samedi, 30 octobre 2010
Fin de concession
C'est le nouveau film de Pierre Carles, journaliste engagé, critique des media de masse, mais au ton dégagé. Pour ceux qui ne connaissent pas le personnage, le premier quart d'heure revient sur les "faits d'armes" de ce trublion du petit écran, relégué aujourd'hui dans les rares salles obscures qui passent ses films.
Il est toujours question de la dénonciation des connivences entre monde politique, milieux économiques et media, ici à travers l'exemple initial de la privatisation de TF1, en 1987. Carles s'appuie sur des images souvent inédites (en tout cas pour moi), notamment celles montrant la préparation de l'audition des représentants du groupe Bouygues. On voit le rôle joué par Bernard Tapie (déjà !) qui, soit dit en passant, est vraiment excellent, le meilleur de la bande, qui n'est pas très fringante à l'oral.
De là, Pierre Carles essaie de rebondir et de rencontrer les acteurs de l'époque, plus de 20 ans après. Le problème est qu'il est désormais très connu. Du coup, beaucoup refusent de le rencontrer (Tapie finit par être très franc au téléphone), l'esquivent (comme Jacques Chancel, excellent fil rouge de la dégonfle), ou se préparent : on sent bien que Jean-Marie Cavada a anticipé son entrevue. Le réalisateur en vient même à se grimer (légèrement) et se présente sous l'identité vaguement travestie de Carlos Pedro (et non Carlo Pierro, comme il est écrit dans la critique parue dans Le Monde) pour pouvoir accéder à certains personnages.
Du coup, le film peut paraître moins réussi que l'excellent Pas vu, pas pris. A l'époque, Carles faisait merveille en faux ingénu, une sorte de Socrate contemporain, qui finissait par mettre ses interlocuteurs face à leurs contradictions, leurs lâchetés.
On n'est plus dans le cadre de l'opposition David contre Goliath. Pierre Carles est devenu quelqu'un avec qui compter dans le monde des media, même s'il n'a pas obtenu la reconnaissance officielle. Et puis... ses adversaires ont vieilli. (Carles aussi : il est désormais grisonnant !) Le réalisateur, encore dans la force de l'âge, est en position de force face à Etienne Mougeotte voire Michèle Cotta, qu'il décide d'épargner. A un moment, il se demande même dans quelle mesure il n'a pas été récupéré par le système. (Peut-être aurait-il fallu enquêter davantage, préparer encore plus les entretiens.)
Fort heureusement, Pierre Carles a du recul et le sens de l'humour. Le film est donc fortement imprégné d'autodérision. On rit beaucoup, souvent aux dépens du réalisateur, aussi aux dépens de ses victimes. Celles-ci sont cependant très habiles. En 2009, il est difficile de piéger les vedettes de l'information... et certaines d'entre elles, telle Elise Lucet, assument d'avoir les ailes rognées. Contrairement à Pierre Carles, elles ont accepté de faire des concessions, pour travailler pour le petit écran.
Le constat final est donc désabusé : l'activisme n'a pas payé, puisque les menteurs et les fraudeurs (ou leurs successeurs) sont toujours en place et que l'information de masse semble verrouillée par les puissants, avec certaines soupapes de sûreté toutefois. On pourrait être moins pessimiste, juger qu'on ne nous montre que ce qui va dans le sens du propos initial et estimer que, d'après les sources sur lesquelles s'appuie Pierre Carles, il existe en France de nombreux journalistes qui font du bon travail, même s'ils ne sont pas les plus connus.
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mardi, 26 octobre 2010
Des Hommes et des Dieux
C'est seulement un mois après sa sortie que ce film est arrivé à Rodez... et je ne vous raconte pas la queue qu'il fallait faire pour le voir dès son arrivée ! Il fait recette auprès du troisième âge, notamment des croyants peu habitués aux salles de cinéma. Cela m'a un peu rappelé l'ambiance autour du Grand Silence (joli film, soit dit en passant).
Les deux "fils rouges" de l'action sont les travaux quotidiens des moines et les relations entretenues avec les villageois algériens (musulmans). Dans ce dernier cas, c'est le médecin du groupe (interprété par l'inénarrable Michael Lonsdale) qui joue le plus grand rôle, devenant même, parfois, conseiller sentimental. Les autres donnent aussi des coups de mains, dans d'autres domaines. Chacun accepte la foi de l'autre. Bref, s'il n'y avait pas eu la période coloniale, on pourrait parler d'idylle franco-algérienne.
Les acteurs sont épatants, ceux qui incarnent les moines comme ceux qui jouent les villageois... sans oublier ceux qui interprètent les terroristes du GIA. A ce sujet, Xavier beauvois laisse la porte ouverte à toutes les interprétations concernant la mort des moines.
Le succès rencontré par ce film est ambigu. D'un côté, on pourrait penser que son oecuménisme a plu dans cette période d'affrontement des cultures. D'un autre côté, il est possible que certains spectateurs se sentent, aujourd'hui en France, dans la position des moines de Tibéhirine de l'époque, assiégés. L'islam peut être perçu comme une menace. En tout cas, il est mal connu. Plus largement, l'évocation de la foi sincère de ces vieux chrétiens a suscité l'intérêt.
Le film semble vouloir montrer qu'ils ne cherchaient pas la mort (sauf peut-être un ou deux). Ils ont perçu comme étant leur mission de maintenir les liens avec les villageois algériens et d'exercer la charité. En cela, ils donné un témoignage de leur foi. C'est le sens originel du mot "martyre".
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jeudi, 21 octobre 2010
Elle s'appelait Sarah
... "Elle n'avait pas huit ans / Sa vie c'était douceur, rêves et nuages blancs / Mais d'autres gens en avaient décidé autrement"..." Oui, comme vous sans doute, le titre de ce film a évoqué pour moi ces paroles de la chanson de Jean-Jacques Goldman, Comme toi.
Je ne sais pas si c'est voulu mais, dans la chanson comme dans le film (tiré du roman éponyme de Tatiana de Rosnay), il est question d'une petite fille juive victime de la déportation pendant la Seconde guerre mondiale.
Cependant, le film, assez habilement, entrecroise deux histoires, celle d'un couple contemporain, en crise (aucun des deux n'étant juif) et celle d'une famille arrêtée lors de la rafle du Vel d'Hiv'. Le début rappelle d'ailleurs certaines scènes de cet autre film, sorti l'an passé, La Rafle. La parenté est très forte quand l'action se déroule à l'intérieur du vélodrome et quand il est question de l'attitude des policiers et gendarmes français.
Toutefois, ce film est à mon avis supérieur sur le plan cinématographique, ne serait-ce que par les choix de mise en scène du réalisateur. Une partie est montrée au niveau du regard des enfants. Certains plans, notamment ceux filmés du dessus, ont une charge émotionnelle assez forte.
L'intrigue se noue autour d'un appartement, propriété de la belle-famille de l'héroïne (incarnée à merveille par Kristin Scott-Thomas, vraiment épatante d'engagement, de trouble et de sensibilité). On finit par comprendre que ce logement a été acquis en août 1942... Julia a-t-elle raison de soupçonner le pire ? Qu'est-il arrivé au petit frère qui avait été caché dans le placard de la chambre ? Sarah a-t-elle survécu ? L'enquête à la fois professionnelle et personnelle de la journaliste franco-américaine réserve bien des surprises...
Même si l'on peut regretter quelques facilités (et une fin que l'on voit venir à 10 kilomètres), l'ensemble est prenant, bien fichu et, franchement, j'ai été plusieurs fois très émouvé.
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samedi, 16 octobre 2010
Cleveland contre Wall Street
Quand on habite l'Aveyron, il faut vraiment être particulièrement motivé pour voir ce film, sorti à la fin du mois d'août, et auquel je n'ai pu avoir accès (en salle) que tout récemment.
Les gérants de salles ont été frileux et pourtant, il traite d'un sujet qui a fait les gros titres en 2008-2009 : la crise des subprimes. L'un des intérêts du film est d'ailleurs de fournir au spectateur un peu perdu des éléments clairs de compréhension du problème, venant de partisans comme d'adversaires de ce procédé financier.
La construction du film est expliquée en introduction. (On peut trouver des informations plus détaillées sur le site du film, dans un entretien réalisé avec le metteur en scène, Jean-Stéphane Bron.) A la base, il y a la colère de victimes des expropriations (souvent noires) et de leurs voisins, à Cleveland, dans l'Ohio. Une association s'est montée et un avocat s'en est approché. La municipalité de Cleveland, dont les finances souffrent particulièrement en raison de cette crise, décide de prendre le taureau par les cornes. L'idée naît de poursuivre en justice les banques qui ont poussé à la signature de ces emprunts aux taux confiscatoires puis mis en œuvre leur titrisation. C'est donc une nouvelle version du pot de terre contre le pot de fer, ou de David contre Goliath.
Le problème est que le procès ne vient pas. Les banques font tout ce qu'elles peuvent pour empêcher sa tenue. Du coup, le réalisateur pense à tourner ce procès de manière fictive, en demandant aux protagonistes de jouer leur propre rôle. Pour les victimes, cela semblait facile. Mais il a fallu aussi dégotter un juge, un avocat pour les parties civiles, un pour la défense des banques... et désigner huit jurés.
Le résultat est vraiment intéressant. Dans la première partie du film, on entend les témoignages de victimes et celui d'un shérif, qui procédait aux expulsions. C'est évidemment émouvant, d'autant plus que le réalisateur a eu l'intelligence d'alterner les scènes de tribunal avec des moments capturés en dehors, dans les couloirs, dans les rues de la ville voire dans les maisons. On assiste même à la vente aux enchères de la demeure de l'un des témoins.
La manière dont le déroulement du procès est rendu est efficace. On nous propose l'interrogatoire puis le contre-interrogatoire des témoins, principalement ceux des parties civiles (les victimes des expulsions). Je pense aussi que le réalisateur a choisi de valoriser ce que chacun avait dit. On ne voit donc pas tout ce qui a été tourné, mais plutôt les meilleurs moments.
Il faut aussi reconnaître à Jean-Stéphane Bron un réel souci d'impartialité : l'avocat des banques n'est pas dénigré... et en plus il est très bon !
Je distingue trois moments particulièrement forts dans ce film. Le premier se place quand vient témoigner à la barre un gérant d'immeubles, ancien courtier... et même ancien dealer (activité dont il reconnaît qu'elle l'a bien aidé dans son métier suivant !). C'est le personnage qui a été choisi pour figurer sur l'affiche. Il s'appelle Keith Taylor et je trouve qu'il a su expliquer simplement le déroulement au quotidien de cette grosse arnaque.
Le deuxième moment fort intervient lorsque témoigne un informaticien, concepteur du logiciel qui a servi aux banques à monter ce qu'il faut bien appeler leur escroquerie. C'est d'autant plus intéressant que le type n'est pas un rebelle, qu'il croit encore dans le système, mais qu'il l'estime dévoyé.
Enfin, on dégustera la séquence qui voit venir à la barre un ancien conseiller de Ronald Reagan, un néolibéral pur sucre. Son contre-interrogatoire n'est pas mené par l'avocat officiel des parties civiles (que, de manière générale, je n'ai pas trouvé très bon) mais par une prof de Droit qui réussit le tour de force de tirer les vers du nez à ce vieux briscard... qui ne s'en rend pas compte !
Restent la délibération du jury et le verdict. Dans un film de procès, je m'amuse toujours à estimer, dès le départ, quelle pourra être la position des jurés. Évidemment, c'est extrêmement subjectif, surtout qu'au début on ne connaît rien d'eux, si ce n'est leur apparence. Hé bien, c'est terrible à dire, mais, à la fin, j'ai retrouvé la grille de séparation du départ. Sachez que le verdict s'est joué à une voix près et que tous ont d'excellents motifs pour justifier leur vote.
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mercredi, 06 octobre 2010
Piranha 3D
De temps à autre, il est bon de rompre avec la monotonie du tout-venant commercial et de se tourner vers des oeuvres plus ambitieuses, quasi philosophiques, à même de répondre à nos questionnements existentiels... Naaaan, je décooooonnne !
Ce petit bijou de mauvais goût fonctionne selon un principe simple. En première partie, on nous montre avec délectation (et pas forcément de recul, c'est l'ambiguïté de ce genre de production, qui se complait dans ce qu'elle prétend dénoncer) des jeunes (aucun obèse, faut pas déconner non plus) assez insupportables : ils sont cons, ils se croient super beaux, ils se la pètent grave. Ami djeunse hétérosexuel, cette séquence est pour toi, puisqu'elle est illustrée par de nombreuses poitrines proéminentes... et pas forcément naturelles. (Le jour où tu veux regarder ce film, pense à envoyer ta copine voir le dernier Twilight.)
Cette première partie n'est pas techniquement irréprochable. Dans certaines scènes, on sent le manque de naturel de ces danseurs, censés être en plein délire. Les clichés que l'on retrouve ne sont pas forcément pris au second degré (c'est variable).
La deuxième partie est la plus gore, avec les piranhas qui se déchaînent. On en a eu un aperçu en introduction, avec Richard Dreyfus en victime expiatrice (petit clin d'oeil aux Dents de la mer). Mais la dernière demi-heure voit le sang gicler abondamment, les membres disloqués, les corps mâchouillés. J'aime tout particulièrement le moment qui voit deux gars tenter de sortir de l'eau une fille attaquée par les bestioles... et dont le corps se rompt en deux ! Pas mal aussi le coup du réalisateur porno (obsédé par les nichons jusqu'à son dernier souffle...) qui se fait bouffer la bite !
Le réalisateur, le Frenchie Alexandre Aja (déjà remarqué pour La Colline a des yeux et Mirrors), a truffé son film d'allusions à des classiques, comme Les Dents de la mer, Alien (dans la séquence dans la grotte sous-marine notamment), Brain Dead (l'officier de police noir qui "fait le ménage" à coups d'hélice de hors-bord n'est pas sans rappeler la fin "à la tondeuse à gazon" du chef-d'oeuvre de Peter Jackson)... et même Titanic ! (Le podium sur lequel se déroule le concours minable de T-shirts mouillés s'effondre un peu à la manière de l'arrière du célèbre bateau dans le film de James Cameron.)
On reste aussi dans les codes du genre. La catastrophe ou le monstre a une fonction immanente : punir les pécheurs, les vilains, les désobéissants... et révéler à eux-mêmes les héros. Cela ne mange pas de pain et contribue à rendre Piranha tout à fait recommandable.
PS
On nous prépare une suite !
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dimanche, 03 octobre 2010
Le Bruit des glaçons
Dans ce film de Bertrand Blier, les glaçons sont une sorte de fil rouge. Présents dans le seau où trempe en permanence une bouteille de vin blanc, ils accompagnent le héros cancéreux (Jean Dujardin, en pleine forme, si j'ose dire) dans presque tous les actes de la vie quotidienne. Le bruit qu'ils font est aussi, je pense, une allusion au mouvement de la vie... jusqu'à la toute fin, que je ne révèlerai pas.
La grande originalité du film est d'incarner le cancer, en la personne d'Albert Dupontel (et de quelqu'un d'autre...), parfait dans le rôle. Les dialogues qui ont été écrits pour ce personnage sont particulièrement savoureux. On retrouve le Blier des Valseuses notamment. C'est donc un film parfois très cru, éventuellement provocateur, sur un sujet sensible.
On sent néanmoins que le réalisateur a eu du mal à tenir le rythme, qui fait alterner moments "calmes", entre tendresse et ironie, et vagues de tempête, parfois très violentes, souvent très drôles. Certaines scènes semblent trop longues, même si l'on a visiblement coupé au montage. Paradoxalement, ce film de moins d'1h25 (en durée effective) peut paraître parfois long... et parfois trépidant.
Les acteurs sont tous bons. Outre les deux mastodontes, on doit noter les prestations d'Anne Alvaro et Myriam Boyer, dans des rôles très différents.
Sur le site internet, en plus des extraits, on peut accéder à un making of pas extraordinaire, mais sympa. (j'adore la séquence des gifles !)
14:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, cinéma, film
jeudi, 30 septembre 2010
Soldat de papier
Ce film russe a pour objectif de montrer les dernières semaines précédant l'exploit de Youri Gagarine, en 1961... du point de vue de l'un des médecins de l'équipe de cosmonautes. L'action se déroule sur deux sites : Moscou et la région de Baïkonour, au Kazakhstan (situé en U.R.S.S., à l'époque), où se construit le cosmodrome.
Le problème est qu'à trop vouloir faire preuve d'originalité, le réalisateur n'aboutit qu'à rater son sujet et susciter l'ennui. La première cause en est ce personnage principal, enfant narcissique qui a mal grandi, objet de vénération mais finalement creux... et qu'est-ce qu'il cause ! Il nous assène des tirades de banalités pseudo-philosophiques dont on se contrefiche !
Les deux héroïnes sont mieux campées. Il y a l'épouse officielle, la citadine, l'éduquée, la sophistiquée et l'autre, la maîtresse de province, plus rustre (mais tout aussi jolie).
Du point de vue de la mise en scène, le film souffre d'un gros défaut : la volonté d'introduire le plus possible d'éléments saugrenus dans une trame en apparence limpide. Cela ne tient pas la route, cela fait "faux", fabriqué (mal). Du coup, l'histoire perd beaucoup de sa force.
C'est en plus assez maniéré, avec des incohérences, comme ce héros qui, retrouvé après une nuit d'errance, est rasé de près, avec des vêtements quasiment impeccables, malgré la boue provoquée par la débâcle...
Il reste quelques (trop rares) moments de vrai cinéma (en particulier quand les personnages principaux ferment leur gueule), comme cette promenade à bicyclette sur la terre gorgée d'eau.
19:25 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma
mercredi, 29 septembre 2010
La Rivière Tumen
Le titre fait référence à un cours d'eau, un fleuve en réalité (bravo au traducteur qui a sans doute mal interprété le mot "river"...), qui sert de frontière entre la Chine, la Corée (du Nord) et la Russie :
Ici, il est question de la partie du fleuve séparant la Corée du Nord de la Chine. L'action se déroule l'hiver, quand le cours d'eau est gelé. Des centaines de Nord-Coréens tentent de franchir cette frontière : la Chine est pour eux un Eldorado, moins dur politiquement que leur pays natal... et surtout plus prospère.
Plusieurs éléments placés dans le cadre sont là pour nous rappeler cette différence : dans ce village chinois loin de tout, les familles ont le téléphone (fixe), la télévision et les enfants sont plutôt bien vêtus. Ceci dit, cette relative aisance est principalement due à l'argent gagné par les adultes qui sont partis travailler en ville, en Chine mais surtout à l'étranger (ici en Corée du Sud). Parfois, un peu de trafic vient mettre du beurre dans les épinards...
Une forme de solidarité se met en place : certains villageois acceptent d'aider les "voisins" coréens, qui font pitié. Mais, ici comme ailleurs, l'arrivée de ce flot de migrants provoque des tensions.
La mise en scène est simple d'apparence. Le réalisateur semble apprécier les plans fixes, parfois agrémentés d'un panoramique. Tout est donc dans la composition des plans, ce qu'on y montre, ce qu'on n'y montre pas. Ainsi, alors que la caméra est centrée sur la soeur du héros (muette depuis la mort de son père), l'apparition, discrète, dans un coin, d'un petit nuage caractéristique nous apprend que le grand-père est dans la pièce d'à côté, en train de fumer sa clope. De la même manière, on comprend ce qui s'est passé dehors, à la sortie de l'épicerie locale, quand on regarde, dans la scène suivante, le bras de l'un des protagonistes... et l'attitude des autres personnages envers lui.
Bref, beaucoup de choses sont dites par les images. Elles sont d'ailleurs parfois superbes, avec ces paysages enneigés, gelés. Les dialogues sont là plutôt pour faire émerger une tension ou la résoudre. Les moments forts sont souvent placés au niveau des repas, très ritualisés. C'est fou comme ce coin de Chine m'a fait penser au Japon (et le réalisateur s'est à mon avis inspiré du cinéaste nippon Ozu).
Le film vaut le déplacement pour le tableau qu'il propose de la vie villageoise (jusqu'au traditionnel cocufiage...) et la description des relations compliquées qui se nouent avec les migrants. Les jeunes garçons, au moins, ont le football pour sympathiser... d'autant que l'un des Coréens est un as du dribble !
Le rythme général n'est pas trépidant, mais j'avoue que j'ai été emballé !
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vendredi, 24 septembre 2010
Hors-la-loi
Voilà donc enfin sur les écrans le film de Rachid Bouchareb (déjà remarqué pour Indigènes... mais je vous conseille surtout Little Sénégal) qui a tant suscité la polémique.
Attention toutefois. Si l'Histoire imprègne fortement l'intrigue, ce film est d'abord un mélange de polar et de film de gangsters. Il est encadré par deux événements forts : les événements de Sétif et de Guelma (du 8 mai 1945) et la manifestation d'octobre 1961 en France métropolitaine.
Entre les deux, l'action se déroule donc principalement en Europe, surtout dans l'agglomération parisienne, avec notamment la reconstitution du bidonville de Nanterre, l'une des grandes réussites du film.
Les trois acteurs principaux, Roschdy Zem, Sami Bouajila et Jamel Debbouze, sont bons, même si je pense que le dernier en fait un peu trop. L'évolution de leurs rapports est passionnante à suivre. Au niveau des acteurs "secondaires", on notera la bonne performance de Bernard Blancan (déjà à l'affiche d'Indigènes... son journal mérite le détour). J'ai été moins convaincu par les autres. Les dialogues (pour ce que j'en ai pu juger : les trois quarts du film sont joués en arabe) m'ont paru plus factices et la direction d'acteur a quelque peu péché.
Si l'on ajoute à cela quelques erreurs factuelles (relevées notamment par une agence de presse qui se dit "indépendante"... comprenez "de droite", les gars), le bilan est partagé. Si vous allez voir ce film pour suivre une aventure de famille, dans un contexte troublé, parfois hyperviolent, en gros, vous en aurez pour votre argent (même s'il y aurait des choses à revoir sur les scènes d'action, le maniement des armes et les "bastons").
Cependant, comparé à Indigènes, Hors-la-loi est sans doute moins réussi sur le plan "civique", même si l'action du F.L.N. est décrite avec nuance. Ce film a tout de même le mérite d'exister.
Sur le site officiel, on peut télécharger le dossier de presse.
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jeudi, 02 septembre 2010
Millénium 3...
... La Reine dans le palais des courants d'air, comme le dit le sous-titre, que je trouve moins pertinent que ceux des premier et deuxième volets (Les Hommes qui n'aimaient pas les femmes et La Fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette).
Si Lisbeth Salander est toujours au centre de l'intrigue, elle agit à distance, puisqu'elle passe une bonne partie du film sur un lit d'hôpital et la majorité du reste en prison. Mais les technologies de la communication permettent de transcender bien des blessures...
Du coup, les journalistes de la revue Millénium occupent le devant de la scène, pour le meilleur et le moins bon : c'est parfois très intéressant (quand ils enquêtent), souvent banal, l'univers des journalistes ayant déjà fait l'objet de maintes représentations cinématographiques. Les auteurs n'ont pas voulu en faire des héros invincibles courant sur la voie royale du succès assuré. Seul Mikael Blomkvist fait figure de superman de l'investigation, avec des burnes d'éléphant.
Des coups de projecteurs sont mis sur les adversaires, ces comploteurs insérés dans l'appareil étatique. Ils sont devenus bien vieux et ces intrigants papys ont de plus en plus de mal à étouffer l'affaire.
C'est dans ce domaine que le film se démarque des précédents. Le gouvernement suédois se décide à réagir et la justice est mise à l'honneur, dans la préparation et la tenue d'un procès qui peut aussi bien déboucher sur la mise hors d'état de nuire de Lisbeth que sur la fin du complot. Cet aspect de l'histoire a dû séduire Hollywood, qui prépare une nouvelle version de la trilogie, avec Daniel Craig dans le rôle du journaliste (je crains le pire...) et une certaine Rooney Mara dans celui de Lisbeth. Je ne connais pas cette actrice, mais je pense qu'elle aura beaucoup de mal à faire oublier l'excellente Noomi Rapace.
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samedi, 14 août 2010
Comme chiens et chats 2...
... La Revanche de Kitty Galore. Le sous-titre, comme une bonne partie du film, sont des allusions à James Bond (le générique de début est interprété par une certaine Shirley Basset... Goldfinger n'est pas loin). Les spectateurs attentifs découvriront, ici ou là, des références à d'autres films, comme Terminator, Les Dents de la mer 2, Le Silence des agneaux, King Kong, Le Seigneur des anneaux (la vilaine, Kitty Galore, une chatte sans poils de race Sphynx, n'est pas sans évoquer le personnage de Gollum)...
C'est donc un vrai film, avec des acteurs humains qui incarnent en général de fieffés crétins, manipulés par les animaux. Ceux-ci ont été soumis à un dressage intense et sont parfois remplacés par un clone numérique. Je pense aussi que, sur certaines images, au véritable animal on a ajouté (notamment au niveau de la gueule) une modification artificielle. C'est bien fichu.
C'est un film d'action, enlevé, pas sanguinolent... et surtout drôle. Le berger allemand Diggs est un gaffeur de première, mais un chien d'action. L'une des premières séquences le voit provoquer une explosion qui le projette vers la caméra... gros plan désopilant à la clé !
Les chiens du D.O.G. s'allient aux chats du M.I.A.O.U. pour contrer l'odieuse Kitty Galore. Cela nous vaut deux très belles entrées : celle d'une chatte Bleu russe (plutôt qu'un chartreux) dans le Q.G. des clébards espions et, un peu plus tard, celle de Diggs (avec difficultés...) au Q.G. du M.I.A.O.U., alerte générale à la clé.
J'ai aussi beaucoup aimé la séquence chez la vieille dame, avec boules de poils fumeurs de joints (très cooool) et tentative de meurtre à l'aide de litière !
En gros, j'ai bien rigolé, je ne me suis pas ennuyé. Les petits peuvent suivre l'histoire de base et les grands s'amuser à décrypter les références et savourer le second degré.
P.S.
Un bémol : le faux bétisier de la fin. Si j'ai ri de bon coeur à ces scènes tantôt câlines tantôt violentes, entre chiens et chats, je n'ai pas du tout apprécié les autres, qui montrent nos amis à quatre pattes déguisés, sans doutes par des vidéastes amateurs (du genre des abrutis qui envoyaient leurs "productions" à Vidéo Gag).
P.S. II
N'arrivez pas en retard, sous peine de rater un court-métrage savoureux : une aventure de Bip Bip et le coyote !
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samedi, 07 août 2010
Inception
... c'est-à-dire "début" ou "commencement", en bon français. (L'étymologie est la même que pour le mot incipit... le genre d'anecdote qu'il est bon de sortir au cours d'un dîner, quand on veut impressionner favorablement la brune pulpeuse qui a bien rigolé quand on a ironisé devant elle sur les tongs ridicules du maître de maison...) Je n'ai rien contre les titres originaux, dont le maintien peut parfois se justifier, mais là, j'ai l'impression qu'on a surtout voulu faire des économies de matériel publicitaire.
Du coup, pour le spectateur français de base non anglophone, le titre est assez mystérieux, ce qui, vu le calibre du réalisateur, peut être un argument en sa faveur. Les producteurs comptent sans doute sur la distribution (internationale et de qualité) pour attirer le public en masse.
Personnellement, j'aurais bien transformé le titre en "Intrusion" ou "Extrusion", vu les pratiques des héros, qui s'introduisent dans les cerveaux pour y dérober des secrets. Cela n'aurait pas rendu compte de l'intention qui a sans doute présidé au choix du titre original : les cambrioleurs de l'esprit sont chargés d'implanter un début d'idée dans l'inconscient d'un rival de leur employeur.
On a voulu concilier deux styles dans ce film, le côté cérébral, propre aux réalisations de Christopher Nolan (voir l'excellent Memento) et le grand spectacle, le clinquant dans lequel il s'est aussi précédemment illustré. Le scénario est donc assez complexe, avec des emboîtements de rêves dont on nous donne un bon exemple au tout début.
L'un des attraits du film est de chercher à savoir quand le personnage principal rêve et quand il est dans la réalité. Ce n'est pas nouveau nouveau et Di Caprio a été vu récemment dans un film qui joue sur ce genre de subjectivité, Shutter Island.
Bref, c'est bien fichu, quelques séquences étant particulièrement impressionnantes, notamment celle qui se déroule à Paris, au cours de laquelle la nouvelle assistante du héros (incarnée par Ellen Page) découvre les possibilités de l'outil onirique auquel elle va participer.
Elle est d'ailleurs le véritable premier personnage féminin de l'intrigue, celui interprété par Marion Cotillard étant assez stéréotypé.
La fin m'a un peu déçu et à quelques occasions, il me semble qu'il manque un raccord. On a sans doute pratiqué des coupures (et c'est parti pour les bonus DVD !). Mais c'est mineur par rapport à l'ensemble, chouette à voir, surtout dans une grande salle.
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jeudi, 05 août 2010
Shrek 4
... sous-titré, en français, "Il était une fin", une jolie trouvaille (meilleure en tout cas que le "Shrek forever after" de la version originale).
Le lieu commun qui circule, à propos de la série, est que les deux premiers films sont géniaux, le troisième raté et le quatrième entre les deux. Si l'inventivité était en effet plus grande dans les deux premiers films, le troisième ne leur est pas si inférieur qu'on l'a dit, à mon avis.
Le quatrième est assez enlevé. Je l'ai vu en version française, ce qui m'a permis de profiter des trouvailles de traduction : l'âne du second monde chante du Renaud (Dès que le vent soufflera) et du Florent Pagny (Ma Liberté de penser). Je me demande si, dans la version originale, les chansons choisies véhiculent les mêmes sous-entendus : le roulis d'un bateau pour le tangage de la roulotte où se trouve Shrek (pour le titre de Renaud) et l'affirmation hors-sujet d'une fausse liberté (pour celui de Pagny).
L'âne, dont la voix est toujours celle du comédien qui double Eddy Murphy, me ravit, tout comme le Chat Potté (pottelé désormais), qui a beaucoup changé mais qui, rassurez vous, nous gratifie, dans la deuxième moitié du film, de son célèbre regard apitoyant.
Les enfants sont très bien, que ce soient les bébés-dragons (que l'on voit peu) ou les petits ogres, qui nous offrent un festival de rots et de pets, à l'occasion d'une des premières séquences, caricaturant la vie de famille dans tout ce qu'elle a de plus frustrant.
Le nouveau monde dans lequel atterrit Shrek est passionnant, avec cette troupe d'ogres résistants à la tête de laquelle se trouve une Fiona très énergique. La nouvelle rencontre des héros mérite le détour. Les méchants sont aussi très réussis, avec le fourbe Tracassin et surtout une armée de sorcières que l'on surprend, au début, en pleine soirée techno !
Reste une petite déception : la "disneïsation" du scénario. La vie (pourrie) de famille qu'a quittée Shrek est son horizon indépassable. On aurait pu finir le film autrement, le couple qu'il forme avec l'autre Fiona étant pour moi plus attrayant. Ceci dit, on passe quand même un agréable moment.
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lundi, 19 juillet 2010
Toy story 3
... en 3D, comme on dit. Le film est d'ailleurs précédé d'un court-métrage pédagogique, montrant comment se servir des lunettes (et même comment les nettoyer... le matos est fourni à l'entrée)... et ce qu'il ne faut pas faire (se barrer avec à la fin de la séance). On a aussi droit à une petite démonstration d'effet de relief.
De ce point de vue (technique), le film n'est pas une grande réussite. Les lunettes sont d'un faible intérêt. Le seul problème est que, si on les enlève, ce que l'on voit à l'écran n'est pas toujours joli (il vaut mieux payer le prix d'une séance normale et aller voir la version 2D), alors que, dans Avatar, on pouvait regarder sans lunettes certaines séquences d'où la 3D était absente).
On retrouve néanmoins avec plaisir les héros des précédents films : Woody, Buzz l'éclair, la cow-girl et tous les personnages secondaires, hauts en couleurs. La grande habileté de l'animation est de faire cohabiter les jouets et les humains. Les premiers restent inanimés lorsque les seconds les manipulent (à l'exception de la séquence initiale, qui est à part dans le film). Mais, dès qu'ils ont le dos tourné, les jouets reprennent leur vie propre. Certaines scènes, notamment dans les salles de la garderie, sont époustouflantes, tant la chorégraphie des mouvements est complexe... et réussie.
Évidemment, c'est truffé de références à des longs métrages, des westerns, des films d'action, de science-fiction ou d'épouvante. Cela finit par devenir un peu lassant.
Il y a une pincée de politique dans le fond. Woody (le cow-boy) s'oppose au reste de la troupe : il a une conception individualiste de la fonction du jouet, alors que ses camarades seraient plus collectivistes. Il faut dire qu'au départ, il est le seul jouet qu'Andy emporterait à la fac, les autres étant voués au grenier (dans le meilleur des cas). Comme dans La Ferme des animaux (l'excellent roman de George Orwell), le désir de justice sociale pousse la masse à soutenir une organisation collective qui s'avère être un piège, une dictature. Le film réconcilie toutefois individualisme et aspiration de groupe par l'amitié. (C'est très hollywoodien, ça.)
Le ton est aussi différent de ce que l'on trouve dans beaucoup d'animations. Si l'on rit parfois, le but n'est pas de faire hurler de joie les spectateurs. C'est souvent mélancolique. Ah, qu'il est loin le bon vieux temps où les enfants s'amusaient avec seulement quelques figurines ! Si l'on est sensible à ce genre d'argumentation, on trouvera le film génial, sinon, parfois, on s'ennuiera un peu.
C'est aussi, de la part des créateurs, un hommage à leur enfance. Ces histoires qu'ils ont créées dans leurs têtes, avec ces personnages inanimés auxquels leurs esprits ont donné vie, leur ont peut-être permis de devenir ce qu'ils sont aujourd'hui : des créatifs au service du divertissement de masse.
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mardi, 13 juillet 2010
Robin des Bois
Ridley Scott revisite la légende du "prince des voleurs", avec une brochette de vedettes. On peut reconnaître, jusque dans les seconds rôles et les figurants, des visages aperçus dans d'autres films du même réalisateur, notamment l'éblouissant Kingdom of Heaven.
Robin des Bois se déroule d'ailleurs à peu près à la même époque. Il pourrait en être une suite. (Il y a une allusion évidente dans la séquence du début, avec Richard Cœur de Lion.) Je me demande d'ailleurs si ce film n'est pas une commande, pour laquelle on tente de réutiliser les ficelles du film de croisade... mais pour en faire une grosse machine à cash.
Ce n'est qu'à moitié convaincant. Si c'est en général assez bien joué, le scénario ne m'a pas emballé. La légende traditionnelle a été déformée pour servir un propos idéologique. Loin de s'attaquer aux riches pour donner aux pauvres, le héros pense d'abord à sa pomme... et à la délicieuse Marianne (Cate Blanchett, seule véritable lumière dans ce film, dont l'interprétation rappelle un peu, si on laisse l'âge de côté, celle d'Uma Thurman dans la version du mythe réalisée en 1991 par John Irvin.)
On en fait aussi un patriote anglais, toutes les mauvaisetés venant des horribles Français, ou des Anglais passés sous leur coupe. Même si les deux "nations" (plutôt leurs noblesses respectives) sont rivales à l'époque, il me semble que le déroulement du règne de Jean Sans terre est "tordu" pour coller aux idées des scénaristes (un peu comme dans Master and commander, où le rival américain de l'histoire est devenu français dans la version filmée).
C'est donc un film manichéen, parfois inspiré, mais assez énervant. Au contraire de bien des acteurs, Russel Crowe semble s'ennuyer ferme (et peut-être regretter le régime et les séances de muscu qu'il a dû endurer pour "entrer" dans le rôle...).
13:49 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : film, cinema, cinéma
vendredi, 09 juillet 2010
Bébés
C'est produit par Studiocanal, sur une idée d'Alain Chabat. Quatre enfants sont suivis, deux dans des familles aisées de pays développés (au Japon et aux Etats-Unis), deux dans des pays en développement (en Mongolie et, pour les plus pauvres, en Namibie). Cela s'inspire un peu du film Le premier cri, autre documentaire "natalitaire".
La grande différence est qu'alors que le précédent film s'achevait avec la naissance, celle-ci sert de point de départ à Bébés. Une courte séquence nous ramène toutefois un peu en arrière. Ensuite, on suit l'évolution comparée des quatre bambins, dans leurs familles respectives, dans leurs environnements respectifs. On a l'émoi de la naissance, la fragilité des premiers jours. Ils sont tous trognons. Mais, au bout de quelques semaines, les cheveux ont poussé, les traits de sont affirmés et ils sont nettement moins jolis, surtout qu'on ne nous cache rien de leur quotidien (le Mongol urine sur le dos, à l'aise dans la yourte et le Namibien chie sans complexe sur la cuisse de sa mère). Certains deviennent très capricieux.
Les contextes familiaux sont différents : en Mongolie et en Namibie, il faut vite affronter les frères et soeurs, parfois très jaloux, alors qu'au Japon et aux Etats-Unis, on a affaire à des enfants uniques. Le film se veut aussi engagé : il confronte le luxe de protections dont bénéficient les enfants américain et japonais (avec de bien jolies chambres et une foultitude de jouets) à la précarité de la situation de l'Africain et du Mongol (un moment à la merci d'un coq audacieux). Il est évident qu'ils ne démarrent pas leurs vies avec les mêmes chances de s'y épanouir.
Dans chaque pays, l'enfance est proche du monde animal. Trois fois sur quatre, les chats sont les compagnons privilégiés des gamins. En Mongolie, le frère aîné fait souffrir ce pauvre sac à puces, alors qu'aux Etats-Unis, le matou est mieux traité, mais pas très joueur ; au Japon, s'il fait montre d'une certaine jalousie au départ, il accepte vite la nouvelle arrivante. En Namibie par contre, seul un chien maigrichon accompagne les enfants.
Dans chaque pays encore, on remarque la sexualisation des tâches : aux mères la gestion de la marmaille (les pères donnent un coup de main aux Etats-Unis et au Japon, mais l'on sent bien que ce n'est pas trop leur kif). Les papas, assez peu présents finalement, sont dans une fonction de pourvoyeur de biens pour la famille.
On peut donc voir ce court film (1h15) de plusieurs manières : comme un document anecdotique, souvent drôle ou comme une tentative de sociologie comparative, inaboutie à mon avis.
Il aurait été beaucoup plus audacieux de choisir des enfants de familles namibiennes et mongoles aisées (encore que cette dernière ne soit pas miséreuse) et, au contraire, de sélectionner des rejetons d'Américains et de Japonais pauvres. On pourrait ainsi accuser le film de contribuer à enraciner certains stéréotypes, d'autant plus que les mères ont été à mon avis "castées" : dans des genres très différents, elles sont assez mignonnes, sans être des "canons".
Mais, dans la torpeur estivale, face à l'avalanche de bouses pour décérébrés qui occupent sans vergogne les écrans, ce petit film est assez rafraîchissant.
21:15 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema
mercredi, 07 juillet 2010
Dirty Diaries
Du cul ! Du cul ! Du cul ! Mais attention, hein, c'est du cul noble, pas misogyne et c'est du vrai cinéma, pas de la vidéo bâclée pour samedis soirs esseulés, plutôt de l'art et essai revendicatif, parfois bien léché (au propre comme au figuré...). Je préviens les âmes sensibles : les gros plans anatomiques sont légion et, comme dirait un de mes anciens camarades de fac, "on voit vach'ment bien les steaks des dames !"
Cela commence par une série de masturbations féminines, autofilmées. Première claque. On continue avec "Skin", le meilleur film de l'ensemble selon moi, assez stylisé, très beau, dont un extrait a été mis en ligne pour suce-hiter la curiosité des internautes.
On continue avec une production qui associe les fruits au sexe... et à l'anus. Faut aimer. Je pense qu'il y a une réelle volonté de choquer dans ce court-métrage, non pas par des actes, mais par des associations d'idées. Confirmation après visionnage : un trou du cul, c'est moche (et pas que dans le gouvernement Fillon).
Ensuite vient une séquence de sexe hétéro classique, genre le retour de soirée qui se termine par une bonne baise. C'est sympa mais, comme "Skin" est passé avant, on voit la faiblesse formelle de cette séquence par rapport à la première.
"Dildoman" est l'histoire d'un club échangiste, où le seul moyen pour un homme de pénétrer une femme est de se transformer en godemiché humain... C'est présenté sous la forme d'une animation en noir et blanc, les traits étant blancs, un peu comme dans le célèbre programme "la linea", diffusé jadis à la télévision française (un échantillon ici), quand elle se piquait d'inventivité. (Je vous parle d'un temps, que les moins de vingt ans...) Grosse différence toutefois : "la linea" n'avait presque rien de sexuel... mais était beaucoup plus corrosif que ce petit film.
"Bodycontact" est une utilisation de la pornographie (et d'internet) pour dénoncer la beaufitude... Amusant, mais est-il besoin de "s'investir" autant pour arriver au résultat souhaité ?
"Red like berry" m'a paru trop intello. A partir de ce moment-là, j'ai trouvé les films plus monotones. Ils sont très souvent une illustration et une défense de l'homosexualité féminine (y a des mecs hétéros pour qui regarder deux lesbiennes en action est "tripant"...). Je sais que cela est inhérent au projet, mais l'accumulation lasse, même si la séquence de baston entre gouines est originale. Ceux qui détestent la police goûteront tout particulièrement "Authority", très sado-maso.
Fort heureusement pour moi, cette deuxième moitié a été illuminée par "Flasher Girl on Tour", l'histoire d'une exhibitionniste frappadingue qui vient kiffer sa race à Paris. C'est parfois hilarant... mais cette fille est vraiment complètement barrée !
On termine avec "For the liberation of men", une apologie de la travelo attitude que j'ai peu goûtée. On remarque d'ailleurs qu'il a été peu question d'homosexualité masculine dans cette série, alors que, si elle avait été tournée par un Français, un Britannique ou un Américain, je pense qu'on aurait eu droit à notre lot de sodomies. (Les amateurs doivent se tourner du côté de Shortbus.)
J'oubliais la musique. Les additionnelles ne m'ont pas paru terribles, mais les principaux morceaux d'accompagnement, signés Fever Ray, sont très sympas.
13:29 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : film, cinema, cinéma
lundi, 05 juillet 2010
Marga
C'est le prénom d'une Allemande juive, épouse de Siegmund Spiegel (surnommé Menne), un vendeur de chevaux de Westphalie, dans la région de Münster (aujourd'hui dans le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, frontalier des Pays-Bas et de la Belgique). De 1943 à 1945, des paysans de leur village vont les cacher, les sauvant ainsi de l'extermination, qui a frappé tous les autres juifs de la contrée.
Ce film montre donc l'exception (moins de 500 "Justes" ont été identifiés en Allemagne, contre plus de 2 500 en France, par exemple), mais une exception dont on a besoin aujourd'hui, l'Allemagne actuelle n'ayant plus rien à voir avec celle d'Hitler. Le film ne fait toutefois pas l'impasse sur l'antisémitisme d'une bonne partie de la population, le poids de la propagande gouvernementale... et la crainte qu'inspirent les forces de l'ordre et les activistes nazis. Plus subtilement, il montre aussi comment le patriotisme légitime des populations est récupéré par la propagande hitlérienne. (Notons cependant qu'il n'a pas suscité un intérêt exceptionnel en Allemagne, où, d'après le JDD, moins de 500 000 spectateurs l'ont vu.)
C'est surtout un film d'intérieurs. C'est lié à l'enfermement que subissent les membres de cette famille juive mais, à part le père, qui a passé la fin de la guerre cloîtré dans un grenier, les autres ont eu une vie en apparence "normale", à ceci près qu'on les faisait passer pour catholiques. Le fait que l'un des scénaristes soit un metteur en scène de théâtre a dû peser dans les choix opérés... Les scènes de soirée et de nuit sont notamment très réussies.
Dans deux fermes cohabitent donc juifs et catholiques (certains au courant, certains non), sous la menace des bombardements (on est en 1943, au début de l'histoire, et l'ouest de l'Allemagne subit déjà ce genre de désagréments). Le film joue essentiellement sur les tensions entre les personnages, partagés entre la jalousie et la philanthropie.
C'est vraiment un beau film, humaniste, fondé sur une histoire vraie. (Il est inspiré des mémoires écrits par la rescapée.) Si l'on peut regretter quelques facilités, l'ensemble est toutefois de bonne facture.
P.S.
La vraie Marga est toujours vivante et le passionnant dossier de presse contient un entretien avec elle. On peut le retrouver, avec bien d'autres choses, sur le site internet du film.
Sur l'opposition allemande au nazisme, on peut voir et revoir Sophie Scholl.
12:08 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : film, cinema, cinéma, histoire
samedi, 03 juillet 2010
Liberté
C'est l'un des avantages de la la Fête du cinéma : on peut essayer de rattraper son retard cinéphilique, certains établissements ayant la bonne idée de reprogrammer des films (pas trop anciens toutefois) sortis dans l'année... et restés peu longtemps à l'affiche.
J'ai dû voir, il y a longtemps, un long métrage de Tony Gatlif à la télévision, mais c'est la première fois que j'en visionne un en salle. J'ai retrouvé dans Liberté cette description empathique du monde des Tziganes, sans que le propos soit angélique. Les tensions avec les sédentaires sont évidemment représentées, mais le contexte historique prend le dessus.
Pendant la Seconde guerre mondiale, deux phases sont à distinguer. Dans un premier temps, les nomades sont assignés à résidence par le gouvernement de Vichy, avant que les Allemands n'en ordonnent la déportation, en vue de l'extermination. Il y a donc bien eu deux génocides pendant la guerre, les Tziganes nommant le leur Samudaripen.
Le film se veut pédagogique. Par touches successives, des scènes montrent les tensions, les amitiés, les lâchetés, jusqu'à la complicité de génocide des autorités françaises de l'époque (bien relayées par les collabos).
Mais on a confié à quelques acteurs "emblématiques" des rôles positifs : Marc Lavoine en maire-vétérinaire humaniste, Marie-Josée Croze en institutrice résistante et Rufus en petit vieux généreux. Face à eux, des habitants du village cantalien incarnent le renfermement et une forme de "beaufitude".
Le grand talent de Tony Gatlif est d'avoir relié le destin tragique des Tziganes à celui des juifs (à travers le cas du gamin qui s'accroche aux basques des nomades... il y a aussi cette curieuse montre, trouvée sur une voie ferrée) et des résistants. Cela donne un film vraiment fort et digne.
Fort heureusement, quelques moments de comédie ont été ménagés dans l'histoire. En général, ils naissent de la confrontation des Tziganes au mode de vie "moderne" des sédentaires. (Faut dire que nos héros sont vraiment crasseux...)
L'interprétation est impeccable. A ceux que j'ai déjà nommés il faut notamment ajouter l'étonnant James Thierrée (un petit-fils de Charlie Chaplin), déjà remarqué dans Ce que mes yeux ont vu, et qui incarne un musicien très doué (lui-même sait jouer du violon) et un peu fou autour duquel se noue une partie de l'intrigue.
La musique est évidemment omniprésente et entraînante. Elle est une part très importante de l'univers de Tony Gatlif, qui lui consacre un site internet.
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vendredi, 02 juillet 2010
Millénium 2...
... La Fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette. Si l'on retrouve bien les deux héros du premier volet de la trilogie, Michael Blomqvist et Lisbeth Salander, c'est bien la jeune femme qui, plus encore que dans le précédent film, est au cœur de l'intrigue. Je précise que je n'ai lu aucun des livres.
Sans trop en dévoiler, on peut dire qu'il est question d'un réseau de prostitution, d'une série de meurtres (attribués à Lisbeth)... et du passé de la jeune femme. Celle-ci est toujours aussi épatante, anticonformiste, indomptable. On a peur pour ce bout de femme d'1m60 (et 50 kg ?), alors que ce sont les mecs qu'elle part affronter qui devraient chier dans leur froc. De son côté, le journaliste (rappelons que Millenium est le nom du magazine géré collectivement par cette équipe d'investigateurs consciencieux) mène son enquête, tranquillou, passant ses nuits de temps à autre avec sa charmante collègue éperdue d'admiration pour lui, mais pensant au fond de lui à la jeune hackeuse qui fait battre son cœur (et grossir son sexe)...
C'est toujours aussi dur. On nous épargne assez peu de violence... même s'il y a deux-trois ellipses... peut-être pas voulues (il semble qu'il y a eu des coupes par rapport à ce qui a été diffusé à la télévision). On sent toujours la volonté de dénoncer les injustices dont sont victimes les femmes (les coups, le viol, la prostitution forcée, le meurtre). Le contexte change par rapport au premier film. Ce n'est plus la période nazie qui se trouve en arrière-plan, mais la Guerre froide.
C'est filmé de manière un peu plan-plan. En gros, n'y allez pas pour y observer la recherche dans la mise en scène. C'est juste du cinéma commercial, plutôt haut de gamme, un polar bien ficelé.
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jeudi, 01 juillet 2010
Summer Wars
C'est un dessin animé japonais... Chouette ! Je regrette toutefois de n'avoir pas pu le voir en version originale sous-titrée. Entendre chanter "Joyeux anniversaire" en japonais, cela doit donner ! (Notons que l'on a "francisé" quelques aspects, puisqu'à un moment, il est question du pouvoir du "président" alors que, dans la version originale, c'était sans doute le Premier ministre ou l'empereur.)
C'est donc l'histoire d'un anniversaire, celui de la matriarche d'une grande famille. Elle fête ses 90 ans, et, si son esprit est encore très vif (et son carnet d'adresses à jour... cela joue un rôle), le corps ne suit plus tout à fait. Les femmes sont chargées d'organiser le repas et la venue des invités, qui s'étalent sur quatre générations. Un intrus, invité par l'une des plus jeunes pour jouer le rôle de son petit ami, se glisse dans la réunion. Evidemment, de vieilles histoires enfouies vont ressurgir. Cette chronique familiale est souvent drôle. Voilà pour l'aspect "tradition".
Là-dessus se greffe la modernité, avec un réseau social qui pourrait être une sorte de "Fesses-bouc" nippon, étendu au monde entier : "Oz". Les personnages ont un avatar dans ce jeu et une partie de l'intrigue s'y déroule. Il y a donc deux types d'animation dans ce film, l'un, proche de ce que l'on pouvait trouver dans certains dessins animés des années 1970-1980 (en plus élaboré toutefois : le réalisateur, Mamoru Hosoda, est aussi l'auteur de La Traversée du temps), l'autre tourné vers le style jeux vidéo (et dessins animés de baston des années 1990). Le mariage des deux est assez réussi, tant au niveau de l'image qu'au niveau de l'intrigue.
La "vraie vie" a donc des répercussions dans le monde d'Oz et l'évolution des avatars dans le monde virtuel a des conséquences sur la "vraie vie". Cela nous amène au titre du film, Summer Wars ("les guerres de l'été") qui fait référence, à mon avis, à War Games, un film des années 1980 dont les héros sont ce que nous appellerions aujourd'hui en bon français des geeks. (La nuance à apporter est qu'à l'époque, on se gaussait de ces adolescents boutonneux passionnés d'informatique -même si dans le film, le héros est un beau gosse, alors qu'aujourd'hui, les jeunes complètement plongés dans le monde des nouvelles technologies, au point d'en oublier le monde réel, sont moins tournés en dérision.)
Bref, l'action qui se déroule dans le monde virtuel d'Oz pourrait provoquer une catastrophe dans le monde réel et, du coup, toute la famille va être mise à contribution pour tenter d'éviter que le drame ne se produise. Cela nous donne notamment une séquence qui voit une vingtaine de personnes se connecter au site internet par tous les moyens possibles : ordinateur fixe, portable, téléphone mobile et console de jeux (une Nintendo DS sans doute). En parallèle, l'une des grand-tantes persiste à regarder un match de base-ball à la télévision : c'est une importante finale régionale et son fiston est le meilleur lanceur de l'équipe !
On passe donc facilement du rire à l'angoisse, le tout baignant dans une humeur bon enfant : le film est plutôt destiné aux adolescents. Les adultes risquent donc d'être un peu déroutés par quelques niaiseries. Cet inconvénient est je pense largement compensé par toutes les qualités du film, notamment, si l'on est un peu observateur, par la description de pans de la civilisation japonaise à travers le vécu de cette incroyable famille.
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mardi, 29 juin 2010
L'Illusionniste
Non, ce billet n'est pas consacré à l'actuel président de la République française ! J'en connais qui ont vraiment l'esprit mal tourné ! Les autres ont bien compris que j'allais causer du dernier long métrage de Sylvain Chomet, adapté d'un scénario de Jacques Tati. Notons que le cadre de l'action a été déplacé de la Tchécoslovaquie à l’Écosse, où Chomet s'est d'ailleurs installé il y a quelques années.
Cela nous vaut quelques moments savoureux, très "couleur locale" : les Écossais aiment consommer des boissons fermentées (le bateau de l'un d'entre eux s'appelle même "Whisky") et c'est une époque (les années 1950-1960, apparemment) où l'on porte encore volontiers le kilt (avec une jolie scène de bateau, vent à la clé).
L'histoire est très nostalgique. Il est question de ces artistes de cabaret (magiciens, ventriloques, acrobates...), qui peinent à gagner leur vie, concurrencés qu'ils sont par les nouvelles idoles (la musique pop-rock et la télévision). Le film s'évertue pourtant à mettre en valeur leur talent. Pour s'en sortir, il faut souvent désormais un deuxième métier. Cela donne des moments comiques (par exemple dans le garage ou dans la vitrine d'un grand magasin) mais aussi tristes voire tragiques (autour du clown).
C'est aussi une histoire d'amour et d'amitié. Une relation père-fille se noue entre le héros, l'illusionniste donc, qui a des airs de Monsieur Hulot, et une jeune servante des hautes terres écossaises, qui va le suivre à Édimbourg. Le problème est que la vision de la femme est assez datée. Alice a fonction de ménagère, réclame de beaux habits (que lui offre l'homme du ménage, qui travaille pour gagner sa pitance) et rêve d'un prince charmant (forcément super beau gosse). Cet aspect scénaristique aurait pu être modernisé.
L'un des personnages principaux du film est un être inanimé : l'hôtel bon marché où logent nombre des saltimbanques. Entre la lumière qui entre par les fenêtres, la musique du tourne-disque et les mouvements acrobatiques des triplés, on ne s'ennuie pas dans ce curieux établissement, tenu par des nains !
L'animation est ma-gni-fique. Si l'on retrouve sans peine le style de l'auteur des Triplettes de Belleville, le trait s'est affiné, les mouvements sont plus détaillés, plus gracieux. On a semble-t-il ajouté des effets numériques (notamment dans les vues urbaines). On remarque aussi un apport asiatique (japonais et coréen, qui figure au générique... au fait, restez jusqu'à la fin), perceptible au niveau du personnage de la jeune fille, très nettement visible dans l'animation du lapin. Le résultat est éblouissant, l'image comprenant une profusion de détails, des jeux d'ombres et de lumières.
J'aime aussi beaucoup la musique, douce, dans le ton de l'histoire.
Reste que je déconseille aux dépressifs d'aller voir ce film, vu qu'il est particulièrement mélancolique. C'est à mon avis un reflet des sentiments éprouvés par Jacques Tati au début des années 1960. C'est l'époque où sa fille Sophie (à qui est dédié le film), adolescente, se détache un peu de lui, pour devenir adulte. On pourrait voir dans la mue du personnage d'Alice une transposition (sublimée) de ce qu'a vécu Tati dans sa vie familiale : à la fin du film, le héros regarde une photographie, sur laquelle il m'a semblé reconnaître Sophie Tatischeff.
P.S.
Le site internet mérite le détour.
12:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema
lundi, 21 juin 2010
Life during wartime
... "La vie en temps de guerre", en français. Le titre a une double signification. Il est une allusion à la politique bushienne de "guerre contre le terrorisme" et, au second degré, il fait référence aux relations humaines, notamment intrafamiliales.
Pour bien comprendre ce film de Todd Solondz (dont je recommande aussi Bienvenue dans l'âge ingrat, l'anti-film pour ados), il vaut mieux connaître un peu Happiness, dont il est la suite. Mais on peut quand même le voir sans cela. Sachez toutefois que la scène d'ouverture de Life during wartime est un décalque de celle de Happiness, les interprètes ayant changé et les personnages ayant évolué.
On retrouve le style adopté par le réalisateur dans le précédent : des situations grotesques, souvent humiliantes pour au moins l'un des protagonistes, traitées sur un ton anodin, avec des dialogues supposés neutres, remarquablement bien écrits. Solondz est le cinéaste du refoulement, de l'innommable.
Après la savoureuse scène de départ, on apprend la sortie de prison du père pédophile. A voir sa tête et à observer son comportement, on comprend qu'il a dû en baver durant sa détention... et qu'il n'est peut-être pas complètement guéri. Là, le réalisateur renonce à la comédie acide et ébauche une réflexion sur la vie de famille d'un criminel. C'est assez étonnant à dire (surtout quand on a vu les précédents films de Solondz), mais là, il travaille dans la dentelle.
On revient à la comédie sardonique avec le portrait des trois soeurs, plus ravagées les unes que les autres. L'aînée (et épouse du pédophile) a fui le New Jersey pour la Floride où elle tente de refaire sa vie. L'intello (interprétée par Ally Sheedy, qui fut l'héroïne de War Games en 1983 !) vit avec un acteur célèbre et méprise toujours autant les autres. Enfin, la névrosée, qui semblait avoir retrouvé un équilibre, est en fait toujours aussi barge. C'est le retour de l'ancien violeur qui fait voler en éclat les faux-semblants.
Il faut noter que Solondz a gardé son habileté à faire jouer des scènes délicates à des enfants. C'est, je pense, dû en partie à la qualité des dialogues qui, à l'aide de mots du quotidien, savent faire exprimer les pires horreurs.
Son talent s'exprime aussi au niveau du cadrage : dans presque chaque scène il faut être attentif à un élément apparemment anodin (un drapeau israélien, un dessin de singes sodomites, un personnage flou qui traverse un coin de l'écran...), très significatif en fait.
Il me semble que cette suite à Happiness insiste davantage sur la judéité de la famille, pour s'en moquer. Il s'agit de la classe moyenne bushiste (qui a voté McCain en 2008), pro-israélienne jusqu'à l'aveuglement. A plusieurs reprises, à travers le personnage de l'épouse qui tente de refaire sa vie, cette "judéité ostentatoire" est tournée en dérision.
J'ai quand même été un peu déçu. Le film est beaucoup moins "rentre dedans" que le premier et il faut reconnaître que, parfois, les situations sont un peu vides. Cela reste un ovni cinématographique qui mérite le détour.
P.S.
Une des scènes d'anthologie de Happiness a inspiré de talentueuses internautes... Celle qui tient le nounours est excellente !
13:46 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, cinéma, film
vendredi, 18 juin 2010
Dream
Derrière ce titre anglais se cache un film sud-coréen, de Kim Ki-Duk. Ce pays n'en a pas l'air, mais il a produit une brochette de réalisateurs talentueux, parmi lesquels on trouve Park Chan-wook (auteur de l'excellent Old Boy et du déroutant Je suis un cyborg), Im Sang-soo (dont je recommande The President's last bang, film politique qui dépote, et Le Vieux Jardin, sublime mélo) et Bong Joon-ho (créateur de l'un des meilleurs polars de la décennie, Mémories of murder, d'une fiction inclassable, The Host et de l'un des trois courts-métrages du film choral Tokyo !). Le tout-venant de la production locale (par exemple Le Roi et le clown, de Lee Jun-hik et The Chaser, de Hong-jin Na) n'est pas désagréable à regarder, même s'il est d'un niveau moindre.
Dream se situe entre ces deux catégories : ce n'est pas un chef-d'oeuvre, mais c'est un bon film, très original.
L'histoire lie fortement deux personnages qui ne se connaissent pas au début. Pendant que l'un rêve, l'autre agit en somnambule. Le problème est que lui veut récupérer son ex-petite amie, qui l'a quitté, alors qu'elle ne veut plus entendre parler de son ex-petit copain, qu'elle a largué. Quand on se rend compte que l'ex de l'un couche avec l'ex de l'autre, les choses se compliquent.
L'intensité monte d'un cran quand les deux principaux protagonistes comprennent qu'ils ont besoin l'un de l'autre. Ils imaginent donc différents stratagèmes pour déjouer la tyrannie des rêves. Cela nous donne quelques moment comiques très réussis.
L'action se déroulant essentiellement la nuit, un grand soin a été apporté aux effets de lumière, aux ombres (le contraste entre l'ombre et la lumière est à relier aux personnages, eux-mêmes alternativement vêtus de blanc et de noir... un côté yin et yang sous-jacent dans le film). Les lits occupent aussi une grande place dans l'intrigue... et les couettes sont fort jolies !
Evidemment, un drôle de sentiment commence à rapprocher les héros. Les anciennes relations et leur peur de s'engager vont-elles les empêcher de commencer une nouvelle histoire ? Mystère et boule de billard... jusque dans le dernier quart d'heure, très très spécial, dont je me garderai bien de dévoiler la substance...
P.S.
Le dossier de presse (lourd, long à télécharger) est très complet.
16:33 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma
jeudi, 10 juin 2010
Ajami
Ajami est un quartier de Jaffa, ville arabe de l'agglomération de Tel-Aviv, située à l'ouest d'Israël :
Les personnages principaux sont donc des "Arabes israéliens", nom donné à cette catégorie particulière de citoyens israéliens, descendant des Palestiniens restés sur le territoire du nouvel Etat juif en 1948. Comme l'on se trouve à Jaffa, ils sont très souvent chrétiens (comme le coréalisateur Scandar Copti, qui incarne le personnage de Binj), à l'image de l'entrepreneur Abu Elias dans le film :
Source : Hérodote
Mais, là où le film devient passionnant, c'est quand il fait s'entrecroiser les destins de ces Arabes chrétiens avec celui de Palestiniens (musulmans) de Cisjordanie (qui tentent d'entrer en fraude en Israël, pour trouver du travail), de Bédouins franchement mafieux et de policiers israéliens juifs. Le montage s'inspire un peu de ce qui a été fait par Tarantino dans Pulp Fiction, mais aussi de la trilogie de Lucas Belvaux (Un Couple épatant, Cavale et Après la vie) : dans le cours du film, on voit certains moments sous différents angles, qui permettent de comprendre le point de vue d'autres protagonistes.
Le premier chapitre met en scène le conflit entre Arabes, sur fond de délinquance. Dès le début est présent celui qui narre une partie de l'histoire, ce jeune dessinateur aux crayonnés si talentueux. La suite nous montre l'un des héros à son nouveau travail (il a des dettes à honorer) et nous fait découvrir un adolescent dont la mère est gravement malade. Point commun de ces deux jeunes hommes : il leur faut trouver rapidement une grosse somme d'argent, ce qui les pousse à passer dans l'illégalité.
C'est à ce moment qu'intervient le policier israélien qui, au-delà de son travail, poursuit une quête personnelle : son frère a disparu et quand il le retrouve, il décide de le venger.
Le grand intérêt du film est de dépeindre les conditions économiques et culturelles de la vie quotidienne des différentes communautés. La conflit proche-oriental n'est suggéré qu'à l'arrière-plan. Les Israéliens ne sont pas montrés systématiquement comme les responsables des malheurs des Arabes. L'organisation mafieuse de certains quartiers et les mentalités archaïques s'ajoutent à la violence politique.
Cela nous donne un polar bien fichu, très pessimiste sur le fond, un peu larmoyant à la fin, mais d'une grande habileté scénaristique.
01:03 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma, israël, palestine, proche-orient
mercredi, 09 juin 2010
Nothing but the truth
Ce film de John Kani (qui dirige aussi le musée de l'Apartheid), a reçu l'Etalon d'argent au Festival panafricain de cinéma 2009 (l'Ethiopien Haile Gerima ayant décroché la récompense suprême avec Teza). Il se déroule dans l'Afrique du Sud post-Apartheid. On y découvre la vie un peu terne d'un vieil employé de bibliothèque et de sa fille, traductrice pour le tribunal dans le cadre de la commission Vérité et Réconciliation.
Cela pourrait être tragique, car l'histoire débute avec la nouvelle du décès du frère du héros (réfugié jadis au Royaume-Uni, et jamais revenu au pays), dont le corps doit être rapatrié par sa fille. C'est là que la partie comédie commence, avec ce choc des cultures entre la jeune urbaine occidentalisée, très expansive, et l'oncle très traditionnaliste. Comme dans d'autres longs métrages (comme Joyeuses Funérailles, par exemple), l'organisation et la tenue de la cérémonie funèbre sont l'occasion de vider bien des querelles... autant de sources de moments comiques... ou d'émotion.
La description du processus du deuil familial est quasi-ethnographique, l'aspect documentaire du film étant renforcé par quelques scènes consacrées à la gestion de l'héritage de l'Apartheid. Parce que le fils de Sipho (interprété par John Kani himself) a été tué par la police raciste, parce que le vieil employé espère qu'enfin l'Afrique multiraciale va lui permettre de décrocher le poste qu'il convoite, auparavant inaccessible aux Noirs, l'histoire personnelle s'entremêle avec l'Histoire.
Le film, parfois maladroit dans la forme, est assez subtil sur le fond, quand il met en balance l'attitude des exilés glorieux (comme le frère du héros, un beau parleur paresseux et coureur de jupons) et la vie qu'ont menée ceux qui sont restés dans ce pays-prison que fut l'Afrique du Sud afrikaaner.
00:36 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma, histoire, afrique
dimanche, 06 juin 2010
Teza
C'est un film éthiopien de Haile Gerima, présenté dans les festivals (à Venise notamment, où il a reçu en 2008 le prix spécial du jury, à Ouagadougou, où il a décroché l'Etalon d'or en 2009), sorti en France seulement en 2010. C'est à la fois une fresque historique (sur l'Ethiopie des années 1970 aux années 1990, avec des références à la colonisation italienne), un conte et un portrait intimiste.
Le montage est assez habile, entrelaçant les époques : la période estudiantine du héros dans les années 1970, en Allemagne, son retour en Ethiopie puis le nouveau départ, pour la R.D.A. et la vie "actuelle" dans l'Ethiopie des années 1990. Le découpage a un but : créer le mystère, les incertitudes trouvant leur réponse au fur et à mesure que l'on découvre le passé du personnage, qui a perdu la mémoire.
"Teza", c'est la rosée (la première séquence du film nous en donne la signification, de manière poétique). Elle désigne peut-être cette jeunesse partie étudier à l'étranger et qui a cru pouvoir changer les choses en revenant au pays, une fois le régime du Négus aboli. Les scènes "anciennes" du début sont très "africaines" et quasi ethnographiques. Elles alternent avec celles présentant le retour du fils prodigue, qui a l'air très atteint (il a perdu une jambe). Le personnage de la mère est particulièrement réussi, très beau.
Le style de la réalisation change avec le tableau des années 1970 en Allemagne : ces exilés se sont bien accommodés de la vie à l'occidentale. Ils ont noué des relations avec des Allemandes "progressistes". On a fait attention aux détails : les coupes de cheveux et les vêtements sont conformes à ce qu'on voyait à l'époque.
L'époque du premier retour nous donne un aperçu de ce que pouvait être un régime communiste africain, avec sa bureaucratie tâtillonne, son idéologie inflexible et ses militants violents. C'est fou mais cette partie du film m'a irrésistiblement fait penser à d'autres longs métrages consacrés à d'autres pays africains : derrière le vernis communiste, il est question d'un pouvoir autoritaire et de la propension des groupes d'activistes à commettre des massacres.
Ce n'est qu'à la fin que l'on apprend ce qui est arrivé à Anberber (le héros), même si un spectateur attentif a su décrypter les indices laissés en cours de route par le réalisateur. Le deuxième retour au pays se fait dans un contexte de violence : la chute du régime communiste de Mengistu est suivie d'une guerre civile encore plus intense, les soldats raflant les enfants pour gonfler leurs troupes (et éviter que leurs adversaires ne les récupèrent).
Du coup, un des lieux prend une importance symbolique considérable : une grotte, peut-être occupée depuis la préhistoire, qui a servi de refuge à différentes époques. Ce fut d'abord une cachette pour les patriotes éthiopiens en lutte contre l'invasion italienne, puis pour les opposants au régime d'Hailé Sélassié, puis pour les enfants fuyant l'embrigadement, enfin pour une femme enceinte rejetée par la société patriarcale (fort bien décrite, sans a priori). On voit là toute la complexité du propos du réalisateur : le pays a souffert d'interventions étrangères (les fascistes italiens, les communistes d'obédiences soviétique, chinoise... et albanaise !), mais aussi de maux internes, en raison de sa difficulté à se moderniser. Même si le film est un peu long (2h20), il est une belle leçon de vie... et une nouvelle preuve que le cinéma africain peut avoir une vocation universelle.
P.S.
A signaler le dossier de presse, excellent, disponible sur le site d' Isabelle Buron (où l'on peut trouver les extraits du film auxquels mènent certains des liens précédents), une attachée de presse très branchée art et essai.
13:42 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma, histoire
jeudi, 27 mai 2010
Les Murmures du vent
C'est un court film (1h15 environ) de l'Iranien Shahram Alidi, un Kurde qui aborde de façon poétique la situation de son peuple à la fin des années 1980, en Irak, sous la riante dictature de Saddam Hussein, invisible dans le film, mais dont les troupes sillonnent les montagnes du Kurdistan en quête de civils à massacrer (c'est l'opération Anfal).
Le héros est un messager d'un genre un peu spécial : un vieil homme, qui a perdu son fils, passant ses journées dans une fourgonnette équipée d'un haut-parleur, lui-même outillé, puisqu'il ne se sépare jamais de son magnétophone. Sa mission est d'enregistrer et transmettre des messages, dans cet immense territoire reculé, aux paysages contrastés et magnifiques.
Même si l'histoire a l'air alléchante, elle n'est qu'un cadre et l'essentiel de l'intérêt est suscité par la mise en scène. On commence par une vision subjective, celle d'un client un peu bourré (le héros). On le retrouve plus tard sur le point de faire sa toilette, au bord d'un lac... mais il faut un petit moment pour se rendre compte de ce qui est en train de se passer : le réalisateur filme un reflet dans l'eau et, tant que le héros ne s'en approche pas, la limpidité de la surface nous empêche de réaliser qu'il ne s'agit que d'un reflet. Très fort !
Le film est rempli de trouvailles visuelles (sans avoir eu besoin de recourir à des trucages numériques). Le héros rencontre un garçon qui écrit son message sur une paroi poussiéreuse, le texte apparaissant au spectateur à l'envers, la scène étant filmée de l'intérieur. Plus tard, il finit par arriver dans un village de femmes, sorte de refuge pour des rescapées qui ont toutes déjà perdu plusieurs proches dans les massacres commis par les sbires de Saddam Hussein. Les humains sont à l'image de ces tas de pierres, renversés la nuit par un vent impitoyable et hallucinant.
La séquence du mariage clandestin est plus que pittoresque : spectaculaire et entraînante, avec la musique et les chants traditionnels (c'est peut-être un clin d'oeil à un autre bon film consacré au Kurdistan, Half Moon). Elle prend de surcroît une autre dimension quand on voit comment elle s'est achevée... J'ai aussi beaucoup aimé la séquence de l'arbre aux postes de radio, à un moment où le héros risque réellement sa vie.
C'est donc un film assez pessimiste, mais duquel émane, en dépit de quelques maladresses, une vraie force de suggestion.
21:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema
dimanche, 23 mai 2010
Dans ses yeux
"Le Secret de ses yeux" (traduction du titre original) est donc le film qui a privé Un Prophète de l'oscar du meilleur film étranger 2010. Cela a mis un peu les critiques parisiens à cran, vu qu'ils avaient encensé le film de Jacques Audiard (qui a récolté neuf récompenses aux César 2010) et qu'ils considéraient comme inévitable son succès à la cérémonie. Ils avaient peut-être négligé le fait que Juan José Campanella, le réalisateur argentin de Dans ses yeux, travaille aux Etats-Unis, sur des séries à succès.
Le film est un mélange réussi de trois niveaux de narration. L'histoire principale alterne l'époque actuelle et les années 1970. S'ajoutent à cela des scènes imaginées par le juge qui tente d'écrire un roman à partir de cette affaire judiciaire à moitié résolue. Ses retrouvailles avec son ancienne collègue lui font revivre ce passé... et permettent aux spectateurs de découvrir, petit à petit, le fait divers sordide, et son arrière-plan politique. Il faut s'attacher aux regards, qui donnent les clés du polar et de l'intrigue sentimentale.
La réalisation est habile. Soyez bien attentifs aux scènes du début, qui réapparaissent plus tard, d'une manière ou d'une autre : on finit par voir "en vrai" la partie romancée par le juge à la retraite. On sent un réel savoir-faire chez Campanella et son équipe, qui jouent habilement sur la focale dans certaines scènes.
C'est donc un bon polar, qui surprend jusque dans le dernier quart d'heure, quand on croit que tout est terminé. Mais c'est surtout une histoire d'amour... deux en réalité. Il y a l'amour fou porté par l'employé de banque à la jeune femme victime du viol et celui, qui n'ose pas se déclarer, du héros Benjamin Exposito pour la sublime Irène (excellemment interprétée par Soledad Villamil). Cela nous donne tantôt des moments pleins de finesse et d'autres excessivement mélo... ce qui est assumé par le film, l'héroïne reprochant même à son acolyte d'en faire trop dans son roman ! Autre bémol : le vieillissement des personnages est plus ou moins réussi, les artifices étant particulièrement visibles sur les gros plans.
15:05 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma
samedi, 15 mai 2010
Mammuth
La bande à Groland sévit de nouveau, plus particulièrement Gustave Kervern et Benoît Delépine (Michael Kael pour les intimes). La distribution oscille entre le nec plus ultra (Gérard Depardieu, Isabelle Adjani, Anna Mouglalis) et la bande de potes (Bouli Lanners, Benoît Poelvoorde, Siné) et Yolande Moreau, qui fait le lien entre les deux, depuis l'excellent Louise Michel.
Mammuth, c'est à la fois Serge Pilardosse et la vieille moto, qu'il n'a pas enfourchée depuis longtemps (on découvre pourquoi dans le film). Les deux refont connaissance à l'occasion de la retraite du vieux boucher. Cela commence fort avec la scène du pot de départ (et le cadeau minable offert par les collègues). Cela continue par la séquence à la maison, le soir, au cours de laquelle Catherine (Yolande Moreau géniale) houspille son mec... et insiste pour qu'il lève la lunette ! On embraye avec la séquence du supermarché, qui voit Serge s'engueuler avec un commis boucher nase (Gustave Kervern himself) et tenter de passer avec son chariot entre deux véhicules garés sur le parking !
Serge part donc en quête de ses points retraite. Je ne vous raconte pas ce que le fossoyeur du cimetière lui demande en échange de sa collaboration. Ensuite, il rencontre des fortunes diverses. Il lui faut faire preuve d'ingéniosité pour récupérer ses papiers... et ne pas tomber dans les pièges qui lui sont tendus, notamment par une arnaqueuse putassière. Cela nous donne une séquence merveilleuse, pendant laquelle Catherine et sa meilleure amie envisagent de faire payer la donzelle.
Les deux rencontres avec le personnage interprété par Benoît Poelvoorde sont de petits bijoux ! Après cela, vous ne regarderez plus les plages de la même manière...
Par contre, les scènes avec le fantôme d'Adjani ne sont pas très bonnes, à l'inverse de la relation qui se noue entre Serge et sa nièce (on finira par apprendre ce qu'est devenu le frangin), très poétique. Et que dire du moment passé avec ce vieil ami, qui finit en branlette mutuelle... crampes à l'appui !
Ce film de qualité, qui n'a hélas pas bénéficié de l'exposition qu'il aurait méritée, a rempli la petite salle du Royal qui lui avait été attribuée... ce qui a donné lieu à de surprenantes proximités. Mais la salle a globalement bien rigolé !
Les coulisses du tournage sont racontées par les deux auteurs dans un entretien mis en ligne (en trois parties) sur le site de sinehebdo.
00:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma