vendredi, 28 février 2025
The Brutalist
C'est le premier film réalisé par Brady Corbet qu'il m'est donné de voir... et, autant le dire tout de suite, cela me donne envie d'en connaître davantage.
La première partie (environ 1h40) passe comme un rêve... et pourtant, ce qu'on y voit est parfois cauchemardesque. On nous y conte une histoire déjà vue et entendue ailleurs (à la fois celle de migrants en quête du Rêve américain et celle d'Européens juifs cherchant un refuge hors du Vieux Continent, après la Seconde Guerre mondiale)... mais c'est mis en scène avec un incontestable brio. J'ai notamment été saisi, au début, par le plan-séquence dont l'aboutissement (la Statue de la Liberté) a été tant de fois commenté. Mais c'est tout l'ensemble qu'il faut déguster. Corbet réussit aussi bien les scènes de groupe (comme les soirées jazzy) que les plans architecturaux (l'auditorium en construction) ou paysagers (la colline, mais aussi la carrière de marbre de Hongrie Carrare).
Une partie de ces scènes inspirantes (et inspirées) se trouve dans la seconde moitié du film, tout comme un autre plan-séquence, remarquable sur la forme comme sur le fond : après que l'épouse de l'architecte, sévèrement handicapée, a dit ses quatre vérités au propriétaire du manoir, qui disparaît soudain de l'écran.
L'interprétation est au diapason. On a principalement évoqué Adrien Brody (dont je ne vois pas comment l'Oscar pourrait lui échapper, s'il y a une justice dans l'attribution des récompenses), mais Guy Pearce (le milliardaire), Felicity Jones (l'épouse) et Alessandro Nivola (le cousin Attila) sont eux aussi excellents... même si j'ai quelques réserves sur les scènes intimes entre l'architecte et son épouse (la première en particulier, que j'ai trouvée limite ridicule).
Ce bémol excepté, ce n'est que du bonheur. La première partie raconte la sortie du bourbier et un début de reconnaissance, en dépit des embûches, la seconde partie est davantage marquée par la salissure (sous toutes ses formes), bien que le succès soit aussi au rendez-vous.
A travers l'architecte qui peine à finir son grand œuvre et qui, pour cela, est prêt à quasiment se prostituer, on peut voir l'image du cinéaste doué, ambitieux, qui cherche à financer la réalisation de son long-métrage.
Au sens figuré, Corbet nous raconte aussi l'histoire d'une Amérique blanche, protestante, patriarcale, un brin raciste et antisémite, qui s'enrichit sur le dos des travailleurs immigrés (ou descendants d'esclaves). C'est assez piquant à constater au vu du contexte outre-Atlantique... et c'est paradoxal, quand on sait que cela a été tourné en Hongrie, pays dirigé par l'un des plus fervents soutiens de Donald Trump en Europe.
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mercredi, 26 février 2025
La Vie devant moi
Cette fiction à caractère documentaire traite de la survie de la famille de Tauba Zylbersztein, connue plus tard sous le nom de Thérèse Birnbaum, née en 1928, morte en 2009.
Une fois n'est pas coutume, un film sur la Shoah n'est pas centré sur la déportation ou l'extermination, mais sur la persévérance, l'endurance et l'entraide qui ont permis à un couple et une adolescente de passer plus de deux ans cachés au nez et à la barbe des nazis et de leurs collaborateurs, en plein Paris.
Au niveau de la distribution, on a du lourd : Adeline d'Hermy et Guillaume Gallienne (tous deux de la Comédie Française) incarnent les parents, Sandrine Bonnaire et Laurent Bateau interprètent les deux "bons Français" catholiques, qui vont risquer leur vie en cachant et alimentant la famille juive.
On pense inévitablement à l'histoire d'Anne Frank, réfugiée avec les siens dans l'Annexe. Promiscuité, enfermement, chaleur, froid, faim, ennui, crainte au moindre bruit... Les vieux spectateurs ont déjà vu/lu tout cela, mais une bonne redite ne fait pas de mal, d'autant que c'est correctement mis en scène et bien interprété.
Petit à petit, le personnage principal devient celui de la fille du couple juif, la jeune Taub, qui grandit, mûrit, prend des initiatives. Elle est incarnée par Violette Guillon, qui, jusqu'à présent, s'est surtout fait remarquer dans des comédies oubliables (C'est quoi cette mamie ?, C'est quoi ce papy ?, 10 jours sans maman et - peut-être le pire de tous - 10 jours encore sans maman).
A noter que les scènes de fiction sont parfois entrecoupées d'images d'archives, le film se concluant sur une histoire d'amour née à la Libération... et qui dura plus soixante ans ! (Voilà qui est peut-être encore plus extraordinaire que l'histoire de la survie de la famille...)
19:22 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
mardi, 25 février 2025
Bridget IV
Il y a fort longtemps (« Je vous parle d'un temps, que les moins de vingt ans, ne peuveuuu pas connaîtttrreuuu... »), une amie m'avait fait découvrir le Journal de Bridget Jones, qui m'avait beaucoup plu. Cela m'a incité, quelques années plus tard, à aller voir son adaptation cinématographique, un peu décevante par rapport au bouquin, mais portée par les interprétations de Renée Zellweger, Shirley Henderson, Hugh Grant, Colin Firth, Jim Broadbent... La comédie est un genre que l'on prend très au sérieux, de l'autre côté de la Manche ! Très déçu par le deuxième film, je m'étais arrêté là. J'ai retenté ma chance avec ce quatrième et sans doute dernier volet des aventures de la fantasque Londonienne.
La première heure (presque 1h10) prend la forme d'une comédie, dans le genre de celles qu'on a déjà vues. Veuve depuis quatre ans, Bridget est tombée dans un état proche de celui dans lequel elle se retrouvait jadis, après une rupture : elle s'habille n'importe comment, mange n'importe quoi, picole sec... et vit dans un beau bordel. Le problème est que, cette fois-ci, elle a deux enfants à charge, ceux qu'elle a eus avec feu Mark Darcy, qu'elle revoit, tel un fantôme, de temps à autre.
C'est drôle parce que Renée a toujours autant d'allant (et de charme), même si je regrette qu'on la fasse un peu trop souvent sourire bêtement. Ce sourire revient parce que, suite aux conseils de son toxique entourage, elle décide de se prendre en mains et de repartir à la chasse au mâle. C'est évidemment source de situations aussi cocasses qu'embarrassantes (pour l'héroïne). Deux beaux (jeunes) spécimens (musclés) se présentent à elle... ainsi que son ex de toujours, Daniel Cleaver, désormais "vieux beau", toujours aussi libidineux. Grant est vraiment savoureux dans le rôle, d'autant que, dans cet épisode, il prend une épaisseur supplémentaire, venue avec l'âge.
Cela indique le ton qui domine la seconde partie, plus dans l'émotion. Il est question de vieillesse, de solitude, de deuil, celui de Bridget, mais aussi celui de son fils aîné. Je trouve que ces questions ne sont pas traitées par dessus la jambe. C'est assez délicat et cela cohabite très bien avec le reste, parfois graveleux, sans être vulgaire. Joli tour de force.
Cela ne va pas révolutionner la comédie, mais cela fait passer un bon moment.
P.S.
Le générique de fin est accompagné d'abord de photographies, puis d'extraits des précédents films de la saga Bridget Jones.
20:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
dimanche, 23 février 2025
Mercato
Un film sur le football, avec pour héros un personnage incarné par Jamel Debbouze... voilà qui a priori n'avait rien d'alléchant. Mais le traitement sous forme de thriller et l'assez bon souvenir laissé par le dernier film vu de Tristan Séguéla (Docteur ?) m'ont incité à tenter l'expérience.
Ma principale crainte était que Debbouze en fasse des caisses, dans le genre trublion. Certes, son personnage (Driss) a de la gouaille (et c'est crédible, vu le contexte), mais l'humoriste s'est effacé derrière le rôle, tout en tension. Lui, le vétéran du transfert de joueurs, risque de tout perdre : son statut professionnel, sa famille, voire la vie. Le film prend donc la forme d'un compte à rebours (d'abord en jours, puis en heures)... et, franchement, c'est palpitant.
Derrière la caméra, Tristan Séguéla s'inspire visiblement de films venus de l'autre côté de l'Atlantique. La qualité de l'image est bonne et la musique d'ambiance au diapason (si l'on excepte quelques morceaux de rap, horripilants). L'action est rythmée, durant les deux heures. On n'a pas le temps de s'ennuyer.
Les acteurs sont bons. On retrouve Hakim Jemili (à l'affiche de Docteur ?), dans le rôle d'un ancien grand espoir du football, devenu une sous-vedette capricieuse. Quelques autres personnages de joueurs sont montrés comme n'étant pas très futés. A l'opposé, l'une des stars de la discipline est présentée comme un type très réfléchi... et surtout amoureux du ballon rond. (Il est incarné par Birane Ba, de la Comédie Française.)
La caractérisation des personnages casse donc parfois (un peu) les codes... mais pas dans la séquence de rap, qui m'a semblé caricaturale. (Ceci dit, une personne qui s'y connaît mieux que moi m'a susurré que c'était plus vrai que nature.) J'ai bien aimé qu'à un moment de l'intrigue, l'une des compagnes de joueur (une jeune femme au physique très avantageux, en général silencieuse) intervienne dans une conversation houleuse... pour dire des trucs extrêmement censés, au grand étonnement d'ailleurs d'une partie de la gent masculine qui l'entoure !
L'ambiance des stades de football est bien restituée, tout comme l'immensité des enjeux financiers, qui se présentent parfois très tôt : un gamin convoité par plusieurs club n'a que onze-douze ans... Le fond de l'histoire n'est toutefois pas très fouillé : celles et ceux qui s'intéressent un tant soit peu à l'actualité de ce sport n'apprendront sans doute pas grand chose. Pour d'autres, ce film fera peut-être office de déniaisement.
En plus, on voyage entre Paris, Lille, Reims, Madrid, Dubaï... et Salzbourg. L'histoire est pimentée d'humour (notamment dans les relations père-fils). J'ai passé un bon moment.
samedi, 22 février 2025
Un Jour en septembre (DVD)
C'est le titre d'un "vieux" documentaire de Kevin Macdonald (qui, à l'époque, n'avait pas encore réalisé Le Dernier Roi d’Écosse), sorti en 1999 et lauréat de l'Oscar, dans sa catégorie, en 2000 (devant le Buena Vista Social Club de Wim Wenders).
C'était l'année où avaient été distingués Sam Mendes et Kevin Spacey (pour American Beauty), mais aussi (en tant que second rôle) Michael Caine et Angelina Jolie, Pedro Almodovar (pour Tout sur ma mère), les décors de Sleepy Hollow (de Tim Burton), les effets spéciaux du premier Matrix... sans oublier You'll be in my heart, la chanson composée par Phil Collins pour le film d'animation Tarzan (un Disney, bien entendu). Étaient repartis bredouilles les œuvres suivantes : Le Talentueux Mr Ripley (avec Matt Damon), Révélations (de Michael Mann), Sixième Sens (le meilleur Shyamalan ?), La Ligne verte (avec Tom Hanks), Magnolia (de Paul Thomas Anderson) et Dans la peau de John Malkovich (de Spike Jonze)... Quelle année !
Le documentaire de Macdonald m'est revenu en tête en raison de la sortie récente de 5 septembre, consacré lui aussi au massacre de Munich, pendant les Jeux Olympiques d'été de 1972.
Voir les deux films à peu de distance l'un de l'autre fait surgir leurs ressemblances. Ils contiennent tous deux des images d'actualité de l'époque... mais la fiction sortie ce mois-ci comporte des scènes, jouées par des acteurs, d'une troublante vérité, proche du mimétisme quand on a les originaux sous les yeux.
L'avantage du documentaire de Macdonald est de ne pas se limiter à la vision de l'équipe d'ABC. Il a croisé les archives avec les déclarations de témoins américains, allemands et israéliens, s'appuyant notamment sur les interventions du chef de Mossad (à l'époque Zvi Zamir) et de la veuve d'un des membres de l'équipe olympique. Du côté allemand, même 27 ans après, on sent souvent la gêne, parce qu'il est évident que les services de sécurité, qu'ils soient bavarois au fédéraux (dépendant de Berlin) n'ont pas été à la hauteur. Sur les lieux du carnage final, certains se sont même fait tirer dessus par leurs compatriotes, qui les ont pris pour des membres du commando terroriste.
Celui-ci a aussi droit à la parole, à travers le dernier survivant du groupe, Jamal Al-Gashey, fier de ce qu'il a "accompli"... mais se terrant pour échapper aux tueurs du Mossad.
Sur le fond, quelques nuances distinguent le documentaire de la fiction. Ainsi, aujourd'hui, on sait que les sportifs en goguette, qui ont fait entrer par mégarde les terroristes dans le village olympique, n'étaient pas états-uniens mais canadiens.
Le documentaire a marqué les esprits pour plusieurs raisons. Il est le résultat d'un travail fouillé, pas unilatéral dans le traitement des informations. Il a été tourné avec un réel souci pédagogique, pour faire comprendre les tenants et les aboutissants au plus grand nombre, avec notamment quelques animations pour expliquer le dénouement. Il a choqué certains à cause des plans des deux premières victimes (aux visages floutés). Il contient enfin une révélation, celle que l'échange des trois terroristes rescapés (réalisé deux mois plus tard) entre la RFA et les Palestiniens qui avaient pris en otage un avion reliant Beyrouth à Francfort... était en réalité une opération d'enfumage, les autorités ouest-allemandes étant peu désireuses de se coltiner l'organisation d'un procès, surtout au regard des menaces que les mouvements terroristes faisaient planer sur le pays.
P.S. I
Un site allemand a réalisé une sorte de mémorial virtuel dédié aux onze victimes du massacre, chacune ayant droit à une page souvenir (fort bien documentée), en allemand et en anglais :
David Berger (né en 1944)
Zeev Friedman (né en 1944)
Yossef Gutfreund (né en 1931)
Eliezer Halfin (né en 1948)
Yossef Romano (né en 1940)
Kehat Schor (né en 1919)
Amitzur Shapira (né en 1932)
Mark Slavin (né en 1954)
Andrei Spitzer (né en 1945)
Yakov Springer (né en 1921)
Moshe Weinberg (né en 1939)
Ce n'est pas l'un des moindres paradoxes de cette affaire : aucune des victimes n'est née dans l’État israélien (recréé en 1948). Les deux plus jeunes du groupe (Slavin et Halfin) ont vu le jour en URSS, tout comme Friedman. Quatre autres sont nés en Europe de l'Est : Springer (en Pologne), Gutfreund, Schor et Spitzer (dans la Grande Roumanie). Berger et Romano sont plus atypiques : le premier est né aux États-Unis (à Cleveland), le second dans la Libye italienne (à Benghazi). Restent Weinberg et Shapira, qui ont vu le jour dans la Palestine mandataire (sous autorité du Royaume-Uni), à Haïfa et Tev Aviv.
Le plus terrible est que ceux qui sont nés en URSS, Pologne et Roumanie sont très souvent des rescapés de la Shoah. Ils ont échappé aux nazis (et à leurs collaborateurs polonais, roumains...), pour tomber, des années plus tard, sous les balles de Palestiniens.
P.S. II
Le DVD ne contient aucun supplément (à part la bande-annonce).
P.S. III
Un certain Raymond Depardon figure au générique : il était en charge de la photographie.
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jeudi, 20 février 2025
Un parfait inconnu
Ah, qu'elle était belle l'époque durant laquelle on pouvait rouler à moto sans casque, fumer dans les lieux publics, baiser à tire-larigot sans capote... et gagner plein de sous avec des chansons contestataires ! En se focalisant sur la période qui vit Robert Zimmerman devenir vraiment Bob Dylan, James Mangold (auquel on doit, entre autres, Logan, Le Mans 66 et le dernier Indiana Jones), né en 1963, nous livre ce que certains djeunses pourraient appeler (de manière réductrice) "un film de boomer".
Du coup, c'est au moins autant une œuvre de cœur qu'un mini-biopic, centré sur les années 1961-1965, avant donc la mort de Woody Guthrie (l'un des modèles de Dylan)... mais juste après la sortie de l'un de ses "tubes", Like a Rolling Stone, qui a marqué un tournant dans sa carrière... et dont les paroles ont inspiré le titre du film (en anglais).
Ce n'est toutefois pas une hagiographie. Mangold dépeint certes un jeune musicien tenaillé par son art... mais aussi soucieux de richesse, de célébrité... et de conquêtes féminines. Sur la plan politique, il est montré comme ambigu, ce que fait bien sentir (parfois de manière implicite) le jeu de Timothée Chalamet (pour une fois très bon). Mais il n'est pas le seul à se distinguer. Toute la distribution est brillante, d'Edward Norton (en vétéran de la folk traditionnelle, militante, qui voit un petit jeune décrocher la célébrité après laquelle il semble avoir couru) à Monica Barbaro (surprenante Joan Baez), en passant par Elle Fanning, Boyd Holbrook (excellent Johnny Cash)... et tant d'autres.
Les événements historiques ne constituent qu'un arrière-plan, jamais réellement creusé. Cela commence avec un petit goût de Guerre froide et des relents de maccarthysme. Cela continue avec le mouvement des Droits civiques et la Guerre du Vietnam. Celles et ceux qui sont allés voir ce film en pensant y trouver un brûlot politique ont dû être déçus. C'est plutôt une nouvelle illustration de la marche vers le sommet d'un p'tit gars venu de la base, une histoire très américaine en fait. (C'est le moment de préciser qu'en réalité, Robert Zimmerman est issu de la classe moyenne.)
Je me dois de signaler que, si l'on n'aime pas la musique folk, il vaut mieux s'abstenir, parce qu'elle occupe une place considérable, peut-être la moitié des 2h20. Moi qui ne suis pas un fan du genre (sans y être allergique), j'ai été séduit.
En dépit de sa longueur et de quelques scènes intimes moins réussies que le reste, le film mérite incontestablement le détour.
22:14 Publié dans Cinéma, Histoire, Musique, Politique étrangère | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire, musique
mercredi, 19 février 2025
Daffy et Porky sauvent le monde
Petit bain de jouvence pour moi, à l'occasion de la sortie en salles de ces nouvelles aventures de deux personnages des Looney Tunes (ou Merry Melodies), à savoir Daffy Duck et Porky Pig. J'ai pu constater que, dans la salle, ceux qui ont connu les courts-métrages déjantés de jadis accompagnaient ceux qui, peut-être, découvraient cet univers.
L'intrigue comique est mâtinée d'horreur et de science-fiction. Les spectateurs avisés reconnaîtront les références à Deep Impact, La Nuit des morts-vivants... ainsi qu'au style des courts-métrages anciens. C'est souvent surréaliste, sans être effrayant... mais ce n'est pas super-bien fait. J'ai vite arrêté de compter les faux-raccords et autres erreurs de mise en image. Il faut être indulgent pour supporter cela... et surtout le personnage de Daffy Duck, à qui j'ai souvent eu envie de coller des gifles. L'intrigue met en scène son amitié tumultueuse avec Porky, qui finit par se fâcher avec lui... mais, je vous rassure, la fin est consensuelle, Daffy ayant lui-même (un peu) mûri.
D'autres messages sont délivrés à nos chères têtes blondes/brunes/rousses/châtain/chauves. Ainsi, Porky refuse la facilité (suggérée par Daffy) qui consisterait à attendre que tombe un chèque du gouvernement (une aide sociale) pour régler leurs problèmes. Les deux acolytes se lancent dans le monde du travail, avec un succès que je laisse à chacun le plaisir de découvrir. Ils finissent par trouver leur bonheur dans un emploi peu gratifiant, sans doute mal payé, mais qui leur convient.
... et c'est là que vous vous dites : mais c'est un film de droite ! Oooooooooooooooooh, ouiiiiiii ! (C'est si rare dans le secteur de l'animation, où fourmillent les gauchistes de diverses obédiences.) Je pense que le sous-texte est en partie trumpien (ou muskien). En effet, Daffy, en plus de se comporter comme un crétin, adopte les théories les plus farfelues. A un moment, il est clairement présenté comme un complotiste... et c'est lui qui, d'une certaine manière, a raison ! Quand j'aurai ajouté que le grand méchant est certes un personnage en apparence hostile, mais qui veut en réalité sauver la planète (grâce à la technologie), vous vous demanderez s'il est bien nécessaire d'emmener votre progéniture ingurgiter une telle propagande insidieuse.
Le film n'est pourtant pas sans qualités. A un court instant, on voit Daffy jouer à l'influenceuse (et c'est hilarant). Un peu plus loin, l'entrée en lice du principal personnage féminin (la charmante Petunia Pig, qui donne très envie de goûter à ses jambons) est délicieusement parodique. Malheureusement, la suite n'est que rarement aussi emballante. Je signale toutefois le procédé utilisé par les héros pour combattre le méchant : une substance à base d’œuf pourri, qui fait vomir les humains zombifiés... Kiffant.
Le public, adulte comme jeune, a au final assez peu ri. J'ai trouvé que le film nous avait été un peu survendu, peut-être en raison de la nostalgie de nombreux adultes. Jadis, les courts-métrages étaient d'esprit contestataire, un peu anars (de gauche). Aujourd'hui, au moins de l'autre côté de l'Atlantique, la disruptivité semble avoir été récupérée par le camp adverse.
19:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 18 février 2025
Haut les mains
Comme l'intrigue fait intervenir un cambrioleur (sur le retour), on est tenté de penser, de prime abord, que le titre fait allusion à un braquage au sens littéral, alors que je pense qu'il faut le prendre au sens symbolique : certaines personnalités ont réalisé un véritable hold-up sur l'écologie et tentent de se faire passer pour ce qu'elles ne sont pas. Le propos est radical, souvent caricatural, mais c'est assumé.
Au centre de l'histoire se trouve Bernard, un cambrioleur quinquagénaire, un peu has been sur les bords... mais qui a gardé un doigté incomparable, qui lui permet de faire monter au septième ciel ses partenaires sexuelles d'ouvrir n'importe quel type de coffre. Il est tombé sous la coupe d'un flic véreux et misogyne, un gros porc dans tous les sens du terme, incarné avec une certaine gourmandise par Stéphane Debac.
Dans des circonstances que je me garderai de détailler, Bernard se retrouve mêlé aux actions d'un groupuscule écolo-féministe, "piloté" (de manière presque démocratique) par une femme forte, Olympe, formidablement interprétée par Émilie Caen. Elle est épaulée par deux djeunses qui sont des caricatures de citadins engagés pseudo-révolutionnaires : un garçon déconstruit (un geek non masculiniste, ce qui mérite d'être souligné) et une amazone qui n'a que les mots "patriarcat" et "boomer" à la bouche. Aussi agaçant ce personnage soit-il, je dois reconnaître qu'il est très bien incarné par Tracy Gotoas et qu'il évolue positivement en cours de route.
C'est d'ailleurs le cas de tous les protagonistes. Bernard le maladroit, le lâche (très bonne prestation de Vincent Elbaz), finit par se laisser pousser des couilles, Olympe fend l'armure, Simon sort de ses écrans et Zora s'ouvre davantage aux autres.
Le début contient quelques répliques grinçantes, quand les djeunses et leur mentor raillent le quinqua qu'ils présument pétri de préjugés... dont ils ne sont eux-mêmes pas dépourvus.
J'ai failli oublier un personnage important : Flamby, un... lapin, qui joue un rôle non négligeable dans l'intrigue.
Voilà pourquoi ce film m'a globalement plu. D'abord, parce que j'y ai ri, à plusieurs reprises. Ensuite, parce que la cause est belle : le plan global consiste à révéler la véritable nature d'un présentateur télé présumé écolo, futur ministre, à la tête d'une fondation renommée (toute ressemblance avec Nicolas H. étant évidemment fortuite). Enfin parce que la réalisatrice Julie Manoukian (dont j'avais plutôt bien aimé Les Vétos) égratigne (avec humour) le camp qu'elle apprécie.
La manière dont les activistes arrivent à leurs fins n'est évidemment pas réaliste, mais l'on passe un bon moment.
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lundi, 17 février 2025
Captain America - Brave New World
Le sous-titre de ce trente-cinquième (!) long-métrage de l'univers Marvel fait allusion au célèbre roman d'Aldous Huxley, connu en France sous le titre Le Meilleur des mondes. Toutefois, même s'il est question d'eugénisme dans les deux histoires, la ressemblance s'arrête là.
L'intrigue est construite autour de complots, plus précisément d'un complot principal, à double emboîtement. Désormais (depuis Endgame), Sam Wilson (ex-Faucon) a succédé à Steve Rogers dans le costume de Captain America. L'un des sous-textes aborde la question de la légitimité de Wilson à cette place... c'est-à-dire, au second degré, la légitimité d'un acteur noir à incarner ce symbole de l'Amérique (blanche). C'est notamment sensible dans un dialogue entre Wilson et le président Ross (Harrison Ford, presque aussi mal coiffé que Donald Trump) et, beaucoup plus tard, à la fin, dans une scène entre deux compagnons d'armes (Wilson et son acolyte), sortes de nouveaux Batman et Robin.
Le nouveau Captain America va donc tenter de sauver l'Amérique le monde du délire d'un génie psychopathe, qui a préparé son coup de longue main. Cela nous vaut une brochette de coups de théâtre et de scènes spectaculaires. (J'ai vu le film dans une salle dotée du son dolby atmos et, franchement, ça dépote.)
A part cela, un esprit pointilleux pourra remarquer quelques faux-raccords et de menues invraisemblances, qui permettent notamment à nos héros de réchapper à (presque ?) toutes les tentatives de meurtre dont ils sont la cible.
Je trouve aussi que cela manque de femmes. A part la cheffe de la sécurité du président (une -charmante- brindille qui peut mettre une raclée à une demi-douzaine de soldats surentraînés), elles n'occupent que des rôles secondaires. L'humour est aussi peu présent. On est loin du brio d'anciens films Marvel. Mais cela constitue quand même un honnête spectacle... prélude à une suite. L'unique scène post-générique (placée à la toute fin) annonce la reformation des Avengers... et l'intrusion du Multivers dans l'intrigue d'un prochain film.
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samedi, 15 février 2025
L'Espion de Dieu
Cette production américaine, tournée en Europe, rend hommage à un opposant méconnu du nazisme (en dehors des cercles religieux), Dietrich Bonhoeffer, un jeune théologien protestant. Il est incarné (à l'âge adulte) par Jonas Dassler, remarqué il y a quelques années dans La Révolution silencieuse. Le problème est qu'on a affublé le personnage soit d'une horrible perruque, soit d'une coiffure plombée à la laque, qui lui donne un air limite ridicule. (On lui a aussi excessivement maquillé les yeux.)
C'est un peu à l'image du film. Les intentions généreuses (rendre hommage à des hommes et femmes courageux, qui ont souvent connu un destin tragique) sont plombées par les maladresses... et les erreurs historiques.
Ainsi, dans la première partie, lorsque le frère aîné du héros part pour la guerre (la Première Guerre mondiale), on ne nous épargne pas le plan éculé, excessivement mélo, du gamin courant derrière la voiture qui emmène son frère... Même les scènes de cache-cache entre les frangins sont mal filmées.
Cela s'améliore par la suite. Le jeune pasteur est envoyé un an aux États-Unis. Il se retrouve à New York, plus précisément à Harlem. Cela nous vaut de belles scènes de culte chanté (au temple)... et de sorties, le soir, en club de jazz (au public majoritairement afro-américain). Pour que le tableau ne soit pas trop idyllique, on a inclus une séquence sur la ségrégation : on a beau être dans un État progressiste, et dans la ville peut-être la plus métissée du monde, les Noirs n'y ont pas tous les droits. Il manque cependant les conséquences de la crise de 1929. Les protagonistes sont de surcroît tous un peu trop bien habillés...
Cela se gâte avec le retour en Allemagne. C'est pourtant l'époque clé, celle qui voit le jeune théologien refuser les compromissions avec le nouveau pouvoir nazi, entraînant d'ailleurs avec lui le pasteur Martin Niemöller (l'auteur du célèbre Quand ils sont venus chercher...), qui fut dans un premier temps assez sensible aux sirènes d'extrême-droite. La division des protestants (entre partisans du IIIe Reich et opposants à ce néo-paganisme déshumanisant) est correcte, mais mise en scène de manière maladroite.
Ce n'est cependant pas le pire. Je ne sais pas si c'est dû au scénario ou à des erreurs de montage, mais c'est rempli d'anachronismes. Ainsi, dès 1934, on nous montre des Juifs embarqués de force par la Gestapo, comme si leur déportation avait commencé. A deux reprises dans des dialogues se tenant entre 1934 et 1938, des personnages évoquent la guerre et la possibilité d'être envoyé sur le front de l'est... alors que le conflit n'a pas été déclenché ! La liste n'est (hélas) pas exhaustive...
C'est vraiment dommage, parce que ces Allemands chrétiens antinazis méritaient mieux que ce traitement approximatif. On sent que les promoteurs de ce film ont surtout voulu faire l'éloge des "vraies valeurs", quitte à tordre un peu l'Histoire.
11:09 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
vendredi, 14 février 2025
Maria (Callas)
Je ne suis pas fan d'opéra mais, tout petit déjà, il m'est arrivé d'être fasciné en entendant un air, soit un instrumental, soit un chant de femme. La Callas avait ce pouvoir, associant une voix exceptionnelle à un incontestable charisme (ou une aura), ce que l'on peut en partie constater grâce aux images d'archives placées en fin de film. C'est d'autant plus cruel pour Angelina Jolie, dont les efforts méritoires ne parviennent pas à redonner entièrement vie à la Diva grecque.
Elle n'est pas aidée par la mise en scène, trop sage, trop plan-plan. Pablo Larrain, qui m'avait laissé plutôt de bons souvenirs (avec Tony Manero, Santiago 73, No ou encore Neruda), retombe dans les travers de son Jackie. C'est empesé, limite poussiéreux parfois, alors que la soprano a vécu intensément, en particulier sa vie d'artiste. Pourtant, le choix de cette comédienne n'est pas incongru. Sa minceur extrême, son profil anguleux ne sont pas sans évoquer son illustre modèle, quand bien même l'actrice est d'une beauté plus classique que la cantatrice.
L'implication d'Angelina Jolie se constate dans les parties chantées qu'elle interprète, où sa voix a été mixée avec celle de La Callas. Le résultat est un peu étrange : le son est superbe, mais la comédienne donne l'impression de mimer... sauf dans son chant du cygne, à la toute fin.
Les plus beaux moments du film sont donc les parties musicales, chantées ou non. Je dois reconnaître qu'à ces instants précis, comme je n'étais pas emballé par ce que je voyais, j'ai eu tendance à fermer les yeux, pour juste profiter du son.
Ce (très) long-métrage propose quelques moments de grâce, notamment dans les retours en arrière, qui montrent la soprano au sommet de son art... ou même bien avant, pendant l'occupation allemande de la Grèce, quand elle chantait pour l'occupant. A cette occasion, je crois que c'est une jeune cantatrice grecque qu'on entend interpréter un passage de Carmen (une rareté dans le film, qui propose surtout des extraits d’œuvres italiennes, d'après ce que j'ai pu reconnaître).
Au niveau des dialogues (entendus en version originale), je suis mitigé. Certains sont trop littéraires, mais il y a régulièrement quelques bons mots, comme lorsque le pianiste qui fait répéter l'héroïne affirme qu'elle a réussi un exploit, celui de pousser un technicien de l'opéra parisien (sans doute syndiqué) à interrompre sa pause déjeuner pour régler un projecteur... Auparavant, à la soprano qui s'excusait pour son retard, il avait répondu : « Non, vous n'êtes pas en retard. Vous êtes La Callas. Ce sont les autres qui sont en avance. » Tout aussi piquante (mais moins élégante) est la réplique d'Onassis, lors de l'anniversaire hyper-médiatisé du président Kennedy. A sa compagne qui s'étonne que l'on porte aux nues une chanteuse somme toute médiocre (Marilyn Monroe), il répond que peu importe comment elle chante, puisqu'on ne regarde que son corps... alors qu'on se désintéresse de celui de La Callas, tant on est captivé par sa voix...
Attention toutefois : ce biopic (partiel) édulcore selon moi certains aspects de la vie de l'héroïne. Le passage sur la période de l'occupation de la Grèce me paraît très déformé et il y a de gros manques, en particulier sur la période post-Onassis. Ceci dit, j'ai trouvé intéressants les personnages de la cuisinière et de l'homme à tout faire. Ils permettent de pointer le côté capricieux de l'artiste lyrique, qui n'avait pas que des qualités. Ce n'est donc une hagiographie qu'on nous livre, mais un film tout de même imparfait.
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mercredi, 12 février 2025
5 septembre
Été 1972. Pour la première fois depuis 1936, l'Allemagne (en l'occurrence celle de l'Ouest, la RFA) accueille les Jeux olympiques. L'ambiance est au beau fixe : l'Europe vit encore au rythme des « Trente Glorieuses », la guerre du Vietnam s'achève et l'Allemagne (version RFA) est redevenue une grande puissance économique... et sportive, puisque la Mannschaft a remporté la Coupe du monde de football en 1954 (et se prépare à récidiver en 1974).
Ces jeux sont restés célèbres pour la prise d'otages (israéliens) organisée par un commando palestinien, qui a été très mal gérée par les autorités allemandes. Les conséquences de ce drame ont été traitées par Steven Spielberg, dans Munich, il y a vingt ans. L'originalité de ce film-ci est de nous présenter les événements du point de vue de l'équipe de journalistes sportifs envoyée par la chaîne américaine ABC pour couvrir les épreuves olympiques.
C'est donc à travers le vécu du rédac' chef, du réalisateur, du présentateur, des reporters, caméramans, techniciens, preneurs de son, interprètes que l'on suit l'évolution de la situation... et c'est un excellent choix. Cela transforme ce semi-documentaire en thriller palpitant, même quand on en connaît la fin.
C'est remarquablement interprété, par Peter Sarsgaard, Ben Chaplin, John Magaro, Leonie Benesch (et le Frenchie Zinedine Soualem, dans un rôle secondaire). Dans la VF, on a eu l'intelligence de ne doubler que les dialogues en anglais, laissant certains passages en allemand sous-titré.
C'est surtout très bien filmé, avec un soin minutieux pour reconstituer le grain et la forme des images de l'époque. (Des extraits d'archives entrecoupent parfois les plans de la fiction.) C'est criant de vérité, les décors comme les costumes ressuscitant de manière crédible le début des années 1970.
Sur le fond, cela dit des choses sur les relations homme-femme au travail, le voyeurisme, la course au scoop. (L'imprudence des journalistes a peut-être empêché la police allemande de libérer une partie des otages.) On apprend aussi deux-trois choses sur la manière dont on réalisait une émission de télévision à l'époque. Ces aspects techniques, bien qu'intervenant au second plan, sont parfois captivants.
C'est pour moi l'un des meilleurs films sortis en ce début d'année 2025.
22:38 Publié dans Cinéma, Histoire, Proche-Orient, Sport | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire, sport, sports
dimanche, 09 février 2025
Paddington au Pérou
Ce troisième (et dernier ?) volet des aventures de l'ourson humanisé sort un peu plus de sept ans après Paddington 2. La distribution compte à nouveau Hugh Bonneville, Madeleine Harris, Samuel Joslin et Jim Broadbent (avec la participation fugace de Sanjeev Bhaskar et Ben Miller). Cependant, un important changement est survenu au niveau de la famille Brown : la mère n'est plus incarnée par Sally Hawkins (qu'on a entre temps remarquée dans The Lost King), mais par Emily Mortimer, que l'on voit plutôt à la télévision (au cinéma, pour moi, pas depuis Hugo Cabret). L'actrice s'en sort correctement, même si je préférais voir Sally Hawkins dans le rôle.
Parmi les nouveaux arrivants figurent Antonio Banderas et Olivia Coleman. Le premier interprète un baroudeur un peu dérangé, la seconde une nonne au tempérament fantasque, qui rappellera immanquablement aux spectateurs français la sœur Clotilde du Gendarme de Saint-Tropez (inoubliable France Rumilly). C'est peu de dire que ce personnage nous réserve quelques surprises...
Quant aux ours, jeunes comme adultes (et vieillards), ils sont remarquablement animés. La qualité du pelage (vu en gros plan sur très grand écran) est exceptionnelle et le travail sur les expressions du visage de grande qualité.
J'ai aussi noté des efforts de mise en scène, perceptibles dès la première scène, que l'on revoit bien plus tard, sous un autre angle, une fois un mystère éclairci. Paddington, retourné chez les Brown, qu'il voit grandir/vieillir, est inquiet à propos de sa tante, qui a disparu. Voilà toute la famille embarquée pour le Pérou, où les (més)aventures vont se succéder. C'est souvent drôle, clairement fantasque, irréaliste, mais plein de douceur et de bonne humeur. Y contribue sans doute le doublage de Guillaume Gallienne (Paddington, dans la VF).
Dans la salle, petits et grands rient, pas toujours aux mêmes moments (certains clins d’œil étant destinés aux adultes). On finit par découvrir le véritable secret de l'Eldorado... et, si l'on est patient (jusqu'à la scène qui interrompt le générique puis, tout à la fin), on assiste au retour d'un personnage vu dans un épisode précédent.
Peut-être qu'après tout la production envisage une suite. C'est tout le mal qu'on souhaite à cette sympathique franchise.
21:46 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
vendredi, 07 février 2025
Companion
Cela commence de manière anodine. Trois couples vont passer le week-end ensemble, dans la superbe villa de l'un d'entre eux, perdue en forêt... mais dotée de tout le confort moderne. (Faut pas déconner, non plus !) On se déplace en véhicule électrique autonome, on boit de grands crus, on mange des mets exquis, entouré d’œuvres d'art contemporain. Bref, on nage en pleine boboïtude à l'américaine.
... sauf que, très vite, une sorte de malaise s'installe. Iris est la nouvelle venue, la compagne que Josh vient présenter à ses meilleurs amis. Elle appréhende un peu, d'autant que certains d'entre eux la regardent ou lui parlent bizarrement. Assez subtilement, le réalisateur Drew Hancock nous fait comprendre que les personnages n'attendent pas tous la même chose de ce week-end entre potes... et que certains ignorent le projet des autres. Je pense ne pas trop divulgâcher en annonçant que cela va rapidement dégénérer.
On tombe donc dans ce que j'appellerais un revenge gore, un peu à l'image de Blink Twice, sorti l'an dernier. Certains aspects de l'intrigue font aussi penser à Robot and Frank, ou encore Ex Machina.
Bref, cette fausse histoire d'amour est d'abord un film sociétal, qui traite de la place des femmes dans les couples modernes (pas si modernes que cela, en fait, certains jeunes hommes, d'apparence cool, étant ce que la délicieuse Ally McBeal appelait des « chauvinist pigs »). Pour traiter cette histoire MeeToo, on l'a mâtinée de science-fiction, avec l'irruption de l'intelligence artificielle. C'est habilement fait, à tel point qu'on en vient à se demander ce qui constitue réellement l'humanité de certains personnages. Le côté gore fait monter la sauce, de manière fort réjouissante, ma foi, avec une belle série de rebondissements... et, comme l'actrice principale, Sophie Thatcher, n'est pas désagréable à regarder, je dois dire que j'ai passé un excellent moment.
21:29 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société
lundi, 03 février 2025
Le Choix du pianiste
Sans doute inspirée d'une histoire vraie (celle d'un musicien français qui a continué à exercer son art sous l'occupation allemande), l'intrigue de ce film nous est présentée sous la forme d'une alternance de deux époques, celle allant de 1925 à la Seconde Guerre mondiale d'une part, celle se déroulant à la Libération d'autre part.
Le point commun entre les deux époques est le personnage de François Touraine (Oscar Lesage, pas terrible), jeune pianiste virtuose qui tombe amoureux de sa prof de musique, Rachel, qui est juive.
Cette communion de deux êtres, autour de la musique classique, est peut-être ce qu'il y a de mieux dans le film. C'est en partie dû au talent de Pia Lagrange, qui interprète Rachel. Je trouve aussi que les scènes des années 1925, 1930, 1935 sont les plus réussies (les moins ratées ?), notamment lorsqu'un morceau de musique est intégré au déroulement de l'intrigue (alors que la musique d'accompagnement est plutôt pénible, soulignant ostensiblement certaines événements). Les deux comédiens principaux ont bénéficié de bonnes doublures piano (l'une d'entre elles s'appelant Lecocq, je crois).
Cette histoire, belle de prime abord, est d'abord gâchée par des dialogues approximatifs et une mauvaise direction d'acteurs. A part Pia Lagrange, il n'y a pas grand monde à sauver... peut-être Philippe Torreton (en industriel patriarcal) et Andréa Ferréol, hélas trop brièvement vue en (grand)maman juive. Le reste de la distribution ne fait pas d'étincelle, du côté français comme du côté allemand. Je crois pouvoir affirmer qu'aucune des scènes se déroulant après la guerre n'est vraiment réussie. Il y a toujours quelque chose de maladroit, d'inabouti, qui me gêne.
Bref, c'est un beau gâchis.
16:55 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
samedi, 01 février 2025
Une Nuit au zoo
Le titre de cette animation franco-belgo-canadienne fait immanquablement penser à La Nuit au musée. Il n'y est pourtant pas question de statues de cire qui prennent vie, à la fin du jour. Mais les pensionnaires du zoo vont connaître un destin comparable puisque, une nuit, après la fermeture de l'établissement, une irruption extra-terrestre va sortir tout ce petit monde de son endormissement... mais pour progressivement les transformer en zombies.
C'est bourré de clins d’œil aux films d'épouvante, de La Nuit des morts-vivants à Alien, en passant par Les Dents de la mer, le méconnu Critters... et même Madagascar (sans les à-côtés nauséabonds) : les héros de l'histoire forment une troupe hétéroclite d'animaux, qui vont devoir apprendre à collaborer pour s'en sortir. Ici, la girafe est remplacée par une autruche, le lion par un puma... et l'on a même un lémurien et une hippopotame, mais naine !
L'action est menée par le puma et une jeune louve au grand cœur, qui finit par rallier le grand costaud à son projet : sauver les animaux infectés, grâce à un procédé totalement abracadabrantesque (mais que je laisse à chacun le plaisir de découvrir).
Sur le fond, le film propose donc un double niveau de lecture, entre l'aventure d'une troupe qui doit (apprendre à) se serrer les coudes (pour les enfants) et les nombreux clins d’œil cinéphiles (destinés aux adultes). On a même droit, en cours de route, aux commentaires de Xavier (le lémurien), qui provoquent un effet de mise en abyme.
L'attelage m'a toutefois semblé bancal. Le côté un peu enfantin des relations entre les personnages empêche les adultes de s'y retrouver pleinement et l'aspect film d'horreur, bien qu'atténué par l'apparence des animaux zombifiés, risque de ne pas convenir au plus jeune public.
C'est dommage, parce que, sinon, cela constitue un honnête divertissement, avec une belle morale.
10:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films
jeudi, 30 janvier 2025
Mufasa
A l'ère du développement durable et de la collecte sélective des déchets, les géants d'Hollywood se mettent au diapason et pratiquent un recyclage éhonté de leurs anciens succès. Et donc, cinq ans et demi après la nouvelle version du Roi lion, en voici la préquelle, elle aussi en animation numérique.
Pour être vraiment honnête, je dois dire que, dans une grande salle, sur l'écran, c'est souvent superbe. Paysages et animaux sont soignés (plus que les dialogues et les chansons en tout cas...), en particulier les félins... et donc je craque.
Derrière cette représentation de gros chats au comportement souvent anthropomorphe, il ne faut pas chercher trop de réalisme, même si, au niveau de l'animation, on a parfois l'impression que les auteurs ont regardé des documentaires animaliers.
Mufasa, le papa de Simba, a connu un destin semblable à celui de son fils. Il a été séparé de sa famille, victime de trahison, a rencontré l'amour en exil, au fur et à mesure qu'il se bâtissait une stature de roi de la jungle. Bref, rien de nouveau sous le soleil, si ce n'est que les personnages féminins (principalement les lionnes) sont très présents dans l'histoire.
Cela dure quasiment deux heures, mais l'on ne s'ennuie pas, tant les péripéties sont nombreuses. Je trouve même que cela va un peu trop vite au début. J'aurais aimé qu'on nous laisse savourer davantage certaines scènes, avec ces magnifiques félins en mouvement.
Sur le fond, il question de famille, d'amitié, d'amour et de solidarité inter-espèces, avec des messages généreux, bien que parfois un peu cucul-la-praline. La beauté des images aide à supporter ces points faibles... ainsi que la médiocrité des chansons (entendues en version française).
P.S.
J'ai comme l'impression qu'on nous prépare une suite, centrée sur le personnage d'une jeune lionne...
20:22 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
lundi, 27 janvier 2025
Vol à haut risque
Cela commence comme Ma Cabane au Canada en Alaska et cela continue sur un air de Y a-t-il un pilote pour sauver le témoin ?... Le nouveau film de Mel Gibson oscille donc entre thriller et comédie. On ne sait pas toujours s'il s'agir de premier ou de second degré... et cela vaut peut-être mieux.
Les trois quarts de l'histoire se déroulent dans un avion, un vieux Cessna dont on se demande s'il a vraiment besoin des péripéties qui se déroulent à l'intérieur pour risquer de s'écraser. J'ai trouvé ce huis-clos assez réussi, entre un pilote psychopathe, une US Marshall autoritaire et un témoin casse-couilles.
Cependant, Mark Wahlberg en fait trop dans le genre tueur impitoyable, dingo... et à moitié chauve ! (Mais qui est responsable de cette caractérisation ridicule ?) Même chose pour Topher Grace, l'horripilant comptable repenti d'un gang mafieux. En revanche, Michelle Dockery (déjà très emballante dans Downton Abbey II) est absolument délicieuse en policière autoritaire, tenace, mais tout de même un peu tenaillée par son passé. J'ai pris beaucoup de plaisir à la voir menotter... et frapper ces messieurs. Ils ont bien de la chance !
L'agent Madelyn Harris a donc fort à faire, entre un assassin complètement barré, un témoin au mental d'un gamin de dix ans, une patronne un peu à l'ouest (et suspecte), le patron de sa patronne lui-même aussi suspect... et un contrôleur aérien dragueur... mais dont elle a bigrement besoin pour tenter de mener l'avion à bon port.
L'intrigue est cousue de fil blanc, mais contient quelques moments spectaculaires et/ou cocasses. L'écrin alaskien de ce périple aérien est très joli... mais totalement virtuel : ça a été tourné à Las Vegas, dans un machin ultra-moderne.
Cela fait agréablement digérer un repas, en soirée, mais cela sera assez vite oublié.
23:01 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Jouer avec le feu
C'est dans une salle remplie de mamans et de grands-mamans que je me suis retrouvé pour voir ce film consacré à un papa formidable. Vincent Lindon a la cote auprès de ces dames et il est vrai qu'on lui a taillé un costume des plus séduisants : veuf inconsolable, papa poule pour ses fils déjà grands, cheminot caténairiste pointilleux, ancien militant syndical (sans doute CGT) et toujours militant de gauche, de la vraie, celle qui n'aime ni les racistes ni les patrons.
... et cela tombe bien (ou mal), puisque l'un de ses fils va se faire entraîner par une bande de crânes rasés aux idées courtes. Ce fils est incarné par un autre acteur formidable, Benjamin Voisin (qu'on a pu voir notamment dans Illusions perdues).
J'ai aimé ce début, où le réalisateur met en valeur le travail des ouvriers du train ainsi que la passion du football, capable de réunir dans les stades ouvriers et cadres, gauchos et fachos, noirs et blancs....
Le père se retrouve dans une situation que nombre de (grands)parents progressistes doivent connaître : voir une partie de sa progéniture contaminée par les idées haineuses, jusqu'à la violence extrême. Dans cette situation, le père est placé devant un dilemme : soit il essaie à tout prix de ramener son fils dans "le camp du bien", quitte à le perdre définitivement, soit il accepte sa dérive, l'espérant temporaire et se positionnant comme un refuge possible pour le jeune homme égaré.
La deuxième heure embarque le film dans une direction inattendue. Deux coups de théâtre font sortir l'intrigue des chemins balisés. Même si je trouve le trait un peu trop appuyé, je reconnais que cette histoire est forte, interprétée par des comédiens de premier plan.
19:19 Publié dans Cinéma, Société | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films, société, france
mardi, 21 janvier 2025
Je suis toujours là
Cette phrase pourrait être prononcée par deux personnages de cette fiction à caractère documentaire. De prime abord, on pense au père de famille, ancien député brésilien (de gauche), ingénieur, qui disparaît au début des années 1970, suite à une arrestation à son domicile. Son absence se fait cruellement sentir, elle rend sa présence (en pensées et en photographies) plus cruciale que jamais.
Mais cette phrase pourrait tout aussi bien sortir de la bouche de son épouse, archétype de la grande bourgeoise qui, après des études universitaires (sans doute inachevées), s'est dévouée à l'éducation des (cinq) enfants et à la tenue de la maison familiale. Formidablement incarnée par Fernanda Torres (qui mériterait de recevoir une statuette en mars prochain), l'épouse un peu compassée doit prendre les rênes de la famille et sortir de sa zone de confort. On la croit dévastée (ce qu'elle est, dans un premier temps), mais elle va bigrement rebondir, de manière assez inattendue (pour qui ne connaît pas l'histoire de la personne qui inspiré ce rôle).
En attendant cette opiniâtre transformation, Walter Salles nous livre une première partie très enlevée. Avec une image d'aspect pelliculaire, des couleurs parfois un peu saturées et une entraînante musique d'époque (brésilienne, anglo-saxonne... et même française), le réalisateur ressuscite le début des années 1970, dans la classe moyenne progressiste de Rio. Les premières années de la dictature militaire semblent avoir peu frappé cette élite, qui s'estime (peut-être à tort...) intouchable. On gagne bien sa vie, on s'amuse et, parfois, on aide les mouvements armés qui s'opposent au régime. Tout cela est montré avec subtilité et une certaine fluidité dans la mise en scène. Les interprètes sont excellents.
Au bout d'un moment, cela se dégrade. Commence alors une sorte de thriller politique, là encore brillamment mis en scène, avec une étonnante économie de moyens. Salles parvient à camper des ambiances très différentes, sans effet tape-à-l’œil. On pense à certains films consacrés à la dictature argentine (comme Garage Olimpo, Buenos Aires 1977, Agnus Dei, Rojo, et, l'an dernier, They shot the piano player) ou à son équivalent chilien (Nostalgie de la lumière, Le Bouton de nacre ou, plus récemment, Chili 1976, dont l'héroïne est aussi une femme).
La fin a parfois désarçonné certains spectateurs. Elle nous fait faire un petit bond dans le temps, nous projetant à une étape de la vie où la mémoire du passé revêt une importance particulière. J'ai trouvé cette conclusion très émouvante et le film, globalement, remarquable. C'est mon premier coup de cœur de l'année 2025.
20:22 Publié dans Cinéma, Histoire, Politique étrangère | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
dimanche, 19 janvier 2025
Personne n'y comprend rien
Le titre est une citation de Nicolas Sarkozy, lors d'un entretien télévisé au cours duquel il se défend des accusations portées contre lui. Les journalistes de Mediapart le "prennent au mot". Devant la caméra de Yannick Kergoat, ils ont pour objectif de rendre intelligible l'ensemble de ce qu'on peut appeler "le dossier Kadhafi", auquel ils ont déjà consacré un livre. L'avertissement du début comme le texte qui s'affiche à la fin (qui évoquent la présomption d'innocence) sont à considérer avec recul. Je pense que ce sont des précautions pour éviter des poursuites, le film étant un brûlot à charge, qui sort à point nommé, quand débute un nouveau procès de l'ancien président de la République.
Pour que cette heure quarante consacrée à des magouilles politico-financières ne soit pas trop austère, un dispositif audiovisuel a été mis en place. Le cœur du documentaire est constitué d'entretiens face caméra, dans ce qui ressemble à un appartement bourgeois du centre de Paris. Ces séquences sont croisées avec des archives télévisuelles, des extraits d'articles... presque tous de Mediapart (exceptionnellement du Monde ou de Libération, où a jadis travaillé Laske). Sur les affaires Sarkozy, il manque notamment les enquêtes du Canard enchaîné... mais, étant donné les mauvaises relations qu'entretient Laske avec sa direction, cette absence n'est guère étonnante.
A ce matériau de base sont ajoutés des documents issus des dossiers judiciaires, notamment des écoutes téléphoniques et des relevés de textos.
Enfin, de manière très pédagogique, une frise chronologique se déroule au bas de l'écran, pour situer tel ou tel événement dans l'historique des affaires politico-judiciaires.
C'est donc assez passionnant à suivre et cela nous fait revivre un pan de l'histoire de la Ve République, de la deuxième cohabitation (1993-1995) au début des années 2020. Outre Nicolas Sarkozy, les principales cibles des auteurs sont Claude Guéant et Brice Hortefeux, auxquels il faut ajouter Thierry Gaubert, "Mimi" Marchand, ainsi que les (troubles) intermédiaires Ziad Takieddine et Alexandre Djouhri.
C'est dans l'utilisation des déclarations de ces deux derniers que l'on sent le plus l'orientation du film. Les journalistes ont choisi de considérer comme fiables les propos qui vont dans le sens de la condamnation de N. Sarkozy et tentent plutôt de démonter les affirmations qui vont en sens contraire. C'est peut-être la partie la moins convaincante du film. Le reste est assez accablant, mais fondé sur très peu de preuves tangibles. Le propos s'appuie bien sur des recoupements (principalement de déclarations), mais on aboutit plutôt à un faisceau de présomptions.
Ainsi, la seule preuve matérielle d'un versement d'argent reliant la Libye à l'entourage de Nicolas Sarkozy est un virement (en deux temps) de 440 000 euros, destiné à Thierry Gaubert, par l'intermédiaire de Z. Takieddine (plus précisément d'une de ses sociétés). Mais rien dans le film ne permet d'affirmer que cette somme, reçue par ce familier de N. Sarkozy, a un lien avec sa campagne présidentielle. Comme le précisent les auteurs du documentaire, Gaubert était de lui-même devenu proche de Z. Takieddine, indépendamment de sa relation avec le futur président de la République. Le versement, incontestablement originaire de Libye, pourrait avoir servi à autre chose.
Du coup, celles et ceux qui n'aiment pas l'ancien président trouveront que le film démontre implacablement sa culpabilité. Celles et ceux qui l'apprécient trouveront que la démonstration repose sur des bases fragiles. Pour moi, le financement de la campagne présidentielle de 2007 demeure toutefois incontestablement entaché de malversations... mais, si les avocats de N. Sarkozy se débrouillent bien, cela pourrait ne déboucher que sur la condamnation des "fusibles", en particulier Claude Guéant.
Une zone grise demeure inexpliquée : pourquoi le camp sarkozyste, qui semblait jusqu'en 2010 si proche du dictateur libyen, a-t-il aussi brutalement retourné sa veste ? (C'était avant que ne sortent les enquêtes.)
10:22 Publié dans Cinéma, Politique, Presse | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films, politique, france, médias, presse, journalisme
samedi, 18 janvier 2025
Hiver à Sokcho
Réalisée par un Franco-Japonais, cette adaptation d'un roman évoque la rencontre de l'Orient et de l'Occident, à travers un métissage franco-(sud-)coréen. L'action se déroule dans une petite ville de province, Sokcho, à proximité de la Corée du Nord.
Cette localisation est l'occasion, pour le réalisateur, de placer l'une de ses séquences aux alentours de la célèbre DMZ, zone démilitarisée qui sert de frontière entre les deux Corée... et qui se visite (sous certaines conditions).
Le début est assez emballant, avec des plans en panoramique ou en travelling, qui présentent le paysage (urbain comme rural) de manière inspirée. Le souci esthétique ne conduit cependant pas le réalisateur à nous livrer une carte postale de cette région : le dessinateur Yann Kerrand (Roschdy Zem, qu'on déjà vu bien meilleur ailleurs) semble débarquer dans une province reculée et loge dans l'une des plus mauvaises chambres d'un hôtel médiocre.
J'ai d'ailleurs été agacé par ce personnage. C'est un Français plutôt mal élevé, un peu mufle sur les bords (et peut-être aussi au milieu), avec un côté "artiste" qu'on a trop exagéré à mon goût. J'ai davantage apprécié la composition de Bella Kim en jeune femme entre deux mondes, trop française pour être considérée par certains de ses concitoyens comme une compatriote pur jus et trop coréenne pour pouvoir passer pour une authentique Française.
A travers son personnage, on nous fait aussi toucher du doigt la pression sociale qui pèse sur les jeunes femmes. Au-delà d'un certain âge, il faut être mariée et il convient de se plier aux canons modernes de la beauté. Le problème est que, quand on voit la comédienne (que je trouve ravissante), on se dit que certaines réflexions sont hors-sujet, ou bien révèlent la bêtise des personnes qui les profèrent, complètement bouffées par la banalisation du recours à la chirurgie esthétique dans ce pays. En revanche, rien ne nous est dit des difficultés qu'a pu rencontrer la mère à élever seule sa fille, de surcroît issue d'une union avec un étranger.
Pendant la majorité du film, le doute demeure sur le personnage de Yann Kerrand : est-il ou pas le père de Soo-Ha ? Qu'est-il réellement venu faire dans ce bled ? Et la jeune femme, que cherche-t-elle en se rapprochant de lui ?
La résolution de ces pseudo-énigmes n'est guère passionnante. En revanche, de nombreuses scènes font preuve d'un véritable sens de la mise en scène, avec une habile utilisation des grands espaces (une plage, un pont urbain) comme des ambiances confinées (une chambre d'hôtel, une minuscule salle de bains). Les scènes de repas sont de plus très alléchantes, faisant un peu penser à L'Odeur de la papaye verte, de Tran Anh Hung.
Du coup, je suis sorti de là mitigé. La forme est réussie, mais je trouve que le fond manque de substance ; il est de plus parfois abordé de manière maladroite.
19:23 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Conclave (le roman)
Quand j'ai évoqué le fait que Conclave, le récent film d'Edward Berger, était l'adaptation d'un roman éponyme, j'ai, presque toujours, provoqué la surprise chez mes interlocuteurs. Pourtant, le bouquin a connu le succès lors de sa sortie en France. Il a bénéficié d'une édition de poche en 2016 et il est ressorti depuis, avec une nouvelle couverture (liée au film). C'est la précédente édition que je me suis procurée, à la fin de l'année dernière :
L'auteur, Robert Harris, est un ancien journaliste, reconverti dans le roman historique, genre dans lequel il a connu le succès (un succès mérité selon moi). J'ai lu plusieurs de ses livres et je n'ai jamais été déçu. Parmi ceux-ci, je conseille notamment Fatherland, Enigma et Archange.
L'adaptation cinématographique est assez fidèle au roman. Parmi les différences, il en est une qui est d'importance : le personnage principal (le Doyen). Dans le film, il s'agit du cardinal Lawrence (un Britannique), interprété (avec talent) par Ralph Fiennes. Mais, dans le roman, ce personnage est italien et s'appelle Lomeli. Cela donne une sensibilité légèrement différente à certaines scènes, selon qu'on les a lues ou vues filmées.
La trame de l'intrigue est grosso modo la même. J'ai préféré le roman en raison des détails supplémentaires qu'il fournit (notamment sur les scrutins). Je trouve aussi qu'il est plus évocateur, sur le plan visuel, quand il est question des déplacements des cardinaux ou des tableaux présents au Vatican. (C'est peut-être dû aussi au talent de la traductrice, Natalie Zimmermann.)
Quand on a vu le film avant de lire le roman (ce qui est mon cas), on repère, à intervalle régulier, les indices disséminés par l'auteur pour annoncer l'ultime coup de théâtre, qui est le même dans les deux œuvres. Du coup, je trouve que la révélation finale est moins abrupte dans le roman que dans le film... et, donc, pour moi, moins grotesque.
(Il serait intéressant de connaître l'opinion de personnes qui ont lu le roman avant, pour savoir si leur ressenti est le même.)
10:52 Publié dans Cinéma, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, roman, littétarure, livre, livres
vendredi, 10 janvier 2025
Criminal Squad : Pantera
Pour profiter pleinement de ce film d'action moulé à la louche, roulé sous aisselles, il n'est pas nécessaire d'avoir vu le premier volet, sorti il y a sept ans.
En revanche, je conseille de choisir une séance en version originale sous-titrée, le plurilinguisme des dialogues contribuant au sel de l'intrigue. Pensez donc : les deux "héros" sont citoyens états-uniens (parlant donc l'anglo-américain, leurs tentatives dans d'autres langues se révélant en général pathétiques), ils vont s'associer avec de redoutables braqueurs originaires des Balkans (parlant le serbo-croate... et sans doute inspirés de la bande des Pink Panthers), se retrouver confrontés à une mafia italienne (pudiquement appelée Octopus...), le tout se déroulant d'abord à Anvers (avec quelques Flamands, pas roses du tout), puis à Nice (en fait aux Canaries, mais bon, on va pas chipoter...).
Du coup, on entend souvent causer dans la langue de Molière François Bayrou, par d'authentiques acteurs francophones... et par d'autres, s'exprimant dans ce qu'on appelle parfois "le français de Hollywood", qui peut passer pour du français pur jus aux oreilles d'un public anglo-saxon qui n'est jamais venu en vacances dans l'Hexagone.
Deux braquages sont au cœur de l'intrigue. Le premier n'est qu'un avant-goût, mais il est efficacement mis en scène. Toutefois, avant qu'on nous serve le plat de résistance de ce film (la séquence du second braquage, vraiment très réussie), il faut attendre un peu et supporter plusieurs scènes plus ou moins bien jouées/dirigées. On a ainsi droit à quelques idées reçues sur les Frenchies (en retard à leurs rendez-vous, bouffeurs de croissants, obnubilés par le football et pas très futés). Quelques traits d'humour font mouche, mais le bilan global est plus que mitigé.
C'est un peu à l'image de la distribution. Gerard Butler (qui coproduit le film, notamment avec le rappeur 50cent...) ne cesse de décliner physiquement. Resplendissant jadis dans 300, il avait encore de l'allant dans La Chute de Londres, beaucoup moins dans La Chute du président et Mayday. Il est désormais proche de la clochardisation. Le réalisateur Christian Gudegast filme avec putasserie gourmandise l'ancien héros qui a perdu de sa superbe... et qui doit désormais compter au moins autant sur son intellect que sur son physique. C'est pas gagné...
Fort heureusement, il est bien entouré. Plusieurs seconds rôles sont incarnés par des vedettes de MMA, musculeuses et teigneuses comme il faut... la plus redoutable étant pourtant Jovanna, une organisatrice aussi séduisante qu'intelligente et déterminée, interprétée par Evin Ahmad, peut-être la révélation de ce film, où elle fait chavirer le cœur de quelques gros bras (sans parler de ceux des spectateurs masculins de la salle).
Complot, faux-semblants, cascades, gadgets numériques et poursuite en voiture sont au programme. On ne s'ennuie pas... mais l'on se désole de l'ultime coup de théâtre, aussi invraisemblable qu'inutile.
22:08 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
samedi, 04 janvier 2025
Six jours
Au début de l'histoire, ces six jours sont ceux qu'il reste à la police pour boucler une enquête criminelle (ou, du moins, trouver de nouveaux éléments permettant d'obtenir le prolongement du délai) avant que la prescription ne soit atteinte. Aujourd'hui, le délai a été porté à trente ans mais, à l'époque, il ne courait que sur dix ans.
Une partie du film est donc constituée d'une course contre la montre, celle que mènent un commandant de police obstiné (Sami Bouajila, impeccable) et la mère d'une enfant (Julie Gayet, surprenante), une cadre sup' qui n'a pas coutume de renoncer. A cette trame principale se mêlent des événements s'étant déroulés dix ans auparavant... et d'autres, se produisant, à l'inverse, des mois plus tard. C'est l'occasion de souligner la qualité du montage, à deux niveaux. D'une part, il croise habilement les époques, celles-ci étant identifiables sans peine. D'autre part, à certains moments, une scène est volontairement coupée pour que nous n'en connaissions pas immédiatement la conclusion. Cela provoque un effet de suspens et nous oblige à nous poser des questions quand on voit une scène ultérieure, sans savoir exactement comment la précédente s'est achevée.
Vous me sentez emballé par ce film (et c'est le cas)... et pourtant, au début, j'ai eu très peur. La première séquence m'est apparue trop mélo, larmoyante, avec une grosse musique pour souligner le drame. De surcroît, j'avais du mal à comprendre précisément comment un personnage pouvait être décédé. Il convient toutefois d'être très attentif à ce qu'on nous montre, parce que nous allons revivre cette séquence à deux reprises. Du point de vue d'une femme, on passe à celui d'un homme (qui revit ce moment traumatique), puis à celui d'un troisième personnage, vers la fin.
C'est donc une histoire très bien conçue, bien filmée (par l'auteur d'Insensibles), même si l'on a parfois un peu abusé de la pluie (ce qui peut s'expliquer par le fait que l'intrigue est inspirée de celle d'un film sud-coréen). Les acteurs sont épatants. Bouajila et Gayet sont (efficacement) épaulés par des figures de la fiction télévisuelle : Marilyne Canto, Manon Azem (une ex de Section de recherches), Philippe Resimont, Dimitri Storoge, Yannick Choirat, Gilles Cohen.
Je ne vais pas trop en rajouter, mais sachez que l'intrigue comporte une sorte de twist et que celui-ci est porteur de sens. Comme dans le récent Juré n°2 d'Eastwood, à un moment, certains personnages se demandent si la morale est compatible avec le strict respect de la loi. Même si leurs histoires sont différentes, ces deux films mettent en scène de manière convaincante un dilemme moral. Cela permet à ce modeste polar d'attendre un niveau inattendu. C'est l'excellente surprise de ce début d'année 2025.
23:28 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
Sarah Bernhardt, la Divine
Ce faux biopic entrelace plusieurs périodes marquantes de la vie de la célèbre comédienne, en particulier 1896 (avec la journée hommage organisée en son honneur) et les années 1914-1923, les dernières de son existence tumultueuse. Diverses allusions à d'autres époques (notamment les années 1870 et 1880) parsèment l'intrigue, afin de brosser un portrait sensé être fidèle d'une femme hors du commun.
Pour l'incarner, il fallait une actrice d'exception : Sandrine Kiberlain, entourée d'une fine équipe empruntée à la Comédie française, à laquelle l'héroïne a d'ailleurs appartenu.
Derrière la caméra se trouve Guillaume Nicloux, qui nous a ravis l'an dernier avec Dans la peau de Blanche Houellebecq. Hélas, la plupart du temps, son talent n'est guère perceptible... à part dans la scène du début, qui n'est pas ce qu'elle semble être de prime abord. La suite est beaucoup plus conventionnelle, comme un film de commande.
Je suis aussi partagé à propos des dialogues. On a certes ménagé de nombreuses saillies au personnage principal (qui n'avait pas la langue dans sa poche et faisait souvent preuve d'une déstabilisante franchise), mais, trop souvent, on place des répliques littéraires dans la bouche d'acteurs qui ont l'air engoncé dans leurs beaux habits. (Ces tenues, tout comme les décors, flamboyants, sont toutefois à porter au crédit du film.)
Concernant le fond, là encore je ne suis guère enthousiasmé. J'ai eu l'impression qu'on juxtaposait des épisodes, plus précisément des rencontres : Sarah Bernhardt et la Guerre de 14, Sarah Bernahrdt et l'Affaire Dreyfus, Sarah Bernhardt et Victor Hugo, Sarah Bernardt et Edmond Rostand, Sarah Bernhardt et Sacha Guitry, Sarah Bernhardt et Emile Zola (à propos duquel le film affirme -de manière erronée- que c'est la comédienne qui l'aurait poussé à écrire son J'Accuse !)... Je pense qu'on a aussi exagéré la place occupée par sa liaison avec Lucien Guitry (très bien incarné par Laurent Lafitte, ceci dit).
La volonté de faire l'éloge d'une femme libre, intellectuellement et sexuellement, est tout à fait respectable, mais le résultat, sans être déshonorant, est un peu "pompier".
16:03 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
vendredi, 03 janvier 2025
Un Ours dans le Jura
Comme le déclarent assez vite deux des protagonistes de cette histoire, il n'y a pas d'ours dans le Jura... ou plutôt il n'y en a plus, depuis le milieu du XIXe siècle. Et pourtant... la première séquence nous présente un plantigrade d'assez grande taille, ma foi... en tout cas assez grand pour foutre la trouille aux humains qu'il croise. L'effet domino provoqué par sa présence, croisée avec celle de trois groupes d'humains, est efficacement mis en scène et monté.
Cela m'a mis dans de bonnes dispositions... et heureusement, parce que la suite n'est pas sans défauts, ni invraisemblances. Ainsi, quand Michel, le père de famille (Dubosc, plus ou moins convaincant) raconte ce dont il est responsable, il ne veille pas à ce que son fils n'entende pas. Plus loin, d'un plan à l'autre, son épouse (Laure Camaly, excellente) porte ou ne porte pas de gants, à un moment où c'est particulièrement crucial. Je pourrais aussi parler d'un téléphone portable, qu'une personne montre à un gendarme et qu'elle semble oublier de reprendre quand elle quitte le poste...
Néanmoins, globalement, la mécanique du rire fonctionne. Une ambiance à la Fargo règne dans cette partie du Jura, dont les habitants ne sont pas particulièrement futés... et où l'on prend parfois quelques libertés avec le respect strict de la loi. Compte tenu de la place que prend le personnage de Cathy (qui a les couilles que semble avoir perdues son mari), j'ai aussi pensé à Bonne conduite, où Laure Calamy s'était déjà distinguée.
Les autre seconds rôles sont en général bien campés. Emmanuelle Devos nous gratifie d'une jolie prestation en tenancière du Cupidon, un établissement pour adultes consentants... et les truands sont particulièrement redoutables, interprétés par des acteurs qui ont des tronches patibulaires (mais presque). Poelvoorde incarne un major de gendarmerie à la fois dépressif et débonnaire... mais le personnage de sa fille est vraiment agaçant (même si sa petite aventure nocturne ne manque pas de saveur). De manière générale, je trouve qu'on nous représente des parents plutôt laxistes avec leurs enfants. Quant au curé, je l'ai trouvé joué de manière appuyée (à l'image de certaines scènes d'ailleurs). Dubosc vise le comique de base, il ne fait pas dans la dentelle... et cela fonctionne.
Le film se veut aussi rassembleur sur certains thèmes. Ainsi, le couple formé par Cathy et Michel bat de l'aile et cette aventure va le ressouder. Dans le même ordre d'idée, les gendarmes sont dépeints comme bienveillants, notamment avec les migrants clandestins, qui sont tous des gars gentils. Enfin, le "pognon de dingue" récupéré dans le sac de sport va susciter beaucoup de convoitises... et finir par "ruisseler" sur le village. (On notera toutefois que certains bénéficiaires se lancent dans des achats qui n'ont pas grand chose à voir avec la subsistance.)
Au final, j'ai passé un bon moment, mais cela ne restera pas dans les mémoires.
P.S.
Aux spectateurs qui restent jusqu'à la fin, on propose une scène supplémentaire, qui voit le retour d'un protagoniste du début (indice : il s'appelle Valentin)...
13:09 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film, films
mardi, 31 décembre 2024
Les "Riton" 2024
Voici venu le temps des rires et des chants des palmarès en tout genre. Comme le veut la tradition inaugurée il y a 18 ans (comme le temps passe...) sur ce blog, je vais proposer mon palmarès cinématographique de l'année écoulée. Pas plus que pour les précédentes promotions, je n'ai pu effectuer un choix limité à un podium, ni même à dix films.
Cette année 2024 a été marquée, pour moi, par un retour gagnant de la comédie. C'est d'ailleurs l'une d'entre elles (que je n'inclus pas dans ce palmarès), qui arrive en tête des entrées, en France : Un p'tit truc en plus.
Riton de la comédie malpensante : Dans la peau de Blanche Houellebecq
Riton de la comédie misanthrope : Dîner à l'anglaise
Riton de la comédie incisive : Vampire humaniste cherche suicidaire consentant (un des films de l'année)
Riton de la comédie mordante : Le Procès du chien
Riton de la comédie sépulcrale : Beetlejuice Beetlejuice (un des films de l'année)
Riton de la comédie qui tombe à l'eau : A toute allure
Riton de la comédie qui tombe à pic : The Fall Guy (un des films de l'année)
Riton de la comédie casse-gueule : Le Deuxième Acte
Riton de la comédie sans queue ni tête : Daaaaaali ! (un des films de l'année)
2024 fut aussi un bon cru pour les polars, plus ou moins déjantés.
Riton du polar (presque) sans queue : Drive-away Dolls
Riton du polar "burné" : LaRoy (un des films de l'année)
Riton du polar au masculin : A Man
Riton du polar maternel : Sons
Riton du polar de gonzesses : Santosh (un des films de l'année)
Riton du polar juridique : Le Fil
Riton du polar historique : Le Tableau volé
Cela m'amène tout naturellement aux films à caractère historique, peu nombreux dans ce florilège, mais marquants.
Riton du film antiraciste subtil : Chien blanc
Riton du film anti-communiste efficace : Rendez-vous avec Pol Pot
Riton du film archi-mémoriel : Une Vie
Riton du film extra-concentrationnaire : La Zone d'intérêt (un des films de l'année... peut-être même LE film de l'année, pour moi)
2024 a aussi vu la sortie en salles de plusieurs documentaires particulièrement bien conçus.
Riton du biopic féminin : Leni Riefenstahl, la lumière et les ombres
Riton du biopic matriarcal : Bye bye Tibériade
Riton du biopic musical : They shot the piano player
Riton du biopic sociétal : Hospital (un des films de l'année, à classer avec Law and order et Juvenile Court)
Riton du biopic générationnel : La Ferme des Bertrand (un des films de l'année)
De nombreuses fictions, françaises comme étrangères, ont abordé des thèmes sociétaux, avec plus ou moins de talent et de subtilité. Voici celles qui m'ont marqué :
Riton de la famille déconstruite : En fanfare
Riton de la famille persécutée : Le Dernier des Juifs
Riton de la femme persécutée : La Jeune Fille et les paysans
Riton de l'oubli de la persécution : Memory
Riton des persécuteurs stupéfiants : Blink Twice
Riton des persécuteurs en uniforme : Heroico
Riton du coupable moral : Juré n°2 (un des films de l'année)
Certaines bonnes fictions ont l'apparence de documentaires :
Riton d'une société moyen-âgeuse : Chroniques de Téhéran (un des films de l'année)
Riton du juridisme européen : Une Affaire de principe
Riton d'une société injuste : Si seulement je pouvais hiberner
La catégorie des films d'animation demeure une valeur sûre, même si, pour moi, ce ne fut pas une année particulièrement enthousiasmante, certaines œuvres très attendues ayant déçu.
Riton de l'animation féérique : Krisha et le Maître de la forêt
Riton de l'animation maléfique : La plus précieuse des marchandises (un des films de l'année)
Riton de l'animation passéiste : Détective Conan : l'étoile à un million de dollar
Riton de l'animation futuriste : Mon Ami Robot
Riton de l'animation catastrophiste : Le Robot sauvage
Riton de l'animation survivaliste : Flow
Riton de la suite réussie : Kung Fu Panda IV
Je termine par une brochette de films inclassables, tous de grande qualité.
Riton du feuilleton à l'ancienne : Le Comte de Monte-Cristo (un des films de l'année)
Riton du petit nouveau de la galaxie : Kraven the Hunter
Riton du Marvel le plus jouissif : Deadpool & Wolverine (un des films de l'année)
Riton brillant et déjanté : Pauvres Créatures (un des films de l'année)
Si j'ai bien compté, cela fait 46 très bons films, parmi lesquels je distingue quinze œuvres particulièrement emballantes, seule peut-être La Zone d'intérêt se plaçant au-dessus du lot.
Archives "ritonnesques" :
- les "Riton" 2023
- les "Riton" 2022
- mes César pour 2021
- les "Riton" 2020
- les "Riton" 2019
- les "Riton" 2018
- les "Riton" 2017
- les "Riton" 2015 : non décernés
- les "Riton" 2014
- les "Riton" 2013
- les "Riton" 2012
- les "Riton" 2011
- les "Riton" 2010
- les "Riton" 2009
- les "Riton" 2008
- les "Riton" 2007
- les "Riton" 2006
18:24 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cinéma, cinema, film, films
dimanche, 29 décembre 2024
Juvenile Court
Ce documentaire clôt la trilogie Il était une fois l'Amérique, de Frederick Wiseman. Après avoir passé une partie de l'année 1968 à Kansas City, pour Law and order et 1969 à New York, pour Hospital, le réalisateur s'est rendu (en 1972) dans l'ouest du Tennessee, à Memphis, pour y suivre l'activité du tribunal pour enfants. (J'ai le fol espoir de voir un jour en salles Welfare, sorti en 1975, qui complète les trois précédents.)
Le documentaire nous montre le travail de différentes catégories de personnes. Il n'a filmé qu'un seul juge des enfants, un type droit, un peu terne, soucieux à la fois de protéger la société et de préserver les intérêts des mineurs. Parfois, cela semble assez facile (quand les cas sont limpides). Parfois, c'est particulièrement complexe. Le magistrat travaille en étroite collaboration avec des policiers, des procureurs, des avocats, des assistantes sociales (dont une vraiment très très jolie... et douce avec ça), des médecins, des psychiatres, des membres d'associations. On assiste par exemple à un entretien préliminaire, au cours duquel trois des cinq personnes présentes dans le bureau s'expriment : le juge bien sûr, mais aussi le psychiatre et l'assistante sociale. Il s'agit de déterminer le profil du mineur dont il est question, ainsi que d'évaluer l'ambiance familiale dans laquelle il évolue.
Les mineurs dont il est question sont soit les victimes, soit les auteurs des méfaits... mais il arrive qu'un primo-délinquant soit aussi une victime. On ne nous le dit pas, mais on peut le déduire du montage des différents entretiens, y compris les interrogatoires par le juge, qui précèdent une éventuelle audience. Dans son bureau se succèdent Noirs comme Blancs, davantage de garçons que de filles. Celles-ci sont en général plutôt des fugueuses, ou des voleuses, voire des droguées, soupçonnées de se livrer à la prostitution. Cette question se pose notamment pour une gamine de onze ans (!!!), visiblement peu surveillée par ses parents, sa mère ne vivant officiellement que de l'aide sociale... mais, comme l'un des adultes s'enquiert d'éventuels rapports sexuels, on est amené à se poser diverses questions. (La gamine pourrait déjà ne plus être vierge -à onze ans...- et sa mère pourrait tirer l'essentiel de ses revenus d'une prostitution occasionnelle...) Plus tard, on voit aussi une petite fille accompagnée de sa mère, qui accuse un garçon, chargé de garder ses enfants, de s'être livré à des attouchements sur sa fille.
Les faits reprochés aux mecs sont en général plus graves : agression sexuelle, vol à main armée, consommation et vente de drogues... Tous les types de famille semblent touchés, puisque, lorsqu'on voit les parents, il apparaît que certains d'entre eux sont issus de la classe moyenne (voire aisée).
Ceci dit, dans les séquences qui nous sont proposées, tout le monde (ou presque) est bien habillé (les costumes des policiers semblant de moins bonne facture que ceux du juge et des avocats). Peut-être est-ce dû au fait que les acteurs de ces procédures ont été au préalable informés qu'il allaient être filmés. Sinon, c'est peut-être lié à la solennité des lieux. Presque toutes les scènes ont été tournées dans l'enceinte du tribunal, un bâtiment qui en impose.
Il n'est d'ailleurs pas composé que de l'accueil et de la salle d'audience. De multiples bureaux ont été installés (sans doute dans les étages). Je crois avoir remarqué la présence d'une infirmerie, d'un vestiaire (pour habiller les enfants en cas de besoin)... et même d'un salon de coiffure ! D'autres images nous montrent des chambres de ce qui ressemble à un internat.
Cela nous amène à ce que risquent les mis en cause. Ce peut être juste un rappel à la loi ou une mesure éducative. Le plus souvent, on parle d'un placement en famille d'accueil ou de l'envoi dans un centre de redressement. La prison n'est évoquée qu'exceptionnellement et les intervenants sont en général d'accord pour estimer qu'elle n'est pas la solution pour leurs "clients", sauf ceux qui semblent sur le point de devenir des criminels endurcis.
Contrairement aux eux précédents films, assez brefs (1h20-1h25), celui-ci s'inscrit dans la durée (2h25). S'il aborde une assez grande diversité de cas, Wiseman a suivi particulièrement certains d'entre eux, presque du début à la fin : la jeune fugueuse, le drogué récidiviste touché par la foi, le babysitteur pervers, le chauffeur du braqueur de commerces.
C'est passionnant. Je recommande vivement.
20:47 Publié dans Cinéma, Histoire, Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire
Ernest Cole, photographe
Ce documentaire retrace la vie du photographe sud-africain, connu pour avoir été l'un des premiers à révéler, par ses images, le fonctionnement du régime raciste d'apartheid mis en place en Afrique du Sud, après la Seconde Guerre mondiale. Le commentaire du réalisateur Raoul Peck est dit à la première personne, comme si Cole racontait sa propre histoire.
La première partie est pour moi la plus intéressante. A l'aide d'images d'époque, on nous fait découvrir l'Afrique du Sud au sortir de la guerre, avec ses villes modernes où les Noirs et métis ne sont autorisés à circuler que s'ils ont un permis de travail... et avec ses bidonvilles, où sont concentrés les "indésirables", à commencer par la famille de Cole. Son quartier a d'ailleurs été détruit à l'occasion d'une opération immobilière.
Une partie des photographies qui nous sont proposées sont celles prises par le jeune homme. Elles sont complétées par d'autres et par des extraits de films, soit d'actualité (quand un dirigeant du Parti National est concerné), soit de reportage (je pense notamment à certaines vues urbaines). Je trouve que la profusion est trop grande. On n'a pas souvent l'occasion de s'arrêter aux détails de ce qui nous est montré, sauf à une ou deux occasions, quand telle photographie est décryptée. Si ce procédé avait été plus souvent reproduit, le film aurait été passionnant.
La deuxième partie évoque la vie de Cole après son départ d'Afrique du Sud, en Europe puis aux États-Unis. Il y publie le recueil de photographies qui va le rendre célèbre, House of Bondage... et qui rend tout retour impossible dans son pays d'origine, tant que l'apartheid y persistera.
Cette période nord-américaine voit Cole s'intéresser tout particulièrement à la cohabitation entre Blancs et Noirs, à une époque où le pays sort de la ségrégation. Il a beaucoup pris en photo les couples mixtes. Il a aussi voulu documenter les conditions de vie des Afro-Américains aussi bien dans les villes que dans les campagnes. Là encore, la profusion d'images (la plupart non commentées) finit parfois par nuire au film. En général, quand les photographies ne sont pas de Cole, c'est précisé, tout comme leur source. C'est rarement le cas des extraits filmiques.
La dernière partie est consacrée à la déchéance de Cole, qui finit dans la misère, complètement démoralisé, ne prenant plus de photographie. Les causes de cette déchéance ne sont pas bien expliquées. Le réalisateur avance le mal du pays. Il réfute tout dépendance à une drogue. La fin de vie d'Ernest Cole conserve une part de mystère (il est mort d'un cancer à quarante-neuf ans)... tout comme le parcours de centaines de ses négatifs, que l'on croyait disparus, et qui ont été retrouvés dans le coffre d'une banque... suédoise.
Le documentaire mérite le détour, surtout pour sa première partie, mais, vu la manière dont le film a été encensé, je m'attendais à mieux.
11:02 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films, histoire