auterne ont ainsi été engazonnées) et pour protéger les forêts, un sujet auquel Renaud Carrier avait consacré un article en 1995. Les coupes sauvages ont été sévèrement sanctionnées et le Conseil général a accordé des primes aux propriétaires qui replantaient sur des terrains pentus (pour, évidemment, lutter contre l'érosion des terres).

   Le conférencier ne pouvait pas passer à côté de l'élevage, souvent présenté comme la principale source de richesse du département. En 1788, une enquête du diocèse de Rodez (peut-être incomplète) ne dénombrait que 15 000 boeufs et vaches dans un territoire correspondant grosso modo à celui du futur département. Douze ans plus tard, on compte environ 30 000 boeufs, autant de vaches et 15 000 veaux, auxquels s'ajoutent plus de 20 000 chevaux, plus de 45 000 cochons... et près de 600 000 "bêtes à laine". N'oublions pas que, jusque dans la seconde moitié du XIXe siècle, le cheptel ovin était ultra-dominant dans bien des départements du sud de la France métropolitaine.

   Cela a favorisé le développement des activités liées à l'agriculture. Le nombre de boucheries rurales a fortement augmenté et on note que les ménages rouergats consomment de plus en plus de volailles, des progrès que Sainthorent attribue aux transformations opérées sous la Révolution. A l'opposé, il est évident que, pour une partie de la population, la consommation régulière de châtaignes reste incontournable, faute de mieux.

   Concernant le fromage, c'est le Roquefort qui semble jouer les premiers rôles. A l'époque, il se vend déjà dans presque toute la France métropolitaine... et même un peu à l'étranger. Cependant, les profits tirés de ce commerce se concentrent dans un petit nombre de mains... Si Sainthorent déplorait cet état des choses, il ne s'en est pas moins appuyé (de manière générale) sur les quelque 500 grands propriétaires du département pour diffuser les progrès agricoles.

   Les productions aveyronnaises ont même fait l'objet d'une exposition parisienne, en 1803 je crois. Un fascicule vantant le savoir-faire rouergat a été édité, mais finalement non diffusé. Les autorités centrales ont apprécié l'esprit d'initiative aveyronnais, mais n'ont visiblement pas voulu s'engager dans une campagne de promotion qui aurait suscité des jalousies... ou lancé une vague qu'il aurait été difficile de contrôler.

   Au sein du département, une autre activité connaît un réel succès : le thermalisme, autour de Cransac et de Sylvanès. Dans le sud du département, les clients sont plutôt issus des départements voisins. Dans le nord-ouest, l'afflux de personnes n'a pas eu que des conséquences positives : des problèmes d'ordre public se sont posés, en particulier en 1806, en raison de la présence de... prostituées. Renaud Carrier a cité un texte qui évoque les maladies qui se propagent, soulignant que certains curistes repartent plus mal en point qu'ils ne sont arrivés !

   Il est cependant un domaine dans lequel l'action des préfets ne semble pas avoir été efficace, du moins à court ou moyen terme : les transports. L'Aveyron est réputé enclavé, formant comme une "isle" au sein de la France métropolitaine. Ainsi, le troisième préfet (le baron de Trémont) disait avoir mis plus de temps pour revenir de Hongrie (en réalité de Croatie) à Paris que pour, de la capitale, arriver à Rodez !

   Après celle de mars 2017, c'était donc une nouvelle conférence passionnante, que l'on doit à la Société des lettres, arts et sciences de l'Aveyron.

mercredi, 05 septembre 2018

Des infiltrés au Ku Klux Klan

   Après avoir vu BlacKkKlansman, le film de Spike Lee, je me suis procuré le livre qui l'a inspiré, Le Noir qui infiltra le Ku Klux Klan, de Ron Stallworth, qui fut le premier enquêteur afro-américain du Colorado.

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   Le bouquin permet de mieux comprendre certains aspects de l'intrigue du film. Ainsi, les policiers infiltrés bénéficient d'une ligne téléphonique intraçable et de plusieurs identités fictives. On apprend aussi que la police de Colorado Springs (aidée finalement par celle de Denver) a réussi à infiltrer non pas un, non pas deux, mais trois agents dans le Ku Klux Klan, à l'époque.

   A la surprise sans doute de certains spectateurs du film, le livre confirme certains éléments jugés invraisemblables, comme le fait que les interlocuteurs téléphoniques de Stallworth n'aient jamais suspecté quoi que ce soit... et pourtant, le policier a parfois poussé le bouchon très très loin. Les scènes montrant ses collègues pouffant de rire derrière lui, alors qu'il converse avec un membre du Klan, n'ont pas été inventées par Spike Lee.

   Le réalisateur a cependant créé le personnage de Patrice, tout comme l'intrigue sentimentale avec Stallworth et l'attentat qui la vise. Mais surtout, Spike Lee a totalement laissé de côté une magnifique anecdote du bouquin, qui montre à quel point le policier noir était opposé à tout communautarisme. Stallworth a refusé de soutenir un mouvement en faveur d'un ado noir qui avait descendu un type, sans raison. Il a même incité un proche de feu Martin Luther King, invité par les militants locaux, à ne pas se dévoyer dans ce combat. C'est un très beau passage, que, dans le film, Spike Lee a remplacé par le récit de Jerome Turner (Harry Belafonte, très émouvant), qui fait référence à une époque plus ancienne, quand le Klan était bien plus violent.

   On peut découvrir cette époque grâce au récit d'un autre infiltré, Stetson Kennedy, un journaliste blanc, neveu d'un authentique membre du Klan, qui a publié en 1959 J'ai appartenu au Ku Klux Klan.

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   Le Blanc floridien antiraciste a commencé à s'intéresser au Klan avant la Seconde Guerre mondiale. L'essentiel de son livre décrit son infiltration entre 1946 et 1952, d'abord en Géorgie, puis en Alabama et en Floride, où il est revenu sous sa véritable identité.

   La durée de cette infiltration explique l'importante quantité d'informations recueillies et la précision des descriptions de l'intérieur. C'est accablant, tant la violence est présente dans les Etats du Sud à cette époque. L'auteur a même assisté à l'assassinat d'un Noir qui avait eu la malchance de croiser la route de deux voitures bourrées d'abrutis suprémacistes. L'inaction voire la complaisance des forces de police et de la justice (d'Etat comme fédérale) sont consternantes. L'auteur, d'une audace folle, a réellement risqué sa vie à plusieurs reprises pour obtenir des informations susceptibles de mettre fin aux agissements du Klan. On constate que, dans cette entreprise, la presse peut être une authentique alliée et que, tout comme contre Al Capone, l'enquête fiscale est un bon moyen de faire condamner d'habiles criminels endurcis.

   C'est un document coup-de-poing, qui est ressorti en poche aux éditions de l'aube.

  

mardi, 21 août 2018

The Intruder

   Diffusé aussi sous le titre I Hate Your Guts, ce film de Roger Corman, datant de 1962, a été restauré. Il est de nouveau proposé dans certaines salles, alors que The BlacKkKlansman de Spike Lee est sur le point de sortir, ce qui n'est évidemment pas une coïncidence.

   Le contexte est celui des débuts de la déségrégation, dans une petite ville du Sud des Etats-Unis, où des adolescents noirs ambitionnent de suivre les cours du lycée des Blancs. Ceux-ci sont majoritairement hostiles au changement mais, par légalisme, semblent vouloir laisser les choses se dérouler dans le calme. Tourné dans le Missouri, le film propose une belle galerie de personnages de l'Amérique profonde, des gens modestes, pas mauvais sur le fond, mais susceptibles de déraper.

   La mèche va être allumée par un "intrus", Adam Cramer, qui affirme venir tantôt de Californie, tantôt de Washington. Il se réclame d'une association politique, la Patrick Henry Society, opposée à la fin de la ségrégation. Il a l'allure avenante de William Shatner, qui, à l'époque, n'avait pas encore endossé le costume du capitaine Kirk dans Star Trek.

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   La première partie de l'histoire nous le présente comme un beau parleur, séduisant, entreprenant avec les femmes. La caractérisation est intéressante, parce qu'un cinéaste du camp opposé pourrait tout à fait créer un personnage miroir, un militant de la déségrégation envoyé par les élites de Washington pour "éclairer" la population locale.

   Petit à petit, Cramer dévoile son jeu et enflamme les foules par des discours où percent un anticommunisme sans nuance... ainsi qu'un indéniable antisémitisme. C'est un peu trop théâtral à mon goût, mais assez efficace. Le réalisateur réussit mieux à mettre en scène la montée de tension et les risques de dérapage : la population locale, chauffée à blanc (!) par l'activiste raciste, ne suit pas tout à fait la feuille de route établie par lui. La fin est évidemment morale.

   P.S.

   L'an dernier, un autre film de la même sensibilité, Du Silence et des ombres (To Kill a Mockingbird dans la version originale), était ressorti sur les écrans français. L'action se déroule dans les années 1930, avec un beau portrait social d'une petite ville du Sud, où un avocat (incarné par Gregory Peck) va tenter de vaincre les préjugés racistes pour faire triompher la justice.

dimanche, 19 août 2018

Un cabot à l'Elysée

   En classant de vieux journaux, je suis retombé sur un article paru dans Le Monde Magazine du 13 juillet dernier. Il y est question des chiens présidentiels, une pratique qui semble intrinsèque à la Ve République, son fondateur excepté.

   En effet, l'article fait débuter à la présidence de Georges Pompidou (qui a succédé à Charles de Gaulle en 1969) la médiatisation entourant la possession d'un chien. Le plus cocasse est que le premier clébard "présidentiel" fut nommé... Jupiter ! Le voici, sur l'une des photographies illustrant l'article :

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   Le mois dernier, je n'ai guère prêté attention à cette photographie. Eh bien, j'avais tort ! En la regardant d'un peu plus près (au besoin, en la retournant), on distingue quelques détails piquants :

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   On apprend que, chez les Pompidou, on lit Elle, Françoise Sagan (Un peu de soleil dans l'eau froide, paru en 1969) et The New Yorker (en version originale, of course !). On boit visiblement du Martini (so chic !)... et on expose à l'oeil du photographe les coucougnettes de Jupiter... so class !

   La suite de l'article nous apprend que les successeurs de Pompidou ont privilégié le Labrador, à l'exception de Jupiter (le président, pas le chien !), qui a voulu un bâtard. Et de Gaulle, dans tout ça ? Il possédait bien un chien, qui gambadait, non pas à l'Elysée, mais dans sa propriété de Colombey-les-Deux-Eglises. C'était un corgi, offert par la reine d'Angleterre (qui aime beaucoup cette race de chiens) :

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   Toujours aussi caustique, de Gaulle avait surnommé le cadeau royal... Rasemotte. D'après la petite-fille de Mongénéral, le canidé a dû cohabiter avec... un matou !... plus précisément un chartreux, appelé Grigri (ou Gris-gris) et qui, lui, avait le droit de se balader partout dans la propriété.

lundi, 30 juillet 2018

Les enfumages de l'affaire Benalla

   Il faut commencer par en dégager les aspects positifs. Jupiter est un peu descendu de son Olympe et je trouve que ce n'est pas plus mal. De leur côté les médias, très révérencieux jusqu'alors vis-à-vis de la présidence de la République, ont joué leur rôle de contre-pouvoir, même si c'est avec d'évidentes arrière-pensées. Autrefois, on aurait dit qu'il s'agissait de faire vendre du papier. Aujourd'hui, on parle d'articles "putaclics". Il suffit que quelques meneurs sortent un sujet porteur pour que tous les autres suivent, sans forcément vérifier leurs sources. Enfin, l'affaire a été instrumentalisée dans un but politique.

   Tout commence le 1er mai dernier. Les traditionnelles manifestations sont émaillées de nombreuses violences, qui ont été rarement rappelées lorsque l'affaire Benalla est sortie. Cela permet de comprendre pourquoi les policiers étaient soupçonneux vis-à-vis de l'apéro organisé place de la Contrescarpe. Les participants ont été (un peu) filtrés et parfois fouillés. Même s'il avait obtenu les autorisations nécessaires, Alexandre Benalla n'avait pas à se trouver là. On a appris depuis qu'il aime l'action et que, notamment au service d'Emmanuel Macron, il s'était déjà signalé par son comportement parfois limite.

   Cependant, comme on peut le voir sur la seconde vidéo, que j'ai découverte quelques jours plus tard sur le site de Libération, c'est lorsqu'il voit les deux supposés "badauds" (lol) balancer des projectiles sur les CRS qu'A. Benalla intervient. Au passage, contrairement à ce qui a été affirmé dans un premier temps (et à ce que hurle l'auteur de la première vidéo, Taha Bouhafs), il ne les a pas tabassés. Il a quand même frappé le jeune homme et s'est vigoureusement saisi de la jeune femme. Il a abusé de la force... mais il avait le droit d'intervenir, conformément à l'article 73 du Code de procédure pénale :

"Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l'auteur et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche."

   D'autres questions se posent quant à la diffusion des vidéos. Dès le 1er et le 2 mai, plusieurs ont été mises en ligne. Leurs auteurs sont le plus souvent des militants, des participants aux manifestations, comme Taha Bouhafs, qui fut candidat de La France Insoumise aux législatives de 2017 (et a failli se qualifier pour le second tour). Ce jeune homme, dont l'agressivité n'est que verbale, s'est déjà signalé lors de l'occupation du campus de Tolbiac.

   Un-e bon-ne journaliste ne doit pas se contenter d'une seule source (surtout si celle-ci a été retravaillée avant d'être mise en ligne). Dès l'article du 18 juillet, Ariane Chemin (du Monde) précise qu'elle a consulté plusieurs vidéos militantes. On ne sait pas précisément quand elle les a vues ni quelles sont ces autres vidéos, puisqu'on ne nous en montre qu'une. Ainsi, on ne sait pas si les journalistes (du Monde et d'ailleurs) avaient vu les autres images, qui montrent ce qui s'était passé avant, en particulier le comportement agressif des deux "badauds". Que les militants LFI ne le fassent pas, on le comprend, même si ce n'est pas honnête de leur part. Mais les journalistes ? On ne sait pas non plus quand exactement ils ont eu ces vidéos en leur possession ni quand ils ont formellement identifié A.Benalla. (Ariane Chemin n'en parle pas dans l'entretien accordé à France Culture, à la lecture duquel on apprend qu'elle n'a pas répondu à toutes les questions qui lui ont été posées... Lesquelles ? Mystère...)

   Tout porte à croire que c'est (bien) avant le 18 juillet que les journalistes ont eu connaissance des débordements d'A. Benalla. Je suis tenté d'affirmer qu'on a jugé que, tant que l'équipe de France de football brillait en Coupe du monde, le moment n'était pas venu de sortir l'affaire. Je suis aussi tenté d'affirmer que, dans un premier temps, on a choisi de ne mettre en valeur que la vidéo (tronquée) la plus incriminante pour le "Monsieur sécurité" d'Emmanuel Macron. J'ai d'ailleurs fini par apprendre que des militants LREM avaient mis en ligne, sur Twitter, dès le début du mois de mai, des vidéos proposant une autre vision des événements. Elles semblent avoir été négligées par les journalistes qui suivent la politique française...

   On a voulu éviter que le public voie les deux "badauds" lancer une carafe d'eau et sans doute des verres ou cendriers sur les policiers, avant l'intervention d'Alexandre Benalla. J'aimerais aussi disposer d'images antérieures du trottoir situé en face du café des Arts. C'est de là qu'a filmé Taha Bouhafs et c'est situé juste à côté de la terrasse du café où se trouvaient les deux "badauds". Ne pourrait-on pas les voir boire un coup ensemble ou discuter, quelques minutes avant que cela ne dégénère ?

   L'exploitation politicienne de cette affaire a donné lieu à une inflation de fake news (de bobards ou d'intox, comme on disait jadis). Le site de Libération (en particulier sa rubrique "CheckNews") a été en pointe dans la lutte contre le bourrage de crânes. En voici un florilège, loin d'être exhaustif. Parmi les propagateurs de fausses nouvelles, on a l'hebdomadaire Valeurs actuelles (dont on se demande s'il est utile ne serait-ce qu'à envelopper le poisson pourri), qui a tenté de faire croire à un pseudo mariage bidon d'Alexandre Benalla et affirmé sans preuve que l'Elysée a voulu le promouvoir sous-préfet. Les réseaux sociaux ne sont pas en reste dans la désinformation. Les affirmations les plus fantaisistes ont circulé, comme celle du supposé effacement de bandes vidéo sur ordre d'E. Macron ou encore la fable du changement de nom d'A. Benalla. On a aussi (volontairement ?) exagéré le montant de son salaire (5-6 000 euros et non 10 000) et la surface du logement de fonction qui lui a été attribué (80 m² et non 300 !).

   Les politiques n'ont pas échappé à l'hystérie ambiante. Ainsi, une élue EELV a colporté une rumeur infondée (sur la collecte d'ADN). Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont comparé l'affaire Benalla à celle du Watergate. Comme la plupart des Français ne savent pas ce que c'est, ça peut passer. Mais là, franchement, ils ont pris les gens pour des cons !

   J'ai gardé pour la fin mon petit préféré, Arnaud Julien. Ce militant LR (secrétaire de la fédération de l'Hérault), sans doute pris par l'enthousiasme de l'exploitation politicienne, a commis une énorme boulette, signalée par le quotidien aveyronnais Centre Presse. Il n'en est visiblement pas à sa première grosse erreur. Aux municipales de 2014, en pleine vague bleue (UMP, c'est-à-dire LR), il a réussi l'exploit de perdre un bastion UMP, la commune de Juvignac. Aux législatives de 2017, bien que bénéficiant de l'investiture LR, il s'est fait sortir dès le premier tour, terminant à une piteuse cinquième place, avec moins de 10 % des suffrages exprimés ! (Entre temps a éclaté le scandale de l'office de tourisme de Juvignac, qui ne me semble pas terminé à ce jour.)

   Mais revenons à l'affaire Benalla. Son exploitation politicienne a fait négliger certaines pistes. On en a quelques échos dans Le Canard enchaîné du 25 juillet dernier. Mais c'est surtout un article de Slate, signé Philippe Boggio (un ancien du Monde, comme nombre de contributeurs du site), qui a développé la piste des manoeuvres policières. Derrière l'exploitation de l'affaire Benalla, il y a la rivalité entre policiers et gendarmes pour assurer (seuls) la sécurité du président de la République. Se greffe là-dessus le mécontentement de voir un outsider (Benalla) leur passer devant. N'oublions pas non plus la politisation de nombre d'officiers de la Préfecture de police (de Paris). Elle a la réputation d'être un nid de sarkozystes, où François Hollande a petit à petit réussi à placer des hommes de confiance. Certains ont-ils tenté de nuire à Emmanuel Macron dans l'espoir de favoriser leur ancien patron ?

   A suivre...

samedi, 28 juillet 2018

Quand sonnera l'heure...

   C'est le titre français d'un "vieux" roman du Britannique John Boynton Piestley, auteur qui connut son heure de gloire entre 1930 et 1960. Cette oeuvre est parue en 1937 sous le titre The Doomsday Men ("Les Hommes du dernier jour") :

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   L'intrigue suit les pérégrinations de trois personnages principaux, tous des hommes. Le premier est le Britannique Malcolm Darbyshire, un architecte féru de tennis, qui participe à un tournoi sur la Côte d'azur française. Il y rencontre sa partenaire de double, la mystérieuse Andréa Baker, fille d'un milliardaire américain, dont il tombe amoureux. C'est l'aspect romance énigmatique de l'histoire.

   Dans le même temps, un jeune scientifique américain, George Hooker, s'est rendu au Royaume-Uni dans l'espoir de retrouver un brillant chercheur qui a disparu des écrans-radar deux ans auparavant. Il est persuadé que celui-ci est sur le point de réaliser une découverte fondamentale, à laquelle le jeune homme souhaiterait collaborer. Nous voilà plongés dans une enquête à l'anglaise, dans le brouillard.

   Enfin, Jimmy Edlin, un aventurier qui s'est enrichi en Chine, débarque d'Hawaï en Californie pour résoudre le mystère de l'assassinat de son frère, un journaliste d'investigation qui s'est récemment intéressé à des gangs originaires de la côte Est. On retrouve l'ambiance des polars américains de cette époque.

   Les trois hommes vont finir par se rencontrer et affronter une secte redoutable. Paru en 1937, ce roman est une curiosité parce qu'il est sans doute l'un des premiers à dénoncer les méfaits des mouvements sectaires... et à prévoir le danger que représente la recherche dans le domaine nucléaire. En dépit de certaines considérations datées (en particulier sur les femmes, même si deux d'entre elles jouent un rôle actif dans l'histoire), cette oeuvre est palpitante à lire et assez prémonitoire sur certains points.

mardi, 17 juillet 2018

Sicilian Ghost Story

   Cette histoire de fantôme(s) sicilien(s) se déroule à une époque où n'existaient pas les téléphones portables. Au vu des modèles de voiture, on se situe à la fin du XXe siècle. A la fin du film, on apprend que l'intrigue un brin fantastique est inspirée de faits réels. Je laisse à chacun découvrir pourquoi.

   C'est d'abord une histoire d'amour balbutiante, intense et parfois un peu puérile, entre deux adolescents issus de milieux différents. Ils sont magnifiquement interprétés par deux inconnus, Gaetano Fernandez et surtout la jeune Julia Jedlikowska, une révélation à surveiller.

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   Comme on est en Sicile, il faut faire attention au regard des autres, dans cette petite ville où il se passe de drôles de choses. La campagne n'est pas loin, avec cette forêt où circule un chien agressif, ce lac de retenue où viennent s'abreuver des bêtes et cette cave creusée dans le rocher où niche une chouette, dont le petit cri est le signe qu'il se passe quelque chose d'inhabituel.

   L'héroïne Luna est en pleine rébellion. Elle ne supporte plus sa mère ni l'école, ni la plupart des habitants du coin. Elle confie ses espoirs à un journal intime dessiné, que sa mère cherche à lire. Tombée amoureuse du sensible Giuseppe, elle lui a écrit une mystérieuse et longue lettre, qui va jouer un rôle dans cette histoire. En plus de tout cela, Luna rêve... et ses rêves interfèrent avec la réalité.

   C'est le moment de dire quelques mots de la réalisation, que je trouve éblouissante. Quasiment chaque scène est construite de manière à ce qu'on ne puisse deviner, à son début, comment elle va tourner. Les plans sont très élaborés et la photographie superbe. Les réalisateurs (Fabio Grassadonia et Antonio Piazza) ont voulu donner une coloration fantastique (voire merveilleuse) à des scènes en apparences anodines.

   Là dessus se greffe l'activité de la Mafia. Ce quotidien sordide rattrape les amoureux, qui n'ont d'autre ressource que de se réfugier dans l'imaginaire, le fantasme... voire le surnaturel.

    C'est une très agréable découverte. Le film est en fin de parcours mais, si vous avez l'occasion de le voir, franchement, n'hésitez pas.

lundi, 16 juillet 2018

Histoire du football

   Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, le football occupe une place importante dans les sociétés contemporaines, en France comme ailleurs. Son histoire est d'ailleurs fort intéressante. J'ai récemment lu deux ouvrages qui en éclairent certains aspects.

   A tout seigneur tout honneur. La Coupe du monde 2018 s'étant déroulée en Russie, commençons par le livre de Régis Genté et Nicolas Jallot :

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   Très bien écrit, l'ouvrage part de l'introduction du football en Russie (par des Anglais) à la gestion poutinienne de ce qui est d'abord perçu comme un outil de propagande. Cela ne date pas du XXIe siècle. Très vite populaire (mais aussi apprécié par des intellectuels comme le compositeur Dmitri Chostakovitch), ce nouveau sport a bénéficié de l'action des frères Starostine, avant la Seconde guerre mondiale. Des supporteurs russes se souviennent encore aujourd'hui de ces précurseurs, dont trois ont été par la suite envoyés au Goulag, sans doute sur ordre de Lavrenti Beria, le chef du NKVD (ancêtre du KGB, dont est issu l'actuel FSB).

   Cela-ci a tenté de promouvoir sa "caste" (celle des policiers politiques) à travers des clubs appelés "Dynamo" (ou "Dinamo"). Il y a d'abord eu celui de Tbilissi (Beria étant géorgien), puis ceux de Moscou et de Kiev. Mais à Moscou, le club fondé par les frères Starostine était le Spartak, le grand rival, soutenu successivement par les coopératives agricoles et les Komsomol (l'union des jeunesses communistes). L'histoire des rivalités internes à la Russie épouse en partie celle des rivalités politiques, la fierté locale venant se greffer dessus. D'autres clubs sont apparus à Moscou, le CSKA (l'équipe de l'armée), le Torpedo (l'équipe du secteur automobile) et le Lokomotiv (soutenu, comme son nom l'indique, par les chemins de fer).

   Le livre fourmille d'anecdotes, notamment sur la période de la Seconde guerre mondiale. Si certains joueurs vedettes ont été envoyés en front, d'autres ont été préservés pour jouer des matchs de propagande (notamment à Leningrad -aujourd'hui Saint-Pétersbourg, ville qui a subi un siège de 900 jours ainsi qu'une épouvantable famine). Pour l'anecdote, je signale que l'un des sites de la coupe du monde (celui de Saint-Pétersbourg) a été aménagé à l'emplacement du stade utilisé par l'une des équipes de la ville avant-guerre, là précisément où, en 1942, se serait déroulé le match famélique de propagande, retransmis à la radio jusque sur les lignes de combat.

   Il est aussi question du "match de la mort", une légende encore vivace aujourd'hui en Russie, sur une rencontre entre des soldats allemands et des joueurs ukrainiens, qui auraient été menacés de mort et, pour certains, fusillés après la rencontre. Les auteurs décryptent parfaitement bien la construction du mythe.

   Après la Seconde guerre mondiale, l'URSS rejoint les instances internationales sportives (la FIFA en 1946, le CIO en 1951). On l'a oublié, mais les succès sont arrivés assez vite. La sélection soviétique a remporté l'épreuve aux JO de 1956 (à Melbourne). Elle est devenue championne d'Europe en 1960, lors de la première édition de l'Euro... en France. Quatre ans plus tard, l'équipe est allée jusqu'en finale, battue seulement par l'Espagne, pays organisateur. En Coupe du monde, le bilan est moins flatteur, avec un quart de finale en 1958 et une demi-finale en 1966, en Angleterre (performance que l'actuelle équipe de Russie n'est donc pas parvenue à égaler cette année). Cette édition a été marquée par l'unique victoire des "Trois Lions"... et le rôle de l'arbitre de la finale, qui était soviétique. (C'est très bien expliqué dans le bouquin.)

   Cette époque (la fin des années 1950 et les années 1960) est marquée par une figure devenu mythique, le gardien de but Lev Yachine, seul de sa catégorie à avoir décroché le Ballon d'or, en 1963. C'est donc à juste titre que ce joueur a été retenu comme emblème de la toute récente coupe du monde, sur une affiche au style rétro, rappelant immanquablement l'époque soviétique, dont l'actuel président Vladimir Poutine est tant nostalgique :

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   Au niveau des clubs, c'est dans les années 1970-1980 que les résultats les plus spectaculaires ont été obtenus. Cela coïncide avec l'arrivée à maturité d'une génération dorée, notamment venue d'Ukraine (du Dynamo de Kiev), où ont été mises en pratiques des méthodes scientifiques d'entraînement. Cela s'est répercuté sur l'équipe soviétique, qu'on a commencé à revoir pointer le bout de son nez en 1982 mais surtout en 1986, au Mexique. Avec le Danemark, c'est l'équipe qui a marqué les esprits dans la première partie de la compétition.

   La fin de l'ouvrage est centrée sur la période poutinienne et le rôle des oligarques dans la vie des clubs. Il est question aussi bien du Zénith Saint-Pétersbourg que des clubs du Daghestan et de Tchétchénie. C'est tout aussi passionnant que ce qui précède.

   On continue avec un livre aux ambitions plus modestes. Il s'agit de la réédition d'un ouvrage publié en 1954 (sous la plume de Jules Rimet), augmenté de plusieurs textes divers :

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   Le fondateur du Red Star, qui présida la FIFA de 1921 à 1954, y raconte les premières Coupes du monde, celles auxquelles il a assisté. Cela commence par celle de 1930, en Uruguay. Les dirigeants de la FIFA et les équipes européennes invitées à y participer ont fait le trajet en paquebot. Rimet emporte avec lui le trophée qui ne porte pas encore son nom et qui a été sculpté par un certain Abel Lafleur, né à... Rodez !

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   Ce n'est pas la seule référence à l'Aveyron que contient ce récit de voyage. Sur le paquebot se trouvent deux chanteurs d'opéra, le Russe Fédor Chaliapine et une certaine Marthe Nespoulous. Les Rouergats qui lisent ce billet auront immédiatement dressé l'oeil l'oreille : c'est un nom assez répandu dans notre département.

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   Par contre, s'il est assez facile de dénicher, sur la Toile, des enregistrements (audio) de la soprano, les informations biographiques manquent cruellement. En Aveyron, on a plutôt retenu la carrière de son aînée, la cantatrice Emma Calvé, dont une place porte le nom à Rodez.

   Mais revenons à nos moutons (en short). Après l'Uruguay, ce fut au tour de l'Italie d'accueillir (et de remporter) la Coupe du monde, en 1934. Avec le recul, Jules Rimet, s'il se félicite de la qualité de l'organisation, semble éprouver quelques regrets, puisqu'il s'est montré accommodant avec le régime fasciste. (Dans un entretien publié en fin d'ouvrage, le petit-fils reconnaît que son grand-père a tendu le bras -comme les autres personnes présentes- lors de la cérémonie d'inauguration.)

   Pour populaire qu'il soit, le spectacle des équipes nationales se défiant dans un stade n'est pas forcément rentable, au début. C'est avec réticence que la France accepte d'organiser la Coupe du monde de 1938. A l'époque, l'écho des troubles politiques se fait encore plus grand. Ainsi, l'équipe d'Autriche est contrainte de se retirer de la compétition après l'Anschluss. Fort prudemment, les autorités décident de ne pas prévoir de compétition pour 1942. Pour l'organiser, il était question du Brésil et de l'Allemagne nazie...

   En 1950, c'est donc au Brésil que s'est déroulée la quatrième édition. Ce chapitre est écrit de manière à faire comprendre aux lecteurs que les Brésiliens n'envisageaient pas d'autre résultat que la victoire de leur équipe nationale... et que le résultat final fut une tragédie (que l'humiliation en demi-finale face à l'Allemagne, en 2014, est venue raviver).

   L'un des textes qui succèdent à ce récit fait le point sur les convictions de Jules Rimet, que l'on a parfois jadis rapproché de Pierre de Coubertin. C'était un contresens. Celui-ci était un aristocrate, qui voyait dans l'amateurisme l'incarnation d'un certain élitisme. Fervent adepte de la professionnalisation du sport en général et du football en particulier, Jules Rimet défendait une vision populaire (et méritocratique) de la pratique du sport. Il n'a cependant pas perçu combien l'introduction massive de l'argent allait le dénaturer.

   Mais son livre est bigrement intéressant, de surcroît bien écrit.

   P.S.

   La fameuse "coupe Jules Rimet" n'existe plus. Donnée au Brésil en 1970, à l'issue de la troisième victoire de ce pays dans la compétition, elle a été volée (et sans doute fondue). Les vainqueurs reçoivent désormais une copie du nouveau trophée (que l'on doit à un Italien).

   Cela n'a pas empêché un journaliste du Monde de commettre une boulette, dans l'euphorie de la victoire française hier en finale. Plusieurs photographies ont montré le joueur Kylian Mbappé embrassant le trophée. Dans la version papier du quotidien, il est fait référence à Jules Rimet :

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   L'erreur a été corrigée dans la version numérique de l'article (qui s'appuie sur une autre photographie) :

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jeudi, 12 juillet 2018

L'Afrique en finale

   L'équipe de France de football est une incarnation de la diversité (comme celle de 2016, d'ailleurs). Mais ce sont surtout les origines africaines des joueurs qui ressortent, quand on analyse la situation dans le détail.

   Tout d'abord, précisons que, sur les 23 joueurs sélectionnés par Didier Deschamps, seuls deux ne sont pas nés en France : Samuel Umtiti (au Cameroun) et Steve Mandanda (en République Démocratique du Congo). Mais, sur les 23, 16 ont au moins une ascendance africaine, soit 70 % de l'effectif.

   Celle-ci semble toutefois davantage répandue chez les remplaçants que chez les titulaires. Ainsi, sur les onze joueurs qui ont démarré la demi-finale contre la Belgique, seulement cinq (45 %) ont une ascendance africaine : outre Samuel Umtiti, on trouve Kylian Mbappé (de père camerounais et de mère algérienne), Blaise Matuidi (de parents angolais), N'Golo Kanté (de parents maliens) et Paul Pogba (de parents guinéens). Le total monte à 7 sur 13 (54 %) si l'on inclut les deux remplaçants entrés en cours de jeu : Steven N'Zonzi (dont le père vient de RDC) et Corentin Tolisso (de père togolais).

   Quand on ajoute les autres remplaçants, on arrive à la synthèse suivante :

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   En orange figurent les pays où est né l'un des joueurs français (Cameroun et RDC). En jaune sont coloriés les pays où sont nés uniquement les parents des joueurs sélectionnés.

   Le Mali est présent à travers Ousmane Dembélé (pour le père, la mère étant mauritanienne) et Djibril Sidibé. Le Sénégal est présent à travers Benjamin Mendy. On retrouve la République Démocratique du Congo avec Presnel Kimpembe (pour le père, la mère étant d'origine haïtienne). Enfin, l'Afrique du Nord est présente à travers Nabil Fekir (de parents algériens) et l'inénarrable Adil Rami (de parents marocains).

   Et ce n'est pas fini ! Si on ne se limite pas à l'Afrique, on verra que le troisième gardien de l'équipe, Alphonse Areola, est d'origine... philippine ! L'Europe est bien entendu présente, à travers l'Espagne pour Hugo Lloris, l'Italie pour Olivier Giroud et le Portugal pour Antoine Griezmann. Le cas de Lucas Hernandez est atypique : né en France mais ayant surtout vécu en Espagne, il a semble-t-il longtemps hésité avant d'opter pour les Bleus...

   C'est révélateur des vagues migratoires qui ont touché la France métropolitaine. A l'Europe du Sud et l'Afrique du Nord a succédé l'Afrique sub-saharienne. De surcroît, à l'exception de l'Angola (ex-possession portugaise) et de la RDC (ex-possession belge), tous les enfants d'immigrés sont issus d'anciennes colonies françaises.

   Leur bi(tri)culturalité et leur binationalité auraient pu faire pencher la balance en faveur du pays d'origine des parents. Mais ce serait oublier que ces joueurs ont été formés en France. Même s'il existe des pressions en provenance des pays d'origine pour les récupérer, on peut aussi penser que les jeunes hommes (quand ils n'ont pas laissé parler leur coeur) ont effectué un choix stratégique, celui de l'équipe nationale qui leur semblait avoir le meilleur avenir : le souvenir des Coupes du monde (1998, mais aussi 2006 et 2014) et des Championnats d'Europe (2000 et 2016) a sans doute pesé dans le choix.

   Concernant les départements d'origine des 21 sélectionnés nés en France, on constate, davantage qu'en 2016, une grande inégalité.

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   Cette carte ne mettant en valeur que les départements métropolitains, elle exclut de fait un des joueurs, Thomas Lemar, né en Guadeloupe. Il s'agit donc d'un bilan de 20 des 23 sélectionnés.

   La grande région parisienne, s'étendant de la Normandie à l'Aube, a vu naître 10 des 20 joueurs métropolitains. Loin derrière arrivent la région lyonnaise (3 voire 4 sélectionnés), le Sud-Est (3 joueurs) et le Nord (2 joueurs), le Toulousain Blaise Matuiti constituant une anomalie géographique. On retrouve la vieille France urbaine industrielle (le Nord-est excepté). De prime abord, c'est assez étonnant. L'Ouest et le Sud-Ouest ne fournissent quasiment aucun sélectionné, alors que ce sont des terres de football (surtout l'Ouest). Mais, comme l'écrasante majorité des sélectionnés est issue de l'immigration, ce sont les départements où se trouvent les villes d'accueil qui ressortent.

   Quant à moi, dimanche, vers 17 heures, je serai au cinéma. Quelque chose me dit qu'il ne devrait pas y avoir foule.

jeudi, 28 juin 2018

Retour à Bollène

   J'ai failli passer à côté de ce petit film sorti le mois dernier. C'est une fiction à caractère autobiographique, le réalisateur Saïd Hamich (producteur entre autre de Much Loved) ayant passé une partie de sa jeunesse à Bollène, une petite ville du département du Vaucluse (en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur) :

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   L'intrigue repose sur des contrastes. La ville elle-même est partagée entre l'image "vieille France" et proprette qu'elle veut donner (à travers ses dirigeants de la Ligue du Sud) et la présence d'une forte communauté d'origine maghrébine, précarisée.

   La famille du héros Nassim est aussi le siège de divisions. La père a eu au moins deux épouses différentes (en même temps). On y parle deux langues (voire trois avec l'anglais) : l'arabe dialectal (dominant chez les parents) et le français (courant chez les enfants). Les premiers rêvent de repartir "au pays" (c'est-à-dire au Maroc), les seconds de s'en sortir, en France.

   Le héros lui-même est une contradiction vivante : c'est un fils de la cité qui a réussi à l'école, puis à Paris et enfin aux Emirats arabes unis. D'un côté, il est très bien inséré dans le monde global, parle couramment anglais (langue qu'il préfère utiliser à Dubaï plutôt que l'arabe, avec le chauffeur de taxi), mais ressent le besoin de se ressourcer à Bollène. Pourtant, tout l'oppose à sa famille. Il a réussi, alors que les autres galèrent. Il n'est pas religieux, boit de l'alcool et goûte les concerts de musique classique (ainsi qu'Alain Bashung), alors que ceux qui sont restés en France sont tentés par le repli islamo-conservateur. De surcroît, il a épousé une non-musulmane, une Américaine, qui trouve ce coin de France très "provincial"... voire un peu puant, quand elle entend les propos du maire.

   Celui-ci connaît très bien le héros, qu'il a eu comme élève alors qu'il était enseignant dans le lycée public, un enseignant connu pour ses opinions de gauche... Le voilà devenu chantre de la droite identitaire. (Dans la réalité, la commune est gérée par le couple Bompard, issu du FN.) Les retrouvailles entre les deux hommes ne manquent pas de saveur, même si ce n'est pas super bien joué. Je trouve qu'Anas El Baz est plus expressif quand il ne parle pas ou quand il débite juste des monosyllabes. Il a du charisme, mais n'est pas très à l'aise avec les longues répliques.

   Signalons que c'est bien filmé, avec de jolies scènes de nuit... et une belle musique d'accompagnement, que l'on doit à Pauline Rambeau de Baralon. Je conseille vivement cet essai pseudo-autobiographique, qui pose de bonnes questions sur l'identité, en évitant les idées préconçues.

mardi, 19 juin 2018

Se protéger de Facebook

   Si l'on n'est pas adepte de l'attitude radicale qui consiste à quitter définitivement le célèbre réseau social, il existe d'autres moyens de se prémunir de la présence envahissante de la firme transnationale. L'un d'entre eux est proposé par la fondation Mozilla, qui édite le célèbre navigateur Firefox.

   Depuis peu, elle propose une nouvelle extension, appelée "Facebook Container", qui met des bâtons dans les roues du système de pistage du réseau social, devenu expert dans l'exploitation des données personnelles que les internautes lui fournissent... gratuitement.

   Une fois installée, l'extension est visible dans la barre d'adresse, lorsque l'on se connecte au réseau social :

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lundi, 18 juin 2018

La chapelle des brebis

   C'est d'un édifice peu connu des Ruthénois qu'il va être question : la chapelle Notre-Dame de Pitié, qui dépendait autrefois de la Chartreuse, dont les bâtiments ont été récupérés par l'Etat lors de la Révolution pour devenir ensuite, sous l'Empire, le siège du haras de Rodez, hélas fermé depuis l'an dernier.

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   Les touristes ont plus de chance de connaître l'édifice que les Ruthénois, puisqu'il fait partie du circuit patrimonial proposé aux visiteurs du chef-lieu aveyronnais (avec le numéro 29). Pour les locaux, le lieu est ouvert au moins le 13 de chaque mois. Pendant des années, c'est un employé municipal féru d'archéologie, Roger Trémouilles, qui a veillé sur l'édifice.

   Ce samedi 16 juin 2018, exceptionnellement, la chapelle a été ouverte au public, dans le cadre d'une manifestation agricole : la (mini-)transhumance des brebis du lycée agricole La Roque, situé sur la commune voisine d'Onet-le-Château.

   La première partie du trajet a mené les ovins du gué de Salelles (numéro 1 ci-dessous) à la place du Bourg (numéro 2), en passant par Layoule, le carrefour Saint-Cyrice, la rue Béteille et la place d'Armes.

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   Le parcours du petit troupeau (une cinquantaine de bêtes) ne fut pas de tout repos. Le long des berges de l'Aveyron, la tendance des brebis à se précipiter brusquement dans une direction inattendue était facilement gérable. C'est devenu un peu plus délicat dans la montée de la rue Béteille, où les passants et les riverains ont eu droit à un étonnant spectacle. (Un des animaux se serait blessé lors d'une bousculade à l'entrée d'une boulangerie-sandwicherie. Un peu de sang a coulé, mais ce serait sans gravité.)

   Arrivées place du Bourg, les brebis ont été parquées dans un enclos amovible, où elles ont rapidement été entourées d'une foule considérable... et mitraillées par les téléphones portables. Durant presque deux heures, elles ont pu se reposer et se désaltérer, pendant qu'une animation était proposée à proximité, avec des oies et des chiens de berger.

   C'est en fin d'après-midi que les brebis se sont remises en marche, direction l'avenue Victor-Hugo puis le chemin de la Boriette, où les attendaient de vertes prairies, jouxtant la chapelle Notre-Dame de Pitié (numéro 3 ci-dessous).

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   A l'intérieur de celle-ci, on peut voir un fort joli plafond étoilé (de style marial, je crois) :

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   Plusieurs statues sont également visibles, certaines plus anciennes que d'autres. Ainsi, l'une d'entre elles représente Jeanne d'Arc. C'est un modèle de série qui doit dater du début des années 1920, peu de temps après la canonisation de la Pucelle (et la création d'une seconde fête nationale, celle du patriotisme).

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   Une autre sculpture est beaucoup plus ancienne, puisqu'elle date du XVIe siècle. Il s'agit d'une Vierge à l'enfant, classée monument historique. Mais je ne me souviens pas si elle se trouvait dans la chapelle lorsque je l'ai visitée.

mercredi, 13 juin 2018

Un billet pour la cathédrale

   J'en ai appris une bien belle en lisant la presse aveyronnaise aujourd'hui (notamment La Dépêche du Midi) : la cathédrale de Rodez a son billet, d'une valeur de... 0 euro. Il s'agit bien entendu d'un gadget touristique, appelé aussi "billet souvenir", ce dernier mot figurant d'ailleurs à des dizaines d'exemplaires sur le billet en question :

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   En bas à droite figure la signature du chef d'entreprise qui a lancé l'idée de ce produit touristique, Richard Faille (auquel on doit aussi les médailles souvenirs, pour moi d'un intérêt moindre). L'objet est fabriqué en coton... et en France, d'après ce que garantit le site internet de l'entreprise.

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   D'ailleurs, le nom de l'imprimeur figure sur l'autre côté du billet. Il s'agit d'Oberthur Fiduciaire, lointain héritier de l'entreprise bretonne fondée au milieu du XIXe siècle, qui dut sa renommée aux tonnes d'almanachs et d'annuaires téléphoniques qui sortirent de ses locaux.

   Cette partie du billet est illustrée de monuments européens (qui ont déjà eu droit à leur version du produit). On reconnaît, de gauche à droite, la Porte de Brandebourg (1), la Tour de Belem (2), le Colisée de Rome (3), la Tour Eiffel (4), la Sagrada Familia (5), le Manneken Pis (6) et, en filigrane, un demi-visage (7) faisant sans doute allusion à la Renaissance (à un tableau de Sandro Botticelli ou de Léonard de Vinci).

   C'est sympatoche et cela ne coûte que deux euros. Voilà une excellente (et parcimonieuse) idée-cadeau pour la Fête des Pères !

mercredi, 30 mai 2018

Un héros peu ordinaire

   C'est un peu la vedette du moment... et c'est mérité. Le Malien Mamoudou Gassama, un "sans papiers" selon l'expression consacrée (un immigré clandestin / en situation irrégulière, disait-on autrefois), a accompli un geste que peu de personnes auraient (physiquement) pu réaliser, tout en ayant l'allure d'un jeune homme comme les autres (en tout cas, pas un fanfaron).

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   La vidéo de son exploit est visible, entre autres, sur le site du Monde. Cela donne une idée de la force et de l'agilité que celui que l'on surnomme Spiderman a dû déployer pour parvenir jusqu'à l'enfant. Cette témérité lui vient peut-être de son parcours de migrant, un périple qui l'a mené du sud-ouest du Mali (du village de Yaguiné) à Paris, en passant par le Burkina Faso, le Niger, la Libye et l'Italie :

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   Sur la carte, j'ai suggéré deux itinéraires entre la côte libyenne et l'Italie, ne sachant pas s'il a fait étape sur l'île de Lampedusa... et, aussi, parce que le jeune homme a eu besoin de deux tentatives pour réussir à "passer" en Europe.

   Ce n'est pas la première fois qu'un Malien se distingue en France par son comportement exemplaire. Souvenez-vous, en janvier 2015, un employé (musulman) du magasin Hyper Casher avait contribué à sauver la vie de plusieurs clients (juifs). Cet homme (Lassana Bathily) est originaire de la même région que Mamoudou Gassama (celle de Kayes), mais pas du même cercle (département) : celui de Yélimané pour Spiderman, celui de Kayes même pour L Bathily (si je ne m'abuse). Celui-ci, comme M Gassama, a été naturalisé français. Comme lui, il avait migré en France après un frère aîné.

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