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mercredi, 05 février 2020

L'Adieu

   Ironiquement, une incrustation placée au tout début informe les spectateurs que l'intrigue du film est inspirée... d'un mensonge. Celui-ci est au coeur de la réunion de famille qui s'organise un peu à l'arrache, en Chine, officiellement pour célébrer le mariage de l'un des petits-enfants. En réalité, les adultes de la "tribu" ont appris que la grand-mère est en phase terminale de son cancer du poumon, un état de santé qu'on lui a jusqu'à présent soigneusement caché.

   Avant d'en arriver aux retrouvailles, on nous présente les différentes branches de la famille. Les deux fils de la matriarche se sont expatriés des dizaines d'années auparavant (si on lit entre les lignes : quelques années à peine après la répression du printemps de Pékin...). Le premier couple vit à New York, en plus ou moins bons termes avec la fille unique, une trentenaire pas encore fixée sur ce qu'elle veut faire de sa vie. Le second couple vit au Japon, où est né le fils sur le point de convoler avec une ressortissante nippone. En Chine, on découvre le reste de la famille : la tante et les cousins.

   Cette histoire pleine de délicatesse se déguste d'abord pour la description du fossé culturel qui s'est creusé entre les expatriés, leurs enfants et les Chinois de Chine. Les premiers ne parlent plus aussi bien leur langue maternelle, méconnaissent les traditions, tandis que, chez les seconds, on sent un petit complexe d'infériorité, ainsi qu'une observance quasi servile des rituels surannés..

   L'humour n'est pas absent. En fil rouge, il y a cette plaisanterie de fin de repas, qu'on nous raconte au début. Je laisse à chacun le plaisir de découvrir ce que cache l'euphémisme "monter sur le toit"... Toutefois, qu'on ne s'attende pas à de la franche rigolade. C'est un humour discret, saupoudré (à bon escient) en quelques endroits.

   L'autre intérêt du film est sa mise en scène des relations entre femmes. C'est d'ailleurs peut-être le moment de préciser que la réalisation est due à une représentante du "deuxième sexe", Lulu Wang. Elle a clairement choisi de mettre l'accent sur les personnages féminins... et elle a eu raison, tant ceux-ci sont bien incarnés. Il y a bien sûr la grand-mère, une femme simple, qui, dans les difficultés de la vie, a acquis une sagesse dont elle tente de faire profiter ses cadettes. Il y a aussi l'une de ses brus, dotée d'une forte personnalité, et qui semble "porter la culotte" dans son ménage. Il y a enfin Billi, la petite-fille préférée, l'artiste un peu ratée, le cul entre deux chaises, mal à l'aise dans la culture chinoise comme dans l'hyper-urbanité individualiste new-yorkaise. Dans le rôle, Awkwafina (vue notamment dans Ocean's 8 et Jumanji 2) est formidable.

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   L'un des sommets du film est le repas de mariage, avec déclarations convenues et karaoké consternant. Mais deux autres scènes m'ont davantage marqué. La première est le petit affrontement entre Billi et sa mère, au cours duquel chacune vide son sac. Dans un premier temps, la réalisatrice semble diriger notre sympathie vers la jeune (qui est très attachée à sa grand-mère). Mais la scène bascule quand la mère révèle quelques aspects de sa vie passée et affirme nettement son caractère, ce qu'elle évite de faire en public, aux côtés de son mari.

   La deuxième scène marquante est le dialogue, dans une chambre, entre la grand-mère et la petite-fille. Il s'y dit beaucoup de choses. On en sous-entend d'autres, plus difficilement exprimables. C'est superbement joué et j'ai été ému.

   P.S.

   Ne partez pas trop vite à la fin : on découvre que cette intrigue mensongère est inspirée d'une histoire vraie.

21:28 Publié dans Chine, Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 31 janvier 2020

Jojo Rabbit

   Quand le réalisateur (talentueux) de Thor : Ragnarok se lance dans la comédie dramatique historique, cela donne ce film inclassable, qui ambitionne de passer des messages importants en recourant (notamment) à la farce.

   Le héros est un bon petit Allemand, dont le papa est parti sur le front de l'Est. L'action se déroule la dernière année de la Seconde Guerre mondiale... et l'on envie un peu ce gamin, parce que sa maman est Scarlett Johansson.  Très vite, le gamin, bouffé par la propagande nazie, se retrouve dans les Jeunesses hitlériennes (dans la section réservée aux pré-adolescents). Il a pour confident un ami imaginaire : Adolf Hitler. (Quelqu'un aurait dû déconseiller au réalisateur d'interpréter ce personnage...)

   La première partie de l'intrigue se veut cocasse, misant sur le grotesque. Le problème est que cela ne marche pas (à de très rares exceptions près). On rit vraiment peu aux mésaventures des gamins comme à la stupidité des adultes qui les encadrent. Je me suis demandé ce que je faisais dans cette salle...

   L'intérêt s'accroît lorsque le garçon fanatisé découvre qu'une pièce secrète de la chambre de sa sœur aînée abrite... une adolescente juive, pour laquelle il se met à éprouver des sentiments ambivalents. Celle-ci est dotée d'un solide caractère. Les échanges avec le gamin sont assez réussis et jouent sur les stéréotypes accolés aux juifs. (Il convient donc de réserver la vision de ce film aux personnes aptes à comprendre qu'il s'agit de second degré...) Je pense qu'on reparlera un jour de Thomasin McKenzie, la ravissante et talentueuse comédienne néo-zélandaise qui incarne Elsa.

   En dépit du regain d'intérêt, je trouve que la satire n'est guère plus évoluée qu'en début d'histoire. Fort heureusement survient l'une des meilleures séquences du film : l'arrivée d'agents de la Gestapo, qui viennent fouiller le domicile de la mère du héros, qui est soupçonnée de distribuer des tracts antinazis. C'est l'occasion de profiter du meilleur gag, la récurrence ridicule des "Heil Hitler !"... dans laquelle tous les cinéphiles verront un pompage éhonté d'une excellente scène de To be or not to be (celui d'Ernst Lubitsch). Jojo Rabbit fait vraiment pâle figure à côté de ce prestigieux ancien... sans parler même de The Great Dictator, le chef-d’œuvre de Chaplin.

   Néanmoins, j'ai apprécié le changement de ton, à partir d'une scène assez bien fichue, qui voit le gamin découvrir une paire de chaussures familières se balançant au-dessus de sa tête. Cela oriente l'intrigue dans un sens plus dramatique, lorsque l'Allemagne est en pleine déliquescence, jusqu'à l'arrivée des troupes alliées. La relation entre Jojo et Elsa prend encore plus de force, même si j'ai trouvé la conclusion un peu nunuche.

   Voilà. Ne vous attendez pas à une œuvre d'exception. Les décors sont certes soignés et quelques moments méritent le détour, surtout si, comme à Rodez, vous avez accès à la version originale sous-titrée.

jeudi, 30 janvier 2020

1917

   Sam Mendes est un de ces cinéastes qui mettent trois à quatre ans pour créer une oeuvre. Sa filmographie est donc assez restreinte, se limitant à huit longs-métrages, les derniers sortis étant Skyfall et 007 Spectre. Ici, on s'éloigne de l'univers de James Bond pour se plonger dans la Première Guerre mondiale.

   Pour immerger les spectateurs dans l'univers apocalyptique dans lequel évoluent les personnages, le réalisateur a recouru aux plans-séquences. Pas un seul, contrairement à ce que certains commentateurs imprudents ont affirmé. Si l'on est attentif, on distingue plusieurs coupures, la première intervenant peut-être au sein d'une scène de tranchées, lors d'un croisement. Par la suite, c'est une explosion, puis une fusillade et deux plongées dans l'eau d'une rivière qui permettent au cinéaste de poser sa caméra. Un oeil exercé remarquera aussi que l'obscurité de certains plans est propice à des raccords subtils (comme lorsque l'un des héros court la nuit dans une ville en ruines, ou quand il quitte une cave en remontant un escalier sombre).

   Le procédé n'a rien d'artificiel, d'abord parce qu'il se passe plein de choses autour de la caméra (qui, souvent, suit ou précède les personnages principaux), au premier plan et à l'arrière-plan. La minutie avec laquelle les scènes sont construites est parfois stupéfiante, comme cette sortie d'un tunnel, qui débouche à l'arrière des lignes allemandes, sans doute au niveau d'une ancienne batterie d'artillerie. La caméra continue d'évoluer autour des deux messagers anglais, après que l'un deux a lancé une fusée d'alerte, qui s'échappe du cadre. Un moment plus tard, les deux hommes repartent alors qu'au loin, derrière eux, on voit la fusée retomber. Les détails de ce genre sont assez nombreux.

   C'est un film de guerre atypique. On y voit très peu de combats. Par contre, les conséquences de ceux-ci sont omniprésentes. On ne nous épargne ni la boue, ni la crasse, ni les rats, ni les cadavres gonflés. C'est l'une des grandes qualités de ce film que de nous faire toucher du doigt toute la réalité de la guerre, à partir d'une histoire somme toute anecdotique.

   Visuellement, on suit les deux jeunes messagers (des acteurs quasi inconnus, pour moi), dans le labyrinthe des tranchées, d'abord britanniques, ensuite allemandes. C'est l'occasion de découvrir (pour ceux qui l'ignoreraient) que les aménagements des Allemands étaient plus élaborés que ceux de leurs adversaires (français comme britanniques). Au niveau des décors, ce sont toutefois les villes et villages en ruines qui impressionnent le plus. J'ai encore en mémoire les déambulations du héros dans une localité fantomatique, éclairée uniquement par des fusées lancées au pistolet et un gigantesque incendie. Marquante aussi est la scène de la ferme abandonnée, qui est le théâtre d'un combat aérien et d'une péripétie qui fait basculer l'intrigue. Enfin, la rencontre entre le héros et celle que l'on prend d'abord pour une jeune mère éplorée est touchante au possible... et c'est surtout l'occasion de voir enfin une femme !

   Si les rôles principaux sont tenus par des figures méconnues, quelques vedettes viennent densifier la distribution : Colin Firth, Mark Strong, Andrew Scott et Benedict Cumberbatch (tous deux anciens de la série Sherlock). Tous les interprètes sont irréprochables. Comme la photographie est soignée et que la musique s'ajoute sans s'imposer, l'ensemble forme un excellent film de guerre, qui échappe au tintamarre héroïsant comme à l'introspection nombriliste. C'est pour moi (déjà) l'un des films de l'année.

vendredi, 24 janvier 2020

Scandale

   Bienvenue dans le monde des riches mâles blancs dominants, harceleurs sexuels de surcroît ! S'inspirant d'une affaire bien réelle (celle impliquant l'ancien patron de Fox News), Charles Randolph (aussi scénariste de The Big Short) et Jay Roach (plus connu comme réalisateur des mémorables Austin Powers...) ont monté ce film féministe, s'appuyant sur trois comédiennes pleines de classe : Nicole Kidman, Charlize Theron et Margot Robbie.

   Commençons donc par ce que le film a d'emballant : le jeu des acteurs. En dépit des ravages de la chirurgie esthétique, Nicole Kidman réussit à faire passer de l'émotion, tandis que Charlize Theron développe toute l'épaisseur et la complexité de son personnage. De son côté, Margot Robbie excelle à transmettre les espoirs et les craintes ressentis par Kayla... et Dieu qu'elle est belle !

   Mais ce fantastique trio d'Amazones ne doit pas nous faire oublier la foultitude de seconds rôles féminins bien campés, au premier rang desquels se trouve Jess, la collègue homo de gauche qui n'a trouvé qu'un boulot à Fox News pour gagner sa croûte ! Elle a les traits de Kate McKinnon, remarquée ces dernières années dans S.O.S. Fantômes, L'Espion qui m'a larguée et Yesterday.

   Du côté des messieurs, il faut souligner l'excellente composition de John Lithgow, parfaitement crédible en patron de médias roublard  et odieux. D'autres personnages masculins ont droit à un traitement qui sort de la caricature.

   C'est une autre qualité de ce film, qui, face à des comportements dégueulasses, prend le temps d'expliquer les choses et nous propose des portraits nuancés aussi bien des victimes que des prédateurs et des témoins plus ou moins complices. Bien que très individualistes, tous se sentent liés au succès de la chaîne d'information, quitte à passer par pertes et profits quelques incartades, en affectant d'ignorer leur gravité.

   Je suis néanmoins réservé sur le film pour plusieurs raisons. La première est le décalage que j'ai ressenti entre mon mode de vie et celui des personnages représentés à l'écran. Je trouve qu'ils évoluent dans un monde superficiel, clinquant, pourri par le fric... mais que c'est plutôt montré comme quelque chose de chouette. La deuxième réserve tient à l'hypocrisie de la mise en scène. Le fond dénonce vigoureusement l'exploitation des (jolies) femmes... mais le réalisateur a filmé avec une évidente gourmandise les formes avantageuses des actrices, pas uniquement celles du trio vedette, mais aussi celles des nombreuses figurantes, dont on présume qu'elles n'ont pas été recrutées sur leur connaissance de la mécanique quantique.

   Et puis il y a (surtout) la présentation de Fox News et du travail de ses supposés journalistes. Je ne vais plus regarder ce qui s'y passe depuis des années mais, sous les présidences Bush et Obama, il m'arrivait régulièrement d'aller y jeter un oeil... et je trouvais cela assez consternant. Ici, on se contente de quelques petites piques sur l'aspect orienté de la chaîne d'info, mais il n'y a quasiment rien sur le manque de professionnalisme. Je pense que c'est pour que l'attention des spectateurs se concentre sur le problème du harcèlement. Du coup, parce que ce sont des victimes, on évite de dire que ces femmes faisaient un boulot de merde.

mercredi, 22 janvier 2020

Les Vétos

   Le film ruraliste a le vent en poupe, ces dernières années... et ce n'est pas moi qui vais le déplorer. Cela nous a permis de voir de jolies réussites comme Petit Paysan ou, plus récemment, Au nom de la terre. Ici, on se place plutôt entre Médecin de campagne (le personnage interprété par Clovis Cornillac étant presque un double de celui incarné naguère par François Cluzet) et Une Hirondelle a fait le printemps, à ceci près que, contrairement à Sandrine (Mathilde Seigner), l'héroïne Alexandra cherche à fuir la campagne plutôt qu'à s'y installer.

   La première partie est filmée sur le ton de la comédie, avec, à intervalle régulier, des moments cocasses, qui jouent sur le comique de situation et le "choc des cultures". Alexandra la Parisienne (Noémie Schmidt, vue notamment dans la mini-série A l'intérieur) ne cherche pas à se rendre sympathique... et, surtout, après cet été, elle ambitionne d'entrer dans un prestigieux laboratoire avec, en ligne de mire, un centre de recherches aux Etats-Unis.

   J'ai apprécié l'ironie du début, même si je trouve que l'actrice principale surjoue un peu. Le trait est trop appuyé, mais comme, en face, des comédiens chevronnés (Clovis Cornillac, excellent, et Carole Franck) font le job, cela passe.

   Le point de bascule est la mise-bas, une scène particulièrement difficile à tourner (et qui, là encore, rappelle Une Hirondelle a fait le printemps). C'est une réussite. On sent l'actrice impliquée et, à la fin, j'ai été ému. J'ajoute que, dans cette scène comme dans les autres, les animaux (chiens, chats, vaches, souris...) sont particulièrement bien filmés, une qualité à signaler alors que la réalisatrice (Julie Manoukian) est semble-t-il novice dans cet exercice.

   Du coup, j'ai bien supporté les grosses ficelles du scénario. Evidemment, l'héroïne va entrer en conflit avec les habitants du cru. Evidemment, elle va aussi se faire des amis... un jeune homme en particulier, beau garçon attentionné dont on a immédiatement compris qu'il n'avait pas vocation à rester un simple collègue de travail. C'est aussi une histoire de passation de témoin, avec l'oncle Michel et entre Nico et Alexandra.

   Petit à petit, le personnage de la jeune femme s'étoffe et, aux côté de Nico, Lila (et Zelda, adorable gamine interprétée par Juliane Lepoureau), elle forme un groupe attachant, qui nous communique un bel appétit de vivre.

dimanche, 12 janvier 2020

Zidane mène l'enquête

   Maiiiis, non ! L'ancien joueur vedette de l'équipe de France (devenu entraîneur) n'a pas quitté le Real Madrid pour s'engager dans la police. Toutefois, un quasi-homonyme officie au département de la Justice américain. Il s'agit d'Omar Zidan, ancien agent infiltré dans un groupe djihadiste, devenu enquêteur au FBI, dans la série du même nom :

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   Les scénaristes ont conçu un beau personnage de policier musulman très impliqué dans son travail... et sans doute pas insensible au charme de sa coéquipière Maggie Bell, une fonceuse comme lui, mais qui peine à dissimuler ses failles.

   Le premier épisode (Bombe à retardement) démarre fort, avec une explosion en plein New York. Le deuxième épisode (L'Oiseau vert) est centré sur les "fiancées du djihad". Le troisième (Portées disparues) a pour cadre l'exploitation sexuelle des femmes ukrainiennes. A chaque fois, le sujet est prenant, le rythme soutenu. On retrouve les qualités et les défauts des séries américaines grand public : c'est divertissant, avec un arrière-plan socio-politique, mais les énigmes sont résolues un peu trop vite par les enquêteurs.

    J'ajoute que c'est produit par Dick Wolf, à qui l'on doit une brochette de séries tournés à New York. D'ailleurs, l'un des personnages principaux, Jubal Valentine, est incarné par Jeremy Sisto, un ancien de New York, Police judiciaire. Quant aux fans des Experts Manhattan (et de Dr House), ils reconnaîtront un autre visage familier, celui de Sela Ward, qui incarna Jo Danville.

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   Parmi les nouveautés télévisuelles de 2020, je trouve FBI plus intéressante que la nouvelle version de Magnum (diffusée sur TF1), assez insipide, en dépit de l'introduction d'un Higgins féminin.

vendredi, 10 janvier 2020

La bonne santé du cinéma de Rodez

   Les chiffres sont tombés cette semaine : en 2019, le nombre d'entrées a progressé au CGR de l'Esplanade des Rutènes, dépassant les 320 000 (contre 302 000 l'année précédente).

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   Quand on regarde les choses avec un peu de recul, on constate que 2019 a été la deuxième meilleure année pour le multiplexe, qu'il ait porté la marque Cap'Cinéma ou CGR. En 2015 et 2017, le nombre d'entrées avait atteint 318 000.

   On notera que, cumulés, les cinq films ayant attiré le plus de public l'an dernier pèsent 18,75 % des entrées. C'est plus qu'en 2018, où le top 5 ne pesait que 14 % du total. Cela confirme les déclarations du directeur du multiplexe, qui voit dans certains films populaires des locomotives pour son établissement.

   L'article de Centre Presse n'évoque cependant pas une autre composante du succès financier du cinéma : les recettes de la confiserie. Entre les bonbons, les boissons et le pop-corn, il y a de quoi améliorer la marge... et dégoûter les spectateurs qui aiment profiter du spectacle sans baigner dans une ambiance de cantine ou d'écurie. J'ai trouvé que, durant la période des fêtes de fin d'année, certaines salles avaient un aspect particulièrement répugnant, une partie du public n'ayant visiblement reçu qu'une éducation rudimentaire...

   Voilà le principal grief à formuler contre ce cinéma (plutôt que les horaires), où, par ailleurs, je note un effort dans la programmation (y compris au niveau de la V.O.), pour qui fait l'effort de lire en détail chaque semaine la grille de programmes. Il reste que, pour les cinéphiles purs et durs, un passage par les autres cinémas de la région est indispensable pour ne pas rater certaines sorties.

vendredi, 03 janvier 2020

Le Miracle du saint inconnu

   Cette coproduction franco-marocaine aborde le thème de la croyance de manière ironique. Tout commence avec la cavale d'un délinquant, qui, pour cacher son butin, creuse un trou au sommet d'une colline isolée, à côté d'un arbuste, dans le désert marocain. Juste après, il se fait arrêter.

   Quand, quelques années plus tard, il sort de prison, il retourne dans le village où il pense récupérer son butin. Sauf qu'entre temps, un mausolée a été construit autour du trou, réputé être la tombe d'un saint inconnu. Cette sorte de chapelle attire pèlerins et touristes dans le village. Il y a du monde toute la journée et, la nuit, un gardien particulièrement vigilant protège les lieux, avec son chien.

   L'intrigue joue sur les deux tableaux. D'un côté, elle se moque des superstitions. De l'autre, elle fait intervenir quelques événements quasi surnaturels, qui contenteront les croyants de base.

   Le film vaut surtout par le tableau du village provincial brossé par le réalisateur. Les paysans s'appauvrissent, victimes de la sécheresse persistante. Leurs enfants ont tendance à quitter le village.  D'autres professions s'en sortent mieux. Le coiffeur (apparemment uniquement pour messieurs) est aussi barbier et, à l'occasion, dentiste ! On découvre rapidement qu'il utilise deux mousses à raser de qualités différentes, en fonction du client. L'autre "boutique" incontournable est le cabinet du nouveau médecin, épaulé par un infirmier très au fait des coutumes villageoises. Le jeune homme fringant est vite déçu du travail qui s'offre à lui, mais il va trouver un moyen de se rendre très utile à la communauté... Le dernier endroit fréquenté du village (après le hammam) est l'hôtel, où se croisent touristes, pèlerins... et délinquants.

   Cela nous mène au "héros" de l'histoire, le désormais ex-taulard. Celui-ci, rejoint par un comparse assez maladroit, échafaude des plans pour récupérer son magot. A chaque fois, cela échoue, pour une raison différente (surgissement d'un autre cambrioleur, début d'une procession, trouille du comparse...). C'est ma foi assez savoureux, même si l'on ne rit pas aux éclats.

   Attention toutefois : le film a été un peu "survendu" par la presse spécialisée. C'est une petite comédie ironique, sympathique, avec une morale.

14:00 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 02 janvier 2020

Séjour dans les monts Fushun

   Cette fresque chinoise s'étend sur un peu plus d'une année. L'action se déroule à proximité de la ville de Hangzhou, située au sud-ouest de Shanghai.

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   La séquence introductive est une fête d'anniversaire, celui de la matriarche, mère de quatre fils, dont celui qui tient le restaurant qui les accueille. C'est l'aîné. Le deuxième est pêcheur sur la rivière Fushun. Le troisième vivote sans parvenir à garder un emploi. Le quatrième, appelé souvent "Cadet" (le benjamin en réalité) est le seul à ne s'être jamais marié.

   Certains d'entre vous ont peut-être été surpris en lisant que la matriarche a eu quatre enfants. Elle a pourtant dû vivre à l'époque où était imposée la politique de l'enfant unique. Oui et non. Tout d'abord, on finit par apprendre qu'elle a eu ses enfants de deux pères différents, ses deux maris successifs. (On perçoit d'ailleurs un écart de génération entre les deux premiers et les deux derniers enfants.) Les deux aînés sont de toute évidence nés avant l'entrée en vigueur de la politique de restriction des naissances. Quant au plus jeune, il a 37 ans, ce qui, si l'action débute en 2015-2016, le ferait naître en 1978-1979.

   Par contre, les trois fils qui se sont mariés n'ont eu qu'un seul enfant. Le couple de restaurateurs a une fille, à qui la mère compte bien faire épouser un beau parti de la région (les filles étant moins nombreuses que les garçons, elles sont très recherchées, surtout si elles sont mignonnes...). Les pêcheurs n'ont qu'un fils, sur le point de convoler. Le troisième enfant de la matriarche a eu un fils, trisomique.

   Toutes ces précisions sont importantes pour comprendre l'un des enjeux de l'intrigue : les stratégies matrimoniales et le comportement des membres de la famille vis-à-vis des traditions. Vaut-il mieux privilégier la sécurité matérielle et l'acquisition d'un bel appartement ou bien prendre le risque de conclure un mariage d'amour, le sentiment n'étant pas voué à durer éternellement ? Les anciens, qui ont connu la misère ou du moins les difficultés financières, veulent (en général) voir leurs enfants à l'abri du besoin. Les plus jeunes n'ont pas le même point de vue.

   C'est la maladie de la matriarche qui va mettre au jour toutes ces tensions. Elle ne peut plus vivre seule. La tradition veut qu'elle soit hébergée par ses enfants, qui se refilent la "patate chaude", comptant sur l'aîné pour assumer cette charge... quitte même à le payer pour cela !

   Clairement, les soucis d'argent sont omniprésents dans l'intrigue. Les cadeaux (objets de prestige ou sommes d'argent) sont un puissant liant social, auquel on ne peut déroger sous peine de perdre la face. Et puis les Chinois sont désormais pris dans la société de consommation. Certains dépensent plus qu'ils ne gagnent. D'autres jouent. D'autres investissent dans l'immobilier, pas toujours à bon escient. Le réalisateur a aussi voulu montrer que cette Chine de l'Est urbanisée, enrichie, subit les contrecoups de la modernisation libérale : les prix de l'immobilier s'envolent et le coût de la santé peut sérieusement grever le budget des ménages.

   Tout cela est mis en scène avec grâce. Le réalisateur Gu Xiaogang (dont c'est le premier film) a vécu dans la région qu'il filme. Il recourt souvent à des plans-séquences, le plus impressionnant étant sans doute celui qui suit l'action le long de la berge de la rivière, de l'arrivée d'un couple d'amoureux à leur passage sur un ferry, en passant par une promenade et même une séance de natation ! Je crois que ce plan dure plus d'un quart d'heure et il n'est nullement ennuyeux.

   C'est d'ailleurs l'une des qualités de ce film très écrit. Bien que durant 2h30, il n'est ni langoureux ni soporifique... et il dit beaucoup de choses sur la Chine d'aujourd'hui mais aussi sur le sens de la vie. Si vous avez l'occasion de le voir, précipitez-vous !

14:23 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mardi, 31 décembre 2019

Les "Riton" 2019

   Il m'est toujours aussi difficile de dresser un palmarès restreint des films qui m'ont le plus plu sur une année. Tant d'entre eux m'ont procuré du plaisir !... et (trop souvent) n'ont pas rencontré leur public. C'est le moment de leur rendre hommage.

   Cette année 2019, les films sociaux ont été nombreux et (parfois) de qualité.

- Riton du film dénonçant les conséquences de la politique de l'enfant unique : So long, my son

- Riton du film mélenchoniste : Joker (un des dix films de l'année, selon moi)

- Riton du film dénonçant la naissance d'un terroriste : Le Jeune Ahmed

- Riton du film dénonçant la petite délinquance : L'Homme à la moto

- Riton du film carcéral : Nevada

- Riton du film dénonçant les inégalités sociales : Les Invisibles

- Riton du film dénonçant une mafia rurale : Mjolk

- Riton du film dénonçant les difficultés dont sont victimes les paysans : Au nom de la terre

 

   Certains films à contexte social (ou sociétal) ont pris la forme du drame ou du thriller.

- Riton de la violence rurale : Les Moissonneurs (un des dix films de l'année)

- Riton de la violence forestière : La Miséricorde de la jungle

- Riton de la violence scolaire : L'heure de la sortie

- Riton de la violence familiale : Wedding Nightmare

- Riton de la violence urbaine : Parasite (pas loin du top 10)

- Riton de la violence californienne : Once upon a time in Hollywood

 

   Un arrière-plan historique a souvent contribué au succès de certains films.

- Riton du film sur la ségrégation : Green Book

- Riton du film sur les femmes et le pouvoir : Mary Stuart, reine d'Ecosse (tout près du top 10)

- Riton du film en costumes : La Favorite (qui passe juste devant le précédent pour devenir l'un des dix films de l'année)

- Riton du film politico-judiciaire : J'accuse (un des dix films de l'année)

- Riton du film qui nous en apprend encore sur la Seconde Guerre mondiale : Les Témoins de Lendsdorf

- Riton du film de femmes victimes des conséquences de la guerre : Une Grande Fille

- Riton du film antitotalitaire : L'Oeuvre sans auteur (un des dix films de l'année)

- Riton du film de rebelles : Companeros

 

   Complète cette catégorie celle des documentaires.

- Riton italo-chilien : Santiago, Italia

- Riton franco-catholique : Lourdes

- Riton franco-international : Le Regard de Charles (pas loin du top 10)

- Riton franco-germano-américain : Chichinette, ma vie d'espionne (pas loin du top 10 non plus)

- Riton agricole : Tout est possible

- Riton trumpiste : Monrovia, Indiana (pas loin du top 10)

 

   Mais ce sont parfois les polars qui parlent le mieux de la réalité.

- Riton de la réalité new-yorkaise : Brooklyn Affairs (encore un qui n'est pas loin du top 10)

- Riton de l'illusion new-yorkaise : Les Faussaires de Manhattan

- Riton des beaux parleurs : El Reino

- Riton des bons menteurs : The Operative

- Riton des faux-semblants : Seules les bêtes (un des dix films de l'année)

- Riton des faux-jetons : Un Eté à Changsha

- Riton des vrais barjots : Qui a tué Lady Winsley ?

 

   Cela m'amène tout naturellement aux comédies, en général plutôt des produits de consommation courante que des chefs-d’œuvre.

- Riton de la comédie à la sauce aigre-douce : Rebelles

- Riton de la comédie à la sauce pénienne : Nicky Larson et le parfum de Cupidon (eeeeeh oui ! J'ose classer ce film furieusement potache dans mon top 10 de l'année !)

- Riton de la comédie sauce harissa : Tel Aviv on fire

- Riton de la comédie sauce tomate : Ne coupez pas !

 

   Ce film japonais expérimental me conduit fort logiquement aux œuvres d'animation, catégorie dans laquelle, une fois de plus, les productions nipponnes se sont illustrées.

- Riton de l'enfance disparue : Miraï, ma petite soeur (tout prêt du top 10)

- Riton des orphelins disparus : Les Enfants de la mer (un des dix films de l'année)

- Riton du monde disparu : Wonderland, le royaume sans pluie

- Riton de l'amour disparu : Millennium Actress

- Riton de la main disparue : J'ai perdu mon corps (un des dix films de l'année)

- Riton du chien découvreur : Stubby

- Riton du jouet fugueur : Toy Story 4 (un des dix films de l'année)

- Riton du pigeon voyageur : Les Incognitos

 

   Ce pigeon espion nous conduit à la dernière catégorie de ce palmarès, celle des films d'action.

- Riton du film qui ne se pose pas de question : John Wick Parabellum

- Riton du film qui complique les questions : Men in Black : International

- Riton du film qui ne cherche pas de réponse : Fast & Furious - Hobbes and Shaw

- Riton du film qui cherche des réponses simples : Jumanji : Next Level

- Riton du film qui répond à toute vitesse : Le Mans 66 (tout prêt du top 10)

 

   Vive le cinéma et bonne année 2020 !

 

   PS

Les "Riton" 2018

Les "Riton" 2017

Les "Riton"... 2015

Les "Riton" 2014

Les "Riton" 2013

Les "Riton" 2012

Les "Riton" 2011

Les "Riton" 2010

Les "Riton" 2009

Les "Riton" 2008

Les "Riton" 2007

Les "Riton" 2006

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lundi, 30 décembre 2019

Une Vie cachée

   Je ne connaissais pas l'histoire de Franz Jägerstätter, que Terrence Malick a choisi de nous conter en partie sous la forme d'une introspection. J'ai eu quelques réticences à aller voir ce film. Le réalisateur est, en général, encensé par la critique. De lui, je n'ai vraiment aimé que Les Moissons du ciel (pour le coup un pur chef-d'oeuvre), alors que Le Nouveau Monde et Voyage of Time m'ont fait piquer du nez.

   Cette fois-ci, j'ai tenu bon... contrairement à nombre de personnes âgées qui occupaient la salle obscure, à mes côtés. A défaut de rires, la séance a été agrémentée de ronflements...

   Vous voilà prévenu.e.s. Malick ne nous livre pas un film d'histoire, ni même un film sur la résistance au nazisme. Plus que de résistance, il est ici question d'opposition (passive, active). De cette opposition, le réalisateur ne retient que le fondement religieux (le héros est un fervent catholique), négligeant les aspects strictement politiques. Le personnage de Franz est un martyr, au sens étymologique du terme : il témoigne de sa foi, étant prêt à mourir pour elle, quand bien même une solution de repli lui serait proposée.

   L'histoire démarre dans une Autriche rurale éternelle, une sorte de paradis perdu où les humains vivaient en harmonie avec la nature. C'est la partie où l'on retrouve le talent de Malick pour la mise en scène de ces grands espaces. Incontestablement, cela ne manque pas de souffle.

   Cela se gâte à partir du moment où le cinéaste décide nous faire entrer dans la tête du héros. Cela devient pompeux, répétitif, maladroit. C'est dommage, parce qu'il y avait un beau sujet derrière : dans quelle mesure une foi authentique conduisait-elle un croyant de l'époque à rejeter le nazisme ? Le problème est que Malick néglige les explications extérieures et semble en empathie totale avec le personnage qu'il met en scène.

   Ainsi, on ne saura pas vraiment dans quelle mesure ce qui perce du front de l'Est (en 1943, l'armée allemande a été vaincue à Stalingrad et le génocide des juifs est déjà bien entamé) a influé sur sa détermination. On ne comprend donc pas pourquoi celui qui a accepté de porter l'uniforme pour se battre en France en 1940 se braque aussi fortement en 1943. Il n'y a aucun recul critique sur son obstination, qui nuit à sa famille. Par contre, les persécutions qu'il subit (de l'attitude grossière de certains villageois aux tortures infligées par les nazis) sont bien montrées.

   Malgré certaines qualités (indéniables), je suis resté sur ma faim. Le film est plutôt décevant.

samedi, 28 décembre 2019

Jumanji : Next Level

   Et c'est parti pour une séance de cinéma grand public, dans une salle presque comble, un soir de sortie en famille ! Deux ans après le succès du "reboot" Bienvenue dans la jungle, on retrouve les désormais jeunes adultes éparpillés aux quatre coins de l'Amérique à cause de leurs études.

   Cette introduction n'est d'ailleurs pas sans intérêt, puisqu'elle nous offre une présentation quasi sociologique des héros. Bethany la blonde est issue de la grande bourgeoisie, elle s'éclate à l'étranger. Mouse le Black a réussi à intégrer un prestigieux établissement grâce à ses aptitudes sportives. Martha la coincée suit un parcours classique et Spencer fait presque figure de prolo de la bande.

   Deux petits nouveaux complètent la distribution IRL ("dans le monde réel") : le grand-père de Spencer et son ancien associé, respectivement incarnés par Danny DeVito et Danny Glover, qui s'en donnent à coeur joie. Une fois la troupe parachutée dans l'univers du jeu vidéo, on retrouve avec plaisir Dwayne Johnson, Jack Black, Karen Gillan, Kevin Hart et une nouvelle, Awkwafina.

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   Les scénaristes ont repris le principe (source de nombreux gags) du décalage entre l'apparence du personnage dans sa "vraie" vie et l'aspect de son avatar. Ils ont même un peu corsé le jeu dans cette suite, en modifiant la répartition (par rapport au premier film)... et en introduisant une péripétie qui provoque des interversions d'apparence ! C'est excellent, d'autant que les acteurs se prêtent bien à l'autodérision, à commencer par Dwayne Johnson et son regard de tombeur ! J'aime aussi beaucoup le personnage interprété par Karen Gillan, certes construit pour allécher le public masculin hétérosexuel (c'est un décalque de Lara Croft). Mais l'actrice y ajoute un supplément d'âme qui lui donne encore plus de charme. (Comparez avec son interprétation de Nebula dans Les Gardiens de la Galaxie : vous serez saisis.)

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   Tous les ingrédients se combinent pour donner un film d'aventures très agréable, bourré d'humour et de rebondissements. On se fait nettement moins chier qu'à L'Ascension de Skywalker !

23:35 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 27 décembre 2019

Proxima

   Outre la proximité, le titre de ce film évoque une étoile (Proxima du Centaure), la plus proche de notre système solaire. C'est aussi le nom qui a été donné à la mission du spationaute Thomas Pesquet... que l'on voit d'ailleurs apparaître au cours du film !

   Au centre de l'histoire se trouve Sarah Loreau, une ingénieure aérospatiale appelée à remplacer l'un des trois astronautes de la mission. Elle est française et femme, ce qu'on va lui faire ressentir. Même si le propos est atténué dans le film, la réalisatrice dit s'être inspirée des témoignages des "femmes de l'espace", auxquelles il est rendu hommage à la toute fin. Dès son intégration à l'équipe, Sarah est confrontée au machisme de l'américain Mike (Matt Dillon), qui va se révéler moins crétin dans la suite de l'histoire. Le plus dur pour elle est l'entraînement sur la base soviétique russe. Le directeur du programme ne fait rien pour lui faciliter les choses.

   Les scénaristes non plus. Epaulée par le Suisse Jean-Stéphane Bron (L'Opéra, L'Expérience Blöcher, Cleveland contre Wall Street), Alice Winocourt (à laquelle on doit déjà deux superbes oeuvres : Augustine et Maryland) accumule les emmerdes sur le dos de son héroïne. C'est une mère célibataire (divorcée), dont l'ex-mari est (jusqu'à présent) peu investi dans l'éducation de leur fille. Celle-ci est de surcroît dyslexique (et dyscalculique, dysorthographique... n'en jetez plus !) et un peu caractérielle. Viscéralement attachée à sa mère, la petite redoute la moindre séparation et le fait bien comprendre à sa génitrice.

   J'ai trouvé que cela faisait un peu trop. L'héroïne a déjà bien assez de soucis comme cela sans qu'il soit nécessaire d'accumuler les guignes de sa vie personnelle. Mais, fort heureusement, cette héroïne est incarnée par Eva Green (vue cette année dans Dumbo), qui a visiblement payé de sa personne pour entrer dans ce rôle à la fois physique et mental. Aussi peu "glamour" le personnage de Sarah soit-il, Eva Green réussit à lui donner un charme fou (mais je ne suis peut-être pas objectif).

   A ceux que les difficultés de la spationaute ne passionneraient pas, l'aspect documentaire du film peut suffire. La réalisatrice a obtenu de tourner dans les lieux mêmes où travaillent celles et ceux qui contribuent au programme spatial, de Cologne à Baïkonour, en passant par la ville fermée de Star City. Comme dans ses films précédents, Alice Winocourt fait montre de son savoir-faire caméra à la main et surtout de son talent pour construire les plans. Avec un dispositif simple, sans effets spéciaux, elle réussit à suggérer l'angoisse, le mépris, la convivialité, bien aidée il faut dire par des acteurs épatants.

   Je recommande chaudement ce film "spatial" féministe, tourné par l'un de nos plus talentueux cinéastes.

Acusada (vidéo)

   L'été dernier, j'avais raté ce film argentin à sa sortie en salles. (Je crois qu'il n'est même pas arrivé jusqu'à l'Aveyron...) Cette information n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde. Du coup, la Mère Noëlle m'a apporté un bien beau cadeau, que j'ai pu déguster non pas dans le fauteuil d'une salle de cinéma, mais devant un petit écran, une fois n'est pas coutume.

   C'est à la fois un film de procès et un film sociétal. Il permet de suivre le déroulement des audiences du tribunal qui juge le meurtre d'une jeune femme, survenu deux ans et demi plus tôt. L'accusée est Dolores, son ex-meilleure amie, fâchée à mort avec elle depuis la diffusion d'une vidéo montrant ses ébats sexuels.

   L'affaire a défrayé la chronique. Les passions se déchaînent à nouveau à l'approche du procès, chacun.e ayant sa théorie sur le crime, les médias ne se privant pas de mettre de l'huile sur le feu. S'ajoute à cela un vernis de lutte des classes : la victime était d'origine modeste, tandis que l'accusée est issue d'une famille bourgeoise.

   La première qualité du film est la tension qu'il réussit à créer tout au long de l'histoire. Etant donné que des révélations vont survenir, on ne cesse de se demander dans quel sens va tourner l'enquête, qui continue en fait durant le procès. De surcroît, si certains personnages ont une idée bien arrêtée sur la (non) culpabilité de Dolores, d'autres sont dans la même expectative que les spectateurs, à commencer par les propres parents de l'accusée.

   Celle-ci ne fait rien pour arranger ses affaires. Elle ne se présente pas sous un jour sympathique... et elle a ses petits secrets. Mais que cache-t-elle réellement ? Sa culpabilité ? Celle de quelqu'un qu'elle protège ? Ou autre chose encore ?

   Outre pour ses mystères, le film vaut le détour pour la manière dont il dépeint le rôle des médias et des moyens de communication numériques, beaucoup plus efficaces pour ruiner la réputation d'un individu que pour faire jaillir la vérité.

   J'ajoute que c'est un film totalement dénué d'humour, assez sombre, y compris sur les relations entre jeunes adultes.

   Mais c'est un sacré suspens !

   Joyeux Noël !

00:48 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 26 décembre 2019

Les Incognitos

   Cette animation de la Fox parodie les films d'espionnage, le héros Lance Sterling étant un décalque (noir) de James Bond, en plus cool et plus moderne. Cela donne le ton du film, totalement décomplexé.

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   Le début est brillantissime. C'est une séquence montrant Sterling dans ses oeuvres, indomptable et arrogant, s'appuyant sur des qualités physiques exceptionnelles, des gadgets étourdissants... et un peu de chance. C'est donc spectaculaire et férocement drôle, vu ce qui arrive aux divers "méchants". Mais certaines péripéties réservent des surprises, en particulier quand une arme secrète fonctionne de manière inattendue...

   C'est au cours de cette mission que l'agent spécial se retrouve face à un redoutable ennemi, qui finit par lui échapper. Il doit se lancer à sa recherche, tout en étant lui-même poursuivi par ses anciens collègues... et transformé en pigeon !

   C'est dire si l'on est loin de l'univers aseptisé de Disney (qui a réussi à saboter la franchise Star Wars, entre autres). J'ose espérer que le rachat de la Fox par la tentaculaire entreprise de divertissement ne va pas nous priver de l'humour pipi-caca-vomi qui sied tant à ce genre de production.

   On retrouve donc Sterling en pigeon-espion, accompagné du jeune geek qui l'a transformé et de partenaires ailés plus ou moins inspirés (mais qui vont se révéler très utiles). L'intrigue fait évidemment l'éloge de l'entraide face à l'individualisme exacerbé. Cela regorge de péripéties plus ou moins loufoques, l'une des plus stupéfiantes étant... la ponte d'un oeuf !

   Ce film est un salutaire courant d'air frais dans une vague de sorties décembriennes très sentencieuses, voire poussiéreuses. C'est accessible aux petits comme aux grands... et c'est superbe à l'écran.

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mercredi, 25 décembre 2019

Le Meilleur reste à venir

   Cette histoire d'amitié peut constituer un excellent film de Noël. Des sapins décorés sont d'ailleurs visibles à l'écran dans la première partie de l'intrigue. Auparavant, on nous a présenté les deux héros dans leurs oeuvres, dans le passé et aujourd'hui, puisque ce sont deux amis d'enfance.

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   A ma gauche se trouve César, le flambeur, le jouisseur, le généreux, l'immature, bien incarné par Patrick Bruel. A ma droite se trouve Arthur, brillant scientifique, divorcé, père d'une adolescente dont il tente de régenter la vie (pour son bien, évidemment). Le rôle semble avoir été écrit pour Fabrice Lucchini, impeccable, comme d'habitude.

   L'intrigue repose sur un quiproquo. A l'issue d'un examen médical, il s'avère que l'un des deux hommes souffre d'un cancer incurable. La question est : lequel ? Chacun est persuadé que c'est l'autre. L'immature décide de s'installer chez son meilleur seul ami pour le soutenir dans ses derniers mois. Le psychorigide accepte la cohabitation et les défis que les hommes se lancent, pour adoucir la fin de vie de son ami.

   Pour entrer pleinement dans le film, il faut accepter une invraisemblance : que les deux héros soient de la même génération... et qu'ils soient quinquagénaires (ce qui fait donc deux invraisemblances !).

   Une fois ce présupposé accepté, on peut profiter des nombreux moments de comédie. L'alchimie fonctionne bien entre les deux comédiens, dont la complicité culmine dans une scène de restaurant qui fait réagir dans la salle !

   Le dernier tiers de l'histoire est plus dans l'émotion. Un personnage féminin apparu plus tôt (une rescapée du cancer au charme certain) joue un rôle croissant dans l'intrigue. A la fin, comme beaucoup dans la salle, j'ai été ému.

   Ce n'est pas un "grand" film, mais une jolie histoire, qui se conclut sur une définition de l'ami, la personne "qui vous connaît vraiment, et vous aime quand même".

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mardi, 24 décembre 2019

Autour de "Star Wars"

   La sortie de L'Ascension de Skywalker a été l'occasion, pour nombre de médias, de lancer des numéros spéciaux, tant sur papier que sur support numérique. J'ai déjà parlé sur ce blog d'un petit bouquin passionnant. On peut compléter ses informations en écoutant deux programmes de France Inter.

   En format court, on a la chronique matinale de Rebecca Manzoni, Pop & Co, dont quatre numéros ont été consacrés à la saga créée par George Lucas. Le 14 décembre dernier, il a été question de la version française des premiers films. Le 15 décembre, la chroniqueuse a traité la question des langues et des voix dans les films, avant d'aborder le bruitage, le 16 décembre. La série s'est conclue le 17 décembre, par un sujet sur la musique d'accompagnement (que l'on doit à John Williams).

   En format long, je recommande l'émission France Inter +, diffusée tard le soir, en semaine. Quatre numéros ont été consacrés à la saga. Pour moi, le plus intéressant est le premier, qui raconte la naissance de La Guerre des étoiles, sa sortie repoussée et la réception critique, en France.

L'Ascension de Skywalker

   Le titre du neuvième épisode de la saga est à la fois trompeur et révélateur du fond de l'histoire. Il est trompeur parce qu'il incite le public à penser que ce qu'il a présumé dans les précédents épisodes (que l'héroïne Rey est la fille biologique de Luke) va être confirmé. Mais il annonce quand même une "ascension" (au sens religieux du terme) à la fin de l'histoire.

   Dès le fameux générique de début, on informe les spectateurs de ce que les moins stupides avaient déjà deviné à l'audition de la bande-annonce : l'ex-empereur Palpatine est de retour, 36 ans après sa disparition dans Le Retour du Jedi... et, autant le dire tout de suite, de la même manière que Le Réveil de la Force avait abondamment puisé dans l'épisode IV, L'Ascension de Skywalker pompe allègrement l'épisode VI. Le problème est que, si, dans l'épisode VII, on pouvait se réjouir que la nouvelle trilogie démarre sur de meilleures bases que la prélogie des années 2000, au bout de trois nouveaux films, je suis assez consterné du manque d'imagination des scénaristes. Ainsi, comme Luke dans Le Retour du Jedi, Rey, en entrant dans une pièce sombre, va être confrontée à sa pire crainte. Comme dans l'épisode VI, le nouveau Jedi se retrouve opposé à l'empereur, qui tente d'abord de le/la convertir... et là encore, un Skywalker vient en aider un "autre"... Enfin, sans que rien ne le justifie vraiment dans l'intrigue, on voit Lando Calrissian venir refaire un petit tour, tout comme les Ewoks. On sent que Billy Dee Williams est tout content d'être là, mais, franchement, c'est une potiche. (Mark Hamill m'a aussi fait un peu pitié.)

   Cela nous mène à un autre problème posé par le film. Visiblement, on a voulu faire figurer à l'écran le maximum de personnages d'origines différentes et des deux sexes. Eh, oui, le space opera est entré à l'ère du "politiquement correct". La conséquence est que presque aucun personnage n'est fouillé, les interactions entre eux sont réduites à l'essentiel. Et pourtant, il y avait de quoi faire avec les duos Rey/Ben, Rey/Finn et Poe/Zorri. Tout cela n'est que survolé. De surcroît, les personnages des droïdes sont sous-utilisés. (Mon petit doigt me dit que certains de ces personnages -Zorri et les stormtroopers déserteurs- vont faire l'objet de films dérivés...)

   Par contre, au niveau de l'action, on est servi. Mais, là aussi, c'est maladroit. Je trouve que cela va trop vite. Certaines des péripéties auraient dû être davantage expliquées. Ne parlons pas des invraisemblances, comme ces vaisseaux sortis de nulle part dont le seul canon est capable de détruire une planète entière, comme seule pouvait le faire l'étoile de la mort. Qui plus est, cette force colossale est détruite presque aussi facilement qu'elle semble avoir été créée... (Il me semble qu'on a pratiqué des coupes pour éviter que l'ensemble ne dépasse les 2h30.) Néanmoins, je trouve que deux séquences sont assez réussies. La première a pour cadre une lune d'Endor, où se trouvent des débris de la seconde étoile de la mort. Là, il se passe quelque chose, tout comme, plus tard, dans le repaire de Palpatine, sur la planète Exegol. Il faut souligner l'excellent travail des décorateurs/illustrateurs. Les ambiances sont très bien restituées (j'ai vu le film en projection 4K). Et puis, dans ces scènes, il y a la présence de Daisy Ridley.

   Une fois de plus, le personnage de Rey porte le film sur ses épaules. Il est vraiment bien écrit et l'actrice est épatante. On sent bien que dans le duo symbiotique qu'elle forme avec Kylo Ren, elle est le membre dominant. Mais le coup de la double résurrection est de trop. Là encore, on sent les faiblesses scénaristiques. Les auteurs savaient qui ils devaient garder vivant à la fin de l'histoire. Le problème était le comment, tout en respectant le cahier des charges de l'intrigue...

   Bref, c'est long, bruyant (la musique est omniprésente : il était impossible d'entendre ses voisins bouffer leur pop-corn !) et assez prévisible. On est loin du niveau de la première trilogie.

10:53 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

lundi, 23 décembre 2019

Star Wars : 350 anecdotes

   La sortie de ce livre est fort opportune, juste avant que l'épisode IX ne soit diffusé dans les salles françaises. Il contient une foultitude de détails, certains connus, d'autres moins. L'auteur Chris Pavone s'est livré à un impressionnant travail de compilation. L'ensemble est bien écrit, facile à lire... et constitue le cadeau de Noël idéal (et pas cher : 10 euros) pour les fans de la série.

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   Beaucoup d'anecdotes évoquent la création de l'habillage visuel ou sonore des films. Ceux qui l'ignoreraient découvriront qu'avant l'ère du numérique, on bidouillait beaucoup. (On continue encore...) Ainsi, le son des sabres-lasers est constitué d'un mélange du bruit fait par le moteur d'un projecteur de cinéma et d'interférences micro. Pour la petite histoire, je signale que la premier sabre-laser à sortir du "canon" (bleu/rouge) est celui de Mace Windu, interprété par Samuel Jackson. Celui-ci avait exigé de disposer d'un sabre personnalisé... violet !

   Sans surprise, les références au monde des samouraïs abondent. Le terme Jedi est d'ailleurs un décalque du japonais "Jidai Geki", qui désigne, au pays du soleil levant, un genre théâtral, cinématographique et télévisuel.

   Au niveau des sons, sachez que le cri d'un monstre marin est en réalité la déformation du... rot du bébé de l'un des membres de l'équipe. Autre détail croustillant : dans l'épisode VII, c'est le ronronnement d'un chat qui a été utilisé pour exprimer l'usage de la Force. Un dernier bidouillage, pour la route : dans l'épisode I, le public de la course est représenté à l'aide de cotons tiges !

   Passons aux personnages principaux. Sachez que Chewbacca a été inspiré à George Lucas par son... chien, un Malamute d'Alaska nommé... Indiana ! (Le livre regorge d'ailleurs de réflexions sur les liens entre Lucas et Spielberg). Sa fourrure est faite de poils de yak et de mohair.

   Autre second rôle emblématique de la saga, R2-D2 bénéficie de plusieurs notes dans le livre. On y apprend l'origine de son nom ("Reel 2 Dialog 2"), les tourments de l'un des acteurs (nain) chargé de mouvoir le robot de l'intérieur (un jour, il a été oublié par l'équipe partie déjeuner) et le pourquoi de ses "bips" qui semblent tellement choquer C-3PO.

   J'ai gardé mon préféré pour la fin. Sous ses identités successives, Dark Vador a été interprété (physiquement et vocalement) par onze acteurs différents tout au long de la saga... le pire étant peut-être Hayden Christensen, dont la carrière a d'ailleurs périclité après le tournage de la prélogie. Signalons que le masque qui apparaît à la fin de celle-ci a été créé par un Français, Martin Rezard. Je pense que personne ne sera étonné d'apprendre que cet objet culte est inspiré d'un masque samouraï, le pectoral lui trouvant son inspiration dans l'Ancien Testament. Le masque a rencontré un tel succès qu'il a inspiré une gargouille de la cathédrale de Washington !

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   Bonne lecture !

Millennium Actress

   On doit ce film d'animation au Japonais Satoshi Kon, auteur, entre autres, des superbes Perfect Blue et Paprika. Mort précocement en 2010 à l'âge de 46 ans, il n'a hélas pas eu le temps d'étoffer une cinématographie qui, par ce que j'en ai vu, a de quoi rivaliser (en qualité) avec celle d'Hayao Miyazaki.

   L'action se déroule dans les années 1990, puisqu'on nous dit que l'actrice en question, qui a dépassé 70 ans, est née l'année du grand séisme du Kanto, en 1923. Faites le compte : 1923 + 70-75 = 1993-1998. Dans certains des retours en arrière, on la voit enfant sous le régime militariste qui a conduit le Japon au fond du gouffre, en 1945.

   Le fil rouge est le reportage qu'un duo de journalistes (l'un d'entre eux fan de l'actrice depuis des années) obtient de tourner chez la comédienne âgée. Un petit cadeau va lancer la série de confidences et, dans la foulée, une vague de scènes bourrées de références.

   On découvre l'actrice jeune, de ses débuts à ses derniers succès dans les années 1960, avant qu'elle ne se retire du métier, pour des raisons qui restent longtemps mystérieuses. Cette actrice a joué aussi bien dans des romances, que dans des films de samouraïs, de science-fiction ou de guerre. La grande habileté du scénario est d'avoir entremêlé la vie de l'actrice et ses rôles.

   Au niveau de la mise en scène, il faut signaler un procédé cocasse : les deux journalistes contemporains sont insérés dans les retours en arrière qui illustrent les instants de la carrière et de la vie de la comédienne.

   A l'origine de cette carrière se trouve un coup de foudre, en pleine période de dictature. Ici, les rôles traditionnels sont renversés : c'est l'amoureuse qui part à la recherche de son aimé. C'est follement romanesque, un brin désuet. J'ai adoré.

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dimanche, 22 décembre 2019

Un été à Changsha

   Ce polar chinois, premier film du réalisateur Zu Feng, a pour cadre une ville de l'intérieur du pays, en pleine expansion, où, l'été, règnent des températures caniculaires :

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   Cela commence par la découverte de morceaux d'un cadavre, celui d'un jeune homme disparu. Ce crime va faire remonter à la surface d'autres histoires, de la mort (accidentelle ?) d'une enfant à diverses tromperies conjugales, en passant par le suicide d'une petite amie délaissée (auquel va répondre un autre suicide, ainsi que plusieurs tentatives).

   Cette accumulation pourrait laisser croire que le film est sinistre. C'est inexact. C'est d'abord une enquête prenante, celle menée par un duo de flics atypiques, l'un plutôt sanguin (et pas très propre), l'autre du genre taiseux :

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   On sent que le réalisateur connaît ses classiques, occidentaux comme orientaux. Cela nous vaut quelques bonnes scènes de comédie, l'une des meilleures étant, pour moi, la poursuite drôlatique entre un flic blessé et un délinquant un peu gras du bide...

   Cependant, petit à petit, ce sont les relations sentimentales qui prennent le dessus sur l'intrigue policière. Dans cette grande ville en construction, les habitants deviennent de plus en plus anonymes. Les personnages principaux appartiennent à la classe moyenne, mais ne semblent pas très heureux. Le scénario s'ingénie à les faire se croiser ; ceux qui semblent destinés à se rencontrer ne vont pas forcément concrétiser et ceux que tout semble opposer de prime abord peuvent très bien finir ensemble. Comme dans la vie.

   Pour un premier film, je trouve que l'auteur réussit à mêler les thématiques avec un certain brio. A découvrir.

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samedi, 21 décembre 2019

J'ai perdu mon corps

   Le titre verbalise la pensée d'une main, que l'on découvre au début de l'histoire coupée de son corps d'origine. Ce film est donc la quête menée par cette main, qui commence par une évasion rocambolesque, le tout en images d'animation.

   Quel choc que ce film ! L'intrigue est racontée du point de vue de la main, considérée comme un être vivant, qui voit, qui ressent... et se souvient. C'est par son intermédiaire que l'on va découvrir les dessous de l'histoire, de l'enfance du possesseur de la main à... une fin que je ne raconterai pas. Deux types de retours en arrière nous sont proposés : ceux de l'enfance, en noir et blanc, et ceux du jeune adulte urbain, colorés.

   On découvre ainsi petit à petit la vie de Naoufel, fils de musiciens, dont le destin semble tracé : il sera concertiste... ou pas. Nous le retrouvons livreur (maladroit) de pizzas puis apprenti menuisier. Notons que les retours en arrière nous sont proposés quand la main entre en contact avec un objet qui lui évoque le passé, ou quand elle revient sur les lieux où a vécu Naoufel. Le périple de la main n'est pas sans danger. C'est une sorte de petit animal fragile, qui fait quelques mauvaises rencontres : des rats, un pigeon, un chien. Les animateurs la font se mouvoir tantôt comme une main réelle, tantôt comme un corps humain entier. C'est vachement bien fait !

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   Une lumière est apparue dans la vie tristounette de Naoufel : la bibliothécaire Gabrielle, rencontrée dans des circonstances improbables. Cette romance est ma foi plutôt bien menée. En terme d'émotion, je place quand même au-dessus du lot la séquence chez la mère au bébé, une pure merveille.

   La seule limite que je poserais à mon enthousiasme est une petite tendance au pathos, dans la scène de l'accident de voiture puis, enfin, quand on nous montre la perte de la main. Je trouve que le réalisateur joue un peu facilement avec les nerfs des spectateurs, d'autant que l'on sait ce qu'il va se passer.

   La fin est ouverte : l'auteur n'a pas voulu trancher entre le drame et le conte de fées, même si l'on sent qu'il penche plutôt d'un côté. Je vous laisse le soin de deviner lequel.

21:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

mercredi, 18 décembre 2019

Vic le Viking

   En début de soirée, pendant qu'une batterie de djeunses faisait la queue pour aller voir l'épisode IX de ce-que-vous-savez, j'ai pu rapidement gagner une salle confidentielle et me plonger dans un bain de jouvence. Dans les années 1970-1980, sous ce titre, les téléspectateurs français ont pu découvrir une série d'animation bon enfant, dont le générique a marqué les mémoires.

   Ici, visuellement, cela tranche. C'est du numérique et, ma foi, plutôt bien torché. Soyez attentifs notamment à tout ce qui est aquatique. C'est vraiment très bien fait.

   Au niveau de l'intrigue, il y a de la recherche, avec une mystérieuse épée et la quête de la porte de la cité d'Asgard. Cependant, c'est traité de manière assez superficielle. On a visiblement visé le jeune public, avec une histoire facile à suivre, sans beaucoup de fioritures, et qui se conclut rapidement (au bout d'à peine 1h20).

   Le film n'en est pas moins bardé de références. Les fans d'Astérix trouveront que le village viking a un petit air de bourg gaulois, avec ses habitants prompts à la bagarre, un gros lard qui mange autant qu'Obélix et un petit malin accompagné d'un animal dégourdi (ici un mystérieux écureuil). Il y a aussi cette scène, vers la fin, qui voit papa Viking mettre une branlée à ses adversaires, comme s'il venait de prendre une dose de potion magique.

   L'autre versant de l'intrigue puise dans la mythologie nordique... et sa réinterprétation par Marvel. On ne sera donc pas étonné de croiser un certain Loki... et même Thor.

   Concernant le personnage de Leif Erikson, je m'attendais à des développements sur l'exploration du nord-ouest de l'océan Atlantique et ce parce que, dès la bande-annonce, j'avais vu apparaître à l'écran une carte faisant allusion à des voyages en Islande et au Groenland :

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      De ce point de vue-là, il ne faut rien attendre du film. Le récit se cantonne au niveau mythologique, avec un humour plutôt destiné aux enfants. La morale aussi a été conçue pour eux : les jeunes héros vont faire leurs preuves devant leurs aînés et une famille disloquée va se reconstituer.

   Ce n'est ni indigne ni enthousiasmant, mais cela peut divertir des gamins qui s'intéressent à ce genre d'histoire.

21:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

lundi, 16 décembre 2019

Brooklyn Affairs

   Cet hommage aux polars des années 1940-1950 est signé Edward Norton, qui interprète le rôle-titre ("L'Orphelin de Brooklyn", dans la version originale), celui d'un homme sympathique et maladroit, atteint du syndrome Gilles de la Tourette. Cela nous vaut quelques incongruités et grossièretés, à intervalle régulier, mais aussi de beaux moments d'émotion.

   Le début met en valeur le patron d'une agence de chauffeurs-détectives privés, incarné par Bruce Willis. Ce vétéran de la Guerre du Pacifique a pris en mains, une dizaine d'années auparavant, une bande d'orphelins auxquels il a donné leur chance, en plus de quelques leçons de vie. Pas de bol pour lui : il a les yeux plus gros que le ventre et se met à dos des types très dangereux. On tombe dans une histoire de chantage et de corruption, sur fond de tensions "raciales".

   C'est l'une des réussites de ce film que d'inclure dans l'intrigue des personnages afro-américains, qui, en général, ne figuraient qu'au second plan (voire étaient totalement ignorés) dans les polars d'il y a soixante ans. Norton est bien aidé par une superbe et convaincante actrice principale, Gugu Mbatha-Raw, dont on a déjà pu apprécier le talent dans Seul contre tous, Miss Sloane et Free State of Jones. C'est elle la véritable femme fatale de l'histoire, et non la veuve (blanche) du détective assassiné. Et c'est une femme fatale diplômée en droit ! Modernité quand tu nous tiens...

   L'intrigue est retorse. Au centre se trouvent des projets immobiliers, avec, à la manoeuvre, en coulisses, un redoutable promoteur, William Randolph, qu'on ne s'étonnera pas de voir incarné par Alec Baldwin. C'est une sorte de mélange du magnat William Randolph Hearst (celui de Citizen Kane) et du roi de l'immobilier William H Reynolds. Mais les scénaristes ont eu l'habileté de lui donner sa chance, dans les dialogues. Le personnage défend mordicus son point de vue de bâtisseur sans scrupules, même si, au bout du compte, les spectateurs dotés d'une once de moralité pensent que c'est une belle ordure.

   Une fois le patron de l'agence de détectives trucidé, ce sont ses employés qui reprennent le flambeau, avec une implication variable. C'est Lionel le détraqué au grand coeur qui se révèle le plus tenace à ce jeu, notamment parce qu'en raison de son handicap, ses interlocuteurs ont tendance à le sous-estimer.

   J'ai écrit plus haut qu'une fraude immobilière était au coeur de l'histoire. En réalité, c'est un secret de famille, inavouable à l'époque. Voici donc un polar fort bien écrit, très joliment filmé, plein d'humanité et d'amour pour New York. Les 2h30 passent comme un rêve.

18:41 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 14 décembre 2019

Docteur ?

   Michel Blanc nous revient dans une comédie signée Tristan Séguéla (oui, le fils de Jacques...), dont l'action se déroule le soir du réveillon de Noël. Le héros est un vieux médecin parisien alcoolique, qui rencontre (dans des circonstances rocambolesques) un livreur UberEats (incarné par Hakim Jemili). La nuit qu'ils vont passer ensemble va les transformer.

   Il n'y a pas de surprise dans cette comédie balisée... mais ce n'est pas un mal. Le contenu du film correspond bien à ce que l'on voit dans la bande-annonce, à ceci près qu'il manque l'aspect grave de l'intrigue, qui touche à la vie personnelle du docteur Mamou Mani.

   On attend donc avec impatience les séquences du patient constipé et de la femme enceinte, deux réels moments d'anthologie, où éclate le talent d'Hakim Jemili. Avec Michel Blanc, l'osmose est parfaite. On peut ajouter une pléiade de seconds rôles plaisants, parmi lesquels je distingue Solène Rigot (aperçue il y a trois ans dans Saint Amour)... et Chantal Lauby... pourtant invisible à l'écran !

   Le film démarre sur une séquence inédite, la visite du docteur chez un couple dont le bébé n'arrête pas de pleurer. Elle est très drôle et permet de comprendre la lassitude du médecin. Une autre source de gags est la récurrence du "client casse-couilles", interprété par Franck Gastambide (vu l'an dernier dans Taxi 5). On le rencontre à trois reprises, dans trois circonstances différentes.

   Voilà. Cela dure moins d'1h30. C'est drôle, mignon (et même émouvant lors de l'accouchement). On sort de là ragaillardi.

13:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 07 décembre 2019

Seules les bêtes

   Ce polar ruralo-urbain est l'adaptation d'un roman de Colin Niel (que je n'ai pas lu). L'énigme prend la forme d'un puzzle en cinq parties, chacune développant des aspects de l'intrigue en suivant un personnage différent. Ce sont les recoupements des cinq parties qui livrent la solution d'un mystère, celui de la disparition d'une femme, sur le Causse Méjean, en Lozère.

   Pour apprécier pleinement ce film noir, il faut accepter, dans un premier temps, de ne pas tout comprendre... et, plus tard, il faut avoir la modestie d'accepter que ce qu'on croyait avoir compris au départ n'était pas la réalité.

   La première partie est centrée sur Alice (Laure Calamy), employée souriante d'une mutuelle, qui sillonne les routes du canton pour faire remplir la paperasse à des personnes isolées... et aussi pour leur tenir compagnie, prêter une oreille attentive à leurs plaintes. A l'occasion, elle se tape l'un des paysans du cru, Joseph (Damien Bonnard, qu'on voit beaucoup ces temps-ci, notamment dans J'accuse). De retour chez elle, elle tente de faire bonne figure face à son mari Michel (Denis Ménochet, excellent), autre paysan taiseux, complètement investi dans son travail. C'est Alice qui découvre la voiture vide d’Évelyne Ducat, une bourgeoise récemment installée dans un ancien corps de ferme restauré. Un jour, le mari d'Alice disparaît à son tour.

   La deuxième partie est filmée du point de vue de Joseph. On commence à mieux comprendre l'arrière-plan de certaines scènes vues précédemment. On y découvre aussi l'une des conclusions de l'intrigue.

   La troisième partie met en scène Marion, une jeune serveuse sétoise, qui s'engage dans une relation fougueuse avec Évelyne. Nadia Tereszkiewicz en fait peut-être un peu trop face à une Valeria Bruni-Tedeschi souveraine (mais un peu empâtée).

   La quatrième partie, intitulée "Amandine", nous révèle une partie des clés. Elle est liée à l'introduction du film, une scène énigmatique se déroulant dans une ville d'Afrique francophone. On apprend qu'il s'agit d'Abidjan, en Côte-d'Ivoire. Qu'est-ce qui peut bien relier de jeunes Africains à des ruraux lozériens ? Je vous laisse le soin de le découvrir. En tout cas, sachez que Dominik Moll (rappelez-vous, Harry, un ami qui vous veut du bien) s'y montre aussi habile à filmer la jungle urbaine ivoirienne que les solitudes enneigées lozériennes.

   La dernière partie est centrée sur la personne qui a tué, dont je me garderai bien de révéler le nom ici. On revoit quasiment tout le film sous un angle différent. Pour les spectateurs, c'est à la fois déstabilisant et jubilatoire. Les scènes ont été tournées de manière à être aussi vraisemblables, quel que soit le point de vue adopté. C'est de surcroît très bien joué, du côté français comme du côté ivoirien.

   La conclusion nous ramène d'Afrique en Lozère, en compagnie de deux personnages vus auparavant. L'auteur a visiblement voulu montrer que, directement ou indirectement, tous les protagonistes de cette histoire sont liés entre eux, une ravissante jeune Ivoirienne semblant se retrouver (bien involontairement) à la croisée des chemins. C'est peut-être un peu too much, mais cela boucle la boucle de manière habile.

   Ne ratez pas ce polar français atypique, en prise sur la société actuelle.

18:50 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 05 décembre 2019

Chichinette, ma vie d'espionne

   Ce court documentaire (1h25) a été pour moi l'occasion de découvrir l'histoire de cet étonnant bout de femme (mesurant 1m50, selon une ancienne carte d'identité visible à l'écran), née Marthe Hoffnung à Metz juste après la Première Guerre mondiale, résistante puis espionne une vingtaine d'années plus tard.

   La première partie du film nous fait découvrir la nonagénaire entre voyages et conférences avec, en parallèle, sa "vie d'avant" (la Seconde Guerre mondiale). On fait la connaissance d'une petite fille juive, plutôt rebelle, qui n'aimait pas l'école et se destinait au métier d'infirmière. Elle est d'ailleurs tombée amoureuse d'un futur médecin.

   Le déclenchement d'un nouveau conflit avec l'Allemagne incite la famille à se replier sur Poitiers. Pour les parents de Marthe, la vie devient plus compliquée, parce qu'ils ne parlent quasiment qu'allemand, vu qu'ils ont vécu toute leur jeunesse en Lorraine annexée. Marthe elle est parfaitement bilingue, une aptitude qui va lui sauver la vie et permettre d'en sauver d'autres.

   Mais la guerre est d'abord source de douleurs, avec l'arrestation puis la déportation de la soeur aînée de notre héroïne, puis la mort de son amoureux, engagé lui aussi en résistance. Quant à Marthe, grâce à des faux papiers sur lesquels ne figure pas la mention de sa judéité, elle passe entre les gouttes.

   Si cette histoire ancienne s'avère passionnante, la vie actuelle de l'arrière-grand-mère de 96 ans (le film a été tourné en 2016) ne manque de sel non plus. Comme elle aime à le préciser, dans son couple, Chichinette a vu la relation s'inverser. Pendant toute sa vie professionnelle, elle a assisté son époux américain (médecin). Depuis que son histoire a été rendue publique, à sa retraite, c'est elle qui mène la danse, l'époux prévenant s'étant transformé en majordome de l'icône de la Résistance.

   C'est en fin de film que l'on découvre son principal fait d'armes, en Allemagne, en avril 1945. Sa maîtrise de l'allemand, son courage et son sang-froid lui ont permis de rendre de considérables services aux armées alliées qui progressaient en territoire germanique.

   C'est à la fois un vibrant morceau d'histoire et une magnifique leçon de vie.

   P.S.

   Il est regrettable qu'il ait fallu attendre si longtemps pour rendre un hommage filmé à cette courageuse française. Il est encore plus étonnant que ce long-métrage soit une production... allemande !

mercredi, 04 décembre 2019

La Famille Addams

   Je suis fan des films de Barry Sonnenfeld, sortis au début des années 1990, petits bijoux d'humour noir mordant, servis par des acteurs épatants. Ici, on nous propose une nouvelle version de l'histoire de cette gothiquissime famille de psychopathes, en images d'animation.

   Le début raconte en quatrième vitesse le mariage de Gomez et Morticia, la rencontre de la créature de Frankenstein et leur installation dans un ancien asile devenu le manoir le plus sinistre de la région. Suivent les naissances de Mercredi et Pugsley. De cette entame menée sur les chapeaux de roue, il faut retenir le réveil et la préparation de Morticia, une merveille d'ironie.

   La suite repose sur une trame hyper-balisée. Le premier arc narratif concerne les relations des habitants du manoir avec ceux d'une ville nouvelle pour classes moyennes. Au départ, chacun ignore l'existence de l'autre. Leur rencontre va (évidemment) provoquer des étincelles. C'est aussi l'occasion pour les auteurs de se moquer du monde "banlieusard", c'est-à-dire, aux Etats-Unis, du mode de vie de la classe moyenne conformiste. C'est assez savoureux, même si l'on peut regretter que Tim Burton ait finalement renoncé à ce projet. Nul doute que l'auteur d'Edward aux mains d'argent aurait su croquer férocement cet univers de carte postale.

   Le second arc narratif concerne la cérémonie de maturité de Pugsley, dite du sabre. Quand il ne tente pas d'assassiner son père ou d'échapper aux sévices de sa soeur aînée, le gamin se prépare à surmonter ce rite de passage, dans lequel il faut sans doute voir un décalque très osé de la bar mitzvah.

   Car il y a bien un propos politique derrière cette histoire rocambolesque. La manière dont les Addams sont attaqués puis chassés, au début de l'histoire, fait sans doute écho aux persécutions antisémites de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Un peu plus tard, au cours d'une fête, on entend une musique au violon qui évoque immanquablement le folklore juif d'Europe centrale.

   Aux spectateurs inconscients de ce sous-texte, le film propose aussi une lecture morale du monde contemporain. La superficialité (addiction aux réseaux sociaux, excès de la vidéo-surveillance, surmédiatisation par le biais d'une émission de télé-réalité, recours à la chirurgie esthétique...) est dénoncée, tout comme certains travers comportementaux, comme le harcèlement à l'école. La fin (consensuelle) est censée démontrer qu'avec un peu de tolérance, des personnes très différentes peuvent vivre en harmonie.

   Entre temps, on aura pu savourer une kyrielle de gags, principalement visuels, hélas, un peu noyés dans le tourbillon d'une intrigue qui avance vite et de manière un peu simpliste. Au niveau visuel, c'est du travail propret, sans génie. Cela dure environ 1h20 et, franchement, je suis sorti de là détendu.

   P.S.

   Compte tenu de l'aspect morbide de certaines scènes, ce film est à déconseiller aux tout-petits. C'est plutôt destiné à des pré-adolescents, de la fin du primaire au début du collège... ainsi qu'aux (très) grands enfants nostalgiques.

   P.S. II

   L'un des deux metteurs en scène est Conrad Vernon, coréalisateur de Shrek 2, Monstres contre aliens et Madagascar 3.

20:50 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

dimanche, 01 décembre 2019

A couteaux tirés

   Soit un riche patriarche, un brin autoritaire, ayant eu quatre enfants et quelques petits-enfants. Tout ce joli monde (sauf l'un des fils, précocement décédé) convoite une part de l'héritage... au point de donner un "coup de pouce" à Mère nature ? Un matin, après qu'il s'est disputé avec presque tous les membres de la famille, ledit patriarche est retrouvé mort, apparemment suicidé.

   Démarre alors une drôle d'enquête de police, puisque les inspecteurs sont épaulés (puis, petit à petit, dirigés) par un mystérieux détective, embauché par on-ne-sait-qui. Outre les membres de la famille (y compris l'arrière-grand-mère quasi mutique), sont interrogés les employés de maison et une étrange infirmière, d'origine latino-américaine.

   Quand j'aurai ajouté que le détective porte un nom francophone (Benoit Blanc - à prononcer Blanque), vous aurez compris qu'un parfum d'Agatha Christie flotte sur ce polar ironique, bigrement malin, tourné dans de superbes décors, avec une distribution de rêve (Daniel Craig, Jamie Lee Curtis, Chris Evans, Michael Shannon, Toni Collette, Don Johnson, Christopher Plummer...).

   Au centre du jeu va se retrouver cette étrange (et ravissante) infirmière. Elle est incarnée par Ana de Armas, un petit canon qu'on a aperçu dans Blade Runner 2049. Elle apporte une touche "américaine" à l'intrigue d'inspiration britannique. Cette fille d'immigrée clandestine souffre d'un trouble psycho-somatique : quand elle ment, elle est prise de violents vomissements. Cela "corse" agréablement certaines scènes, puisque, la demoiselle connaissant sa faiblesse, elle a appris à la surmonter... temporairement. L'un des jeux intellectuels qu'offre ce film est de deviner si et quand l'infirmière va relâcher brusquement le contenu de son estomac.

   Pour les spectateurs peu enclins à ce genre de divertissement immature, il reste l'énigme policière. On se rend rapidement compte que (presque ?) tout le monde ment. La simple succession des interrogatoires des membres de la famille nous révèle leurs contradictions, un effet qui s'accentue par le contraste entre l'image et le son : lorsque l'un des protagonistes raconte sa version de la soirée précédente, à l'écran s'affiche une scène qui très souvent ne concorde pas avec ce que le personnage est en train de déclarer aux enquêteurs.

   Le scénario est vraiment bien construit. On nous propose plusieurs fausses pistes mais, pour qui sait voir et entendre, l'identité de la personne coupable finit par s'imposer avant même que le détective ne nous dévoile toutes les ficelles, dans une séquence à la Hercule Poirot. C'est d'ailleurs l'une des rares limites que je mettrais à mon enthousiasme : Daniel Craig est un acteur trop physique pour être totalement crédible dans le rôle d'un enquêteur cérébral. L'autre limite est la durée du film, supérieure à deux heures. Paradoxalement, c'est au début que cela se ressent. Le réalisateur Rian Johnson (à qui l'on doit Looper et Les Derniers Jedi) prend un peu trop de temps à mettre en place son dispositif. Mais l'ensemble n'en constitue pas moins un très agréable divertissement.

13:14 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 30 novembre 2019

Adults in the room

   Le titre reprend une formule utilisée par le personnage de Christine Lagarde. Dans l'histoire, celle qui est à l'époque directrice du FMI (aujourd'hui présidente de la BCE) fait office de Madame Loyale, autorité bienveillante qui tente de concilier les contraires... tout en restant du côté du manche. La formule fait allusion au manque présumé de maturité des hommes qui s'affrontent au cours des réunions ayant pour but de résoudre la crise grecque (en réalité les conséquences de la crise financière de 2007-2008 sur l'Union européenne).

   Costa-Gavras nous livre une oeuvre engagée, sous forme de théâtre politique. La musique, omniprésente, souligne les moments dramatiques, cocasses... et a peut-être aussi pour mission de pallier le manque d'action à l'écran. Bien que le film soit long (il dure plus de deux heures), je trouve que le résultat est globalement réussi, sur la forme.

   C'est dû à la qualité de l'interprétation, en particulier celle de Christos Loulis, incroyable de charisme en Yanis Varoufakis (le ministre des Finances grec). Le réalisateur fait la part belle à ce personnage, ce qui d'ailleurs fait perdre à son histoire une partie de sa crédibilité. Face à lui, il faut souligner la performance d'Ulrich Tukur en Wolfgang Schäuble, l'omnipotent ministre allemand, ancien rival d'Angela Merkel qui, bien que cloué sur un fauteuil roulant, terrorise la moitié de l'Eurogroupe. Si l'acteur est excellent dans le rôle, je trouve que la représentation du ministre allemand est plutôt caricaturale. On peut faire la même remarque à propos du président (de l'époque) de la BCE, Mario Draghi, un ex de Goldman Sachs qui, à l'usage, s'est révélé beaucoup plus subtil qu'on ne l'avait craint (et qui a sans doute grandement contribué à sauver l'euro... mais c'est peut-être justement là que le bât blesse pour certains abrutis de base).

   C'est pire encore concernant d'autres personnages majeurs : le Premier ministre grec lui-même, Alexis Tsipras, est dépeint en type mou et influençable. Costa-Gavras est trop dépendant de sa principale source (le bouquin de Varoufakis, qui a rompu avec son ancien partenaire de Syriza). Concernant les représentants français, les spectateurs hexagonaux qui ne sont pas nostalgiques de la présidence Hollande apprécieront de voir Michel Sapin (le ministre des Finances) caricaturé en hypocrite veule et Pierre Moscovici présenté en notable suiviste (avec une bonne composition d'Aurélien Recoing). Des flèches encore plus acérées sont destinées au président de l'Eurogroupe de l'époque, le ministre néerlandais des Finances (travailliste) Jeroen Dijsselbloem, présenté comme un type suffisant... et un véritable laquais de l'Allemagne. C'est là que l'on mesure (quand on connaît un peu le contexte) la partialité du film (et aussi du livre, je présume). Rien ne nous est dit des difficultés avec lesquelles se débat le gouvernement néerlandais, à l'époque, difficultés qui peuvent (en partie) expliquer l'attitude du ministre dans les réunions européennes.

   De manière générale, je trouve que le film porte d'énormes oeillères, se contentant de véhiculer le point de vue de Varoufakis, en passant très vite sur les errements des précédents gouvernements grecs (dont les élus de Syriza, qu'ils le veuillent ou non, doivent gérer l'héritage). Je trouve que les enjeux européens ne sont pas suffisamment expliqués. Ils auraient permis de comprendre l'attitude de certains des acteurs majeurs de ces négociations... mais cela aurait peut-être quelque peu diminué l'éclat de l'auréole varoufakienne.

   Au final, on se retrouve avec un film à la dramaturgie élaborée, mais très orienté.

   P.S.

   La séquence conclusive, qui comprend un ballet métaphorique, est complètement ratée.