dimanche, 15 mai 2022
Le Roi cerf
C'est le premier long-métrage d'animation que signe Masashi Ando, mais celui-ci a beaucoup d'expérience dans ce domaine. Il a travaillé sur Le Voyage de Chihiro (de Miyazaki), Miss Hokusai (de Keiichi Hara). Surtout, il a été directeur de l'animation sur Paprika (du très doué Satoshi Kon, hélas, prématurément décédé) et, plus récemment, sur Your Name (de Makoto Shinkai).
Tout ça pour dire que les amateurs de manga sont en terrain connu. Le style semble familier (à tel point que, parfois, on se croirait chez Miyazaki) et l'animation est de grande qualité. La faune a été l'objet d'un soin particulier : cerfs, chevaux, loups, renards, aigles sont très réussis. Outre ces moments "bucoliques", j'ai aussi apprécié les scènes oniriques, fantastiques, qui témoignent d'un incontestable savoir-faire.
L'intrigue est feuilletonnesque. On est dans le Japon médiéval, avec un empereur et de grands féodaux, le territoire d'Aquafa étant passé sous la domination de Zol. La première séquence se déroule dans une gigantesque mine de sel, véritable enfer à ciel ouvert qui rappelle la prison-puits du Dark Knight Rises.
C'est à ce moment-là que le surnaturel jaillit, sous la forme d'une meute de loups que rien ne semble pouvoir arrêter. Tous les occupants de la mine vont périr, soit des morsures des animaux, soit d'un mal mystérieux qu'ils véhiculent...
... En fait , il y a deux survivants, dont le héros (ça tombe bien !), Van, qui fut autrefois un valeureux chevalier, défenseur d'Aquafa. Il a survécu à la morsure du chef de meute mais, désormais, il est doté de pouvoirs mystérieux. De plus, il a accès à un monde fantasmagorique, par lequel il entre en contact avec une sorte de sorcier.
Van semble avoir une mission... mais il veille surtout à s'occuper de Yuna, une adorable gamine qui le prend pour son père. Celui qui avait perdu goût à la vie depuis la mort des membres de sa famille décide de s'occuper d'elle.
Dans le même temps, dans la citadelle de Zol, on s'inquiète des ravages de la peste lupine... qui épargne les habitants d'Aquafa. Comment est-ce possible ? Existe-t-il un remède capable de sauver les habitants ?... et, n'y a-t-il pas une manipulation derrière l'expansion de ce mal sélectif ? C'est à ces questions que le médecin Hohsalle doit trouver les réponses. En compagnie de son garde, il part à la recherche de Van, à la suite d'une traqueuse dont la mission comporte une part secrète. Dans le même temps, l'empereur de Zol approche (par les airs). Un complot est à l’œuvre, en coulisse...
Je n'en dirai pas plus. Outre les qualités formelles, il faut relever la richesse du scénario (inspiré d'un roman). On n'a vraiment pas le temps de s'ennuyer. C'est toutefois un peu compliqué (et violent) pour les tout-petits.
Sur le fond, le film fait l'éloge d'une médecine scientifique contre le charlatanisme religieux et, surtout, il est un chant d'amour d'un père pour sa fille.
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vendredi, 13 mai 2022
The Northman
Loin, très loin, dans l'Atlantique Nord, vit un peuple farouche, habile navigateur et surtout redoutable guerrier. Un jour de 895, par une mer démontée, de frêles drakkars sont de retour au pays, chargés de butin. A la tête de ses troupes, le roi regagne sa demeure, couvert de gloire et de richesses... mais blessé. Heureusement pour lui, une blondissime épouse botoxée l'accueille avec tendresse, en compagnie du jeune héritier du trône, Amleth.
La joie des retrouvailles se ternit rapidement, car la perfidie rôde. Le roi sent ses jours comptés, même s'il ne soupçonne pas la traîtrise dont il va être la victime. Il a juste le temps d'initier son fils à ses devoirs de guerrier, à coups de rots et de pets.
Hélas, hélas, trois fois hélas ! Le jeune Amleth ne peut empêcher l'inévitable. Il parvient toutefois à s'échapper. La force qu'il déploie dans le maniement des avirons aurait pu lui ouvrir la voie des Jeux Olympiques... si ceux-ci avaient été organisés à l'époque. Il doit se contenter de devenir un soudard, une brute épaisse pratiquant le pillage et le meurtre, laissant le viol à ses compagnons d'armes. Entre deux crimes de guerre, il a des visions étranges. Un jour, il sent qu'est venu le temps de se venger.
Ni une ni deux, voici l'invincible combattant se faisant passer pour un esclave et profitant d'un convoi commercial pour regagner son île. Là-bas, personne ne le reconnaît... et il va de surprise en surprise. Dans son malheur, il a du bol : il croise une jeune et jolie sorcière, qu'impressionne son grand glaive bien dur. Du coup Amleth, devenu Bjornulf, se demande s'il doit écouter sa tête ou sa bite.
La résolution de ce terrible dilemme survient dans un gigantesque sauna naturel. Les deux principaux antagonistes, après avoir passé des heures sur le banc de muscu, vont s'y affronter à poil, sans se couper le zizi.
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mercredi, 11 mai 2022
The Duke
Ce duc est celui de Wellington, l'un des plus redoutables adversaires de Napoléon Bonaparte, connu notamment pour son rôle dans la bataille de Waterloo. Son portrait a été réalisé par Francisco Goya. L'objet constitue un bien patrimonial de grande importance outre-Manche, si bien qu'en 1961, les élites britanniques se sont mobilisées pour empêcher son départ aux États-Unis. Cependant, quelques semaines plus tard, le tableau fut volé à la National Gallery.
C'est à ce moment-là qu'entre en jeu un drôle de lascar, Kempton Bunton, un chauffeur de bus retraité, progressiste et gouailleur, qui a repris du service dans une compagnie de taxi pour arrondir ses fins de mois, son épouse Dorothy continuant, malgré son âge avancé, à faire la bonniche dans une famille bourgeoise.
Ces personnages sont incarnés par deux acteurs formidables, Jim Broadbent et Helen Mirren. Le premier, habitué des seconds rôles, est sans doute moins connu du public français. On a toutefois pu le voir dans Cloud Atlas, la saga Harry Potter et plus récemment dans Paddington 1 et 2. La seconde confirme qu'elle peut décidément tout jouer, de la reine d'Angleterre (dans The Queen) à la femme de ménage, en passant par la mère d'un truand dans Hobbes & Shaw.
Ce vieux couple a l'air bancal, de prime abord : il y a beaucoup de mensonges et de non-dits entre eux. Mais c'est aussi une histoire d'amour qui dure, depuis des décennies. Entre eux, les répliques fusent. Ils m'ont faire rire... et ils m'ont touché, à travers la douleur qu'ils éprouvent en repensant au décès de leur fille.
Bien que désespéré au fond, Kempton essaie de prendre la vie du bon côté et de faire bouger les choses. Au début de l'histoire, on le voit lancer une croisade contre le paiement de la redevance par les retraités et les vétérans de l'armée. Il va jusqu'à rendre son poste de télévision inapte à recevoir la BBC pour justifier son refus de payer la taxe ! C'est vraiment savoureux.
Le procès est aussi l'occasion d'assister à quelques moments de bravoure. Les dialogues (à savourer de préférence en V.O. sous-titrée) sont vraiment bien écrits ... et servis par des comédiens hors pair. Je ne dirai pas comment tout cela se termine. Sachez toutefois que le film a pris quelques libertés avec l'histoire réelle qui l'a inspiré.
P.S.
A la fin, nous avons droit à un clin d’œil cinéphilique, puisque, moins d'un an après avoir été volé, le tableau est apparu dans un célèbre film de fiction... que les héros sont allés voir au cinéma !
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mercredi, 04 mai 2022
Doctor Strange in the multiverse of madness
Il a fallu attendre plus de cinq ans après la sortie du premier Doctor Strange pour voir débouler la suite dans les salles obscures. Aux manettes se trouve désormais Sam Raimi, qui a jadis réalisé ce que j'estime être les meilleures adaptations cinématographiques de Spider-Man (avec Tobey Maguire)... dont le dernier volet des aventures (coïncidence ?...) fait lui aussi intervenir le "multivers".
C'est (avec l'inventivité graphique des décorateurs et des spécialistes des effets spéciaux) l'un des atouts de ce long-métrage, qui met le héros en contact avec d'autres versions de lui-même. (Conclusion : notre univers a la chance de posséder le "meilleur" Doctor Strange... cool, non ?)
J'ai eu un peu peur au début : on découvre notre Stephen avec la coupe de cheveux d'un hipster en train de faire de la gymnastique devant un fond vert, en compagnie d'une adolescente dont on sent qu'elle va nous lui casser les pieds pendant deux bonnes heures. Tous deux sont opposés à un méchant très très méchant.
... mais ce n'est pas le principal antagoniste qu'il va leur falloir vaincre. Plus forte que la créature démoniaque est... une sorcière, dont les pouvoirs, déjà bien grands, sont démultipliés par l'usage d'un grimoire maléfique... Faut pas faire chier la dame ! Dans le rôle, Elizabeth Olsen a la chance d'incarner deux versions très différentes d'elle-même. L'actrice s'en sort bien, même si la séquence de la "maman grizzli" (quand la sorcière a pris possession du corps d'une mère de famille en apparence inoffensive) frôle le ridicule.
La première baston (avec la grosse bébête monoculaire) est la plus réussie. Les autres scènes m'ont semblé répétitives, un peu stéréotypées. Et puis ce personnage prêt à foutre en l'air des centaines d'univers parallèles pour avoir le plaisir de vivre avec les enfants qu'elle n'a pas pu avoir dans notre monde.... comment dire... c'est quand même très limite au niveau du scénario... et je ne parlerai pas de l'intervention d'un groupe d'Illuminati... un des plus mauvais moments du film.
En revanche, les effets spéciaux sont bluffants. J'ai vu cela dans la plus grande salle du cinéma ruthénois et, franchement, ça dépote. J'ai particulièrement aimé la scène qui montre deux personnages traverser plusieurs univers parallèles, ainsi que la bagarre (musicale...) entre deux versions de Strange. Sur le plan visuel, certains plans déjantés rappellent des scènes d'Inception. Vers la fin, une dernière bonne surprise nous est proposée avec la résurrection d'une version de Strange (grâce à un dreamwalking, un état second permettant de prendre possession d'un corps à distance). Sam Raimi s'est rappelé qu'il avait commencé sa carrière en réalisant des films de zombies (Evil Dead) !
Comme vous pouvez le constater, il y a à boire et à manger. Notons que les producteurs semblent vouloir profiter des longs-métrages sortis en salle pour "booster" les séries-maison, comme WandaVision et Loki, auxquelles certains événements font allusion. On sent aussi, de manière appuyée, la volonté de Disney de se plier aux règles du "politiquement correct". Désormais, les films de super-héros sont peuplés de "minorités visibles" et de femmes d'action (ce dont je ne me plains pas)... mais c'est à se demander si le mâle blanc hétérosexuel n'est pas en voie de disparition outre-Atlantique !
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L'Affaire Collini
Cette fiction à caractère documentaire est adaptée d'un roman de Ferdinand von Schirach (que je n'ai pas lu). Tout commence (croit-on) en 2001, à Berlin, où un industriel allemand renommé, Hans Meyer, est assassiné dans un hôtel par un inconnu.
L'opinion est choquée. Beaucoup de questions se posent quant à cet assassinat (dont on ne voit l'exact déroulement qu'à la fin, pour des raisons que je laisse à chacun le loisir de découvrir). On finit par apprendre que le meurtrier est un Italien vivant en Allemagne. Qu'est-ce qui a motivé son geste ? La Mafia est-elle impliquée ?
L'avocat commis d'office de Fabrizio Collini se pose les mêmes questions. Son client, mutique, ne veut rien dire. Pour Caspar Leinen (issu d'un couple mixte germano-turc), l'affaire comporte un gros enjeu : c'est la première fois que ce jeune avocat va plaider aux Assises. De surcroît, il est confronté à un conflit de loyauté. En raison d'une erreur d'identification de la victime, il n'a pas compris dès le départ qu'il devait défendre l'assassin d'un homme qu'il connait, un homme auquel il doit beaucoup... et dont il a fréquenté la petite-fille.
Cerise sur le gâteau : au tribunal, Caspar va affronter le redoutable avocat de la partie civile, Richard Mattinger, juriste réputé, qui fut son prof de fac (en droit pénal) et, à vrai dire, sans doute son mentor.
Petit à petit, le mystère s'éclaircit concernant les motivations de Collini. Son avocat se fait enquêteur, s'appuyant sur une petite équipe hétéroclite : un autre jeune avocat, une employée de pizzeria... et son propre père, libraire, qu'il n'avait pas revu depuis des années. Cette affaire est l'occasion pour Caspar de faire le point sur sa vie privée... et de faire des choix décisifs.
On suit le déroulement de la procédure pas à pas. Le film, pas très brillant sur le plan de la mise en scène, détaille le fonctionnement de la procédure criminelle. L'action culmine dans le procès, entrecoupé de pauses. On sent l'influence des films américains, même si, ici, la sobriété l'emporte sur le brio.
A l'arrière-plan se trouve la Seconde Guerre mondiale, plus précisément les années 1943-1945. Les Alliés anglo-franco-américains progressent dans la péninsule italienne, où ils ont débarqué à l'été 1943. Dans le même temps, Mussolini a été renversé par le roi et une partie des élites locales. Libéré sur ordre d'Hitler, il n'est plus à la tête que d'un État fantoche, la République de Salo. Désormais, la partie nord de l'Italie est occupée par les troupes allemandes, auxquelles s'opposent des résistants italiens, notamment communistes.
Le film alterne trois trames temporelles : celle de la fin de la Seconde Guerre mondiale, celle de la jeunesse de Caspar (dans les années1980-1990) et celle de l'année 2001. J'ai bien aimé l'effet de miroir entre certaines scènes se déroulant à deux époques différentes. C'est pertinent et techniquement bien fichu.
Plusieurs événements semblent avoir inspiré l'intrigue. Le public français cultivé pensera au massacre des Fosses ardéatines, mais, hélas, d'autres tueries se sont déroulées à la même époque, comme celle de Cibeno. Je pense aussi que les auteurs avaient en tête l'action du "boucher de Gênes".
Même si les scènes se déroulant dans les années 1940 sont parfois un peu trop appuyées, elles ont le mérite de rappeler des événements importants. Elles évoquent aussi la complexité de la situation de l'époque, avec notamment le rôle de l'interprète italien. Les acteurs de la partie contemporaine (2001) sont remarquables.
Sur le plan historique, le film s'appuie aussi sur un aspect méconnu (que j'ignorais), un texte de loi dont la révélation du contenu joue un rôle décisif dans le procès.
Quelques années après Le Labyrinthe du silence et Fritz Bauer, un héros allemand, le cinéma d'outre-Rhin prouve de nouveau qu'il est capable de regarder avec intelligence et honnêteté le passé trouble de son pays.
09:54 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire, allemagne
mardi, 03 mai 2022
Downton Abbey II
Je crois n'avoir jamais regardé un seul épisode de la série en entier... et je n'ai pas souvenir d'avoir vu le premier film. (Je ne l'ai pas chroniqué, mais il n'est pas impossible que je l'aie vu. En tout cas, je n'en ai gardé aucun souvenir.) Même si l'on ne connaît pas la série, se plonger dans ce long-métrage a comme un goût de déjà-vu pour les cinéphiles. On pense aux films de James Ivory (Retour à Howards End, Les Vestiges du jour), aux aventures d'Hercule Poirot (incarné par David Suchet) ou encore à Gosford Park (coécrit par Julian Fellowes... créateur de la série Dowton Abbey).
J'ai saisi l'occasion d'une séance en version originale sous-titrée. J'avais envie de me "rincer les oreilles" avec de l'anglais classique. Cela m'a aussi permis de remarquer que l'on parle une autre langue dans ce film : le français. En effet, l'intrigue a pour cadre deux propriétés : le château anglais où résident les Crowley et une résidence en France, sur la Riviera (comme disent les Britanniques), du côté de Nice.
Tout tourne autour de la matriarche, la comtesse de Grantham, interprétée avec gourmandise par Maggie Smith (une formidable actrice, vue il y a quelques années dans The Lady in the van). On apprend qu'elle vient d'hériter d'une demeure dans le Sud de la France, demeure qu'elle souhaite donner à l'une de ses arrière-petites-filles. Les raisons pour lesquelles un marquis français (dont elle affirme se souvenir à peine) a préféré léguer cette résidence à une aristocrate britannique plutôt qu'à sa propre famille sont mystérieuses. C'est l'un des secrets que l'intrigue va révéler.
A l'invitation du fils du marquis (dont la mère est jouée par Nathalie Baye), une partie de la petite troupe de Downton Abbey se lance dans un périple français (notamment en train bleu) pour se rendre dans ladite demeure. Quelques domestiques les accompagnent, le plus gros restant dans le château anglais, où s'installe une équipe de tournage américaine, qui va quelque peu perturber le fonctionnement de l'antique demeure.
L'un des atouts du film (et de la série, je suppose) est la richesse des personnages, aussi bien membres de la famille que de la domesticité. Cela laisse la place à de multiples intrigues secondaires, servies par une brochette d'acteurs et d'actrices de qualité.
Il serait trop long de relever ici le nom de toutes celles et ceux qui m'ont marqué. Je distingue toutefois Michelle Dockery, qui incarne Mary Talbot, petite-fille de la matriarche, veuve puis remariée à un aventurier qui la délaisse. Elle personnifie le charme, la délicatesse mais aussi la fermeté, quand il le faut. Je trouve que la comédienne a une classe folle !
Du côté des domestiques, c'est Sophie McShera qui sort du lot. Elle interprète Daisy Parker, une cuisinière que la venue de l'équipe de tournage met dans tous ses états... surtout qu'elle va devoir s'occuper de la vedette féminine de la troupe.
J'ai lu ici et là qu'il ne se passerait pas grand chose durant les deux heures que dure le film. Quelle erreur d'appréciation ! Certes, il ne faut pas s'attendre à des rebondissements extraordinaires, ni à des cascades explosives. Mais, dans les relations entre personnages, beaucoup de choses évoluent. Je pense que certains spectateurs ont été perturbés par le style de nos amis britanniques. On dit beaucoup de chose par sous-entendu, euphémisme, voire litote. C'est l'art de l'understatement, à savourer de préférence en version originale.
Mine de rien, cette tranche de vie, située à la fin des années 1920, en dit long sur la vie, l'amour, l'amitié, la fidélité, les espoirs et les craintes des uns et des autres. Du côté des aristocrates, on comprend que la réputation joue au moins autant que la fortune. Contre une vie confortable, les femmes ont échangé leur liberté, même si les choses commencent à changer durant l'Entre-deux-guerres. Du côté des domestiques, on dépend terriblement du bon vouloir des employeurs, quand bien même ceux-ci seraient relativement éclairés.
J'ai aussi apprécié le choc des cultures avec l'équipe de cinéma. Certains de ses membres sont chargés de personnifier une sorte d'exubérance décontractée, qui doit d'adapter aux us et coutumes du manoir... dont les occupants sont divisés quant à l'attitude à adopter vis-à-vis de ces intrus. Les spectateurs apprécieront aussi la mise en scène des questionnements concernant le passage du muet au parlant (déjà vu dans The Artist, ceci dit). Bien entendu, cette équipe de cinéma faisant elle-même partie d'une fiction, le scénario joue de la mise en abyme pour faire passer quelques messages à la profession...
Notons que le scénario prend soin de faire évoluer les personnages, du majordome à l'actrice vedette, en passant par la (encore jeune) lady ou l'enseignant désargenté.
J'ai passé un très bon moment, savourant à intervalle régulier les répliques bien senties. J'ai aussi été ému, dans la dernière partie, à l'occasion d'une scène, autour d'un lit. Même si la toute fin est trop sentencieuse à mon goût, je recommande vivement ce film.
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vendredi, 29 avril 2022
Le Stade
Ce documentaire en noir et blanc... et rouge (pour les incrustations) nous raconte la deuxième partie de la saison 2020-2021 de ce club de rugby "mythique", de mars à juin 2021. Je pense rien dévoiler aucun secret en rappelant que ce fut une saison exceptionnelle, conclue par un titre européen et le titre national, remportés tous deux contre la même équipe en finale (La Rochelle).
A l'arrière-plan se trouve la pandémie de covid-19 : on voit des personnes porter (plus ou moins rigoureusement) un masque, des stades vides de public, un effectif rarement au complet, que ce soit pour cause de maladie ou de blessure.
C'est l'un des mérites de ce film que de ne pas cacher la brutalité de ce sport, certes davantage réglementé qu'autrefois, mais désormais pratiqué par des immeubles ambulants, des boules de muscles dont il vaut mieux ne pas croiser le chemin. Certains regretteront le temps où un "quinziste" musclé sec pouvait faire office de demi ou d'ailier. Au très haut niveau, aujourd'hui, cela ne semble plus possible. Quelques scènes nous font entrapercevoir la quantité d'efforts à fournir par les athlètes pour acquérir la masse musculaire requise. On ne nous dit cependant rien de leur régime alimentaire.
La première partie relate principalement le début de la phase finale du championnat de France. La seconde est concentrée sur la Coupe d'Europe, notamment l'exploit réalisé en huitième de finale : la victoire en Irlande, face au Munster, jamais obtenue auparavant. A côté de certains moments épiques (très bien filmés, même si je regrette le faible nombre de vues du dessus), la finale (contre La Rochelle) laisse un goût d'inachevé, sur le terrain comme à l'écran. Mais, dans ce match, l'essentiel était de gagner.
La fin du documentaire souligne les difficultés à terminer la saison... mais, comme tous les bons clubs français sont allés très loin dans les coupes européennes, en juin, tout le monde est fatigué et les effectifs sont rarement au complet.
A l'issue de cette plongée dans la vie du club, on comprend qu'outre les efforts physiques, la répétition des schémas tactiques, l'habileté d'une équipe d'entraîneurs (autour du charismatique Ugo Mola) et le travail sur le mental, il a fallu... de l'argent. Ces dernières années, le premier budget (annuel) du Top 14 oscille entre trente et cinquante millions d'euros (39 millions pour la saison 2021-2022). Voilà une information qui fera sourire les spécialistes de football : le PSG qatari s'appuie sur un apport annuel de 620 millions d'euros, le budget du Stade toulousain correspondant à celui d'Angers ou de Brest, l'un des quatre derniers...
On peut faire le même type de remarque à propos des salaires des joueurs (hors contrats publicitaires personnels). Dans le Top 14, c'est le Sud-Africain Handré Pollard (qui a sans doute de lointaines origines françaises) qui est le mieux payé (1,19 million par an), le Français touchant le plus étant Antoine Dupont (du Stade toulousain), avec 600 000 euros. C'est à comparer à ce que gagnent les footeux (les trente mieux payés), de 300 000 à 3 millions d'euros ... par mois (3,246 millions pour Lionel Messi cette saison).
Pour apprécier pleinement ce documentaire, je pense qu'il faut quand même s'intéresser un peu au rugby... ou au physique des joueurs !
15:24 Publié dans Cinéma, Sport | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, occitanie, sport, sports, toulouse, toulousains, toulousain
mercredi, 27 avril 2022
Un Talent en or massif
Nicolas Cage coproduit ce film autoparodique, consacré à un acteur encore célèbre, qui connut naguère son heure de gloire, mais se contente désormais d'aligner les productions plutôt bas-de-gamme, qui ne lui assurent plus le même train de vie qu'auparavant. Du coup, le gars, que son épouse vient de quitter, se sent vieillir, à cours de moyen... sous le regard de sa fille adorée qui semble le trouver de plus en plus ringard. (La séquence liée à l'anniversaire est particulièrement pathétique.)
Le début est vraiment savoureux. Cage (dont je me suis toujours demandé s'il aurait eu la même carrière s'il n'avait pas été un Coppola) est très bon en has been, qui enchaîne les déconvenues. Notons toutefois qu'à intervalle régulier, il se ménage quelques scènes qui témoignent de son talent. Le meilleur intervient quand il dialogue avec la version jeune de lui-même, incontestablement plus fringante.
Pour échapper à la lose, Cage (le personnage) accepte la proposition d'un milliardaire espagnol douteux... qui se révèle être un fan. Entre les deux hommes naît une drôle de complicité (qui tend vers une bisexualité non assumée). La mise en scène maintient longtemps le doute quant à savoir lequel en cache le plus à l'autre.
Bien évidemment, cette histoire de fête d'anniversaire va déraper, d'autant que Cage (le personnage) est prié de faire l'agent secret (pour de vrai) pour la CIA. Cela devient du grand n'importe quoi, les spectateurs étant censés laisser leur souci de vraisemblance au vestiaire.
Bref, l'acteur sur le retour et papa bedonnant (re)devient un homme d'action, épaulé par des compères à peine moins amateurs que lui. Quand on supporte Cage (et sa moumoute) et qu'on accepte le principe de dérision, on suit avec plaisir des péripéties dont on se doute qu'elles ne peuvent pas mal finir.
Ce sera assez vite oublié, mais j'ai passé un bon moment.
P.S.
Sans être aussi dithyrambique que certains personnages du film, je partage néanmoins leur affection pour le film Paddington 2, l'un des running gags de l'intrigue.
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vendredi, 22 avril 2022
Et il y eut un matin
Ce matin succède à une nuit de noces, celles de deux jeunes Arabes israéliens. La veille, on a beaucoup mangé, bu, dansé. On a discuté aussi. Deux pères de famille comparent les réussites respectives de leurs fils, qui ont une bonne place à Jérusalem, dans des entreprises israéliennes. On est à la limite du concours de bite : c'est à celui qui a acquis le plus d'avantages, du téléphone à la voiture de fonction... remboursement de l'essence compris.
C'est un peu à l'image du film, qui évoque la complexité des rapports entre ces Palestiniens de l'intérieur et l’État juif. On tient aussi à nous montrer la diversité des comportements, côté palestinien. La famille du héros fait partie de la classe moyenne, laïque. Dans le village arabe, d'autres, à l'image du chauffeur de taxi, ont un niveau de vie plus modeste. En bas de l'échelle sociale se trouvent les travailleurs illégaux, des Palestiniens sans doute venus de Cisjordanie. Contrairement aux autres habitants du village, ils ne sont pas citoyens israéliens... et leurs patrons arabes profitent un peu de la situation. Il ne faut pas négliger une quatrième "catégorie" d'habitants : les voyous, qui tentent de prendre le contrôle du village... et qui s'accommodent très bien de la domination israélienne.
Le héros Sami a le cul entre deux chaises. Il laisse croire aux membres de sa famille qu'il est prêt à revenir habiter dans le village, alors qu'il a définitivement fait sa vie à Jérusalem. Il fait semblant de prendre du plaisir à la fête de mariage, un peu kitsch, alors que le citadin sophistiqué qu'il est a d'autres divertissements, quand il réside dans la grande ville. Il est même en train de s'éloigner de son épouse palestinienne et songe à s'installer chez sa maîtresse israélienne... et juive. Enfin, il ne semble guère s'indigner de la situation du "peuple" palestinien, contrairement à certains habitants du village, qui subissent régulièrement les mesures autoritaires prises par l'armée israélienne.
Le blocage de l'unique route menant à Jérusalem, pour une raison (au départ) obscure, va tout faire basculer. Vie privée, vie professionnelle et positionnement politique sont remis en question par le blocus du village (télécommunications comprises).
Eran Kolirin, auteur jadis de La Visite de la fanfare réussit à mêler l'histoire familiale aux méandres du conflit israélo-palestinien. Attention toutefois : le propos est fortement idéologisé. Derrière la façade moderne et aimable, le personnage de Sami est dépeint comme un égoïste, un bourgeois peu viril, plutôt lâche, auquel le séjour forcé dans son village natal va redonner le sens des "vraies valeurs".
On n'est pas obligé d'adhérer à l'intégralité du propos et l'on peut légitimement trouver certaines métaphores (comme celle des colombes) un peu lourdes. Le film n'en est pas moins intéressant pour le portrait qu'il dresse d'une catégorie de population méconnue.
P.S.
Mira, l'épouse de Sami, est interprétée par Juna Suleiman (dont je me demande si elle n'est pas apparentée au cinéaste Elia Suleiman). C'est une militante ardente de la cause palestinienne. Avec une partie de l'équipe, elle avait boycotté la première mondiale du film, au Festival de Cannes. Cela ne l'a pas empêchée d'être récompensée aux derniers Ophir (les César israéliens). Israël va donc être représenté aux Oscar par un film dont l'équipe dénonce publiquement et avec véhémence l'action du gouvernement.
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jeudi, 21 avril 2022
Le Secret de la cité perdue
Le titre fleure bon le film d'aventures, en terre exotique, avec végétation luxuriante, chaleur étouffante, énigme intrigante et trésor caché. Le contenu correspond grosso modo à l'étiquette... à ceci près qu'il s'agit d'une parodie. Les scènes oscillent donc entre les péripéties d'aventures trépidantes et la cocasserie la plus saugrenue, parfois graveleuse.
Dès le début, le ton est donné, avec la séquence dans un temple antique, les deux héros semblant piégés au milieu d'une armée de serpents venimeux. Un changement de cadre nous fait passer de la romance au danger... puis à l'ironie. c'est comme ça pendant presque tout le film, de manière plus ou moins réussie.
Le comique repose sur les dialogues et l'abattage des acteurs.
Sandra Bullock met toute son énergie à incarner Loretta Sage, romancière à succès atteinte par le syndrome de la page blanche. Elle s'est enrichie en écrivant des histoires d'aventures romantiques, pimentées d'un peu de sexe. Pour assurer la promo de son dernier bouquin, elle accepte d'enfiler une combinaison pailletée hyper-moulante... à tel point que "ça lui rentre dedans, par devant et par derrière"... Si l'accessoire ne permet pas d'ignorer que la presque sexagénaire est encore très bien gaulée, il va accompagner son personnage pendant un peu plus de temps que celui de la soirée de présentation...
De son côté, Channing Tatum prête ses muscles et sa belle gueule à Alan, le mannequin qui pose pour les couvertures des romans écrits par Loretta... à tel point qu'il a fini par se prendre pour le principal personnage masculin des histoires, le dénommé Dash, viril, courageux, irrésistible. Son entrée en scène, sur The Final Countdown (du groupe Europe) le soir de la présentation du dernier roman, vaut son pesant d'extensions capillaires...
Aux côtés de l'héroïne, on remarque aussi la présence de son éditrice, la pétulante Beth, que rien ne semble pouvoir arrêter.
Tout bon film d'aventures a besoin d'un méchant convaincant. Daniel Radcliffe (eh, oui ! Harry Potter) est chargé d'interpréter un milliardaire excentrique, un peu allumé... voire psychopathe. Ses adversaires finiront par le qualifier de "perfide", ce qui leur semble naturel, puisqu'il est... anglais ! (Parfois, j'adore Hollywood !)
Ledit milliardaire est à la recherche d'un mystérieux trésor, caché sur une île dont il a fini par découvrir la localisation. Pour mener son projet à terme, il a besoin des connaissances d'une personne qui a étudié cette civilisation disparue... ce qui est le cas de la romancière, autrefois mariée à un archéologue.
Tout ce petit monde se retrouve embarqué pour l'océan Atlantique, en zone tropicale. Les deux héros vont tenter d'échapper aux sbires du milliardaire, épaulés par un aventurier musclé, tatoué... les cheveux au vent :
L'irruption de Brad Pitt dans l'intrigue nous vaut certains des meilleurs moments comiques du film. Brad est... pittissime !
L'histoire est nourrie de rebondissements et de "détails qui tuent" : une victime que l'on transporte attachée à une chaise, une voiture qui ne fait pas du tout baroudeur, une héroïne glamour qui urine dans la rivière... ce que perçoit l'homme qui la suit !
Bon, voilà. ce n'est pas bien subtil, mais les acteurs ne se prenant pas au sérieux, on passe un bon moment.
23:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 20 avril 2022
My Favourite War
La "guerre préférée" de l'auteure de ce documentaire autobiographique est la "Grande Guerre patriotique", ainsi qu'on l'appelait en URSS, autrement dit la Seconde Guerre mondiale. Enfant, à la télévision, elle raffolait des fictions de propagande, produites dans la Patrie des travailleurs ou l'un de ses satellites. Quelques extraits nous en sont proposés au cours du film.
Ilze Burkovska Jacobsen est originaire de Lettonie, un des trois pays baltes coincés en haut à droite de la carte de l'Europe. Objet des convoitises rivales des différents États allemands et russes, le pays a connu une histoire mouvementée.
L'auteure n'en a vécu qu'une partie : la fin de la période soviétique puis la deuxième indépendance. Le film entremêle trois époques : la fin de la Seconde Guerre mondiale (période des grands-parents maternels), les années 1970-1980 (la jeunesse de l'auteure) et le début des années 2020.
Sur le plan formel, ce documentaire d'un genre particulier alterne prises de vue réelles (contemporaines), images d'archives (des années 1940, 1970 ou 1980) et images animées, chargées de mettre en scène l'enfance et l'adolescence d'Ilze.
Au début, le style est un peu déroutant, avec ces formes anguleuses, les yeux tout noirs et la texture qui semble de carton. Finalement, cela colle assez bien avec l'époque. A l'occasion de certaines scènes, les animateurs démontrent qu'ils sont tout de même capables de réaliser des prouesses. Notons que la voix off s'exprime en anglais, tandis que, de temps à autre, on entend des dialogues en russe ou en letton.
J'ai été touché par l'histoire de cette gamine, au départ bouffée par la propagande mélenchoniste soviétique, qui ne comprend pas pourquoi son grand-père a hérité jadis de l'appellation infâme d'ennemi du peuple (déportation à la clé). Elle ne saisit pas non plus l'intensité de l'amour qui unit ses parents, issus de milieux si différents, la fille du paysan réprouvé ayant épousé un jeune cadre dynamique du parti communiste.
Je ne vais pas dire pourquoi, mais, à un moment, l'héroïne est contrainte de mûrir plus rapidement que ce que son âge exige. Son regard devient plus lucide sur son entourage et les lieux qu'elle fréquente. Cela nous vaut de savoureux portraits du système scolaire letton (à la mode soviétique) et du mouvement des Pionniers, auquel l'adolescente adhère au moins autant pour assurer son avenir de journaliste que pour contribuer à améliorer sa vie quotidienne avec sa mère et son petit frère.
En revanche, quand le passé (celui de la guerre) percute la vie de l'héroïne enfant, c'est en général par un aspect macabre, de la menace représentée par des hommes armés à la découverte de mystérieux restes humains, dans le bac à sable de l'école.
Cela dure 1h20, c'est très chouette à voir et, pour un public français, cela dévoile une part méconnue de l'histoire européenne du XXe siècle.
21:38 Publié dans Cinéma, Histoire, Politique étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire, europe
dimanche, 17 avril 2022
Touroulis - Voyage entre le Larzac et le causse Comtal
Ce documentaire aveyronnais évoque, par son titre, un volatile particulier : l’œdicnème criard, qui passe les hivers en Afrique du Nord, mais le reste de l'année en France métropolitaine, en particulier dans l'Aveyron.
La carte ci-dessus (extraite de la plaquette LPO) met en évidence les zones où des couples ont été observés (donc les zones de reproduction). Ce sont principalement les causses du Larzac (au sud) et Comtal (au nord)... d'où le titre du documentaire, qui embrasse toutefois un espace plus important et diversifié :
Une histoire nous est contée par une voix off (censée être celle d'un de ces oiseaux), celle d'un territoire parcouru/survolé par les œdicnèmes. Du causse du Larzac, on est transporté dans les gorges (de la Jonte, du Tarn), puis du côté de Bertholène (près de Laissac, sur la carte ci-dessus). Le parcours s'achève au nord et nord-est de Rodez, avec en vedette (notamment) le "Trou de Bozouls" (que les âmes raffinées appellent "canyon") et la cascade de Salles-la-Source (dont l'écoulement d'eau fait l'objet de polémiques depuis des années).
L'une des qualités de ce film est le soin apporté aux images, qu'elles soient aériennes, terrestres, souterraines ou aquatiques. Les vues sont splendides, qu'il s'agisse de plateaux, de vallées ou de très gros plans des espèces, animales comme végétales. Ce soin, ajouté à la scénarisation sur (presque) quatre saisons, est (à mon avis) une référence au Farrebique de Georges Rouquier.
Une autre qualité est l'insertion d'incrustations, donnant le nom de tel animal ou telle plante. Cumulées aux informations données par le commentaire (pas super emballant, ceci dit), elles permettent au commun des mortels de parfaire sa culture environnementale.
En revanche, je n'ai pas bien vu l'intérêt d'ajouter des séquences montrant une petite famille pratiquant l'escalade ou la spéléologie. Là, on est à la limite du dépliant touristique... (Mais il est vrai que le film a été cofinancé par le Conseil départemental de l'Aveyron.)
Parmi les activités sportives, il manque la randonnée, à laquelle les Aveyronnais s'adonnent massivement et qui constitue un excellent moyen de découvrir les beautés d'un territoire. C'est dommage, parce que, le film ne durant qu'1h10, il y avait de la place pour quelques scènes pédestres. Cela n'enlève toutefois rien aux qualités visuelles de l'ensemble, un bien bel hommage à la faune et à la flore des régions calcaires centre-orientales du Rouergue.
16:46 Publié dans Aveyron, mon amour, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, occitanie, nature, écologie, environnement
samedi, 16 avril 2022
Seule la terre est éternelle
... pas les écrivains, puisque le romancier et poète Jim Harrison est mort en 2016. Ce documentaire, signé François Busnel et Adrien Soland, lui rend un vibrant hommage, tout en célébrant les beautés de l'Amérique de l'intérieur.
Vivant entre le Montana (où il avait hérité d'une demeure familiale) et l'Arizona (où il est décédé), Jim Harrison, qui fut, dans sa jeunesse adulte, un beatnik des villes, avait grandi à la campagne. C'est là qu'il a quasiment perdu son œil gauche, au cours d'une dispute avec une gamine du coin. À l'écran, on voit celui-ci tantôt ouvert, tantôt fermé, à l'image d'un physique déclinant. Âgé de plus de 75 ans, l'écrivain marche avec difficulté, tremble des mains, peine parfois à respirer... mais l'esprit est resté vif. C'est de surcroît un conteur doué.
Le film est nourri d'anecdotes, sur la famille et ses drames. Malgré les années passées, on le sent marqué par le décès du père et d'une sœur au cours d'une partie de chasse... et par la rudesse d'une mère autoritaire (sans doute luthérienne stricte), d'origine suédoise. Ses horizons se sont ouverts à l'école, grâce notamment à une prof francophile, qui lui a fait lire tout Stendhal, mais aussi Apollinaire, Rabelais... Est-ce la raison pour laquelle, lorsqu'il va pêcher, il porte une casquette sur laquelle est écrit, dans la langue d'Emmanuel Macron, "PÊCHE A LA MOUCHE" ? Mystère...
Il reconnaît son alcoolisme et les ravages qu'il a faits (au cas où on ne l'aurait pas remarqué). Il en profite pour détruire une légende : c'est à jeun que l'on écrit le mieux. Lui a besoin d'un calepin classique, de nombreux stylos (de marque Bic... même si des feutres fins Pilot sont aussi visibles sur son bureau), d'un mur blanc... et d'eau plate.
Ses débuts furent laborieux. C'est le journalisme qui a, dans un premier temps, rempli le frigo. A partir du succès de Légendes d'automne, la vie a pris un tour confortable. L'écrivain est même devenu proche de l'acteur Jack Nicholson, qui en avait marre des scénaristes d'Hollywood.
La grand talent de ce film, qui bénéficie d'une très bonne qualité d'image et de son, est la représentation d'une partie de l’œuvre de Harrison par des paysages, des collines enneigées et boisées du Montana au désert de l'Arizona. Aux souvenirs de l'écrivain (majoritaires dans la première partie) succède un joli road moavie, (passant par entre autres l'Idaho, le Wyoming et le Nebraska) dans le dernier tiers de l'histoire.
C'est un peu long, mais rafraîchissant et passionnant, tant les thématiques abordées sont nombreuses : de l'extermination des Amérindiens au féminisme, en passant par la pêche, la relation aux animaux sauvages (grizzli, loup) et la culture littéraire. J'ajoute que la musique d'accompagnement, jouée sur guitare sèche ou électrique douce, est parfaitement dans le ton.
21:29 Publié dans Cinéma, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, littérature, roman, romans, poésie
Les Animaux fantastiques 3
... Les secrets de Dumbledore. Je n'avais pas été particulièrement emballé par les deux premiers volets, mais la vision de la bande-annonce du troisième m'a donné envie de tenter l'expérience, en version originale sous-titrée.
Les vingt premières minutes lancent parfaitement le film. On commence dans un salon du thé, très chic, où se rencontrent les deux principaux antagonistes, anciens amants devenus adversaires mortels. Dans le rôle de Grindelwald, Mads Mikkelsen succède avantageusement à Colin Farrell et Johnny Depp. Il incarne vraiment très bien la puissance maléfique, servi, une fois n'est pas coutume dans cette série, par de très bons dialogues (sauf peut-être à la fin).
Lui succède une séquence enlevée, qui démarre par une naissance nocturne, avant de se poursuivre en cavalcade violente. C'est assez brillant.
Tout est (presque) dit par le titre intégral. Les effets spéciaux (somptueux) mettent parfaitement en valeur les créatures virtuelles (dont une nouvelle, une petite Qilin), avec lesquelles Eddie Redmayne interagit très bien (même si son personnage a toujours ce côté nunuche agaçant). Au niveau de l'image, c'est aussi souvent splendide, avec (heureusement), moins de plans sombres dans lesquels on a du mal à se retrouver.
L'arrière-plan politique est nourri de références aux années 1930 et à notre époque. La partie ayant pour théâtre Berlin, avec ces statues aux casques si caractéristiques et ces hommes de main (portant chapeau sombre, nuque rasée), fait immanquablement penser au régime nazi. Mais la facilité avec laquelle les foules (ici de sorciers) peuvent être manipulées par des complotistes, en vue d'une élection, évoque plutôt le XXIe siècle.
Du coup, j'ai été emballé, emporté par la féérie visuelle et l'intrigue trépidante, nourrie de rebondissements, certains étant prévisibles... d'autant que tout le monde dans la salle savait que Dumbledore ne pouvait pas mourir assassiné ! (Surprise au passage : l'histoire fait intervenir non pas un, ni même deux, mais trois Dumbledore !) Je recommande tout particulièrement la séquence de la prison, formellement très réussie et drôle à la fois. C'est une autre qualité de ce long-métrage, émaillé d'un humour savamment dosé et plutôt bon enfant. La conclusion, en haute montagne, au Bhoutan, est particulièrement inspirée.
Dans la salle, les ados et les adultes ont été captivés pendant plus de deux heures.
14:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mercredi, 06 avril 2022
Les Bad Guys
Ce film d'animation (visible par les pas trop jeunes et les adultes) est produit par DreamWorks et réalisé par... un Français : Pierre Perifel. Les "mauvais garçons" (ou "sales types") sont des as de la cambriole, qui vont se voir proposer l'occasion de se racheter.
Loup (Pierre Niney dans la VF) est le chef de la bande. Charismatique et charmeur, il a toujours un plan de secours en poche. De temps à autre, il lui arrive de "faire son Clooney", référence transparente à la série de films Ocean's.
Serpent est son meilleur ami. Sans pitié dans les affaires, il a un péché mignon : les cochons d'Inde, d'autant plus savoureux qu'ils sont gentils.
Requin est le gros bras de la bande... très habile aussi dans les déguisements. Cela donne lieu à quelques scènes particulièrement cocasses. Il est doublé par Jean-Pascal Zadi (oui, celui de Tout Simplement Noir).
Son principal acolyte est Piranha. Petit mais costaud, il est redoutable par sa force physique... et ses problèmes gastriques, qui enchanteront les petits comme les grands !
Cette bande de mecs ne serait rien sans Tarentule, l'as du piratage informatique, un personnage dont l'animation se révèle vraiment virtuose.
Toutefois, mon coup de cœur est un autre personnage féminin : la renarde Diane Foxington, gouverneure de Californie qui ne s'en laisse conter par personne. C'est une femme engagée, brillante... qui réserve quelques surprises. Alice Belaïdi lui prête sa voix, avec talent.
L'intrigue comme la mise en scène fourmillent de références. Dès le début, la conversation dans un diner fait penser à Tarantino. D'autres allusions à Pulp Fiction sont présentes dans le film. On pense aussi évidemment à la série de films mentionnée plus haut, avec George Clooney. Quant aux policiers (et à leur cheffe), ils semblent sortir tout droit d'un manga. Les gags sont souvent visuels. Les petits aiment. Les allusions sont plutôt destinées aux adultes.
J'ai été enchanté par cette histoire. Elle est pleine de rebondissements et quasiment chaque scène contient une petite surprise ou un effet de décalage, qui lui donne une saveur particulière. J'ajoute que la musique (orchestrale) est chouette. C'est sans doute la meilleure comédie sortie ce 6 avril.
21:54 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 05 avril 2022
De nos frères blessés
Ce film relate (de manière un peu romancée) la fin de vie de Fernand Iveton, militant communiste pied noir, engagé aux côtés du FLN dans la lutte pour l'indépendance algérienne... contre l'armée française, dans la seconde moitié des années 1950.
Au départ, j'ai eu du mal à reconnaître Vincent Lacoste dans le rôle. Il est vrai que la moustache, ça vous change un homme. Mais il est surtout très bon. J'ai été moins convaincu par le choix de Vicky Krieps pour incarner sa compagne. Elle parle français avec un accent anglais... alors qu'elle est censée être d'origine polonaise ! Le côté sentimental de l'intrigue m'est passé un peu au-dessus de la tête.
J'ai été davantage intéressé par la mise en scène du contexte de la Guerre d'Algérie. Sans surprise, cette fiction engagée nous présente une version de gauche. Les indépendantistes sont de courageux résistants, victimes de l'ignoble État colonial raciste. On a quand même droit une fois ou deux à la mention de certains des "exploits" des membres du FLN et de leurs sympathisants... mais je pense que cela a glissé sur le public, tant la réalisation est en empathie avec le héros et ceux qu'il soutient.
Les scènes de tribunal militaire sont prenantes. Au début, on se dit que tout est joué d'avance. Mais, au fur et à mesure des interrogatoires, on est amené à penser qu'il y a de l'espoir, la procédure étant suivie de manière assez scrupuleuse. La conclusion nous ramène sur terre... et le héros aussi, dont on finit par découvrir qu'il se berçait d'illusions sur la future Algérie indépendante. (Seuls les imbéciles ont pu croire que les types du FLN allaient instaurer une démocratie multiculturelle de ce côté-là de la Méditerranée.)
Je recommande malgré tout ce film pour sa peinture d'une époque et pour la découverte d'un destin particulier, celui d'un pied noir pro-FLN qui n'a sans doute jamais versé le sang d'autrui.
P.S.
Parmi les seconds rôles figure Henri, incarné par Yoann Zimmer, vu l'an dernier dans Des Hommes, dans la peau d'un Depardieu jeune, lui aussi empêtré dans le conflit algérien.
22:10 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 02 avril 2022
Retour à Reims (fragments)
Ce documentaire militant s'inspire d'un essai de Didier Eribon (que je n'ai pas lu). A travers la redécouverte de l'histoire familiale (avec laquelle l'auteur / la narratrice dit avoir jadis coupé), le film dessine une histoire (subjective) de certaines catégories populaires (essentiellement le monde ouvrier), de l'Entre-deux-guerres (période des grands-parents) jusqu'aux années 1980-1990 (à l'âge adulte de l'auteur).
Le grand intérêt du film (et son originalité par rapport à la forme écrite) est le montage d'images anciennes qu'il propose, composé d'extraits de films de fiction et (surtout) de reportages d'époque. Hélas, ces images ne sont jamais contextualisées au moment où elles passent à l'écran. Il faut attendre le générique de fin pour découvrir de quand les extraits datent, en vrac. Du coup, parfois, j'ai eu l'impression que les périodes ne concordaient pas tout à fait. Ainsi, quand il est question des années 1950, il me semble que, parfois, ce sont des images de la fin des années 1960 qui nous sont projetées. Plus gênante encore est, pour illustrer la montée du vote FN chez les ouvriers dans les années 1980-1990, l'utilisation d'images d'archive présentant Jean-Marie Le Pen... dans les années 1970, à l'époque où son jeune mouvement ne rencontrait aucun succès.
Quoi qu'il en soit, le travail de documentation semble avoir été énorme et les extraits proposés sont intéressants. On en voit peu datant de la période des grands-parents. Le propos est centré sur la voix-off, qui lit des passages du livre. C'est la grand-mère maternelle qui est au centre de cette partie. C'était une femme libre, à qui le rôle de fidèle épouse au foyer ne convenait pas. Au début des années 1940, elle a même osé partir travailler volontairement en Allemagne... Notons que le livre, comme le documentaire ne jugent pas... enfin, pas ce genre de comportement.
La période d'après-guerre est plus fournie. Au niveau de la fiction, cela va de Jean-Luc Godard à Coline Serreau. Au niveau reportages et archives, c'est foisonnant, sur le travail des ouvriers, le rôle des femmes, la place des immigrés. L'accent est mis successivement sur ces trois aspects, l'un venant compléter l'autre. L'idée générale est que l'on trouve toujours plus opprimé que soi.
J'ai apprécié que le réalisateur ne contourne pas la difficulté du basculement d'une partie du vote ouvrier. Mais je trouve que l'état des lieux comme l'analyse des causes sont superficiels, voire biaisés.
Sur le plan historique, le film semble ne pas savoir que, depuis qu'elle a été identifiée en tant que telle, la "classe ouvrière" a toujours été profondément divisée. A la fin du XIXe comme au début du XXe siècle, une partie du monde ouvrier s'identifiait plutôt à la droite, voire à l'extrême-droite. De plus, le film occulte complètement l'influence démocrate-chrétienne dans le milieu, influence concurrente de celle des marxistes (ceci expliquant peut-être cela). Enfin, les nouveaux bataillons d'électeurs populaires de l'extrême-droite ne proviennent pas uniquement du PC ou du PS. Il s'agit parfois aussi d'anciens électeurs de la "droite sociale". Le réalisateur est sur une ligne néo-marxiste, qui attribue au supposé renoncement des gouvernements de gauche le basculement de l'électorat ouvrier. Il sous-estime considérablement les évolutions sociétales, à commencer par le (relatif) embourgeoisement d'une partie de la classe ouvrière. Eh, oui ! Le niveau de vie des Français (classe ouvrière comprise) s'est élevé entre les années 1950 et le début du XXIe siècle... mais de cela les spectateurs ne sont pas informés.
Je ne vais pas m'éterniser mais ce film est une petite déception. Si l'on aime les images d'archives (souvent pas vues depuis des années), il mérite le détour. Sinon, on peut se passer d'une œuvre qui se conclut sur les gilets jaunes et la "convergence des luttes".
Uncharted
"Non cartographié" est l'adaptation d'un jeu vidéo qui a mis un peu de temps à sortir en salle, en partie à cause de la pandémie, en partie à cause des tribulations de la distribution. L'intrigue s'inspire des aventures d'Indiana Jones, d'Allan Quatermain... et sans doute aussi d'ersatz comme À la poursuite du diamant vert. Les personnages, principaux comme secondaires, sont taillés à la hache. Commençons par le héros,
SIMPLET
Tom Holland (le dernier Spider-Man en date) est chargé d'incarner Nathan, un jeune Américain sympathique, bien qu'un peu stupide. Il mâche ostensiblement des chewing-gums, ne sait pas apprécier le bon vin, a tendance à parler avant de réfléchir, mais c'est un chic type : il est gentil et honnête, deux qualités qui permettent de le rendre supportable... surtout dans ses interactions avec :
TONTON
Interprété par Mark Wahlberg (qui a failli se retrouver à la place de Tom Holland), il cabotine à mort... mais je trouve que cela fonctionne. L'humour qui traverse cette histoire de chasse au trésor est le bienvenu et cela passe souvent par lui. Toute l'ambiguïté du personnage réside dans son rapport au héros. Celui-ci est orphelin et Sully pourrait constituer une figure paternelle de substitution... s'il n'était pas aussi sournois. Dans ce domaine, il est concurrencé par les deux principales figures féminines, notamment :
TATI (qui n'est pas l'épouse de "Tonton")
... alias Braddock, dans le film. Elle a les traits de Tati Gabrielle, qui incarne un personnage tellement venimeux qu'on serait tenté de l'appeler "Tatie Danielle". Elle est en concurrence avec une autre jolie jeune intrigante :
MILF
En dépit des conseils avisés de Sully, Nathan est très tenté par un rapprochement physique avec Chloe Frazer (qui, comme Braddock, a sans doute jadis couché avec "Tonton"). Belle, intelligente, sportive, elle a tout pour plaire... sauf, peut-être, sa malhonnêteté. Je suis quand même surpris que les scénaristes (une bande de mecs, soit dit en passant) n'aient pas pensé à introduire un personnage féminin un peu plus positif. Bon, ceci dit, globalement, l'histoire a tendance à présenter l'espèce humaine (tous sexes confondus) sous un jour assez sombre.
Ce quatuor (et d'autres encore) est lancé dans la quête du trésor de Magellan, au cours d'un jeu de pistes qui va mener les protagonistes des États-Unis aux Philippines, en passant par l'Europe. On a ainsi l'occasion de croiser Antonio Banderas, dans un énième rôle caricatural.
Le film, à mon avis, mérite le détour en partie grâce à ses scènes d'action (émaillées d'humour). On a un avant-goût de la première (une sortie d'avion quelque peu périlleuse) dès l'introduction. On revoit plus tard cette scène, sous un autre jour. Elle prend encore plus de saveur. Elle est mise en scène de manière percutante. (Signalons qu'aux manettes se trouve Ruben Fleischer, qui s'est déjà illustré avec Venom et Retour à Zombieland.)
L'autre séquence marquante est celle de la découverte puis de l'hélitreuillage de deux navires anciens, totalement irréaliste, mais bien filmée et bien montée.
Si les qualités du film sont indéniables, il faut quand même faire preuve d'indulgence avec le scénario et le jeu des acteurs. C'est une agréable détente, sans plus.
P.S. I
Le public français n'a peut-être pas compris le sous-texte d'une scène, un dialogue furtif entre le client d'un centre de vacances et le héros, sur une plage.
Ce client est interprété par Nolan North, très connu aux États-Unis pour ses doublages et sa participation à des séries télévisées... Surtout, il est la voix de Nathan Drake dans la version anglo-saxonne du jeu vidéo. (Cela confirme indirectement que les scénaristes ont fait le choix de rajeunir le personnage principal, sans doute pour attirer le public adolescent.)
P.S. II
En général, les spectateurs n'ont pas encore quitté la salle quand débarque la première scène post-générique. Elle est consacrée à un personnage de l'histoire appelé à réapparaître dans une suite...
P.S. III
... suite amorcée par la seconde scène post-générique (que je suis le seul spectateur de la séance à avoir vue), qui présente deux des protagonistes, dans une situation délicate, au cours d'une nouvelle chasse au trésor. Mais j'ai surtout adoré voir émerger une charmante boule de poils d'un petit sac à dos !
16:47 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 31 mars 2022
Icare
Ce film d'animation luxembourgeois puise son inspiration dans la mythologie grecque, plus précisément l'arc narratif crétois. L'histoire entremêle ainsi les destins de Minos, Pasiphaé, Ariane, Thésée, Dédale et son fils Icare.
Les amateurs de contes anciens retrouveront les histoires de leur jeunesse, autour de la naissance puis des méfaits du Minotaure, de l'habileté de Dédale, de l'impétuosité d'Icare et de l'héroïsme de Thésée. Les auteurs y ajoutent une touche personnelle, modifiant légèrement la trame des mythes. L'image est soignée, de texture numérique.
Au doublage, on reconnaît quelques voix : celle de Féodor Atkine dans le rôle du vieil architecte talentueux, celle de Camille Cottin en Ariane, fille de roi sûre de sa beauté... et qui rêve du grand amour.
Cependant, j'ai été déçu par le traitement de l'intrigue. Les auteurs se sont concentrés sur la relation amicale qui naît entre Icare enfant et le jeune Minotaure. C'est un aspect original par rapport au mythe, mais je ne vois pas trop où ils ont voulu nous mener. Ces vieilles histoires sont à manier avec précaution. Elles sont le résultat de millénaires de sagesse. Elles évoquent des intemporels, comme la démesure politique, l'amitié, l'amour, l'inconscience de la jeunesse et la trahison.
A part un éloge (maladroit) de la différence, je ne vois pas trop quoi tirer du gloubi-boulga qu'on nous sert. Je m'attendais à mieux. Mais cela se suit sans déplaisir, et cela marche plutôt bien auprès des gamins.
20:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 25 mars 2022
Ambulance
Michael Bay est une sorte de Roland Emmerich au petit pied : versé dans le film à grand spectacle pas subtil, il a été capable de produire quelques grands succès populaires comme d'authentiques daubes (à gros budget).
Ici, les héros sont deux frères d'adoption, un Noir et un Blanc. Le premier, incarné par Yahya Abdul-Mateen II (qui a déjà traîné sa carcasse dans Aquaman et Matrix Resurrections), est un vétéran d'Afghanistan tombé dans la précarité. Marié, père d'un bébé, il voudrait la jouer réglo et bien s'insérer dans le monde des civils, quitte à accepter le premier travail venu. (On sent la volonté des scénaristes de proposer un modèle positif à la frange du public issue des ghettos.)
Surtout, Will voudrait éviter d'avoir à solliciter l'aide de son frangin blanc, Danny-la-débrouille, un flambeur un peu cinglé, toujours entre deux coups. Dans le rôle, Jake Gyllenhaal s'épanouit délicieusement dans la dinguerie.
Une fois cette rangée de perles enfilée, on nous conduit à un spectaculaire braquage de banque, qui, bien évidemment, ne se déroule pas comme prévu. L'équipe de gros bras frappadingues réunie par Danny a beau avoir minutieusement préparé le coup, l'antigang est à leurs trousses... et le sentimentalisme de deux flics de Los Angeles menace de tout faire foirer. Cela donne une séquence survitaminée, avec une caméra un peu trop fébrile à mon goût, mais globalement efficace.
En découle la fameuse poursuite, qui va durer (presque) tout le reste du film : les deux braqueurs rescapés du groupe ont pris en otage une ravissante infirmière (Eiza Gonzalez, vue dans Hobbes & Shaw), dans un camion-ambulance où se trouve aussi un policier gravement blessé. Entre la volonté de profiter du pognon mal acquis et le désir de ne pas commettre de mal irréparable, les voleurs sont partagés, à des degrés divers.
Cette deuxième (longue) partie frôle dangereusement l'invraisemblance : dans la vraie vie, les fuyards auraient été bien plus rapidement rattrapés... mais cela nous aurait notamment privés de l'exceptionnelle opération à ventre ouvert, dans un véhicule en marche. L'infirmière y fait montre de sa dextérité à explorer les tripes du policier blessé, qui a le mauvais goût de se réveiller en pleine boucherie chirurgie expérimentale ! Là, je kiffe. Les traits d'humour noir atteignent leur cible, alors que la trame chaotique de l'amour fraternel est assez convenue.
Bon, voilà, c'est trépidant, vraiment prenant, dans une grande salle, sur un très grand écran, avec du gros son, de grosses bagnoles, de gros guns, de grosses voix, de grosses burnes... et de gros ovaires. (L'infirmière a beaucoup de cran.) Hélas, cette emballante farandole est gâchée par les dernières minutes, engluées dans les bons sentiments. Bay aurait dû resserrer son histoire autour de la déglingue et des cascades. Cela aurait pu donner un excellent divertissement régressif.
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samedi, 19 mars 2022
Notre-Dame brûle
J'avais quitté Jean-Jacques Annaud en 2015, avec Le Dernier Loup. Le revoici avec un film à grand spectacle, ayant bénéficié de nombreux financements publics... et du mécénat Pinault. C'est une sorte de fiction à caractère documentaire.
La début met en scène les heures précédant l'incendie. On nous propose d'abord de superbes vues de Paris, l'un des plans s'achevant derrière la cathédrale, avec la Tour Eiffel en ligne de mire, sur la gauche. Ce côté carte postale est très présent dans le film, qui prend parfois l'allure d'un dépliant touristique consacré à la capitale et à Versailles.
Le scénario comme la réalisation ne tranchent pas franchement entre les différentes hypothèses concernant le déclenchement du feu. Entre l'abandon de mégots de cigarettes mal éteints dans une zone inflammable, les travaux de coupure et de soudure réalisés sur place et les conséquences de courts-circuits (liés à une installation électrique vieillissante... ou à l'action des pigeons !), chacun est laissé libre de choisir.
La suite immédiate n'est pas à l'honneur des Français. La sécurité de la cathédrale apparaît chancelante, reposant sur des personnes très âgées (censées être capable de monter rapidement des dizaines de marches d'escalier) ou des travailleurs précaires, formés à la hâte. L'arrivée des secours est retardée par les embouteillages parisiens, l'incivisme de certains conducteurs, piétons ou cyclomotoristes... et les travaux de voirie, qui ont empêché au moins un camion de pompiers de rejoindre rapidement les lieux. (Hidalgo, démission !) Quant au régisseur en chef de la cathédrale (qui possède la seule clé capable d'ouvrir une serrure stratégique), il met un temps fou à revenir au centre de Paris, ratant sa correspondance RER (Pécresse, démission !) puis peinant à trouver un "vélib" en état de fonctionner !
Arrivent enfin à l'écran ceux qui vont occuper l'essentiel du reste de l'action : les pompiers. Le film est un hommage à leur courage et leur ingéniosité, qui ont sans doute sauvé l'édifice d'un effondrement total. Les plus convaincants sont les acteurs campant les pompiers de terrain, les "bleus" comme les expérimentés. Je suis moins emballé par ceux qui incarnent les officiers supérieurs, en particulier Samuel Labarthe, que j'ai déjà vu bien meilleur ailleurs. (Qu'elle est loin, la Comédie française !)
Des hommes embarqués dans un maelstrom de feu, Annaud sait faire. Sur un très grand écran, c'est incontestablement spectaculaire. Le cinéaste sait créer une tension dramatique autour de l'action des pompiers. Certains plans sont particulièrement réussis, notamment quand il est question du plomb en fusion, mais aussi à l'intérieur de l'église, le mobilier étant tour à tour touché par le feu et par l'eau. Autre point fort : la séquence qui mène au sauvetage (en deux temps...) de la couronne d'épines.
Tout cela aurait pu donner un film formidable, si je n'avais pas quelques réserves à émettre. Il y a tout d'abord la direction d'acteurs. Si on met de côté l'action des pompiers de base, le reste est vraiment médiocre, très appuyé. (Le pire du lot est le sacristain en chef de la cathédrale, caricatural au possible.) J'ai aussi été gêné par l'aspect "cul-bénit". Qu'on rende hommage aux croyants sincères qui ont été bouleversés par les ravages subis par l'édifice, d'accord, mais pas au point de faire de la propagande religieuse. Le coup de la gamine, qui échappe à sa mère (ainsi qu'à tous les adultes présents sur place) pour allumer son petit cierge... le seul qui finit non éteint dans une cathédrale obscure... c'est un peu too much pour moi.
P.S.
Dans le cadre de la Fête du court-métrage, nous avons eu droit, en guise d'amuse-gueule, à Bouquet d'illusions (dit aussi The Triple-Headed Lady), de Georges Méliès.
23:55 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
King
Ce roi est... un lionceau, clin d’œil transparent à la production Disney, à laquelle le réalisateur David Moreau emprunte une partie des codes, quand il ne pioche pas chez Spielberg. Comme chez le réalisateur barbu, les adultes sont à côté de la plaque et ce sont les enfants les moteurs de l'intrigue.
Mention spéciale à Lou Lambrecht, chargée d'incarner une préadolescente non conformiste, victime de cyber-harcèlement. Je suis nettement moins convaincu par les autres interprètes, adultes comme enfants. Soit ils surjouent, soit ils sont empêtrés dans des personnages taillés à la hache.
Évidemment, le personnage le plus intéressant est celui du lionceau... une créature virtuelle dans la plupart des scènes. Et pourtant, il semble plus vrai que nature... et très très mignon. Quand on aime les félins, on ne peut pas ne pas craquer pour lui.
Et l'histoire dans tout ça ? Cousue de fil blanc, parfois invraisemblable, mais rythmée, avec un poil d'humour, de l'émotion et des rebondissements (assez prévisibles). Notons que les auteurs ont eu l'intelligence de faire évoluer positivement plusieurs personnages, adultes comme enfants, en particulier le frère de l'héroïne (qui commence à mûrir après avoir reçu un bon coup de poing dans les burnes) et le fils du traqueur de lion, une véritable tête à claques rivée à son portable (persuadé qu'écouter fort du rap bas-de-gamme fait de lui un rebelle).
Les enfants adorent et l'on passe un gentil moment.
P.S.
Dans le cadre de la Fête du court-métrage, en guise hors-d’œuvre, nous avons eu droit à Chute (Down), un petit film pétillant, à l'humour macabre... pas tout à fait adapté au public de la salle (qui n'y a d'ailleurs guère prêté attention).
22:45 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 11 mars 2022
Belfast
Kenneth Branagh revisite son enfance nord-irlandaise, entre pastilles de bonheur et éclairs de violence. Le ton est donné dans les cinq premières minutes. On commence par voir ces jeunes filles portant jupe et grandes soquettes blanches, dans un monde en noir et blanc où la guerre civile fait soudain irruption. La suite va osciller entre ces deux ambiances et c'est l'un des (rares) mérites de cette histoire, qui parvient à rendre crédible cette juxtaposition. Dans la vision de l'enfant, la perception du drame en gestation est incomplète, entachée d'incompréhension... et parfaitement compatible avec des moments de bonheur, faisant intervenir les grands-parents, les parents, la jolie blonde de l'école ou encore l'activiste à couettes.
C'est de surcroît superbement mis en images. Branagh s'appuie sur son directeur de la photographie habituel, qui lui a déjà sauvé la mise à plusieurs reprises. Mais le résultat a un côté carte postale qui finit par lasser.
... parce qu'au final, j'ai trouvé ce film décevant. Je l'ai vu en version originale sous-titrée et je n'ai pas trouvé cela très bien interprété. Clairement, le gamin surjoue. De plus, trop de personnages parlent comme dans des livres. Ils ont beau avoir un fort accent irlandais, ils causent un peu trop bien. S'ajoutent à cela une brochette de clichés dans la caractérisation. Les relations chaotiques entre les parents sont de l'ordre du vu et revu. Les grands-parents (pourtant incarnés par Judi Dench et Ciarán Hinds) sont des caricatures ambulantes. À leur sujet, on peut quasiment tout prévoir. Et que dire de cette rue populaire, où tout semble si propre, même après un attentat ?
Quant au conflit nord-irlandais, il sert principalement de toile de fond et d'accélérateur dramaturgique... mais il vaut mieux connaître les dessous de l'Histoire pour comprendre les sous-entendus.
Bref... bof.
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jeudi, 03 mars 2022
Rien à foutre
Il est rarement aisé de choisir un titre judicieux pour son film. Ici, a-t-on hésité entre Rien à branler et J'm'en bats les couilles ? Difficile à dire. Cela correspond à ce que pourrait déclarer l'héroïne, Cassandre, hôtesse de l'air dans une compagnie low cost basée à Lanzarote, dans les îles Canaries.
Cette hôtesse a les traits et le corps d'Adèle Exarchopoulous. J'ai écrit le corps, parce qu'une hôtesse, c'est, pour beaucoup de passagers (et les cadres de la compagnie), d'abord un sourire et une paire de jambes (dont il faut soigner l'apparence).
La jeune femme voyage à l’œil, voit du pays, rencontre du monde, boit beaucoup d'alcool, baise à droite à gauche sans souci du lendemain et passe une partie de ses loisirs à danser sur de la musique moderne assourdissante. Pour certains, cela ressemble à une vie de rêve. Sauf que Cassandre fait un peu la gueule et qu'elle a des moments de cafard. C'est la facette la plus intéressante du personnage... malheureusement, je ne la trouve pas bien traitée (ou jouée) dans la majorité du film.
Celui-ci a aussi un aspect documentaire. Qu'est-ce que c'est que de travailler dans ce genre de compagnie ? Quelles consignes sont données par les patrons ? Comment gère-t-on les passagers ? À quoi ressemble vraiment la vie loin des paillettes, quand les hôtesses ont ôté leur habit de lumière ? Pour qui ne connaît rien de ce milieu, c'est instructif. On en apprend aussi sur les conditions salariales et les perspectives de carrière. Le tableau n'est pas exclusivement à charge. L'héroïne, d'abord simple hôtesse "junior" (le bas de l'échelle), a la possibilité de devenir "numéro 1" (cheffe de cabine), avec une meilleure paye... mais aussi des contraintes plus grandes. Le rêve de ces jeunes femmes ? Se faire embaucher par une compagnie prestigieuse, qui offre un meilleur statut à ses employées. On ne sait pas ce que deviennent celles qui décrochent en cours de route.
Dans les deux premiers tiers, c'est un peu long, un peu déprimant. (J'étais triste pour ces jeunes femmes.) Le film prend une autre tournure dans le dernier tiers de l'histoire. Cassandre passe ses congés dans son pays natal, la Belgique, chez son père. Elle retrouve ses amis, sa sœur cadette... et les problèmes qui vont avec. J'ai vraiment aimé cette partie, qui commence pourtant mal, avec l'incompréhension entre le père (agent immobilier) et sa fille aînée (qu'il traite avec condescendance). Petit à petit, les scènes du quotidien donnent de l'épaisseur au portrait de l'héroïne, qui semblait assez superficielle au départ. L'intrigue se conclut à Dubaï, en pleine pandémie.
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mercredi, 02 mars 2022
The Batman
Moins de dix ans après la sortie de The Dark Knight Rises, la Warner a décidé de relancer une série de films sur le plus rentable populaire de ses super-héros. Aux manettes se trouve Matt Reeves, qui s'est précédemment illustré avec La Planète des singes. Tout de même... il fallait des couilles pour tenter de succéder à Christopher Nolan... et peut-être aussi un max de thunes, comme le susurre fielleusement ma voisine de droite (200 millions de dollars, selon les estimations les plus récentes).
Concernant la distribution, je suis partagé. Robert Pattinson (pour lequel le rôle principal aurait été réécrit) et Zoë Kravitz s'en sortent assez bien, mais ils ne font pas oublier certains de leurs prédécesseurs. (Christian Bale était un meilleur Batman et Michelle Pfeiffer une Catwoman bien plus inspirante.) De plus, j'ai beau apprécier Andy Serkis, dans le rôle d'Alfred Pennyworth, je regrette Michael Caine. Je ne suis pas non plus emballé par la nouvelle version du Pingouin (Rendez-nous Danny DeVito !) ... mais qui sait ce que nous réserve la suite ?
Heureusement, certains seconds rôles relèvent le niveau : Jeffrey Wright fait un bon lieutenant Gordon, John Turturro un mafieux très convaincant et Paul Dano un psychopathe redoutable, particulièrement machiavélique.
Cependant, les véritables qualités du film sont ailleurs. C'est d'abord d'une grande beauté formelle. L'image est souvent sombre, tout en restant parfaitement visible (contrairement à ce que j'ai pu voir dans d'autres grosses productions). La photographie est superbe, servie par de bons effets spéciaux, très bien intégrés à l'action. Cela m'amène à la mise en scène, épatante. J'ai presque envie de retourner voir le film pour en savourer de nouveau certains plans. Reeves a un vrai talent pour choisir ses cadrages et les angles de prise de vue. Pour moi, les scènes (quasi) statiques (le plus souvent des vues urbaines) sont plus belles que les scènes d'action, pourtant très réussies. On attend bien sûr celle avec la Batmobile. (Au début, le héros ne se déplace qu'à moto.) On est cueilli par la beauté d'un combat rapproché, dans l'obscurité, sporadiquement éclairé par le fonctionnement des armes à feu. Enfin, je recommande particulièrement la séquence finale, dans le stade, un moment d'anthologie.
Le tout est accompagné d'une musique bien choisie (due à Michael Giacchino, l'Alexandre Desplat américain), parfois fascinante... parfois un brin humoristique (avec une allusion au personnage de Dark Vador). Surtout, j'ai aimé qu'on nous propose une histoire à rebondissements, pas aussi linéaire qu'on pouvait le craindre... même si je déplore la peinture quasi systématiquement négative des élites, une tendance lourde du cinéma contemporain (mais qui est conforme à ce qu'on trouve dans la BD d'origine).
Bref, c'est un très bon spectacle, dans la veine du Joker de Todd Philips, avec une pincée du Seven de David Fincher.
14:58 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 01 mars 2022
Un autre monde
... est-il possible ? C'est ce que semble se demander Stéphane Brizé, dans ce dernier (?) volet de ce qu'on appelle désormais sa "trilogie sociale", après La Loi du marché et En Guerre. Comme pour les deux précédents, il s'appuie sur Vincent Lindon qui, après avoir incarné un employé servile puis un syndicaliste combatif, s'est coulé (magnifiquement) dans le rôle d'un patron d'usine, Philippe Lemesle.
Ce n'est pourtant pas par cet aspect de l'intrigue que le film commence. La première séquence est celle du rendez-vous entre deux époux qui divorcent, chacun(e) appuyé(e) par un(e) avocat(e). Comme souvent dans ce genre de situation, c'est tendu, mais aussi plein d'émotion, des deux côtés. En (future) ex-femme du héros, Sandrine Kiberlain (qui fut jadis la compagne de Vincent Lindon, dans la vraie vie) est excellente. Complètent le couple deux enfants : une fille, étudiante brillante (expatriée), et un garçon un peu "décalé", incarné par Anthony Bajon (meilleur que dans Une Jeune Fille qui va bien... où il était dirigé par Sandrine Kiberlain !).
L'histoire alterne les moments intimes (familiaux) et les scènes d'entreprise, soit à l'intérieur de l'usine dirigée par le héros, soit entre les cadres du groupe auquel elle appartient. Quel que soit le milieu représenté, j'ai été frappé par la qualité des dialogues et de l'interprétation. Dans le monde entrepreneurial, deux femmes se distinguent : Marie Drucker en patronne ambitieuse et Sarah Laurent en syndicaliste pugnace. Tous les seconds rôles sont épatants : bravo à la directrice du casting (Coralie Amedeo, déjà à l’œuvre sur La Loi du marché et En Guerre).
C'est au niveau de la mise en scène que, me semble-t-il, Stéphane Brizé suit des chemins différents de certains de ses précédents films. Souvent, l'objectif se fixe sur un personnage ou un petit nombre de personnes, tandis qu'une discussion se poursuit autour d'eux, sans qu'ils continuent à y participer. Le réalisateur a sans doute voulu montrer le sentiment de décalage que ressentent certains protagonistes, ainsi que l'exclusion.
Sur le fond, il s'agit d'une dénonciation du capitalisme boursier, expliqué de manière pédagogique au cours d'une scène de visioconférence, au cours de laquelle le PDG du groupe états-unien donne une petite leçon d'économie financière à ses cadres français. Les plus futés des spectateurs remarqueront que les scènes avec le fils (mentalement perturbé) font écho à la situation de l'entreprise que dirige son père. Dans un premier temps, son obsession des chiffres (à propos du trajet effectué par ses parents pour venir lui rendre visite) crée le malaise... mais elle est comme un décalque de la culture du résultat à l’œuvre dans la boîte de son père. Plus loin, il est question de l'activité de marionnettiste, qui permet au jeune homme de se structurer... mais on pense évidemment au management du groupe auquel appartient l'usine dirigée par son père.
Entre drame familial, contraintes économiques et urgence sociale, Stéphane Brizé réussit son coup... mais n'attire pas le public : nous n'étions que quatre dans la salle.
12:23 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : société, cinéma, cinema, film, films
dimanche, 27 février 2022
Blacklight
Cette "lumière noire" est un révélateur : elle rend visible ce qui n'apparaît pas à l’œil nu. Au sens symbolique, il est bien évidemment question d'un complot, un thème archi-rebattu par les scénaristes hollywoodiens, qui nous en offrent une énième resucée, sous la houlette de Mark Williams (II), réalisateur de The Good Criminal... déjà avec Liam Neeson (qu'on a vu depuis dans Ice Road).
C'est en raison de la présence de celui-ci au générique que je me suis laissé tenter par cette histoire très très balisée. Celles et ceux qui ont vu de nombreux films d'action ou des polars conspirationnistes n'y dénicheront que peu d'inventivité.
À noter toutefois que, dans ce film-ci, ce bon vieux Liam incarne un agent du FBI sur les épaules duquel le poids des ans commence à peser : il s'essouffle lors d'une poursuite à pieds, n'a pas le dessus lors d'une confrontation musclée et laisse échapper l'un de ses protégés, un jeune policier brillant qui a pété les plombs.
Par contre, au volant de sa bagnole ou une arme au poing, Travis Block reste une redoutable machine à tuer, comme vont s'en rendre compte quelques méchants très méchants. En face, Liam incarne un gentil... pas si gentil que cela. Bien entendu, sa conscience professionnelle aiguë lui a fait rater sa vie familiale. Il essaie tardivement (et maladroitement) de se rattraper.
Au niveau de la mise en scène, on ne se fout pas de la gueule du client : les poursuites en voitures sont bien maîtrisées, tout comme les rares scènes de corps-à-corps. J'ai aussi apprécié la représentation des tocs du héros. Je n'en dis pas plus mais, soyez attentifs dès le début. On pourrait avoir l'impression que c'est mal réalisé, mais, en fait, il s'agit de nous faire toucher du doigt la principale manie de Travis.
La musique est clinquante, mais cohérente avec le sujet. Dans la salle, j'étais donc en train de me dire que j'allais pondre une critique très positive de ce film... mais c'était avant le dernier quart d'heure. A-t-on arrêté de payer les scénaristes ? A-t-on manqué de budget pour clore dignement cette intrigue ? Toujours est-il que la résolution du complot et la mise hors d'état de nuire des méchants interviennent un peu trop facilement, je trouve. C'est dommage, parce que les trois quarts du film sont assez prenants, pour qui aime le genre.
21:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 25 février 2022
Une jeune fille qui va bien
Pour sa première réalisation, Sandrine Kiberlain mêle histoire familiale et amour du théâtre, dans une fiction qui s'inspire semble-t-il (un peu) de la vie d'Hélène Berr, rendue célèbre par son Journal :
Au vu du prénom de l'héroïne, on est aussi tenté de voir une référence à Irène Némirovsky, bien qu'elle soit d'une génération différente.
Le début n'est pas situé dans le temps... même si, en regardant les vêtements portés par les personnages (et leur environnement technologique), on se doute bien que l'action se déroule il y a plusieurs dizaines d'années.
Ce début ne m'a pas emballé du tout. Il est centré sur le théâtre, les répétitions et les relations entre de jeunes adultes (certains pas encore majeurs à cette époque), le tout de manière allusive. Je n'ai pas trouvé cela très bien joué (ni dirigé).
C'est petit à petit, au fur et à mesure que le contexte se précise, que cela devient passionnant. D'abord parce qu'on découvre progressivement les contraintes qui pèsent sur l'héroïne et la majorité de ses proches. Ensuite parce qu'il est d'abord question de la vie d'une jeune femme, qui tente de concilier bonheur familial, réussite dans les études... et grand amour. On la voit se chercher, tâtonner, le tout à une époque où l'on serait tenté de penser que d'autres sujets obsédaient les esprits.
C'est fidèle à ce qu'on trouve dans le journal d'Hélène Berr. Celle-ci ne prépare pas le Conservatoire, mais étudie l'anglais (en visant l'agrégation, puis une thèse), tout en jouant de la musique classique. Autant qu'Irène, elle est mue par l'envie de vivre, malgré tout.
Cela passe parce que l'intrigue est magnifiquement servie par son interprète principale, Rebecca Marder (aperçue dans La Daronne). Dès qu'elle se trouve à l'écran, elle illumine la scène. Voilà une actrice à suivre. Je suis moins convaincu par la prestation d'Anthony Bajon, que j'ai vu bien plus à son aise ailleurs (par exemple dans Teddy).
On suit les pérégrinations sentimentales d'Irène, parallèles à ses activités théâtrales, tout en s'inquiétant à propos des nuages sombres qui s'accumulent au-dessus de la tête des juifs de Paris.
La fin, abrupte, a déconcerté certains spectateurs. Je la trouve parfaitement justifiée.
22:20 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
mercredi, 23 février 2022
Maigret
Patrice Leconte adapte l'un des romans de Georges Simenon, Maigret et la jeune morte. Le recentrage du titre sur le personnage du commissaire indique la volonté du réalisateur de mettre en avant la personnalité du policier, incarné par un Gérard Depardieu sobre et efficace, bien que parfois un peu pataud. (Celles et ceux qui veulent le retrouver avec plus de pêche n'ont qu'à aller voir Maison de retraite.)
Au départ, la morte n'a pas de nom. Elle est à l'image de nombreuses jeunes femmes de province "montées" à Paris : anonyme et vulnérable. Elle est incarnée par Clara Antoons, découverte dans la série Candice Renoir, où elle interprète la fille de l'héroïne.
D'autres comédiennes sont à leur avantage dans ce film : Aurore Clément (en grande bourgeoise), Mélanie Bernier (en petite arriviste) et surtout Jade Labeste, dont le personnage (Betty) est comme un double de la victime, mais un double que Maigret prend sous son aile, pour des raisons qui demeurent obscures.
C'est l'un des grands intérêts de l'histoire : l'étrange relation qui se noue entre cette fille perdue et l'enquêteur souffreteux. Elle a du mal à comprendre qu'un homme s'intéresse à elle sans attendre quelque chose en retour. Lui semble d'abord vouloir lui éviter le destin de tant de jeunes provinciales. Peut-être aussi effectue-t-il un transfert sur Betty, en qui il voit un possible substitut à sa propre fille. Et puis, au détour d'un regard, on sent quand même, à un ou deux moments, qu'il pourrait y avoir du désir.
A côté de cela, l'intrigue policière apparaît presque secondaire. Elle est correctement construite, mais ne suscitera pas l'enthousiasme des amateurs d'histoire compliquée. On se consolera en se plongeant dans le Paris des années 1950, grisâtre et dangereux pour la plupart des pauvres.
21:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 22 février 2022
Mes César 2022
Je n'ai pas encore eu le courage de dresser mon palmarès de l'année cinématographique écoulée... et je n'aurai sans doute ni le temps ni la volonté de m'y mettre avant que l'académie du septième art hexagonal ne distribue ses statuettes. Ben, du coup, je vais énoncer mes choix, avec l'immense avantage que les lauréats auront reçu 100 % des voix ! Pour ce faire, je vais suivre l'ordre des nominations, tel qu'il est paru sur le site officiel.
César de la meilleure actrice : Virginie Efira, pour sa prestation dans Benedetta... et l'ensemble de sa carrière. Cela fait un petit moment déjà qu'elle aurait dû recevoir une statuette.
César du meilleur acteur : Gilles Lellouche, nommé pour Bac Nord, mais qui est formidable dans Adieu Monsieur Haffmann. Là encore, il est grand temps que ce comédien soit distingué, lui dont le talent a longtemps été sous-estimé.
César de la meilleure actrice dans un second rôle : Cécile de France, pour Illusions perdues... mais je ne trouverai pas scandaleux que soit récompensée Jeanne Balibar (présente dans le même film) ou Adèle Exarchopoulos, pour sa prestation dans Mandibules. Ce dernier choix permettrait de distinguer un film réalisé par le talentueux Quentin Dupieux.
César du meilleur acteur dans un second rôle : Vincent Lacoste, pour Illusions perdues... mais, au vu de la qualité de la concurrence, un autre choix ne serait pas illogique.
César du meilleur espoir féminin : un seul choix possible, celui d'Agathe Rousselle, pour Titane, un film de surcroît tenu un peu à l'écart des nominations majeures.
César du meilleur espoir masculin : pas trop d'idée... pourquoi pas Benjamin Voisin, pour Illusions perdues (qui risque d'être le grand vainqueur de la soirée) ?
César du meilleur scénario original : je pencherais pour Yann Gozlan, Simon Montaïrou et Nicolas Bouvet-Levrard, pour Boîte noire... mais, de manière incompréhensible, Arthur Harari et Vincent Poymiro sont nommés dans la même catégorie, alors que l'histoire de l'excellent Onoda est inspirée d'un livre ! A choisir entre les deux, je privilégierais le second.
César de la meilleure adaptation : il semble destiné à Illusions perdues, puisque son principal rival (Onoda) a été reversé dans la catégorie précédente. Comme je n'apprécie pas ce genre de magouille (et que j'ai émis des réserves sur la manière dont le roman de Balzac a été adapté), je me prononce donc pour Les Choses humaines, un scénario bien moins démagogique que celui du film de Giannoli.
César de la meilleure musique originale : il me semble évident que Warren Ellis et Nick Cave soient récompensés pour La Panthère des neiges.
César du meilleur son : autre évidence en faveur de Nicolas Provost, Nicolas Bouvert-Levrard et Marc Doisne pour Boîte noire.
César de la meilleure photo : pour moi, Tom Harari se détache, en raison de son travail sur Onoda - 10 000 nuits dans la jungle.
César du meilleur montage : difficile de se prononcer... mais avantage à Cyril Nakache, pour Illusions perdues.
César des meilleurs costumes : grosse concurrence, mais je place devant Madeleine Fontaine, pour Délicieux (autre film injustement exclu des principales récompenses).
César des meilleurs décors : rebelote avec Bertrand Seitz pour Délicieux.
César des meilleurs effets visuels : Stéphane Taillasson, pour Eiffel. (C'est ce qu'il y a de mieux dans ce film médiocre.)
César de la meilleure réalisation : grosse concurrence là encore... et, après consultation de mes personnalités multiples, je me prononce en faveur d'Arthur Harari, pour Onoda - 10 000 nuits dans la jungle. Cependant, comme, désormais, on n'attribue plus les deux récompenses majeures (meilleur film et meilleure réalisation) au même film, je serais tenté de choisir Julia Ducourneau, pour Titane, réservant l'autre statuette à Onoda.
César du meilleur court-métrage d'animation : Empty Places, de Geoffroy de Crécy, à voir sur France 3.
César du meilleur film d'animation : Le Sommet des dieux, de Patrick Imbert.
César du meilleur film documentaire : La Panthère des neiges, de Marie Amiguet et Vincent Munier, bien entendu.
César du meilleur premier film : comme La Panthère des neiges est déjà récompensée par ailleurs, j'en profite pour distinguer La Nuée, de Just Philippot. (De manière générale, j'aimerais bien que cette édition mette un peu en valeur des cinéastes atypiques, comme Julia Ducourneau, Quentin Dupieux et donc Just Philippot.)
César du meilleur film étranger : la sélection comporte plusieurs films surcotés (selon moi) ; La Loi de Téhéran, de Saeed Roustayi, sort du lot.
César du meilleur film : Onoda - 10 000 nuits dans la jungle, d'Arthur Harari.
C'est un drôle de hasard, mais l'ordre des récompenses fait que je termine par cinq des films qui m'ont le plus marqué en 2022. Nul doute que quatre d'entre eux auraient figuré dans mon top 10.
20:25 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, actu, actualite, actualites, actualité, actualités