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jeudi, 02 février 2012

Sherlock Holmes 2 - Jeux d'ombres

   Je n'ai pas vu le premier film dans lequel Robert Downey Jr et Jude Law redonnent vie au duo le plus mythique du roman policier : Sherlock Holmes et le docteur Watson. Les extraits diffusés à l'époque (et même d'autres depuis) m'ont fait craindre le pire : la dénaturation des principes fondamentaux des intrigues policières. Ici, c'est la confrontation avec le professeur Moriarty qui m'a attiré.

   Le duo d'enquêteurs fonctionne très bien. C'est pour moi la grande qualité du film : recréer ce couple, avec un Watson plus "moderne" et un Holmes plus "djeunse". Leurs quasi-disputes conjugales sont exquises et l'on prend plaisir à les voir se chamailler.

   L'intrigue n'est pas des plus élaborées, mais elle laisse la place à quelques séquences très bien foutues, notamment celle du train, qui oscille entre La Cage aux folles et Die hard 4 et celle tournée à l'intérieur de l'usine allemande, enlevée et pleine de rebondissements. J'ai aussi beaucoup apprécié l'enterrement de la vie de garçon de Watson et le finale dans le château suisse.

   Aux acteurs principaux s'ajoutent deux excellents seconds rôles, Noomi Rapace (oui, Lisbeth Salander, la seule, la vraie, l'unique) en bohémienne pleine de ressources et Stephen Fry, qui incarne avec désinvolture un Mycroft Holmes totalement décomplexé !

   Par contre, j'ai peu goûté l'abus de ralentis. Je comprends qu'on ait choisi cette technique pour nous faire toucher du doigt l'extraordinaire faculté d'observation du héros, mais, franchement, là, c'est trop. Et je ne parle pas des scènes de baston survitaminées. On nous fait de ce champion de la déduction, plutôt enquêteur en chambre, un roi de la castagne. C'est la principale limite de ce film, qui, à trop vouloir séduire un certain public, rate parfois sa cible.

23:28 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, cinema, film

vendredi, 27 janvier 2012

Les courts-métrages nommés aux Césars 2012

   Il ne m'a pas été possible de tous les voir. J'ai quand même pu visionner au moins un extrait de chaque. Ils sont de genres très différents.

   Deux d'entre eux sont ouvertement militants. La France qui se lève tôt (de Hugo Chesnard) marie le pamphlet à la comédie musicale... Je ne suis pas hyper emballé... mais un jury "politiquement correct" aimera sans doute cette défense et illustration des sans-papiers.

   Plus convaincant, parce que plus subtil, est le drôlatique Je pourrais être votre grand-mère (de Bernard Tanguy), qui voit un jeune avocat d'affaires se lancer dans la création de pancartes pour SDF. Très corrosif !

   D'autres jeunes cinéastes ont tenté la comédie de moeurs. Les extraits disponibles de J'aurais pu être une pute (de Baya Kasmi... qui donne très envie de voir l'intégralité !) et de Un Monde sans femmes (de Guillaume Brac : extrait 1 et extrait 2) sont prometteurs.

   Mais mon préféré, le plus abouti selon moi, est L'Accordeur, d'Olivier Treiner. On est face à un vrai metteur en scène et une histoire bien construite. Il est question d'un pianiste, de la cécité et d'un meurtre...

23:23 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema

Les nominations pour les César 2012

   Sur le site de l'Académie des arts et techniques du cinéma, on peut télécharger la liste complète des nominations, sans doute présentée dans l'ordre dans lequel les récompenses seront décernées :

Césars-nominations-2012.pdf

   Je vais me livrer à un exercice difficile, non pas celui du pronostic (puisque je n'ai pas vu tous les films concernés et que, de surcroît, je ne pense pas avoir des goûts représentatifs de la majorité des personnes qui votent), mais celui des préférences, parmi le choix proposé, forcément restrictif. (J'ai déjà décerné mes propres récompenses, les Riton 2011.)

   Meilleur scénario original

   Entre les quatre films que j'ai vus, il n'est pas facile de trancher. L'histoire d'Intouchables est forte, mais elle s'inspire de faits réels, tout comme celle de Polisse. Le mérite est plus grand quand on doit davantage imaginer, selon moi. Restent The Artist et L'Exercice de l'Etat. Le premier est davantage conçu sur le mode de l'hommage. Je choisis donc le second et Pierre Schoeller.

   Meilleure adaptation

   J'hésite beaucoup entre Présumé coupable et Carnage. Comme c'est pour moi la seule occasion de récompenser le film de Polanski, qui m'a fait beaucoup rire, je choisis Carnage et le travail de Yasmina Reza et Roman Polanski. Mais celui de Vincent Garenq est aussi très bon.

   Meilleur montage

   Pour moi, cela se joue entre Polisse (Laure Gardette et Yann Dedet) et The Artist (Anne-Sophie Bion et Michel Hazanavicius). Je choisis le second.

   Meilleur réalisateur

   Je donne la prime à l'originalité rétro : Michel Hazanavicius pour The Artist.

   Meilleure actrice

   J'ai beaucoup aimé les compositions de Marina Foïs et Karin Viard dans Polisse, mais je choisis Marie Gillain, dont la force de l'intériorité m'a bouleversé dans Toutes nos envies.

   Meilleur acteur

   Choix très très difficile. Je pense honnêtement qu'ils méritent tous le César. Je place néanmoins un peu au-dessus la performance réalisée par Philippe Torreton dans Présumé coupable.

   Meilleure actrice dans un second rôle

   Anne Le Ny, dans Intouchables. (Mais Zabou Breitman n'est pas loin.)

   Meilleur acteur dans un second rôle

   Aucune autre personne que Michel Blanc, dans L'Exercice de l'Etat, ne peut décrocher la récompense.

   Meilleur film documentaire

   On va dire que l'Aveyronnais que je suis manque d'objectivité, mais, franchement, Tous au Larzac est au-dessus du lot.

   Meilleur premier film

   Là aussi, le choix est facile : Le Cochon de Gaza.

   Meilleur film étranger

   Pour moi, cela se joue entre Incendies et Une Séparation. Avantage au film iranien.

   Meilleur film

   Je choisis le plus complet de la liste, pas forcément le plus récompensé par moi, mais celui qui est bien placé dans toutes les catégories, à savoir Polisse.

   Restent les regrets, les absents. Plusieurs très bons films français sont exclus des nominations :

- La Grotte des rêves perdus, bizarrement absent de la liste des meilleurs documentaires

- Jeanne captive (le film anti-paillettes), ainsi que son interprète principale Clémence Poésy

- Moi, Michel G., milliardaire, maître du monde, une excellente comédie satirique injustement ignorée

- L'Assaut, un très bon film d'action, mais où les méchants sont des musulmans, ce qui n'est pas politiquement correct dans le monde du cinéma français

- De bon matin, un film coup de poing, en prise sur son temps, avec Darroussin au meilleur de sa forme (mais les critiques préfèrent le voir médiocre chez Guédiguian).

   Il ne reste plus qu'à attendre le palmarès.

17:05 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

jeudi, 26 janvier 2012

Incendies

   La semaine dernière s'est déroulé le Festival Télérama, qui voit des cinémas reprogrammer des films "art et essai" de l'année écoulée. Parmi ceux-ci, je recommande L'Exercice de l'Etat et surtout Une Séparation.

   En Aveyron, ce n'est pas sur les cinémas de Rodez qu'il fallait compter pour accorder une telle place à une programmation originale. C'est le cinéma decazevillois "La Strada" qui a permis aux cinéphiles de (re)voir des films de qualité peu diffusés.

   Il y a plusieurs mois de cela, je m'en étais voulu d'avoir raté Incendies à sa sortie. Du coup, là, j'ai fait en sorte de voir ce film. C'est une production canado-libanaise. Il est inspiré (en partie) de l'histoire de Soha Bechara, parfois surnommée la "Jeanne d'Arc libanaise".

   Le film prend son temps. Il démarre lentement, mettant en place son dispositif : des allers et retours entre le monde actuel, celui de la mort de l'héroïne (apparemment diminuée intellectuellement et physiquement), et sa jeunesse au Liban juste avant et pendant la guerre civile.

   Nous suivons ses enfants, les (faux) jumeaux Jeanne et Simon, dans leur quête du passé caché de leur mère, aidés en cela par un notaire sympathique et débonnaire (un personnage de science-fiction ?).

   Les scènes anciennes permettent de voir en action une actrice remarquable, Lubna Azabal, naguère remarquée dans Viva Laldjérie, Paradise now et Les Hommes libres. On la voit successivement jeune femme amoureuse, patriote militante, enseignante, meurtrière, prisonnière, enfin mère éteinte. Pour bien comprendre les enjeux des principaux retournements, je recommande d'être particulièrement attentif lors de la première séquence de jeunesse.

   Le film joue sur la montée progressive de la tension. On se retrouve quasiment dans un polar. La dernière demi-heure est celle des révélations les plus fracassantes, dont l'accumulation donne un tour encore plus dramatique à l'histoire... à tel point que l'on frise l'invraisemblance. Pour que le tout tienne mieux la route (notamment la révélation sur le vrai père des jumeaux), il aurait fallu mieux mettre en scène l'ellipse qui fait sauter l'intrigue de la jeunesse de l'héroïne à son action de militante à l'âge adulte, même si sa coiffure et ses vêtements sont censés nous faire comprendre que pas mal de temps a passé depuis la naissance du premier enfant.

   La fin est assez inattendue, et je suis sorti de là un peu sous le choc.

   P.S.

   Un documentaire suisse permet de suivre Soha Bechara, de retour au Liban.

dimanche, 22 janvier 2012

J Edgar

   Clint Eastwood s'est donc "attaqué" à la biographie de l'ancien directeur du FBI, John Edgar Hoover. Le titre est révélateur de la célébrité de cet homme de l'ombre, qui ne s'est pas contenté de se faire un nom, mais aussi un prénom... et même deux ! Le film montre bien que la manière dont une personne s'adressait à lui ("Mister Hoover", "John", "Edgar") révélait la nature de leurs rapports.

   Le réalisateur s'attarde sur le "privé". Le jeune homme n'a pas digéré sa relation oedipienne avec sa mère, ce qui l'a sans doute handicapé dans sa vie sentimentale. A un moment, Eastwood nous montre le film qu'il aurait pu faire, si quelque chose de charnel s'était noué entre le jeune Edgar (Di Caprio éblouissant, aussi bien jeune que vieux) et sa future collaboratrice, Helen Gandy, incarnée avec brio par Naomi Watts. Les deux personnes semblent faites du même bois : dévouées à leur travail et à une certaine idée des Etats-Unis.

   La part la plus délicate est la peinture de la relation homosexuelle qui liait Hoover à son bras droit, Clyde Tolson (Armie Hammer, lui aussi excellent ; on l'avait remarqué dans The Social Network). Dans la première moitié du film, Eastwood semble marcher sur des oeufs, lui l'hétérosexuel viril flamboyant des années 1960-1990. Dans la seconde partie, il représente ce quasi-couple comme il l'aurait fait d'un homme et d'une femme... en évacuant le côté sexuel toutefois.

   Le film est aussi réussi (et inabouti) dans son traitement du parcours professionnel de Hoover. On nous le dépeint comme un jeune ambitieux propre sur lui, très pointilleux sur le respect des convenances et de la loi. Très tôt (dès l'après-première guerre mondiale), il a la passion de combattre le crime (avec l'exemple emblématique de l'affaire Lindbergh) et le communisme.

   Les partis pris d'Eastwood (le républicain) sont visibles dans la manière dont il choisit d'illustrer les relations ambiguës entretenues par le chef du FBI et les hôtes successifs de la Maison Blanche. Il est plutôt question des présidents démocrates : Roosevelt et JFK. La gué-guerre menée par Hoover contre Martin Luther King est elle aussi montrée du point de vue du chef du FBI. Du coup, sont cités dans le film essentiellement les défauts de ses adversaires... et j'ai trouvé que les magouilles de Hoover ont été singulièrement édulcorées.

   Le plus paradoxal est que sa carrière prend fin quand est élu président celui qui, a priori, pouvait sembler le plus proche de ses convictions : Richard Nixon. Mais Eastwood prend soin de laisser entendre que le nouveau patron n'a rien à envier au vieil Edgar, question magouilles. (La fin contient une préfiguration de l'affaire du Watergate.)

   Eastwood a voulu mêler le mélo au film politique. Le mélange tient bien la route, parce que c'est bien joué, bien filmé et que la musique (signée Clint) est chouette. C'est plutôt l'histoire intime qui est la mieux traitée, selon moi. La vie professionnelle de Hoover durant l'Entre-deux-guerres est bien restitutée. Mais son action dans les années 1940-1960 n'est pas étudiée de manière approfondie. Cela aurait sans doute conduit Eastwood à trop se distancier de son "héros", ce qui n'était visiblement pas dans ses intentions.

dimanche, 15 janvier 2012

La Colline aux coquelicots

   C'est le deuxième long-métrage signé Goro Miyazaki (le fils de Hayao), après le moyen Contes de Terremer. Le papa et son équipe ne sont toutefois pas totalement étrangers à ce film.

   L'histoire a pour toile de fond les années 1963-1964, juste avant que les Jeux Olympiques ne se déroulent au Japon, juste avant l'inauguration du Shinkansen. Le pays essaie d'oublier la Seconde guerre mondiale et connaît une forte croissance économique.

   On en a des traces tout au long de l'histoire. Le centre névralgique de l'intrigue est une pension, tenue par une veuve, aidée de ses petites filles (surtout l'aînée, Umi), parfois de sa fille, une enseignante souvent absente. Les clients sont exclusivement des femmes. Le père d'Umi, un marin, est mort en opérations lors de la guerre de Corée.

   L'autre lieu-clé est le lycée, plus précisément une sorte de cité-U (masculine) en autogestion, le "Quartier latin". On trouve d'autres références françaises dans ce film, du drapeau tricolore (qu'on aperçoit une ou deux fois sur un mât) au dictionnaire français-japonais (visible la première fois qu'Umi recopie des caractères), en passant par le livre Les Thibault, de Roger Martin du Gard, que l'héroïne lit.

   Trois histoires principales s'entrecroisent : la lutte pour la sauvegarde de ce joyeux bordel qu'est le "Quartier latin", les interrogations d'Umi à propos de son père et la relation qui se noue entre elle et un étrange garçon, Shun, tantôt très proche, tantôt distant.

   Mais le plus beau du film réside dans les scènes de la vie quotidienne, décrite avec grand soin (un peu comme dans les films d'Ozu, mais en moins lent). Comme dans le récent Colorful, la représentation des repas et de leur préparation donne vraiment faim !

   Au niveau du dessin, c'est joliment fait, sans que cela soit éblouissant. Le ton est nostalgique. Ah qu'il était bon le temps où les jeunes filles étaient sages, avec leur jupe plissée et leurs sockettes blanches ! (Les garçons, eux, portaient l'uniforme... et respectaient l'autorité.) C'est peut-être la limite du film : il ressuscite une époque, mais n'est pas porteur d'un message particulièrementn fort. Cela reste un bon divertissement.

21:16 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, film

samedi, 14 janvier 2012

Intouchables

(Début novembre 2011)

- Il parait qu'Intouchables est pas mal, comme comédie. T'en penses quoi ?

- Pas grand chose : il vient de sortir et je ne l'ai pas vu. Par contre, je peux te recommander De bon matin (avec un Darroussin excellent) et L'Exercice de l'Etat (Michel Blanc et Olivier Gourmet é-pa-tants).

- J'en doute pas, mais ils ne sont pas encore à Rodez, tes films !

 

(Début décembre 2011)

- Bon, alors tu l'as vu, Intouchables ?

- Toujours pas ! Il y a une queue pas possible ! Je ne vais tout de même pas me taper une demi-heure avant de passer en caisse, puis une demi-heure dans la salle avant le début !

 

 

(Début janvier 2012)

- Ne me dis pas que tu n'as toujours pas vu Intouchables !

- Eh bien si !  J'avais autre chose à faire durant les fêtes... et j'ai un peu peur d'être déçu.

- Tu peux y aller ! C'est meilleur que Bienvenue chez les Ch'tis !

 

   J'ai donc enfin vu le film-événement (en terme de nombre d'entrées). J'ai même eu le plaisir d'assister à une séance relativement peu suivie... mais dans la grande salle du Royal, ce qui n'est pas déplaisant.

   Bon, à la base, cela fonctionne sur des clichés. On a un riche très riche, plutôt pincé, voire méprisant. On ne sait pas trop comment il a obtenu tout cela, ni comment une telle fortune se gère... mais on le voit bien dépenser sans compter ! Face à lui on nous a placé quasiment "une racaille" de banlieue, un Black en baskets et haut de survêtement, avec une tchatche d'enfer. Il est plutôt agressif et plein de préjugés, lui aussi.

   Notons tout de suite que l'interprétation est excellente. François Cluzet fait tout passer par le visage et la diction ; c'est impressionnant. Omar Sy joue sur plusieurs registres. Certes, le rôle a été adapté pour lui (dans la vraie vie, c'est un Algérien, Abdel Sellou, qui a accompagné le tétraplégique... du coup, en Algérie, des voix se sont élevées pour regretter le changement opéré), mais il ajoute la subtilité à l'abattage. Parmi les seconds rôles (très bons), signalons Anne Le Ny (la réalisatrice de Ceux qui restent) et la pulpeuse Audrey Fleurot.

   J'ai souvent ri. Il y a bien sûr le comique de situation, avec le "choc des cultures" du début, assez attendu, mais bien rendu. Il y a aussi tout ce qui touche aux handicaps de Philippe Pozzo di Borgo. Il y a enfin toutes les "vannes" que les personnages se lancent : ça chambre un max... et des deux côtés ! (Je dois d'ailleurs avouer que je ne connaissais pas celle du "Pas de bras, pas de chocolat !")

   C'est autour du personnage -modifié- de Driss qu'un aspect social a été introduit dans l'histoire. Le personnage de la "mère" (la tante en réalité) est très touchant, et les difficultés de cette famille de banlieue issue de l'immigration ne sont pas montrées avec une ostentation excessive. D'un point de vue filmique, j'ai aussi apprécié les plans du quartier tout comme ceux du métro. Les auteurs ont un potentiel à exploiter dans le cinéma réaliste.

   C'est par contre la limite du film. Bien qu'il soit inspiré d'une histoire vraie, le parcours de ces deux hommes est plutôt l'exception que la règle. La vie des handicapés moteurs est encore plus pénible que celle du héros, parce qu'ils n'ont pas les moyens financiers dont dispose Philippe. Quant à la famille d'Omar-Driss, elle parvient finalement à surmonter toutes les embûches, alors qu'une ou deux situations pouvaient déboucher sur un drame. En cette fin d'année 2011, on a voulu offrir aux Français un joli conte de fées.

   P.S.

   Aux États-Unis, on n'a pas forcément vu le film avec ce regard-là. La "politiquement correct" n'est pas tout à fait le même ici et là-bas. Ainsi, le personnage incarné par Omar Sy est à la base assez violent, homophobe et adopte vis-à-vis des femmes qu'il essaie d'entreprendre un comportement qui pourrait être qualifié de harcèlement outre-Atlantique. Et je ne parle même pas de la vision de la musique classique... dont Driss finit toutefois par s'accoutumer, de la même manière qu'il acquiert une certaine compétence en peinture. Un Français dirait qu'il finit par réellement s'intégrer tandis que le grand bourgeois se décoince.

16:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema

jeudi, 12 janvier 2012

Bruegel, le moulin et la croix

   C'est un bien étrange film que le Polonais Lech Majewski a consacré au tableau de Pieter Bruegel, Le Portement de croix (dont une reproduction numérique en haute définition est visible ici) :

Bruegel léger.jpg

   Après une vue détaillée de la composition du tableau, on nous propose un éclairage sur certains éléments. Il y a la famille du meunier, au réveil pittoresque de laquelle on assiste, avant de voir le fils se diriger laborieusement à son poste de travail. (Beau travail sur le son.)

   Il y a aussi le ménage du peintre, avec ces enfants chahuteurs. On suit ainsi le début de journée d'une série de personnages, lors de scènes d'intérieur, un brin théâtrales, néanmoins maîtrisées.

   Le ton change avec l'arrestation puis le supplice de l'un de ces quidams. Ici, le portraitiste social se fait militant politique, dénonçant l'occupation de la Flandre par l'Espagne. Le destin de cet inconnu, emblématique de celui du territoire, est mis en parallèle avec la montée au Golgotha de Jésus. C'est le passage qui m'a le moins emballé. C'est laborieux, alors que le martyre de l'inconnu était bien mis en scène.

   On peut trouver son plaisir dans le jeu des couleurs. Le cinéaste s'est évertué à tenter de restituer la richesse picturale de l'oeuvre d'origine. Du coup, on a particulièrement soigné les costumes, qui font même un peu trop "jolis". Cela confine à l'enluminure.

   Cela reste à mon avis plus réussi que La Ronde de nuit de Greenaway, mais moins que Ce que mes yeux ont vu (de Laurent de Bartillat), qui avait choisi le biais de la fiction.

   P.S.

   Ceux que le sujet passionne peuvent se rendre sur un site où l'organisation du tableau est expliquée en détail.

21:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, cinéma, film

dimanche, 01 janvier 2012

Les "Riton" 2011

   L'an dernier, j'ai décidé d'appeler "Riton" le palmarès des films qui m'ont particulièrement marqué durant l'année écoulée. Voici donc mon bilan cinéphilique de 2011.

Riton du film cro-magnon : La Grotte des rêves perdus

Riton du film sur une gonzesse : Jeanne captive

Riton de la nostalgie du muet : The Artist

Riton du film sur la guerre d'Espagne et ses conséquences : Pain noir

Riton du film clownesque : Balada triste

Riton de la fresque historique : la trilogie Welcome in Vienna

Riton du film éclairant un aspect de la Seconde guerre mondiale : John Rabe

Riton du film de trekking : Les Chemins de la liberté

Riton de la biographie de François Bayrou : Le Discours d'un roi

Riton du documentaire sur le triomphe de la démagogie en politique : Le Président

Riton du film sur le mélange des genres : Moi, Michel G, milliardaire, maître du monde

Riton de la fiction politique : L'Exercice de l'Etat

Riton du film de tension : L'Assaut

Riton du film nostalgique de l'après-guerre : Les Tribulations d'une amoureuse sous Staline

Riton du film anti-ségrégation : La Couleur des sentiments

Riton du film d'action post-guerre froide : Mission : impossible - Protocole fantôme

Riton du film de flics : Polisse

Riton du film consacré à une erreur judiciaire : Présumé coupable

Riton du film de bagnole : La Défense Lincoln

Riton du mélo : Toutes nos envies

Riton du film sociétal : De bon matin

Riton du documentaire militant : Gasland (techniquement moins joli que Tous au Larzac, mais plus fort)

Riton du film sardonique : Carnage

Riton du film iranien : Une Séparation

Riton du film consacré au conflit israélo-palestinien : Le Cochon de Gaza

   Vous constatez que cette liste semble, pour l'instant, marquée par les films ancrés dans le réel, parfois très durs. C'est un genre que j'aime, mais l'année 2011 a aussi été riche en fantaisie.

Riton du roman-feuilleton : Les Mystères de Lisbonne

Riton du western : True Grit

Riton du film d'anticipation : Source Code (devant Time Out)

 Riton du "prequel" : La Planète des singes : les origines

Riton du film de drogué : Limitless

Riton du film de poupées : Les Fables de Starevitch

Riton du film musical : Chico et Rita

Riton du manga : Colorful

Riton de l'animation animalière : Le Chat Potté

17:16 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinema, cinéma

samedi, 31 décembre 2011

Hugo Cabret

   Le dernier film de Martin Scorsese est destiné aux petits et aux grands. C'est presque un conte de Noël, mâtiné de féérie technologique. Cette féérie s'incarne dans les incrustations numériques, qui garnissent l'image. Si l'on est indulgent, on dira que c'est de la belle enjolivure. Si l'on est grognon, on dira que c'est de la poudre aux yeux.

   Mais la technologie est aussi au coeur de l'intrigue. C'est celle de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Il est question d'horlogerie, d'automates, de chemins de fer et de cinéma (muet). Les amoureux de Jules Verne ne seront pas déroutés par cet univers, qui est aussi un vibrant hommage à l'oeuvre de Georges Méliès. Jean-Pierre Jeunet aurait pu tourner ce film.

   Alors, oui, le grand enfant que je suis a été captivé par ces engrenages, ces animations mécaniques. Scorsese a réussi à créer un lieu à part, hors du temps, avec l'envers du décor de la gare parisienne, où vit et travaille Hugo Cabret.

   Les Anglo-Saxons percevront aussi cet orphelin pauvre comme une référence à l'oeuvre de Charles Dickens. Il est épaulé par une gamine intelligente, avide d'aventures, dont on sent bien qu'elle est un peu calquée sur le personnage d'Hermione Granger (dans Harry Potter, voyons !).

   Bon, la mode vestimentaire comme les coiffures sont atroces, mais c'est pour faire authentique ! Les décors sont par contre épatants. Eux et les mouvements de caméra (par exemple dans la séquence introductive, mais aussi dans la poursuite du gamin par le policier de la gare - Sacha Baron Cohen excellent - dans la seconde moitié du film) donnent une grande force visuelle à ce film.

   Par contre, il y a quelques longueurs. On a visiblement hésité à couper dans le travail du Maître au montage. On aurait dû : le film aurait gagné en rythme.

   Plus qu'un produit Scorsese, c'est un agréable divertissement de fin d'année, qui a l'avantage de mettre les bambins au contact de Georges Méliès (plusieurs extraits de ses oeuvres sont insérés dans le film), dont la fantaisie est susceptible d'éveiller leur intérêt.

22:52 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema

vendredi, 30 décembre 2011

Mission : impossible - Protocole fantôme

   Ce nouvel épisode des aventures de l'agent Ethan Hunt (Tom Cruise, très professionnel... pensez qu'il a mis ses sous dans le film, à l'écriture du scénario duquel il a contribué) est signé Brad Bird... oui, LE Brad Bird de chez Pixar, à qui l'on doit notamment Les Indestructibles et surtout Ratatouille.

   Bon, là, on voyage. La première partie (qui suit une introduction très conventionnelle) nous plonge en plein Moscou, d'une prison sécurisée au Kremlin. On est dans le film d'espionnage classique, efficace, maîtrisé... à ceci près que les Russes passent pour les dindons de la farce... De bonne guerre en pleine époque des fêtes de fin d'année ? En tout cas, ça les rend furieux... et même dangereux.

   La deuxième partie est la plus spectaculaire, à mon avis. Notre fine équipe se retrouve à Dubaï, notamment dans le gratte-ciel le plus haut du monde, Burj Khalifa. Cela nous vaut des scènes particulièrement enlevées, où Tom Cruise se distingue. Mais les autres (les "bons" comme les "méchants"... avec Léa Seydoux, peu causante, mais on ne lui demande pas plus) se débrouillent bien aussi, le tout millimétré comme c'est pas permis (une double manoeuvre coordonnée est organisée pour duper deux groupes de "méchants"). Et je kiffe trop les gadgets technologiques !

   A partir de là, on se dit que le réalisateur comme les scénaristes en font un peu trop. Bon, c'est vrai, cela "dépote" (un peu comme dans Die Hard 4), on ne s'ennuie pas, mais on dépasse un peu trop souvent les frontières de la vraisemblance... et les moments qui se jouent à la seconde près sont un peu trop nombreux. Cependant, quand on est pris dans le rythme, ça passe.

   Aux côtés de Tom Cruise, on peut signaler la prestation de Jeremy Renner (remarqué dans Démineurs), de Paula Patton (95 C ?... mais elle n'est pas réductible à sa plastique avantageuse) et de Anil Kapoor (rappelez-vous... le Jean-Pierre Foucault indien de Slumdog millionaire) en playboy bouffi de suffisance... qui se fait donner une jolie leçon dans la troisième partie du film. Celle-ci se déroule à Mumbai (Bombay pour les intimes). Tout spectaculaire qu'elle soit, elle fait un peu retomber le rythme par rapport à la précédente.

   Bref, les deux heures et quelque passent vite. C'est un bon film d'action, émaillé de traits d'humour (souvent liés au fonctionnement d'un appareil de haute technologie), bien léché côté réalisation. On retrouve un peu l'esprit des bons James Bond, à ceci près qu'ici le héros est une équipe d'espions.

22:22 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, cinéma, film

mercredi, 28 décembre 2011

La Vitesse du passé

   C'est un court-métrage de Dominique Rocher, primé par la fondation Audi (qui décerne chaque année les "Audi Talents Awards")... et que l'on peut visionner gratuitement sur le site dédié, jusqu'au 2 janvier 2012 (mais il y aura peut-être une deuxième prolongation, si le bouche-à-oreille confirme le succès du film).

   Ces quelque 15 minutes, prenantes, tournent autour d'un mystérieux accident, qui n'en finit pas de s'achever. Un couple s'installe dans sa maison de campagne. Ils sont jeunes, ils sont beaux (surtout la femme, incarnée par Mélanie Thierry), ils s'aiment, ils ont la vie devant eux.

   Mais, ce jour-là, pendant que chacun vaque à ses occupations, une sorte de tremblement survient, provoquant la chute inachevée de nombreux objets... et celle de l'homme, monté sur le toit. A l'image des cartons, tasses et tuiles, il est figé dans une posture dangereuse, au-dessus du vide.

   Se pose alors à la femme aimante la question suivante : que doit-elle faire ? Elle repousse rapidement les propositions d'une équipe de scientifiques venue analyser la phénomène et installe sous son homme figé dans les airs un matelas pour amortir sa chute qui, bien que très ralentie, n'en est pas moins inéluctable. (Ce dispositif fait écho à une scène du tout début du film.) Chaque jour, elle continue à aménager la maison. Elle vient lui parler.

   Elle n'est cependant pas seule : l'un des scientifiques venus peu après l'incident s'est incrusté. Il est très gentil et, visiblement, en "pince" pour la dame. Doit-elle répondre à ses avances ? Doit-elle vivre dans le souvenir de cet amour qui semble perdu ?

   Je vous laisse découvrir le reste sur le site internet.

   C'est bien filmé, avec des trucages numériques pertinents... et une musique captivante, signée Etienne Forget (auteur aussi de la bande originale de la série Hero Corp).

 

   PS.

   Pour tout dire, ce film a un petit côté Donnie Darko !

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mardi, 27 décembre 2011

Le Miroir

   Ce film date de 1997, mais c'est seulement cette année qu'il est sorti en France, à peu près en même temps que Ceci n'est pas un film, du même réalisateur iranien Jafar Panahi, qui a quelques soucis avec le gouvernement de la république islamique.

   Il nous propose une tranche de vie, à travers le regard d'une gamine de 6-7 ans, que sa mère tarde à venir chercher à l'école. Gonflée, la petite Mina décidé de tenter de retourner chez elle par ses propres moyens, alors qu'elle ne connaît pas bien le chemin. Elle va évidemment se perdre, et c'est l'occasion pour le réalisateur de nous montrer différentes catégories d'habitants de Téhéran.

   Ainsi, on voit (mal) fonctionner la circulation aux carrefours, avec ce papy qui n'arrive pas à traverser. Dans le bus, on entend ces femmes discuter de leurs problèmes personnels ; on voit de futurs jeunes mariés. On observe le rôle de ces gardiens de la vertu, qui, tout en contrôlant les billets des passagers, veillent soigneusement à la séparation des sexes. (J'ajoute que même les gamines sont voilées...)

   Et puis, au milieu du film, il se passe un truc étrange...

Attention ! Ne lisez pas la suite si vous n'avez pas encore vu le film.

Je "déflore" un peu l'intrigue...

Ne venez pas vous plaindre, après !

   Donc, au beau milieu du film, on voit la gamine piquer une crise dans le bus, ôter le plâtre de son bras et quitter le lieu du tournage. On bascule dans la mise en abyme... et l'on se demande dans quelle mesure tout cela est bien réel.

   La suite du film suit le schéma suivant : la jeune actrice refuse de continuer à jouer et veut rentrer chez elle par ses propres moyens. L'équipe de tournage fait semblant d'accéder à ses vœux... mais ne lui retire pas le petit micro mobile placé sur elle... et la filme, de loin.

   L'histoire prend donc un tour étrange, où l'on voit une équipe de cinéma filmer une gamine censée agir de manière authentique... tout comme les vrais gens qu'elle rencontre. Le son et l'image sont découplés, ce qui accroît la tension dramatique... et l'on peut se demander si cette nouvelle histoire est plus ou moins vraisemblable que la précédente.

   Les esprits forts prétendront que la supercherie est à double détente : cette révolte de l'actrice n'est-elle pas tout aussi simulée que les séquences précédentes ?

   On passe donc la seconde moitié du film à la fois à suivre les pérégrinations de la gamine... et à se demander jusqu'où va la fiction et où commence la réalité, le tout avec pour arrière-plan la société téhéranaise.

   C'est expérimental, parfois déroutant ou répétitif, mais passionnant à suivre.

23:20 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ilm, cinéma, cinema

dimanche, 25 décembre 2011

Welcome in Vienna

   Sous ce titre viennent d'être reprogrammés (certains pour la première fois en France) trois films, le dernier donnant le titre à l'ensemble, initialement nommé Wohin und zurück (que l'on pourrait traduire par "Vers où et de retour"... on a eu raison de changer, même si le titre d'origine explique bien le parcours global de certains personnages). L'auteur est un Autrichien, Axel Corti.

   Le premier volet est Dieu ne croit plus en nous. Il commence par les conséquences de la Nuit de Cristal, principalement les destructions subies par les commerces tenus par des juifs, la mort de certains d'entre eux (dont le père du personnage principal) et l'emprisonnement de survivants. On y voit la lâcheté de nombre de Viennois chrétiens (qui ont accueilli l'Anschluss avec enthousiasme, rappelons-le). L'un d'entre eux est particulièrement mis en lumière : une sorte de policier municipal, qui met la main sur une partie des biens de la famille expropriée, qui va aider le jeune héros à fuir le pays... tout en servant ses intérêts. Ferry Tobler rencontre quelques figures charismatiques, comme Alena et celui que l'on surnomme Gandhi, farouchement antinazi.

   La suite se déroule en France (on y entend donc parler notre langue, parfois maladroitement). Les réfugiés autrichiens tentent de se débrouiller, dans un pays lui-même pas en très grande forme sur le plan économique. Le début de la guerre complique leur situation : de nationalité allemande, ils sont enfermés dans des camps d'internement. Autant le dire : cette partie n'est pas à la gloire de la France. Même si certains habitants portent assistance aux réfugiés juifs, force est de constater que beaucoup les perçoivent comme un problème. Les séquences montrant la vie dans le camp d'internement sont vraiment remarquables. On notera que les auteurs du film semblent avoir été frappés par la présence de policiers et gendarmes noirs (antillais sans doute). En 1940, les héros décident de gagner la zone non occupée, puis de partir pour les Etats-Unis.

   C'est donc dans ce pays que se déroule le deuxième volet, Santa Fe. Contrairement à ce que pourrait laisser croire le titre, l'action ne se déroule pas au Nouveau Mexique (où le personnage principal de ce film, Freddy Wolff, rêve de refaire sa vie), mais à New York. On y voit cette communauté juive tenter de survivre, tant bien que mal, entre la nostalgie du pays d'origine, la peur du nazisme (on a souvent encore de la famille en Europe) et les nécessités de la vie quotidienne. L'Amérique n'est pas encore totalement sortie de la crise des années 1930... et le pays est dur à ceux qui ont peu. La plupart (comme le vieux médecin, qui pousse quasiment son épouse à mendier) connaissent le déclassement social. Le cinéaste réussit à restituer la complexité du tissu social, montrant le décalage entre ce que chacun veut montrer et sa situation réelle. J'ai particulièrement apprécié le personnage de Popper, vieil homme qui se place volontiers au centre du cercle de débrouillardise, cachant sa propre détresse. Une histoire d'amour se noue entre la fille de l'épicier-poète et le héros, très tourmenté. Celui-ci ne voit finalement son avenir que dans le retour au pays natal.

   Cela nous mène donc au troisième volet, Welcome in Vienna. Le titre est bien entendu ironique. Le film va illustrer l'écart entre le bon accueil reçu par les soldats américains (parmi lesquels on retrouve Freddy) et le fond antisémite qui persiste. L'histoire commence avec la progression des troupes alliées, en Alsace d'abord. C'est l'occasion pour les deux héros de rencontrer un personnage trouble, le Viennois Treschensky (brillamment interprété), d'abord leur prisonnier, puis en fuite, qu'ils retrouvent dans un café-concert de la capitale autrichienne, en incontournable homme à tout faire, aux relations troubles. Une romance se noue entre Freddy et la fille d'un hiérarque nazi qui a su se vendre aux nouveaux vainqueurs (les cinéphiles se rendront compte à ce moment-là que The Good German a puisé à bonne source). Entre la fin du conflit mondial et le début de la Guerre froide, la morale a peu de place dans cette ville à moitié détruite. En gros, c'est chacun pour soi. On sort de là pas très optimiste à propos du genre humain.

   De manière générale, on voit que l'auteur a une formation théâtrale. Il a d'ailleurs dû puiser dans ce vivier pour distribuer les rôles. Cela se sent parfois. Il faut dire que les films ont 25-30 ans. La manière de jouer a un peu changé depuis. Mais ce n'est gênant qu'à la marge. La grande force de cette trilogie (rééditée grâce à un Français, Jean Labadie, et à sa société Le Pacte) est l'aspect quotidien qu'elle donne ce pan de l'histoire contemporaine, le mariant avec des histoires d'amour, de jalousies et d'ambition. C'est très fort.

jeudi, 22 décembre 2011

Time Out

   Andrew Niccol a un parcours un peu à part. C'est d'abord un scénariste (de The Truman Show, Le Terminal), passé à la réalisation, mais qui se fait rare. On lui doit les excellents Bienvenue à Gattaca, S1mone et Lord of War. Ici, il explore un univers proche du premier : c'est un film d'anticipation.

   Les inégalités de richesse ont été remplacées par les inégalités de temps de vie. Le héros (bien joué par Justin Timberlake, qui confirme le bien qu'on pensait de lui après The Social Network), issu des "basses classes", va se transformer en Robin des Bois du temps de vie, épaulé par une drôle de Marianne, issue de la nouvelle aristocratie (Amanda Seyfried... pas terrible... mais elle mérite un prix spécial pour sa capacité à courir chaussée de machins importables). Signalons, dans le rôle de l'indécrochable méchant, Cillian Murphy, qui introduit un petit côté Matrix dans cet univers torturé. On notera aussi que certaines scènes semblent puiser dans la "mythologie" de James Bond.

   Mais, finalement, c'est du côté de Bonnie and Clyde qu'il faut regarder : le duo amoureux se transforme en couple flingueur, et les poursuites en voiture constituent des moments forts de l'intrigue. Au-delà des références cinéphiliques (qui occupent les quelques vieux cons qui se sont glissés dans la salle), on a visiblement surtout pensé à introduire de quoi appâter le djeunse. Du coup, c'est souvent tape-à-l’œil, avec les bagnoles et les flingues donc, mais aussi (surtout ! me glisse mon voisin post-pubère proche de l'extase) avec ces personnages féminins qui semblent quasiment tous sortir d'une soirée VIP pour blaireaux et pétasses.

   On a donc ménagé la chèvre et le chou dans ce film. L'histoire est prenante, palpitante parfois. Les acteurs ne sont pas tous très bons, mais globalement, ça passe. Le spectateur exigeant supportera moins quelques facilités, notamment ce côté "à la dernière minute" de certaines actions, qui jouent sur le compte à rebours qui s'affiche sur l'avant-bras des personnages. Et je ne vous parle pas de deux scènes, qui voient le héros et une femme (différente à chaque fois) courir l'un vers l'autre.

   C'est donc un film inabouti, mais pas inintéressant, notamment sur le fond. On passe un assez bon moment, sans plus.

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dimanche, 18 décembre 2011

Carnage

   Je n'ai pas vu (ni lu) la pièce de théâtre (de Yasmina Reza) qui a inspiré ce film. C'est d'abord la distribution qui m'a alléché, mais j'ai été rebuté par la bande-annonce en français : honnêtement, ce n'est pas très bien doublé. Par chance, je l'ai aussi vue en version originale sous-titrée : c'est plus saignant. Du coup, j'ai essayé de voir le film en VO.

   Nous sommes donc face à deux couples bourgeois, un plutôt de gauche, l'autre sans doute "libéral" au sens français du terme.

   A ma gauche donc, la "bobo attitude" incarnée par Jodie Foster, quadragénaire féministe, philanthrope, cultivée... et un peu névrosée. L'actrice excelle à faire ressortir les contradictions du personnage, qui paraît dominer les débats au début, avant de s'effondrer plus tard. (A travers elle, je pense que Roman Polanski règle quelques comptes personnels...)

   Son mari est une sorte de gros nounours, content d'avoir une telle compagne, mais qui suffoque un peu sous le harnais. (On semble vouloir nous faire comprendre qu'à travers son mariage, il reproduit son état de dépendance affective vis-à-vis de sa mère.) Il aurait pu être joué par Sydney Pollack. C'est le mari attentionné, pas super fûté mais gentil... tant qu'on ne lui casse pas les pieds.

   Face à cette gauche bien-pensante, on nous a placé une droite -supposée- moderne, incarnée par un avocat véreux, rivé à son BlackBerry, et une gestionnaire de biens immobiliers d'apparence très classe. Christopher Waltz a pris visiblement beaucoup de plaisir à jouer cet enfoiré qui s'assume. Derrière le cynisme affiché, on finit par découvrir qu'il a peut-être moins d'oeillères qu'il n'y paraît. Mais c'est quand même une belle enflure !

   Son épouse est l'un de ses trophées (visiblement déboulonnée de la première place dans le coeur de son mari par le nouveau smartphone). Kate Winslet (récemment vue dans un tout autre rôle dans Contagion) est gé-niale. Son personnage est construit par contraste avec celui interprété par J. Foster : la sensuelle face à l'intellectuelle, la classieuse face à la rustique (au niveau des vêtements et du maquillage), la dominée face à la dominatrice... même si tout cela évolue au cours de la rencontre, supposée ne pas durer longtemps, mais qui s'éternise un peu.

   Les dialogues sont excellents. Cela fourmille de bons mots, de vacheries. J'ai très souvent éclaté de rire. A cela s'ajoute un comique de situation maîtrisé. Cela commence avec la présentation visuelle des personnages : on nous fait bien comprendre au premier coup d'oeil que les deux couples n'ont pas tout à fait les mêmes "valeurs" (même s'ils affichent -au départ- un attachement identique à la "civilisation").

   Cela continue avec la séquence du vomi (ahhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh... j'adore !!!!). Je vous laisse découvrir le lien avec l'oeuvre du peintre Kokoschka. Il y a bien sûr le fil rouge du téléphone portable envahissant, qui vibre toujours fort à propos. (Faites attention au contenu des conversations téléphoniques... un lien finit par s'établir entre celles du portable et celles du fixe.) Il y a aussi le sèche-cheveux (outil qui joue un rôle presque aussi important dans l'histoire) et la bouteille de scotch, qui fait rebondir l'intrigue et libère les dernières pulsions refoulées.

   La réalisation n'est guère inventive, mais efficace. De près, Polanski a eu tendance à filmer ses personnages en légère contreplongée, l'un des trois autres se retrouvant à l'arrière-plan. Cela accentue le grotesque des situations. De manière générale, il a construit ses plans de manière à véhiculer au moins deux informations par image. C'est bien fichu et cela renforce le comique des dialogues.

   Bref, cela dure 1h20 (scènes d'extérieur introductive et conclusive incluses), c'est à la fois pétillant et graveleux... on passe vraiment un bon moment !

15:10 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema

samedi, 17 décembre 2011

L'Ordre et la Morale

   Mathieu Kassovitz nous livre sa vision de l'affaire d'Ouvéa (en Nouvelle-Calédonie... mais le film a été tourné en Polynésie), qui a surgi en pleine campagne présidentielle de 1988. Le titre est extrait d'un dialogue du film. Cette expression est mise dans la bouche de Bernard Pons (très bien interprété par Daniel Martin), ministre des DOM-TOM à l'époque. On pourrait aussi l'analyser comme le résumé du conflit intérieur qui mine le personnage principal, le capitaine Legorjus : doit-il faire passer sa mission militaire avant ce qu'il estime être l'intérêt général ?

   Le problème est que Mathieu Kassovitz, qui incarne le chef du GIGN, semble n'avoir pas pris (suffisamment) de recul vis-à-vis de qu'a pu dire et écrire Philippe Legorjus. Du coup, sur le plan factuel, le film oscille entre le respect d'une version "tiers-mondiste", qui vise à prendre le contrepied de ce qui a été affirmé par les autorités françaises à l'époque, et un regard plus distancié, qui conduit le cinéaste à dresser un portrait plus nuancé des protagonistes.

   Ainsi, il a souvent tendance à faire de son héros (qu'il n'interprète pas très bien, à mon humble avis) un type au-dessus du lot, quitte à lui donner un rôle (dans les négociations, dans l'assaut) qu'il n'a pas eu. (Il ne cache toutefois pas ses faiblesses.) A l'inverse, les militaires de l'armée de terre sont quasi systématiquement dépeints de manière négative, alors que les défauts des preneurs d'otages kanaks sont présentés comme véniels, bien qu'ils aient tué. On peut malgré tout reconnaître au réalisateur la volonté de donner la parole à tous les protagonistes, même si c'est à travers une version réécrite de l'histoire.

   C'est à propos de l'assassinat des quatre gendarmes que les choix de Kassovitz sont particulièrement perceptibles. Alors que les médias, à l'époque (ainsi qu'on peut le voir et l'entendre sur le site dédié au film), ont systématiquement parlé de "massacre à l'arme blanche" (ou à la machette), le cinéaste choisit de ne mettre en scène que des morts par arme à feu, même si l'on peut voir que certains assaillants sont munis du fameux tamioc. Or, le fils de l'une des victimes a semble-t-il apporté la preuve qu'au moins un gendarme a été achevé à coups de machette :

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   La vérité est donc dans un entre-deux indéterminé, entre la version polémique du gouvernement français de l'époque (et de certains militaires aujourd'hui) et la version engagée des défenseurs des Kanaks. On pourrait appliquer la même démarche à propos de la fin de l'assaut de la grotte et des exécutions : il n'est pas possible de nier, comme le font encore (maladroitement) quelques militaires, que plusieurs des Kanaks ont été exécutés (ou peut-être achevés d'une balle dans la tête). Cependant, il est excessif d'affirmer que l'assaut a été mené comme une entreprise de massacre systématique. On pourrait continuer longtemps ce petit jeu, en s'intéressant à d'autres aspects du film, mais on est quand même là pour causer de cinéma.

   Alors, ce long-métrage est-il une "bouse" infâme ? Non ! D'abord parce qu'il ne manque pas de souffle. On sent que Kassovitz a vu et revu de grands classiques, comme Apocalypse now, Voyage au bout de l'enfer ou La Ligne rouge. S'il n'a pas le talent de Coppola, Cimino ou Malick, il sait néanmoins mettre en scène des groupes en action. Il réussit à planter le décor et créer un climat de tension, même si l'on peut regretter le côté "gros sabots" du compte à rebours qui nous rapproche inexorablement de l'assaut final.

   C'est en général correctement joué. Les militaires sont assez convaincants et, côté kanak, il faut signaler la performance d'Iabe Lacapas, impressionnant en Alphonse Dianou (le chef des preneurs d'otages). On peut aussi apprécier le film pour la vision nuancée et approfondie qu'il offre du peuple kanak, à travers les personnages des anciens, très dignes, pacifiques, bien joués. On sera néanmoins agacé par le parti-pris du réalisateur, qui ne montre les "jeunes" quasiment que sous un jour favorable, et qui sous-estime leur violence. Il commet d'ailleurs sans doute une erreur à propos d'une conséquence de l'affaire d'Ouvéa : le film sous-entend que Jean-Marie Tjibaou et Yeiwéné Yeiwéné ont été tués parce que le FLNKS a lâché les preneurs d'otages, alors qu'il semble plutôt qu'ils ont été abattus par un extrémiste de leur camp qui leur reprochait d'avoir finalement négocié avec le gouvernement français.

   Le film se veut aussi un brûlot politique. Il donne un aperçu des arcanes de la première cohabitation finissante, de la rivalité Chirac-Mitterrand, tous deux en course pour la présidentielle. Cela nous vaut une série de bonnes petites scènes (où s'illustre notamment Philippe Torreton, bien remis du tournage de Présumé coupable). On n'en sort pas avec une bonne image de la chose publique, et c'est dommage, parce que juste après la présidentielle de 1988, les événements ont pris une autre tournure, plus apaisée (grâce aux Accords de Matignon), propre au contraire à faire croire en la politique.

mardi, 13 décembre 2011

Toutes nos envies

   Le réalisateur de Welcome (Philippe Lioret) revient avec un film sur un autre sujet casse-gueule... en fait deux. Il fait se télescoper un mélo qui traite de la mort annoncée d'une jeune magistrate (mariée, mère de deux enfants) et un quasi-polar social sur le surendettement, à la sauce judiciaire. J'ai donc attendu avant d'y aller, sans enthousiasme.

   Deux acteurs illuminent ce film. On commence par le monsieur, Vincent Lindon. A la base, je ne suis pas fan, mais, depuis une dizaine d'années, il m'a convaincu par la qualité de ses prestations, notamment dans Je crois que je l'aime, Pour elle, Welcome, bien sûr, et surtout Ceux qui restent, qui n'est pas sans liens avec Toutes nos envies. Vincent Lindon excelle a faire passer les sentiments par autre chose que les dialogues, ici comme ailleurs.

   Mais c'est pour moi surtout sur les (ravissantes) épaules de Marie Gillain que repose ce film. Bon, d'accord, on nous fait bien comprendre que cette quasi-quadragénaire est encore super-bien gaulée, avec ces jambes qui me fascinent depuis une vingtaine d'années. (De surcroît, on la voit plutôt portant des chaussures plates, ce qui nous change... et pis ça lui va très bien !) N'allez cependant pas croire que l'on a tout misé sur son physique. C'est juste un agrément supplémentaire pour le spectateur masculin hétéro. 

   Je pense qu'une partie de la critique a été dérangée par le fait que Marie Gillain n'en fait pas trop et qu'elle incarne un personnage qui a une riche vie intérieure. Pour bien apprécier toute la saveur du film, il faut se mettre dans la tête de ce personnage d'une grande intégrité, entier dans ses choix professionnels comme dans sa vie privée. Elle pense à (presque) tout et peut justifier chacun de ses actes. Oui, d'accord, c'est un peu hagiographique.

   L'histoire rappelle furieusement Ma Vie sans moi, un bijou d'émotion dans lequel une mère se retrouve à peu près dans la même situation. (Un argument scénaristique est même identique : le choix d'une future compagne pour le mari et les enfants.) J'ai encore en mémoire l'enregistrement (sur cassettes audio) des messages pour les futurs anniversaires de ses enfants, auxquels elle savait qu'elle ne pourrait assister. C'était prenant.

   Ici, l'action se situe dans un milieu plus bourgeois, mais c'est finalement complètement anecdotique. Claire - Marie Gillain, dès qu'elle apprend qu'elle a une tumeur au cerveau, décide deux choses : préparer la vie future de sa petite famille et mener à bien un combat en faveur d'une victime du surendettement, qui va s'intégrer à sa vie de tous les jours. Stéphane - Vincent Lindon est un collègue dont elle fait la connaissance à l'occasion de l'affaire de surendettement, mais il va surtout l'aider (inconsciemment puis consciemment) à supporter le secret de sa maladie puis le développement de celle-ci.

   Le film mérite le détour pour ceux qui ont envie de voir fonctionner un aspect de la justice française et ceux qui ont envie d'en apprendre un peu plus sur l'arnaque du surendettement. J'ai aussi aimé les quelques moments où Claire suit des chemins de traverse, où elle réalise quelques-unes de ses envies, elle qui déclare qu'elle n'a pas fait la moitié des choses qu'elle s'est promis de réaliser. Ces moments-là sont pleins de fraîcheur et d'émotion.

   Et puis, il y a la naissance d'une relation particulière, qui ne dit pas son nom. C'est ténu, c'est fait de petits gestes, d'attentions. C'est de moins en moins discret, alors que les héros semblent chacun se détacher de leur foyer respectif, tout doucement, insensiblement. Bref, ce film est beau... et j'emmerde les grands esprits qui ont fait la fine bouche !

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samedi, 10 décembre 2011

Polisse

   C'est donc le film de Maïwenn (la soeur d'Isild Le Besco), consacré à la Brigade de Protection des Mineurs (la BPM pour les intimes), qui dépend de la préfecture de police de Paris. On a évidemment cherché à le comparer à d'illustres prédécesseurs, comme le Police de Maurice Pialat (qui ne raconte pas le même genre d'histoire) et L627 de Bertrand Tavernier (axé sur le trafic de drogue).

   Ici, aucun héros ne se détache vraiment. On nous offre un portrait de groupe (de policiers) et des tranches de vies de citoyens de tout milieu, des immigrés roumains (séquence poignante de "rafle" à la clé) à la grande bourgeoisie parisienne (où se distingue Sandrine Kiberlain, peu présente mais impressionnante à chaque fois), en passant par les jeunes des "quartiers difficiles".

   Avant d'aller voir ce film, j'ai entendu dire qu'il se rapprochait (trop ?) du documentaire. C'est parce qu'il joue sur le réalisme des situations. Le scénario s'est inspiré de faits réels et les dialogues comme le jeu des acteurs ont sans doute été influencés par ce qu'ils ont observé et ressenti au contact des vrais flics.

   Du coup, c'est très cru, trop même parfois (et pourtant, je ne pense pas être particulièrement bégueule). On comprend vite que les flics ne pratiquent pas la langue de bois entre eux. Quant aux rapports avec les justiciables, s'ils ne sont pas nécessairement marqués par la violence physique, ils sont souvent émaillés de violence verbale. On nous met dans le bain dès le début avec cette ado insultante embarquée dans la voiture, confrontée à Naidra Ayadi et Joey Starr (excellents tout au long du film).

   Mais la pire violence n'est pas dans les actes qui sont montrés à l'écran, ni dans les insultes ou grossièretés qui pleuvent parfois. Elle est dans certaines situations, souvent ignobles, dont l'accumulation a pour certains spectateurs franchi la limite du supportable. On passe ainsi deux heures plongé dans les affaires de viol, pédophilie, inceste, prostitution, le tout assaisonné de violences diverses, de perte de logement, de divorces.

   Certains cas sont tellement énormes qu'ils suscitent le rire. Il y a cette mère qui masturbe son enfant en bas âge "pour le calmer", cette adolescente prête à tout pour récupérer le téléphone mobile qu'on lui a volé... "parce que c'est quand même un très beau portable" ! C'est le moment de signaler la qualité du jeu de la pléiade de figurants qui peuple ce film, en particulier celui des enfants, toujours vraisemblables. Le casting a été soigné et la direction d'acteurs est sans faille.

   Il reste cette équipe de flics, qui encaisse tous les chocs et doit, par dessus le marché, gérer une vie privée souvent chaotique. C'est pour moi la plus belle partie du film, autour de Karin Viard et Marina Foïs, épatantes (je recommande en particulier le "pétage de plombs" de K. Viard).

   De son côté, Maïwenn ne s'est pas attribué un rôle particulièrement facile. Elle est la photographe qui suit l'équipe de la BPM. Elle vient des beaux quartiers (c'est visiblement une "bobo") et a bénéficié d'un gros piston. Elle est donc bousculée par cette équipe de flics, peut-être un peu à l'image de ce qu'a vécu la réalisatrice quand elle a suivi des fonctionnaires de la brigade en préparant ce film.

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dimanche, 04 décembre 2011

Le Chat Potté

   Depuis le temps que l'on nous annonçait ce produit dérivé de l'univers de Shrek, je ne l'attendais plus ! Voici donc cette animation entièrement dédiée à ce brillant second rôle, cet adorable et insupportable sac à puces dont le regard apitoyant avait fait craquer des millions de spectateurs.

   On commence par une remarque : c'est presque un vieux matou (encore bien en jambes, rassurez-vous) qui est le héros de ce film ; il me semble qu'on a un peu vieilli le personnage par rapport à ses aventures "shrékiennes"... mais on nous offre le récit de sa jeunesse tourmentée, l'une des plus belles séquences étant celle de son arrivée au refuge, une sorte d'orphelinat où l'on retrouve quantité d'enfants tarés ou rejetons de déviants. Très vite, le chaton timide se révèle audacieux.

   L'un des ressorts de l'intrigue est donc son amitié à rebondissements avec l'œuf, un gars très inventif... pour le meilleur et pour le pire. J'ai moyennement apprécié cet aspect-là. J'ai beaucoup plus goûté la relation acrobatique avec une insaisissable chatte ("Kitty pattes de velours", doublée par Virginie Efira dans la version française), qui n'est pas sans évoquer (du moins au début) la Catwoman de Tim Burton. (Quel mâle hétérosexuel n'a pas fantasmé des nuits entières sur Michelle Pfeiffer en combinaison de cuir ?.........)

   Le film regorge donc de clins d'œil, à des films de Disney, aux westerns-spaghetti, aux contes (Le Chat Botté, cela va sans dire, mais aussi Jack et le haricot magique et Alice au pays des merveilles, Humpty étant visiblement -au moins en partie- inspiré du Gros Coco). C'est un divertissement plutôt réservé à des enfants déjà un peu âgés : dans la salle où je me trouvais, une gamine de 4-5 ans a vite décroché, alors que les garçons de 8-10 ans ont bien suivi. Le (très) grand garçon que je suis a beaucoup ri.

   Ceci dit, les petits seront quand même emballés par l'une des premières séquences, une effraction chez un couple d'horribles géants (l'une des nombreuses réussites de ce film ; tendez l'oreille lorsqu'ils parlent... les dialogues sont savoureux !) qui se continue en trépidante course-poursuite pour se finir en battle-dance sur musique entraînante.

   C'est l'occasion de découvrir l'un des lieux mythiques de ce film : l'antre des chats, qui n'est pas sans évoquer l'univers des Aristochats. On y joue de la musique, on y danse... au milieu de dizaines de boules de poils ! (C'est peut-être le moment de préciser que, si vous n'aimez pas ces animaux, mieux vaut passer votre chemin...)

   Un autre lieu-clé est le royaume de l'oie qui pond des œufs d'or. Là, on est en plein conte... avec une morale, donc : le film se veut une dénonciation de l'appât du gain, aussi bien chez certains personnages principaux que chez les humains.

   Tout ce beau monde finit par se retrouver dans le village où le Chat Potté (qui n'était pas encore botté) et l'oeuf se sont connus. On y règle ses comptes, on y dévoile ses sentiments profonds. Ce n'est pas la partie que j'ai préférée, mais, bon, on nous ménage une fin à rebondissements, pas déplaisante du tout.

   P.S.

   Le site internet dédié est sympa. On peut y jouer au "chat boosté", aux "dancing boots" et accéder aux traditionnels bonus.

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jeudi, 01 décembre 2011

Tous au Larzac

   Voilà donc ce documentaire consacré à la lutte des paysans des Causses contre l'agrandissement du camp militaire de La Cavalerie. Il est attendu depuis plus de deux ans : il était déjà en gestation au moment de la sortie de Les Brebis font de la résistance, en avril 2009.

   Ce film a été pour moi source de deux agréables surprises. Tout d'abord, même si les auteurs éprouvent une évidente sympathie pour les révoltés larzaciens, leur film se veut d'abord une histoire rigoureuse de la lutte et de son contexte. Ensuite, bien que cela dure presque deux heures, on ressent peu la longueur, ce qui est assez rare pour un documentaire. Je pense qu'un gros travail pédagogique a été fait au moment du montage, qui alterne différents entretiens, images d'archives et paysages magnifiques.

   Que les allergiques à José Bové se rassurent : il n'apparaît qu'au bout de 40 minutes et il n'est pas particulièrement mis en avant par rapport aux "historiques" du combat que sont par exemple Léon Maillé, Guy et Marisette Tarlier, Pierre et Christiane Burguière. Le rôle des femmes est mis en valeur, sans que cela soit ostentatoire.

   Ces deux heures se justifient tant la lutte (10  ans, au sens strict) fut, contrairement à ce qu'une lecture rapide des événements laisserait croire, longue, difficile, à l'issue incertaine. Les relations avec les commerçants de La Cavalerie et certains militaires furent très tendues. Une des bergeries fut même plastiquée. Vers la fin du film on comprend que, sans l'élection de François Mitterrand (dont la venue sur le Larzac fut peut-être le théâtre d'un complot policier) à la présidence de la République, les rebelles auraient sans doute fini par céder.

   Et pourtant, ils furent aussi pacifiques qu'inventifs (et drôles, parfois). Je reste épaté par la ténacité dont ces personnes ont fait preuve pour organiser les actions non violentes qui ont tant marqué leur époque. Pour que le film soit complet, il manque peut-être le point de vue des enfants de ces militants, dont la jeunesse a dû être marquée à la fois par l'enthousiasme de la lutte mais aussi les difficultés d'une vie quotidienne perturbée par un combat dont on avait du mal à voir la conclusion.

   Le film fait aussi le lien entre les luttes du passé et celles du présent. Ce n'est pas forcément la partie la plus convaincante, mais bon, l'ensemble mérite quand même le détour.

   P.S.

   Signe que les temps ont changé, le sénateur du Sud Aveyron (élu en 2008), Alain Fauconnier, un socialiste plutôt proche de la gauche de la gauche, s'est inquiété, dans une question posée au ministre de la Défense et des Anciens combattants (Alain Juppé, à l'époque), du devenir du camp militaire qui, quoi qu'on en dise, est pourvoyeur d'emplois dans la région...

dimanche, 27 novembre 2011

Jeanne captive

   On va dire : encore un film sur Jeanne d'Arc ! Cette fois-ci, en dépit du peu d'informations dont on dispose sur l'épopée johannique, le réalisateur, Philippe Ramos, a choisi de concentrer son attention sur trois moments seulement : le début de la captivité de Jeanne, alors aux mains des hommes de Jean de Luxembourg, le passage aux mains des Anglais, avant le procès, puis la dernière période, de l'après-procès au bûcher. 

   La première période est fondée sur un postulat sans doute faux : une supposée tentative de suicide de Jeanne, prise pour une nouvelle tentative d'évasion. Cette hypothèse était (et reste) la plus vraisemblable : la Pucelle avait déjà essayé de s'enfuir de son premier lieu de détention, le château de Beaulieu. Dans le film, elle se trouve, sauf erreur de ma part, dans le second lieu de détention, le château de Beaurevoir, dont il ne reste plus qu'une tour (Jeanne fut enfermée dans le donjon, aujourd'hui disparu). D'ailleurs, dans l'évocation de la tentative se suicide/évasion, le réalisateur se garde de faire figurer un élément : une corde bricolée à partir de draps et tapisseries, qui aurait cédé au cours de la tentative.

   Cette réserve faite, force est de constater que le film "fonctionne" très bien. Il est centré sur l'attitude de Jeanne, souvent incompréhensible à ses geôliers ainsi qu'aux autres visiteurs... et peut-être aux spectateurs contemporains. P. Ramos nous trace le portrait d'une croyante fervente, et même d'une sainte.

   Le choix de l'actrice était donc crucial. Ce fut un bon choix. Clémence Poésy (la Fleur Delacour de Harry Potter, aussi remarquée dans Bons Baisers de Bruges) nous fait totalement croire à la foi qui anime cette jeune femme et, cerise sur le gâteau, elle est absolument ravissante (les vicelards esthètes raffinés peuvent même profiter de certaines séquences pour se rincer l’œil) .

   Dans la première partie, c'est sa relation avec le guérisseur (Thierry Frémont, excellent) qui est mise en scène... sous la forme d'un drôle de dialogue, puisqu'elle ne lui adresse (presque) jamais la parole. C'est un joli tour de force au niveau de la réalisation... portée par de brillants interprètes, jusque dans les seconds rôles.

   La deuxième partie voit intervenir les Anglais, plus ou moins respectueux de la demoiselle. La confrontation est plus dure, mais la jeune femme sort renforcée de sa précédente détention. Elle a décidé de parler désormais. On ne comprend toutefois pas bien comment elle a été amenée à se renier, avant de vite récupérer ses esprits. Par contre, on saisit parfaitement la volonté des Anglais de brûler la "sorcière" ou la "putain". Le réalisateur n'est cependant pas allé jusqu'à mettre en scène des tentatives de viol. Il se contente d'une version édulcorée du processus qui conduit Jeanne à être relapse, mais il la tourne bien.

   J'ai aussi aimé la manière dont est montré le doute que la Pucelle réussit à instiller dans l'esprit de nombre de ses adversaires. Il y a aussi la peur que la présumée sorcière inspire aux esprits faibles, qui la croient capable de moult maléfices.

   Reste la mise à mort, qui est l'occasion de découvrir l'entourage, la population. Le réalisateur met à l'image quelques habitants de Rouen, mais surtout les Anglais dans leur diversité, auxquels il oppose deux religieux : un moine (Jean-François Stévenin, correct) et un prédicateur illuminé (Mathieu Amalric, supportable). La toute fin m'a moyennement plu, avec ce jeune couple (qu'on a découvert peu auparavant) qui s'ébat. On a visiblement voulu contrebalancer la mort de la sainte par la naissance d'un amour. Mouais...  

   P.S.

   Le réalisateur et l'actrice principale ont participé, en compagnie d'un historien, à l'émission Les femmes, toute une histoire, le 13 novembre, sur France Inter.

dimanche, 20 novembre 2011

Colorful

   C'est un manga, adapté d'un roman japonais. Il est "plein de couleurs" parce qu'il est souvent question de peinture, à travers l'atelier artistique d'un collège, où se rejoignent certains élèves de 3e. C'est aussi une allusion au tempérament des personnages principaux, à plusieurs facettes.

   Au départ, l'histoire ne semble pas alléchante : on ne voit pas le personnage principal, que l'on ne fait qu'entendre. Il croit qu'il est mort. Pas de chance ! Il va devoir intégrer le corps d'un autre garçon, qui vient de se suicider. Voilà qui n'est guère réjouissant. Mais je vous assure que la séquence du "purgatoire" est brillante, souvent drôle. Et l'on se demande qui peut être ce curieux "employé du Ciel", ce garçon en costume-cravate...

   La suite est la découverte de la seconde existence de celui qu'on appelle Makoto Kobayashi. Le réalisateur a tenu à nous montrer la vie quotidienne d'une famille de "Japonais moyens". La façade est jolie (ils ont une maison, un intérieur coquet à défaut d'être luxueux, deux garçons propres sur eux), mais le fond est moins joyeux : le père est un gentil ringard, un brin alcoolique, très pris par son boulot minable ; la mère, qui a eu des faiblesses pour son professeur de danse, est d'une insupportable soumission à la maison ; le frère aîné semble être un jeune homme égoïste et le rescapé Makoto est un enfant gâté.

   Il est surtout décalé par rapport à ceux qui croient le connaître. Il n'a que quelques semaines pour mener à bien sa "mission"... qu'il ne connaît pas, en fait. On sent qu'il doit "réparer" certaines choses. Pour cela, il doit découvrir pourquoi le garçon qu'il remplace s'est suicidé. Il mène donc une petite enquête. Ce qu'il découvre n'est pas toujours joli joli.

   Mais l'âme réincarnée se rebelle parfois. Il veut n'en faire qu'à sa tête. (N'oublions pas que c'est un gamin.) Comme celui qu'il remplace n'avait visiblement pas d'ami, il tente de s'en faire. Il va aussi découvrir sa "famille", les voir sous un autre jour. Une des belles séquences le voit partir à la pêche avec son "père". On peut relever aussi les scènes de repas, vraiment réussies... et qui donnent faim !

   Les Occidentaux seront stupéfaits de découvrir un collège où les garçons portent l'uniforme et les filles la jupe et de grandes socquettes. Mmmm... Les Occidentaux seront peut-être aussi surpris par le respect de certaines convenances, la politesse des protagonistes. Heureux Japon... Du point de vue scolaire, on apprend que les lycées prestigieux sont publics, alors que les bahuts privés semblent appartenir à deux catégories : ceux qui acceptent tous les collégiens, quels que soient leurs résultats, et ceux qui offrent une formation très spécialisée (en arts plastiques, par exemple).

   Le dessin est agréable à regarder. Ce n'est pas du niveau d'un film de Miyazaki, mais cela a été fait avec soin, surtout au niveau des décors. C'est un peu plus limite quand les mouvements se font rapides.

   La fin nous propose un petit retournement... auquel on peut s'attendre si l'on a été attentif. (C'est pas pour me vanter, mais j'avais "intuité" depuis le début !) Je trouve toutefois le film un peu complexe pour des petits. Dans la salle où je l'ai vu, quelques parents n'avaient visiblement pas lu grand chose à son sujet avant d'y emmener leurs bambins. En dépit de la qualité de l'image et de l'intérêt porté aux relations entre ados, certains ont assez vite décroché... et ils n'ont pas dû comprendre certains traits d'humour.

   On peut glaner plus d'informations sur le site dédié.

14:01 Publié dans Cinéma, Japon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film

samedi, 19 novembre 2011

Tintin et le secret de la Licorne

   Cette adaptation est construite à partir de deux albums, Le Crabe aux pinces d'or (qui voit la rencontre entre Tintin et le capitaine Haddock) et Le Secret de la Licorne. On comprend la logique qu'il y a derrière : cela constitue une sorte de matrice, dont vont découler les autres films (le prochain fera sans doute intervenir le professeur Tournesol). Mais l'attelage est un peu bancal : je considère Le Secret de la Licorne nettement supérieur au Crabe aux pinces d'or.

   Après, que les scénaristes aient réécrit une partie de l'histoire ne me choque pas. Leurs choix ne sont pas forcément mauvais. On notera tout de même que le récit (par Haddock) de la vie de son ancêtre intervient, dans le film, dans une phase de sevrage d'alcool, alors que dans la bande dessinée, il nourrit son récit de fréquentes gorgées de boisson fermentée...

   Mon principal regret est le traitement subi par le second album, dont l'intrigue est quelque peu rognée pour que l'ensemble rentre dans le format d'un film d'environ deux heures. Exit donc les frères Loiseau (ce qui évitera au film de susciter l'ire des antiquaires), remplacés par une habile histoire de vengeance à plusieurs générations de distance. L'épisode du voleur de portefeuilles est aussi un peu bâclé : dans l'album, il est traité avec un grand soin graphique... et beaucoup plus d'humour.

   J'ai par contre apprécié l'introduction précoce de la Castafiore dans l'univers de Tintin. Sa présence se justifie d'une manière que je ne peux raconter ici sous peine de déflorer un peu trop l'intrigue. C'est bien trouvé.

   Les séquences d'action sont particulièrement réussies. On a l'abordage de la Licorne par le bateau-pirate, un grand moment en 3D. On se laisse aussi volontiers porter par l'incroyable poursuite marocaine, à pieds, en moto, en voiture, en char, dans les airs... jusque dans l'eau. On retrouve le souffle d'Indiana Jones... mais ce n'est pas du Tintin.

   Le film commence pourtant très bien, avec un générique virevoltant, puis un hommage à Hergé dans la première séquence. (Regardez bien qui fait le portrait de Tintin.)

   Mon gros problème est que je n'ai pas trop aimé les voix françaises des deux personnages principaux (Tintin et Haddock), qui me sont apparus moins sympathiques et fantaisistes que dans la BD. Par contre, j'ai adoré Milou, qui se comporte comme un mélange d'Idéfix et de l'adorable cabot de The Artist.

23:31 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinema, film, cinéma

vendredi, 18 novembre 2011

Contagion

   Pour se mettre dans l'ambiance de ce film, il faut imaginer une suite virtuelle à L'Armée des douze singes : le scientifique fou a réussi à mettre en oeuvre son projet de dissémination des germes, et le monde va subir une terrible épidémie... sauf qu'ici la cause est accidentelle.

   C'est d'ailleurs l'un des intérêts du film : découvrir, au fur et à mesure que l'enquête épidémiologique progresse, le chemin pris par la contamination, jusqu'à parvenir à remonter au "moment zéro". Je trouve néanmoins que le scénariste n'a pas assez exploité cet aspect de l'histoire.

   C'est d'abord une tranche de vies (pas du niveau de Short Cuts toutefois), un film sur l'humain de base confronté à une catastrophe sanitaire. Certains se révèlent être médiocres, d'autres des salauds, d'autres encore des héros. Le paradoxe est que ces humains ordinaires sont incarnés par une brochette de vedettes : Matt Damon (au poil en Américain moyen), Kate Winslet (mon kiff perso), Laurence Fishburne (très bon), Gouinette Patrop (qui joue juste, dans un rôle difficile), Jude Law, en internaute justicier à la noix et Marion Cotillard, un peu transparente en technocrate de la médecine au grand coeur.

   Si le déroulé de l'intrigue n'a rien de transcendant, le traitement est rigoureux, soigné, efficace (didactique même, pensent certains spécialistes), sans recherche d'effet catastrophe. C'est très bien joué... et, face aux stars, c'est une actrice méconnue qui remporte le ponpon, avec le rôle-clé.

   Le soir, après un bon repas, cela permet de digérer agréablement. Sans plus.

00:43 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, cinema

lundi, 14 novembre 2011

Un mythe s'effondre

   J'ai apris la nouvelle (renversante) en écoutant le "portrait chrono" que Tanguy Pastureau lui a consacré ce week-end. George Clooney... oui, le George Clooney, le beau gosse qui les fait tomber comme des mouches, l'acteur drôle et subtil, le réalisateur pas manchot, le producteur engagé, ce George Clooney-là est... un mec normal !

   L'information a été puisée à bonne source : le magazine Rolling Stone, réputé pour la rigueur de ses enquêtes approfondies. Le 9 novembre est paru un article dans lequel on apprenait notamment que le chéri de ces dames a eu son premier orgasme en montant à la corde. Voilà qui n'a rien de surprenant : Clooney ado était bien dans la norme, c'est-à-dire excité comme une puce !

   Mais le plus incroyable est à venir dans la suite de l'article. Le VRP du café-express des bobos (dont une publicité a fait l'objet d'un détournement "équitable"...) avoue raffoler... des pets, qui le font mourir de rire, à tel point qu'il a téléchargé une application flatulente sur son téléphone portable (qu'on imagine très chic). Il a même acheté des coussins-péteurs déclenchables à distance...

samedi, 12 novembre 2011

Une Vie avec Oradour

   Ce documentaire est consacré, comme son titre l'indique, au massacre d'Oradour-sur-Glane. Il n'est pas le premier (et sans doute pas le dernier). Le réalisateur a donc adopté une démarche originale, comme il l'explique dans le passionnant dossier de presse publié à l'occasion de la sortie du film : il suit l'un des deux derniers rescapés encore en vie, Robert Hébras (auquel Libération a récemment consacré un joli portrait). Celui-ci raconte donc cette journée comme il l'a vécue.

   D'autres témoins ont été sollicités. Au final, le film réussit le tour de force de raconter de manière objective un événement, à partir de visions subjectives.

   Ceux qui se sont déjà rendus dans le village en ruines (dont une reconstitution en images de synthèse a été réalisée) reconnaîtront certaines rues et certains bâtiments. A travers les descriptions du rescapé, on suit à la fois le déroulement du massacre et son parcours de survie.

   La deuxième partie du film est consacrée à l'après-guerre. Le village est reconstruit à côté, laissant les ruines en place. Il faut vivre avec la douleur, l'absence des êtres aimés. Les survivants se font passeurs de mémoire. On suit l'évolution de Robert Hébras, dont on comprend qu'il fut sans doute longtemps germanophobe, avant de pouvoir faire la distinction entre les criminels de l'époque et les Allemands d'aujourd'hui. A ce sujet, une séquence émouvante le montre en compagnie d'un groupe d'élèves venus d'Allemagne avec leurs enseignants. C'est l'un des très beaux moments du film.

   On peut aussi y dénicher quelques "perles", comme ces extraits d'un documentaire allemand (eh oui !) tourné il y a plus de vingt ans. On y voit un Robert Hébras plus jeune présenter une partie des ruines devant des journalistes venus d'outre-Rhin. On y voit aussi l'un des responsables du massacre, Heinz Barth, aujourd'hui décédé. Il se déclarait très surpris d'apprendre qu'il y avait eu des survivants...

   Cela nous amène au procès de 1953, qui a vu s'opposer deux mémoires des victimes : celle des habitants d'Oradour et celle des "Malgré-nous", Alsaciens et Mosellans engagés de force dans l'armée allemande (voire les SS) : 13 d'entre eux (dont un engagé volontaire) étaient membres de la troupe qui a perpétré le massacre.

   Pour complexifier le tout, ajoutons que, parmi les 642 victimes, figurent des réfugiés originaires d'Alsace-Moselle (n'oublions pas que ces deux territoires ont subi, en 1940, une nouvelle annexion allemande), notamment du village de Charly, situé à proximité de Metz. A sa demande, il obtint de changer son nom en Charly-Oradour.

   Même si le film est bien fichu, je pense que rien ne remplace la visite des lieux. L'accès aux ruines est gratuit. Sur certains bâtiments, des plaques apportent des éléments d'explication. Mais peut-être vaut-il mieux commencer par la visite du Centre de la mémoire, qui explique le contexte du massacre et élargit à toute la Seconde guerre mondiale (et au-delà).

vendredi, 11 novembre 2011

Ici on noie les Algériens

   C'est un documentaire consacré au massacre du 17 octobre 1961, à Paris. Ce n'est toutefois pas une enquéte exhaustive sur les tenants et les aboutissants de l'événement. Le film prend la forme d'un déroulé chronologique, qui s'appuie sur des documents d'époque et les témoignages de rescapés et de proches des victimes.

   Premier constat : c'est fou ce que l'on peut retrouver comme images d'archives ! Si, en France, le bilan de ce massacre a été longtemps occulté, force est de constater que la manifestation comme la répression, même atténuée, sont présentes dans les médias de l'époque.

   On pourra regretter que la réalisatrice (qui s'est auparavant intéressée aux massacres de Sétif) n'ait pas choisi de consacrer davantage de temps au contexte de la manifestation : la guerre d'Algérie finissante. Cela aurait permis de mieux cerner les motivations des autorités de l'époque. On se place tout de même dans une séquence hyperviolente, commencée le 8 mai 1945 (et à la Toussaint 1954 pour la guerre en tant que telle). N'oublions pas non plus que, pour l'Etat français, "l'affaire algérienne" est officiellement une série d'opérations de maintien de l'ordre, pas une guerre (dont l'existence n'a été reconnue qu'en 1999...).

   Les moments que j'ai trouvés les plus intéressants sont cependant les témoignages (contemporains) des femmes, sur le déroulement de la manifestation, la répression, leur vie sans leur mari, leurs démarches pour le retrouver. Certaines font même parfois preuve d'un humour étonnant. (On peut en lire d'autres sur un site dédié au 17 octobre 1961.)

   Reste que le film m'est apparu long. Il ne dure pourtant qu'1h30, mais je dois avouer que, durant la première partie, il m'est arrivé de piquer du nez ! C'est, je pense, une des limites du documentaire cinématographique. Un format de 45-50 minutes est plus adapté. Sauf exception, la télévision se prête donc mieux à sa diffusion. Pour maintenir l'intérêt sur une plus longue durée, il faut que le documentaire soit porté par une verve polémique talentueuse, ou qu'il soit d'une exceptionnelle qualité. Ce n'est pas le cas ici. C'est un travail intéressant, sans plus.

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dimanche, 06 novembre 2011

La Couleur des sentiments

   Ce n'est pas le titre d'origine, qui est The Help ("La Domestique" ou "La Femme de ménage"), directement inspiré du livre écrit par Kathryn Stockett, dont la biographie n'est pas sans ressembler à celle du personnage de Skeeter.

   Je pense qu'on a changé le titre pour que les spectateurs français adultes fassent le rapprochement avec le film de Steven Spielberg La Couleur pourpre (lui aussi adapté d'un roman). Dans les deux cas, l'action se passe dans le sud des Etats-Unis. Dans les deux cas, les Noirs sont confrontés à la ségrégation. Dans les deux cas, ce sont d'abord des histoires de femmes. La grande différence est l'époque : le début du XXe siècle pour La Couleur pourpre, les années 1960 pour The Help.

   C'est donc d'abord un film d'actrices, où les personnages masculins, fait exceptionnel, sont au second plan. Ma préférée est sans conteste Octavia Spencer, qui joue Minny Jackson, une employée à fort caractère, dont les pâtisseries sont renommées. Son gâteau au chocolat va occuper une place particulière dans l'intrigue...

   Du côté des Blanches, j'ai apprécié Jessica Chastain, dont le rôle de fofolle contraste fortement avec celui qu'elle a interpété dans L'Affaire Rachel Singer. Bryce Dallas Howard est aussi très bien en insupportable pétasse. Dans un rôle plus difficile (celui d'une mère non raciste, mais qui n'assume pas devant ses fréquentations très traditionnalistes), on peut noter la performance d'Allison Janney, récemment remarquée dans Life during wartime. Enfin, les plus âgés (ou cinéphiles) seront heureux de retrouver Sissy Spacek, qui n'est plus la jeune femme révélée par Carrie au bal du diable, mais une grand-mère caractérielle qui déteste sa fille.

   L'histoire tourne autour des relations entre les nounous noires et les enfants dont elles ont (eu) la charge. Ce sont finalement elles qui les élèvent, et non les mères biologiques, accaparées par l'organisation de goûters, de réunions ou de soirées... où toutes les tâches ingrates sont exécutées par les domestiques.

   C'est un aspect "quotidien", trivial, de la ségrégation qui joue le rôle de détonateur. En effet, alors que dans presque toutes les circonstances, les législateurs ont prévu de séparer les Blancs des autres, dans les maisons où travaillent les domestiques se pose la question de l'usage des toilettes (et même du papier hygiénique). Au départ anecdotique, le sujet va prendre des proportions inattendues... et franchement cocasses !

   C'est le passage par l'écrit qui met le feu aux poudres. L'étudiante blanche anticonformiste, de retour dans sa ville natale, constate qu'elle tranche sur l'opinion moyenne des gens de son milieu. Elle décide de donner la parole aux employées noires... avec les risques que cela comporte. Ce film est donc aussi un hommage à l'écriture, qu'elle soit sous forme journalistique ou romancée.

   Et l'amour dans tout cela ? Il est difficile à trouver aussi bien pour les Blanches que pour les Noires. Les hommes noirs sont singulièrement absents de cette histoire (à une exception près). Les rares fois où il en est question, les maris sont dépeints comme violents. Du côté des Blancs, le tableau n'est pas meilleur. S'ils ne frappent pas leurs épouses, les maris imposent quand même leur loi et, quand ils sont gênés, ils ont tendance à se défiler. Quelques (rares) figures viennent heureusement nuancer ce tableau peu réjouissant. (Signalons que le film a été réalisé par un homme !)

samedi, 05 novembre 2011

L'Exercice de l'Etat

   Ce titre étrange, sur lequel butent nombre de spectateurs, est (à mon avis) le résultat du téléscopage de deux expressions : "l'exercice du pouvoir" et "le service de l'Etat".

   A priori, on assimile l'exercice du pouvoir aux postes ministériels et le service de l'Etat aux hauts fonctionnaires. Mais, un bon ministre ne doit-il pas avoir le sens de l'Etat ? Un haut fonctionnaire n'exerce-t-il pas une partie du pouvoir ? D'où le mélange.

   Le film tourne autour de deux personnages principaux, le ministre, auquel Olivier Gourmet donne son corps et son tempérament, et le directeur de cabinet, incarné par un Michel Blanc d'une éblouissante sobriété.

   Le ministre est membre d'un gouvernement "PR". Il ne s'agit bien évidemment pas de feu le Parti républicain, devenu Démocratie libérale, qui s'est fondu dans l'UMP. Le PR est donc un avatar du parti présidentiel. Mais le héros n'en est apparemment pas membre... ou à moitié. On lui prête une sensibilité plus centriste. On pourrait le rapprocher du Parti radical valoisien ou, à la rigueur, du Nouveau centre.

   Le directeur de cabinet est sans aucun doute un ancien membre de l'ENA. (Jean-François Carenco a-t-il servi de modèle ?) Il en a la componction et les réseaux. C'est aussi incontestablement un gaulliste. L'une des plus belles scènes du film nous montre Michel Blanc en train de s'habiller au son du (superbe) discours prononcé par André Malraux lors de la panthéonisation de Jean Moulin.

   Gilles-Michel Blanc agit dans l'ombre. Il connaît presque tout le monde, dans le gouvernement et en dehors. Mais il n'utilise pas ces réseaux pour servir ses intérêts (contrairement à l'un de ses camarades de promotion, une fripouille que Didier Bezace est chargé de rendre sympathique). Il nous est présenté comme un quasi-moine-soldat républicain. L'opinion commune aurait pu conduire les scénaristes à faire de ce personnage quelqu'un de plus malfaisant. C'est au contraire, à mon avis, des puissants qui nous sont montrés, le plus honnête et le plus noble. Toute la haute fonction publique n'est hélas pas faite du même métal...

   Face à lui s'agite Bertrand Saint-Jean, un type sympathique, aux idées généreuses, bosseur, pas frimeur... mais quand même ambitieux et un peu hypocrite... "qualités" indispensables à qui veut aujourd'hui faire carrière en politique, semble nous dire le réalisateur... On n'est pas obligé d'adhérer au propos.

   Autour d'eux gravitent les huiles, les sous-fifres et les gens "normaux".

   On entraperçoit les "huiles" à plusieurs reprises. On retiendra tout particulièrement Stéphane Wojtowicz, très bon en président de la République. On nous a épargné le portrait d'un agité bling bling. On nous propose la vision d'un politique manipulateur... tout de même obsédé par la consultation de son téléphone portable.

   Voilà un objet dont le réalisateur a su faire un argument cinématographique. Presque tous les personnages sont équipés d'un "smartphone", qu'ils consultent le plus souvent possible (au point qu'au cours d'une réunion confidentielle, le Premier ministre prenne la peine d'interdire aux participants de le maintenir allumé). A intervalles réguliers s'affichent sur l'écran les textos reçus ou envoyés et les dépêches AFP. Ils contribuent à relancer l'action ou lui donnent une profondeur inattendue.

    Une remarque sur le style : c'est du cinéma de bonne facture, soigné, qui privilégie le réalisme... à quelques exceptions près : quelques moment oniriques (qui ont beaucoup excité la critique...) ont été intercalés. Ils ne sont pas inintéressants, mais n'apportent pas grand chose au film, selon moi.

    Pas très loin des dirigeants, on rencontre les sous-fifres, les intrigants. Le film ne met en lumière que certains d'entre eux, pas de manière très flatteuse. On doit distinguer l'entourage du président de la République et du Premier ministre, plus distant, de celui du ministre (plutôt hétéroclite), avec lequel on nous familiarise. (On peut s'amuser à essayer de trouver des correspondances avec l'ancien cabinet de Jean-Louis Borloo.)

   Enfin, à l'arrière-plan, se profilent les "gens du peuple" (90 % de la population tout de même !). Ils sont incarnés par des manifestants hargneux et un couple, dont l'homme devient chauffeur du ministre. La séquence la plus marquante est celle de la soirée durant laquelle le ministre, esseulé, partage le repas de ce couple et engage, à moitié ivre, un débat avec son hôtesse, qui lui "rentre dans le lard".

   Si cette séquence est formellement réussie, sur le fond, elle ne m'a pas beaucoup plu. Elle est construite sur un postulat favorable au ministre : le pauvre gars est tout seul, il n'a pas d'ami, mais voyons c'est un type bien qui veut servir son pays. On ne donne pas assez la parole aux vraies gens dans ce film. Il aurait pourtant été possible de tracer un parallèle entre la vie sans paillettes des Français moyens et celle de ceux qui évoluent dans le tumulte politico-médiatique.

   On perçoit clairement le parti-pris de la réalisation lorsque le ministre se trouve confronté à des manifestants (de la CGT principalement : on prend soin à ce que les drapeaux rouges soient visibles à l'écran), qui menacent de le bloquer. On ne saura pas vraiment pourquoi ces hommes et ces femmes se comportent ainsi, mais on est vraiment content que le ministre s'en sorte !

   C'est au second degré qu'une critique est émise. On peut ainsi analyser l'accident de voiture de manière métaphorique : de la même manière que le choix, par le ministre, d'un itinéraire non sécurisé conduit à la mort d'un personnage, la politique menée par le gouvernement détruit les vies de citoyens qui en subissent les conséquences. Mais faut vraiment aller chercher loin !

   Si l'on fait abstraction de ces limites, cela reste un très bon film, servi par une pléiade d'acteurs excellents.

16:13 Publié dans Cinéma, Politique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma, cinema, film