mardi, 23 juin 2009
Dernière saison - Combalimon
Voici un nouveau documentaire agricole qui synthétise en quelque sorte bien de ses prédécesseurs... ainsi que quelques films de fiction à la base bien documentés. Il a été tourné dans le département du Cantal, sur le territoire de la commune de Saint-Urcize, mais dans une région frontalière. Voici de quoi vous repérer :
Nous sommes sur l'Aubrac cantalien, tout près de la Lozère (dans le film, Jean, le paysan, téléphone à une connaissance de Nasbinals) et de l'Aveyron (il n'est pas excessif d'affirmer que Saint-Urcize est située dans l'arrière-pays de Laguiole). C'est dans ce (magnifique) département que notre fermier a acheté nombre de ses vaches : dans le film, il dit avoir été en affaire avec quelqu'un de Thérondels, sans doute la commune aveyronnaise du Carladez, une région proche de l'Aubrac et il parle d'un marchand de bestiaux du nom de Latieule, un patronyme typiquement aveyronnais.
Le film commence par une séquence qui nous mène à un vêlage, celui d'une vache Aubrac. Au départ, on ne sait pas trop à quoi s'attendre ; ce n'est que lorsque l'on distingue le cul de l'animal que l'on se rend compte que quelque chose dépasse... juste avant que l'animal ne se couche et ne commence à mettre bas. C'est toujours un moment impressionnant.
Puis il est question de la solitude de ce vieux célibataire (qui plus est fils unique) de 66 ans, qui a conclu un drôle de mariage avec une Camerounaise qui a pris depuis la poudre d'escampette. Son ami lozérien a lui aussi connu une mauvaise expérience, avec une Marocaine semble-t-il. C'est un sujet délicat, qu'une fiction comme Je vous trouve très beau avait abordé avec un certain tact (la promise étant, dans ce cas, originaire de Roumanie). En gros, les anciennes colonies françaises voire les D.O.M.-T.O.M. (et même l'Ile Maurice) ont été pourvoyeurs d'épouses pour les paysans esseulés. Les mariages ne se sont pas toujours déroulés dans la plus grande harmonie, loin de là...
Ensuite, une séquence plus attendue nous présente les difficiles négociations menées autour de la vente du bétail. Déjà que la conversion des euros ne simplifie pas les choses, mais, de surcroît, le héros raisonne encore en anciens francs ! Cette partie fait peut-être écho au premier volet de la trilogie Profils paysans de Raymond Depardon, dans lequel une séquence de ce type est visible.
Enfin, il est question de la transmission de l'exploitation. Pierre Barrès ne veut pas voir ses terres accaparées par les "gros" de la région, avec lesquels il semble avoir eu maille à partir dans le passé. Mais c'est qu'on ne se bouscule pas au portillon ! Il y a bien une stagiaire, fort sympathique, volontaire, mais pourra-t-elle tenir le coup ? Le vieux paysan en doute (un peu à l'image du personnage joué par Michel Serrault dans le très beau Une hirondelle a fait le printemps)... d'autant plus qu'au lieu d'élever des vaches, elle veut implanter des brebis et transformer leur lait en fromage.
Le film s'achève sur cette incertitude, porteuse d'espoir, même si je doute qu'elle lui ait succédé.
Deux documents, quasi jumeaux, permettent d'appréhender le film : le dossier de presse oiginal (à mon avis) et le dossier pédagogique réalisé par "zéro de conduite". Le site eurozoom permet aussi de visionner des extraits du film.
Laissez-vous tenter ! C'est une vraie réussite (contrairement à d'autres), avec beaucoup d'humour et un personnage principal très attachant.
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lundi, 22 juin 2009
Toto qui vécut deux fois
C'est un film italien, en noir et blanc, dont l'action se déroule sans doute en Sicile... mais en fait symboliquement au Proche-Orient, puisque les évangiles sont très souvent parodiés. Cela a d'ailleurs valu quelques ennuis au film qui, dans un premier temps, a été censuré en Italie, avant de finalement sortir avec une interdiction aux moins de 18 ans.
Les auteurs me donnent l'impression d'être un peu les équivalents ritals de l'équipe de Groland... Côté références, s'il y a une évidente filiation avec le "vieux" cinéma d'avant les années 1960 (le noir et blanc est très joli, les effets d'ombre et de lumière travaillés), on peut aussi évoquer un cousinage avec un film plus récent, d'Ettore Scola : Affreux, sales et méchants.
Les personnages principaux sont donc moches (édentés, obèses...), sales, teigneux voire violents : des groupes mafieux font régner leur loi... mais parfois tout ne se passe pas comme prévu. Qu'est-ce qui travaille toutes ces personnes ? Le cul et le fric. Il est donc normal que l'arrivée d'une prostituée (interprétée, comme les vieilles femmes, par un homme à la sensualité que je qualifierai de... débordante) suscite un grand enthousiasme dans ce bourg du bout du monde, où nombre de mâles esseulés se retrouvent dans les toilettes du cinéma pour se masturber...
Ah, oui, j'oubliais : si vous êtes en quête d'humour raffiné, passez votre chemin. C'est d'ailleurs ce qu'ont fait quatre spectateurs de la séance à laquelle j'ai assisté. Deux lycéennes n'ont pas voulu aller plus loin que le premier quart d'heure, qui voit se succéder une scène de zoophilie, la branlette collective au cinoche et l'érection progressive d'un âne. Un (jeune) couple est parti peu de temps après, sans doute dépassé par la puissance des dialogues qui oscillent entre scatologie et pornographie... Petites natures ! (Ils ont donc raté la bluette homosexuelle et la sodomie du faux ange par trois obèses, qui les auraient certainement ravis.)
Ceci dit, tout n'est pas réussi. Le lien entre les séquences est parfois ténu et, malgré la relative brève durée du film (1h30, en cette période d'inflation pelliculaire, c'est court), on perçoit quelques temps morts. Mais, bon, si vous n'êtes pas trop coincés et que vous avez envie d'une bonne tranche de rigolade, vous pouvez vous laisser tenter...
14:32 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema
dimanche, 21 juin 2009
Amerrika
C'est une nouvelle lecture du "rêve américain", à la sauce du XXIème siècle, le contexte proche-oriental en plus : l'héroïne est une Palestinienne (mais issue de la minorité chrétienne) qui quitte la Cisjordanie peu avant l'invasion de l'Irak par les troupes yankees. Cela nous vaut d'intéressantes scènes au début, notamment sur le comportement des soldats israéliens. Précisons que la réalisatrice est une Américaine d'origine jordanienne. Ainsi qu'elle le déclare dans le dossier de presse, la part d'autobiographie est grande dans le film.
Il y a donc un fond dramatique à cette histoire : l'occupation israélienne de la Cisjordanie (avec ses conséquences multiples), l'unilatéralisme de la politique étrangère de George W. Bush et le racisme de certains Blancs américains. Fort heureusement, plusieurs personnages sont introduits pour nuancer ce dernier point (le proviseur, le jeune collègue au piercing et l'employée de banque notamment).
C'est aussi une comédie, qui joue sur le supposé sentimentalisme des Orientaux et pointe les difficultés d'intégration, le déclassement social. On vit les joies et les peines de ces migrants à travers notamment les yeux de l'héroïne (magnifiquement interprétée par Nisreen Faour), qui souffre d'un handicap supplémentaire : elle est obèse.
Tous les acteurs sont formidables. Certains visages paraîtront familiers à ceux qui ont déjà vu de bons films (classés "art et essai") consacrés au Proche-Orient. Ainsi, la soeur de Mouna, Raghda, est interprétée par Hiam Abbas, remarquée, entre autres, dans La fiancée syrienne ou encore Paradise now.
22:50 Publié dans Cinéma, Proche-Orient | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema
samedi, 20 juin 2009
Jusqu'en enfer
Sam Raimi revient à ses premières amours : le film d'épouvante. Pour le scénario, il s'est fait aider par le frangin Ivan (qui a déjà mis la patte aux scénars de L'armée des ténèbres et de Spiderman 3).
C'est un film conforme aux "canons" du genre : certains personnages font ce qu'ils ne devraient pas faire, les acteurs sont souvent filmés de dos et la musique est là pour ficher les jetons quand il faut. Comme on est au XXIème siècle, les effets spéciaux numériques déchirent : ils rendent certaines séquences gores à souhaits... et instillent parfois une note d'humour. Mais, bon, ne vous attendez à rien d'extraordinaire d'un point de vue filmique. C'est du travail correct. Seule la séquence du cimetière (avec actrice principale en T-shirt mouillé dans la boue... mmm) sort du lot, d'un point de vue photograhique.
Le meilleur du film est son propos sociologique, voire politique. C'est une critique du travail des banques (la crise des subprimes est dans toutes les têtes aux States) et du carriérisme. C'est donc l'intransigeance de la banque qui est à la source de la malédiction... et la féroce compétititon que se livrent deux des employés ne va pas arranger les choses. De la même manière, au passage, le réalisateur choisit d'épingler le conservatisme social d'une partie de la grande bourgeoisie.
On peut dire que Raimi s'est compliqué le travail : au lieu de choisir la facilité, avec une héroïne siliconée, débile, gosse de riche et pétasse, il a bâti un personnage attachant, celui d'une ancienne grosse devenue jolie, fille de fermier qui s'est élevée à la force du poignet.
Comme dans tout bon film d'épouvante, la fable morale n'est pas loin. A la base, le spectateur prend connaissance de la force de la malédiction à travers un ancien cas (que l'on relie plus tard directement à l'histoire principale), lié à un vol. Toute faute, tout péché doit être expié.
On remarquera que le surnaturel surgit des groupes de population situés à la marge : les gitans, les Mexicains (l'action se passe en Californie). Je ne révèlerai pas la fin, mais plusieurs pistes sont suggérées dans la seconde moitié du film... et celle retenue par les scénaristes se devine assez aisément.
22:07 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema
vendredi, 19 juin 2009
Le sens de la vie pour 9,99 $
C'est un film d'animation australo-israélien, fondé sur la technique du stop motion (dite aussi animation image par image... oui, comme dans Wallace et Gromit, Chicken run -sauf qu'il ne s'agit pas ici de pâte à modeler- mais aussi Les Noces funèbres), à partir de marionnettes. Imaginez le boulot que cela a dû représenter, même si le film dure un peu moins d'1h20 !
C'est la chronique douce-amère d'un quartier et plus précisément d'un immeuble, qui pourrait se trouver à Tel Aviv (ou peut-être Sydney... voire New York). On y croise un veuf esseulé, qui tente de nouer des contacts avec les autres habitants, notamment un jeune homme qui vit avec son père. Celui-ci est une caricature de petit bureaucrate, replié sur lui depuis que sa femme l'a quitté (et quel bide !). Son fils tente de lui redonner goût à la vie... et puise son inspiration un peu partout, notamment dans des bouquins, comme celui qui a donné son titre au film.
Mais le personnage le plus original de cette petite famille est sans conteste le fils aîné, qui bosse dans une boîte de recouvrement. Cela nous vaut, au passage, quelques scènes assez dures sur la saisie mobilière. Mais ce personnage va surtout se distinguer par l'histoire d'amour qui naît entre lui et un mannequin qui emménage dans l'immeuble. Cette partie du film, au départ la plus terre à terre, devient franchement surréaliste.
C'est d'ailleurs la marque de fabrique du film : le balancement régulier entre la description minutieuse des rapports humains au sein d'un petit groupe de voisins et les envolées fantastiques. Ainsi, l'un des habitants de l'immeuble (qui se fait larguer par sa copine l'institutrice) est parfois rejoint par trois petits compagnons facétieux (ah, le pet enflammé !...)... surtout quand il a picolé et/ou fumé des joints...
Le summum est atteint à travers le personnage de l'ange, qui n'a pas grand chose d'angélique. Je vous laisse le plaisir de découvrir les péripéties liées à ce deus ex machina qui n'arrange pas vraiment les choses. Ici l'humour est noir, grinçant.
L'émotion est plus grande lorsqu'il est question du veuf, mais surtout quand le petit garçon apparaît à l'écran. L'histoire bâtie autour des économies et du petit cochon est très belle, accordant une place grandissante à cette tirelire inanimée qui imprime l'imaginaire enfantin.
Le portrait social ne serait pas complet sans que ne soit évoquée la force du consumérisme, à travers le démarchage téléphonique. Ces enquêtes de consommation, sorte de fil rouge du film, donnent lieu à des moments assez cocasses.
Notons que la qualité de l'animation est grande. Aux effets cinématographiques proprement dits sont couplés les mouvements des marionnettes, criants de vérité (de la marche aux pleurs en passant par les caresses). A la fin, on en voit même faire quelques plongeons dans un lac !
Ajoutez à cela une musique subtile et légère, et vous obtenez une grande réussite !
Voici l'adresse du site officiel :
11:02 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema
mardi, 16 juin 2009
Herbe
Et un documentaire agricole de plus ! Depuis trois-quatre ans, le genre fait florès, et les Français ne sont pas à la remorque de cette tendance. Cela donne des films aussi réussis que We feed the world, Notre pain quotidien, L'apprenti ou Les brebis font de la résistance, mais aussi des demi-échecs comme La vie moderne.
Ici, comme dans d'autres films, le point de vue est militant. On compare deux manières de pratiquer l'agriculture, en Bretagne. Ceci dit, c'est honnête : chacun peut exposer son point de vue. Du coup, l'élevage bovin est vu de manière moins anecdotique... mais ce n'est guère passionnant. Alors que le sujet m'intéresse à la base, j'ai vraiment eu du mal à rester accroché à ce film. Il souffre vraiment de la comparaison avec d'autres documentaires ou semi-documentaires consacrés au monde agricole. Franchement, vu le battage qui a été fait autour, c'est une déception.
20:45 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, film
vendredi, 12 juin 2009
Nous resterons sur terre
Le principe est le suivant : on a interrogé quatre "personnalités éminentes" (Wangari Maathai, Mikhaïl Gorbatchev, Edgar Morin, James Lovelock) et on a "monté" leurs réponses, de manière à les confronter à des images tournées aux quatre coins du monde (dans 21 pays, je crois). Les intervenants ont été choisis parce chacun incarne un type d'engagement : la fondatrice d'O.N.G. dans un pays en développement, le politique, l'intellectuel, le scientifique.
Les images ont été tournées dans des lieux "remarquables" ou sur des sites qui subissent d'importantes dégradations : on nous propose des montagnes de déchets empilés, des zones victimes de la déforestation ou de l'exploitation pétrolière...
Le visuel est très joli. Dans une grande salle, c'est appréciable. Mais... qu'est-ce que c'est ennuyeux ! Les interventions des "spécialistes" sont assez pontifiantes, se limitent trop à des idées générales. Du coup, j'ai failli m'endormir !
12:45 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma
samedi, 06 juin 2009
Le Voyage de Primo Levi
Primo Levi était un Italien juif, déporté à Auschwitz, où sa compétence scientifique (il était chimiste) lui a sans doute sauvé la vie : il a travaillé dans le troisième camp, celui dit de Buna-Monowitz (comportant une usine de caoutchouc). Il raconte cela dans son plus célèbre livre : Si c'est un homme.
Mais le film que j'ai vu traite d'un autre aspect de sa déportation : le périple accompli en Europe entre sa libération, en janvier 1945, et son retour en Italie, plus de huit mois plus tard. Ce voyage est le sujet d'un autre livre de Primo Levi : La Trève, qui a été adapté au cinéma en 1997 par Francesco Rosi (avec John Turturo).
L'originalité de ce Voyage est d'être un parcours contemporain sur les traces de Primo Levi. Au début, une carte dynamique décrit le parcours chaotique de l'ancien déporté, qui va être celui du film. Des images d'archives (montrant le plus souvent Primo Levi) sont insérées entre les séquences tournées au XXIème siècle.
Tout commence donc par Auschwitz, pour se poursuivre en Europe de l'Est, revenir en Europe centrale et finalement aboutir en Italie du Nord. Je dois dire que le résultat est très inégal. Si le début est assez fort, le suite, qui se déroule en Pologne et en Ukraine, est assez décevante... et mal filmée. Je ne sais pas si c'est dû à la copie du film ou au fait qu'il ait en partie été tourné en vidéo numérique, mais c'est assez laid à regarder. De surcroît, je ne vois pas trop ce que le 11 septembre 2001 vient faire là-dedans. Montrer Ground zero n'apporte rien ; c'est plutôt même, à mon avis, un facteur de confusion pour le spectateur moyen.
L'intérêt remonte au moment du retour en Europe centrale, notamment à l'occasion du passage par l'Autriche et l'Allemagne. Les auteurs nous mènent dans une réunion électorale... celle d'un parti néo-nazi !
L'image est beaucoup plus soignée dans la dernière partie du film, qui se déroule en Italie. Le parcours de Primo Levi est mis en parallèle avec celui d'un autre Italien emporté dans la tourmente de la Seconde guerre mondiale : Mario Rigoni Stern. Pour bien apprécier ce passage, peut-être faut-il un peu connaître le sujet. C'est d'ailleurs une remarque que l'on pourrait étendre au film : si cette période de l'histoire vous intéresse, vous y trouverez de l'intérêt, sinon, vous risquez d'être fortement déçu-e-s, au vu de la faible qualité cinématographique.
12:04 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma, histoire
samedi, 16 mai 2009
Les brebis font de la résistance
Le film a beau être sorti en salles un 1er avril, ce n'est pas un canular ! Une version tronquée (de 50 minutes environ) avait été diffusée auparavant sur France 3 (on en retrouve certaines séquences comme celle avec le jeune couple venu de Montpellier, celle de l'ancien éleveur catho de droite "converti" ou encore celle du boulanger).
Le sujet est le Larzac, ses agriculteurs, leurs engagements. Si le film remonte à la lutte des années 1970, il n'en fait pas un historique détaillé. (D'après la réalisatrice, présente à la séance à laquelle j'ai assisté, une oeuvre de ce type serait en préparation.) Plus qu'un documentaire militant, c'est un vrai long métrage de cinéma. Un grand soin a été apporté à l'image, que ce soit au cadre ou à la photographie. Les animaux sont mis en valeur, presque comme des personnages : ce sont des brebis bien sûr, mais aussi des chèvres (moins qu'on ne le croit, le plateau étant essentiellement occupé par des ovins), des ânes... et même des chiens et des chats !
L'essentiel repose tout de même sur les témoignages des hommes et femmes, anciens et plus jeunes. C'est la difficulté du métier qui est soulignée, difficulté finalement supportable parce que tous ces "acteurs" (au vrai sens du terme) ont conscience de donner un sens à leur existence... et de vivre dans un cadre magnifique.
J'ai aussi aimé ce film parce qu'il accorde une assez grande place au travail manuel, celui des éleveurs bien sûr (de la conduite du troupeau à la traite, en passant par les soins et la mise-bas), mais aussi la transformation des produits (avec la fabrication de fromage, de pain...) et même la construction de bâtiments (certaines des actions symboliques de la lutte des années 1970 ayant consisté à restaurer -collectivement le plus souvent- des bâtiments d'élevage).
A lire : le dossier de presse, bien fichu.
15:03 Publié dans Aveyron, mon amour, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma
vendredi, 15 mai 2009
Millénium
C'est l'adaptation du premier des trois tomes écrits par feu Stieg Larsson. Je ne les ai pas lus. Ce fut donc une totale découverte pour moi. Comme le livre est épais, le film est long (2h20), parfois lent (les mauvaises langues diront qu'on retrouve là la "patte germano-nordique") mais jamais ennuyeux.
C'est d'abord une enquête policière, réalisée par un journaliste-vedette en disgrâce pour le compte d'un riche industriel auquel il est lié par des souvenirs d'enfance. Toutefois, le véritable héros du film est le personnage présent sur l'affiche, la jeune Lisbeth Salander, sorte de surdouée de l'informatique, psychologiquement instable, assez "gothique" en apparence. D'ailleurs, de manière générale, on peut dire que l'histoire a un fond féministe. La grande violence de certaines scènes (parfois odieuses) sert à dénoncer principalement les comportements machistes... voire pires.
Le film est aussi un portrait historico-social de la Suède et d'une partie de ses élites. L'attitude de celles-ci pendant la Seconde guerre mondiale est mise sur la sellette, tout comme les circuits contemporains d'argent sale, de corruption... tradition et modernité en quelque sorte.
A ce sujet, le fait que l'enquête soit menée avec pour principaux outils des ordinateurs puissants reliés à internet est passionnant, bénéficiant d'une bonne mise en scène. Toutes proportions gardées, je crois que ce film, par l'usage des outils de traitement de l'image qui y est fait, se situe dans la continuité du Blow up d'Antonioni, dans lequel l'intrigue était étroitement liée à la photographie (argentique... une autre époque).
12:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma
jeudi, 14 mai 2009
Louise Michel
La bande à Groland a encore frappé. Si vous voulez savoir ce qu'un ex-taulard analphabète grimé en gonzesse peut bien faire avec une ancienne lanceuse de marteau qui a trop tâté des hormones, eh bien ce film est pour vous !
Il s'agit d'un pamphlet social. Sont dénoncés les patrons voyous et les financiers prédateurs. Fait exceptionnel pour un film de fiction, certains vont subir le châtiment suprême. Yolande Moreau est l'instrument de cette vengeance immanente, le bras armé de ce groupe d'ouvrières du textile qui se font entuber par leur employeur et son DRH magouilleur.
On retrouve les recettes qui ont fait le succès de Grolandsat : acteurs pas toujours professionnels, humour à froid, laideur assumée, sens du détail croustillant, refus de l'héroïsation (les personnages principaux sont des ratés, mais eux, au moins, ne cherchent pas à vivre aux dépens des autres).
Une poignée de potes vient faire un peu de figuration : Benoît Poelvoorde, Mathieu Kassovitz (qui coproduit), Siné, Philippe Katerine, Denis Robert... et même Albert Dupontel, qu'on est tout surpris de voir figurer au générique... mais faut rester jusqu'à la fin !
23:59 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma
dimanche, 10 mai 2009
Romaine par moins 30
Le "moins 30" (degrés Celsius) fait à la fois allusion aux températures polaires que subit régulièrement le Québec et à la supposée frigidité de l'héroïne. Ce film est un peu un "A la recherche de l'orgasme perdu". Sandrine Kiberlain se donne à fond et réussit aussi bien à incarner la Parisienne dépressive et dépassée par les événements que la virago indépendante qui ne veut pas s'en laisser compter.
Les scènes d'intérieur sont savoureuses, souvent cocasses (c'est l'adjectif qui convient le mieux au film, je crois), que ce soit dans les toilettes d'un avion, la salle de bains d'un appartement, une chambre, un bar ou un chalet. En extérieur, c'est la neige bien évidemment qui joue le plus grand rôle. On a droit à de beaux moments, comme celui de la rencontre de Kiberlain avec un renne ou, plus prosaïque, celui qui met en scène les différentes machines (d'une surprenante variété) qui ont pour fonction de dégager la neige qui encombre les rues.
Les personnages que croise l'héroïne sont très en général gratinés. Cela va de l'hôtesse de l'air phobique qui fait pipi au lit (superbe composition d'Elina Löwensohn, vue jadis dans les films de Hal Hartley) au barman don juan en passant par le chauffeur de taxi un peu homme des cavernes (hilarante séquence qui voit Romaine se marier !), la policière zen enceinte, le médecin acupuncteur qui fraude le fisc et la colocataire fêtarde qui a des hémorroïdes.
C'est parfois graveleux sans être vulgaire (cela nous change, pauvres Français gavés de comédies à la subtilité éléphantesque)... et c'est fou comme le fait de malaxer de la pâte peut parfois procurer de plaisir !
14:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma
samedi, 09 mai 2009
Soeur Sourire
Domini-que-ni-que-nique s'en allait tout simplement, routier, pauvre et chantant... en tout chemin, en tout lieu, il ne parle que du bon dieu, il ne parle que du bon dieuuu. Cela ne vous dit rien ? Bon ben c'est que vous êtes trop jeunes ! Cette chanson a été un méga tube à son époque (dans les années 1960)... et même après !
Elle s'appelait Jeannine Deckers, était belge et a connu un destin singulier. Cette biographie filmée (un biopic, comme qu'on dit dans le milieu des gens autorisés) lui rend hommage. La belgitude est renforcée par la présence de la délicieuse et talentueuse Cécile de France (excellente dans Un secret). Je trouve assez piquant qu'on ait choisi cette actrice, certes belge, mais incarnant d'abord le charme et la sensualité, pour jouer cette religieuse atypique. Elle se révèle épatante dans le rôle... et elle chante ses chansons elle-même (souvent en play-back pour le film, mais apparemment, c'est elle qui les a enregistrées en studio).
La première grosse moitié du film est une comédie. On y voit la jeune Jeannine étouffer dans le carcan de la Belgique traditionnelle au tournant des années 1950-1960 (très beau portrait de famille, soit dit en passant), préférant finalement l'ordre des Dominicains, pourtant rigoriste, à la vie terne de femme au foyer qui semble l'attendre. Il y a un petit côté Jeanne d'Arc dans cette déjà plus adolescente croyante et rebelle, un peu garçonne et très charismatique.
Les scènes du couvent sont très belles et (comme tout le reste du film d'ailleurs) bien jouées. On rit souvent... en particulier quand le groupe de nonnes est confronté au "star système" (maison de disques, journalistes, télévisions...) !
La deuxième partie est consacrée à la seconde vie de celle qui n'est plus soeur Luc-Gabriel ni soeur Sourire. Je connaissais mal cet aspect de son existence, même si j'avais des souvenirs de sa tentative de retour au tout début des années 1980 (le "tube" était ressorti, réarrangé façon "moderne"... beurk !). Le ton est mélodramatique. Jeannine découvre la vraie vie, avec ses joies et ses tristesses, ses lâchetés, ses déceptions. Elle a tenté beaucoup de choses... et on ne l'a guère aidée. Le film veut montrer que des gens se sont enrichis grâce à son talent (le couvent, la maison de disques en particulier) et qu'ils ne lui ont pas renvoyé l'ascenseur le moment venu.
Le film la fait mourir un peu plus jeune que dans la réalité et exagère peut-être ses difficultés financières. Cela n'en reste pas moins du bel ouvrage. Le réalisateur a su marier plusieurs styles : le film mêle agréablement les scènes de commerce, de couvent, de music-hall et les moments intimes (à deux en général, l'héroïne se retrouvant avec sa cousine, son amie, son prétendant, son imprésario ou sa collègue de couvent et de chant). Ne vous fiez pas aux critiques snobs !
Une archive sur le décès de soeur Sourire :
http://www.ina.fr/divertissement/chansons/video/CAB850121...
11:46 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film
dimanche, 03 mai 2009
Katyn
Encore un film pour lequel il faut faire preuve de patience et de persévérance... pour parvenir à le voir en salles ! A peine plus de 10 cinémas en France le programment ! Peut-être l'aspect historique a-t-il rebuté distributeur et public, d'autant plus que le sujet n'est pas très connu : un massacre (en fait une série de massacres) des "élites" polonaises (catholiques, les nazis se chargeant des Polonais juifs -10% de la population tout de même, ce dont le film ne parle jamais, même allusivement), en 1940, par la police politique soviétique (le N.K.V.D., ancêtre du K.G.B.). Par l'effet de la propagande communiste, les massacres ont été parfois attribués à l'Allemagne nazie... on ne prête qu'aux riches.
Pourtant, dans sa grande majorité, le film n'est guère violent. Il est tourné principalement du point de vue des Polonais, des familles comme des officiers emprisonnés. Je ne pense pas que Wajda ait eu cet objectif mais, involontairement, son film montre que les Soviétiques ont mené une "guerre de classes" contre la "bourgeoisie" polonaise catholique, un peu à l'image du "traitement" administré naguère en U.R.S.S. aux koulaks, paysans supposés aisés. On sent toutefois que le réalisateur a perçu cet aspect du drame vers la fin, après la guerre, quand il met en scène l'ancienne servante devenue une dame qui compte grâce à l'ascension sociale de son époux, ancien résistant communiste. En face, l'ancienne employeuse, issue de la grande bourgeoisie de Cracovie, connaît des fins de mois difficiles. Comme par hasard, l'ancienne servante et son mari endossent le costume des parvenus grossiers, tandis que la dignité est forcément du côté de la famille du capitaine dont on est sans nouvelle.
C'est globalement bien joué, même si j'ai un tiqué parfois devant l'expression exacerbée des sentiments. On semble avoir donné pour consigne aux acteurs d'être le plus explicite possible : on vise le grand public, en Pologne. La réalisation n'est pas neutre. Le film est un long hommage aux martyrs (catholiques) de la Pologne, prenant la forme d'un requiem au moment où l'on propose aux spectateurs la mise à mort des officiers (grâce à la découverte d'un carnet). Les symboles religieux sont mis en valeur : Wajda ne dénonce pas seulement l'envahisseur russe (ennemi séculaire de la nation polonaise), il s'attaque au communisme athée et semble sous-entendre qu'il y a eu volonté d'extermination du peuple polonais (certaines scènes ont visiblement été tournées de manière à mettre en parallèle le sort des officiers polonais avec celui des Européens juifs exterminés par les nazis et leurs collaborateurs). Si, sur ce point, on ne peut pas suivre le réalisateur (qui, de surcroît, me paraît très indulgent vis-à-vis des Allemands), le film n'en garde pas moins une grande force évocatrice.
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jeudi, 30 avril 2009
X-Men origins : Wolverine
C'est un peu une sorte de "X-Men begins". L'action se situe avant la célèbre trilogie et est centrée sur un personnage qui, au départ, n'était pas une vedette de la série : Serval, autrement dit Wolverine. Des ponts sont tracés avec les films qui suivent, mais qui ont été tournés auparavant. C'est le même procédé que pour Star wars.
Il faut d'abord savoir que c'est hyper violent. On s'entretue, ou tente de s'entretuer, à tire-larigot. Les effets spéciaux ont beau être réussis, cela devient lassant à la longue... d'autant que le côté "je suis quasiment invincible - ben tu vas voir que moi je suis encore plus invincible que toi", ça fait un peu "regarde ma quéquette hein n'est-ce pas que c'est la plus longue". L'intérêt du comics résidait au contraire dans la fragilité des personnages, à la fois physique et psychologique.
Ici, seul le scénario, habile voire machiavélique, vaut le détour. J'en exclus toutefois une des premières séquences, qui voit le héros successivement participer, en compagnie de son frère, à la guerre de Sécession, la Première guerre mondiale, la Seconde, enfin celle du Vietnam. Cela ne vous rappelle rien ?
De surcroît, l'esthétique du jeu vidéo a envahi la série... et on sent la volonté de se rapprocher d'autres films consacrés à des individus "extraordinaires", dotés de super pouvoirs. Du coup, les X-Men en perdent un peu leur originalité. Il n'y a guère que les dames qui sortiront vraiment enchantées, tant Hugh Jackman a pris soin de soigner sa musculature (il avait déjà bien commencé pour Australia !)...
J'espère que le film consacré à la jeunesse de Magnéto aura un peu plus d'envergure.
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samedi, 25 avril 2009
Chomsky et compagnie
Pour ceux qui ne le connaissent pas, il faut d'abord préciser que Noam Chomsky, linguiste internationalement reconnu, est devenu une sorte d'icône altermondialiste intello, parce qu'il a, très tôt, formulé une dénonciation argumentée de la politique étrangère des Etats-Unis. Il est aussi très critique vis-à-vis de l'économie de marché telle qu'elle existe aujourd'hui. Il n'est pas communiste pour autant. On pourrait dire que c'est un franc-tireur de la gauche critique.
C'est pour cette raison, je pense, que l'équipe de l'émission Là-bas si j'y suis (diffusée du lundi au vendredi sur France inter, accessible aussi sur la Toile) a décidé de rencontrer N. Chomsky... et deux autres intellectuels, un Belge et un Canadien (du Québec). Le tout a été enregistré en 2007.
Alors, qu'est-ce que cela donne ? Un vrai film tout d'abord, parce qu'un documentaire qui se contenterait du jeu de questions-réponses entre Daniel Mermet et ses interlocuteurs serait vite ennuyeux... surtout que cela dure deux heures (à mon avis, c'est nécessaire... et encore, c'est une synthèse). La séquence du début est très bien et, à plusieurs reprises, dans le film, on sent quand même la volonté de travailler l'image, de ne pas se contenter du texte.
En s'appuyant sur les travaux de Chomsky, notamment sa comparaison de la manière dont les médias ont rendu compte des exactions des Etats-Unis et de l'U.R.S.S. (ou de leurs alliés) pendant la Guerre froide, les auteurs veulent faire émerger l'idée que les médias de masse nous mentent, souvent par omission d'ailleurs. Dans le flot d'informations qui circule désormais, les actions de tri et de hiérarchisation prennent une importance capitale. C'est globalement convaincant.
A ce sujet, j'ai bien aimé l'anecdote du comptage de passes. En gros, en regardant la vidéo suivante (qui dure moins d'une minute), essayez de compter les passes que les blancs et les noirs se font. L'idéal est que, dans le même temps, à côté de vous, une autre personne regarde la vidéo sans compter les ballons. Partagez vos réactions à la fin !
Le film est aussi intéressant par ce qu'il dit de l'autocensure et de la complaisance journalistiques. Il n'y a pas de complot pour cacher la vérité ou mettre les opinions dissidentes (pas forcément minoritaires) sous l'éteignoir. Mais, soit les professionnels de l'information (ici surtout télévisée) sont complètement en accord avec les idées dominantes, soit ils ont intégré les limites qu'il vaut mieux ne pas dépasser pour rester en cour... et espérer faire carrière. Quelques extraits viennent appuyer le propos. Je recommande tout particulièrement le passage qui voit Arno Klarsfeld apporter un soutien aussi bruyant qu'infondé à l'intervention des Etats-Unis en Irak.
Le film ne laisse pas de côté LA question polémique, celle du soutien de Chomsky à la publication des thèses négationnistes, bien qu'il ne les partage pas. Ici l'on voit le fossé qui peut opposer des intellectuels européens à ce penseur somme toute très américain, pour qui la liberté d'expression doit être pleine et entière, se référant notamment au premier amendement à la Constitution des Etats-Unis :
"Le Congrès ne fera aucune loi qui touche l'établissement ou interdise le libre exercice d'une religion, ni qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse, ou le droit qu'a le peuple de s'assembler paisiblement et d'adresser des pétitions au gouvernement pour la réparation des torts dont il a à se plaindre."
Le film, tout en empathie avec Chomsky, prend plutôt parti pour lui dans la controverse qui l'a opposé à l'historien Pierre Vidal-Naquet. Peut-être que tous les spectateurs ne le ressentent pas ainsi, mais, en ce qui me concerne, j'aurais aimé un peu plus de recul critique vis-à-vis des propos de Chomsky sur ce sujet en particulier.
Un autre point est à noter. Au début de l'entretien, D. Mermet fait réagir le professeur au massacre, commis juste avant leur rencontre, dans une université de Virginie (à l'époque, le massacre avait semé le trouble chez les Coréens, des Etats-Unis et d'ailleurs). Peut-être est-ce dû à la tonalité de l'entretien, aux thèmes qui devaient être abordés. En tout cas, au lieu d'évoquer la menace que constitue pour les citoyens américains la facilité de se procurer des armes dans son pays, Chomsky fait immédiatement une comparaison avec un massacre ignoré de mineurs chiliens et de leurs familles. Je vois bien où il veut en venir : les médias voguent sur le "sensationnel", au détriment de la réflexion. Le massacre commis par l'étudiant coréen n'est hélas pas un phénomène isolé, méconnu, alors que la violence exercée, avec le soutien des Etats-Unis, en Amérique latine, a été longtemps largement passée sous silence.
Sur le site de Noam Chomsky, on peut accéder (en anglais) à nombre des articles qu'il a écrits, y compris un très récent sur l'attitude de Barack Obama sur le conflit du Proche-Orient.
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jeudi, 23 avril 2009
La Journée de la jupe
Isabelle Adjani (un peu boulotte, un peu refaite, énergique et fragile) est donc de retour au cinéma, dans un film "sociétal", sur un sujet qui recommence à intéresser les cinéastes hexagonaux : le malaise de l'école. Ici, il est question d'un collège... avec des élèves qui ont l'air d'avoir 18 ans au moins. Je veux bien qu'ils aient redoublé une paire de fois, mais tout de même... Ceci dit, les acteurs "jeunes" sont excellents.
Le personnage interprété par Adjani est un antihéros, une antihéroïne pour être plus précis : côté vie privée, elle s'est fait quitter par son mari et on finira par apprendre qu'elle est fâchée avec sa famille. Côté boulot, c'est la catastrophe : ses élèves ne la respectent guère et, en tant que prof de français, elle a toutes les peines du monde à obtenir un temps de cerveau disponible de 5 minutes sur une heure de cours. Ne parlons pas de la hiérarchie (Jackie Berroyer, excellent en principal fuyant ses responsabilités), ni des collègues : ce nid de gauchistes est prêt à tout accepter de la part des élèves qui, en réalité, ont d'abord besoin d'autorité.
Ce film repose donc sur l'utilisation et le détournement des clichés. Sonia-Adjani se fait d'abord copieusement bordéliser et même insulter. Un coup de théâtre survient (dans une salle de spectacle, comme cela tombe bien !), que la prof met à profit pour... finalement tenter d'enseigner. Mais tout se complique avec l'intervention de la police (avec une brochette de flics excellents, notamment Denis Podalydès et Yann Collette)... et ce pistolet qui change de mains, faisant émerger des vérités que l'on croyait enfouies.
Si la première partie se voit comme une comédie (alors qu'elle dit des choses très graves à la fois sur la vie des jeunes des cités et sur le métier d'enseignant dans les "établissements sensibles") parfois grossière (il aurait fallu que quelques scènes soient rejouées, cela sonne parfois faux), la deuxième surprend (au bout de 3/4 d'heure, je me suis demandé comment le réalisateur allait pouvoir tenir 1h30) par ses rebondissements (dont l'un des derniers fait peut-être écho à la propre vie d'Adjani) et l'émotion qui finalement étreint le spectateur pas trop cynique.
Alors, est-ce un film ou un téléfilm ? Ben, entre les deux. Pour que ce soit un film à part entière, il aurait fallu un peu peaufiner les dialogues. Mais c'est quand même plus qu'un téléfilm. Sonia-Adjani est mise en scène un peu sous toutes les coutures. J'ai aussi apprécié que le réalisateur multiplie les sources d'images. Au-delà, force est de constater que, de Entre les murs à ce film, l'enseignant-e de français semble incarner le dernier rempart de la civilisation contre l'ignorance et la barbarie.
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mardi, 21 avril 2009
OSS 117, Rio ne répond plus
Hubert Bonisseur de la Bath revient, plus hâbleur que jamais. Dans ce nouvel opus des aventures de ce sous-James Bond à la française (clins d'oeil à l'illustre Connery à la clé), il est toujours aussi infatué de lui-même, sexiste, xénophobe (sa confrontation récurrente et savoureuse aux bandits chinois constitue le fil rouge de l'histoire)... et même un peu antisémite. Evidemment, le film joue sans cesse sur le second degré... et même, semble-t-il, sur le troisième voire le quatrième. Qu'est-ce que c'est malin ! Le spectateur antiraciste comme l'indécrottable franchouillard pourront goûter les saillies des personnages, même si scénaristes comme réalisateur ont pris franchement le parti de déboulonner la statue du héros.
Evidemment, on rit... pas forcément tous aux mêmes endroits d'ailleurs. Quelques scènes font toutefois l'unanimité, comme cette hilarante poursuite en déambulateur qui, au début, nous donne à voir le physique d'OSS sous un jour inattendu... L'abattage de Dujardin (à qui on fait même incarner un trapéziste !) est pour beaucoup dans la réussite de cette comédie. Hazanavicius a réussi a donner une vraie force cinématographique à son rire "gargantuesque". Il force un peu trop sur les expressions du visage, mais bon, quand on est pris dans le rythme, cela passe. Notons cependant quelques "blancs" dans le film. S'ils sont parfois justifiés (le réalisateur a pris quelques risques dans les dialogues), il est incontestable que toutes les répliques ne font pas mouche, quelques-unes étant même ratées.
L'ambiance des années soixante est rendue avec soin. Costumes, musique, voitures, meubles font partie de l'univers décalé d'OSS, pour notre plus grand plaisir (je songe à acquérir le CD de la bande originale, tant les partitions m'ont plu). Le côté "kitsch" est poussé à l'extrême : la réalisation se la joue rétro, avec cet écran partagé (bien utilisé ma fois), avec ces scènes filmées dans des voitures derrière lesquelles défile un paysage factice, avec ces pétarades censées évoquer les ricochets des balles (qui, bien entendu, n'atteignent jamais le héros) ou encore avec ces qui combats qui puent la mise en scène, le summum étant atteint lors de la mini-partie de catch entre Bonisseur et un sbire masqué du méchant nazi. On appréciera aussi le coup de la même scène jouée deux fois, à deux époques différentes, allusion aux facilités que se permettaient nombre de films de genre de jadis.
Côté paillettes, je relève un gros effort de casting : le film regorge de "canons" de toute sorte. S'ils font régulièrement tourner la tête de notre espion préféré, l'information la plus "sensible" est qu'il semble découvrir une nouvelle facette de sa sexualité... un aspect qui, si mes oreilles ne m'ont pas trahi, serait promis à un bel avenir dans le troisième volet...
23:34 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film
dimanche, 12 avril 2009
Ponyo sur la falaise
C'est le dernier animé de Miyazaki (le père, parce que le fils avait officiellement assumé la direction des Contes de Terremer, où la patte du papa était néanmoins décelable). L'action se passe à notre époque, au Japon, en zone littorale (côté sud du pays). Le père est marin-pêcheur, la mère auxiliaire de vie dans une maison de retraite. Le fiston est le héros de l'histoire. Il partage la vedette avec le personnage éponyme, la sirène (personnage apparenté à Kiki, la petite sorcière) qu'il va nommer Ponyo.
Le dessin est toujours aussi bien léché. On retrouve, dans les mouvements, les qualités qui ont fait le succès notamment de Princesse Mononoke et de Nausicaä, de la vallée du vent. L'influence de la culture européenne se fait aussi toujours sentir. Ainsi, dans les profondeurs de l'océan vit un personnage qui doit beaucoup au capitaine Nemo de Jules Verne (en moins cynique toutefois)... et l'une des séquences les plus enlevées, sur une musique calquée sur celle de Wagner, nous permet d'assister à une formidable chevauchée des super-poissons.
Une grande attention a été portée aux mouvements des personnages. J'ai notamment en tête une scène où l'on voit Sosuke se débarrasser précautionneusement des jumelles qu'il porte en bandoulière ou une autre au cours de laquelle Ponyo ôte le seau qu'elle tient au bras. Même la psychologie enfantine est abordée avec un grand sérieux... sous un jour presque exclusivement positif toutefois : si l'on excepte un bébé affamé plein de morve, ces bambins sont plus adorables et attendrissants les uns que les autres. (Une chose m'a frappé : le héros -dans la version française- ne s'adresse pas à ses parents en les appelant "papa" ou "maman", mais en utilisant leurs prénoms.)
Les scénaristes ont donc choisi de mettre l'accent sur l'histoire enfantine, plutôt que sur le monde des adultes. Les personnages les plus en phase avec le héros sont paradoxalement les retraitées percluses de rhumatismes. Il a donc été décidé de ne pas développer l'histoire du côté du père de la sirène, dont on sent à un moment du film qu'il semble avoir un projet assez cataclysmique, projet que l'évasion de sa fille fait, au propre comme au figuré, tomber à l'eau.
Du coup, le film reste au niveau de la gentillesse, nimbée dans un halo de fantastique. C'est sympathique, mais cela ne vole pas aussi haut que les précédents films de Miyazaki.
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jeudi, 09 avril 2009
Agnus Dei
Le titre est le nom d'une prière et signifie "agneau de Dieu". C'est une référence à Jésus et à sa mort. Une victime sacrificielle est donc au cœur de l'histoire. Il s'agit du mari de l'héroïne qui revient de France en Argentine. Le film va se charger de nous faire comprendre, par petites touches, comment on en est arrivé là et pourquoi l'enlèvement du grand-père affable, en 2002, fait remonter à la surface la période de la dictature militaire, plus précisément l'année 1978 (celle de la coupe du monde de football en Argentine).
Ce sont les mêmes acteurs qui incarnent les personnages principaux à 24 ans d'intervalle (sauf pour la petite-fille). Du coup, on a beaucoup joué sur les coiffures, les vêtements et le maquillage pour montrer le temps qui passe. Cela fonctionne, en gros.
La construction est habile. La trame est celle de l'année 2002, émaillée de retours en arrière... pas forcément placés dans l'ordre chronologique. Cela complique un peu le suivi du film, mais c'est pertinent : les séquences "anciennes" interviennent quand leur souvenir revient à l'un des personnages... avec quelques accommodements toutefois, histoire de ménager un peu de suspense.
Ceux qui ne connaissent pas les années 1976-1983 en Argentine ne vont pas apprendre grand chose : ce n'est pas une leçon d'histoire. Par contre, ils verront comment une dictature peut transformer la vie d'une famille de classe moyenne, y compris 25 ans après les faits.
15:32 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film
mercredi, 08 avril 2009
Monstres contre aliens
Les "aliens" sont, bien entendu, des extra-terrestres...mais tout le monde n'étant pas anglophone, il aurait peut-être été utile de modifier le titre. C'est la dernière production des studios Dreamworks. C'est donc un dessin animé visible à plusieurs niveaux. C'est d'abord une comédie sympatoche pour petits et grands, avec des personnages hauts en couleurs. L'espèce de matière flasque cyclopéenne se taille un franc succès chez les jeunes (pis chez certains "grands" aussi). Parfois, cela part dans tous les sens... en tout cas, c'est "animé" !
Au second degré, c'est émaillé de clins d'œil, par exemple à Rencontres du troisième type, à Star Wars... C'est aussi une critique gentille du monde des adultes, avec ce président des États-Unis qui se prend pour Bruce Willis et qui s'avère être un gros gaffeur pétochard. On se moque aussi sans méchanceté de ces films hollywoodiens dans lesquels les extra-terrestres ont toujours le bon goût de débarquer... aux États-Unis.
C'est aussi un joli portrait de femme. L'un des monstres est "Suzanne". Rien ne la destinait à devenir un super-héroïne. Elle devait visiblement devenir une épouse dévouée à son journaleux de mari... mais tout dérape et ce film est aussi l'histoire de son affirmation, de l'acquisition de son indépendance. Cela ne va pas changer le monde, mais cela contribue à mettre quelques idées à l'endroit dans la tête de nos chers bambins.
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mardi, 07 avril 2009
Tulpan
Ce titre un peu mystérieux n'est autre que le prénom de la jeune femme que convoite le héros du film, Asa. On ne la voit pratiquement jamais : on distingue ses yeux quand elle observe le dialogue entre son prétendant et ses parents à travers l'ouverture d'un drap et on entraperçoit son dos et sa nuque dans la cabane où le pauvre Asa essaie de pénétrer (en tout bien tout honneur, évidemment).
Le pauvre garçon n'est pas bien futé. Il a achevé son service militaire dans la marine, ce qui est plutôt valorisant (il en a d'ailleurs gardé l'uniforme pour impressionner la famille), mais il est doté d'oreilles assez décollées (moins toutefois que celles du prince Charles, comme il peut le démontrer au cours du film !), qui déplaisent à sa dulcinée. Le problème est qu'en plus d'être mignonne, elle est la seule femme disponible de toute la région. Si notre héros ne parvient pas à se marier, on ne lui confiera pas de troupeau et il ne pourra donc pas s'installer sur place comme éleveur.
C'est cet aspect du film qui m'a le plus séduit. Parce que bon, cette histoire d'amour contrarié lasse vite (surtout quand on apprend que la jeune convoitée veut poursuivre ses études "à la ville" et que la mère ne veut pas la donner à un paumé qui revient de l'armée). De nombreuses scènes ont été tournées dans la steppe kazakh, si aride, parfois traversée par des tornades de sable. C'est sur de gigantesques surfaces que les bergers guident leurs troupeaux. Notre héros Asa n'est d'ailleurs pas très habile en la matière... mais une évolution se dessine.
Certaines séquences avec les brebis sont fortes par leur aspect documentaire non simulé (je pense notamment à la mise-bas). L'intervention du vétérinaire, aux prises avec une chamelle et son petit, est à la fois drôle et criante de vérité. De la même manière, un grand soin a été apporté aux séquences d'intérieur, dans les yourtes. Les tâches sont sexuées. Les femmes sont d'abord des ménagères... et elles chantent.. pour mon plus grand plaisir quand il s'agit de la sœur du personnage principal... mais il est évident que sa fille a des progrès à accomplir (sa voix stridente m'a été particulièrement insupportable). On sent toutefois que, dans le couple, la hiérarchie peut parfois s'inverser. On retrouve donc dans ce film des éléments déjà présents dans d'autres fictions comme Le Mariage de Tuya ou Le Chien jaune de Mongolie (je ne l'ai pas chroniqué, mais je peux vous assurer qu'il est très bien).
Le séjour en ville est quelque chose qui travaille les jeunes. Le plus jeune fils de la sœur d'Asa demande sans cesse à ce qu'il l'y emmène. Le meilleur ami du héros essaie de l'y entraîner. Ce personnage mérite tout particulièrement le détour. C'est une sorte de livreur-marchand ambulant, qui parcourt la steppe dans son drôle de véhicule, écoutant Boney M à fond la caisse et tapissant les parois internes de photos érotiques ! On sent qu'il en pince pour la sœur d'Asa, que ses parents ont sans doute mariée de force à un homme bien plus âgé qu'elle. Le héros lui-même, comme sa dulcinée, envisage finalement de partir en ville. Entre l'envie de vivre et la résignation, le cœur des personnages balance...
14:27 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film
Gran Torino
Imaginez que l' Inspecteur Harry (ou le Maître de guerre) soit à la retraite et qu'il vienne de perdre son épouse. On se retrouve avec un vieux blanc aigri, misanthrope, raciste, homophobe (très souvent filmé en contre-plongée, comme pour accentuer ses défauts)... et très attaché à ses armes.
Voilà un rôle taillé sur mesure pour notre ami Clint, le cinéaste républicain le plus intelligent des États-Unis ! Les scénaristes ont la bonne idée de lui flanquer dans les pattes de nouveaux voisins, asiatiques, hauts en couleur : la grand-mère crache encore plus ignominieusement que notre ex-soldat, ex-ouvrier de chez Ford. En plus, le fiston, une vraie "tafiole", risque de passer sous la coupe d'un gang local. Il n'y a guère que la sœur aînée qui mérite le détour : elle est intelligente, courageuse et ne manque pas de répartie.
Évidemment, le salaud a un grand cœur et ce film est l'histoire de l'ouverture de ce cœur. Eastwood manie la pâte humaine comme il sait si bien le faire (revoyez par exemple l'excellent Million dollar baby ou encore L'Echange). La caméra sait suivre le personnage principal aussi bien à l'intérieur (quand il est invité chez ses voisins Hmongs ou qu'il bricole dans son garage) qu'à l'extérieur (quand il intervient pour mettre fin à une agression ou qu'il fanfaronne sur son patio). On retrouve un peu le tempérament de Dirty Harry, parfois emprunté, tête de cochon et mauvais langage (en version originale sous-titrée, ça déchire... même si je préfère la voix française de Clint). On notera au passage un message "politiquement incorrect" : les liens d'amitié sont plus importants que ceux du sang... surtout quand la famille est indigne !
Tout ça pour dire quoi, au final ? Ben j'ai adoré, j'ai ri (même -surtout ?- aux blagues racistes auxquels le personnage croit à moitié)... et j'ai eu les yeux qui piquent, à la fin. Tout n'est pas dit concernant ce dernier quart d'heure. Le film terminé, on réfléchit et on se dit que l'ancien ouvrier cancéreux a donné une sacrée leçon de vie à son jeune apprenti.
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lundi, 06 avril 2009
Welcome
Le titre a un double sens... pas seulement parce qu'il est (en partie) une antiphrase. C'est d'abord la référence au rejet dont font l'objet les immigrants, rejet non assumé dans le "pays des Droits de l'Homme", à l'image du paillasson sur lequel figure la fameuse inscription. C'est aussi le symbole du dialogue qui s'instaure entre quelques Français et ces Kurdes ou Afghans, en anglais. Ce film très français est donc souvent sous-titré !
J'ai hésité à aller le voir. J'ai eu peur d'un prêchi prêcha "gauche alternative", chiant et manichéen. Heureusement, le réalisateur a eu l'habileté de ne pas présenter systématiquement les policiers comme d'horribles fachos... et il a nuancé le tableau des milieux immigrés, à travers notamment l'histoire du mariage arrangé... sans parler des vols.
Les acteurs sont très bons. C'est prenant. Un bon film "social" français, ça ne se refuse pas ! Ceci dit, c'est un peu larmoyant, un peu trop souligné par la musique, mais il est vrai que ces histoires ne sont pas d'une grande gaieté. Le cas du jeune footballeur irakien est d'autant plus attendrissant qu'il cherche à rejoindre sa dulcinée. On a voulu donner des migrants mis au premier plan l'image la plus humaine possible. Autre intérêt du film : la description de Calais et des installations portuaires, souvent de nuit. Une vraie réussite.
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dimanche, 05 avril 2009
Prédictions
Le réalisateur et les producteurs ont dû hésiter quant au genre du film. Du coup, ce n'est pas vraiment un film d'épouvante, c'est un peu un film de science-fiction et, de temps à autre, un film-catastrophe. On y retrouve des ingrédients présents dans d'autres longs métrages : Nicolas Cage incarne un père célibataire un peu largué, pris par son boulot. Il est fils de pasteur et a perdu la fois suite au décès de sa femme. Cela n'est pas sans évoquer le personnage joué par Mel Gibson dans Signs ou celui interprété par Tom Cruise dans La Guerre des mondes.
On confronte donc un citoyen lambda (professeur au M.I.T. tout de même, faut pas déconner non plus) à des événements étranges, inexplicables, surnaturels. L'implication des chiffres n'a rien de nouveau. Pour ce qui est des productions récentes, un (télé)spectateur a pu entrer être familiarisé avec le sujet par la série Numbers ou encore le film Le nombre 23 (vi, avec Jim Carrey, acteur sous-estimé). Si on remonte un peu dans le temps, on trouve l'excellent Cube, par exemple.
Le film est une démonstration, dont l'enjeu est énoncé dans le premier cours du prof auquel on assiste : hasard ou nécessité ? Et, si nécessité il y a, faut-il invoquer un (ou plusieurs) dieu(x) ? Comme c'est un film grand public, les scénaristes ont tenté de ménager la chèvre et le chou. Du coup, que vous soyez croyant ou athée, vous verrez ce qui concorde avec vos convictions. (Sont malins ces producteurs, tout de même !)
Revenons à l'histoire : on remonte donc ces dessins de gamins de 1959 en 2009... et le fils du héros se voit attribuer le plus bizarre : une série de chiffres. Un soir de cuite, le papa pense avoir décodé (au moins partiellement) le truc. Il va tenter d'empêcher ces catastrophes de se produire... et surtout de comprendre le pourquoi du comment de la chose.
Le séquences de catastrophes sont époustouflantes. Franchement, l'accident d'avion comme celui du métro sont impressionnants de réalisme et de maîtrise visuelle. On a soigné les détails... au point peut-être de parfois choquer une partie du public. C'est donc un bon film d'action, un bon film-catastrophe.
Par contre, la dernière demi-heure m'a laissé sur ma fin. J'ai compris assez tôt quelle était la solution de l'énigme... et j'ai été déçu. Cela devient un peu grand-guignolesque. Dommage, parce que le reste mérite le détour.
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samedi, 04 avril 2009
La véritable histoire du chat botté
C'est bien entendu adapté du conte de Charles Perrault, qui n'était lui-même pas le créateur de l'histoire... Il y a eu des prédécesseurs... et des versions dans lesquelles le héros est une chatte ! Du coup, je me suis replongé dans le XVIIème siècle.
Deschamps et compagnie ont apporté deux modifications majeures à l'histoire. La première est une inversion dans l'importance des membres du couple royal : chez Perrault, c'est le roi qui agit, la souveraine ne jouant aucun rôle, alors que dans le film, à côté du roi fainéant roupilleur s'agite une reine gouailleuse et énergique... Yolande Moreau, bien entendu. Toutes les scènes qui la voient intervenir sont des réussites. L'autre modification est liée à la confrontation du chat et de l'ogre (le seul moment de vraie folie, hélas) : le grand costaud est plus finaud que dans le conte, puisqu'il n'accepte pas de se changer en souris ni en rat (sage décision, quand on sait combien nos amis félidés sont friands de ces petites bestioles qui couinent).
Les images sont magnifiques. Les décors ont été particulièrement soignés (plus que les vêtements des personnages, paradoxalement) et les effets de miroir sont superbes. La musique est entraînante, un peu folk, parfois gitane, reprenant des thèmes célèbres puisés chez Beethoven, Bizet, Mozart, Verdi, Strauss... et même Louis Armstrong. Par contre, les parties chantées sont de faible qualité. Y a-t-il dérision ? Je ne crois pas. Je me serais bien passé des vocalises poussives de la princesse (beau visage, jolie poitrine, taille de guêpe et gros cul) et de son soupirant fils de meunier.
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vendredi, 03 avril 2009
Un barrage contre le Pacifique
C'est qu'il faut bien de la patience pour arriver à voir ce film ! A la base, j'ai été attiré par trois caractéristiques : le sujet (le Cambodge colonial français), l'actrice principale (Isabelle Huppert, vieillissante et in/digne selon les moments) et le réalisateur Rithy Panh (auteur notamment de l'excellent documentaire S21, la machine khmère rouge, sur le génocide cambodgien).
Le résultat est assez emballant, bien qu'un peu long. La réalisation est soignée (dès le début, on nous ravit avec un superbe panoramique suivant les pas de l'héroïne), l'image léchée (superbes plans des rizières... c'est que ça peut monter, le riz !) et le son très soigné (dans une salle de ciné bien équipée, c'est un plaisir d'entendre la pluie tomber, les oiseaux chanter etc).
Les interprètes sont bons, qu'ils soient cambodgiens ou français. Isabelle Huppert bien, sûr, même si elle a quelques absences à l'occasion de certaines scènes (et puis le coup de la faire parler à voix haute quand elle s'adresse à elle-même, c'est moyen moyen...). Gaspard Ulliel (oui, notre Jacquou !) est excellent, en jeune beauf au grand coeur (avec heures de musculation à la clé... faut ce qu'il faut ! Une consolation pour les mâles moins bien achalandés : il a des dents pourries !). Les acteurs cambodgiens sont bien dirigés.
Le côté documentariste de Rithy Panh ressort dans le tableau qu'il dresse de la domination coloniale. Pourtant, ce n'est pas vraiment un film militant. Il est trop contemplatif et esthétisant pour cela, mais l'arrière-plan historique n'est pas négligé. Régulièrement, de "petites" scènes brossent un portrait au final assez accablant de l'action des Français, qu'ils soient colons (sauf l'héroïne), commerçants ou fonctionnaires. Leurs alliés cambodgiens ou sino-cambodgiens ne sortent pas du film grandis non plus.
Sans trop dévoiler la fin, je peux dire qu'il se termine par un plan sur la rizière, aujourd'hui... car le réalisateur est retourné sur les lieux où a vécu la mère de Marguerite Duras, auteur du roman autobiographique dans lequel elle figure sous le nom de Suzanne.
P.S.
Le dossier pédagogique publié à l'occasion de la sortie du film est très intéressant :
P.S. II
Dans Le Monde a été publié un article qui revient sur la problématique et l'histoire du barrage dans la région où a vécu la mère de M. Duras.
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samedi, 28 mars 2009
Les Trois Royaumes
C'est paraît-il le plus gros succès cinématographique de tous les temps en Chine. Et, là-bas, le film dure plus de 4h30 (contre un peu plus de 2h15 pour la version qui nous est proposée) ! Il aborde des événements célébrissimes en Extrême-Orient, quelque chose que l'on pourrait comparer, pour le retentissement, à la bataille de Waterloo en Europe.
C'est une sorte de péplum chinois, un péplum qui aurait bénéficié d'une armée de figurants et d'une pléthore d'effets spéciaux numériques. Ceux-ci sont d'ailleurs parfois très voyants, en particulier au début : la première séquence présentant la flotte impériale donne l'impression de sortir d'un jeu vidéo. Par la suite, cela s'améliore.
Deux moments sont particulièrement réussis. La "séquence des bateaux de paille" voit l'un des généraux alliés (interprété brillamment par le Japonais Takeishi Kaneishiro) mettre en oeuvre un habile stratagème pour réapprovisionner les troupes rebelles en flèches. (De manière générale, tout ce qui a trait à ce personnage est marqué par la subtilité, l'action de l'espionne en étant un beau symbole.) La deuxième séquence marquante est celle de l'incendie. Là, au moins, les trucages (un mot qu'il n'est plus convenable d'employer depuis que les ordinateurs ont remplacé le carton-pâte...) numériques se justifient.
A ces effets visuels s'ajoutent les scènes de combat. On est en Asie de l'Est, avec John Woo derrière la caméra, donc ne vous étonnez pas que les généraux d'il y a 1 700 ans soient experts en arts martiaux. C'est spectaculaire. Par contre, nombre de scènes de dialogues sont d'une grande platitude. Les acteurs prennent la pose, froncent les sourcils, esquissent un sourire... et donnent parfois l'impression de peiner à retenir un pet.
Les femmes ne sont en général que d'agréables personnages secondaires. On appréciera les interventions de l'espionne. Côté fausse contemplative, l'épouse du général sudiste (incarné par Tony Leung, efficace) joue un rôle plus important que ce à quoi on s'attendait, même si elle est d'abord une image de la compagne raffinée et soumise.
On pourrait se dire que toutes ces intrigues orientales ne vont pas nous concerner, nous pauvres Occidentaux. Eh bien si, finalement. Parce que cette histoire d'affrontement mythique entre deux armes coalisées, avec ces actes d'héroïsme individuels et la rivalité pour la possession d'une femme ne sont pas sans rappeler la guerre de Troie (l'action des dieux grecs en moins).
Enfin, c'est un film de notre époque. Au détour d'une scène, le réalisateur souligne le raffinement des élites, introduit, à travers quelques répliques, des références au taoïsme, met en valeur la maîtrise technique des Chinois de l'Antiquité (avec l'usage des explosifs par exemple), suggère même qu'ils ont inventé le football (ce qui n'est pas forcément erroné d'ailleurs : http://www.storyfoot.com/jeu.php ). On est donc dans le parfait prolongement de la cérémonie d'ouverture des derniers Jeux Olympiques. Ce nationalisme puise dans l'histoire ancienne un ferment de modernité. Paradoxalement, dans ce film, c'est le Premier ministre qui veut unifier de force les trois royaumes qui est le méchant, face aux dirigeants du centre et du Sud de la Chine qui souhaitent la paix dans le respect mutuel. Je ne sais pas s'ils étaient vraiment ainsi, mais, en tout cas, il est frappant qu'un film qui a eu l'imprimatur du Parti communiste chinois propage cette vision.
15:32 Publié dans Chine, Cinéma | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : film
dimanche, 22 mars 2009
Pets politiques
Il s'agit d'une parodie du Seigneur des anneaux. Cela pourrait s'appeler Le Seigneur des anus. C'est bien foutu : les dialogues parodiques sont assez bien écrits, l'auteur s'est efforcé de les faire coïncider avec les mouvements des lèvres des acteurs et la qualité sonore est tout à fait acceptable.
Cela s'appelle Les Contes de pets et vous pouvez visionner la chose à l'adresse suivante :
http://video.google.fr/videosearch?q=pet&hl=fr&em...#
Mention spéciale pour les orques victimes des pets !
01:39 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : de tout et de rien, film
mardi, 10 mars 2009
La vague (die Welle)
Le film commence par une séquence durant laquelle on découvre le personnage principal, au volant d'une splendide 504 (méfions-nous des individus qui avalent les kilomètres dans une vieille Peugeot...), écoutant du rock anglo-saxon. On entend très bien, à plusieurs reprises, les paroles "I don't care about history" (Je me fous de l'histoire)... alors que l'intrigue tourne essentiellement autour d'un phénomène historique, ce que les personnages vont d'ailleurs prendre en pleine figure. C'est une allusion à la formule "(Un peuple) qui oublie son histoire se condamne à la revivre".
Comme l'action se passe en Allemagne, de nos jours, dans un lycée pour rejetons de la classe moyenne, on tend l'oreille, on scrute : oui, il va être question du nazisme, plus généralement en fait du totalitarisme, à travers un "cours" original sur l' "autocratie". Le prof, charismatique, est à la fois entraîneur de water-polo et spécialiste de (science) politique (en voilà enfin un qui a bien compris toute la substance de la politique éducationnelle de Xavier Darcos).
Le réalisateur a voulu nous peindre un cadre particulier. Au départ, on a presque l'impression d'arriver sur un campus états-unien, avec ce travelling si caractéristique. De la même manière, la présentation de plusieurs contextes familiaux nous met en contact avec ces banlieusards friqués mais pas trop qui sont si peu autoritaires avec leurs enfants. Au lycée, les mêmes principes sont à l'oeuvre : les ados passent beaucoup de temps dans des clubs, apportent parfois leur pitance en cours et apparaissent souvent complètement "bouffés" par le consumérisme putassier. Je pense que, derrière cette description sans complaisance du milieu, il y a la volonté de faire toucher du doigt que, dans certaines circonstances, certaines des mesures proposées par des mouvements dangereux peuvent avoir de bons côtés.
Pour bien faire comprendre à ses élèves ce qu'est un mouvement populiste , le prof décide d'en créer un, dans sa classe. Il est fondé sur la soumission absolue à l'autorité et l'exclusion (directe ou plus subtile... perverse même) des dissidents. Le grand intérêt du film est l'évolution de ce groupe de jeunes, où la quête identitaire le dispute au besoin de reconnaissance. (Non, je n'enlèverai pas cette phrase grandiloquente.)
Les acteurs sont formidables, à commencer par ce prof sportif, mais les jeunes sont eux aussi épatants.
Le film souffre cependant d'une faille conceptuelle. En théorie, le prof était chargé de faire toucher du doigt à ses élèves la réalité d'un totalitarisme qui se met en place. Il a donc réussi au-delà de ses espérances. Mais, dans le récit, on l'entend affirmer qu'il voulait surtout leur faire découvrir le collectif, la solidarité (à l'opposé de leurs valeurs bourgeoises égocentriques). Le réalisateur a du mal à gérer cette contradiction, entre le prof manipulateur d'un côté et l'ingénu pédagogue de l'autre. Mais cela reste une formidable expérience cinématographique... que j'ai pu voir, en sortie nationale, dans un cinéma aveyronnais, en version originale sous-titrée ! (Pas à Rodez, hélas, mais à Millau... mes compliments au responsable de la programmation des Lumières de la ville.) Ne vous laissez pas influencer par la critique professionnelle snob, qui n'a en général pas aimé.
Sur un sujet proche, j'avais aussi beaucoup apprécié L'Expérience, de Olivier Hirschbiegel, sorti en 2003.
23:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film